C’est dans les chœurs que sont reléguées les réflexions, les incertitudes, les délibérations et les craintes ; les héros agissent toujours par l’ordre des dieux. […] Les héros que peignaient les auteurs dramatiques, n’avaient point cette grandeur soutenue que leur a donnée Racine ; mais ce n’est point à une condescendance populaire qu’il faut attribuer cette différence ; tous les poètes ont peint ainsi les caractères, avant que de certaines habitudes monarchiques et chevaleresques nous eussent donné l’idée d’une nature de convention. […] L’idée forte qu’Homère avait donnée de ses héros, a beaucoup servi les auteurs tragiques.
III Rien de pareil ne s’était encore vu, même dans Feydeau, et il a si bien senti lui-même la puanteur de son sujet, choisi probablement par fanatisme d’exactitude, que lui, l’homme de la réalité exacte, et qui persifle si joliment les moralistes dans sa préface, a cru devoir se faire provisoirement moraliste contre l’épouvantable drôle, son héros, et le timbrer, pendant tout le temps que dure son récit, des épithètes de misérable, d’homme affreux, de coquin, comme s’il était, Feydeau, un des vertueux dont il se moque ! […] Mais Feydeau, qui n’avait pas d’idées à lui, a cru, en outrant l’infamie de son héros, dissimuler mieux un sujet de roman déjà traité et qui ne lui appartenait pas… Ce sujet, c’est celui de Leone Leoni. […] Aussi arrive-t-il un moment, quand on ne lit pas l’ouvrage comme il a été fait, dans l’ordre suspendu du feuilleton avec ses interruptions et ses coupures, où le lecteur le plus intrépide et le plus cuirassé contre le mal au cœur est tenté de rejeter le livre dont un pareil homme est le héros.
Le second panégyrique a, dans le dessein, quelque chose de bizarre : Julien veut y prouver que son héros est égal aux plus fameux héros d’Homère ; à Achille, Diomède et Patrocle, pour la valeur ; à Ulysse, pour la politique ; à Nestor, pour l’éloquence. […] Il fallait, pour être grand, ressembler aux héros qu’Homère avait peints.
S’il nous parle de la vie mortelle de ses héros, c’est pour nous persuader de leur bienheureuse immortalité. […] Cependant, entre cette oraison funèbre et celle du grand Condé, il y a la même différence qu’entre les deux héros. […] Il faut en convenir, on a regret que la dignité de l’oraison funèbre et sa marche soutenue, ou du moins le ton sur lequel le préjugé et l’habitude l’ont montée, ne permettent point d’employer ces traits d’une simplicité touchante, et qui mettraient souvent le héros à la place de l’orateur.
Cet homme c’est le « Héros », c’est celui qui entend chanter l’âme intérieure des choses, qui nous mène au bord de l’infini et nous y laisse, quelques moments, plonger le regard. Avec Emerson, le héros devient le représentant de l’humanité, c’est le divin patron sur la véracité duquel le monde s’appuie.
Le héros du livre est à la fois raisonneur et analyste. […] L’étrange héros de la Course à la Mort n’aime pas, on doute du moins qu’il aime et se sent douter, interroge sans cesse son pâle cœur, ne sait que résoudre et se résigne à son atonie.
Cette trempe qui étonne et qu’on admire comme un luxe dans un écrivain, Ferry l’avait comme ses héros, et voilà ce qu’une critique qui voit plus que l’épiderme de la pensée doit noter. […] Dupe, ou, pour dire un mot moins dur, victime du génie de Cooper, Ferry a cru qu’on pouvait reprendre la création achevée d’un immense artiste, et il ne s’est pas aperçu que dans Fenimore Cooper le véritable personnage, le vrai héros des poèmes que nous avons sous les yeux, c’est l’Amérique elle-même, la mer, la plaine, le ciel, la terre, la poussière enfin de ce pays qui n’a pas fait son peuple et qui est émietté par lui… Il n’a pas vu qu’en ôtant Bas-de-Cuir lui-même des romans de Fenimore, — cette figure que Balzac, qui avait le sens de la critique autant que le sens de l’invention, a trop grandie en la comparant à la figure épique de Gurth dans Ivanhoe et qui n’est guères que le reflet du colossal Robinson de Daniel de Foe, — il n’a pas vu qu’il n’y avait plus dans les récits du grand américain qu’une magnifique interprétation de la nature, que l’individualisation, audacieuse et réussie, de tout un hémisphère, mais que là justement étaient le mérite, la profondeur, l’incomparable originalité d’une œuvre qui n’a d’analogue dans aucune littérature.
Tout historien doit aimer son héros ; nous ne reprochons pas à M. […] Il raconte avec la plus amusante péripétie de dialogue la lutte inégale entre le fait et le rêve, entre le héros et le logicien. Le logicien cède bientôt au héros. […] C’est évidemment un poème populaire destiné à faire des Alpes franchies sans obstacles un piédestal dans les nuages à son héros. […] Thiers, juge léger, superficiel et injuste cette fois, prend ici au mot les boutades de son héros contre M.