Par son âge, elle appartenait tout à fait à la jeune cour ; et même avec moins de solidité dans l’esprit, elle n’aurait pas manqué d’en posséder encore les plus justes élégances. […] Or la publication des Maximes, et l’entrée du comte de Saint-Paul dans le monde, en la rapportant à l’âge de seize ou dix-sept ans, concordent juste, et donnent l’année 1665 ou 1666. […] Je hais comme la mort que les gens de son âge puissent croire que j’ai des galanteries. […] Elle craignait surtout de paraître inspirer ou sentir la passion à cet âge où d’autres l’affectent. […] Ainsi ces deux amis vieillis remontaient par l’imagination à cette première beauté de l’âge où ils ne s’étaient pas connus, et où ils n’avaient pu s’aimer.
Quels sens manquaient aux hommes des premiers âges ? […] Les philosophes du progrès indéfini en théologie, en morale et en littérature, nous diront ensuite si de telles idées, de tels dogmes, de tels préceptes et de telles poésies, à l’aube des siècles, sont de nature à les confirmer dans leur système de l’homme brute au commencement, de l’homme dieu à la fin des âges. […] Qu’on juge par là de cette prétendue barbarie des âges primitifs que les philosophes de la perfectibilité indéfinie affirment, en balbutiant encore eux-mêmes des doctrines infiniment moins sublimes que ces échos lointains du berceau du monde. […] Une telle littérature atteste, par son existence à cette époque reculée du monde, une de ces deux choses : ou bien une révélation primitive dont les perfections étaient encore présentes à la mémoire de l’homme, ou bien une maturité consommée d’âge et de raison qui portait déjà ses fruits de sagesse et de sainteté dans la philosophie et dans la poésie de la prodigieuse vieillesse d’une telle race humaine. […] N’y sent-on pas, au contraire, ou la sagesse d’un âge déjà très-avancé en foi et en vertu, ou le reflet encore tiède et lumineux d’une révélation primitive mal effacée de la mémoire des hommes ?
Rousseau avait deux fois notre âge avant d’écrire sa première page de prose. […] Vous voyez que je ne suis pas si malheureux que vous dites, puisque j’ai l’esprit de mon état et de mon âge. […] Cet âge de seigneurie était surtout l’âge de l’histoire honnêtement racontée, et des commentaires définitifs, quand l’homme qui parle à ses contemporains les peut prendre en témoignage de la loyauté et de la justice de sa parole. […] Pourquoi donc l’avons-nous aboli, cet âge de seigneurie, et quelle rage hostile à nous-mêmes nous précipite ainsi, sans un moment de trêve et de répit, de l’âge mûr dans la vieillesse, et de la vieillesse à la mort ? […] « Mon ami, lui dit-il, quel âge avez-vous ?
Il n’avait pourtant point dirigé ses premières vues du côté de la vie des cloîtres : mais, un jour qu’il était à la chasse avec quelques jeunes gens de son âge, son cheval le renversa et l’entraîna quelque temps, le pied engagé dans l’étrier. […] Sa mère veuve s’opposait à son dessein ; il combattit contre sa tendresse durant deux années, et put enfin prendre l’habit religieux à Marmoutier, à l’âge de vingt et un ans ; il fit profession l’année suivante. […] Il sentit donc, sans être très avancé en âge, les premières atteintes du mal qui devait l’emporter : « Un gros rhume dont il fut attaqué vers la fin de l’année 1748, nous dit son biographe, le força de prendre une chambre à feu : c’est le seul adoucissement qu’il se permît. » Ainsi, jusque-là, il avait vécu, travaillé, étudié, comme le moins délicat de nous ne consentirait pas à vivre, même un seul hiver. — Sachons-le bien, quand l’encre venait à geler dans une de ces froides bibliothèques de bénédictins, le savant religieux était obligé, pour s’en servir, de l’aller faire dégeler un moment au feu de l’infirmerie ou de la cuisine. […] Les fabliaux les plus moqueurs florissaient déjà du temps de saint Louis : cette veine est encore la plus sûre et la moins interrompue, quand on veut remonter à l’esprit français des vieux âges.
« Il est pour chacun, disait-il, un âge pour mourir. » Il prit mal son moment et son endroit. […] Je vous assure qu’à votre âge je n’aurais point fait de pareilles lettres. […] Il semble se corriger ici de ce lieu commun d’un faux Sully, qu’il avait caressé dans le précédent ouvrage. — Il observe très bien que de son temps les conditions de la société se sont tellement mêlées et confondues, et avec un frottement si continuel, que ce qu’on appelle les gens du monde n’ont plus ni état ni âge, ni rien qui marque l’individualité de la personne : La vie intérieure et domestique, dit-il, n’a plus été le partage que des états obscurs et des gens sans fortune. Celui qui a un bon estomac, qui joue, et qui sait l’histoire du jour, est de tous les âges, de toutes les conditions.
Maintenant, tout cela dit, et les torts de trahison et d’indiscrétion étant dès longtemps épuisés, on sait gré involontairement à Bussy (à cette distance) de nous montrer en action tout ce beau monde, nobles gentilshommes et grandes dames, de nous les produire dans un naturel et une originalité de désordre qui fait réfléchir sur le degré de civilisation et d’honnêteté aux différents âges, et qui peut servir à remettre à la raison l’enthousiasme des historiens à tête montée et des faiseurs d’oraisons funèbres. […] En un mot, Bussy a donné dans l’Histoire amoureuse des Gaules une sorte de plat de son métier, une rabutinade qui a un ragoût particulier pour les palais qui n’en sont pas restés aux mets de l’âge d’or. […] Du même âge que Bussy (Tallemant est né vers 1619 et Bussy en 1618), fils d’un riche financier, nourri dans l’opulence et la jovialité bourgeoises, il nous a tenus au courant de ses belles passions de jeunesse, il a fait aussi son histoire amoureuse, mais que le ton est différent ! […] Il atteignit et passa peut-être l’âge de soixante-douze ans ; on n’a pas exactement la date de sa mort.
Cet élève distingué de la première École normale, ce contemporain et ami intime de Victor Cousin, de bonne heure prosateur distingué, poète élevé et touchant, esprit mûr, est enlevé à la fleur de l’âge, à vingt-neuf ans, en 1820 ; il emporte avec lui les regrets, les adieux funèbres éloquemment exprimés de ses amis. […] De ce côté et presque du premier jour, sa plume fut celle d’un excellent esprit et d’un bon écrivain : comme ceux qui sont destinés à mourir jeunes et en qui les saisons intérieures anticipent sur l’âge, il eut la maturité précoce. […] Il y a dans l’âge de l’homme et de l’enfant un certain moment de transition qu’on appelle l’âge bête.
A ceux qui, jeunes, débutent par l’attaquer, par la dédaigner, l’Académie, qui n’est pas une personne jeune, mais d’âge moyen, et qui ne meurt pas, peut répondre : J’attendrai. […] S’il est vrai, comme l’a dit d’Alembert encore, que l’écrivain isolé soit une espèce de célibataire, il vient un âge où les plus intrépides célibataires commencent à ne pas trouver absurde de se marier. […] L’Académie, en un mot, répond parfaitement à un certain changement d’âge dans les esprits littéraires. […] Une compagnie d’honnêtes gens, aimant les lettres, y arrivant, y revenant de bien des côtés, se plaisant à en causer dans leur âge mûr, ou sur leurs vieux jours, s’y réconciliant, s’il le faut, et croisant sur un même point, sur un mot de vocabulaire, des pensées d’origine bien diverse, ainsi je me figure la réunion de famille et le tous-les-jours de l’Académie.