Les haines religieuses, en bien des lieux, s’associaient et s’accouplaient aux haines politiques pour les mieux empoisonner encore, et ce vieux levain de cupidité, d’avarice et d’envie qui fait le fond de la nature humaine autant et plus que la bonté (quoi qu’en ait dit Bossuet dans une phrase oratoire célèbre, empruntée au déclamateur Tertullien), ce mauvais fond sauvage qu’il n’est besoin que d’éveiller pour le remettre en goût et en appétit, faisait le reste. […] On voyait en première ligne, en tête de ces partisans des rigueurs salutaires, un Bonald, à l’air respectable et doux, métaphysicien inflexible et qui prenait volontiers son point d’appui, non pas dans l’ancienne monarchie trop voisine encore à son gré, mais par-delà jusque dans la politique sacrée et dans la législation de Moïse : oracle du parti, tout ce qu’il proférait était chose sacro-sainte, et quiconque l’avait une fois contredit était rejeté à l’instant, répudié à jamais par les purs ; — un La Bourdonnaie, l’homme d’action et d’exécution, caractère absolu, dominateur, un peu le rival de Bonald en influence, mais non moins dur, et qui avec du talent, un tour d’indépendance, avec le goût et jusqu’à un certain point la pratique des principes parlementaires, a eu le malheur d’attacher à son nom l’inséparable souvenir de mesures acerbes et de classifications cruelles ; — un Salaberry, non moins ardent, et plus encore, s’il se pouvait ; pamphlétaire de plume comme de parole, d’un blanc écarlate ; — un Duplessis-Grenedan, celui même qui se faisait le champion de la potence et de la pendaison, atroce de langage dans ses motions de député, équitable ailleurs, par une de ces contradictions qui ne sont pas rares, et même assez éclairé, dit-on, comme magistrat sur son siège de justice ; — M. de Bouville, qui eut cela de particulier, entre tous, de se montrer le plus inconsolable de l’évasion de M. de Lavalette ; qui alla de sa personne en vérifier toutes les circonstances sur les lieux mêmes, et qui, au retour, dans sa fièvre de soupçon, cherchait de l’œil des complices en face de lui jusque sur le banc des ministres ; — et pour changer de gamme, tout à côté des précédents, cet onctueux et larmoyant Marcellus, toujours en deuil du trône et de l’autel, d’un ridicule ineffable, dont quelque chose a rejailli jusqu’à la fin sur son estimable fils ; — et un Piet, avocat pitoyable, qui, proposant anodinement la peine de mort pour remplacer celle de la déportation, disait, dans sa naïveté, qu’entre les deux la différence, après tout, se réduisait à bien peu de chose ; ce qui mettait l’Assemblée en belle humeur et n’empêchait pas le triste sire de devenir bientôt, par son salon commode, le centre et l’hôte avoué de tous les bien pensants ; — et un Laborie que j’ai bien connu, toujours en quête, en chuchotage, en petits billets illisibles, courtier de tout le monde, trottant de Talleyrand ou de Beugnot à Daunou, mêlé et tripotant dans les journaux, pas méchant, serviable même, mais trop l’agent d’un parti pour ne pas être inquiétant et parfois nuisible.
Tout nous échappe, et la possession de ce qu’on souhaite, et le goût de ce qu’on possède. […] Ducis, tout en consolant son étrange malade et en lui insinuant les remèdes les plus appropriés, se peint à nous avec sa chaleur d’imagination, avec ses goûts modérés et parfois ses désirs plus grands que son destin.
Probablement, à quelques endroits, les plus connaisseurs dirent : « C’est bien là Lebrun avec ses hardiesses et ses défauts. » L’erreur, même de la part de gens de goût, était excusable : l’ode entière était animée d’un beau feu. […] Lebrun, tout cela est sensible à la simple lecture ; mais ce que je prétends, c’est que ce n’est nullement par un procédé d’imitation ou par un goût de fusion qu’il nous offre de tels produits de son talent, car il est, il a été poète, sincèrement poète, de son cru et pour son propre compte ; il en porte la marque, le signe au cœur et au front : il a la verve.
Et ceux qui étaient encore en feu il y a dix ans, et ceux qui se sont produits et déjà fatigués depuis, et ceux qui ressaisissent aujourd’hui de bons éclairs d’une ferveur littéraire longtemps ailleurs détournée, tous ne sont pas si loin de s’entendre pour de certaines vues justes, de certains résultats de goût, de sens rassis et de tolérance. […] Ou bien, méritera-t-on de compter parmi les siècles qui ont eu quelque consistance, qui ne se sont pas hâtés eux-mêmes de se dissoudre, qui ont lutté avec honneur sur les pentes dernières de la littérature, de la langue et du goût ?
J’ai eu, du reste, toujours beaucoup de goût pour tout ce qui touche à la médecine. […] Peu à peu, il n’avait plus eu de goût pour le pain, il en était arrivé à cracher sur le fricot.
Mais l’esprit dominant ne portait pas à l’abstraction ; la science expérimentale, le naturalisme littéraire maintinrent dans l’histoire le goût de la réalité concrète et le sens de la vie : d’autant que le développement des sciences auxiliaires, diplomatique, épigraphie, archéologie, faisait sans cesse jaillir une multitude de faits précis, individuels, sensibles, qui menaçaient même d’inonder l’histoire et de noyer toutes les idées ; ces matériaux, du moins, facilitaient la restitution intégrale de la vie et donnaient aux plus forts esprits la tentation de l’essayer. […] Cependant, je saisis trois traces de son passage : c’est d’abord la curiosité si universellement éveillée sur les choses religieuses, le goût des artistes et du public pour les restitutions des plus singuliers effets de la foi, pour les analyses psychologiques de la sainteté ou de la dévotion.
Au xiie siècle, saint Bernard et Abélard écrivent en latin en hommes qui lisaient et pratiquaient Cicéron, mais ce savoir n’était ni très profond, ni réglé par le goût. […] Notre goût pour la précision et la rigueur logique ne vient pas de là ; je n’en vois, dans les penseurs du moyen âge, que beaucoup d’applications mauvaises parmi un très-petit nombre de bonnes.
Du jour où nous examinerons les animaux par leurs rapports avec nous et d’après leur utilité, notre imagination, nos usages, nos goûts, nos dégoûts corrompront notre étude. […] Ces pages compensent la part de vaine parure que la science et le goût ont justement critiquée dans l’Histoire naturelle des animaux.
Il entre, sur ce chapitre des repas et victuailles, dans des détails dignes de Gargantua, et qui nous paraîtraient aujourd’hui de mauvais goût, mais qui n’étaient que dans le goût du temps. […] Ceux qui, à en juger par une lecture légère, croiraient Chaulieu un petit poète abbé, musqué et mythologique, se tromperaient fort : c’était une nature brillante et riche, un génie aisé et négligé, tel que Voltaire nous l’a si bien montré dans Le Temple du goût.
Périer avait du goût pour le pouvoir. […] La modération, après tout, était ici chose de tact et de goût ; elle m’a bien servi ; et toutes fois que vous me verrez paraître en mon nom, ne craignez pas que j’exagère.
Il ne songea plus désormais qu’à jouir de la vie en sage épicurien ou en cynique mitigé (c’est son expression), et à se livrer à ses goûts, où les sens se mêlaient agréablement à l’esprit. […] Il recevait toute la jeunesse des environs, et lui-même a ainsi défini son hospitalité pleine de facilité et de noblesse : Grand chère, vin délicieux, Belle maison, liberté tout entière ; Bals, concerts, enfin tout ce qui peut satisfaire Le goût, les oreilles, les yeux ; Ici, le moindre domestique A du talent pour la musique.
Ce Desfontaines, abbé aussi, mourut d’hydropisie, et ses goûts très connus lui valurent cette épitaphe : Periit aqua qui meruit igné. […] Il est tout simple qu’on recherche médiocrement leur familiarité et qu’on n’ait point le goût de voisiner avec eux.
L’univers entier est pour lui un motif de joie, d’amour et d’étude. « Celui qui se renferme en lui-même, ajoute la même critique, pour rêver d’après ses goûts des types de perfection idéale… n’est certainement pas l’homme qui sait le mieux… tirer des campagnes et des buissons qui entourent sa demeure le contentement et les inspirations qu’ils pourraient fournir, — et ce n’est pas lui non plus qui sera le plus grand artiste. » Ceci nous montre tout ce qui sépare la riche émotivité de Ruskin, l’homme qui « découvre le côté frappant de chaque chose », de la sèche artificialité des Préraphaélites, de Rossetti et de Burne-Jones notamment, « rêvant d’après leur goût des types de perfection idéale ».
« Je perdis le goût d’aller chercher et emprunter ailleurs ce que je pouvais trouver et acquérir par moi-même. […] Je n’ai rien su que ce que j’ai trouvé, et quand il m’est entré dans la tête des opinions qui étaient aussi celles des autres, c’est que mes recherches comme les leurs y avaient abouti. » Un peu plus tard, traitant des signes, il ne voulut ouvrir aucun des ouvrages de ses prédécesseurs, et expliqua son étrange refus comme Descartes : « Notre première raison, c’est que les idées qu’ils nous suggéreraient gêneraient la liberté de notre esprit qui aime à se conduire à sa façon, et dépouilleraient pour lui cette recherche de son plus grand charme, qui est dans la recherche même plutôt que dans le résultat qu’elle peut donner à la science ; la seconde, c’est que les idées d’autrui, quand nous n’avons pas d’abord exploré nous-même la matière à laquelle elles se rapportent, n’ont pour nous qu’un sens vague, et nous troublent plutôt qu’elles ne nous éclairent54. » Cette habitude et ce goût sont le signe du véritable philosophe.
Si vous rencontrez un intestin propre à digérer seulement de la chair et de la chair récente, l’animal a des mâchoires construites pour dévorer une proie, des griffes pour la saisir et la déchirer, des dents pour la couper et la diviser, un système d’organes moteurs pour la saisir et l’atteindre, des sens capables de l’apercevoir de loin, l’instinct de se cacher, de tendre des pièges, et le goût de la chair. […] Faites varier un organe ; si le pied est enveloppé de corne, propre à soutenir, impropre à saisir, l’animal a le goût de l’herbe, des dents molaires à couronne plate, un canal alimentaire très-long, un estomac ample ou multiple.
C’est un peu libertin, dans les deux sens du terme, non pas grossier ni sans goût. […] Sa condition et sa pauvreté l’obligeaient à des goûts modestes. […] Henri de Régnier a le goût très sûr en poésie. […] De ce père, Lucien tient son goût pour les raffinements d’une ancienne civilisation. […] On le lira toujours pour savourer son style ensorcelant, son goût de l’héroïsme, son amour de la France.
Dans l’ensemble de ces morceaux, déjà imprimés sous le titre de Loisirs d'un ministre, ou d’Essais dans le goût de Montaigne, sont puisés les éléments de ces Mémoires.
Je pourrais citer de Joachim Du Bellay plus d’une chanson agréable dans le goût d’Anacréon.
Scribe a pour système de suivre le public plutôt que de lui commander, et de chercher à lui plaire en obéissant à ses goûts plutôt que de le dompter en lui imposant les siens.
Vos goûts, vos croyances, vos sympathies et vos antipathies s’agglutineront en quelque sorte autour du noyau primitif.
Robert Caze y publiait des nouvelles dans le goût réaliste.
Réduites ainsi à la condition de choses libres et individuelles, comme la littérature, le goût, les religions se transformeront entièrement.
Madame de La Fayette racontait plaisamment à madame de Sévigné qu’on discourut tout une après-dînée chez Gourville, sur les personnes qui ont le goût au-dessus ou au-dessous de leur esprit.
L’invention en eût été plus riche, la diction plus naturelle, & l’intérêt plus sensible ; l’Auteur auroit employé des expressions plus correctes, & évité les tournures Gasconnes ; ses images auroient été mieux choisies, ses comparaisons plus justes & moins ridicules ; il n’eût point appelé le Soleil le Duc des Chandelles les Vents les Postillons d’Eole, le Tonnerre le Tambour des Dieux ; le total de l’Ouvrage eût été dans le goût de ces vers du quatrieme Chant, qu’on peut citer avec estime, dès qu’il ne s’agit pas de l’Astronomie : Il se trouve entre nous des esprits frénétiques Qui se perdent toujours dans des sentiers obliques, Qui, sans cesse créant des systêmes nouveaux, Prouvent que la raison gît loin de leurs cerveaux.
Goldoni, précédée d’une Préface pleine de sentimens raisonnables, intéressans & bien exprimés, peut figurer parmi les Pieces de ce genre, si opposé au génie & au vrai goût.
Je ne suis pas éloigné de songer qu’il serait plus utile de faire apprendre aux enfants les termes de métier que les racines grecques48 ; leur esprit s’exercerait mieux sur une matière plus assimilable, et si l’on joignait à cela des exercices sur les mots composés et les suffixes, peut-être prendraient-ils plus de goût et quelque respect pour une langue dont ils sentiraient la chaleur, les mouvements, les palpitations, la vie.
Le jeune homme qui avait du goût et de la vérité dans le caractère, dit à sa famille en la remerciant : Vous n’avez rien fait qui vaille, ni vous, ni le peintre.
Dans le vrai, il n’y en a aucun qui n’ait quelque talent, et en comparaison de qui un homme du monde qui peint par amusement ou par goût, un peintre du pont notre-dame, même un académicien de st Luc ne soit un barbouilleur.
Cette émotion artificielle n’en est que l’occasion ; elle fomente dans le coeur d’une jeune personne qui lit les romans avec trop de goût, les principes des passions naturelles qui sont déja en elle, et la dispose ainsi à concevoir plus aisément des sentimens passionnez et serieux pour ceux qui sont à portée de lui en inspirer : ce n’est point Cyrus ou Mandane qui sont le sujet de ses agitations.
La sensibilité vient à s’user dans un artisan sans génie, et ce qu’il apprend dans la pratique de son art, ne sert le plus souvent qu’à dépraver son goût naturel et à lui faire prendre à gauche dans ses décisions.
Nous les plaçons avec raison fort au-dessus de Ronsard, mais ceux qui le connoissent ne sont pas surpris que ses contemporains se soient plûs à lire ses ouvrages malgré le goût gothique de ses peintures.
Nourri jusqu’à en pâlir des philosophes et des savants, entraîné au grand air par le lyrisme des Lamartine et des George Sand, mais encore bien âpre et livresque et provocant comme un curé breton, Renan eut tout pour séduire son siècle dès cet instant où Sainte-Beuve le fit homme de goût.
C’est le goût des grandes synthèses, des généralisations hardies. […] Il traite Villemain d’« eunuque littéraire opéré par le goût ». […] Et pourtant quelque chose va prédominer, le goût de la vérité. […] L’un s’amuse le premier de ses fines agaceries, sans en avoir l’air toutefois, s’il est homme de goût. […] Il remarquait en lui trop de goût pour les anecdotes d’alcôve, trop de friandise de la « bagatelle ».
Ils disaient que l’art était perdu, que c’en était fait du goût public ; les marionnettes outrageaient (c’est l’usage) la morale et le bon sens. […] Il se rappelle Damas, intelligent et plein de zèle, mais sans grâce et sans goût, poussant le travail jusqu’à la grimace, et se permettant le vers à la Molé, le vers de quinze pieds. […] Ni choix, ni goût, ni méthode ; pas d’ordre et pas de nœud, rien qui se noue et se dénoue. […] Ce n’est pas seulement l’esprit français qui manque à la comédie grecque… elle manque de cet art aimable de ce goût exquis, et de cette fleur délicate qui ont signalé et glorifié les œuvres du grand siècle ! […] Tous ces actes se ressemblent ; l’esprit y manque autant que le goût, l’honnêteté, et la vraisemblance.
Gustave Flaubert a le goût de l’exagération et de l’accumulation. […] Noriac écrit des romans ; mais, n’ayant pas le goût des phalanstères, il a résolu de se bâtir « une maison à soi », au grand scandale des gens de la caserne. […] Nous sommes étonné qu’une pareille accusation parte de ce critique au goût sûr, au jugement sain, qui s’appelle Édouard Thierry. […] Cette matinée, où le pâtre trempe et retrempe, avec une joie sinistre, son couteau dans la mare qui a le cadavre de Jeanne, pour donner à son pain un goût de mort ? […] Ces auteurs-là s’adressaient à notre sensibilité, mais ils s’adressaient encore à notre goût et à notre raison.
On pourrait croire qu’il a manqué de goût. […] Il se plaignit, un jour, de n’avoir plus le même goût à lire : « L’intelligence, disait-il, est comme le corps. […] Ceux mêmes que le succès avait consacrés recherchaient auprès de lui la confirmation de leur esthétique et de leurs goûts. […] C’est un caractère, un ami sûr et un critique de goût classique. […] Les littérateurs n’ont pas beaucoup de goût pour l’exercice physique.
Être éloquent sur des sujets difficiles et sérieux, de manière à plaire à la majorité de quarante membres qui pensent différemment sur toute chose et qui particulièrement ne sauraient être d’accord en matière de goût, c’est à peu près impossible.
La langue française a le mérite de distinguer les synonymes avec une lumineuse précision : elle le doit en grande partie à ces précieux et à ces premiers académiciens, dont se moquait un peu légèrement Saint-Ëvremond, et aussi à ce goût d’analyse morale qui a poussé tant d’écrivains, tant de gens du monde même, à étudier le cœur humain dans ses plus délicats mouvements et ses plus imperceptibles ressorts.
D’autres ont visité des terres ignorées pour en agrandir leur patrie, ou par un amour ingénu de la science et de la vérité, quelquefois aussi par goût du mouvement et de l’aventure.
Delavigne, l’essor de la grande ambition littéraire, en ce qu’il peut avoir parfois de téméraire et de suprême, était arrêté en lui et comme limité par une sorte de réserve naturelle, qu’on peut louer ou blâmer, selon qu’on préfère dans les productions de l’esprit le goût qui circonscrit ou le génie qui entreprend, mais qui était une qualité aimable et gracieuse, et qui se traduisait en modestie dans son caractère et en prudence dans ses ouvrages.
Nos goûts sont autres.
Les piquantes balivernes de Valéran dit le Picard, les plaintes de dame Gigogne, les hardiesses mimiques de Gros-Guillaume, tout méprisés qu’ils étaient des gens doctes et d’un goût difficile, n’en avaient pas moins plus de portée souvent que les lazzi et surtout que les éternels travestissements des Gelosi.
Il arrivait qu’on vît, au fort des récitations, se ruer dans la salle un flot d’aèdes en tournée qui s’y arrêtaient le temps d’évacuer quelques truculences dans le goût du jour et qui, chargés d’applaudissements frénétiques, libéralement octroyés pour prix de leur dérangement, repartaient aussitôt vers les cabarets de Montmartre dans le fiacre qui les avait amenés.
On se figurait donc que les Érynnies mettaient une joie méchante à poursuivre et à torturer les coupables, et que l’habitude de verser le sang leur en avait fait prendre le goût.
Ce goût est principalement resté chez les Espagnols, & chez les Italiens.
Le réalisme tire toute sa force de sa simplicité, de sa naïveté ; rien n’est moins simple et moins naïf que le goût d’une race vieillie, spirituelle, saturée de rhétorique. […] L’appareil réaliste semble plutôt une gêne pour le poète épique, une concession aux goûts de l’époque qui doit répugner à son imagination abstraite. […] Quand il se prendra à un sujet historique, Poltava, Boris Godounof, son goût acquis refrénera sans pitié les dons innés ; ce lyrique saura être impersonnel, il s’effacera derrière les personnages qu’il crée. […] Dans les familles qui descendent directement de cette souche, — et la famille de Gogol en était, — on retrouve les révoltes héréditaires, les instincts errants, le goût de l’aventure et du merveilleux. […] En vérité, je ne lui connais pas de rival pour la sûreté du goût, la tendresse, je ne sais quelle grâce tremblante également répandue sur chaque page, qui fait penser à la rosée du matin.
Quand, au contraire, la société s’apaise et se repose, l’imagination se reprend de goût pour les crimes. […] Ce n’est pas seulement chaque âge, c’est chaque saison et chaque journée, et chaque matin et chaque soir, qui a ses goûts et son humeur. […] Ceux qui ne font pas marcher de front la physiologie, la morale, l’histoire et le reste, sont des rhétoriciens incurables, qui n’ont pas le goût de la réalité. […] Les Français, par nature, étaient peu musiciens ; mais, à force d’esprit et de goût, et par leur merveilleuse faculté d’assimilation et de sympathie, voilà qu’ils le deviennent. […] Ils y ajoutèrent ensuite le goût de la réalité, — sans aucune espèce d’idéal.
Le bien-être domestique suit la sécurité civile, et l’homme, mieux fourni dans sa maison, mieux protégé dans sa bourgade, peut prendre goût à la vie terrestre qu’il transforme et va transformer. […] Un peu plus tard, il n’y a d’habits que ceux qui sont dans le goût allemand. […] Les modèles. — Les anciens. — Traduction et lecture des auteurs classiques. — Sympathie pour les mœurs et les dieux de l’antiquité. — Les modernes. — Goût pour les idées et les écrits des Italiens. — Que la poésie et la peinture en Italie sont païennes. — Le modèle idéal est l’homme fort, heureux, borné à la vie présente. […] On oublie bien vite les fautes de goût qui l’accompagnent, les affectations, le jargon bizarre. […] On les pare et on les accommode à son goût ; elles ont cessé de maîtriser et de plier l’homme ; il s’en égaye et il en jouit.
Les quelques pièces qu’on rassemblées les anthologies nous permettent de juger de la maîtrise parfaite de son talent où il semble que l’art de Heredia s’est marié à celui de Henri de Régnier, en une simplicité d’un goût toujours sûr. […] Lucie Delarue-Mardrus Dans l’œuvre poétique de Mme Lucie Delarue-Mardrus revit le goût de conquête et d’aventure de la race normande. […] Il y a, en effet, dans ses vers, un goût de l’analyse subtile qui se marie à une sorte de fatalisme. […] Ce vers, que je cueille à l’espalier d’un long poème, est un beau fruit qui contient vraiment le goût d’amertume du désir impossible : Je voudrais, une fois, prendre vos mains, un soir. […] ………………………………………………………………………… La larme qui me monte aux yeux, tu la connais, Elle a le goût profond de mon sang sur tes lèvres.
Robert de Souza, avec cela, le goût le plus sûr, la pensée la plus pénétrante et la plus noble. […] On ne sait pas, un homme de goût ne cherche même pas à savoir ce que signifie telle chanson de Shakespeare, exquise pourtant. « Il semble qu’il n’y ait plus rien, disait le robuste Angellier de certains poèmes de Burns ; les pièces sont dépouillées du moindre contenu intellectuel, elles sont vides. […] Ayant écrit, il y a déjà longtemps, dans un article sur Sainte-Beuve, que le goût était autre chose que la raison, M. Souday, pour me confondre, avait pris les mêmes armes : mais tout au contraire, m’avait-il répondu, le goût « c’est la raison dégustant les œuvres d’art » de même que l’athena promakhos, c’est la raison armée. voici plus curieux encore, et plus pathétique : la poésie, déclare-t-il, s’ajoute à la raison, mais ne la nie pas. tiens ! […] Diderot raconte quelque part : j’ai connu un jeune homme plein de goût qui, avant de jeter le moindre trait sur la toile, se mettait à genoux et disait : « mon dieu, délivrez-moi du modèle. » on ne saurait trop presser le sens de cette petit histoire.
La féodalité turbulente s’était énervée comme la théocratie oppressive, et les deux grandes passions maîtresses, privées de leur séve et retranchées de leur tige, s’alanguissaient jusqu’à laisser la monotonie de l’habitude et le goût du monde germer à leur place et fleurir sous leur nom. […] Les mœurs du temps les suggèrent ; car les usages et les goûts de la société ont commencé, et la fiction, ainsi conçue, ne fait que transporter dans les livres les conversations qui s’échangent dans les salles et sur les chemins. […] La pente du caractère français fait de l’amour, non une passion, mais un joli festin, arrangé avec goût, où le service est élégant, la chère fine, l’argenterie brillante, les deux convives parés, dispos, ingénieux à se prévenir, à se plaire, à s’égayer et s’en aller. […] — Rédacteurs de moralités. — Gower. — Occlève. — Lydgate. — Analogie du goût dans les costumes, dans les bâtiments et dans la littérature. — Idée triste du hasard et de la misère humaine. — Hawes. — Barcklay. — Skelton. — Rudiments de la Réforme et de la Renaissance. […] Amours et moralités, c’est-à-dire mignardise et abstractions, tel est le goût du temps228 ; pareillement, au temps de Lebrun, d’Esménard, à l’extrême fin de notre littérature, on composait les recueils avec des poëmes didactiques et des bouquets à Chloris. — Pour le moine Lydgate, il a quelque talent, quelque imagination, surtout dans les descriptions riches ; c’est le dernier éclat des littératures qui s’éteignent ; on entasse l’or, on incruste les pierres précieuses, on tourmente et on multiplie les ornements, dans les habits, comme dans les bâtiments, comme dans le style229.
C’était une maison à tourelles gothiques, encadrée dans de beaux ombrages ; il la dessinait souvent avec goût et talent. […] Ces soins domestiques lui laissaient le loisir non-seulement de méditer et de polir ses vers, mais encore de se livrer comme Frédéric II à son goût pour la musique, et en particulier pour la flûte, le plus doux et le plus pastoral des instruments, celui qui s’allie le mieux avec la solitude et la campagne ; il y retrouvait l’âme de Théocrite de Sicile, et il excellait dans cet instrument. […] La poésie était son premier goût. […] Il monte de la grammaire à l’œuvre, au lieu de descendre de l’inspiration au style ; il sait façonner tout dans un goût vulgaire et joli, et peut tout ciseler avec agrément, jusqu’à l’éloquence de la passion. — C’est l’HOMME DE LETTRES. […] Or la multitude seule multiplie le salaire ; et, dans les plus belles des nations, la multitude ne cesse qu’à la longue d’être commune dans ses goûts et d’aimer ce qui est commun.
Pourtant, avec la prétention, le goût aussi de l’antique reprenait ; l’étude ramenait à des sources. […] Mais laissons parler là-dessus un témoin bien grave et hautement autorisé en toute matière, M. le duc de Broglie, qui, dans la Revue française de janvier 1830, venant constater, à propos de l’Othello de M. de Vigny, la révolution sensible qui s’opérait dans le goût du public, écrivait : « Chacun peut se rappeler les murmures qui interrompirent, lors de la première représentation du Cid d’Andalousie, cette scène charmante94 où le héros de la pièce, tranquillement assis aux pieds de sa bien-aimée, sans desseins, sans inquiétude, uniquement possédé de l’idée de son prochain bonheur, dans un profond oubli et du monde, et des hommes, et de toutes choses, l’entretenait doucement des progrès de leur amour mutuel, et lui rappelait, en vers pleins de délicatesse et de grâce, les premiers traits furtifs de leur muette intelligence. […] La façon du vers, libre dans sa forme, et souvent hardi sans système, ne rompait pas absolument avec l’ancien genre, mais jurait encore moins avec le goût nouveau99, avec le rhythme émancipé de 1828 ; et nous alors, poëtes de nouvelle volée, en le lisant, en notant ses coupes, en insistant sur ses mots familiers et simples, sur les gaietés de klefte lâchées à l’écho : Du pistolet joyeux il fait siffler la balle, nous disions, nous avions droit de dire : Il est des nôtres.
Le goût naturel de Mme de Longueville était celui qu’on a appelé de l’hôtel de Rambouillet : elle n’aimait rien tant que les conversations galantes et enjouées, les distinctions sur les sentiments, les délicatesses qui témoignaient de la qualité de l’esprit. […] Le petit avis au lecteur y répond bien mieux d’un seul mot : « Il faut prendre garde…, il n’y a rien de plus propre à établir la vérité de ces Réflexions que la chaleur et la subtilité que l’on témoignera pour les combattre141. » Voltaire, qui a jugé les Maximes en quelques lignes légères et charmantes, y dit qu’aucun livre ne contribua davantage à former le goût de la nation : « On lut rapidement ce petit recueil ; il accoutuma à penser et à renfermer ses pensées dans un tour vif, précis et délicat. […] Lorsqu’au fond l’esprit est droit et le cœur bon, après bien des efforts dans le goût, on revient au simple ; après bien des écarts dans la morale, on revient au virginal amour, au moins pour le contempler.
Qu’on cherche dans l’histoire des lettres à appliquer cette loi sévère aux hommes les plus honorés et qui, on avançant, ont conquis l’autorité la plus considérable comme organes du goût ou comme truchements spirituels de l’érudition, aux La Harpe, aux Daunou, aux Fontenelle, à Bayle lui-même ! […] on est ligueur en théorie, et on trouve les idylles de Fontenelle très-poétiques, comme on a la barbe en pointe ; il ne faut pas disputer des goûts ni des dilettantismes. […] Pourtant cette vie de Rennes, loin de Paris, et malgré tous les dédommagements des amitiés qu’il s’était formées, coûtait à ses goûts ; il ne tarda pas à désirer de nous revenir.
