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432. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

… lui qui aspirait secrètement à la gloire littéraire ! […] Quelles peines donne l’amour de la gloire ! […] Laure, quelle chute de mes projets de gloire ! […] Un jour, je l’espère, — un peu de gloire lui payera tout ! […] Il n’eut que la perspective du repos dans la gloire.

433. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Les dépouillant l’un après l’autre d’une gloire qu’il croyoit usurpée, il les représenta comme des hommes inspirés quelquefois par le génie, mais toujours abandonnés par le goût, & par les graces. […] La traduction en prose de madame Dacier l’a comblée de gloire dans l’esprit de certaines gens. […] Si Virgile imite Ennius & quelques poëtes subalternes, c’est en homme supérieur, en homme qui fait gloire de tirer, de quelque mine que ce soit, des diamants bruts, pour les polir & les mettre en œuvre. […] Cette idée des destins qui établissent l’empire d’Auguste, & la gloire de Rome, n’est due qu’à lui ; celle des vaisseaux changés en nymphes ne fait aucun tort à son imagination toujours belle, toujours sage. […] Il ne vit qu’avec désespoir sa gloire attaquée.

434. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Celui qui lui répondit fut un ancien professeur dont j’ai oublié le nom ; je sais seulement que toute sa gloire consiste à avoir signé ou dirigé une traduction des classiques latins. […] Le jour où un gouvernement décrétera la dissolution de cette fade compagnie de bavards qui n’a même pas la force de porter le poids de son Dictionnaire, il aura bien mérité de tout ce qui tient à cœur les gloires immortelles des arts et des lettres. […] La vraie gloire d’Arago sera peut-être moins d’avoir découvert tant de belles choses que d’avoir éclairé et vulgarisé les questions les plus ardues ; ce sera là du moins sa gloire populaire, et c’est la meilleure de toutes et la seule enviable. […] Au contraire, elle s’est faite son commis voyageur, elle a été lui chercher en Italie, en France, en Espagne, en Nubie, en Syrie, au Mexique, aux Indes, en Sicile, partout enfin, des paysages, des monuments, des types, des costumes dont elle a pu tirer parti pour sa propre gloire. […] J’ignore quels sont ceux qui ont pu accepter ses largesses, mais je sais qu’ils sont blâmables et qu’ils ont prouvé peu de souci de leur gloire et de l’honneur de la littérature.

435. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Gloire, ambition, fanatisme, votre enthousiasme a des intervalles, le sentiment seul enivre chaque instant, rien ne lasse de s’aimer ; rien ne fatigue dans cette inépuisable source d’idées et d’émotions heureuses ; et tant qu’on ne voit, qu’on n’éprouve rien que par un autre, l’univers entier est lui sous des formes différentes, le printemps, la nature, le ciel, ce sont les lieux qu’il a parcourus ; les plaisirs du monde, c’est ce qu’il a dit, ce qui lui a plu, les amusements qu’il a partagés, ses propres succès à soi-même, c’est la louange qu’il a entendue, et l’impression que le suffrage de tous, a pu produire sur le jugement d’un seul. […] Les succès de l’amour-propre, le dernier degré des jouissances de la personnalité, la gloire, que vaut-elle auprès d’être aimé ? […] Si l’on veut sentir le prix de la gloire, il faut voir ce qu’on aime honoré par son éclat ; si l’on veut apprendre ce que vaut la fortune, il faut lui avoir donné la sienne ; enfin, si l’on veut bénir le don inconnu de la vie, il faut qu’il ait besoin de votre existence, et que vous puissiez considérer en vous le soutien de son bonheur. […] L’amour est la seule passion des femmes ; l’ambition, l’amour de la gloire même leur vont si mal, qu’avec raison, un très petit nombre s’en occupent.

436. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Pendant les siècles, déchirés par les querelles religieuses, on a vu des hommes obscurs, sans aucune idée de gloire, sans aucun espoir d’être connus, employer tous les moyens, braver tous les dangers, pour servir la cause qu’ils avaient adoptée. […] L’injustice décourage de la recherche de la vérité ; la gloire est rarement contemporaine, et la renommée elle-même est tellement investie par l’esprit de parti, que l’homme vertueux et grand peut ne pas obtenir son recours sur les siècles. […] L’esprit de parti est la seule passion qui se fasse une vertu de la destruction de toutes les vertus, une gloire de toutes les actions qu’on chercherait à cacher, si l’intérêt personnel les faisait commettre ; et jamais l’homme n’a pu être jeté dans un état aussi redoutable, que lorsqu’un sentiment qu’il croit honnête, lui commande des crimes ; s’il est capable d’amitié, il est plus fier de la sacrifier ; s’il est sensible, il s’enorgueillit de dompter sa peine : enfin, la pitié, ce sentiment céleste, qui fait de la douleur un lien entre les hommes ; la pitié, cette vertu d’instinct, qui conserve l’espèce humaine, en préservant les individus de leurs propres fureurs, l’esprit de parti a trouvé le seul moyen de l’anéantir dans l’âme, en portant l’intérêt sur les nations entières, sur les races futures, pour le détacher des individus ; l’esprit de parti efface les traits de sympathie pour y substituer des rapports d’opinion, et présente enfin les malheurs actuels comme le moyen, comme la garantie d’un avenir immortel, d’un bonheur politique au-dessus de tous les sacrifices qu’on peut exiger pour l’obtenir. […] Mais quand l’esprit de parti, dans toute sa bonne foi, rendrait indifférent aux succès de l’ambition personnelle, jamais cette passion, considérée d’une manière générale, n’est complètement satisfaite par aucun résultat durable ; et si jamais elle pouvait l’être, si elle atteignait jamais ce qu’elle appelle son but, il n’est point d’espoir qui fut plus détrompé, qui cessa plus sûrement au moment de la jouissance ; car il n’en est point dont les illusions aient moins de rapport avec la réalité ; il y a quelque chose de vrai dans les satisfactions que donnent la puissance, la gloire, mais lorsque l’esprit de parti triomphe, par cela même il est détruit.

437. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

L’œuvre était faite, et les piécettes de vers ou les bavardages en prose contournée qu’à l’heure, du déjeuner lui soutiraient d’industrieux éditeurs n’ajoutaient rien à sa gloire. […] À Verlaine échut cette triple gloire. […] La juste gloire mettra bientôt Verlaine auprès de Hugo, de Vigny, de Baudelaire. […] Entre mes bras tes os vont se briser ; Mes ongles dans ta chair… — Qu’importe le supplice, Si j’ai conquis la gloire et ravi le baiser ?

438. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre douzième. »

C’est ici que La Fontaine abandonne son auteur pour approprier la morale de ce conte à l’âge et à l’état du prince auquel il est adressé ; mais l’auteur italien n’en use pas ainsi : il poursuit son projet ; et quand Ulysse, pour amener ses gens à l’état d’hommes, leur parle de belles actions et de gloire, voici ce que l’un d’eux lui répond : « Vraiment nous voilà bien. […] N’est-ce pas ton amour de la gloire qui a fait de nous si longtemps des meurtriers mercenaires, couverts de cicatrices ? […] Retire-toi et ne me parle plus de ta gloire, qui d’ailleurs n’est pas la mienne, mais que je déteste comme la source de toutes nos calamités. » Il me semble qu’il y a, dans cette réponse, des choses fort sensées et auxquelles il n’est pas facile de répondre. Je suis bien loin de blâmer La Fontaine du parti qu’il a pris ; mais il est curieux d’observer que ce que dit le compagnon d’Ulysse, sur les guerres, sur les conquêtes, sur la gloire, etc., offre le même fond d’idées que Fénélon développa depuis dans le Télémaque : ce sont les principes dont il fit la base de l’éducation du duc de Bourgogne.

439. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

À la première édition du Tristram, Sterne eut immédiatement sa gloire. […] Son succès de Tristram Shandy, auquel il ajouta de nouvelles parties, ne s’épuisait pas, mais sa vie s’épuisa avant sa gloire et son génie. […] La Gloire est la sœur jumelle de la Fortune. […] Mais, pour cette fois, la Gloire a touché juste.

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