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26. (1923) Paul Valéry

De là l’importance du corps. […] Ici des corps stylisent des colonnes. […] L’âme vient habiter et agiter le corps qui la repoussait douloureusement. […] Brisez, mon corps, cette forme pensive ! […] Il ne prolonge pas une substance ; de corps par une substance de bras.

27. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre II. La relativité complète »

Nous n’avons donc pas besoin de nous appesantir sur le sens qu’il faut donner à la « déformation des corps », au « ralentissement du temps » et à la « rupture de la simultanéité » quand on croit à l’éther immobile et au système privilégié. […] Mais en est-il ainsi de tel ou tel corps, érigé en entité plus ou moins indépendante ? La perception visuelle d’un corps résulte d’un morcelage que nous faisons de l’étendue colorée ; elle a été découpée par nous dans la continuité de l’étendue. […] Elle résout le corps en un nombre quasi indéfini de corpuscules élémentaires ; et en même temps elle nous montre ce corps lié aux autres corps par mille actions et réactions réciproques. […] Mais si chaque corps, pris isolément et arrêté là où nos habitudes de perception le terminent, est en grande partie un être de convention, comment n’en serait-il pas de même du mouvement considéré comme affectant ce corps isolément ?

28. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Ni la direction, ni la vitesse du corps n’ont été altérées. […] On pourrait imaginer un état de choses dans lequel, par cela seul qu’un corps se mouvrait dans un sens, une portion de ce corps répugnerait à se mouvoir en même temps dans un autre sens. […] Dans l’un sont inclus tous les événements réels, dans l’autre tous les corps réels. […] Placez un autre corps pesant hors de la ligne droite, dans le plan, c’est-à-dire selon la seconde dimension ; le mouvement des corps situés sur la ligne droite se modifie. Placez enfin un dernier corps hors du plan, c’est-à-dire selon la troisième dimension ; le mouvement des corps situés sur le plan se modifie encore.

29. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

De la nécessité de n’étudier les phénomènes physiologiques qu’après ceux des corps inorganiques. […] Mais il n’est nullement indispensable de considérer les corps bruts et les corps vivants comme étant d’une nature essentiellement différente, pour reconnaître la nécessité de la séparation de leurs études. […] Ce n’est pas ici le lieu de développer, dans ses diverses parties essentielles, la comparaison générale entre les corps bruts et les corps vivants, qui sera le sujet spécial d’un examen approfondi dans la section physiologique de ce cours. […] Une division analogue s’établit, de la même manière, dans la science générale des corps organisés. […] Ainsi les phénomènes organiques ne comportent qu’une étude à la fois moins exacte et moins systématique que les phénomènes des corps bruts.

30. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

Avant l’époque des représentations nationales, elle s’était constituée par sa nature et à son insu le corps représentatif de la pensée. Elle avait créé, en face du corps de la noblesse, du corps parlementaire, du corps ecclésiastique, la corporation des hommes de lettres. […] Ce ne sont pas les corps qui font naître le génie, c’est la nature ; ce ne sont pas même les corps qui reconnaissent, qui constatent, qui honorent le génie, c’est la postérité. […] Homère, Virgile, Dante, Shakespeare, Milton, Camoëns, Cervantès, n’étaient membres d’aucun corps privilégié des lettres. […] L’esprit des parlements n’est à nos yeux qu’un esprit de corps qui bornait son indépendance à lui-même.

31. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

‌ Les cités qui se partagent le globe vivent-elles indépendantes l’une de l’autre, ou bien dépendent-elles d’une solidarité plus large que celle du corps social ? […] Tout en établissant l’existence du « corps social » et les lois internes de cette existence, la sociologie semble considérer cet « être » comme vivant d’une vie solitaire et indépendante. […] L’étude des rapports de l’individu et du corps social qui constitue la sociologie d’aujourd’hui, nous conduit fatalement, l’analogie des deux organismes étant admise, à celle des rapports du corps social et de la société humaine dans son ensemble. […] Le principe qui domine les individus à l’intérieur du « corps social », est bien le même que celui qui domine les « corps sociaux » entre eux, à l’intérieur de ce « corps » plus vaste qui est l’agrégat des cités. […] Assurément il y a ressemblance entre les membres d’un même corps social, et divergence entre les membres de corps sociaux différents ; mais il y a également divergence entre les premiers et ressemblance entre les seconds.

32. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

Il y ajoute le mouvement de translation, soit que le corps se déplace dans l’espace et change de lieu, soit qu’il fasse une révolution sur lui-même et reste en place. […] Ce serait exagérer que de croire que le vice tout entier vient du corps, et que l’âme n’a pas ses passions propres qui la ruinent, quand elles sont mauvaises, comme celles que le corps lui suggère. […] Modérer le corps, le dompter dans une certaine mesure, lui faire la part de ses justes besoins, lui résister dans tout ce qui les dépasse, en un mot faire du corps un instrument docile et un serviteur soumis, voilà l’une des règles essentielles de la vie morale, et par conséquent, une des parties considérables de la science. […] En réglant le corps de certaine façon, on tempère les passions de l’âme ; et, par un régime bien entendu, on tire, en partie du moins, la santé de l’âme de la santé du corps : Mens sana in corpore sano. […] Il l’a confondue avec le corps, auquel elle est jointe, et dont elle n’est selon lui que l’achèvement, ou, pour prendre son langage, l’Entéléchie.

33. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVI. Jésus au tombeau. »

Le corps, probablement, était déjà descendu de la croix. […] On n’avait pas encore choisi le lieu où on déposerait le corps d’une manière définitive. […] Les femmes se retirèrent après avoir soigneusement remarqué comment le corps était posé. […] La pierre était déplacée de l’ouverture, et le corps n’était plus à l’endroit où on l’avait mis. […] Les besoins de l’argumentation chrétienne portèrent plus tard à exagérer ces précautions, surtout quand les Juifs eurent adopté pour système de soutenir que le corps de Jésus avait été volé.

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