Enfant de notre Révolution, il a des ressemblances frappantes avec sa mère : intempérance de langage, goût de la basse littérature, passion d’écrire dans les journaux. […] Une douce conformité d’humeur et de goûts m’unissait étroitement à cette sœur ; elle était un peu plus âgée que moi. […] « On m’accuse d’avoir des goûts inconstants, de ne pouvoir jouir longtemps de la même chimère, d’être la proie d’une imagination qui se hâte d’arriver au fond de mes plaisirs, comme si elle était accablée de leur durée ; on m’accuse de passer toujours le but que je puis atteindre : hélas !
C’est vraiment charmant cette petite et rustique maison japonaise du Trocadéro, avec son enclos de bambous, sa porte aux grosses fleurs sculptées dans un bois tendre, ses petits arbres en paraphes d’écriture, ses parasols, sous l’ombre desquels se remuent des volatiles minuscules, ses resserres en essences joliment veinées : tout ce goût et tout cet art décoratif dans une habitation des champs. […] Autour d’elle, il y a une petite senteur sauvage, perdue dans un goût d’héliotrope. […] » — et parle avec émerveillement de Versailles… Lundi 23 septembre On cause d’une excentrique châtelaine des environs de Paris, dont le goût, la passion, l’idée fixe, est le maquerellage, et le maquerellage uniquement par perversion.
C’est ainsi encore que le plus ou moins de goût que l’historien peut avoir pour les édits du chancelier de L’Hôpital ne l’empêche pas de nous rendre fidèlement l’état des esprits à cette époque critique où le parti des protestants faillit prendre le dessus dans le royaume. […] Il est trop souvent de ces côtés bizarres et secrets dans le tempérament d’un chacun, de ces recoins de passion ou de vice qui se démasquent et se creusent en vieillissant : avec les années les goûts cachés se découvrent.
Il s’agit bien de vos goûts et de vos préférences ! […] Car c’est dans la nature, bien plus que dans les livres, qu’il faut chercher des inspirations pour un enseignement qui doit demeurer élémentaire, pratique et toujours approprié aux intelligences moyennes… À mesure que l’enseignement se fortifie, on peut donner aux exercices un caractère plus profitable ; poser aux élèves des problèmes numériques et en faire contrôler la solution de temps en temps… Par quelques exercices de ce genre, les jeunes gens apprennent bientôt à calculer, à peser, à mesurer, et on leur inspire le goût de l’expérience avec la confiance dans ses enseignements.
lorsque Casaubon allait entendre à Saint-Paul ou ailleurs (car il se laissait mener volontiers aux églises catholiques) quelqu’un des prédicateurs du temps si détestables de goût, le célèbre Valladier, par exemple, faisant le panégyrique de la Vierge, célébrant les louanges de Marie, il se sentait redevenir très protestant, et il avait quantité de réponses toutes prêtes à opposer à du Perron ; au contraire, il y avait des jours où quand il sortait d’un prêche, d’un sermon protestant de Du Moulin, il se sentait rejeté vers les catholiques. […] Le plus grand inconvénient pour notre savant dans cette nouvelle et dernière patrie, c’est que le goût du roi le dirigea sur la théologie et le poussa à écrire contre Baronius.
Rousset a, dès l’origine, une théorie du caractère et de la fonction de Louis XIV, qui est celle des opposant et des mécontents, et que je ne crois pas très justifiée, si on y regarde de près : « Louis XIV, nous dit-il, avait, comme Philippe II, le goût des détails ; ses ministres encouragèrent ce goût et le poussèrent même à l’excès ; en trompant par la multiplicité des affaires un appétit de travail qui était réel et sérieux, ils l’assouvissaient d’abord par les petites et tenaient les grandes en réserve ; mais toutes lui étaient présentées.
Le goût des arts et de la Renaissance s’y marquait encore. […] Peut-on s’étonner qu’il fut vite repris du goût des affaires ?
Il s’agit de ceux qui ont le goût et la passion des collections. […] Les collections en grand, et faites par des curieux, gens de savoir et de goût, ne sont autre, chose que les éléments de la science même, les données positives qui permettent, là où il y avait lacune, de combler les vides, d’asseoir des conjectures, d’établir des suites et des lois.
Notre siècle, un peu revenu depuis quelque temps du goût des révolutions en politique, a reporté cette passion assez innocemment dans l’histoire littéraire : il n’aime rien tant en ce genre que de défaire et de refaire, de détruire ou de créer ; il a un goût décidé pour déterrer ou réhabiliter des inconnus de la veille, et pour renverser de grands noms, des noms consacrés.
Léo Joubert, en avaient donné depuis longtemps, dans nos principales Revues, des analyses qui avaient mis en goût tous les bons esprits. […] C’est dans le texte infime, dans l’étude des tours, des idiotismes propres à l’improvisateur, de ses artifices, qu’il faut chercher la solution de la question que vous venez d’effleurer. » Ici nous rentrons dans les sentiments et les nuances du goût individuel, dans ce qu’il y a de moins transmissible et de moins démontrable.
Doux quand il lui plaît, gracieux, affable, jamais importuné quand même il l’est le plus ; gaillard, amusant ; plaisant de la bonne et fine plaisanterie, mais d’une plaisanterie qui ne peut offenser ; fécond en saillies charmantes ; bon convive, musicien ; prompt à revêtir comme siens tous les goûts des autres, sans jamais la moindre humeur ; avec le talent de dire tout ce qu’il veut, comme il veut, et de parler toute une journée sans toutefois qu’il s’en puisse recueillir quoi que ce soit, et cela même au milieu du salon de Marly, et dans les moments de sa vie les plus inquiets, les plus chagrins, les plus embarrassants. […] Un peu de folie dans son talent, un peu de vertu dans son égoïsme, ajoutaient aux variations de ce Protée que la Cour avait vu changer successivement de parti, de goûts, de mœurs, et qui probablement aussi eût changé d’amis s’il en avait eu.
Mais si vous voulez, Sire, qu’on rompe le silence, c’est à vous de l’ordonner. » Louis XV accepte de bonne grâce cette ouverture et lui permet de libres avis ; il avait du goût pour ce genre de correspondance particulière, j’allais dire cachotière, en dehors de ses ministres en titre ; ce n’était pas précisément un insouciant que Louis XV, c’était même un curieux ; il aimait à tout savoir, le pour et le contre sur les choses et sur les gens, sauf à en très peu profiter et à n’en rien faire. […] Fénelon n’était pas un flatteur ou il ne l’était qu’avec goût, lorsque dans son Mémoire sur les occupations de l’Académie française, et conseillant à la docte Compagnie de donner une Rhétorique et une Poétique, il disait : « S’il ne s’agissait que de mettre en français les règles d’éloquence et de poésie que nous ont données les Grecs et les Latins, il ne vous resterait plus rien à faire : ils ont été traduits… Mais il s’agit d’appliquer ces préceptes à notre langue, de montrer comment on peut être éloquent en français, et comment on peut, dans la langue de Louis le Grand, trouver le même sublime et les mêmes grâces qu’Homère et Démosthène, Cicéron et Virgile, avaient trouvés dans la langue d’Alexandre et dans celle d’Auguste. » Il y aurait à dire aux analogies, mais ce qui est certain, c’est que, s’il est naturel et juste de dire la langue de Louis XIV, il serait ironique et ridicule de dire la langue de Louis XV.
Il n’était pas sans un certain goût pour les vers, les couplets, ce qu’on appelle les choses de l’esprit. […] écrivait-il au sortir de là à la princesse de Guise ; il est aimable comme s’il n’était qu’un particulier… Je crus n’y voir qu’un prince et j’y rencontre un homme. » Le comte de Clermont dut à cette circonstance de se voir nommé dans les premières éditions du Temple du Goût ; mais cette mention de faveur disparut et tomba, comme tant d’autres noms éphémères, à l’édition définitive.
Dans une jolie pièce de vers, adressée à un riche agriculteur de Toulouse qui lui donnait ce conseil, il réfute agréablement les raisons flatteuses par un tableau de ses goûts et de ses simples espérances : « Dans ma ville, où chacun travaille, laissez-moi donc comme je suis ; chaque été, plus content qu’un roi, je glane ma petite provision d’hiver, et après je chante comme un pinson, à l’ombre d’un peuplier ou d’un frêne, trop heureux de devenir cheveux blancs dans le pays qui m’a vu naître. […] Nous concevons que Goudouli, au commencement du XVIIe siècle, ait été plus nourri dans son style des purs idiotismes provençaux, et que la saveur de ses vers garde mieux le goût de la vraie langue.
Je confesserai pourtant, avant d’aller plus loin, ma faiblesse : je suis de ceux qui ont toujours reculé devant cette poésie Louis XIII, et je n’ai jamais pu m’en inoculer le goût ; tout en désirant qu’il s’en écrivît une histoire exacte et critique, et en croyant qu’il en résulterait des jours curieux et utiles sur la formation définitive du genre Louis XIV, il m’a été impossible d’admirer à aucun degré (j’excepte bien entendu Corneille et Rotrou) aucun de ces poëtes. […] Tout cela est trop, le goût aussi bien que l’âme s’en offense, et de tels passages marquent un défaut de bon esprit autant et plus que les deux fameux vers de Pyrame et Thisbé.
La grande époque de notre ancien théâtre, au moins par l’éclat des représentations, par le goût déclaré du peuple, par le nombre ou le développement des pièces qui nous sont conservées, est le xve siècle ou plutôt le siècle qui s’étend de la moitié du xve à la moitié du xvie : le genre dramatique, abstraction faite de la valeur poétique et littéraire des œuvres, se développe le dernier, à l’extrême limite du moyen âge. […] Cette partie descriptive se prolonge comme si le goût de l’auteur et du public en faisait le principal agrément de la pièce.
Il y a là, de la mesure, du goût : cette énormité a quand même quelque chose de parisien, un je ne sais quoi, mais sensible. […] L’orateur a trop d’apostrophes à la façon de Bossuet : « Onction de la vérité, sages conseils, prescriptions salutaires, pressez-vous sur mes lèvres », etc Il a trop, à mon goût, de solennelle phraséologie oratoire, de formules guindées : « Cette conclusion n’est pas le fruit de mon interprétation privée.
Le bonheur suppose, lui aussi, la diversité des goûts et des préférences. […] Or il n’est pas certain que cette différenciation sociale soit toujours calquée sur la différenciation native, physiologique, des individus sur la différence des aptitudes et des goûts.
Je n’ai réussi que bien imparfaitement à rendre cette physionomie singulière, originale, attrayante, si peu gallicane et si française, qui plaît jusque dans ses hasards, où le naturel se dégage en jets heureux de quelques bizarreries de goût, où l’audace ne compromet pas de réelles beautés ; cet orateur au vêtement blanc, à l’air jeune, à la parole vibrante, aux prunelles de feu, et dont les lèvres, faites pour s’ouvrir et laisser courir la parole, expriment à la fois l’ardeur et la bonté. […] Vous en faites un Balzac ridicule ; Érasme n’était qu’un Voltaire modéré, un Fontenelle au goût littéraire plus sain, le précurseur de Rabelais sans ivresse, un sage qui, venu trop tôt et placé entre des partis extrêmes dont il ne pouvait épouser aucun, demandait la permission de rester neutre.
Guizot était purement politique, je le laisserais passer sans le croire de mon ressort, fidèle à mon rôle et à mon goût, qui sont d’accord pour s’en tenir à la littérature ; mais ce Discours n’est politique que par le sens et par le but ; il est purement historique de forme et d’apparence, et, comme tel, je ne saurais le négliger sans paraître manquer à une occasion et presque à une opportunité. […] Tout en écrivant beaucoup, tant par goût que par une nécessite honorable, il se dit qu’il était de ceux qui deviennent ministres et qui gouvernent.
Le texte, typographiquement, est admirable ; les titres sont d’un grand goût ; les portraits sont beaux : je ne trouve à blâmer que les espèces de vignettes qui terminent les pages à la fin des chapitres, et qui font ressembler par moments ce volume royal à un livre d’illustrations : ces enjolivements, dont le sujet est souvent énigmatique, ne conviennent pas à la gravité monumentale de l’édition. […] Toutes les petites biographies des électeurs primitifs, de qui il n’y a pas grand-chose à dire, sont esquissées avec sobriété et dans un goût sévère.
Mais on sent que Rulhière était des plus propres, en effet, à composer une comédie de cette sorte dans le genre et dans le goût du Méchant. […] Les regrets qu’excita la mort de Rulhière parmi ceux qui jouissaient de sa société, montrent assez qu’il ne faut pas prendre à la lettre la réputation de méchanceté qu’on a voulu lui faire ; il a dû se calomnier lui-même par son goût et son talent pour l’épigramme.
On entre dans ce qui est du goût personnel et particulier, dans ce que la folle du dedans s’est mise à chérir par choix et à revêtir amoureusement à sa manière. […] Si j’avais pourtant à le faire, je dirais que, malgré des fautes trop fréquentes et de mauvaises habitudes de goût, jamais peut-être la vraie matière poétique en circulation n’a été plus abondante, jamais la main-d’œuvre plus vulgarisée, et plus à la portée de ceux qui en abusent comme de ceux qui en sauront profiter.
Remercions donc cette Société, composée d’amateurs de beaux livres, d’appliquer si bien son goût et sa munificence : et venons-en à l’étude du personnage même qu’elle nous aide à mieux connaître. […] Il faudra près d’un siècle pour réformer complètement ce vice de goût ; il faudra que Mme de Rambouillet et sa fille viennent morigéner la Cour, que des professeurs de bon ton et de politesse, tels que Mlle de Scudéry ou le chevalier de Méré, s’appliquent pendant des années à prêcher le décorum : et encore trouverait-on bien des retours et des vestiges de grossièreté tout au travers de leur raffinement et de leur formalisme.
Dans les sens les plus nécessaires à la vie et les plus primitifs, comme ceux du goût, de l’odorat, du toucher, de la température, il n’y a rien d’indifférent, tout est agréable ou pénible. […] Une sensation violente enlève la perception et le discernement ; si nous buvons une tasse de café bouillant, nous ne discernons nettement ni le goût du café ni la place où la brûlure a lieu ; la douleur seule remplit la conscience, et non ses relations.
Dans La Maison d’un artiste au dix-neuvième siècle, j’écris l’histoire de l’art industriel de l’Occident et de l’Orient, et l’on ne se doute pas, à côté de moi, que je prends la direction d’un des grands mouvements du goût d’aujourd’hui et de demain. […] * * * — Quelqu’un m’entretenait du goût d’art de Richard Wallace, achetant le cor de chasse de Saint-Hubert, non pour l’intérêt de l’objet, mais pour l’histoire qui s’y rapporte, et qu’il pourra raconter au prince de Galles, la première fois qu’il le lui montrera.
Les objections se suscitent les unes les autres ; je prévois : Verlaine avait-il quelque goût pour la musique ? […] Sans admettre que le vers devienne un verset complet, et là le goût et l’oreille sont suffisants pour avertir le poète, on peut grouper en un seul vers trois ou quatre éléments ayant intérêt à ce que leur jaillissement soit resserré.
Le pape Clement XI qui avoit beaucoup de goût pour les arts, et qui aimoit les antiquitez, n’aïant pu empêcher la destruction des peintures de la vigne Corsini sous le pontificat d’un autre, n’a point voulu que les curieux pussent reprocher au sien de pareils accidens, qui sont pour eux des malheurs signalez. […] Pline parlant encore d’un tableau d’Aristide qui representoit une femme percée d’un coup de poignard, et dont l’enfant sucçoit encore la mammelle, s’énonce avec autant de goût et de sentiment que Rubens l’auroit pû faire en parlant d’un beau tableau de Raphaël.
Goût pour les paris risqués. — Les hypothèses cosmogoniques, ethniques et zoologiques des noirs. — Conclusion. — But de l’auteur : planter des jalons pour faciliter le travail de ceux qui voudront approfondir une matière digne d’une étude plus poussée que celle-ci. […] Il reste encore à signaler le goût des noirs pour des paris dont l’enjeu est souvent leur propre vie (V.
Par une sorte d’hérédité romantique ils affichent des airs d’excentricité et manifestent leur goût pour les innovations ; dans le fond, ils sont pourris de la banalité de notre époque. […] Mais tous ceux qu’il avait indiqués comme faisant partie de sa combinaison ont protesté dans Le Figaro contre une tentative d’embauchage qu’ils ne trouvaient pas de leur goût.
Et cependant, ne nous y trompons pas, ni le talent qui est suprême en ces Mémoires, — qui va jusqu’au génie, quand il ne s’agit que de peindre, mais qui n’y va pas, quand il s’agit de juger, — ni le sujet de ce récit, grand, varié, et pour nous, les démocrates du xixe siècle, déjà merveilleux comme une lointaine épopée, ni les hasards d’une publication qui a aiguisé le goût public et l’a fait attendre avant de le satisfaire, ni même, ce que nous ne comptions pas tout d’abord, la rareté des livres sur le siècle de Louis XIV, rareté étonnante et qui vient de la peur qu’inspirait Voltaire, lequel l’avait pris pour sa part de lion et faisait trembler d’y toucher les superstitieux de son génie, ne peuvent suffisamment expliquer l’amour que Saint-Simon, presque inconnu, presque dédaigné au xviiie siècle, a trouvé tout à coup parmi nous. […] Il l’accusa de goût pour les subalternes et de jalousie basse contre son frère, Monsieur, l’homme le plus méprisable du royaume et du temps, et il releva le tout par un orgueil, à la Nabuchodonosor, qui méritait de paître l’herbe des gazons de Versailles !
et contre le goût, et quel goût !
Nous aurions mieux aimé une action une et déterminée, choisie délibérément dans la vie de Napoléon ; mais ce n’est pas de notre goût qu’il s’agit ici. […] Les triomphes poursuivis sans nécessité ne sont pas de son goût : elle ne conçoit pas la victoire sans modestie. […] Dans le rôle d’Agnès, mademoiselle Anaïs ne blesse pas le goût ; mais elle manque de simplicité. […] Il a défendu pied à pied contre la déclamation vulgaire et le paradoxe anecdotique le terrain du goût et du bon sens. […] Les rimes qu’il daigne assembler pour nos plaisirs et notre enseignement ne relèvent pas de notre goût.
Ainsi un feuilletoniste, qui s’efforce de m’être agréable, dira par exemple : « Jeune, quand vous alliez à l’Abbaye-au-Bois, vous écoutiez ; maintenant, c’est votre tour de parler, on vous écoute… » Il semblerait en vérité que, dans ce charmant salon où présidaient la politesse et le goût, M. de Chateaubriand eût charge de rendre des oracles et que le rôle des autres fût de l’écouter bouche béante.
Il a soin de nous prévenir, dans une des intéressantes notices précédemment indiquées, que jamais il n’eut, comme tant d’autres poëtes au début, d’époque rude et nécessiteuse à traverser ; ses goûts d’étude et d’imagination ne furent jamais contrariés, et il ne fit que s’épanouir dans un loisir riant au souffle qui le favorisait.
Mais à la pauvreté hautaine, étalée et presque cynique de Jean-Jacques, à la délicatesse de haut goût et un peu aristocratique de M. de Custine, à cette longue demande d’indispensables millions et de liste civile littéraire par M. de Balzac, je ne veux opposer, comme vérité, tact et dignité, qu’une page d’un écrivain bien compétent : « En vous rappelant sans cesse, écrit quelque part M. de Sénancour, que les vrais biens sont très supérieurs à tout l’amusement offert par l’opulence même, sachez pourtant compter pour quelque chose cet argent qui tant de fois aussi procure ce que ne peut rejeter un homme sage.
Walewski est dans le cas de nous tous, journalistes et littérateurs par goût, par convenances (qu’il le sache bien, car en bonne compagnie les nécessités mêmes s’appellent des convenances), littérateurs à nos moments perdus (et nous en perdons beaucoup) ; il ne faut pas qu’il s’imagine que nous soyons plus contraints au métier que lui ; nous sommes tous des amateurs, et il est étrangement venu à nous dire : « La presse qui semblait devoir, au moins par générosité, accueillir avec indulgence un homme du monde et lui faire les honneurs de la république des lettres, la presse, c’est-à-dire une partie de la presse, s’est montrée peu courtoise. » La presse ne devait et ne doit rien à M.
J’ai regretté l’autre jour, je l’avoue, de ne pas être un peu de l’opposition, afin d’être plus en droit de dire ce que je pensais après avoir lu l’excellent et spirituel discours que M. le comte de Persigny a prononcé à Montbrison ; mais enfin de ce qu’on a l’honneur d’être, par goût et par choix, le serviteur et l’ami des gens, ce n’est pas une raison pour éviter de dire d’eux le bien que l’on pense.
La condition de simple particulier convient mieux à mes goûts.
Georges Pioch Parce qu’il participe de la vie par cet amour qui souffre et jouit d’homme à femme, parce qu’il la surpasse en bonté et la domine par le pardon, ce livre (Les Quatre Saisons), qui nous vient avec le printemps, peut-il être admiré et chéri comme le commentaire généreux d’une année ; mieux même : de l’Année… Le goût littéraire y cueille des joies rares : celles qu’un art hautain et délicat procure et que fortifie le rayonnement d’une libre pensée ; celles, aussi, d’une surprise.
Le flamboiement de l’alcool brûlait dans ces ténèbres ; il y avait déjà, je ne veux pas l’oublier, des pages délicieuses ou ravagées de sauvages passions et qui donnaient le goût de grands rêves nocturnes, dans les brumes de sa flottante Thulé.
J’ose dire que, parmi nos poètes, il est, avec Victor Hugo, dans un goût très différent, le plus grand trouveur de symboles.
Il y eut dans cette génération beaucoup de goût pour la justice et la vérité.
Cette dame (madame Scarron) a parlé de vous avec une tendresse et une estime extraordinaires ; elle dit que personne n’a jamais tant touché son goût, qu’il n’y a rien de si aimable ni de si assorti que votre esprit et votre personne. » Cette lettre est rapportée ici pour montrer l’union et la conformité de mœurs et d’esprit qui existaient entre madame Scarron, madame de Sévigné, sa fille, et leur société.
Il est certain encore que ses Adversaires n’ont jamais pu lui contester le mérite des talens : il faudroit être bien injuste ou bien aveugle, pour ne pas convenir, après la lecture de ses Ouvrages, que peu d’Auteurs parmi nous ont l’esprit aussi vigoureux, le goût aussi sûr, & le style aussi piquant.
Mais il joignoit à ce goût celui du monde, du jeu, de la table & de la société ; le luxe, le faste & la magnificence.
Ce fut le sçavant Lazare Baïf qui lui donna le goût des belles-lettres.
L’illustre Pope, par humanité pour vous, a bien voulu rendre compte à la postérité de votre esprit, de vos ouvrages, de vos goûts, de vos mœurs, du temps de votre naissance & de votre mort.
Je n’ignore pas qu’une belle édition dont les caracteres bien taillez et bien noirs sont rangez dans une proportion élegante sur du papier d’un bel oeil, ne fasse un plaisir sensible à la vûë ; mais ce plaisir plus ou moins grand suivant le goût qu’on peut avoir pour l’art de l’imprimerie, est un plaisir à part, et qui n’a rien de commun avec l’emotion que cause la lecture d’un poëme.
Lui, qu’il serait infâme de mettre aux mains de l’enfance, que toute femme laissera tomber des siennes, et dont le vieillard à cheveux blancs rougira d’avoir eu le goût… autrefois, n’en a pas moins mis sur l’esprit du temps qui a suivi le sien une empreinte qu’une moitié de siècle, avec deux Bonaparte et un Joseph de Maistre, n’a pas pu encore effacer !
C’est une bretonne qui n’a jamais perdu le goût de son terroir, et qui nous le fait partager.
Un trait moins particulier, mais bien frappant encore, est le goût des philosophes français pour la psychologie, leur penchant à l’observation intérieure.
Près de Corinne, Pindare semble avoir reçu des conseils de goût, encore plus que des inspirations musicales.
En quoi cela concerne-t-il les hommes de lettres, les vrais, au goût du jour ? […] Il y a aussi un horrible danger pour les auteurs, même les plus illustres ; c’est qu’on a de moins en moins le temps et peut-être le goût de tout lire. […] C’est bien un goût de folâtrerie, d’ailleurs assez légitime et à peu près inévitable, avec cette nature de poète, qui le conduisit au catholicisme. […] Ce goût pour l’observation de la nature et pour la science expérimentale contrastait avec le fameux idéalisme de Schiller : Goethe n’y renonça nullement. […] — à ce que nous accablions d’insultes l’homme qui a un goût passionné pour la civilisation de la France… » etc.
C’en était fait de l’épicurisme élégant où son imagination délicate s’était complu jusqu’alors ; et c’en était fait de ce goût du romanesque et du rêve où l’on avait pu craindre qu’il ne s’attardât. […] Comme professeur de rhétorique, il ne se peut pas, me disais-je, qu’une Charogne, ou le Voyage à Cythère n’offensent et ne révoltent la délicatesse de son goût. […] Ou plutôt, avec le goût que les hommes, en général, ont pour la contradiction, qui répondra que ce n’est pas nous, en l’attaquant, dont la maladresse lui suscitera des sympathies inattendues ? […] Le bon critique ne met point le public dans la confidence de ses goûts ; et, dans un genre faux, bâtard ou douteux, il n’est écrivain qui ne perde la moitié de son talent. […] Gens de goût avant tout, les bons pères eux-mêmes ne parlent jamais sans quelque coupable complaisance de ce petit polisson d’Arouet.
Traduisons correctement la pensée qu’une modestie de bon, — goût l’empêchait d’exprimer tout entière. […] Ma femme est une bonne femme, qui ne manque ni de sens ni de goût, et il lui a fait plaisir. […] Si cela m’est arrivé, je vous en demande mille pardons… Permettez que mon ouvrage paraisse, et ne contraignez pas l’artiste à toucher à la figure principale contre son propre goût. […] Rien ne contribue davantage à rendre une nation grossière, détruire le goût, abâtardir l’éloquence et toute sorte d’esprit. […] Heureusement que ce qu’il y a d’invinciblement déplaisant dans la suffisance était tempéré chez lui par un goût naturel pour la bouffonnerie.
Je suis sûr qu’il y a des gens que je considère comme des imbéciles, précisément parce qu’ils ont en littérature les goûts que j’ai en musique. […] Et chacun aurait, bien entendu, le droit d’employer l’une ou l’autre, selon son goût ou ses prétentions, ou même selon les circonstances. […] Vous aimez encore mieux ces belles vertus quand il s’y joint un peu de « panache » ; mais ce goût est bien de votre âge. […] Vous prendrez goût aux petites intrigues de couloir. […] Nos gentilshommes eurent pourtant, autrefois, de l’initiative et du goût en ces matières.
Je sentais qu’elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu’elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. […] Ce goût c’était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l’heure de la messe), quand j’allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m’offrait après l’avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. […] Plus loin Swann procède de la même façon, suivant la même méthode que Proust compare lui-même à la méthode historique et à la critique des textes, pour découvrir — bien tardivement, il est vrai — les goûts pervers d’Odette. […] Ce qu’il fallait c’est que notre goût pour lui devînt exclusif. […] D’ailleurs, ce goût elle l’apporte dans ses toilettes, dans son jeu.
En un tel lieu, c’eût été un manque détestable de goût. […] Le goût y est rehaussé par les plus rares épices de la psychologie et même de la physiologie. […] Il avait aussi le goût et le sentiment de la mignardise. […] Te réjouis-tu du sort de ce Pauson qui vécut dans le mépris et dans l’extrême pauvreté à cause de son goût trivial ? […] C’est pourquoi les Nymphes le changèrent en olivier sauvage dont le fruit par son âpreté et son aigreur rebute le goût.
. — Son goût classique. — En quoi ce goût l’a servi. — Childe Harold. […] Mais j’étais un fou alors, et je ne suis pas beaucoup plus sage aujourd’hui1241… » Il ne le fut jamais : lectures énormes au collége, exercices violents plus tard à Cambridge, à Newstead et à Londres, veilles prolongées, débauches et jeunes outrés, régime destructif, il se ruait en avant jusqu’au fond de tous les goûts et de tous les excès. […] Bien, vous allez avoir pis ; voilà pour votre peine. » Cet instinct de révolte est dans la race ; il y a tout un faisceau de passions sauvages1245, nées du climat et qui le nourrissent : l’humeur noire, l’imagination violente, l’orgueil indompté, le goût du danger, le besoin de la lutte, l’exaltation intérieure qui ne s’assouvit que par la destruction, et cette folie sombre qui poussait en avant les berserkers scandinaves lorsque, dans une barque ouverte, sous un ciel fendu par la foudre, ils se livraient à la tempête dont ils avaient respiré la fureur. […] Ce sont ces écrivains, à son avis, qui ont gâté le goût public. […] Ce sont ses opinions, ses souvenirs, ses colères, ses goûts qu’il nous étale ; son poëme est une conversation, une confidence, avec les hauts, les bas, les brusqueries et l’abandon d’une conversation et d’une confidence, presque semblable aux mémoires dans lesquels le soir, à sa table, il se livrait et s’épanchait.
