En un mot, l’homme classique était le héros que toutes les littératures primitives ont seul jugé digne de leur attention. […] Par moments, ces plantes s’attendrissent, ces arbres se penchent sur les jeunes héros frappés de mort. […] C’est une des brèves esquisses de la vie caucasienne réunies sous ce titre : Un héros de notre temps. […] On était las du roman historique et pseudo-populaire, autant que de la débauche lyrique et des héros surhumains. […] Pourquoi les ressorts de la vie étaient-ils brisés chez tous les héros du livre ?
Mais c’est surtout aux Corses qu’il s’adressa pour bien connaître le héros corse qui est devenu, depuis quelque temps, l’objet préféré de ses soins. […] Il griffonnait des romans, des nouvelles, dont les héros ne parlaient que de la Corse. […] L’Empereur crut bien faire en assignant à son impératrice un rôle d’héroïne dans un roman fantastique et surhumain. […] Avec quelle dévotion respectueuse Mme de Staël sollicita la faveur de voir face à face son héros de prédilection ! […] Paul Gautier, historien diligent, suit son héroïne d’étape en étape, à Berlin, à Londres, à Stockholm.
Black, guidé par la vie du Tasse, écrite en 1600 par le marquis Manso, qui avait connu et aimé le poète, et par l’histoire plus récente de l’abbé Serassi, a suivi trace à trace, dans toutes les archives et dans toutes les bibliothèques d’Italie, pendant dix ans, les moindres lueurs de vérité qui pouvaient recomposer le vrai jour sur la vie de son héros ; moi-même, une sorte de piété semblable à une parenté des âmes m’attira de bonne heure vers ce nom comme un pèlerin vers un sépulcre. […] » On voit par ces lettres que la mère du Tasse était une de ces femmes rares qui forment de leur sang les hommes supérieurs, poètes, philosophes, héros. […] Un sang héroïque coulait dans ses veines, il rougissait de polir des vers au lieu de tenir l’épée de ses pères ; célébrer des exploits guerriers lui semblait associer son nom aux héros qui les avaient accomplis sur les champs de bataille ; la religion, la chevalerie et la poésie, la gloire du ciel, celle de la terre, celle de la postérité, se réunissaient pour lui conseiller cette œuvre. Les poètes, en ce temps, étaient les héros de l’esprit au niveau des héros de l’épée ; le chevalier ne dérogeait pas en célébrant dans ces chants les hauts faits dont il avait la source dans son sang, l’idéal dans son âme. […] … Je vis des divinités célestes et charmantes, et, parmi ces nymphes et ces sirènes… je restai frappé de stupeur, et je me sentis tout à coup grandir moi-même à la hauteur de ce que j’admirais… Rempli d’une vie inconnue, inondé d’une divinité intérieure toute nouvelle… je chantais les exploits et les héros, dédaignant désormais les humbles idylles… » XVI Cependant, soit que la distance et le respect eussent intimidé l’aveu de ces sentiments pour Léonora d’Este, soit qu’il eût voulu dérober sous un autre nom les hommages poétiques secrets qu’il adressait dans son cœur à Léonora, le Tasse affecta de célébrer quelque temps dans ses vers une autre beauté de la cour de Ferrare.
Plus de légendes strictement locales, de mythes enracinés sur un point du sol, de héros poliades internés dans les remparts d’une cité ou dans l’horizon d’une tribu. […] Chaque combattant de Marathon et de Salamine produisait un héros de plus sur la scène, le mort légendaire renaissait du vivant illustre. […] Elle proclame à sa manière le droit divin du despote indiscutable et irresponsable, — « Certes, sachez-le, mon fils, s’il réussit, sera le plus glorieux des héros ; vaincu, il n’aura nuls comptes à rendre. […] Il pleure sur l’Asie dépeuplée, sur tant de héros « mangés par les Muets de la mer incorruptible ». […] Les héros épiques ne les approchent qu’avec des prières. — Ulysse, échappé de son radeau englouti, nage deux jours contre les flots courroucés.
Quant aux Confessions du comte de…, ce sont les mémoires d’un roué, d’un jeune colonel du commencement du xviiie siècle, et qui présente une première ébauche de ces autres héros fictifs ou réels, les Valmont et les Lauzun : on y parcourt une liste de bonnes fortunes, à travers lesquelles l’auteur a la prétention de peindre une collection de caractères de femmes, la femme de qualité, l’Anglaise, l’Espagnole, la coquette, la dévote, la caillette, la marchande, la financière ; mais les esquisses sont si rapides et si peu gracieuses, les teintes si monotones, qu’on fait bientôt comme le héros qui les confond et qui les oublie. […] Dans le portrait de la dernière conquête qu’il prête à son héros, il a essayé d’atteindre à une sorte d’idéal en peignant Mme de Selve, qui est selon lui l’honnête femme ; mais là encore il a su joindre à quelques intentions meilleures bien de l’indélicatesse. […] C’est ainsi que, dans un chapitre de ses Considérations, il a très bien décrit ce travers du persiflage et de la méchanceté qui fut quelque temps une mode, une fureur, une espèce de grippe qui régnait sur tout Paris, et qui, du cercle brillant des Forcalquier, des Stainville et des duchesse de Chaulnes, gagnait les sociétés même subalternes : il n’était cercle bourgeois se piquant de bon ton, qui n’eût son petit héros de scélératesse, son Cléon : c’est, en effet, le moment où Gresset eut l’idée de faire sa comédie du Méchant (1747).
Or ce rêve est réalisé, du moins en partie, par les héros des romans mondains. […] Rabusson voit sans illusion la populace mondaine, on ne saurait dire non plus qu’il nous ait surfait ses héros. […] Un héros de roman ferait le généreux, délierait la jeune fille. […] Rabusson veut-il nous faire entendre qu’aux heures mêmes où son héros déploie, le plus de volonté, il subit encore des impulsions irrésistibles et cachées et reste passif en pleine action ?
De l’Opéra et de la Foire, le souci de la mise en scène, des accessoires exacts et pittoresques, gagne la Comédie Française : les princesses grecques quittent leurs paniers, les héros romains rejettent leurs perruques. […] Qui reconnaîtrait là l’aimable héros de salon que fut le prince de Ligne ? […] Juliette et son Roméo sont un couple quelconque, des amis d’enfance ; Roméo élevé près de Juliette sous un faux nom : et quand nous le voyons, le doux, le tendre, le poétique enfant de Shakespeare est un « guerrier redoutable », un général vainqueur, enfin l’insipide héros cent fois revu.
Elle fut enfin gaiement une sainte, comme on était, en France, gaiement un héros, du temps de Fontenoy ! En religion, les saints sont les héros, et elle était une héroïne, qui courait toujours au plus difficile, au plus escarpé, au plus terrible dans la discipline, dans la règle, dans la stricte observance !