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21. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIV. Moralistes à succès : Dumas, Bourget, Prévost » pp. 170-180

À peine il parle de ses pièces, et le peu qu’il en dit, sans fausse humilité, est qu’il les trouve excellentes. […] Alexandre Dumas demeure à beaucoup incompréhensible : outre qu’ils jugent sa philosophie puérile, son sens social faux et sa littérature grossière, ils sont incapables de trouver à ses fables le moindre attrait, de quoi amuser une curiosité même badaude. Or la fortune de ce théâtre ne viendrait-elle pas de cette extraordinaire faculté de Dumas : Suggérer qu’il sait la vérité, la solution des difficultés morales, qu’il va élucider, escamoter le problème, et, manches retroussées, vous faire circuler la solution. — Y a-t-il dans la salle une fille-mère de bonne volonté qui veuille bien me prêter un instant sa fausse situation ? […] Pour ce penseur, il y a des solutions fausses, à gauche, à droite des solutions vraies. […] On objecte : Ces peintures sont fausses et exagérées. — Qu’en savez-vous ?

22. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vitu » pp. 103-115

Moraliste et politique tout à la fois, ainsi qu’il l’a supérieurement prouvé dans son beau fragment sur Paul-Louis Courier, ce faux canonnier à cheval, ce faux vigneron, ce faux républicain, ce faux bonhomme et ce faux écrivain, qui fit de la vieille prose française comme Vanderburgh fit de vieux vers, Auguste Vitu n’a pas, vous le voyez, en dépouillant Courier de sa morale et de sa politique, craint d’attaquer une de ces idoles qui prennent racine sur les piédestaux du préjugé ou des partis.

23. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

Succès à faux ! insuccès à faux ! […] … Le succès à faux finit par avoir l’air si bête que tôt ou tard l’esprit et la justice sont vengés de cette mortelle impertinence. […] Mais l’insuccès à faux est une cruauté sans revanche. […] Assurément nous ne comparerons pas à l’auteur de Marianne, des fausses Confidences, des Jeux de l’Amour et du Hasard et de tant de chefs-d’œuvre où l’art est retors jusqu’à l’artifice, un auteur à l’aurore de ses premières pages, qui a du sentiment comme Chérubin dans sa romance, et qui, comme Chérubin, est très-joli garçon en femme, ainsi qu’il l’a prouvé dans sa Confession d’Antoinette, dont tout à l’heure nous allons vous parler.

24. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Pris au mot par le confiant mari, le docteur se voit obligé de jouer lui-même le rôle du faux amant, et il y a des moments où l’on croirait qu’il le joue au naturel et au vrai. […] On sent donc là, comme dans d’autres proverbes du même auteur, une première observation vraie, beaucoup de finesse et de délié dans l’exécution et aussi un coin de faux par parti pris. […] Notre artiste, simple amateur et très-homme du monde, qu’une première maladresse a mis en position un peu fausse vis-à-vis d’elle, n’a d’ailleurs que de l’aversion pour cette petite personne très-inconséquente. […] Pas tout le vrai, j’en tombe d’accord ; mais jamais le faux ! […] Feuillet : il y a, au milieu d’observations vraies et charmantes, des traces de faux qui se reconnaissent aussitôt à certains reflets et qu’on voudrait en enlever.

25. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Rien de plus faux que le raisonnement d’après lequel Claude justifie sa tolérance impassible. […] Quand un drame glisse sur la pente du faux, avec ce violent parti pris, il roule jusqu’au fond. […] Le fusil a porté, mais l’arme morale a dévié ; ce dénouement fait faux coup. […] Encore se masquait-il, pendant ces visites, du faux nom de Monsieur Alphonse. […] L’auréole mystique de Claude illumine, a ce moment, M. de Montaiglin d’un faux idéal.

26. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

» Quand on voit, au seul point de vue moral, de telles métamorphoses, on maudit les révolutions, on les redoute, non pas pour sa vie, mais pour son propre caractère ; on se demande si l’on n’aurait point en soi quelque travers, quelque fausse vue ou quelque passion maligne, quelque fanatisme caché, qu’elles se chargeraient de développer ensuite et de mettre en lumière pour notre abaissement et notre honte. […] Necker avait écrit l’éloge : « Comme de l’admiration à l’imitation, dit-il, il n’y a qu’un pas, je me rappelle avec tremblement que Colbert commença son ministère par une banqueroute et le finit par de la fausse monnaie. » Le bon sens de Voltaire se révolte pourtant à une telle injustice, et il rappelle Condorcet à l’ordre : « Je n’ai jamais été de l’avis de ceux qui dénigrent Jean-Baptiste (Colbert)… » Mais on entrevoit déjà un coin de jugement faux chez Condorcet, car ce n’est qu’un esprit en partie faussé par la passion et par le système, qui peut comparer M.  […] Les voilà prises sur le fait les conséquences pratiques de ces fausses théories spéculatives. […] On entrevoit assez comment et en quel sens Condorcet, malgré ses mérites, a été un grand esprit faux, et n’a pas toujours été un cœur droit. […] Sa déviation tout à fait fausse et fatale date de 1791.

27. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Il immole l’absurde et le faux à la vérité qu’il respecte207. […] C’est ainsi qu’Aristophane avait détruit ce qui est faux en Morale, en Religion, en Politique, en Philosophie, en Littérature, au plus grand honneur de l’indestructible Vérité. […] … Toute action n’est pas déjà comique parce qu’elle est vaine et fausse. […] Et dès lors, ce côté personnel de la passion, qui contredit leur nature divine, se laisse représenter comme une fausse exagération. […] Ainsi, par exemple, le Tartuffe de Molière, ce faux dévot, véritable scélérat qu’il s’agit de démasquer, n’est nullement plaisant.

28. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Dans les Fausses Confidences, l’artifice des valets force l’attention et la pitié d’Araminte : de l’attention et de la pitié naissent l’intérêt, qui fait poindre l’inclination. […] Un an après le Glorieux, La Chaussée donnait la Fausse antipathie, et la comédie larmoyante était créée. […] Les œuvres de La Chaussée, gâtées par le romanesque des intrigues, par la fausse sentimentalité des caractères, par la vague boursouflure du style, sont à peu près illisibles aujourd’hui. […] Disposer l’action pour amener une suite de tableaux, où tous les personnages se fixent en attitudes expressives, évidemment cela est dangereux : on sent dans ce procédé de composition la tendance d’une poétique sentimentale, qui fausse la destination naturelle du genre dramatique. […] Il se fit connaître à quarante ans par l’Épître de Clio contre les théories antipoétiques de La Motte, et aborda le théâtre en 1733 par la Fausse Antipathie.

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