Il reçut une instruction assez décousue, aux collèges de Dol, de Rennes, de Dinan : on le destinait à l’état de marin, puis il déclara vouloir être prêtre. […] C’était en deux mots la poésie et l’art que Chateaubriand ramenait à la place de la rhétorique et de l’idéologie : c’était le sentiment de la nature et l’inquiétude de la destinée qu’il offrait comme thèmes d’inspiration, pour remplacer la description des mœurs de salon et la mise en vers de toutes les notions techniques. […] Tandis que je contemplais les feux réguliers des lignes romaines et les feux épars des hordes des Francs, tandis que, l’arc à demi tendu, je prêtais l’oreille au murmure de l’armée ennemie, au bruit de la mer et au cri des oiseaux sauvages qui volaient dans l’obscurité, je réfléchissais sur ma bizarre destinée… Que de fois, durant les marches pénibles, sous les pluies ou dans les fanges de la Batavie : que de fois à l’abri des huttes des bergers où nous passions la nuit ; que de fois autour du feu que nous allumions pour nos veilles à la tête du camp ; que de fois, dis-je, avec des jeunes gens exilés comme moi, je me suis entretenu de notre cher pays. » Et voilà à quoi sert d’avoir servi dans l’armée de Condé, septième compagnie bretonne, couleur bleu de roi avec retroussis à l’hermine659 ! […] Le héros romantique, victime de la destinée sombre par état et désespéré, est sa création.
Il eût désiré entrer, comme plusieurs de ses camarades, dans l’artillerie ou le génie militaire ; mais la faiblesse de sa santé et de sa complexion le fit destiner et, selon lui, condamner par sa famille à l’état ecclésiastique. […] Par ces trois écrits, Sieyès fut un des précurseurs de la Révolution de 89, de cette même Révolution que, dix ans après, il congédiait, pour ainsi dire, en la remettant, au 18 Brumaire, entre les mains de Bonaparte ; car il eut cette singulière destinée d’être le même à l’ouvrir et à la fermer, et de jouer un premier rôle le premier jour comme le dernier. […] Cette conquête de 89, à laquelle Sieyès a pour jamais attaché son nom, subsiste : elle a traversé les différentes formes de gouvernement depuis 89, et elle semble destinée à les traverser encore, comme une condition désormais inhérente de tout ce qui veut durer. […] s’écriait-il dès lors, et certes un homme appelé à nous servir de guide dans l’Assemblée nationale qui va décréter notre destinée. » Ce sentiment très profond de déférence, Mirabeau ne cesse de le lui exprimer dans chaque billet, où il l’appelle en toute occasion le maître : — « Mon maître, car vous l’êtes, même malgré vous !
Sa Grammaire Grecque, destinée à faciliter l’intelligence de la Langue d’Homere & de Platon, est un Traité aussi clair que méthodique, de tout ce qui est nécessaire pour remplir le but qu’il s’est proposé.
» Il se rassure toutefois par l’idée qu’une loi aussi doit régir ces destinées sociales en apparence égarées, et qu’un avenir plus fixe et plus calme ne manquera pas à la civilisation européenne si lente en son enfantement. […] Tout ce qu’ajoute M. de Tocqueville sur cet intéressant sujet et en conséquence de sa distinction lumineuse, mérite d’être étudié, et appartient à l’idée la plus fondamentale qui le préoccupe, celle de nos destinées européennes futures.
L’Évangile était ainsi destiné à devenir pour les chrétiens une utopie, que bien peu s’inquiéteraient de réaliser. […] D’autres fois (quoiqu’une telle pensée n’ait été érigée en dogme que plus tard), la mort se présente à lui comme un sacrifice, destiné à apaiser son Père et à sauver les hommes 890.
Les Anciens, & les bons Ecrivains du Siecle dernier, avoient une toute autre méthode : comme les métaphores & les comparaisons ne sont destinées qu'à éclaircir une pensée, qu'à la rendre saisissante & palpable, ils ne présentoient que des images connues & frappantes. […] Vous apprendrez que cent mille hommes opposés à cent mille hommes forment des masses redoutables qui s'étudient, s'observent, combinent avec une sage lenteur tous leurs mouvemens, & balancent avec un art terrible & profond la destinée des Etats *.
Il est en nous un sens destiné pour juger du mérite de ces ouvrages, qui consistent en l’imitation des objets touchans dans la nature. […] Lorsqu’il s’agit de connoître si l’imitation qu’on nous présente dans un poëme ou dans la composition d’un tableau est capable d’exciter la compassion et d’attendrir, le sens destiné pour en juger, est le sens même qui auroit été attendri, c’est le sens qui auroit jugé de l’objet imité.
Il n’est, ajustement parler, qu’une destinée, mais les êtres volontaires, passionnés et forts, qui l’ont faite, cette destinée, se relèvent en même temps que ce cadavre quand on le met sur ses deux pieds, et viennent tout à coup se ranger autour de lui comme dans sa vie, — comme, dans Shakespeare, les victimes autour de Richard III.