Son goût pour les spectacles. […] Revenu à Paris, Poquelin s’abandonna avec ardeur à son goût pour les spectacles. […] Ce fut le 18 novembre 1659 que Molière livra cette attaque au faux goût. […] Non content d’avoir pour lui le suffrage des gens de goût et des spectateurs impartiaux, Molière voulut mettre encore les rieurs de son côté. […] Cet aimable héros de boudoir, forcé de sortir de France, avait emporté aux bords de la Tamise et ses goûts passagers et sa changeante humeur.
D’autres symptômes, aussi bien, présageaient une révolution de la littérature, et, au premier rang, le goût non pas certes nouveau, mais raisonné désormais, dont on commençait à s’éprendre pour les littératures étrangères. […] Le Vieux Célibataire, Les Cinq Étages], — à développer la défiance ou la haine. — Qu’il ne faut pas chercher ailleurs les raisons de la popularité de Béranger ; — et que c’en est d’ailleurs la justification ; — si ce goût de la polissonnerie ; — ce refus de penser ; — et cet esprit d’opposition « quand même » ; — ne sont malheureusement pas les moins certains des caractères qu’on enveloppe sous le nom de gauloiserie. […] II, 1850] en a proposé la classification suivante : 1º Chansons anciennes, dans le goût de Panard et de Désaugiers : Le Roi d’Yvetot ; La Gaudriole ; M. […] Il a dû à d’autres raisons ; — différentes quoique connexes ; — de survivre lui-même au romantisme ; — et par exemple à son goût du « petit fait » ou du fait précis et « documentaire » ; — à sa tendance à transformer en lois de l’esprit ou de la nature des anecdotes particulières ; — à sa manière d’écrire, anonyme ou impersonnelle, mais surtout « analytique » ; — et d’ailleurs à la valeur de quelques-unes de ses observations. — Si cependant la valeur même « documentaire », — et surtout la valeur littéraire de La Chartreuse de Parme, 1839, — sont aussi considérables qu’on l’a quelquefois prétendu ? […] Surya, Bhagavat] ; — et qu’il y faut rapporter les origines du pessimisme du poète ; — son goût pour l’exotisme, — et sa conception d’une poésie « naturaliste et scientifique ».
. — Autre goût de gentilhomme, qui est une suite du précédent : la chasse. […] Telle est celle du duc de Gesvres, premier gentilhomme de la chambre, gouverneur de Paris et de l’Ile-de-France, ayant en outre les gouvernements particuliers de Laon, de Soissons, de Noyon, de Crépy en Valois, la capitainerie de Mousseaux et vingt mille livres de pension, véritable homme de cour, sorte d’exemplaire en haut relief des gens de sa classe, et qui, par ses charges, sa faveur, son luxe, ses dettes, sa considération, ses goûts, ses occupations et son tour d’esprit, nous représente en abrégé tout le beau monde196. […] Superbement vêtu, beau, galant, d’une politesse exquise, le moindre de ses sourires était une grâce. « Son visage toujours riant inspirait la confiance ; il avait la vraie physionomie de l’homme destiné à représenter. » Telle est aussi l’attitude et l’occupation des principaux seigneurs laïques, chez eux, en été, lorsque le goût de la chasse et l’attrait de la belle saison les ramènent sur leurs terres. […] Ayant trouvé à son goût un mets qu’on lui avait servi, elle y revint, et alors elle parcourut des yeux le cercle devant elle… et dit : « M. de Lowendal ?
Mais avec une génération d’hommes mûrs il n’y a rien à faire, ni pour le corps, ni pour l’esprit, ni pour le goût, ni pour le caractère. […] Celui qui ne vous connaît pas ne croirait guère que vous avez des goûts si pratiques. […] Avec vos goûts d’archer vous êtes arrivé à de très jolies connaissances, et à des connaissances vivantes, à celles que l’on n’obtient que par des moyens pratiques. […] — Je m’en suis occupé avec goût depuis mon enfance, et pour elles mes yeux et mes oreilles ont toujours été ouverts.
Prenons un exemple : soient A et B deux phénomènes externes : la couleur et le goût d’un fruit ; — soient a et b les sensations visuelle et gustative produites dans l’organisme par ce fruit : tant que nous n’examinons que le rapport À B, nous faisons une étude physique ; tant que nous n’examinons que le rapport a b, nous faisons une étude de physiologie, « Mais nous passons dans le domaine de la psychologie dès que nous cherchons comment il peut exister dans l’organisme un rapport entre a et b qui d’une manière ou de l’autre répond au rapport entre A et B. […] « Tel est le cas du minéralogiste qui, pour reconnaître si une masse de matière peut être appropriée à un certain usage, en examine le mode de cristallisation, la couleur, la texture, la dureté, le clivage, la fracture, le degré de transparence, l’éclat, le poids spécifique, le goût, l’odeur, la fusibilité, les propriétés électriques et magnétiques, et dirige sa conduite d’après toutes ces choses prises ensemble. » La correspondance entre l’être et son milieu s’est donc constituée pleinement par des conquêtes successives ; il ne reste plus qu’à coordonner ces divers éléments. […] Mais cette classification implique quelque chose de plus que la sensation actuelle, à savoir des attributs tangibles, une odeur, un goût, une structure intérieure qui, à la suite de la sensation visuelle, ne sont qu’inférés. Et ce qui le prouve, c’est que cet objet peut être une simple imitation, un trompe-l’œil : en ce cas, le goût, le toucher, l’odorat rectifient mon inférence et l’objet n’est plus classé parmi les oranges.
» Oui, c’est vraiment positif, au fond le scientifique est devenu le goût de toutes les intelligences, depuis les plus hautes jusqu’aux plus basses, et ne voilà-t-il pas une pauvre petite créature, qui au lieu de couper des romans au bas des journaux, coupe des articles de science, et a l’envie passionnée d’aller à un cours médical, comme autrefois l’une de ses pareilles avait l’envie d’aller au bal. […] Nous montons, un moment, dans le haut de l’atelier, joliment arrangé dans le goût anglais. […] Il parle de bouillabaisses mangées sur des côtes sauvages, où le feu fait avec des lentisques et des branches de genévrier donnait un goût inoubliable au poisson. […] Enfin, Messieurs, en ce temps où l’argent menace d’industrialiser l’art et la littérature, toujours, toujours, et même en la perte de sa fortune, Flaubert résista aux tentations, aux sollicitations de cet argent ; et il est peut-être un des derniers de cette vieille génération de désintéressés travailleurs, ne consentant à fabriquer que des livres d’un puissant labeur et d’une grande dépense cérébrale, des livres satisfaisant absolument leur goût d’art, des livres d’une mauvaise vente payés par un peu de gloire posthume.
Un autre élève de Malherbe, et le seul après Racan qui mérite un souvenir, parce qu’il est le seul qui ait laissé en poésie, et dans le goût du maître, quelque chose de durable, c’est Maynard. […] On aura plus tard d’éclatants retours, et plus d’un jet moderne surpassera en puissance et en largeur la source première : on ne retrouvera plus cette veine charmante et trop peu suivie, qui n’a d’ancien qu’une plus douce couleur, cette veine non plus italienne, ni grecque, ni espagnole, mais purement française de ton et de goût jusque dans ses réminiscences d’Horace.
Lus aujourd’hui, ils plaisent encore ; ils montrent surtout combien le goût public a changé, et comment on demande moins souvent qu’autrefois aux auteurs de ces vers qu’on appelait spirituels. […] Cowper est profondément chrétien ; l’austérité domine même trop chez lui, au point de vue de la mesure et du goût.
Les nombreux amis auxquels il lut, cahier par cahier, ces mémoires dont il était si fier, eurent raison d’en féliciter l’auteur, de lui donner des encouragements et des conseils ; de lui recommander « de les continuer dans le plus grand détail qu’il pourrait », de ne rien retrancher « de ce qui peint l’homme dans les moindres circonstances de sa vie », de ne pas trop céder sur ces points au goût simple et un peu nu du trop classique abbé Fleury, lequel en fut d’ailleurs très satisfait. […] Je lui ai lu le quinzième chapitre de l’Évangile de saint Jean, où il a pris un grand goût, disant : « Voilà toute ma consolation. » Puis ajoutant : « Il faut bien remercier Dieu de ce qu’il nous a donné une telle consolation dans nos maux, sans laquelle on y succomberait. » Il s’est promené environ une heure, puis on a continué la lecture des voyages, et le soir il y a eu symphonie.
Quoiqu’il se soit laissé faire et qu’il n’ait jamais refusé les fonctions publiques, tous ses penchants, toutes ses qualités étaient pour la vie privée : « Les goûts simples qui s’allient avec les études abstraites donnent une sorte de candeur, de timidité, qui fait aimer la vie domestique. » N’ayant de valeur que dans la solitude ou dans un cercle intime qui l’appréciait, et où ses facultés reluisent quelques instants, son état habituel, au sein d’une grande assemblée, tout le temps qu’il en fut membre, était un état de timidité et de crainte : Je me sens plus faible, disait-il, au milieu de tant d’hommes forts ; je ne me mets pas en rapport avec eux : je cesse d’être moi sans me confondre avec les autres. […] En 1814, il se donna pourtant un plaisir social bien en accord avec ses goûts méditatifs.
Ma conclusion bien sincère sur l’ensemble du talent de M. de Pontmartin, et malgré toutes ces critiques auxquelles je me suis vu forcé, ayant à combattre avec lui pied à pied et me trouvant réduit à la défensive, est qu’il y a de la distinction, de l’élégance, que c’est un homme d’esprit et d’un esprit délicat, auquel il n’a manqué qu’une meilleure école, et plus de fermeté dans le jugement et dans le caractère, pour sortir de la morale de convention et pour atteindre à la vraie mesure humaine, sans laquelle il n’est pas de grand goût, de goût véritable.
Je ne suis ni assez fou ni assez vain pour croire avoir pu lui inspirer du goût à mon âge ; mais, sur certains propos qu’elle tint à Thérèse, j’ai cru lui avoir inspiré de la curiosité. […] Il fuit le commerce du monde, il ne se plaît que dans la solitude ; ce goût pour la retraite lui a fait des ennemis : l’amour-propre de ceux qui l’ont recherché s’est trouvé blessé de ses refus.
Fauriel, qui excellait à ces sortes de comparaisons et qui, tout impartial qu’il était, n’inclinait que rarement par goût en faveur de notre littérature, comparant ensemble les deux Cids, se plaisait à remarquer comme différence l’abrégé fréquent, perpétuel, que Corneille avait fait des scènes plus développées de l’original, les suppressions, les simplifications de tout genre : « Chez Corneille, ajoutait-il avec un ricanement doucement ironique, on dirait que tous les personnages travaillent à l’heure, tant ils sont pressés de faire le plus de choses dans le moins de temps ! […] Tout homme studieux et de goût le lira avec intérêt, avec fruit.
Il cherche une mesure entre ses regrets pour l’Empire tombé et ses goûts pour la liberté renaissante. […] En un mot, il a le goût un peu hybride ; son esprit, qui est assez solide, n’a pas la trempe ni le fil : il ne lui a manqué peut-être que le dur besoin, la nécessité, cette pierre à aiguiser ; mais le fait est qu’il ne sépare pas nettement les choses, il ne discerne pas toujours vivement les personnes ; son métal n’est pas d’un son clair et net : il admet quelque amalgame. — À cela près, le plus galant homme, le plus droit, le plus véridique, je le crois sans peine, bon à écouter de temps en temps ou à parcourir, et méritant, comme je viens de le faire, qu’on aille glaner chez lui.
Nous supportons l’adversité non d’après tel ou tel principe, mais selon notre éducation, nos goûts, notre caractère, et surtout notre génie. […] Enfin il recherche de préférence, dans ce règne aimable, les plantes qui par leurs accidents, leurs goûts, leurs mœurs, entretiennent des intelligences secrètes avec son âme.
Il n’a point de raffinement ni de délicatesse : par certains excès de goût et de langage, il mène à Scarron et peut revendiquer une part de paternité dans la naissance du burlesque. […] Comme il n’y a pas encore de goût public, et qu’il n’y a plus de doctrine d’école, chacun suit en liberté la pente de sa pensée et va où les nécessités de sa vie intellectuelle et morale le poussent.
Les pièces étaient reçues par une sorte de comité national du goût public. […] si le besoin de tuer le temps nous conserve le théâtre, si le goût du spectacle nous sauve un art ?
Les pièces étaient reçues par une sorte de comité national du goût public. […] si le besoin de tuer le temps nous conserve le théâtre, si le goût du spectacle nous sauve un art ?
Si je m’abandonnais à mon goût personnel, je serais peut-être aussi peu favorable que vous à M. […] Littré, de même, avait le goût des simples ; les simples le lui rendirent.
La définition sera alors trop étendue ; car l’enfant qui voit une pomme, prévoit qu’elle sera résistante, douce au toucher et aura un certain goût. […] Point de mesure possible pour nos sensations, point de science ; ainsi il n’y a point de science des goûts ni des odeurs.
Dis-moi qui t’admire, et je te dirai qui tu es, du moins qui tu es par la forme du talent, par le goût. […] Ce ne sont là que des manques de goût et de délicatesse, qui caractérisent l’époque, et surtout le genre dont Rousseau est le type.
En causant, elle avait le don du mot propre, le goût de l’expression exacte et choisie ; l’expression vulgaire et triviale lui faisait mal et dégoût : elle en restait tout étonnée, et ne pouvait en revenir. […] Son goût littéraire était plus vif que sûr ; elle aimait, elle adorait Racine, comme le maître du cœur, mais elle n’aimait pas pour cela le trop fini, elle aurait préféré le rude et l’ébauché.
Je veux vous parler comme ferait un homme de plaisir à un autre, s’il a du goût et de l’esprit. » Et il s’exprime en conséquence, stimulant le plus qu’il peut le jeune homme vers les arrangements honnêtes et les plaisirs délicats, pour le détourner des habitudes faciles et grossières. […] Il faut savoir, même en littérature, tolérer les faiblesses des autres : « Laissez-les jouir tranquillement de leurs erreurs dans le goût comme dans la religion. » Oh !
Michaud et Poujoulat, avaient pu mettre en goût les lecteurs ; mais autre chose est un extrait où l’on ne prend que les beautés et la fleur d’un sujet, autre chose une reproduction exacte et complète des textes latins dans toute leur teneur, et des instruments mêmes (comme cela s’appelle) d’une volumineuse procédure. […] Ce n’est pas qu’une critique sévère et précise, une critique d’un goût simple ne pût relever dans ce brillant et vivant morceau bien des inexactitudes et des infractions au ton vrai du sujet.
Et ceci encore : Des sentiments élevés, des affections vives, des goûts simples, font un homme. […] Il a, sur la corruption du goût et sur les rapports du talent et des mœurs, des conseils sobres et sains, qui rappellent Vauvenargues : Le beau en tout est toujours sévère.
On nous le peint encore dans les années paisibles de son épiscopat, aimant la musique, faisant volontiers sa partie dans son intérieur avec ses chanoines et ses chantres avant ses repas : « Il se plaisait même à jouer des instruments, et souvent, avant le dîner, il touchait d’un clavecin, pour se mettre à table l’esprit plus dégagé après ses études sérieuses. » Ce goût du bon évêque alla jusqu’à entraîner des abus, et il s’introduisit dans sa cathédrale des nouveautés de chant qui scandalisèrent les classiques, les amateurs zélés de l’ancien plain-chant grégorien. […] Ses fautes, qu’un Méziriac relève si aigrement, d’autres érudits plus cléments et d’un goût meilleur les corrigeront sans grande peine.
Le goût du théâtre était très vif à cette époque ; on était las des Grecs et des Romains, et, depuis plusieurs années, aucune nouveauté n’avait réussi. […] En France, ce fut Corneille, Corneille seul, qui releva, comme disait Raynouard, le temple de Melpomène ; de telles locutions, sans propriété et sans goût, dérogeaient à la théorie même qu’on prétendait introniser.
Ainsi, quand je dis qu’elle était, par le goût, un peu contemporaine de Corneille, on voit dans quel sens il faut l’entendre, et qu’elle y corrigeait l’exagération. […] Elle conclurait volontiers sur le chapitre de la Cour comme a fait La Bruyère : « Un esprit sain puise à la Cour le goût de la solitude et de la retraite. » Elle aime dans ses Mémoires à moraliser, à donner des réflexions sérieuses qu’elle relève de citations agréables ; elle cite volontiers les poètes espagnols ou italiens, quelquefois Sénèque, plus souvent l’Écriture.
Il avait un goût prononcé pour l’histoire : celle de Charles XII par Voltaire le transporta. […] Veut-on savoir, par exemple, comment il apprécie tout d’abord le politique en Bonaparte, lorsque, lié au siège de Toulon et depuis avec les révolutionnaires ardents, Robespierre jeune et autres, plus terribles pourtant de nom que de fait, le futur César les domine déjà et songe à se servir d’eux pour les chances possibles : Éloigné par caractère de tous les excès, dit Marmont de Bonaparte, il avait pris les couleurs de la Révolution, sans aucun goût, mais uniquement par calcul et par ambition.
Ce sont les petites choses qui l’ont décidé, les petites vexations locales, de voir des abus de pouvoir dans l’endroit, de voir un homme trop puni pour avoir manqué au curé, d’entendre ce curé défendre le cabaret aux paysans le dimanche, enfin des querelles de maire et de garde champêtre ; c’est ce qui le décida pour l’opposition ; et, une fois piqué au jeu, il y prend goût : le talent, chez lui, qui cherchait jour et matière et qui s’ennuyait à ne point s’exercer, s’empare de ces riens et en fait à la fois des thèmes d’art achevés et de merveilleuses petites pièces de guerre. […] Dans le dialogue original et vif qu’on supposerait de l’un à l’autre, ils ne seraient d’accord que sur le Jupiter Olympien et contre Napoléon ; tous deux hommes d’humeur et ne voyant qu’un côté des choses ; mais Quatremère de Quincy plus élevé, et, au nom même de l’art antique et de la religion du goût, faisant honte à Courier de sa popularité politique, de mettre ainsi un talent d’Athénien au service des gens de La Minerve, et d’avoir pu dire sérieusement, dans une lettre adressée au Drapeau blanc : « Le peuple m’aime ; et savez-vous, monsieur, ce que vaut cette amitié ?
Il s’est surtout fait une solitude très animée, très conversante et selon ses goûts, à son château de Rheinsberg ou Remusberg qui est près de là : « Nous sommes une quinzaine d’amis retirés ici, qui goûtons les plaisirs de l’amitié et la douceur du repos. » Les occupations y sont de deux sortes, les agréables et les utiles : Je compte au rang des utiles l’étude de la philosophie, de l’histoire et des langues ; les agréables sont la musique, les tragédies et les comédies que nous représentons, les mascarades et les cadeaux que nous donnons. […] Je suis loin d’avoir épuisé l’ami en Frédéric : ses correspondances avec Jordan, avec La Motte-Fouqué, sont des témoignages non moins réels, non moins touchants peut-être que sa correspondance avec M. de Suhm ; mais celle-ci a cet avantage qu’elle est constamment élevée et pure, qu’elle ne contient ni plaisanteries littéraires ou morales d’un goût équivoque, ni mauvais vers.
Ses goûts étaient ceux d’un honnête homme qui avait du mouvement dans l’imagination, du trait dans l’esprit, et de bons sentiments dans le cœur. […] En se détournant de la muse tragique, Arnault, dans cette seconde moitié de sa vie, prit goût insensiblement à faire des fables ; il trouva de ce côté à employer et à fixer, sous une forme courte et vive, les qualités de son esprit.
., ont en commun le caractère essentiel d’être des moyens d’expressions peu représentatifs, et contenant un minimum d’images expresses : évidemment, ces moyens, à part le fait même qu’étant esquissés, on peut les compléter selon sa fantaisie, et qu’ils ne risquent guère ainsi de heurter le goût de personne, provoquent dans l’esprit ou dans les sens chargés d’en extraire une image définie, un effort, une excitation, un plaisir de divination et de composition, un ébranlement diffus qui est déjà un commencement d’émotion d’autant plus esthétique qu’elle est absolument dénuée de tout coefficient de peine ou de plaisir. « Comme il faut plus d’énergie, dit Dumont (Théorie scientifique de la sensibilité) pour retrouver un objet sous un signe indirect que sous un signe direct, on fournit à l’entendement occasion d’employer plus de force disponible et par conséquent d’éprouver plus de plaisir. » Le profit que l’on a à employer ce moyen d’expression qui est le propre de la poésie, est malheureusement combattu par la fatigue qu’il cause et les images peu définies, c’est-à-dire peu associables, que l’on en extrait. […] On pourra prétendre que l’analyste devant constater les effets émotionnels de l’œuvre qu’il examine, et ces effets étant extrêmement variables selon les goûts, il sera obligé, sinon de porter positivement un jugement littéraire, du moins d’introduire dans ses constatations un élément personnel, par le fait même qu’il admettra que telle ou telle œuvre a produit tel ou tel effet.
La tête du malade est du plus grand goût de dessin, de la plus rare expression. […] Si vous eussiez consulté ces gens à petit goût raffiné qui craignent des sensations trop fortes, vous eussiez passé la brosse sur votre frénétique qui s’élance de l’hôpital, sur ce malade qui se déchire les flancs au pied de votre massif ; et moi j’aurais brûlé le reste de votre composition, j’en excepte toutefois la femme au chapelet, à qui que ce soit qu’elle appartienne.
En voyant aujourd’hui à quel poids spécifique on a réduit l’édition ancienne, on se demande si c’est par respect ou par enthousiasme pour Rivarol, que les éditeurs du présent volume se sont donné les airs de faire un choix dans ses ouvrages, de prendre ceci ou de laisser cela, au nom de leur propre goût à eux, éditeurs, et de leurs préférences, ou si c’est plutôt par mépris bien entendu pour le public, qui n’aime et ne lit que les petits livres, quand il les lit toutefois… Ce qu’il y a de certain, c’est que nous n’avons pas là Rivarol ; c’est que nous n’avons en petit paquet que quelques paillettes de ce Pactole intellectuel, qui passa, en brillant, à travers le xviiie siècle. […] Pourquoi M. de Lescure, très digne par son érudition, par la hardiesse et la sûreté de son goût et surtout par son enthousiasme pour Rivarol, de nous le donner intégral, a-t-il imité, — avec des qualités nouvelles, je le reconnais, — mais a-t-il imité cependant les éditeurs par fragments qui l’ont précédé, au lieu de nous enrichir d’une Édition complète des Œuvres de Rivarol qui va manquer encore, — qui peut-être manquera toujours ?
Voilà qui est bien conforme et « en parfaite harmonie avec le goût théâtral du moment où nous vivons71. » Pour peu donc qu’on ait le sentiment dramatique et qu’on se mette à envisager les choses à ce point de vue, on indiquerait d’avance, comme dans un bon cours de rhétorique, les endroits, les motifs qui prêtent à une jolie lettre et qui font canevas ou thème : Le moment où la Dauphine quitte les terres de l’empire ; Le moment où elle met le pied sur la terre de France ; Le moment, la minute qui suit la célébration du mariage ; Le moment, la minute où elle devient reine, Louis XV venant de rendre le dernier soupir ; Le moment où, souveraine outragée, elle apprend l’Arrêt du Parlement dans l’affaire du Collier, etc., etc.
Voici l’article sur Cinq-Mars, tiré du Globe, 8 juillet 1826 : Pendant que Richelieu, vainqueur des grands et des calvinistes au dedans du royaume, et de la maison d’Autriche au dehors, poursuivait tout ensemble, dans cette triple voie de l’organisation intérieure, de la religion et de la politique, les plans tour à tour conçus et ébauchés par Louis XI contre la féodalité, par François Ier contre la réforme, et par Henri IV contre la postérité de Charles-Quint, Louis XIII, indolent et mélancolique, renfermé dans ses maisons de plaisance, cherchait à tromper son ennui par des jeux puérils ; son goût le plus prononcé était d’élever et de dresser des oiseaux.
Cette idée d’aller rechercher à sa source la connaissance, le goût et l’inspiration la plus sûre de l’antiquité grecque a dû naître dans plusieurs esprits, du jour où le Gouvernement de la Grèce offrait toutes les garanties de sécurité, de civilisation renaissante et d’avenir.
Rien n’est plus difficile d’ailleurs que de faire un choix dans des œuvres posthumes ; et, en l’absence de l’auteur, nous ne nous sommes pas cru le droit de substituer notre goût à celui du public, d’élaguer la matière à notre gré.
Si madame des Ursins avait désiré se faire une souveraineté indépendante dans les Pays-Bas pour s’assurer une retraite, madame de Maintenon sut s’en préparer une, qui était plus à sa portée et dans ses goûts.
À mon sens l’argument était faible : des goûts personnels ne me semblaient pas des autorités.
Le nom de figures convient mieux à certaines constructions, et certains groupes de mots, où le choix et le goût de l’écrivain ont plus de part, et qu’il emploie, pouvant ne pas les employer.
Il faisait de l’utilité sociale, du goût contemporain, la mesure de tout bien et de toute beauté.
Kahn, sa « vaste ambition », il se risque, bien témérairement à notre sens, à interdire au poète de l’avenir l’usage de la symbolique gréco-latine ; il effleure là des questions bien délicates d’atavisme et de culture, et nous devons faire toutes réserves de nos droits à disposer selon nos goûts de l’héritage aryen.
Mallarmé, par le spectacle prométhéen d’un immense génie foudroyé, nous a donné le goût de l’héroïsme et l’impérieux besoin de la victoire.
Mais le goût du parfait et du rare ne doit pas rétrécir notre compréhension.
La pensée française, j’entends la pensée officielle — car l’autre, la vraie, continue à sourdre, mais couverte et méconnue — la pensée officielle, dis-je, stagne pour s’adapter au goût du jour et la moralité publique s’en ressent.
Les premières études que l’on consacre à apprendre le bagage matériel d’une langue seraient sans cela insupportables, et, grâce à ce goût, elles deviennent des plus attrayantes qui se puissent imaginer.
Jamais on n’a renfermé en un moindre volume plus de connoissances, plus de lumieres, plus de raison & de goût.
Le goût que nous inspire le monde n’est déjà que trop répandu.
Sans méconnaître la grande poésie du Nord représentée en France même par d’admirables poètes, il a toujours eu un goût vif pour la forme méridionale et précise.
Il avoit de l’esprit, de la vivacité, mais point de goût ; une mémoire prodigieuse, mais aucune invention ; une immense littérature Grecque & Latine mais qu’il ne tourna point au profit de notre langue.
Il ne fut pas en son pouvoir d’employer un Cowley, digne rival de Pindare & le chantre des infortunes de David ; un compte de Rochester, ce Juvénal Anglois ; un Waller, le Voiture & le Chaulieu de l’Angleterre ; le premier de cette nation qui, dans ses vers, ait consulté l’harmonie, ait cherché l’arrangement des mots & le goût dans le choix des idées ; ce poëte, qui, vivant à la cour avec soixante mille livres de rente ; cultiva toujours son talent pour les vers agréables & faciles ; le même qui, en ayant fait à la louange de Charles II, les lui présentant & s’entendant reprocher qu’il en avoit fait de meilleurs pour Cromwel, répondit au prince : Nous autres poëtes, nous réussissons mieux dans les fictions que dans les vérités.
Guéret s’éleva fortement contre ce goût de son siècle, ou plutôt contre l’abus le plus grand qu’il pût y avoir au barreau & le plus difficile à déraciner.
Si l’on personnifie, en Voltaire, la Raison critique, indépendante, saine, la logique et l’ironie, l’esprit de réforme contenu dans le culte du goût, de tradition légitime et de nécessité, le respect de la langue, il deviendra facile d’identifier Rousseau à cet esprit de révolte, d’instinct brutal, de mépris pour la forme, de lyrisme hors de propos, d’orgueil maladroit qui semble nous dominer aujourd’hui.
« Étendez mon cœur, afin qu’il vous aime davantage, et que j’apprenne, par un goût intérieur et spirituel, combien il est doux de vous aimer, de nager et de se perdre, pour ainsi dire, dans cet océan de votre amour.
Il y a même quelque chose de plus : ceux qui prennent soin de l’éducation d’un enfant de seize ans, tâchent toûjours, et l’on sçait bien pourquoi, de le détourner de la poësie, dès qu’il témoigne un peu trop de goût pour les vers.
Les personnes d’un goût exquis, celles dont nous avons dit qu’elles avoient la vûë meilleure que les autres, prévirent même d’abord quel parti le public prendroit avant peu de jours.
Affaire de goût.
Voilà une atmosphère où le goût de l’éternel est si vigoureux que nul sentiment médiocre, je veux dire de considération pour les choses passagères, ne saurait y être viable.
