Quand sa fureur l’agite, ceux qui ne le connaissent point et qui l’entendent parler croient qu’il va tout renverser, mais ceux qui le connaissent savent que ses menaces n’ont point de suite, et que l’on n’a à appréhender que les premiers mouvements de cette fureur ; ce n’est pas qu’il ne soit assez méchant pour faire beaucoup de mal de sang-froid, mais c’est qu’il est trop faible et trop timide, et on ne doit craindre que le mal qu’il peut espérer de faire par des voies détournées, et jamais celui qui se fait à force ouverte… Il est avare, injuste, défiant au-dessus de tout ce qu’on peut dire ; sa plus grande dépense a toujours été en espions ; il ne peut pas souffrir que deux personnes parlent bas ensemble, il s’imagine que c’est de lui et contre lui qu’on parle… Dans les affaires qu’il a, il se sert tantôt de discours captieux et tantôt de discours embarrassés pour cacher le but où il veut aller, croyant être bien fin… Jamais il ne va au bien de l’affaire, soit qu’il soit question de l’État, de sa famille ou d’autres gens ; il est toujours conduit par quelque sorte d’intérêt prochain ou éloigné, et, au défaut de l’intérêt, par la haine, par l’envie ou par une basse politique. […] C’est ce talent de juger et de discerner les hommes qu’il croyait avoir et qu’il avait à un très remarquable degré, qui l’a conduit à dire de lui une chose singulière dont Voltaire s’est, moqué, et dont l’expression ne saurait en effet, raisonnablement, échapper à la raillerie. […] Lassay put connaître La Bruyère à l’hôtel de Condé ; il est un de ses disciples pour l’observation vraie ; il en a le fond, sinon le relief : Mon étoile bien plutôt que mon goût, dit-il dans une lettre à une femme, m’a conduit à vivre avec des princes, connaissant qu’ils sont encore plus imparfaits que les autres hommes ; car, n’étant pas nécessités à se contraindre, ils se laissent aller à toutes leurs mauvaises inclinations.
Ceux qui étaient auprès du roi, ou pour faire plaisir au marquis de Villars, ou pour approcher de la vérité, estimaient que cette dépense pouvait monter à quarante ou cinquante mille livres. « Messieurs, leur dit-il, il ne m’en a pas coûté une pistole. » Le roi, surpris de la réponse, lui en demanda l’explication. « Sire, répondit Villars, pour être magnifique, il faut être économe et se servir de son esprit. » Le courtisan ne savait à quoi ce préliminaire allait conduire, lorsque Villars ajouta : « Sire, lorsque mon équipage est parti, la réforme de votre cavalerie se faisait. […] Si je parlais autrement à Votre Majesté, je n’aurais plus l’honneur de me conduire à son égard avec un esprit de vérité. » C’est comme un janséniste de la guerre que Catinat ; il y porte l’amour strict de la vérité, et une prudence, une patience opiniâtre. […] M. de Magnac, maréchal de camp, avait fort bien conduit la cavalerie, qui décida du gain de la journée.
Tous les prétextes que la malveillance a fait valoir jusqu’à présent contre vous manqueront à la fois, le jour où vous aurez conduit en votre nom, une division, une brigade, un corps quelconque à l’ennemi. […] Jomini était « un militaire de peu de valeur. » Qu’est-ce à dire, et Napoléon lui a-t-il jamais fourni l’occasion de se montrer militaire dans le sens où il l’entend, et de conduire une brigade à l’ennemi ? […] Était-ce une raison pour qu’à l’épreuve il ne sût point conduire une troupe au feu ?
Quant aux philosophes qui s’inquiétaient des théories nouvelles, M. de La Mennais ne réussit qu’avec peine à conduire leur orgueil cartésien au delà de son second volume ; ils se prêtèrent difficilement à rien entendre davantage : cette infaillible certitude, appuyée au témoignage universel, leur semblait une énormité trop inouïe. […] Car ce n’est pas avec une raison lucide seulement qu’il convient de se livrer à cette investigation, trop variable selon les lumières ; c’est avec des qualités religieuses de l’esprit et du cœur, qui soutiennent dans le chemin, le devinent aux places douteuses, et en dispensent là où il ne conduit plus. […] L’imagination de l’abbé de La Mennais est restée ardente jusqu’à quarante ans : il eût aimé s’en laisser conduire dans le choix et la forme de ses écrits.
