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2034. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Ils seront admis dans les conseils de la Providence et comprendront toutes ses démarches « depuis le commencement jusqu’à la fin des temps. » De plus « il y a certainement dans les esprits une faculté par laquelle ils se perçoivent les uns les autres, comme nos sens font des objets matériels, et il n’est pas douteux que nos âmes, quand elles seront délivrées de leurs corps ou placées dans des corps glorieux, pourront par cette faculté, en quelque partie de l’espace qu’elles résident, apercevoir toujours la présence divine922. » Vous répugnez à cette philosophie si basse.

2035. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Si d’abord il voulut se jeter à corps perdu dans le travail, séduit bientôt par la nécessité de se créer des relations, il remarqua combien les femmes ont d’influence sur la vie sociale, et avisa soudain à se lancer dans le monde, afin d’y conquérir des protectrices : devaient-elles manquer à un jeune homme ardent et spirituel, dont l’esprit et l’ardeur étaient rehaussés par une tournure élégante et par une sorte de beauté nerveuse à laquelle les femmes se laissent prendre volontiers ? […] Son corps avait la verdeur que nous admirons dans les feuilles nouvellement dépliées, son esprit avait la profonde concision du sauvage, elle était enfant par le sentiment, grave par la souffrance, châtelaine et bachelette.

2036. (1925) La fin de l’art

L’âme empoisonnée par Port-Royal, le corps empoisonné par Guénault, on s’étonne qu’il lui soit resté quelques lueurs de génie. […] Quand la mort le délivra de ses bourreaux, son intelligence vacillait, son corps était une loque.

2037. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XI : Distribution géographique »

Si, par exemple, un certain nombre d’espèces, qui ont vécu pendant longtemps en concurrence mutuelle dans une même patrie, émigrent en corps dans une nouvelle contrée, qui plus tard se trouve isolée, elles seront sujettes à très peu de modifications : car ni l’émigration ni l’isolement ne peuvent rien par eux-mêmes, et ne jouent un rôle qu’en changeant les relations des organismes entre eux, ou, en moindre degré, avec les conditions physiques environnantes. […] Laplace a bien démontré qu’aucune cause liée à l’attraction universelle ne peut déplacer l’axe de rotation du sphéroïde terrestre, mais Laplace, dans tous ces calculs, a toujours considéré les corps célestes comme des masses rigides parfaitement homogènes ou, tout au moins, formées de couches concentriques d’une parfaite homogénéité sur toute leur circonférence, de sorte que leur centre commun de gravité dût coïncider avec leur centre de figure.

2038. (1927) Des romantiques à nous

Et comme dans ces sortes de polémiques, il ne s’agit pas tant, pour vaincre, d’avoir raison que d’avoir de l’esprit et de rendre l’adversaire ridicule, on peut dire que le romantisme, en cette période de son adolescence inquiétée, ne trouva pas de meilleur combattant que Stendhal, qui fut pour lui comme un corps merveilleux de cavalerie légère. […] Mais, pour moi, la notion intellectuelle, théorique de Dieu, que Renan l’ait embellie ou gâtée, représente bien peu de chose, tant je vois depuis des siècles, philosophes et théologiens s’évertuer vainement à lui donner, à force de superlatifs, un corps saisissable. […] Voici un adolescent dont tous admirent la grâce de visage et de corps. […] Ses pieds trottaient menu sous un corps énorme.

2039. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

À la fin donc, le jeune roi, curieux de tout savoir, amoureux comme il l’était, sûr d’être le maître, et qui ne savait guère qu’un jour il appartiendrait, corps et âme, à cette rude chrétienne apostolique et romaine, qui s’appelait, en ce temps-là, madame Scarron, permit à Molière de représenter Tartuffe, au beau milieu de Paris, puis il partit, le lendemain, pour assister à ces sièges de la Flandre à demi conquise qui se faisaient aux sons du violon, au bruit du canon. […] Dans toutes ces fatigues de la tête, de l’âme et du corps, la poitrine était prise, et Molière se sentait mourir ; mais pour lui la mort était la délivrance. […] Il était si brillant quand il fut pris par cet enfant dans son réseau de gaze, il avait toute sa poussière et toute sa couleur, il resplendissait de tous les feux du jour, parmi les fleurs des jardins sur lesquelles il aimait à se poser… Aujourd’hui, ce bel insecte ailé n’est plus qu’un squelette attristant ; la pourpre de son aile est passée, et l’azur de son corps s’est envolé. […] « Oui, levez-vous un peu, s’il vous plaît ; un peu plus de ce côté-là ; le corps tourne ainsi ; la tête un peu levée, afin que la beauté du cou paraisse ; ceci un peu plus découvert (il découvre un peu plus la gorge), bon, là, un peu davantage, encore tant soit peu ; — un peu plus de ce côté, je vous prie, vos yeux tournés vers moi, vos regards attachés aux miens ! 

2040. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

Rouher a pour la première fois aujourd’hui, depuis la mort de l’infortuné prince, reparu à la Chambre, à la Chambre de Paris, à l’ancien Corps législatif. […] Planté sur ses deux pieds, corps rejeté en arrière avec une désinvolture extraordinaire, les bras croisés, à la main, la bouche riant de travers, il bafoue l’humanité. […] C’est la musique qui fait corps avec le poème, c’est l’absence d’airs et de remplissages ; c’est enveloppé, large, magnifique, grandiose… Massenet est certainement un grand artiste et désormais une gloire nationale. […] Cher Paul, Mme Z… est un drôle de petit corps de femme ; son mari est sénateur, en outre un savant, un lettré, un homme supérieur, il a traduit en langues étrangères les chefs-d’œuvre russes et a porté le deuil de Gambetta.

2041. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Pour obtenir une mélancolie de cette profondeur incurable, aussi creuse et aussi mortellement gravée il fallait cette greffe et ce sauvageon, il fallait cette race et il fallait cette autre race, il fallait cette âme et il fallait cette autre âme et ce corps mortel, il fallait un virus aussi antique introduit dans un corps jeune et sain et il faut le dire sans défense. […] Jésus a pu greffer l’inquiétude juive dans le corps chrétien. […] Et Jésus n’a pas pu, (ou n’a pas voulu), greffer la patience juive dans le corps chrétien. […]   Un liquide mouillant, un corps mouillant mouille ou ne mouille pas. […] Je vois que la pensée chrétienne, exprimée dans une des plus vieilles et des plus traditionnelles formules de l’enseignement de l’Église, et la pensée bergsonienne, exprimée partout dans l’œuvre de notre maître, et notamment dans Matière et Mémoire, (essai sur la relation du corps à l’esprit), et dans l’Essai sur les données immédiates de la conscience, procèdent par une démarche à ce point parallèle, pénètrent dans les réalités spirituelles, par un approfondissement à ce point parallèle et parent que nous ne sommes entrés dans le plein de l’intelligence de cette vieille formule de l’enseignement de l’Église qu’armés du plein du sens et de l’intelligence et de l’éclairement de la pensée bergsonienne.

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