Pinto célèbre juif, le chapelain de la chapelle réformée de l’ambassadeur batave, le secrétaire de M. le prince Galitzin du rite grec, un capitaine suisse calviniste », réunis autour de la même table, échangeaient, pendant quatre heures, leurs anecdotes, leurs traits d’esprit, leurs remarques et leurs jugements « sur tous les objets de curiosité, de science et de goût ». […] Il en tombe quelque chose dans l’étage inférieur, ne serait-ce que la poussière, je veux dire l’espérance, la confiance en l’avenir, la croyance à la raison, le goût de la vérité, la bonne volonté juvénile et généreuse, l’enthousiasme qui passe vite, mais qui peut s’exalter parfois jusqu’à l’abnégation et au dévouement. […] Au contraire, le grand vicaire peut sourire à un propos contre la religion, l’évêque en rira tout à fait, le cardinal y joindra son mot. » — « Il y a quelque temps, raconte la chronique, on disait à l’un des plus respectables curés de Paris : Croyez-vous que les évêques, qui mettent toujours la religion en avant, en aient beaucoup Le bon pasteur, après avoir hésité un moment, répondit : Il peut y en avoir quatre ou cinq qui croient encore. » — Pour qui connaît leur naissance, leurs sociétés, leurs habitudes et leurs goûts, cela n’a rien d’invraisemblable. « Dom Collignon, représentant de l’abbaye de Mettlach, seigneur haut justicier et curé de Valmunster », bel homme, beau diseur, aimable maître de maison, évite le scandale, et ne fait dîner ses deux maîtresses à sa table qu’en petit comité ; du reste aussi peu dévot que possible et bien moins encore que le vicaire savoyard, « ne voyant du mal que dans l’injustice et dans le défaut de charité », ne considérant la religion que comme un établissement politique et un frein moral.
Quel était ce mieux dont il eut l’honneur de donner le goût, et qu’il essaya vainement de réaliser ? […] Il y a d’ailleurs une preuve que, même au plus fort de ses spéculations, loin de négliger l’antiquité, il y puisait des sujets de méditation, et il en portait des jugements pleins de goût. […] Je reconnais là pour la première fois le goût, ce sentiment de la langue de chaque sujet, commun aux écrivains du dix-septième siècle, Descartes en tête, lesquels n’étonnent guère moins par ce qu’ils rejettent de leurs discours que par ce qu’ils y reçoivent.
Je ne me décide point d'après les idées d'autrui : je ne juge, comme vous, que d'après les regles imprescriptibles de la raison & du goût. […] Il annonce un Esprit aussi zélé pour les vrais principes du goût, que pour ceux de la Morale & de la Religion. […] Avoir à lutter contre la morgue de nos prétendus Philosophes & l’amour propre des petits Ecrivains ; entreprendre de persuader aux uns qu’ils dégradent la raison en croyant l’enrichir & la développer ; qu'ils pervertissent tous les genres en se vantant de les perfectionner : vouloir rappeler les autres à l’autorité des regles imprescriptibles du Goût, quand ils se trouvent si bien de s'en être écartés : n’est-ce pas en effet déchaîner une Ménagerie, & provoquer des criailleries aussi aiguës qu’interminables ?
Le goût très-vif du peuple toscan pour les récits romanesques suscitait des conteurs et des chroniqueurs en langue vulgaire. […] Après cela, si vous y prenez goût et que vous souhaitiez d’en apprendre davantage, vous n’aurez plus qu’à consulter les meilleurs entre les commentaires. […] En effet, mon cher Marcel, tout ce mélange de paganisme et de christianisme, de personnages de la Bible et de héros latins, semble bizarre, si nous le considérons avec notre savoir et notre goût modernes. […] Cela n’avait rien alors d’offensant, ni pour le goût, ni pour la foi. […] Pas plus que les femmes dévergondées, les prêtres gourmands ne sont épargnés au Purgatoire ; le pape Martin IV y expie dans le jeûne et l’amaigrissement son goût excessif pour les anguilles du lac Bolsena.
Il avait peur du snobisme, du faux goût et de la convention. […] À mesure que Pierre Nozière grandissait, le Louvre lui inspirait davantage le goût de ce qui est beau, l’horreur de ce qui est vilain, vulgaire ou mesquin. […] Si Hélène avait du goût pour la chicane, elle pourrait invoquer les « précédents » qui foisonnent dans l’histoire amoureuse de l’humanité. […] Lockroy, mis en goût par cette confession, prit la parole après M. […] Pouvillon n’a jamais voulu déserter le sol qui donne à ses pensées, à ses sentiments, à sa phrase un goût de terroir si savoureux.
Il n’y a que cela qui existe pour la noblesse de leur goût. […] Leur Temple du Goût est de taille à loger tout le monde. […] Ils ont aussi beaucoup de goût pour l’épilepsie. […] En affaire de goût il se préoccupera du plaisir, en affaires de morale il se préoccupera du bonheur, bien que ce ne soit pas là la condition de sa conduite morale. […] Oui, cet aventureux M. de Laborde met toute son audace à désirer, à demander que les objets industriels soient désormais faits avec goût !
Sur cinq points qui sont les cinq sens, nous avons tenté de dépasser la limite ordinaire ; nous avons poussé jusqu’à une assez grande distance du côté des sensations de l’ouïe et du côté des sensations de la vue ; nous avons fait un pas du côté des sensations de l’odorat et du goût ; et nous avons vu que, du côté des sensations du toucher, on pourrait plus tard en faire un pareil. — D’après toutes ces indications, nous avons conclu que, dans le cercle de chaque sens et probablement de sens à sens, les sensations qui, en apparence, diffèrent de qualité, ne diffèrent qu’en quantité ; que les mêmes sensations élémentaires peuvent, par leurs différences de nombre, d’intensité et de proximité, constituer les sensations totales que la conscience juge irréductibles entre elles, et que partant, si diverses que soient les apparences, il n’y a là probablement aussi qu’un même fait, sorte de roche primitive dont les divers aspects tiennent aux diverses profondeurs de l’eau. […] « Tels sont les tintements et bourdonnements d’oreille chez les personnes qui ont les nerfs délicats, et chez celles dont le nerf auditif lui-même est siège d’une lésion ; tel est encore le bruissement qu’on discerne dans ses oreilles après avoir longtemps couru dans une voiture dure. » — On constate moins aisément les sensations subjectives pour le goût et pour l’odorat. […] Si enfin le nerf est devenu autrement excitable, son jeu, quoique provoqué par le même excitant, est différent, et la sensation n’est plus la même ; dans l’indigestion ou la fièvre, les aliments n’ont plus qu’un goût terreux ou amer. — En somme, la condition directe de la sensation, c’est l’action ou mouvement moléculaire du nerf ; peu importent les événements du dehors, ou les autres événements intérieurs du corps vivant ; ils n’agissent que par l’intermédiaire de ce mouvement qu’ils provoquent ; par eux-mêmes, ils ne font rien ; on pourrait se passer d’eux. […] Telles sont pour la conscience nos cinq familles de sensations, dans chaque famille plusieurs groupes, dans chacun de ces groupes plusieurs espèces, et, parmi les sensations du goût et de l’odorat, presque chaque espèce. — Du même coup, une lumière jaillit sur la structure et sur le jeu interne de notre appareil sensitif. Primitivement, une cellule n’est qu’un magasin de force, et tout son emploi consiste à multiplier une impulsion qu’elle transmet à un nerf moteur ; ultérieurement, à mesure que l’animal s’élève dans la série et que les sens deviennent spéciaux, la cellule perfectionnée s’acquitte par surcroît d’un autre office ; selon qu’elle sert à l’audition, à la vue, au goût, à l’odorat, elle traduit une forme particulière d’ébranlement extérieur, des vibrations de l’air, des ondulations de l’éther, des systèmes de déplacements atomiques ; or, pour cela, il faut qu’elle soit construite de manière à exécuter tel type de danse, et non tel autre.
L’Évangile élégant qu’il nous prêche (et qui n’est ni humble ni chaste) est déjà selon le goût ou le caprice des plus voluptueuses intelligences d’à présent. […] Il y trouve comme un goût : « Mais c’est du sang ! […] C’est un mélange de haut goût. […] En sorte qu’il y en a pour tous les goûts, et que M. […] Cela veut dire simplement que mon goût musical retarde de cent cinquante ou deux cents ans sur mon goût littéraire.
Les Anglais ont le goût pratique de l’agriculture, et ils poussent ce goût jusqu’à ses dernières limites ; mais ils ont aussi un naïf et sauvage amour de la nature, qui ne se trouve au même degré chez aucune autre nation. […] Du haut en bas de l’échelle sociale, ils sont physiquement vigoureux et ont un goût prononcé pour les exercices physiques. […] Ils ont des goûts, des préférences, des aptitudes spéciales ; ce ne sont pas des êtres surnaturels, ce sont les habitants invisibles du monde naturel. […] À cette humeur batailleuse il joint un goût assez vif, mais très chaste, pour la grâce et la beauté, un goût que n’aurait désavoué aucun des chevaliers de la Reine des fées de Spenser. […] Les tableaux qui s’étaient déroulés sous ses yeux durant son enfance n’étaient pas faits pour lui donner le goût des armes et de la guerre. .
Peut-être avec un goût mieux calculé pour ses entraînements, aurais-je pu atteindre à des altitudes que je n’ai fait qu’entrevoir. […] C’est, dans le décor figé de Bruges, l’histoire d’amour d’un neurasthénique, accommodée aux goûts d’un public perverti. […] Ils ont, tous les deux, le souffle, la force, le goût de l’énorme, le sens de l’épique. […] Les Flaireurs, La Princesse Maleine, L’Intruse révélaient le théâtre d’angoisse, apportant ainsi une conception neuve, mais nettement septentrionale, par son goût du symbole et du mystère. […] Leurs dispositions picturales devaient naturellement les incliner vers la critique d’art : plusieurs cédèrent à ce goût instinctif.
Il y avait déjà sept théâtres au temps de Shakspeare, tant le goût des représentations était vif et universel. […] Quels sont-ils ces bourgeois, ces courtisans, ce public dont le goût façonne le théâtre ? […] Ils ont le même goût pour les exercices des membres, la même indifférence aux intempéries de l’air, la même grossièreté de langage, la même sensualité avouée. Ce sont des corps de charretiers avec des sentiments de gentilshommes, des habits d’acteurs et des goûts d’artistes. « À quatorze ans6, un fils de lord va aux champs pour chasser le daim et prendre de la hardiesse ; car chasser le daim, l’égorger et le voir saigner donne de la hardiesse au cœur. […] Quand Henri V fait la cour à Catherine de France, c’est avec le grossier entrain d’un matelot qui aurait pris goût pour une vivandière ; et comme les gabiers qui aujourd’hui se tatouent un cœur sur le bras pour prouver leur passion à leur payse, vous trouvez des gens qui « avalent du soufre et boivent de l’urine9» pour gagner leur maîtresse par un témoignage d’amour.
À chacun son œuvre : les uns blâment dans le siècle ses passions politiques ; les autres, la corruption de ses goûts littéraires. […] Mais alors par quel singulier goût a-t-il fait choix, pour l’analyser, de ce triste et honteux penchant qui fermente au cœur d’Amaury ? […] Je n’ai assurément aucune intention d’instituer, avec l’auteur de Volupté, une controverse religieuse, et quoique la fin que fait son héros ne soit pas fort de mon goût, je conçois qu’il y ait beaucoup de personnes à qui elle plaise et qu’elle profite même à quelques-unes. […] On peut demander si la langue française du dix-neuvième siècle est une langue hors la loi, que rien ne protège plus, ni la convention, ni le goût, ni le bon sens, et qu’on puisse livrer sans scrupule à tous les hasards, à tous les périls d’une incessante expérimentation ; en un mot, si l’indépendance qu’on proclame est l’affranchissement de toute règle, si la liberté qu’on revendique au profit de l’intelligence n’est autre chose que la révolte de toutes les médiocrités, la confusion de tous les systèmes, l’anarchie de toutes les tendances aventureuses et novatrices. […] Capricieuse, fantasque, aujourd’hui philosophe, lisant du grec ou livrée à des méditations esthétiques, demain rieuse emportée, se roulant sur les tapis ; aimant « les beaux chiens, les beaux chevaux, les belles pipes, les beaux hommes » ; abandonnée à l’intimité d’une soubrette et d’un page libertin ; sans frein dans ses goûts, sans mesure dans ses plaisirs, ouvrant son salon à des femmes décriées, et la nuit, déguisée, se glissant sous le toit d’un étudiant allemand, qu’importe ?
Une fois produit, il travailla vigoureusement à se faire sa place, à concilier l’étude du cabinet avec la pratique : il était littérateur à la façon du xvie siècle, parlant latin autant et plus volontiers que français ; c’est pour le latin qu’il garde ses élégances : quand il écrit dans sa langue maternelle, son style bigarré exprime à merveille le mélange de goût qui régnait dans les professions savantes durant la première moitié du xviie siècle. […] On était sous la régence ; Richelieu n’était plus là pour protéger le pauvre Renaudot, et le Parlement avait peu de goût pour les créatures du défunt cardinal.
personne du moins ne l’oserait dire, et il n’est sage si morose qui, nous connaissant tous deux, et nos goûts et nos mœurs, aille s’enquérir de la date de notre alliance, et qui n’applaudisse de bon cœur à une si parfaite union. […] La Bruyère, qui a dit ce beau mot : « Il y a un goût dans la pure amitié où ne peuvent atteindre ceux qui sont nés médiocres », ne paraît pas admettre cette formation prompte et soudaine du même sentiment : L’amour, dit-il, naît brusquement, sans autre réflexion, par tempérament ou par faiblesse : un trait de beauté nous fixe, nous détermine.
Il y avait eu un temps, au commencement du siècle, où les grandes dames avaient auprès d’elles leur bel esprit, puis un autre temps où elles avaient leur géomètre, puis leur philosophe ; vers la fin, quelques princesses avaient renchéri sur ces goûts de luxe et avaient voulu avoir leur théosophe. […] Il hésitait d’abord à accepter, craignant que cela ne le dissipât et ne le jetât, comme il disait, dans l’externe, tandis qu’il sentait de plus en plus le goût des voies intérieures et silencieuses ; puis il pensa qu’il était peut-être appelé par là à rendre témoignage de sa doctrine et à briser quelque lance contre l’ennemi : Il est probable, pensait-il, que l’objet qui m’amène à l’École normale est pour y subir une nouvelle épreuve spirituelle dans l’ordre de la doctrine qui fait mon élément… Je serai là comme un métal dans le creuset, et probablement j’en sortirai plus fort et plus persuadé encore qu’auparavant des principes dont je suis imprégné dans tout mon être.
Ce n’est point par le goût que brille ordinairement Corneille ; mais ici, pour peu que l’on compare avec la pièce espagnole, on verra qu’il a eu, relativement à nous, Français, et à notre public d’alors, beaucoup de goût, c’est-à-dire beaucoup de choix.
On a, par exemple, le menu du dîner de noces, un festin de Gargantua, les inscriptions mêlées aux illuminations des palais, les devises latines pédantesques et d’un goût équivoque, tout le programme des magnificences. […] Il semblait être revenu par goût à l’existence du Nord, aux mœurs copieuses, aux habitudes et aux orgies paternelles.
73 Ses premiers goûts, sa première vocation, le portaient vers la sculpture : il y réussissait et promettait un artiste distingué ; il avait remporté, je ne sais en quelle année au juste, le premier prix dans un des concours pour Rome. […] Le crayon fut offert au général qui, revenant à ses premiers goûts, se mit à tracer aussitôt sur les murs de sa chambre des dessins pleins d’âme et de talent.
Le style de cette histoire est très-convenable ; il est généralement sain : la marque réfugiée ne s’y fait point ou presque point sentir61, et je reprocherais plutôt à l’auteur par moments quelque emphase, quelque recherche d’élégance convenue, trop conforme au goût régnant (le timon de l’État, les trophées de la victoire, les bannières de la philosophie, etc.). […] Parny, à cette date, était encore considéré par les hommes de l’école dernière du xviiie siècle, de l’école de Marie-Joseph Chénier, comme un parfait modèle d’élégance, de pureté (pour le goût), et le Racine de l’Élégie.
Son monde à lui, en effet, selon ses goûts, aurait été plutôt celui dont elle citait là les noms, ou encore le monde de Mme de Lambert et de M. de Fontenelle. […] Placée au centre d’une seule idée, elle ne voyait partout alentour que des moyens, et elle ne concevait pas qu’un goût de philosophie, judicieux ou non, une opinion quelconque sur les oracles ou les miracles, ou encore sur le chapeau de l’abbé Dubois, pût venir jeter le moindre embarras dans la chose essentielle et sacrée.
Jusqu’alors il n’avait fait qu’entremêler avec agrément les camps et la cour, cultiver la littérature légère, et arborer les goûts de son âge, non sans profiter vivement de toutes les occasions de s’éclairer ou de se mûrir au sein de ces inappréciables sociétés d’alors, qu’il appelle si bien des écoles brillantes de civilisation. […] Un jour, à cette heure même de la promenade impériale, M. de Ségur imagina de se trouver dans la seconde des allées au moment du détour, et de ne pas s’y trouver seul, mais de se faire apercevoir, comme à l’improviste, prenant ou recevant une légère, une très-légère marque de familiarité d’une des jolies dames de la cour qu’il n’avait sans doute pas mise dans le secret. — Au dîner qui suivit, le front de Sémiramis apparut tout chargé de nuages et silencieux ; vers la fin, s’adressant au jeune ambassadeur, elle lui fit entendre que ses goûts brillants le rappelaient dans la capitale, et qu’il devait supporter impatiemment les ennuis de cette retraite monotone.
J’acceptai : cette proposition convenait à mes goûts de solitude et ne contrariait en rien mon dégoût du monde. […] IX Cet isolement cependant, en me forçant au travail, nourrissait un peu mes goûts prématurés de littérature.
Mais on conçoit quelle délicatesse de goût, quelle légèreté de touche il faudrait pour ne point dépasser la mesure sous prétexte de rendre la peinture plus comique ou plus maligne par la précision des ressemblances. […] Ce goût pour les mœurs basses et les aventures triviales, avec l’absence ou la vulgarité de l’idéal moral, constitue en majeure partie le réalisme des Fabliaux.
Il a de l’intelligence au reste du goût : il aime la poésie, il fait des vers164, comme Marot, trop souvent comme Jean, mais par rencontre aussi comme Clément. […] De plus, écrivant pour un public d’élite, asservissant son inspiration au goût de ses lecteurs, il ouvre l’ère de la littérature mondaine, il fait prédominer les qualités sociables sur la puissance intime de la personnalité ; avec lui commence le règne — salutaire ou désastreux comme on voudra, ou mêlé de bien et de mal — d’une société polie.
Quelques-uns même (Théodoric, Chilpéric, etc.) y prirent goût avec une facilité et une promptitude qui étonnent. […] L’imperfection de l’état actuel, c’est que l’occupation extérieure absorbe toute la vie, en sorte qu’on est d’abord d’une profession, sauf ensuite à cultiver son esprit s’il reste du temps ou si l’on a ce goût.
Le fait est que, douée d’une vive imagination, d’un sens poétique exquis, d’un sentiment passionné de la nature, elle personnifiait tous ses goûts et toutes ses inspirations de jeunesse dans la figure de Goethe, et qu’elle l’aimait avec transport comme le type vivant de tout ce qu’elle rêvait. […] Dans sa noble maison, qui avait au frontispice ce mot : Salve, il exerçait l’hospitalité envers les étrangers, les recevant indistinctement, causant avec eux dans leur langue, faisant servir chacun de sujet à son étude, à sa connaissance, n’ayant d’autre but en toute chose que l’agrandissement de son goût : serein, calme, sans fiel, sans envie.
Partant de là et pour mieux conserver ce sentiment naturel dans toute son énergie et sa délicatesse : « J’ai renoncé, disait-il, à la chasse pour laquelle j’avais eu du goût, et je ne me suis pas même permis de tuer les insectes, à moins qu’ils ne fassent beaucoup de mal. » Turgot, avec qui il entre dans cet ordre de confidence, lui répond admirablement sur le chapitre de la morale, et il marque les points sur lesquels il diffère avec lui. […] L’impression qu’il produit sur tout lecteur d’un goût délicat et prompt est bien celle-là.
Mme de Girardin est cause que je me suis souvent posé ces deux problèmes embarrassants : Comment, avec tant d’esprit et d’élégance, n’a-t-on pas toujours du goût, de ce goût qu’elle-même a si bien défini quelque part la pudeur de l’esprit ?
Ces luttes, ces difficultés dernières traînent encore et se prolongent quelque temps, jusqu’à ce que la résolution persévérante vienne à son terme, et qu’éclate un matin l’accent de délivrance : Enfin je quitte le monde, s’écrie-t-elle le 19 mars 1674 : c’est sans regret, mais ce n’est pas sans peine ; ma faiblesse m’y a retenue longtemps sans goût, ou, pour parler plus juste, avec mille chagrins ; vous en savez la plus grande partie, et vous connaissez ma sensibilité ; elle n’est point diminuée, je m’en aperçois tous les jours, et je vois bien que l’avenir ne me donnerait pas plus de satisfaction que le passé et le présent. […] Je ne puis entrer ici dans la discussion de ce point, ni approfondir mes doutes : je me borne à maintenir, à mes risques et périls, mon impression de goût, et à dire, quel que puisse être le correcteur, que la véritable et entière confession de la pénitente doit se chercher dans les Éditions premières.
On a un bel article d’André Chénier, inséré dans le Journal de Paris (12 février), qui venge les mœurs, la langue et le goût, également outragés dans cette ridicule et révoltante préface de l’éditeur magistrat. […] Elles ont, pour la plupart, le faux goût, le faux ton exalté du moment, les fausses couleurs ;·le Marmontel et le Fragonard s’y mêlent, et, bien qu’exprimant un sentiment véritable, elles sont plus faites aujourd’hui pour exciter le sourire que l’émotion.
Abordant franchement, dans son Essai sur l’éloquence de la chaire, les causes de la décadence du genre durant le xviiie siècle, il s’en prend encore moins au talent des orateurs chrétiens qu’à l’usage peu chrétien qu’ils ont fait de leur talent en courtisant le goût et l’esprit du jour, en s’écartant des sources directes de la doctrine et de la foi pour se jeter sur des thèmes de morale à la mode et de bienfaisance. […] Si vous étiez à Paris, je ferais sur votre âme sensible et délicate l’épreuve de ma verve oratoire, et votre goût fixerait le jugement que je dois en porter.
Quant à Mlle de Biron, comtesse de Bonneval, elle ne le prit pas si légèrement : il ne lui avait pas fallu un long temps pour s’attacher d’un goût très vif à ce brillant et volage aventurier, pour l’aimer même, bien qu’elle osât à peine se permettre un tel mot. […] Entre lui et Prié, c’est une guerre à mort ; il se figure que l’Europe entière est attentive à ce démêlé et à l’éclat qu’il en a fait : Je dois songer à la grande affaire qui est de vaincre, écrivait-il à un ami de Bruxelles pendant sa détention au château d’Anvers (16 septembre 1724) ; le moyen que j’ai pris et mes mesures m’y conduisant tout droit, il n’importe pas si cela se fait exactement suivant le goût et la règle des cours, puisqu’un homme de courage hasarde volontiers une petite mortification de la part de son maître pour arriver à un plus grand bien, et qu’il doit suivre sans aucun égard les routes les plus courtes, pourvu que ce soient celles des gens de bien, quand on y devrait chiffonner sa perruque, déchirer ses habits, perdre son chapeau et le talon de ses souliers en sautant les fossés… Au reste, si vous lisez attentivement mes lettres à Sa Majesté, vous verrez qu’elles présagent les pas que j’ai faits avec toute la franchise d’un soldat qui ne craint rien, pas même son maître, quand il y va de son honneur, que je n’ai jamais engagé ni n’engagerai de ma vie à aucun des rois de la terre.
Il avait peu de goût pour M. de Talleyrand et pour ses manœuvres. […] Il se montra en même temps humain et moral, fidèle à ses principes de Lyon, en insistant pour qu’on prévînt la conspiration une fois connue, au lieu de la laisser à demi éclater comme quelques ministres l’auraient voulu Vers ces années, pour se consoler des injustices de l’opinion publique à son égard, se sentant peu de goût d’ailleurs pour tout ce qui se pratiquait à la Cour, et croyant aussi qu’il était séant à une époque de paix d’inaugurer le rôle d’une espèce de grand seigneur industriel, il conçut l’idée de fonder dans sa terre de Châtillon un vaste établissement où il assemblerait toutes les industries, et moyennant lequel il doterait son pays des innovations utiles en tous genre.
Payé à vingt-quatre ans de ce service par un bon évêché, de la familiarité du cardinal et du jeu de la reine, Cosnac, par tempérament, par goût et par esprit d’intrigue (je mets toujours le mot comme lui-même, indifféremment), se mêlait alors de beaucoup de choses, et on l’y jugeait propre. […] Cependant, après plus d’une velléité de se retirer, l’aversion pour la province et le goût qu’il avait pris pour la vie de cour le retiennent, et il finit par forcer l’intimité de son prince, et par s’y faire une place qu’il saura disputer.
Des circonstances heureuses avaient habitué ma jeunesse à l’étude ; j’avais pris le goût, la passion même de l’instruction ; mon fonds me parut un moyen nouveau de satisfaire ce goût, et d’ouvrir une plus grande carrière à mon éducation.
Au point de vue de la composition littéraire, cette convocation générale des peuples, où ne manquent ni le Lapon, ni le Samoyède, ni le Tongouze, désignés chacun par des épithètes qui veulent être homériques, est bizarre et sans goût : on plaide et l’on dispute devant je ne sais quel autel de l’union et de la paix ; il y a le groupe des amis de la vérité qui a son orateur, et un certain groupe des hommes simples et sauvages qui parle tout à la fois : c’est ce dernier groupe qui a les honneurs de la conclusion, et qui coupe court à la dispute universelle, en disant de ne croire qu’à ce qu’on voit et à ce qu’on sent par sensation directe. […] D’ailleurs, il n’a aucun goût sensible pour les écrivains éloquents ou les poètes ; il cite une fois, sur « la crainte qui serait la cause première des religions (Primus in orbe Deos, etc.) », un mot de Pétrone ou de Stace, qu’il attribue par mégarde à Lucrèce : jamais il ne lui arrive de citer Virgile, Horace, un vers d’Homère, ce qui fait la douceur habituelle de ceux qui ont pratiqué ces sentiers de l’Antiquité ; il ne fleurit jamais son chemin d’un souvenir : avec des connaissances si approfondies et si particulières, il n’a pas plus la religion de la Grèce que celle de Sion.
Heine eut des goûts divers, s’éprit et subit de nombreuses influences artistiques ; c’est-à-dire que beaucoup de choses et de différentes lui ont plu, ou encore que ses sentiments étaient assez variables pour être successivement satisfaits et charmés par des expressions artistiques dissemblables entre elles et pouvant varier de la rêverie vague des romantiques allemands, au rude réalisme de la poésie populaire, à la précision et à l’esprit des prosateurs français. […] De même que les gens privés de patrie par une éducation errante et des goûts composites, professent le cosmopolitisme et dénigrent les nations avec équité, il eut un mépris égal pour le judaïsme et le christianisme, s’étant composé une foi poétique ornée de toutes les légendes païennes.
À quoi cette poésie peut-elle servir, sinon à égarer notre bon sens, à jeter le désordre dans nos pensées, à troubler notre cerveau, à pervertir nos instincts, à fêler nos imaginations, à corrompre notre goût, et à nous remplir la tête de vanité, de confusion, de tintamarre et de galimatias ? […] Toute la loi du goût est là.
Cependant un homme de beaucoup d’esprit et de goût, et à qui l’on doit toute déférence, a paru douter de l’assertion. […] III, chap. 6] Voici quelques fragments que nous avons retenus de mémoire, et qui semblent être échappés à un poète grec, tant ils sont pleins du goût de l’antiquité.
Il a voulu avoir du goût, comme on l’entend à l’Académie. […] Il n’est plus qu’un homme d’esprit et de goût.
Une passion d’un certain goût propre sur lequel, et sur laquelle rien ne peut tromper. […] Ils ont un goût secret pour l’adversaire. […] Il est bien le même homme dans le goût de sa race qu’il est dans le goût de tout. […] La morale est une propriété, un régime et certainement un goût de propriété. […] Et la défaite dans la première catégorie a un goût moins amer que la victoire dans la seconde.
. — Sympathie universelle et goût de la France pour l’esprit 167 XLII. — Félix Pyat contre Jules Janin 172 XLIII. — Suite de la polémique entre Félix Pyat et Jules Janin. — Mademoiselle Rachel dans Bérénice 173 XLIV. — Le bon Nodier 175 XLV. — Suites et conséquences de la visite des députés légitimistes au comte de Chambord en Angleterre. — Explosions de la Chambre. — Les flétris.
Toujours, en le louant ou en le critiquant, je l’ai désiré un peu autre qu’il n’était ou qu’il ne pouvait être, toujours je l’ai plus ou moins tiré à moi, selon mes goûts et mes préférences individuelles ; toujours j’ai opposé à la réalité puissante, en face de laquelle je me trouvais, un idéal adouci ou embelli que j’en détachais à mon choix.
L’oratorien Dotteville refit l’œuvre de la Bletterie, et la diction de ce doux vieillard, pure, châtiée, coulante et tout à fait dans le goût de Rollin, a du moins l’avantage de se laisser lire avec un plaisir continu.
S’il y a dans le style de nos modernes d’évidentes fautes de goût, cela tient surtout à leur mauvaise manière d’envisager le monde, et fort peu au mépris qu’ils ont eu pour les préceptes de Boileau-Despréaux.
Dans un temps comme le nôtre, en deux ans, l’instinct des masses devient goût.