Cet homme, « qui n’a d’autre passion que la fatuité », s’est conduit en malhonnête homme. […] Je le conduisis jusqu’à la porte du salon, et il me dit qu’il retournerait chez son ami. […] « En un mot, le désœuvrement, l’agitation d’une santé superflue ; si vous me permettez de parler ainsi, m’ont conduit près de Belinde, que le hasard offrit la première à ma vue, que le voisinage recommandait à ma paresse et qui a le mérite de n’avoir que vingt ans.
En vertu d’une ordre du comité de sûreté générale du quatorze vantose qu’il nous a présenté le dix-sept de la même anée dont le citoyen Guenot est porteur de laditte ordre, apprest avoir requis le membre du comité révolution et de surveillance de laditte commune de Passy les Paris nous ayant donné connaissance dudit ordre dont les ci-dessus étoit porteurs, nous nous sommes transportés, maison quaucupe la citoyene Piscatory ou nous avons trouvé un particulier à qui nous avons mandé quil il était et le sujest quil l’avoit conduit dans cette maison11 il nous à exibée sa carte de la section de Brutus en nous disant qu’il retournaist apparis, et qu’il étoit Bon citoyent et que cetoit la première foy quil renoit dans cette maison, quil étoit a compagnier d’une citoyene de Versaille dont il devoit la conduire audit Versaille apprest avoir pris une voiture au bureaux du cauche il nous a fait cette de claration à dix heure moins un quard du soir à la porte du bois de Boulogne en face du ci-devant chateaux de Lamuette et apprest lui avoir fait la demande de sa démarche nous ayant pas répondu positivement nous avons décidé quil seroit en arestation dans laditte maison jusqua que ledit ordre qui nous a été communiquié par le citoyent Genot ne soit remplie mais ne trouvant pas la personne dénomé dans ledit ordre, nous lavons gardé jusqua ce jourdhuy dix huit. Et apprest les réponse du citoyent Pastourel et Piscatory nous avons présumé que le citoyent devoit estre interrogés et apprest son interogation estre conduit apparis pour y estre détenue par mesure de suretté générale et de suitte avons interpellé le citoyent Chenier denous dire cest nomd et surnomd âges et payi de naissance demeure qualité et moyen de subssittée.
Il est certain, il est évident que le problème qui agite M. de Tocqueville et qui l’a conduit aux États-Unis, c’est le problème de la démocratie européenne : c’est là même ce qui donne à ce livre sa grandeur, je dirai presque son pathétique, mais ce qui y répand en même temps une certaine obscurité. […] A la vérité, M. de Tocqueville, ayant été plus qu’aucun autre frappé des excès et des périls de la centralisation, a bien entrevu cette sorte de communisme où pourrait conduire l’abus de l’intervention de l’État en toutes choses, et c’est là une des formes du socialisme ; mais ce n’est pas la plus redoutable, quelque grave qu’elle soit. […] Si l’on cherche maintenant à quelle conclusion la méthode précédente a conduit M. de Tocqueville, on verra qu’en dehors des vues particulières, qui sont très-nombreuses dans ses écrits, il a mis en pleine lumière cette loi aperçue par quelques auteurs, mais que nul n’avait encore développée comme lui.
Comme elle le conduit à quelque théorie très générale, à une idée à peu près vide, il pourra toujours, plus tard, placer rétrospectivement dans l’idée tout ce que l’expérience aura enseigné de la chose : il prétendra alors avoir anticipé sur l’expérience par la seule force du raisonnement, avoir embrassé par avance dans une conception Plus vaste les conceptions plus restreintes en effet, mais seules difficiles à former et seules utiles à conserver, auxquelles on arrive par l’approfondissement des faits. […] Chacune, prise à part, nous conduira à une conclusion simplement probable ; mais toutes ensemble, par leur convergence, nous mettront en présence d’une telle accumulation de probabilités que nous nous sentirons, je l’espère, sur le chemin de la certitude. […] Tout ce que je veux dire est que cette nouvelle ligne de faits nous conduit au même point que la précédente.