D’autres rapportent que Bayle s’excusoit lui-même sur cet article, en avouant que son goût l’y portoit comme malgré lui.
Plusieurs gens de goût blâment La Fontaine d’avoir mis la morale, ou à la fin, ou au commencement de chaque fable ; chaque fable, disent-ils, contient sa morale dans elle-même : sévérité qui nous aurait fait perdre bien des vers charmans.
., sont rédigées avec beaucoup d’intelligence & écrites avec goût, sans cette affectation d’ornemens qui est ridicule dans un livre instructif.
Mais le goût s’accroissant avec la richesse et le luxe, bientôt l’architecture des temples, des palais, des hôtels, des maisons, deviendra meilleure ; et la sculpture et la peinture suivront ses progrès.
Sans l’histoire, il est difficile d’entendre les auteurs anciens ; sans la morale universelle, il est impossible de fixer les règles du goût : et, sous ces deux points de vue, l’enseignement de ce second cours reflète encore sur l’enseignement du premier.
En un mot, comme le premier but de la poësie est de plaire, on voit bien que ses principes deviennent plus souvent arbitraires que les principes des autres arts, à cause de la diversité du goût de ceux pour qui les poëtes composent.
Nul n’a plus que lui le goût et même le culte du fait.
Fils d’un tisserand du Palatinat, son père, qui avait émigré, s’était marié dans cette douce contrée, le pays de la bonhomie vraie qu’on appelle l’Oberland badois, et c’est là, entre le Rhin et les hauteurs boisées de la Forêt Noire, que ce poète de la bonhomie — car tel est le caractère distinctif de la poésie de Hebel et son originalité supérieure — nourrit son génie de ces premières impressions qu’on devait toujours y retrouver, et qui entrent dans la pensée d’un homme profondément organisé comme le goût du thym dans le miel de l’abeille et la saveur des serpolets vierges dans la chair sauvage des chevreuils.
Spirituel dans une certaine mesure, frotté d’esprit plu ; encore que spirituel par les gourmets intellectuels avec lesquels il a vécu, comme un crouton est frotté d’ail, riche, facile, ayant des goûts fastueux, une bonne table surtout, l’autel des illusions et de la fédération universelle, Véron, avec de la tenue et du silence, aurait pu passer pour un esprit politique.
Vous le trouverez peu chez une nation livrée à ce qu’on appelle les charmes de la société ; chez un tel peuple, la multitude des goûts nuit aux passions.
ou bien un philosophe qui était tout à la fois physicien, géomètre, naturaliste, politique, dialecticien, qui avait porté l’analyse dans toutes les opérations de l’esprit, assigné l’origine et la marche de nos idées, cherché dans les passions humaines toutes les règles de l’éloquence et du goût, et en qui le concours et l’union de toutes ces connaissances devaient former un esprit vaste et une imagination qui agrandissait tous les arts en réfléchissant leur lumière les uns sur les autres, ne devait-il pas en effet avoir moins d’estime pour un orateur qui avait plus d’harmonie que d’idées, et pour un maître d’éloquence qui savait mieux les règles de l’art, que l’origine et le fondement des arts même et des règles ?
Mais il se conserve encore de lui le début d’un hymne à Diane, moins gracieux que les vers d’Euripide, mais d’un ton chaste et noble : « Je suis à tes genoux, puissante chasseresse, blonde fille de Jupiter, Artémis, reine des hôtes sauvages des forêts, soit que maintenant, près des flots tourbillonnants du Léthé, tu regardes avec joie la ville habitée par des hommes aux cœurs courageux ; car tu n’es pas la bergère d’un peuple féroce, soit que… » Le goût peut se plaire à recueillir ces moulures tombées des fresques antiques du véritable Anacréon, et à les comparer aux ornements et aux grâces du recueil moderne.
Celui-là n’est pas riche, mais il a des goûts de millionnaire, et il s’est fait un système de vie qui participe à la fois des privations que sa position lui impose et de ses désirs qui luttent avec sa position. […] Karr a dans ses romans une originalité qui ne convient guère à nos idées plus graves, et tout son esprit de mots, de subtilités, nous échappe, parce que nous n’avons pas autour de nous les mille explications nécessaires à l’intelligence et à l’appréciation du goût de ce sel attique. […] Elle était mise avec un goût dont l’originalité n’avait rien de forcé ; ce n’était que de la distinction. […] À Paris, l’auteur de Plick et Plock est meublé avec un luxe inouï dans le goût de la Renaissance et du siècle de Louis XV. […] Le marchand de meubles a envoyé une garniture de boudoir, le tapissier a tendu le salon, orné la chambre à coucher, et le lendemain l’article Ameublements a vanté le goût et la supériorité de telles ou telles fabriques.
Le Clergé s’est modernisé, mis au goût du jour. […] Ce sont d’ailleurs les privilégiés, les maîtres du mauvais régime social qui sollicitent, invoquent le goût de l’antiquaille. […] L’hermaphroditisme psychologique (compatible avec une physiologie et des goûts normaux) décide le mâle amoureux de sa propre et seule virilité à en faire, au moins, deux parts, la première pour celle à qui va son désir, la seconde, pour les rencontres. […] Le Français, il est vrai, si telle ou telle raison l’empêche de quitter son pays, a pris assez de goût à l’exotisme pour que les barnums de ses désirs lui servent quelques-unes de ces curiosités d’importation lointaine, qui le dépaysent et lui donnent ainsi à penser qu’il se renouvelle. […] Le christianisme n’a jamais perdu le goût médiéval des écrouelles.
Le nombre en est prodigieux, & plusieurs habiles gens ont remarqué que, si l’on en excepte les ouvrages purement didactiques, plus un auteur a de goût, plus on trouve dans son style de ces irrégularités heureuses & souvent pittoresques, qui ne paroissent violer les lois générales du langage que pour en atteindre plus sûrement le but. […] L’usage n’y décide guere que la forme des caracteres qu’elle employe : l’art de s’en servir devient en quelque sorte une affaire de goût ; mais le goût a aussi ses regles, quoiqu’elles puissent plus difficilement être mises à la portée du grand nombre. […] que ce sont des licences autorisées par l’usage en faveur de la difficulté, ou suggérées par le goût pour donner au vers une mollesse relative au sens qu’il exprime, ou même échappées au poëte par inadvertance ou par nécessité ; mais que comme licences ce sont encore des témoignages rendus en faveur de la loi qui proscrit l’hiatus. […] D’ailleurs la séparation des deux êtres qui étoient unis, est respective ; le premier est séparé du second, & le second du premier ; & l’on peut, sans aucun renversement extraordinaire, les présenter indifféremment sous l’un ou l’autre de ces deux aspects, s’il n’y a, comme ici, un motif de préférence indiqué par la raison, ou suggéré par le goût qui n’est qu’une raison plus fine. […] Au reste le choix entre ces différentes formes est uniquement une affaire de goût, & il arrive souvent à cet égard la même chose qu’à l’égard de tous les autres synonymes, que l’on choisit plutôt pour la satisfaction de l’oreille que pour celle de l’esprit, ou pour contenter l’esprit par une autre vûe que celle de la précision.
L’autre est la nature dans un pays déjà cultivé aussi, mais sans goût encore. […] Mais déclarons notre insuffisance en ne tentant pas de les rapprocher : l’un est au-dessus du goût, l’autre est au-dessus du sublime. […] C’est alors que la conformité du goût et du talent nous unit plus intimement, que j’allai plus souvent m’asseoir à leur vie de famille, et qu’ils vinrent eux-mêmes habiter plus fréquemment ces deux asiles de Saint-Point et Monceaux que la suite des événements politiques me laissait encore libres pour moi et pour mes amis.
il faut dire que les vieux psaumes sont beaux, tandis que les modernes ne sont qu’ingénieux ; et pourtant le goût le plus exercé peut à peine les discerner. […] Je suppose qu’un homme d’esprit (c’est presque le cas d’Apollonius de Rhodes) pût attraper le pastiche du style homérique de manière à composer un poème exactement dans le même goût, un poème qui fût à Homère ce que les Paroles d’un Croyant sont à la Bible ; ce poème, aux yeux de plusieurs, devrait être supérieur à Homère ; car il serait loisible à l’auteur d’éviter ce que nous considérons comme des défauts, ou du moins les manques de suite, les contradictions. […] Non, cela nous fait dire froidement et comme s’il s’agissait de la constatation d’un fait : « Cet homme avait bien délicatement saisi le goût antique. » Ce qui provoque notre admiration et notre sympathie, c’est précisément ce qu’il y a de moderne dans ce beau livre ; c’est le génie chrétien qui a dicté à Fénelon la description des Champs-Élysées ; c’est cette politique si morale et si rationnelle devinée par miracle au milieu des saturnales du pouvoir absolu.
Le prétendu idéalisme allemand n’est que le goût des spéculations abstraites et la passion des systèmes. […] Saint-Simon et Auguste Comte ont ceci de commun, que la science abstraite de l’homme qui se nomme la psychologie est médiocrement de leur goût et de leur compétence. […] Si ce n’est point en étudiant les lois de la nature et en contemplant l’infinie grandeur, l’universel harmonie du cosmos, que l’on contracte le goût des choses morales et politiques, la connaissance des lois historiques et la contemplation philosophique de l’histoire universelle ne sont pas non plus très-propres à nous intéresser, comme acteurs, aux événements.
Glachant : le goût de Victor Hugo, souvent trop indulgent pour lui-même, a été ici trop sévère. […] Il l’avait deviné, ce qui donne une haute idée de son goût et de son flair ; il l’avait encouragé à écrire. […] ces amours qui ont un goût de cendre mâchée et remâchée ! […] C’est surtout quand je ne suis plus en présence du texte que certains souvenirs ont [pour moi] le goût de cendres. […] — IV : Quels sont les défauts que la raison et le goût proscrivent dans nos représentations théâtrales ?
Les choses purement littéraires exigent le goût, qui n’est, après tout, que la vraie mesure des perceptions de l’âme. » Je ne suis pas bien sûr de comprendre parfaitement cette définition du goût ; mais, en tout cas, je crois pouvoir affirmer que c’est là un programme d’éducation bien difficile à exécuter. […] — Vous ne savez rien de la femme, vous qui voulez lui tracer un rôle conforme à vos systèmes, à vos goûts et à vos habitudes. […] Cela a permis au goût individuel de se produire d’une façon souvent piquante. […] Et ne seriez-vous pas tenté de dire que votre ami, malgré ses grands yeux et son goût pour la musique, est un fat insupportable ? […] Il n’est pas jusqu’au goût si naturel et si instinctif des femmes pour la parure, qui n’ait pris dans ces derniers temps un caractère tout particulier.
Ce goût lui vient de son grand maître Corneille. […] Cette restauration des cours d’amours marche de pair avec le goût des vieux meubles et des vieilles porcelaines. […] Pièces inachevées, sentiments obscurs, fautes de goût, harmonies grinçantes. […] Fontaine qui ne haïssait pas la gaudriole prit goût à ces réunions. […] Quand on l’en pressait, il invoquait son goût pour l’indépendance, la crainte de changer ses habitudes.
Il les dirige par l’influence de son goût. […] Ce n’est pas l’assentiment de notre goût qu’il désire ; mais il exige notre âme, afin de l’offrir à Dieu ; il veut forcer notre consentement intime ; il veut nous arracher, malgré nous, à l’abjection du doute et du dilettantisme. […] En même temps qu’elle est une œuvre universelle, la Passion selon Saint-Jean délicieusement garde un goût national. […] Pourtant ce goût de la vie sur les lèvres, il ne renonce pas encore à lui trouver de la douceur. […] Le Goût du Néant, p. 205.
Tout cela indépendamment du poète et de ses goûts propres. […] Or, c’est au contraire le goût de Laforgue d’être sincère incessamment et minutieusement ; c’est le goût de Laforgue et, suivant les principes de son esthétique, c’est aussi la condition de son Art, car tout ce qui s’écarte, même un peu, de l’intime vérité des choses est inexistant. […] Le poète est libre ; il n’a pas d’autre règle à suivre que son goût et, n’ayant plus à sa disposition de recettes catégoriques, il devra sans cesse élaborer des rythmes nouveaux. […] Chacune de ses œuvres, même les plus anciennes, témoigne de son goût pour la littérature du Moyen-Age et de la Renaissance : il lui emprunte des légendes, des mots et des tours de phrase. […] Son goût de l’allégorie, qui s’est déjà manifesté dans son œuvre avec éclat, mais à la façon peut-être un peu d’un brillant procédé littéraire, va devenir quelque chose de plus : sa philosophie.
S’il plut, ce fut moins par ce qu’il a de vraiment admirable que par des accessoires auxquels le goût de son époque attachait grand prix. […] Que d’idées, que de goûts imposés par l’opinion, par la coutume ! […] Ce qui nous lie et nous maîtrise malgré nos vœux, nos goûts, nos intérêts les plus pressants, est-ce le moi ou le non-moi ? […] L’esprit français a du goût, du mouvement, de l’entrain, peu de spiritualité sérieuse. […] « Un esprit sain puise à la cour le goût de la solitude et de la retraite.
Il avait, de bonne heure, renoncé aux études de lettres, pour se vouer aux sciences ; son tempérament tranquille et son goût pour la retraite le prédestinaient peut-être aux humbles fonctions de médecin de village, ou de modeste chimiste Mais il dut gagner son pain, comme simple employé de la maison Hachette ; et bientôt, peut-être, au contact de toutes les œuvres qui lui passaient par les mains, il sentit s’éveiller en lui les instincts littéraires. […] Mais les conditions peu avantageuses qu’il acceptait prouvent bien que son but, en écrivant ses romans, était bien plus de satisfaire à ses goûts de travailleur, à ses besoins d’artiste, que de gagner beaucoup d’argent. […] C’est là qu’il faut le voir, si l’on veut connaître ses goûts : ce sont ceux d’un collectionneur, ou plutôt d’un amateur de tout ce qui est ancien, de tout ce qui porte un souvenir et raconte une histoire. […] Zola, le seul du groupe, se trouve placé dans la critique militante ; par ce fait même, il est appelé à défendre les théories qu’on lui connaît ; il le fait avec d’autant plus de vigueur qu’il se sent appuyé par le suffrage et par les opinions des hommes dont il estime le plus le goût et le talent.
Je n’ai aucun goût pour ce genre d’opération. […] Je vous avoue que je ne m’en sens pas le goût, que je ne m’en sens pas le cœur. […] Ils n’en ont pas le goût, ils n’y ont point de compétence. […] Par goût acquis, gardé. […] Le goût du Turc est toujours très mauvais signe pour le classique français.
Mais la forme seule en était légère ; à un goût très sûr, M. […] — Ailleurs, c’est un trait de goût douteux. […] On en vient à admettre qu’il faut subir en art, comme en toutes choses, du médiocre : et alors, sans y prendre goût, oh ! […] Il n’a de goût vif que pour le délicat, le rare et le distingué. […] Il nous en donne presque le goût.
Chacun de nous probablement, avec un peu d’attention, se rappellera des jouissances du goût qui ont été de véritables jouissances esthétiques. […] Les sensations du goût ont si bien un caractère esthétique qu’elles ont donné naissance à une sorte d’art inférieur : l’art culinaire. […] Les parfums saisis par l’odorat ont la même valeur que l’arôme saisi par le goût. […] Au lieu de se plier au goût plus ou moins altéré d’une époque, le génie entreprend de le réformer ; or, le goût d’une époque est souvent plus facile à réformer (Corneille en a été encore un exemple) que celui d’une académie. […] V. plus loin notre analyse des sensations du tact, du goût, etc.
On y sent à chaque pas la renaissance du goût antique ; les gravures y témoignent de l’art retrouvé de Pompéi et d’Herculanum.
un manque de goût.
Mais ici, autour de l’idée principale, venaient naturellement se grouper une foule de questions accessoires que l’auteur a négligées et que provoquait l’esprit de l’époque : jusqu’à quel point est légitime et approuvé par le goût cet emprunt d’images étrangères ; en quoi il peut réellement consister ; si c’est en bravant l’harmonie par une foule de mots barbares tirés d’idiomes encore grossiers, ou en reproduisant simplement une pensée naïve, une coutume touchante d’un jeune peuple, si c’est en s’emparant sans discernement des êtres créés dans des mythologies étrangères, ou en ne s’enrichissant que des allégories ingénieuses et faites pour plaire en tous lieux, que le poète imitateur méritera dignement de la littérature nationale ; ou encore, s’il n’y a pas l’abus à craindre dans ce recours trop fréquent à des descriptions de phénomènes ; si Delille, Castel, que l’auteur cite souvent, et les écrivains de cette école qu’il paraît affectionner, s’en sont toujours gardés ; si enfin il n’y a pas souvent cet autre danger non moins grave à éviter, de parler à la nation d’une nature qu’elle ne comprend pas, d’en appeler à des souvenirs qui n’existent que pour l’écrivain, et réduire l’homme médiocrement éclairé à consulter Buffon ou Cuvier pour entendre un vers.
Diderot, dans quelques-uns de ces endroits, se reproche de marcher sur les brisées de Marivaux ou de Crébillon fils ; mais il a bien autrement de profondeur, de réalité et de goût ; Crébillon fils toutefois, dans ses ouvrages, plus estimables qu’on ne le croit communément, a tracé plus d’une analyse de cœur ingénieuse et civilisée qui soutiendrait assez bien le parallèle avec quelques passages de Diderot.
On ne peut guères comparer cet état qu’à l’effet du goût du sang sur les bêtes féroces, alors même qu’elles n’éprouvent ni la faim, ni la soif.
Cependant les luttes mesquines de ces tristes années ont développé l’énergie d’André, lui ont donné le goût de l’action.
Et il y a une incontestable pose dans le goût des femmes qui prétendent n’aimer plus Bourget.
Laforgue rêve d’écrire « l’histoire, le journal d’un Parisien de 1880 qui souffre, doute et arrive au néant et cela, dans le décor parisien, les couchants, la Seine, les averses, les pavés gras, les Jablochkoff, et cela, dans une langue fouillée et moderne, sans souci des codes du goût, sans crainte du cru, du forcené, des dévergondages cosmologiques du grotesque, etc. ».
Welcker traite avec beaucoup de mépris, et les œuvres de second ordre des littératures classiques, si elles servent moins à former le goût, offrent quelquefois plus d’intérêt philosophique et nous en apprennent plus sur l’histoire de l’esprit humain que les monuments accomplis des époques de perfection.
Autour de cette maison, ils plantent un petit jardin, et ils jettent les hauts cris si quelqu’un, y avisant des fleurs qui lui plaisent pour leurs nuances et leur parfum, mais à son goût mal disposées, les loue en peu de termes tout en faisant ses réserves sur le style décoratif du jardin.
Il trouvait un double avantage à la fréquentation de cette société, celui de satisfaire le goût très vif qu’il avait pour les jouissances de l’esprit, et de se dérober aux inquiétudes jalouses de Luynes, favori de Louis XIII, et défiant à l’égard de toute espèce de mérite, comme le sont d’ordinaire les favoris.
. — Parole du roi qui indique un goût très vif pour madame de Scarron.
C’était uniquement par plaisir que les trouvères — dénotant ainsi un étrange manque de goût — jonglaient avec un même son, en des suites de vers indéfinies.
On y découvre un historien d’un goût admirable & approchant de celui de Tacite.
Ces hardiesses, lorsqu’elles sont bien sauvées, comme les dissonances en musique, font un effet très brillant ; elles ont un faux air de génie : mais il faut prendre garde d’en abuser : quand on les recherche, elles ne deviennent plus qu’un jeu de mots puéril, pernicieux à la langue et au goût.
Étrange illusion, indigne de vous, digne tout au plus de ceux qui, loin de ces sanctuaires des fortes études, s’imaginent découvrir le goût dans un manuel et se figurent qu’on peut se préparer à sentir et à comprendre le génie !
Nous avons vû blâmer Homere d’avoir décrit avec goût les jardins du roi Alcinous, semblables, disoit-on, à celui d’un bon vigneron des environs de Paris.
Vaultier, né pour la rhétorique, sensible à ce bien dire si vain, dut être pour les phrases et les beaux parleurs de la Gironde, et il faillit payer de sa tête son goût pour eux.
Il a manqué deux fois de goût avec le bombast de son titre, et il en a été puni par l’effet que produit rétroactivement ce titre, d’une prétention si accusée, quand on a lu un ouvrage qui, au contraire, devait conseiller toutes les modesties de l’auteur.
En effet, je suis frappé (et je l’ai toujours été) de la consanguinité de ces deux hommes, tous les deux de la même double race : tous les deux Juifs, tous les deux Allemands, tous les deux poètes et reflétant dans leurs poésies leur double nationalité, entraînés tous les deux, par aptitude et par goût, vers la philosophie et la science ; mais dont l’un a brisé tout : religion, race, philosophie, système, pour s’asseoir, isolé et désespéré, au milieu des massacres de son esprit, comme un meurtrier au milieu de ses meurtres, et dont l’autre s’est conservé intégral, — noble, ferme et pur.
Ce poète, aux plus savoureuses nuances bucoliques, unit par nous écœurer à force de philanthropie, de communisme bénis, de fraternité universelle, enfin de toutes ces sucreries hypocrites avec lesquelles on espère nous masquer le goût vrai et âpre de la révolution future.
Arrivé à la dernière limite que les sensations puissent atteindre, et toujours affamé de sensations nouvelles, il s’imagine que de prendre la vie à rebours c’est le seul parti qui lui reste pour y trouver quelque goût et quelque saveur, et il le prend, ce parti de la vie à rebours, et il décrit tous les vains efforts qu’il fait pour l’y mettre.
Ingres des recherches d’un goût particulier, des finesses extrêmes, dues peut-être à des moyens singuliers.
Les hymnes qu’Horace fit pour les jeux séculaires de Rome, ont le mérite de la délicatesse et du goût ; mais combien elles sont au-dessous du sujet !
Il est agréable, mais plein de contrastes et d’antithèses : il paraît d’un genre d’éloquence où il y a plus d’esprit que de goût.
Il importe encore plus, je crois, d’être bon citoyen, qu’excellent orateur ; et s’il est utile de ne pas corrompre le goût, il vaut encore mieux ne pas corrompre les hommes et les princes.
Nous avons besoin de causer, de nous enthousiasmer, de raisonner sur des opinions spéculatives, tout cela fort légèrement, environ une heure par jour, ne livrant à ce goût que la superficie de nous-mêmes, si bien nivelés, qu’au fond nous pensons tous de même, et qu’à voir justement les choses on ne trouvera dans notre pays que deux partis, celui des hommes de vingt ans et celui des hommes de quarante ans. […] En un instant, par besoin d’action, il frappe, caresse, change cent fois de ton, de visage, avec de brusques mouvements, d’impétueuses saillies, quelquefois enfant, toujours homme du monde, de goût et de conversation. […] Ce peu qu’a perdu ta beauté est largement compensé par ton esprit992. » Et il insiste avec un goût exquis : « Oh ! […] Les anciens, dit-il, ont désigné les critiques, à la vérité en termes figurés et avec toute sorte de précautions craintives ; « mais ces symboles sont si transparents, qu’il est difficile de concevoir comment un lecteur de goût, doué de la perspicacité moderne, a pu les méconnaître. […] Je pense que les avantages de ce projet sont nombreux et visibles aussi bien que de la plus haute importance. — Premièrement, cela diminuera beaucoup le nombre de papistes, dont nous sommes tous les ans surchargés, puisqu’ils sont les principaux producteurs de la nation. — Secondement, comme l’entretien de cent mille enfants de deux ans et au-dessus ne peut être évalué à moins de 10 shillings par tête chaque année, la richesse de la nation s’accroîtrait par là de 50,000 guinées par an, outre le profit d’un nouveau plat introduit sur les tables de tous les gentlemen de fortune qui ont quelque délicatesse dans le goût.
C’est un second trait de l’idéal classique qui commence à se dessiner : le goût des idées générales ; ou, comme on va bientôt le dire, le goût de la réduction à l’Universel. […] 2º La Femme et l’Écrivain. — Les mésaventures d’une réputation royale ; — et comment Marguerite a été victime de l’excès ou de l’indiscrétion de son affection pour son frère, François Ier ; — du goût des biographes pour les anecdotes scandaleuses ; — et de son homonymie avec une autre Marguerite, qui est celle dont Le Pré-aux-Clercs, Les Huguenots et La Reine Margot ont popularisé la mémoire. — Mais les témoignages des contemporains, — et l’examen de ses œuvres elles-mêmes, y compris l’Heptaméron, — donnent d’elle une idée précisément contraire. […] — Ce qu’il y a de certain, c’est l’influence que ce mince volume a exercée sur la Pléiade. — Témoignages tirés des Œuvres de Ronsard et de Remy Belleau. — De quelques autres écrivains grecs édités pour la première fois par Henri Estienne ; — qu’ils sont tous du second ou du troisième ordre ; — et qu’il les traduit tous en latin. — Du goût d’Estienne pour les Analecta. […] Satire i] ; — le manque de goût et l’absence d’art [Cf.
C’est que l’exercice de cette critique flatte et développe des goûts très généralement répandus : le goût de la collection, le goût du rébus. […] est-il contraire à l’intérêt, à la vanité, aux sentiments, aux goûts littéraires de l’auteur ou de son groupe ? […] Les goûts personnels ou le patriotisme peuvent créer des préférences pour des personnages sympathiques ou des événements locaux ; mais le seul principe de choix qui puisse être commun à tous les historiens c’est le rôle joué dans l’évolution des choses humaines. […] C’est le don de voir les problèmes importants et le goût de s’y attacher, aussi bien que la puissance de les résoudre, qui, dans toutes les sciences, font les hommes de premier ordre. — Mais supposons le sujet choisi d’une façon rationnelle. […] Le mépris de la rhétorique, des faux brillants et des fleurs en papier n’exclut pas le goût d’un style pur et ferme, savoureux et plein.
Chaque élève a sa chambre, qu’il peut meubler et orner selon son goût. […] Il y a, dans cette prose alerte, des contrastes aigus, qui piquent la curiosité, avivent l’intérêt, excitent le goût. […] Quel sortilège efficace pourra nous redonner le goût de l’action, le désir d’entreprendre ? […] Chacun son goût. […] Ne cédez pas au goût des idées générales.
Vous croyez que le goût de la musique est un symptôme de progrès moral, voyez-y plutôt un signe d’affaissement général des caractères et de relâchement de la fibre virile. […] Loin de trouver les âmes de nos contemporains trop molles, je les trouve trop fortes encore pour mon goût. […] On a institué récemment des concerts populaires de musique classique, et on a constaté, contre l’attente générale, que le peuple prenait goût aux grandes œuvres musicales. […] Pour moi, si je l’ai défendu, c’est par un goût tout particulier, qui n’a, je le crois, aucune raison puérile, goût fondé sur les qualités nobles et sérieuses qui sont l’apanage de Werther. […] Il s’assied à vos côtés, le perfide, et, en même temps qu’il vous insinue ses poisons, il vous conseille d’espérer, de prendre goût à la vie, de l’oublier même.
Tous les snobs feignent d’avoir le même goût que la minorité exclusive qui, faisant bande à part, passe avec des airs de profond mépris devant tout ce qui jusqu’à présent a été réputé beau ; et c’est ainsi que l’humanité civilisée tout entière semble convertie à l’esthétique du Crépuscule des Peuples. […] Si Gœthe n’avait jamais écrit un seul vers, il n’en aurait pas moins été un homme d’excellente compagnie, de bons principes, un fin connaisseur d’art, un collectionneur plein de goût, un observateur pénétrant de la nature. […] Le public, auquel des fanatiques hystériques n’avaient pas encore imposé tyranniquement la foi à la beauté de ces œuvres et qui n’était pas encore sous l’empire de la mode inventée par les snobs esthétiques, et consistant à voir dans l’admiration pour celles-ci une marque de distinction et d’affiliation à un cercle étroit et exclusif de patriciens du goût, le public, disons-nous, alla à elles sans prévention et les trouva incompréhensibles et grotesques. […] Ils étaient faciles à imiter, car, lorsqu’on peignait dans le style des « primitifs », le dessin incorrect, l’absence du sentiment de couleur, l’impuissance artistique générale devenaient des qualités ; et ils contrastaient d’une façon suffisamment violente avec toutes les exigences du goût de l’époque, pour satisfaire le penchant à l’opposition, au paradoxe, à la négation, à la singularité, qui est, nous l’avons vu, le propre de l’imbécile.
… Voyez, il ne sait accueillir aujourd’hui que l’ironie terrible de Pascal ; demain peut-être il sera dompté par le puissant génie de Bossuet : heureux si, le jour suivant, il vient à prendre goût aux chants mélodieux de Fénelon, lorsqu’il charme notre exil par les plus douces paroles qui se soient trouvées jamais sur les lèvres d’un habitant de la terre ! […] Ballanche n’a été conduit là, au moins à ce qu’il me semble, que par suite d’une erreur de goût qui l’a porté à convertir et à traduire en poésie une opinion créée par la réflexion et l’analyse. » Nous croyons qu’il ressort de la biographie psychologique de M. […] Son élocution était lente ; toutes ses idées pures, choisies et nobles ; son goût exquis.
152 Il regarde ses animaux marcher et s’occupe de ce qu’ils ont en tête, « même quand ils vont par pays, gravement, sans songer à rien. »153 Il s’inquiète de leur dîner, veut savoir s’il est de leur goût. […] Sans se l’être marqué comme un géomètre, il y va par le chemin le plus sûr et le plus court, poussé par cet instinct irréfléchi, aveugle et divin, qu’on nomme le goût. […] 174 Rabelais, étourdi de ses détails et enivré de sa profusion, n’a pas aperçu ce geste ni rendu cette exclamation ; il dit seulement : « Tous choisissaient celle qui était d’or et l’amassaient, remerciant le grand donateur Jupiter. » Etrange puissance que celle du goût !
Thiers se souvient trop, en écrivant ces pages, de ce sophisme de situation qui a tué en quinze ans le gouvernement des Bourbons par sa plume ; il confond dans le premier Consul le goût héroïque du despotisme et le goût populaire de la liberté, afin de lui donner, selon les besoins de l’opposition, qui vit de sophismes, la popularité du dictateur et la popularité du libéral de 1830 : hermaphrodisme politique nécessaire à la mémoire du héros avec lequel on voulait faire une double guerre aux Bourbons. […] Si elle ne décelait pas le goût pur, la foi simple et solide des écrivains du siècle de Louis XIV, elle peignait avec charme les vieilles mœurs religieuses qui n’étaient plus.
Mon père, dont j’étais le seul enfant, servait complaisamment mes goûts ; il aimait à me procurer des œufs, des fleurs, des oiseaux. […] « Je reçus de mon père un don qui me fut doublement agréable, et par la valeur même du cadeau, et par le charme d’une attention qui flattait mes goûts les plus prononcés. […] M’étant muni d’une belle ligne et des insectes que je savais le plus de son goût, je gagnai un banc de sable recouvert par un pied d’eau environ, et où j’avais préalablement reconnu plusieurs de ces dépôts d’œufs.
La science n’est pas une dispute d’esprits oisifs sur quelques questions laissées pour servir d’aliment à leur goût pour la controverse. […] Il faut être conséquent : si faire son salut est la seule chose nécessaire, on se prêtera à tout le reste comme à un hors-d’œuvre, on n’y sera point à son aise ; si on y met trop de goût, on se le reprochera comme une faiblesse, on ne sera profane qu’à demi, on fera comme saint Augustin et Alcuin, qui s’accusent de trop aimer Virgile. […] Le besoin de remplir une vie calme et retirée par d’utiles travaux, des goûts studieux, l’instinct de la compilation et des collections peuvent rendre à l’érudition d’immenses services, mais ne constituent pas l’amour pur de la science.
À la répétition générale, la partition a été simplement allégée de son ouverture, de quelques passages importants, et l’on a, cela va de soi, conservé le ballet ; l’ouvrage se trouve ainsi mieux accommodé au goût parisien, et beaucoup d’habitués de la salle Garnier sont persuadés que Sigurd sera un grand succès. […] Et nous pouvons expliquer ce progrès par une notion claire à tous : Beethoven a arraché la musique à l’influence de la mode et du goût changeants, pour l’élever à un type d’éternelle valeur, purement humainbo. […] Les considérations précédentes nous ont rendu assez familier le tempérament spécial de Beethoven pour que nous comprenions aisément ses goûts au sujet de l’opéra, et cette aversion qui le portait à refuser, avant tout, la composition d’un opéra sur un livret de tendances frivoles.
Il nous avoue qu’alors, indépendamment du goût qu’il avait pour les costumes voyants, il était possédé de l’envie de produire un effet sur les passants : envie qui se trouvait mélangée d’une extrême timidité, le rendant tout honteux, et le faisant se sauver, quand l’effet se produisait. […] Puis je me répands, dans Paris, cherchant de l’œil mes affiches, et ma foi escomptant un fort quart de mon roman, je termine la journée par une visite chez Bing, où indépendamment d’une boîte de Ritzouo de 500 francs, j’achète 2 000 francs, un chef-d’œuvre de Korin, une écritoire en laque d’or, où est répandue, couvrant le dessus et le dedans, une jonchée de chrysanthèmes aux fleurs d’or, au feuillage de nacre : un objet d’un goût barbare merveilleusement artistique. […] * * * — Tous les hommes avec lesquels ma carrière, mes goûts, m’ont mis en rapport, s’en vont l’un après l’autre de la vie, laissant derrière eux des lettres de faire-part, semblant me dire à bientôt.
Mais, si elle a moins d’originalité et moins de profondeur, elle a aussi bien plus de convenance, de choix et de goût dans l’esprit. […] XXXI C’est de la chaire sacrée principalement que naquit, sous Louis XIV, ce goût élevé pour la haute littérature. […] Cette tribune sacrée du sacerdoce moderne fut en réalité à cette époque, et à son insu, la plus puissante institution littéraire qui pût initier le peuple illettré au sentiment, au goût et même au jugement des lettres.
Il n’a obéi à d’autre nécessité qu’à son goût personnel d’observer et d’écrire ; jusque dans ses productions les moins flatteuses on sent de l’aisance. […] Le Pilote et le Corsaire rouge de Cooper avaient mis le public français en goût de cette vie de périls et d’aventures ; on admirait à chaque salon Gudin.
Le lendemain du triomphe, au lieu d’entrer, par un mouvement qui eût semblé naturel, dans la pratique et le maniement politique, il distingua sa propre originalité et se maintint dans une ligne plus d’accord avec ses goûts véritables. […] Et puisque nous sommes en train d’oser, il ne serait pas juste, en quittant l’un des écrivains les plus respectés et les plus considérables de notre temps, de ne pas toucher à l’homme, et de ne pas au moins nommer en lui quelques-uns de ces traits si rares et qui accompagnent si bien le talent, sa simplicité, un caractère aimable, resté fidèle à ses goûts et à ses affections, quelque chose de gracieux qui, ainsi que nous l’avons noté chez son ami M.Thiers, se rattache à la patrie du Midi et aux dons premiers de cette nature heureuse.
Elle était ennuyée de toutes les affaires dont son odieux favori voulait qu’elle se mêlât, et n’avait de plaisir qu’à gaspiller en robes et en bijoux les millions que la bassesse du contrôleur général lui fournissait avec profusion ; soit crainte, soit goût, soit faiblesse, elle était entièrement livrée aux volontés despotiques de M. […] Telle était la position où se trouvaient dans ce moment les ennemis du tripot ; la connaissance qu’ils avaient du goût du roi pour les sacrements, de son idée sur l’efficacité d’un acte de contrition, et sur le besoin qu’il en avait, leur persuadait bien qu’on touchait au moment où son amour pour la religion, ou son envie de donner un bon exemple en ce genre, allaient lui faire demander son confesseur ; mais leur opinion, partagée par Mesdames, la leur rendait encore plus certaine.
Or ce cas, que j’avais prévu, se présente jusqu’à un certain point en ce moment, et c’est ce qui, malgré mon goût pour le silence, m’oblige à le rompre et à parler. […] Je ne sais, mais vous me mettez en goût d’interdiction, messieurs de la Commission : eh bien, je vais vous signaler une lacune ; votre liste, si longue qu’elle soit, est incomplète : messieurs, il y manque Molière, il y manque Tartuffe.
Le patient aspira un moment et présenta ensuite tous les phénomènes qu’éprouverait une personne qui viendrait de prendre une poudre sternutatoire. » — Pareillement, « dites à une personne convenablement disposée par l’hypnotisme qu’elle mange de la rhubarbe, qu’elle mâche du tabac ou quelque autre substance désagréable au goût… et l’effet suivra vos paroles. […] Il le loua comme excellent — cette eau avait bien pour lui le goût du brandy — et il en demanda d’autre tout en buvant avec avidité. — Dans un second cas, J.
Si individuel et subjectif que soit son livre, il s’éloigne du goût classique plutôt par une différence d’application que par une contrariété de principes. […] Mais si nous trouvons une étroite correspondance entre le génie de Montaigne et le genre classique, il faut bien songer que Montaigne, qui déborde encore un peu des cadres classiques, correspond à ce qu’il y a eu de plus large, de plus compréhensif dans le goût du siècle suivant : il en a tout le positif, mais point le négatif.
C’est dans le « Chœur des racoleurs » qui vont embauchant les coquins le long du quai de la Ferraille : Les belles ont le goût des héros… Voilà le thème. […] Et Voici le développement ; il est proprement fantastique : Les belles ont le goût des héros, et le mufle Hagard d’un scélérat superbe sous le buffle Fait briller tendrement l’hiatus des fichus Quand passe un tourbillon de drôles moustachus Hurlant, criant, affreux, éclatants, orgiaques, Un doux soupir émeut les seins élégiaques.
Chez Pouchkine la verve ne fait pas défaut assurément, mais elle est accompagnée d’un goût sévère et d’un désir de la perfection que le « travail de la lime » limæ labor, ne rebute pas. […] Ses images toujours pleines de vérité et de vie sont plutôt indiquées que développées, et c’est avec un goût tout à fait hellénique qu’il dirige l’attention du lecteur.
Ajoutez à ce premier attrait une langue dont les nouveautés viennent des choses, non des mots, et qui nous donne le plaisir du changement sans qu’il en coûte rien au goût. […] Une morale, c’est plus que le goût de tout ce qui est moral, plus que l’amour du droit, plus que la justice et la bienfaisance ; c’est la certitude que toutes ces choses ne sont pas de purs mérites de la volonté, mais des lois divines obéies, et qu’en les pratiquant d’un cœur sincère, on reste infiniment au-dessous de ce qu’elles prescrivent.
On ne tardera donc pas à rire de ces rieurs et à retrouver le goût de la vie sérieuse. […] Mais cette activité ne tardera pas à se proclamer elle-même impuissante, et l’on comprendra alors que la grande révolution ne viendra pas des hommes d’action, mais des hommes de pensée et de sentiment, et on laissera ce vulgaire labeur aux esprits inquiets, et toutes les âmes nobles et élevées, abandonnant la terre à ceux qui en ont le goût, tenant pour choses indifférentes les formes de gouvernement, les noms des gouvernants et leurs actes, se réfugieront sur les hauteurs de la nature humaine et, brûlant de l’enthousiasme du beau et du vrai, créeront cette force nouvelle qui, descendant bientôt sur la terre, renversera les frêles abris de la politique et deviendra à son tour la loi de l’humanité.
Si l’on considère les débauches élégantes de la cour et du grand monde, le goût de persiflage qui règne dans les salons à la mode, la grivoiserie qui gâte alors tant d’écrits et des plus sérieux, on est tenté de lui assigner un rang peu élevé sur l’échelle de la moralité. […] Il advient même qu’à force de répudier tout souci de la morale certains auteurs se plaisent à la heurter dans leurs ouvrages ; qu’ils prennent un goût dépravé pour les pourritures élégantes, pour les paradoxes effarouchants, pour les crudités répugnantes ; et alors, dénoncés par les moralistes comme des corrupteurs de parti pris et des malfaiteurs publics, ils compromettent et avilissent avec eux la littérature.
Au contraire l’idée d’une orange résulte réellement des idées simples de couleur, forme, goût, etc., parce qu’en interrogeant notre conscience, nous pouvons discerner tous ces sentiments dans notre idée. […] Le résultat de leur sensibilité médiocre sera vraisemblablement l’amour de la science ou de la vérité abstraite, et le défaut de goût et de chaleur.
Cette femme est vaincue par Dieu parce qu’elle n’a pu devenir la maîtresse d’un ingénieur de son goût ! […] Elle va au vice comme elle est allée au mariage, sans goût ni dégoût.
M. de Chateaubriand, au milieu des songes et des fantômes de son imagination, a toujours eu le goût des études sérieuses. […] il passera une vie frivole à s’occuper de chicanes grammaticales, de règles de goût, de petites sentences littéraires !
Elle écrivait à une de ses amies : « Mon éducation un peu sauvage, « comme elle se fait dans les bois, et mes goûts retirés offrent peu d’agrément à une femme du monde. » Et sa modestie la trompait. […] ; soit enfin à, surveiller le ménage qu’elle dirigeait avec infiniment de goût et d’intelligence.
Mais imaginez une société composée de groupements spécialisés, dont l’organisation est orientée vers une certaine fin, — les uns destinés par exemple à servir certains intérêts économiques, les autres à contenter certaines aspirations religieuses, ou certains goûts esthétiques, — alors il semble impossible qu’une société ainsi composée ne se complique pas. […] La province dont je suis, le « monde » où je vis, le public du journal que je lis, sont des groupements dont la mainmise sur ma conduite, mes goûts, mes idées est manifeste, mais ils ne sont pas officiellement constitués, ils n’ont pas demandé d’autorisation pour vivre, la statistique les laisserait échapper.
Mais ces plaisirs, un peu longuement analysés par Buffon, sont tous de l’ordre physique : la perception de la lumière, le mouvement, le toucher, la satisfaction de l’odorat et du goût. […] Si donc, lecteur qui parcourez ces pages par une étude de spéculation et de goût, vous ne voulez jamais oublier le côté sérieux des arts, ce qui touche à l’énergie de l’âme, à la passion du devoir et du sacrifice, à la liberté morale, même pour bien juger les grâces et la puissance du lyrisme hellénique, vous aimerez à réfléchir sur une beauté plus sévère : vous contemplerez cette originalité plus étrangère, plus lointaine pour nous, et cependant incorporée dans notre culte religieux et partout présente, que nous apporte la poésie des prophètes hébreux, de ces prophètes nommés par le Christ à côté de la loi, dont ils étaient, en effet, l’interprétation éclatante et figurée.
Ses travaux de philosophe et de critique se ressentent de cet intérêt pour la musique : Les Idées de Nietzsche sur la musique (Mercure de France, 1905), L’Esprit de la musique française (Payot, 1917), Philosophie du goût musical (Grasset, 1922). […] C’est là qu’il commença son instruction, Mme de Warens lui épura le goût, lui fit sentir la belle langue de la passion et de la mysticité. […] Quand on ne se laisse pas prendre à son beau feu, cet homme, dont Adolphe nous a montré, en même temps que la misère de volonté, l’extraordinaire finesse de pensée et de goût, perd toute convenance d’imagination, toute délicatesse de procédé. […] C’est un plaisir, par exemple, pour l’homme de goût, de chercher jusque dans les romans les plus forcés de la période romantique de G. […] Il leur était impossible de rivaliser avec elle sans se mettre intérieurement à son ton, Elle les faisait pareils à elle par l’habitude de leur esprit, comme aussi le goût ardent qu’ils lui vouaient devait éteindre chez eux celles des exigences intellectuelles et esthétiques qu’elle sacrifie, et qui se rapportent à la justesse, à la vérité et au naturel.
Quand M. de Sénancour écrivait Oberman, il ne se considérait pas comme un homme de lettres ; ce n’était pas un ouvrage littéraire qu’il tâchait de produire dans le goût de ses contemporains.
Rien de plus juste : ce malheureux goût de style et d’art est comme une gale qui s’attache à vous et gâte toute votre vie.
On voit que, dans une chose quelconque, son goût apathique le porte du côté où il y a le moins d’embarras, dût-il être le plus mauvais. » Et plus loin : « Les nouvelles de la Bavière sont en pis… On prétend que le roi évite même d’être instruit de ce qui se passe, et qu’il dit qu’il vaut encore mieux ne savoir rien que d’apprendre des choses désagréables.
La Révolution, longtemps sur la défensive et ne combattant d’abord que pour ses foyers, prend goût à la lutte, s’anime à la conquête ; toute son énergie semble refluer et déborder aux frontières.
Avant d’avoir lu ces lettres, et malgré notre goût bien vif pour tous ses autres ouvrages, il manquait quelque chose à l’idée que nous nous formions du grand homme ; de même qu’on ne comprendrait pas Mirabeau tout entier si l’on ne connaissait aussi ses lettres écrites à la Sophie qu’il aimait.
A mesure que l’heure irréparable d’asseoir grandement l’état transitoire que nous concevions s’écoulait dans une inertie impuissante ou dans des tâtonnements rétrogrades, notre goût pour la lutte passionnée et pour l’attaque immédiate diminuait.
… « Il n’y a un véritable ordre que quand on ne peut en déplacer aucune partie sans affaiblir, sans obscurcir, sans déranger le tout…… « Tout auteur qui ne donne point cet ordre à son discours ne possède pas assez sa matière ; il n’a qu’un goût imparfait et qu’un demi-génie.
Ce grand seigneur bouscule règles, goût, bienséances, pour mettre son tempérament tout à fait à l’aise dans son style ; entre Voltaire et Montesquieu, il écrit comme il ne sera permis d’écrire qu’au temps de Hugo et de Michelet.
quels maîtres coups de corne administrés au goût, à la raison, au sens véritable des choses !
Et en même temps, ses propres sens sont si éduqués que de simples visions, goûts, parfums, etc., l’affectent comme nous feraient des émotions abstraites.
Une génération nouvelle se levait, éprise de sports et de vie agissante, qui n’avait guère le goût des spéculations métaphysiques ni des subtilités prosodiques.
D’un autre côté, le manque total de goût pour les arts et pour ce qui contribue à l’élégance de la vie matérielle, donne à la maison de celui qui ne manque de rien un aspect de dénûment.
Les cas de ressemblance physique entre père et fils, oncle et neveu, grand-père et petit-fils sont des plus fréquents : de même aussi goûts et façons de sentir se transmettent d’une génération à une autre ; un ancêtre revit et agit tout à coup dans quelqu’un de ses descendants.
Quelle idée avantageuse peut-on s’en former, quels fruits peut-on s’en promettre pour la culture de l’esprit & la perfection des mœurs, quand on voit les vrais principes attaqués, les regles méconnues, les bienséances violées, l’anarchie & la confusion établies sur les débris du goût & de la raison ; quand la Religion, la morale, les devoirs, la vertu, deviennent la proie d’une Philosophie extravagante qui outrage l’une, corrompt l’autre, prononce sur ceux-ci, & défigure celle-là au gré de ses caprices ou de ses intérêts ?
Ainsi, il est évident que quand une philosophie aussi savante et aussi éloquente que celle de Job nous apparaît tout à coup avec le livre qui porte ce nom dans la Bible, cette sagesse, cette expérience, cette éloquence, ne sont pas nées sans ancêtres du sable du désert, sous la tente d’un Arabe nomade et illettré ; il est également évident que quand un poète comme Homère apparaît tout à coup avec une perfection divine de langue, de rythme, de goût, de sagesse, aux confins d’une prétendue barbarie, il est évident, disons-nous, qu’Homère n’est pas sorti de rien, qu’il n’a pas inventé à lui seul tout un ciel et toute une terre, qu’il n’a pas créé à lui seul sa langue poétique et le chant merveilleusement cadencé de ses vers, mais que derrière Job et derrière Homère il y avait des sagesses et des poésies dont ces grands poètes sont les bords ; littératures hors de vue, dont la distance nous empêche d’apprécier l’étendue et la profondeur.
Mais les trois alliés du lion qui ne lui coûtent rien, son courage, sa force, avec sa vigilance, est une tournure d’un goût noble et grand, et presque oratoire.
Les dessins lavés au bistre et à l’encre de la Chine sont sublimes, tout à fait dans le goût des plus grands maîtres ; rien de maniéré, de petit, ni de moderne soit pour la composition, soit pour les caractères, soit pour la touche.
Discours d’un homme sans goût et de peu du bonne foi.
Mais l’art des représentations théatrales où nos jeunes gens avoient pris un grand goût se perfectionna avant peu : d’abord on récitoit des vers faits sur le champ, mais bien-tôt on apprit, continuë Tite-Live, à faire des pieces suivies, et du temps du poëte Andronicus la récitation de quelques-unes de ces pieces se trouvoit déja être mesurée, et l’on en écrivoit déja la note pour la commodité des joüeurs de flutes.
Tout esprit distingué, qui a un goût distingué, choisit ainsi ses auditeurs lorsqu’il veut se communiquer ; en les choisissant, il se gare contre les autres.
Je crois même sentir en le lisant qu’il a peut-être du goût pour cette société qui n’est plus, et qui sait ?
le Journal de Louis XVI montre parfaitement que ce Roi auquel on avait donné des mœurs bourgeoises — car on voulait à toute force qu’il fût un bon bourgeois dans sa maison, le dos au feu, le ventre à table, — était, de pied en cap, aussi prince de goûts et de mœurs que peut l’être un prince, et, chose nouvelle et plus stupéfiante encore !
En nous résumant donc sur la valeur d’un homme dont le talent, curieux à étudier, fut plus grand que la renommée, nous dirons que l’auteur des Confidences et du Couvre-feu est, comme tous les poètes célèbres de son temps, un grand talent de décadence, mais dont l’âme, très peu de son époque, rachète la fausseté du goût.
Cependant le mien a du goût… Je ne dis pas non, mais le titre est mauvais !
Si cela est, la faute de goût a été punie, car les Aventures parisiennes n’ont pas fait plus de bruit que si elles s’étaient appelées Nuances du cœur, qui était peut-être leur vrai nom.
Il les juge un peu à la vapeur, mais aussi bien qu’un esprit attentif puisse faire dans ce lancé de locomotive ou de steamer que l’on appelle maintenant voyager, et en attendant la découverte d’un moyen d’observation supérieure en rapport avec la rapidité des voyages ; car la vapeur, qui nous donne la vitesse des aigles, ne nous en donne pas le regard… Quoi qu’il en soit, des notions exactes en bien des choses, mêlées à des souvenirs classiques dont nous aimerons toujours l’écho, un style animé, qui a quelquefois, il est vrai, comme une éruption d’épithètes, — mais certaines marques ne nuisent pas à certains visages expressifs, — telles sont tes qualités d’un livre sans prétentions et dont l’auteur, d’un goût parfait, ne s’exagère pas d’ailleurs la portée : « J’ai vu — dit-il — Athènes avec bonheur, Constantinople avec étonnement, le Caire avec une vive curiosité.
On peut donc conclure de tout ce qui s’est dit dans cet ouvrage, que la Science nouvelle porte nécessairement avec elle le goût de la piété, et que sans la religion il n’est point de véritable sagesse.
C’est pour la fête du martyr, dont il occupait la chaire épiscopale, qu’il revint aux goûts poétiques de sa jeunesse, et exprima dans un des mètres d’Horace ces sentiments d’un ordre si nouveau.
» Au quatrième acte, il souffre dans son goût de logique et sa passion de vérité autant que dans son amour. […] Et voici une très gracieuse scène, dans le goût de Pétrarque, où le prince Louis de Tarente déclare sa flamme à la reine, et où elle fait à son tour le doux aveu. […] Rousseau nous dit : « Ayant à plaire au public, Molière a consulté le goût le plus général de ceux qui le composent : sur ce goût, il s’est formé un modèle, et sur ce modèle un tableau des défauts contraires, dans lequel il a pris ses caractères comiques, et dont il a distribué les divers traits dans ses pièces. […] C’est que, cette vie déshonorée, il la mène moins par goût naturel que par respect de son génie et de son art, et qu’ainsi ses vices sont artificiels et scéniques comme ses vertus. […] L’Art est si occupé à traduire qu’il n’a pas le temps ni le goût de condamner.
Il a voulu être un héros à la Plutarque, un tyrannicide dans le goût d’Harmodius et d’Aristogiton. […] Et je ne sais quoi d’irréductible, qui vient du plus profond de mon passé spirituel, s’insurge en moi, soit contre cette inconsciente impiété, soit contre cette monstrueuse faute de goût. […] Autre question : de ces tournées d’« étoiles » européennes, faut-il espérer la formation d’un goût européen ? […] Mais elles n’en donnent que des versions effrontément écourtées à leur usage : et ainsi le « goût européen » qu’elles propagent c’est le goût pour Mme Duse et pour Mme Sarah Bernhardt. […] il se pliait au goût de la foule ; il condescendait à la romance la plus éhontée, ou à la « religiosité » la plus vague et la plus veule.
Pendant qu’il travaille, penché sur la planche de cuivre, qui lui met un reflet rouge sur la figure, il me confesse ses goûts de bibeloterie, son amour des bois sculptés du xviiie siècle, et il m’avoue que pour le tableau qu’il finit dans le moment, tableau vendu seulement 2 000 francs, il vient d’acheter un cadre, aux armes de France, de 1 500 francs. […] » Pour la première fois, vient ce soir chez Daudet, Mme Martel, ou plutôt Gyp, à l’élégance brisée du corps, dans une toilette blanche d’un goût tout à fait distingué. […] Mais là, pétrir de la glaise ne lui semblait pas, avec les idées de son enfance, l’œuvre d’un vrai sculpteur, d’un sculpteur frappant, à tour de bras, sur de la matière dure ; et il entrait dans un atelier de médailliste, où se creusaient des coins, où l’on incisait le métal : vivant alors de travaux commencés pour des camarades, de bronzes de poignées de commodes, pour un réparateur de vieux meubles, et venant à l’atelier d’une manière intermittente, et travaillant sans goût. « Car, s’écrie-t-il, en levant la tête de sa terre, il n’y a que sept ou huit ans, que l’amour du travail m’est venu… et seulement, quand j’ai été encouragé par des gens, dont j’estimais au plus haut degré le talent… quand j’ai été encouragé par Rodin. » Et maintenant, c’est un rude et acharné travailleur, s’appliquant, dans les loisirs que lui laissent ses médaillons, à faire de l’objet de la vie usuelle, un objet d’art, ayant à l’exposition du Champ-de-Mars, de cette année, des corbeilles à miettes, des brosses, des bougeoirs, des jetons, des cartons pour estampes, des couvertures gaufrées de catalogues, des programmes du Théâtre-Libre. […] Pour avoir le goût fiévreux du travail et de la production, il faut presque toujours avoir grandi dans l’activité des capitales. […] Vendredi 14 décembre Aux curieux d’art et de littérature, qui dans le xxe siècle, s’intéresseront à la mémoire des deux frères, je voudrais laisser un inventaire littéraire de mon Grenier, destiné à disparaître après ma mort ; je voudrais leur faire revoir dans un croquis écrit, ce microcosme de choses de goût, d’objets d’élection, de jolités rarissimes, triés dans le dessus du panier de la curiosité.
Bref, le poète, le peintre, le sculpteur, le musicien obéira aux lois subtiles de l’Équilibre et de l’Harmonie, dont le seul goût de l’artiste peut décider. […] … Enfin, si je parais critiquer vos vers, pour l’homme de goût et d’intéressante causerie, pour le très érudit amateur que vous êtes, Monsieur, je professe et garde une entière, cordiale et respectueuse sympathie. […] Petit salon Empire, d’un goût charmant et suranné. […] Nous devons, certes, remercier le grand Ronsard de nous avoir tracé, même à ses dépens, la route inconnue de la véritable poésie lyrique ; mais puisque nous avons le bonheur de pouvoir suivre l’exemple d’un Racine et d’un La Fontaine, ne nous entêtons pas à bouleverser l’ordre de la beauté, et gardons-nous de l’ambition de plaire un instant à quelques personnes d’un goût bizarre. […] Ils usent, suivant leur goût, de tous les éléments de cadence qui sont fournis par le langage.
Mais elle a le droit d’être la voix des aspirations confuses du public pour dire aux écrivains : — Tel goût a vieilli. […] Vous courez tout droit (c’est un goût très féminin) à ce qui ébranle les nerfs, secoue la chair d’un frisson, fait détourner la tête et les yeux ! […] Elle est visible dans les tendances de la jeune génération, dans ses goûts, dans ses rêves, dans ses romans. […] Ils douteront alors du goût public, mais non de leur journal, qui dit toujours vrai et ne vend point ses éloges. […] Elle a sans doute plus d’une cause, cette crise du roman contemporain, cette mue du goût général.
Et le lendemain, voyant qu’il avait bien raisonné la veille, il se dit encore : « Tu te lèveras le matin, entre sept et huit heures, et la vieille Katel t’apportera ton déjeuner, que tu choisiras toi-même, selon ton goût. […] D’après cette peinture, le grand-père Frantz Sépel avait dû faire bien des envieux, et l’on s’étonnait que son petit-fils eût si peu de goût pour le mariage. […] Souvent alors il descendait, afin de jouir de ce spectacle, car il avait fini par prendre goût au bétail, et c’était un véritable plaisir pour lui de voir ces bonnes vaches, calmes et paisibles, se retourner à l’approche de la petite Sûzel, avec leurs museaux roses ou bleuâtres, et se mettre à mugir en chœur comme pour la saluer. […] C’est encore plein de rosée, et ça conserve tout son goût naturel, toute sa force et toute sa vie. » Christel le regardait d’un air joyeux.
Un instinct plus doux l’attachait à cette maison ; quoique la vieillesse qui s’approchait eût donné de la gravité à ses goûts et imprimé quelques lignes grises aux belles ondes de sa magnifique chevelure, il pouvait plaire encore à l’innocente admiration du premier âge et inspirer naïvement les sentiments qu’il rougissait de ressentir. […] Ses goûts étaient d’un chevalier né dans un château des campagnes ; il avait l’instinct de l’épée ; à peine celui des lettres et de la poésie l’égalait-il ? […] Desmoutiers, dans ses Lettres à Émilie sur la mythologie, avait donné l’habitude et le goût de cette poésie païenne ; le jeune Aimé Martin lui donna, dans la même forme, plus de sérieux, de science et de gravité, en traitant de même un autre sujet, les phénomènes de la nature. […] Leurs ombres n’ont pas besoin de l’éclat qu’ils ont fui pendant leur vie ; mais si elles s’intéressent encore à ce qui se passe sur la terre, sans doute elles aiment à errer sous les toits de chaume qu’habite la vertu laborieuse ; à consoler la pauvreté mécontente de son sort ; à nourrir dans les jeunes amants une flamme durable, le goût des biens naturels, l’amour du travail et la crainte des richesses.
À défaut d’actions étonnantes, il a besoin de voyager dans des pays étranges et lointains pour tromper son goût d’aventures. […] C’est le style d’un vrai poète, qui, ayant pris dans l’étude des poètes anglais le goût du rêve et de la nuance, trouve notre vers trop rigide pour écrire en vers et qui, écrivant en prose, donne libre cours à son imagination très riche et à sa fantaisie très harmonieuse. […] Tout artiste puissant et original doit nécessairement heurter le goût de ses contemporains, car il apporte une façon nouvelle de sentir, et une façon nouvelle de sentir ne peut s’exprimer fortement qu’avec des moyens nouveaux. […] Je serai content ou mécontent, mais comment imposerai-je mes goûts à l’artiste ?
Indiana ignore que l’homme qu’elle distingue, et qui semble lui devoir rendre l’espérance, le goût de la vie, s’est adressé à une autre qu’elle, et si près : le jour où Noun sait tout, ou plutôt la nuit orageuse et sinistre de cette découverte, la pauvre fille se noie.
Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure.
Nous remontons sans doute au moyen âge aussi ; mais c’est là, surtout au théâtre, une fièvre chaude, un peu factice, et qu’il est difficile de faire partager au grand nombre : au lieu qu’avec le xviiie siècle, nous ne nous sentons pas tellement éloignés que cela ne rentre aisément dans nos goûts au fond et dans nos mœurs, sauf un certain ton, un certain vernis convenu qu’on jette sur les personnages, un peu de poudre et de mouches qui dépayse et rend le tout plus piquant.
Deux ou trois fois notamment, quelques murmures soulevés ont fait peu d’honneur au goût littéraire de ceux qui se les permettaient.
Cependant, avec quelque goût naturel, on comprendra ce qu’il faut rejeter ou accepter, et où l’on doit diriger son invention.
Ces prédicateurs protestants, et non seulement Viret, mais Calvin même qu’on croit si austère, sont tout près de Menot et de Baulin, ils y touchent non par le temps seulement, mais par le goût.
Avec son vocabulaire opulent et varié, d’où surgissent à chaque phrase les mots strictement choisis, avec sa claire vision de paysages fondus, ses images dorées, ses plastiques ondulantes ou sévères, M. de Régnier a le goût qui distingue, élit, compare et dispose ; il a l’instinct souverain de l’ordonnance qui assigne à ses poèmes la solidité du verbe immobilisé comme un marbre.
Pénétration la plus intime des secrets de la psychologie spontanée, haute habitude de la psychologie et des sciences philosophiques, étude expérimentale de l’enfant et du premier exercice de sa raison, étude expérimentale du sauvage, par conséquent connaissance étendue des voyages, et autant que possible avoir voyagé soi-même chez les peuples primitifs, qui menacent chaque jour de disparaître, au moins avec leur spontanéité native ; connaissance de toutes les littératures primitives, génie comparé des peuples, littérature comparée, goût délicat et scientifique, finesse et spontanéité ; nature enfantine et sérieuse, capable de s’enthousiasmer du spontané et de le reproduire en soi au sein même du réfléchi.
À cette époque le bel esprit avait perdu de son importance, la mode avait amené le goût de l’étude et des sciences.
Ceux de poule & de perdrix ne blessent ni le goût, ni l’oreille, dans ces Vers de M.
Marquis, le chocolatier, collectionneur d’un goût supérieur dans l’exotique, et qui a été un des premiers à posséder les plus beaux et les plus curieux objets japonais.
Sa tombe fut encore honorée d’une épitaphe* dans le goût du temps.
Vandale, après avoir décrié les oracles, se proposoit encore, sur le succès de son entreprise, de décrier certains pélerinages, quelques pratiques de dévotion mal entendues : mais Fontenelle, après la publication de ses idées philosophiques, ne fut pas tenté d’en publier de nouvelles dans ce goût.
Digne par la proportion de son modèle, le portrait de Chateaubriand a donc été une toile à l’huile parmi les aquarelles de Monselet, et si vous ôtez quelques taches de goût, grandes comme des mouchetures sur une glace limpide13, vous avez là une pure et lumineuse peinture d’histoire littéraire dans laquelle le Monselet du xviiie siècle n’a eu absolument rien à faire ni rien à voir… On sait si le génie de Chateaubriand, à part même son christianisme, fut antipathique au xviiie siècle, et aujourd’hui que le xviiie siècle, mal mort, voudrait recommencer de vivre, Chateaubriand, moqué par Morellet et Chénier, a retrouvé dernièrement un nouveau Morellet dans Stendhal.
Peut-être Livet (c’est presque d’Olivet, par le nom du moins,) attend-il d’être académicien à son tour pour reprendre l’histoire de l’Académie de 1700 jusqu’à nos jours ; mais, s’il attend cela, nous n’aurons qu’une histoire dans le genre et le goût de celles qu’il a rééditées, c’est-à-dire sans vue, sans profondeur et sans vérité.
De Portraits intimes en portraits intimes de cette époque dont ils ont le goût, qui est déjà une corruption, ils sont arrivés à cette grande figure de Marie-Antoinette, plus grande que le cadre du siècle dans lequel elle est renfermée ; et, le croira-t-on ?
De Portraits intimes en portraits intimes de cette époque dont ils ont le goût, qui est déjà une corruption, ils sont arrivés à cette grande figure de Marie-Antoinette, plus grande que le cadre du siècle dans lequel elle est renfermée ; et, le croira-t-on ?
Toute cette glace empilée n’abolit pas le goût du breuvage, facile à reconnaître, que Ranke nous a versé.
Il les aimait comme ce monstre camard de Gibbon, qui n’avait pas le physique de son goût, et dont le visage causa une si grande peur à l’aveugle Madame du Deffand, quand elle l’eut embrassé et tâté, croyant que ce n’était pas un visage… Gibbon et Sismondi recherchaient beaucoup la société des femmes, par amour du contraste, probablement.
Ils paraissent insuffisants, fades et même fadasses aux goûts développés et à la fureur d’un temps dépravé.
Sa petite morale par elle-même est déconcertée de cela, et je le crois bien ; mais ce n’est pas là une raison pour avoir, en exprimant un jugement faux, une familiarité qui n’est pas seulement un manque de respect, mais une faute de goût.
I Je n’ai jamais eu un goût bien exalté pour les messieurs d’Académie, et cependant en voici un pour lequel je me sens beaucoup de sympathie, de considération intellectuelle et de respect.
Nous ne sourcillons pas, et nous sommes si crânes Que nous jonglons avec des fémurs et des crânes Et que ce métier-là, nous le faisons par goût.
On pourrait très bien supposer que le poète fruste, salin et amer, découvert aujourd’hui comme une perle dont on ne m’a pas assez montré l’huître, fût, par hasard, quelque lettré moderne qui, blasé des corruptions et des hauts goûts de nos décadences, aurait reculé, par impatience de sensation nouvelle, jusqu’aux formes délaissées de la Bible et d’Homère, et eût fait de l’archaïsme en provençal, avec une habileté plus ou moins scélérate… Seulement, quoiqu’il en pût être, imitateur ou spontané, l’homme quelconque qui a enlevé ces douze chants sur un sujet qui serait vulgaire, si ce n’était pas la rabâcherie immortelle de l’amour, et donné à Daphnis et Chloé des proportions d’Iliade, est en définitive un poète que l’on peut mettre, ici ou là !
Dans Le Drack, où il nous fait passer par toutes les nuances de la peur surnaturelle, il entremêle au pathétique de son sujet des vers charmants : Ce sont les fleurs les plus étranges Et des fruits d’un goût sans pareil, Des orangers remplis d’oranges, Dans des champs tout pleins de soleil !
Il n’échouera pas, quoique avec un livre substantiel et de qualités excellentes, mais qui ne dépassent point le niveau de prudence et de goût prescrit par tous ces mulets d’Académie qui se croient le pied sûr et qui ne veulent pas qu’on l’ait emporté.
En lisant au front de son volume ces mots : Les Amours d’Italie, on pourrait supposer qu’il a saisi, avec l’ambition très-peu scrupuleuse du succès, cette misérable bonne fortune d’occasion qu’un goût très-élève dédaignerait ; mais quand il s’agit de M.
Il fut président et trésorier de France à Poitiers, et de plus orateur, poète, jurisconsulte, historien, servit sous quatre rois, fut sur le point d’être secrétaire d’État sous Henri III, mérita l’estime et l’amitié de Henri IV, se distingua aux États de Blois par son courage, à l’assemblée des notables de Rouen par ses lumières, dans une place d’intendant des finances par son intégrité ; et mêla toute sa vie l’activité courageuse des affaires, à ce goût des lettres que l’ignorance et quelquefois la prévention calomnient, que les vrais hommes d’état estiment, et qui donne encore plus de ressort et d’intrépidité aux âmes nobles.
Les noms d’Hercule, d’Évandre et d’Énée passèrent donc de la Grèce dans le Latium, par l’effet de quatre causes que nous trouverons dans les mœurs et le caractère des nations : 1º les peuples encore barbares sont attachés aux coutumes de leur pays, mais à mesure qu’ils commencent à se civiliser, ils prennent du goût pour les façons de parler des étrangers, comme pour leurs marchandises et leurs manières ; c’est ce qui explique pourquoi les Latins changèrent leur Dius Fidius pour l’Hercule des Grecs, et leur jurement national Medius Fidius pour Mehercule, Mecastor, Edepol. 2º La vanité des nations, nous l’avons souvent répété, les porte à se donner l’illustration d’une origine étrangère, surtout lorsque les traditions de leurs âges barbares semblent favoriser cette croyance ; ainsi, au moyen âge, Jean Villani nous raconte que Fiesole fut fondé par Atlas, et qu’un roi troyen du nom de Priam régna en Germanie ; ainsi les Latins méconnurent sans peine leur véritable fondateur, pour lui substituer Hercule, fondateur de la société chez les Grecs, et changèrent le caractère de leurs bergers-poètes pour celui de l’Arcadien Évandre. 3º Lorsque les nations remarquent des choses étrangères, qu’elles ne peuvent bien expliquer avec des mots de leur langue, elles ont nécessairement recours aux mots des langues étrangères. 4º Enfin, les premiers peuples, incapables d’abstraire d’un sujet les qualités qui lui sont propres, nomment les sujets pour désigner les qualités, c’est ce que prouvent d’une manière certaine plusieurs expressions de la langue latine.
Et ce n’est pas l’originalité la moindre de Francis Vielé-Griffin, que ce goût tout classique pour une forme d’art objective, dans un temps, dans un groupe où régnait un subjectivisme absolu. — Le poète ayant pris conscience de soi ne s’abîme pas dans son propre culte ; il aspire à sortir de lui-même, à se fuir, et je vois là le secret de la grandeur d’un Racine. […] Quelle fantaisie dans la mesure, quelle simple gravité, quel goût ! […] Le goût français si mesuré, si fin, sait pourtant accueillir et fêter un Swinburne, un Dostoïevski, un Ibsen ; mais croyez bien qu’obstinément il se refuse à prendre des leçons de latinisme de M. […] Ce style, il avait trop de goût sans doute, pour consentir à le surcharger de placage, à le gonfler, à l’étirer, à l’essouffler ; donc, il l’accepte tel, — le subordonne : serviteur de la passion. […] — j’entends directement, comme on lit tous les autres, sans l’intermédiaire sonore de Sarah ou de Coquelin67, en dehors du tonnerre d’applaudissements de cinq cents représentations consécutives : pour fausser l’oreille et le goût, avouez qu’il n’en faut pas plus.
C’est à la faveur de ce goût décidé pour elles, que les jésuites eurent entrée à la Chine. […] Les courtisans n’ont de goût que celui de leur maître. […] Il fit paroître vingt autres pseaumes dans le goût des premiers. […] La misère & des maladies l’obligèrent de retourner dans sa patrie : mais il conservoit du goût pour la France. […] Enfin, il lui fut permis de suivre son goût & de cesser la guerre.
Ajoutez le goût de l’aberration russe, des extravagantes complications dostoievskystes, d’une religiosité perverse, fondée sur la culture intensive du péché, etc… M. […] Paul Monsieur l’idéaliste, vous avez du goût pour les potins. […] Pierre Brémond a du goût : il aime la poésie, et notamment celle de Valéry.
Mais, ce qui ne sera peut-être pas au goût de toute l’Europe, il prétend que les hommes ont trop de besoins et trop peu de force pour que le superflu des uns ne soit pas le nécessaire des autres ; en conséquence il peint le luxe des couleurs les plus odieuses, le montre partout comme l’écueil du bonheur public, et affecte de prouver, par les événements, que la décadence des mœurs, qui en est la suite nécessaire, a entraîné celle des deux dynasties Hia et Chang. […] À dix-sept ans mon goût pour les livres me faisait lever avant l’aurore et coucher bien avant dans la nuit ; je m’y livrai tellement que ma santé en fut affaiblie. » « Le précepteur dont parle Kang-hi fit pour ce prince les excellentes gloses des livres de Confucius et des deux King, qui sont un chef-d’œuvre de clarté, d’éloquence et d’exactitude. […] Les chefs des grandes maisons font leur journal secret, dans le goût, à peu près, de celui de l’empereur, pour leur propre instruction et pour celle de leurs enfants.
Il prit sous eux le goût des livres. […] Vivre à ma fantaisie, travailler selon mon goût et à ma guise, ne rien faire de sérieux, m’endormir sur l’avenir que je me fais beau, penser à vous en vous sachant heureuses, avoir pour maîtresse la Julie de Rousseau, La Fontaine et Molière pour amis, Racine pour maître, le cimetière du Père Lachaise pour promenade ! […] Mes livres sont mes outils, je ne puis les vendre ; le goût, qui met tout chez moi en harmonie, ne s’achète pas (malheureusement pour les riches) ; je tiens, au surplus, si peu à toutes ces choses, que si l’un de mes créanciers veut me faire mettre secrètement à Sainte-Pélagie, j’y serai plus heureux, ma vie ne me coûtera rien, et je ne serai pas plus prisonnier que le travail ne me tient captif chez moi.
Son tour d’esprit est arrêté : un gentilhomme du voisinage, M. de Conzié, qui le vit souvent vers 1738 ou 1739, nous signale en lui un « goût décidé pour la solitude, … un mépris inné pour les hommes, un penchant déterminé à blâmer leurs défauts, leurs faibles, … une défiance constante en leur probité ». […] Notre goût fait aujourd’hui quelques réserves : il y a trop de tension, trop d’élan, trop d’effusion ; l’émotion est trop complaisamment projetée au dehors, filée ou soufflée. […] Son séjour à l’Ermitage est une idylle réaliste, et les Confessions abondent en petites scènes du même goût, un dîner chez un paysan, le passage d’un gué, une cueillette de cerises : ce sont les faits les plus insignifiants de l’ordre commun, dont le sentiment de Rousseau fait des tableaux exquis.
… De là, nous sommes allés chez Carrier, le vieux miniaturiste qui a inoculé à son confrère Saint, et à quelques autres amateurs, le goût du xviiie siècle. […] Aussi trouvons-nous à la vie, un goût de fadeur, et dans l’ennui d’être, un perpétuel écœurement. […] Je reste là jusqu’à onze heures… Le goût de la campagne chez l’homme, à certains moments, est le besoin de mourir un peu.
Elle se fortifie sans cesse dans les journaux et fait échec à la science, à l’art, en s’appliquant à flatter l’opinion dans ses goûts les plus bas : la clarté confinant à la sottise, la vie des chiens. […] Il est un fait que, depuis deux annéesbv, le problème de l’Esprit et de la Raison, plus nettement que jamais posé par le surréalisme, n’a plus laissé indifférent quiconque a le goût des choses de l’intelligence. […] Pour lui, le départ a conservé la saveur d’un goût premier.
Elle est faite d’archaïsmes et de flexions verbales au goût du populaire. […] J’y trouve ce goût, auquel on ne croit plus guère, et qui n’est que le sentiment de la mesure. […] Que ce souci de l’actualité, ce soin de flatter le goût du public, ôtent de ses moyens au romancier, la chose, je pense, n’est point contestable. […] Seulement, dans l’édifice composite, vous trouverez un coin décoré d’un goût bien personnel, et c’est l’alcôve ». […] « Les goûts sur les livres changent de mode chez les Français comme les habits.
De toutes les pièces de Molière, Dom Juan est assurément celle qui convient le mieux à nos goûts et à nos idées. […] Nous poussons parfois un peu trop loin le goût des comparaisons et volontiers nous faisons crédit à nos aïeux des passions qui nous agitent. […] Encore un coup, ce n’était pas le goût des discours et le prurit de la langue qui poussaient Molière à parler en public, mais l’âpre besoin d’expliquer ses idées et son but. […] C’est à la faveur de ces sortes de compositions que le gros des spectateurs avait pris goût pour l’auteur, et plus de gens vont à la comédie pour rire qu’il n’y en a pour admirer. » Certes. […] Du Parc (René Berthelot), dit Gros-René (1645-1665). — Un des fondateurs de l’Illustre Théâtre, fils de bonne bourgeoisie entraîné par le goût de la comédie.
Il est venu à son heure, il a donné au public le goût de la vie et des tableaux taillés dans la réalité. […] La situation sera d’autant plus fâcheuse, que le public prendra certainement le goût des réalités, dans la lecture des romans. […] Seulement, je n’ai pas de goût pour l’horlogerie, et j’en ai beaucoup pour la vérité. […] Il y a là simplement un reste de courtisanerie, un goût pour la grâce et l’heureux équilibre de la bonne société. […] Le goût n’est plus à ces courts récits, si délicats parfois, d’un art si achevé.
Henri Rochefort, engagé par sa naissance, ou par ses goûts, ou par ses intérêts, dans le parti de la réaction. […] Enfin, le spectacle, d’un goût parfait, d’une richesse très harmonieuse, est un charme pour les yeux. […] Il y a, dans la Chartreuse, une mélancolie, un goût de la solitude qui semblent sincères. […] Pas précisément ; sa paresse plutôt, et son goût du propre et du confortable. […] Puis elle sait se parer, elle a des sens délicats, l’intelligence et le goût des élégances de la vie.
Il lui en veut aussi de faire courir la foule à ses farces, de lui désapprendre le chemin des pièces du genre noble, d’abaisser enfin le goût du public. […] Mais cela prouverait que vous n’avez pas tous deux exactement les mêmes goûts littéraires, ce qui est heureux pour la variété de nos plaisirs. […] … … J’ai ri ; me voilà désarmé… Voilà de vos arrêts, Messieurs les gens de goût ! […] Remarquez, en effet, que ceux de nos contemporains qui se sont mis, comme Francaleu, à faire des vers aux environs de la cinquantaine les font encore dans le goût de Francaleu, dans le goût pseudo-classique du xviiie siècle et du premier empire. […] Il a dans son état-major, parmi d’autres nobles dames, lady Dora qui a voulu suivre son vieux mari et pour qui cette guerre est un amusement de haut goût.
En l’éclairant sur ses intérêts et sur ses devoirs, ou en flattant ses mauvais instincts et ses goûts dépravés. […] Ne citant que ce qui me paraissait pouvoir être cité, dans les limites du possible, si j’ai applaudi à certaines tendances, il en est que j’ai réprouvées et que je réprouve encore au nom du goût. […] La nature a voulu que notre vue, nos oreilles, notre goût, notre odorat aient leurs exigences, et vous ne nierez pas qu’elle ait créé les choses qui les charment et celles qui leur répugnent. […] Assuré enfin que j’étais bien mort, celui qui était le plus anciennement entré à mon service se mit à me tripoter, avec impudence, partout, comme pour se rendre compte de la substance on quoi était fait l’homme qu’il avait si longtemps accepté pour maître… Puis, il pinça très fort mon nez, probablement trop évasé pour son goût, et qu’il était libre, en cette minute, de rectifier à sa guise. […] … écrire, c’est bien autre chose… Et s’exaltant à mesure qu’il parlait : C’est vivre d’abord, et avoir de la vie un goût à soi, une saveur unique, une sensation, là, dans la gorge… C’est se transformer soi-même en champ d’expériences, en sujet auquel inoculer la passion.
Le général Bonaparte appréciait Ducis et avait du goût pour lui ; il l’aimait pour son instinct nouveau, pour ses éclairs de génie et ses élans hors de la routine, pour sa simplicité biblique dans Abufar. […] J’aime, comme vous, à voir la nature avec goût, avec amour, avec un œil pur et sensible ; et cet œil, qui est ma lumière et mon trésor, je le sens s’éteindre et m’échapper lorsque je mets le pied dans le monde.
« Quant à ce goût « d’opéra, de pompe et d’emphase », pourquoi donc voulez-vous que les choses n’aient pas été ainsi, puisqu’elles sont telles maintenant ! […] Plein de feu, d’ardeur, d’une âme affectueuse et amicale, unissant à un fonds d’instruction solide les goûts les plus divers, ceux de l’art, de la curiosité et de la réalité, il semble ne vouloir faire usage de toutes ces facultés que pour en mieux servir ses amis ; il se transforme et se confond, pour ainsi dire, en eux ; et ce sont eux les premiers qui, de leur côté, sont obligés de lui rappeler qu’il y a aussi une propriété intellectuelle qu’il faut savoir s’assurer à temps par quelque travail personnel : il est naturellement si libéral et prodigue de lui-même envers les autres qu’on peut sans inconvénient lui conseiller de commencer un peu à songer à lui, de penser à se réserver une part qui lui soit propre, et, en concentrant ses études sur un point, de se faire la place qu’il mérite d’obtenir un jour.
De côté, sur ces tablettes odorantes, voilà les livres choisis, les maîtres essentiels du goût et de l’âme, et quelques exemplaires somptueux où se retrouvent encore tous les noms de l’amitié, les trois ou quatre grands noms de cet âge. […] On a pu remarquer parfois dans les pages graves de M. de Chateaubriand quelques mots aigus qui font mine de sortir du ton, et qu’un goût scrupuleux voudrait rabattre.
Tout en prenant peu de goût à cette sobriété filiale par ce coin de curiosité maligne et oblique qui est dans chacun, nous ne saurions en faire un sujet de reproche à l’écrivain consciencieux. […] Nous sommes de son avis en cela, et il nous semble qu’en ce qui touche les portions toutes romanesques de la vie des grands hommes, s’il y a peu à faire pour les rendre plus complètes et harmonieuses, il est permis de l’oser ; mais un goût parfait, une discrétion extrême, devraient présider à ces légères et chastes atteintes.
Bien plus encore qu’aujourd’hui, il a le monopole de tout ce qui est œuvre d’intelligence et de goût, livres, tableaux, estampes, statues, bijoux, parures, toilettes, voitures, ameublements, articles de curiosité et de mode, agréments et décors de la vie élégante et mondaine ; c’est lui qui fournit l’Europe. […] Si les nobles s’habillent en bourgeois, c’est qu’ils sont eux-mêmes devenus des bourgeois, je veux dire des oisifs qui, retirés des affaires, causent et s’amusent. — Sans doute ils s’amusent en gens de goût et causent en gens de bonne compagnie.
« Le pavillon, bâti en pierre dans le goût Mansard, lambrissé et meublé dans le goût Watteau, rocaille au dedans, perruque au dehors, muré d’une triple haie de fleurs, avait quelque chose de discret, de coquet et de solennel comme il sied à un caprice de l’amour et de la magistrature.
. — Je n’ai pas perdu mon goût pour le latin du moyen-âge, le latin parallèle au plus ancien français. […] Ils prennent l’impression pour la beauté définitive, préfèrent l’abondance au choix, la vivacité des sensations à la sûreté du goût.
Le goût, le naturel sont de belles choses assurément moins utiles qu’on ne le pense à la poésie. […] Ils prétendirent donner des règles pour écrire, comme s’il y avait d’autres règles pour cela que l’usage et le goût.
L’idéal humanitaire, attitude d’utilité anglo-saxonne, s’efforce d’établir la supériorité des buts économiques et commerciaux sur les visées de suprématie guerrière, sur le goût abstrait de prévaloir, excitant naturel de l’énergie française. […] Or, cette attitude de défense s’est dissimulée sous le masque de cette même idée générale dont on vient de montrer l’origine dans le principe chrétien accommodé au goût du protestantisme anglo-saxon, l’idée humanitaire qui, sous l’influence d’un besoin plus complexe, s’est enrichie d’une inflexion nouvelle et est devenue ici l’idée cosmopolite.
Il faut renouer ses habitudes, reprendre goût à la platitude de la vie. […] Il consent toutefois à me montrer dans sa chambre cinq ou six Boucher, accrochés par un clou au mur, des Boucher de sa plus large manière, — tout le reste est sous son lit : un ci-devant lit doré de cocotte d’un affreux goût.
Au latin papaver qui a fourni en français tant de formes singulières, pavot, pavon, papon, paveux, pavoir — le goût populaire substitua en plusieurs régions l’idée de rouge, et le latin du moyen âge appelle rubiola, la plante que la science qualifie de papaver rubeum ; cependant l’idée de rouge se fixa sur la crête de coq, puis sur le coq et enfin sur le chant du coq que rendait l’onomatopée coquelicot ou coquericot. […] Le mot latin s’est substitué, sans qu’on en comprenne le sens, aux noms indigènes qui avaient sans doute été faits, comme en Angleterre, avec l’idée de fleur qui a goût de miel, honey sukkle, ou celle de lien sauvage, lien des bois, wood bine 193.
Schiller, pour se rapprocher du goût de son siècle, avait cru devoir diviser le chœur en deux moitiés, dont chacune était composée des partisans des deux héros, qui, dans sa pièce, se disputent la main d’une femme. […] Sans ces règles, ils multiplieraient, pour arriver à leur but, des tentatives dans lesquelles ils s’écarteraient toujours davantage de la vérité, de la nature et du goût.
Capefigue n’est pas plus coupable que tout le monde dans son goût pour le xviiie siècle. Cet aimable goût scélérat est universel.
Après l’éphémère fortune du naturalisme, une autre jeunesse, se libérant à son tour des tutelles et des méthodes, est venue manifester son goût profond du rêve et son dégoût non moins profond de la vie. […] Il a désiré ardemment connaître les femmes, la joie du vin, la furie du combat, le goût de la sueur du laboureur dans le champ.
Mais le goût moyen de l’époque n’était peut-être pas assez averti, L’innovation le trouva sans préparation suffisante. […] Est-ce le goût que vous demandez à un écrivain ?
Il n’a ni compétence pour parler physiologie, ni qualité pour le faire ; et je voudrais voir, je l’avoue, quelqu’un de nos médecins illustres, ayant du goût et sachant écrire, — c’est le cas de plus d’un, — se donnant un de ces jours la peine d’examiner et de réduire à sa valeur vraie la soi-disant physiologie des matérialistes, arrachant à ces prétendus savants la robe de docteur dont ils s’affublent pour imposer à une galerie ignorante. […] J’ai peu de goût pour les prophéties, et cependant je formulerais volontiers celle-ci : « La république sera autre chose que naturaliste ou elle ne sera pas. » Ce n’est pas du fond d’où est sortie La Marseillaise qu’est sorti le naturalisme.
« L’habitude chaque jour plus générale de prendre exemple autour de soi, dans le présent, au lieu de prendre exemple exclusivement derrière soi, dans le passé… produit l’uniformité vaste des idées et des goûts, des usages et des besoins qui rend possible, puis nécessaire, non seulement la fusion des peuples assimilés, mais encore l’égalité des droits et des conditions, c’est-à-dire la similitude juridique entre les citoyens de chaque peuple devenus semblables sous tant d’autres rapports140. » Le triomphe de la mode serait donc l’avant-coureur de l’égalitarisme. […] D’une visite à ces sociétés auxquelles Tocqueville demandait le modèle de la démocratie, l’un rapportera l’impression que tous les éléments d’une foule américaine se rassemblent145, l’autre que chaque Américain a son régime, ses idées, ses goûts propres146.
Necker, M. d’Alton-Shée n’a répondu qu’en faisant ces jours derniers une conférence toute littéraire, où il a retracé « l’histoire de la calomnie », en la prenant depuis Thersite jusqu’à Iago et à Basile : cette conférence, pleine d’intérêt et de talent, et à laquelle n’a cessé de présider un goût sévère, était traversée pourtant d’éclairs soudains et d’allusions vibrantes.
Être un esprit littéraire, ce n’est pas, comme on peut le croire, venir jeune à Paris avec toute sorte de facilité et d’aptitude, y observer, y deviner promptement le goût du jour, la vogue dominante, juger avec une sorte d’indifférence et s’appliquer vite à ce qui promet le succès, mettre sa plume et son talent au service de quelque beau sujet propre à intéresser les contemporains et à pousser haut l’auteur.
L’esprit et ce qu’on appelait le goût survivaient toujours et foisonnaient à l’envi ; mais c’étaient comme les fleurs légères jetées sur des armes, comme des paillettes au fourreau de soie des épées.
Maclou de Beaubuisson, fort bien joué par Bernard-Léon, je pensais que j’avais senti, confusément peut-être, que cet être ridicule avait pu inspirer de l’amour à de jolies femmes de province, qui, à leur peu de goût près, auraient pu faire mon bonheur.
C’est au goût individuel à fixer les nuances et choisir les mesures.
De précieuse, elle devient classique ; et j’ai dit ce qu’était proprement le goût classique, une combinaison de la raison positive et du sens esthétique.
Les modèles étant sous les yeux, la moindre faute contre le goût ou l’exactitude est aussitôt saisie.
Jésus partageait le goût de tout le monde pour ces interprétations allégoriques.
Les types des miracles évangéliques, en effet, n’offrent pas beaucoup de variété ; ils se répètent les uns les autres et semblent calqués sur un très petit nombre de modèles, accommodés au goût du pays.
Un goût singulier de persécution et de supplices 891 le pénétrait.
n’était-elle pas de celles qui donnent à l’esprit le plus d’étendue et de lumières, qui s’allie ni le plus naturellement et le plus étroitement aux qualités morales, au perfectionnement de la raison, au sentiment du beau et du grand, à la délicatesse du goût, et se prêtent le mieux aux plaisirs d’une imagination sage et réglée ?
La princesse Parthénie madame de Sablé) avait le goût aussi délicat que l’esprit ; rien n’égalait la magnificence des festins qu’elle faisait : tous les mets en étaient exquis, et sa propreté a été au-delà de tout ce qu’on peut imaginer.
L’on aura désigné ainsi par le dehors et le dedans, ta sorte d’Athénien, par exemple, qui s’attachait à Aristophane, et celle qui se sentait exprimée par Euripide ; le citadin de la renaissance italienne dont les goûts allaient aux peintures sévères de l’école florentine, et l’habitant de Venise qui, charmé d’abord par le colorisme des Titien et des Tintoret, versa dans les luxurieuses mythologies de leurs successeurs ; de l’habitué des concerts du dimanche à Paris qui, penché toute la semaine sur quelque besogne pratique, retrouve une fois par semaine une âme enthousiaste et grave, digne de s’émouvoir aux hautes passions d’un Beethoven, au religieux naturalisme de Wagner, au trouble de Berlioz.
Rien ne forme autant le goût que la comparaison entre deux grands écrivains dont la manière est différente.
Le public dont il s’agit ici est donc borné aux personnes qui lisent, qui connoissent les spectacles, qui voient et qui entendent parler de tableaux, ou qui ont acquis de quelque maniere que ce soit, ce discernement qu’on appelle goût de comparaison, et dont je parlerai tantôt plus au long.
Le trait du Roman de la Rose qu’on nous cite est, en effet, remarquable ; mais il est précisément dans le goût d’Homère, et les traits de ce genre fourmillent dans l’Iliade et l’Odyssée.
J’aurais mieux aimé qu’elle fût restée dans cette pénombre qu’avec son goût et son détachement de toute gloire, elle avait choisie.
Je doute seulement qu’elle convienne à un chercheur comme lui, qui n’a mission que de prendre à larges et pleines mains tout ce qu’il rencontre, dans un but de renseignement et de connaissances, et non pas mission de choisir et de rejeter, au nom d’un goût qui n’a que faire ici.
Quoi qu’il en soit, du reste, du goût que je suppose en Mérimée pour la netteté d’acier du talent de Daly, nous croyons, nous, après avoir lu son mémoire, la question assez pénétrée de lumière pour n’en être plus une désormais.
Jules Girard est un de ces esprits qui ne sont pas encore les plus mauvais parmi les esprits modernes, car du moins ils ont le goût, l’atticisme, l’imitation réfléchie et savante pour orner leur sécheresse ou cacher leur stérilité, mais qui se payent de tout ce que leur a coûté leur archaïsme en ne concevant rien de plus beau que l’art et la civilisation des Grecs.
Il nous met en goût d’impartialité sur le compte d’une femme qui en a peu trouvé dans l’histoire, et qui attend encore, dans les confusions de sa renommée, l’historien à l’arrêt suprême et au burin ineffaçable qui doit définitivement la classer.
Le monde, puisqu’il s’agit de son goût pour une œuvre qui ne fut jamais faite pour lui, lit avec avidité l’Imitation, et ne veut pas lire l’Évangile, et les raisons de cela ne viennent pas de l’Imitation.
Edmond de Guerle déclare avoir peu de goût pour les théories avec lesquelles on explique présentement les grands hommes, en les diminuant ; car tout est jaloux dans un temps envieux, même les théories.
Ils ont de la sensibilité qu’ils corrompent avec leur goût faux pour un siècle faux, mais qui résiste encore, malgré toutes les mauvaises influences qui ont joué sur elle.
… Je fais mes réserves, moi aussi, telles qu’un instinct du goût nous les suggère, sur ces ententes qui, dans le froid de nos vies quotidiennes, seraient des compromissions ; mais dans la fraternité du sacrifice pour la France et pour la civilisation, nos héros reçoivent spontanément le secours de toutes les prières, l’effusion de toutes les consciences bouleversées par le même sublime.
Ils ont loué enfin cet amour des lettres et des arts, qui, au milieu des agitations de l’Europe qu’il ébranlait, lui fit fonder l’Académie française, dont il fut le chef ; amour des lettres qu’il avait par goût, et qu’il fit naître, dit-on, par politique, qui substitua, chez les Français, l’ambition des talents à celle des cabales, et une activité plus douce, à cette activité féroce, nourrie de factions et de crimes.
Son génie austère et dépourvu de sensibilité comme d’imagination, était trop accoutumé à la marche didactique et forte du raisonnement pour en changer ; et il ne pouvait répandre sur une oraison funèbre cette demi-teinte de poésie qui, ménagée avec goût et soutenue par d’autres beautés, donne plus de saillie à l’éloquence.
Le goût du philosophe pour les institutions lacédémoniennes, son penchant à les imiter dans sa République idéale, la place qu’il y donne aux jeux guerriers et à une sorte d’éducation héroïque de l’âme et du corps, devaient lui rendre précieuse cette magnifique parole du poëte, qu’il cite parfois à l’égal des traditions antiques dont il aime il s’autoriser.
Le gaz flambait et alors apparaissait une coquette salle, véritable bonbonnière décorée avec grand art et un goût raffiné. […] Les autres genres, dans ce qu’on peut appeler la littérature d’imagination, ont eu leurs progrès successifs, leur éclat et leur décadence, qui a tenu à l’épuisement du génie et non pas toujours à la corruption du goût public ou aux vicissitudes du langage. […] Ayant devant elle un champ plus vaste et plus libre, elle est obligée à moins de détours et de déguisements pour s’accommoder au goût de chaque époque, et l’époque s’y montre naïvement ce qu’elle est. […] Mais il y avait jadis répandu sur tout un vernis brillant et léger qui s’efface et qui tenait pour beaucoup à l’amour désintéressé des lettres et au goût des choses de l’esprit, à présent si dédaignées. […] Dans une forme imitée de Fénelon et de Montesquieu, Weiss met en scène de grands génies, qu’il a pris à sa manière et selon son goût, non sans leur prêter quelque chose de l’esprit de son époque, je veux dire de l’esprit des premières années du règne de Napoléon III.
Cela me coûte d’autant moins que j’ai un goût des plus modérés pour l’alcool, mais, n’étant pas fanatique, je me vois obligé d’accepter les faits tels qu’ils se présentent à mon esprit. […] Des miracles Dans le fatras de nouvelles hétéroclites que certains journaux enregistrent à la manière anglaise, sans choix et sans goût, on pouvait lire, avant-hier, entre un assassinat et un cambriolage extravagant, celle qui relatait la promotion de la défunte petite Bernadette, de Lourdes, au grade de vénérable dans la milice céleste. […] Cet homme qui est un ancien officier réformé pour accident s’est trouvé, une fois guéri, repris d’un goût si vif pour le métier militaire que le voilà à Saïda, se destinant fiévreusement au caporalat. […] Il n’est pas très riche, il n’a pas de goûts particuliers, il ne sort pas, comme font les femmes, pour voir les magasins, pour éprouver, suivre ou vaincre la tentation. […] Il y avait encore de la discrétion et du goût.
Le raffinement particulier de M. de Montesquiou, son goût pour le chantournement, sa façon de dissimuler les portes de son appartement et d’égayer les tapis aux frais de la santé des tortues orfévrées, avaient infiniment séduit l’intelligence avide de petites nouveautés de M. […] Les événements modifièrent cette conception du poète qu’avait conçu de lui-même Hugo ; la forme du roman s’imposait ; la poussée des romans de langues germaniques et anglo-saxonne, leur fantastique que l’on ne connaissait guère que par ses pires adaptateurs anglais, le roman à couleur historique qu’imposait le goût des masses pour les chroniques de Walter Scott et le goût des élites pour les restitutions de Châteaubriand et de Thierry, induisirent Hugo au roman. […] Comme date (il est inutile de le redire), Villiers de l’Isle-Adam appartint et fréquenta au groupe dit le Parnasse contemporain ; dans une explication plus large que celle qui enferme cette dénomination de groupe sur quelques personnalités qui défendent encore, attardés, les vieux rythmes de la poésie romantique, les Parnassiens de ce temps étaient, en somme, des novateurs sinon de fait, du moins de goût. […] L’opinion ne fait pas, des Parnassiens, cas de grands poètes ; le dire du lecteur de goût ou de l’universitaire au courant se synthétise en phrases de ce genre. « Ils ont créé un merveilleux outil pour la poésie, ils ont aménagé de belles ressources pour un grand poète, qui viendra peut-être, qui n’est pas parmi eux, c’est sûr », c’est la phrase typique qu’on sert aux groupes de poètes, à la veille d’une consécration, durant une période plus ou moins longue, d’une façon plus ou moins générale, et à cela que répondre du camp des poètes, sinon : « faites mieux que nous ». […] avec autant de nuances que vous voudrez, selon le goût particulier que vous portez non à tel écrivain, mais à telle théorie, plus ou moins brillante.
En goûtant un mets délicat, le goût seul et non le moi tout entier éprouve un certain plaisir. […] Ce sont la chaleur, la couleur, le goût, l’odeur, etc. […] Les gourmets, par exemple, imaginent sans trop de peine les sensations du goût. […] Dans les sensations du goût et de l’odorat, nous sommes bien moins actifs que dans les autres. […] Mais pourtant le goût est à un autre point de vue individuel.
Je me reprocherais d’avoir négligé de leur donner du pain un seul jour, le pouvant faire absolument. » Mais la recette, le goût du public la règle. […] Taine et Renan n’avaient que le goût des idées qu’ils croyaient exactes. […] Ces formules outrancières révèlent un goût puéril d’étonner qui ne convient guère à un savant. […] La discipline d’abord, la totale et volontaire subordination du goût personnel dans l’obéissance. […] Livre bien français, un des rares que l’on ait le goût de rouvrir dans ces douloureux moments, pour y contempler la noblesse de la guerre.
Les Pacifiques m’apparaissent, à cet égard, l’œuvre majeure de Han Ryner, non pas œuvre majeure dans l’absolu de mon jugement, car j’ai trop le goût de l’abstraction, pour ne pas suivre Psychodore et les Paraboles Cyniques avec une joie d’algébriste au milieu de ses équations. […] De son ascendance ou de son éducation ou même de son hérédité chrétienne, il a gardé, malgré lui, ce goût de l’examen de conscience, et le besoin de juger certaines réalités (celles de l’amour) sous un critère (Les Paraboles cyniques, p. 219) qui n’est point Hellène, tout au plus Hellénistique et plutôt chrétien. […] Sage pénétré de la casuistique grecque, où l’algèbre semblait le rire même du soleil sous les oliviers ; penseur méprisant qui ne sut arriver au calme devant la vie qu’après des luttes douloureuses et des révoltes ; poète ardent dont l’âge éréthise le goût passionné pour le Grand Tout, rêveur et abstracteur, amoureux de mythes et d’idées, Han Ryner est probablement le plus haut génie de notre temps. […] Il a le goût des gares, des fumées lointaines, c’est le poète moderne à la casquette de voyage.
Dans le volume de Quillot, il y a des petits chapitres délicieusement intitulés Psychoses qui sont du goût le plus neuf… Dame ! […] c’est qu’il a un goût de Caraïbe ! […] Il a servi, il a excité la littérature et donné le goût du nouveau, de l’original. […] un virtuose qui aurait le goût déplorable de n’exécuter que des variations sur les opéras d’Auber ! […] Ses romans ont, à un degré rare, l’odeur, le goût et le sens de la vie.
son mérite le désigne : point d’excuse, point de refus, le péril n’en accepte pas ; on lui impose au hasard les fardeaux les plus disproportionnés à ses forces, les plus répugnants à ses goûts… L’esprit de cet homme s’élargit, ses talents s’élèvent, ses facultés se multiplient ; chaque fardeau lui crée une force, chaque emploi un mérite, chaque dévouement une vertu. » Et c’est ainsi qu’en croyant peindre M.
La grâce piquante, le goût exquis qui régnaient dans ses ouvrages, lui rendaient presque nécessaire d’avoir pour juge l’esprit aristocratique.
Vainement les goûts se modifient, les inclinations changent ainsi que le caractère ; il faut rester la même puisqu’on vous croit la même ; il faut tâcher d’avoir quelques succès nouveaux puisqu’on vous hait encore pour les succès passés ; il faut traîner cette chaîne des souvenirs de vos premières années, des jugements qu’on a portés sur vous, de l’existence enfin telle qu’on vous la suppose, telle qu’on croit que vous la voulez.
Le goût, la justesse d’esprit, la logique en avertissent.
Dans l’applaudissement chaleureux dont il a été salué, il faut voir le goût passionné de la poésie et de l’éloquence, et une sorte de reconnaissance exprimée par des lettres à un homme qui peut se tromper sur l’agencement d’un drame, mais qui a le feu sacré, l’enthousiasme entêté pour les belles sonorités et les beaux rythmes, et qui manie la langue poétique comme personne, à ma connaissance, ne sait faire en ce moment.
Luc, suivant son goût pour la conversion des pécheurs, a ici modifié la tradition.
Le nombre des musiciens qui se conforment à ce goût, comme si la musique étoit incapable de faire rien de mieux, n’est que trop grand.
Ils sont dans le goût ordinaire des livres qu’elle couronne.
Elle ne conçoit rien de mieux que Villemain sur Byron, Villemain qui a fait de l’épithète d’homme de goût qu’on lui a tant donnée, une injure !
Ces sirènes corruptrices mirent des concetti dans le vieux Corneille, et, dans cet invulnérable de goût et de génie qu’on appelle Racine, surent trouver le tendon d’Achille, qu’elles ne coupèrent pas, mais qu’elles énervèrent.
Malgré l’air utilitaire, le ton d’oracle, la suppression de toute déclamation, non par goût ni par sobriété d’esprit (Castille n’est pas sobre), mais parce qu’on paraît plus fort quand on ne déclame pas, enfin, malgré les œillères de la préoccupation qui ne veut voir jamais que le résultat obtenu par la Révolution, — comme si c’était possible, cela !
Elle avait bien des défauts et nous les reconnaissons… Pédante si l’on veut, quelquefois sans grâce et précieuse, esprit faux en philosophie, bas-bleu à ravir l’Angleterre de l’éclat enragé de son indigo, madame de Staël, par la distinction de sa pensée, par la subtilité de son observation sociale, par son style brillant d’aperçus, par ses goûts, ses préoccupations, ses passions même, tendait vers la plus haute aristocratie, vers la civilisation la plus raffinée.
MM. de Goncourt ont compris les goûts de leur temps, ou plutôt ils les ont partagés, si même ils ne les ont subis ; et j’avais raison tout à l’heure de dire qu’avant eux, et avant que les choses de l’art eussent parmi nous leur toute-puissance, personne n’avait pensé, comme eux, à faire tenir toute l’histoire d’un temps dans un catalogue de peinture, et à l’écrire comme Diderot écrivait son Salon.
Lorsque le duc de Luynes, qui rapporte tout cela très correctement, avec la répétition d’une exactitude infatigable, lorsque le duc de Luynes écrivait de telles choses, il pouvait, en sa qualité de grand seigneur, parfaitement myope et naturellement fat, qui croyait la monarchie éternelle, se dire qu’il faisait là l’éducation de ses enfants, et qu’ils trouveraient dans ces récits paternels du goût, du parfum et de l’instruction, — l’instruction de ce singulier état de grand seigneur, tel qu’on l’entendait à Versailles, — et qu’ainsi, cela pouvait être utile, mais à présent et pour nous, à quoi cela est-il bon ?
Quand elle se prit de goût et d’intelligence pour M. de Meilhan, il avait, lui, quarante-six ans, l’âge où l’homme resté le plus beau parle moins à l’imagination qu’à la pensée, et elle en avait soixante-huit, mais soixante-huit si sereins et si fermes, que la dépravation de tête, le néant de tout et l’ennui, l’horrible ennui d’une créature qui vit sans Dieu, dans le cachot de la cécité, ne firent pas d’elle une Madame Du Deffand, amoureuse d’un autre Horace Walpole !
sur l’attestation d’un tel critique nous avons cherché obstinément la petite nuance qui devait faire de Tocqueville un très joli poète au goût éveillé de Sainte-Beuve, et qui l’eût achevé ainsi en Montesquieu, car Montesquieu a fait des vers sur Venise, et même un peu légers pour un président à mortier, et il a écrit son Temple de Gnide ; mais notre recherche a été vaine.
Le Neveu de Rameau lui donna cette préoccupation de l’effet sensible dans les arts, ce goût de la peinture et de la musique, — de la musique, dans laquelle il voyait tant de choses, comme on les voit dans les nuages : — précisément parce qu’elles n’y sont pas !
que dirait-il, le grand poète, s’il vivait à cette heure du siècle et s’il apprenait tout à coup qu’en France, ce pays de convenance et de goût, il est livré dans une de ses plus belles œuvres aux faiseurs de flonflons, et, comme il les appelait : aux violonneurs !
On est impatient de sortir de la science telle qu’il nous la montre dans ce profil perdu, mais qui fait trembler, et de rentrer dans la famille, dans l’ordre, dans l’histoire, toutes choses ignorées du bourgeois célibataire, jongleur et parisien, lequel cherche à chercher un objet de recherche d’un goût recherché, car voilà toute la philosophie de M.
Ils le sont de talent, de goût et même de prétention, je crois.
C’est la sveltesse d’un style que le goût littéraire a dégagé et allégé jusqu’à la légèreté d’un Grammont ou d’un Matta, si de tels hommes avaient pu écrire sur les sciences.
L’enthousiasme ne sait pas trembler, un écrivain qui a voué à Bossuet un culte véritable et qui, pour mieux vivre tête à tête avec lui, s’est retiré intellectuellement de son siècle et n’a plus habité que celui de cet imposant génie, Floquet, a entrepris de nous donner un livre nouveau sur Bossuet, et, quoique sa modestie le cache avec un goût parfait sous ce nom respectueux d’Études, ce livre, d’une érudition vaste et détaillée, n’en est pas moins une biographie.
Je ne m’attendais donc pas, quand j’ouvrais cette Vie de saint Vincent de Paul, par l’abbé Maynard, à beaucoup plus qu’à des choses infiniment touchantes et touchées délicatement par un homme d’un talent borné par le goût, cette barrière élégante !
Littérairement (s’il est permis de finir par un mot de littérature en présence de livres pareils), le roman de Paul de Musset est écrit avec le goût un peu sec, mais ferme, d’un homme qui a beaucoup lu les romans du xviie siècle et qui s’est tapissé l’esprit de leurs formes.
Littérairement (s’il est permis de finir par un mot de littérature en présence de livres pareils), le roman de M. de Musset est écrit avec le goût un peu sec, mais ferme, d’un homme qui a beaucoup lu les romans du dix-septième siècle et qui s’est tapissé l’esprit de leurs formes.
Mais si le Don Quichotte, malgré le génie de Cervantès et les épisodes qui sont la plus belle partie de son livre, est un livre monotone, d’une gaieté de muletiers, ayant toujours le même goût d’ail et de proverbe, que dire de la grosse plaisanterie du Docteur Mathéus, bien moins acre et bien moins renouvelée ?
L’abaissement de son exécution fait resplendir qu’il a eu, en écrivant, les yeux attachés sur le public pour lequel il écrivait ; qu’il lui en a fourré selon ses goûts ; qu’il l’a pris par ses préoccupations les plus momentanées ; que l’homme s’est fait enfin le courtisan du public et non son dompteur de génie… cherchant, avant la gloire de l’art, le petit chatouillement de la popularité.
Je n’appartiens plus à mon père, à ma fiancée, à mes études, à mes goûts.
Il y a plus ; et selon la remarque d’un philosophe célèbre qui a analysé le goût comme les lois, ce contraste perpétuel devient symétrie ; et cette opposition, toujours recherchée, se change en uniformité.
Faudrait-il supposer même que, métropole puissante de l’univers, le sillonnant de ses colonies, l’Europe lui ait envoyé avec son sang une vieillesse anticipée, et que, sur ces territoires de l’Amérique septentrionale qui s’étendent sans cesse, dans ces villes qui poussent si vite, notre civilisation n’ait jeté partout, avec son expérience de plusieurs siècles et ses plus récentes inventions, que le bon sens pratique, l’intelligente âpreté au gain, et cette active distribution du travail, cet emploi technique et pressé de la vie, qui laisse si peu de temps aux plaisirs délicats de l’âme et du goût ?
Il donnerait un spécimen de son physique, un aperçu de ses goûts, un exemple de ses vers […] Il y a dans tous les livres que nous venons d’étudier, une tendance à rentrer dans la nature, un goût passionné du paysage faits pour réjouir. […] Les Goncourt — du moins le survivant l’affirme dans Préfaces et manifestes littéraires — ont répandu en France le goût du japonisme. […] Son caractère réservé, un peu indécis, son goût de la droiture, sa sensibilité très fine font qu’il a tout d’abord quelque peine à s’imposer. […] Puis, par goût et par réflexion, j’aime que le Théâtre ne m’évoque pas directement la vie.
Des renseignements puisés à la meilleure des sources nous permettent d’assurer qu’il était entré dans cette vie parlementaire et magistrale un peu contre son goût, mais qu’il s’y voua par devoir. […] chacun a son goût peut-être ! […] Vu de ce profil, c’est, si vous le voulez, un très-bel esprit, nerveux, brillant et mondain, qui a lu beaucoup d’in-folios et qui les cite : le goût peut trouver à y redire ; les allusions aux choses lues et les citations sont trop fréquentes. […] Mais chez lui les défauts de goût, notez-le bien, ne sont que passagers, pas beaucoup plus forts, après tout, que ceux de Montesquieu lui-même. […] Il y avait même fait des corrections et ajouté des développements qui nuisaient singulièrement à l’atticisme de ce charmant opuscule ; mais il eut assez de confiance dans le goût d’une femme, d’une amie, qu’il voyait alors beaucoup à Lausanne, pour sacrifier ses corrections et rétablir le Voyage, à peu de chose près, dans sa simplicité primitive.
Sa mère était « une personne exemplaire, célèbre dans tout le voisinage par ses aumônes430. » Son père, étudiant à Christ-Church et déshérité comme protestant, avait fait seul sa fortune, et, parmi ses occupations d’homme de loi, avait gardé le goût des lettres, n’ayant point voulu « quitter ses libérales et intelligentes inclinations jusqu’à se faire tout à fait esclave du monde » ; il écrivait des vers, était excellent musicien, l’un des meilleurs compositeurs de son temps ; il choisissait Cornélius Jansen pour faire le portrait de son fils qui n’avait encore que dix ans, et donnait à son enfant la plus large et la plus complète des éducations littéraires431. […] Mais étant parvenu à quelque maturité d’années, et voyant quelle tyrannie avait envahi l’Église, une tyrannie si grande que quiconque voulait prendre les ordres devait se déclarer esclave par serment et sous son seing, en sorte qu’à moins de trouver sa promesse au goût de sa conscience, il fallait se parjurer ou souffrir le naufrage de sa foi, je crus meilleur de choisir un silence sans reproche plutôt que l’office sacré de la parole acheté et commencé avec la servitude et le parjure. » Il refusait d’être prêtre de la même façon qu’il avait voulu être prêtre ; espérances et renoncement, tout chez lui partait de la même source, la volonté fixe d’agir noblement. […] C’est la vie des salons qui a dégrossi les hommes : il a fallu la société des dames, le manque d’intérêts sérieux, l’oisiveté, la vanité, la sécurité, pour mettre en honneur l’élégance, l’urbanité, la plaisanterie fine et légère, pour enseigner le désir de plaire, la crainte d’ennuyer, la parfaite clarté, la correction achevée, l’art des transitions insensibles et des ménagements délicats, le goût des images convenables, de l’aisance continue et de la diversité choisie. […] À la page suivante, l’adversaire disait, en façon de reproche spirituel et railleur : « Vraiment, mes frères, vous n’avez pas bien pris la hauteur du pôle. — Rien d’étonnant, répond Milton, il y en a beaucoup d’autres qui ne prennent pas bien la hauteur de votre pôle, mais qui prendront mieux le déclin de votre élévation. » Il y a de suite trois calembours du même goût ; cela paraissait gai. […] Avec quel ordre industrieux, pour éviter la confusion des goûts, pour ne pas les mal assortir, pour qu’une saveur suive une saveur relevée par le plus heureux contraste ?
Il ne se borne pas à éclaircir en critique les circonstances peu connues de la vie de Moschus, il aspire à en vulgariser les charmantes idylles en sciolti plus ou moins fidèles, premier coup d’essai, que bientôt son goût plus mûr répudiera. […] Ce goût philologique qu’il avait développé et aiguisé dans la lecture des anciens, Leopardi le portait aussi dans l’étude et l’usage de sa propre langue ; il revenait à Dante et aux vrais maîtres d’avant la Crusca. […] Enfin deux odes grecques dans le goût d’Anacréon s’ajoutaient comme provenant du même manuscrit.
En second lieu, personne ne te prendra, si ce n’est peut-être quelques dames qui jouent déjà bien, qui veulent perfectionner leur goût, et, dans ce cas, elles payeront bien. […] « S’il y avait ici à Paris, s’écrie-t-il en versant tous ces déboires dans le cœur de son père, s’il y avait un coin seulement où les gens eussent de l’oreille pour entendre, un cœur pour sentir, du goût pour comprendre quelque chose à la musique, je rirais volontiers de toutes ces misères, mais je vis malheureusement parmi les brutes (en ce qui concerne la musique). […] Je remercierai le Dieu tout-puissant si j’en reviens avec le goût sain et sauf !
J’y copiais, dit-il, pour me former la main et le goût, les chefs-d’œuvre de l’histoire de Galatée dont Raphaël embellissait les murailles. […] Son goût pour la flûte lui procura un apprenti et l’occasion d’un heureux mariage. […] « Je réfléchissais sur cette proposition qui, étant acceptée, contrariait infiniment mon goût pour mon métier.
Elle suit en tout les goûts et les opinions des gens de son monde, ou de sa coterie, ou de son âge. […] Je veux parler de son goût pour la campagne, autre fruit de ses solitudes forcées de veuve. […] Dans le chapitre de la Ville, il plaint les citadins qui « ignorent la nature, ses commencements, ses progrès, ses dons et ses largesses… Il n’y a si vil praticien qui, au fond de son étude sombre et enfumée… ne se préfère au laboureur qui jouit du ciel… » Tout ce que développeront un jour Rousseau, Bernardin, Chateaubriand et Sand n’est-il pas enclos dans ces deux brèves et charmantes pensées : « Il y a des lieux qu’on admire ; il y en a d’autres qui touchent et où l’on aimerait à vivre Il me semble que l’on dépend des lieux pour l’esprit, l’humeur, la passion, le goût et les sentiments. » L’auteur des Caractères était essentiellement de ces esprits ouverts, « vacants » et inquiets, révoltés contre le présent, ce qui donne une bonne posture dans l’avenir ; de ces âmes qui sentent beaucoup et pressentent plus encore, par un désir de rester en communion avec les hommes qui viendront, et par une sympathie anticipée pour les formes futures de la pensée et de la vie humaine.
Joncières… ils s’en défendent, et c’est d’un beau patriotisme… mais les auditeurs sentent bien qu’ils ont pris au musicien de Bayreuth ce qu’il avait de possible et de bon. » Ils ne sont point des wagnéristes : ils continuent, les accommodant au goût moderne, le mélodrame de Meyerbeer, ou l’opérette d’Adam, enseignés au Conservatoire. […] Citons toute la première partie, judicieuse et excellente, qui complètera les articles publiés en cette Revue sur les Maîtres Chanteurs : Chaque année, le théâtre royal de la Monnaie nous convie à quelque nouveauté d’importance, et, cette fois, deux hommes de grand goût et d’initiative qui s’apprêtent à se retirer après une période de direction vraiment brillante, ont résolu, pour leur dernier coup d’éclat, de nous faire entendre un des plus célèbres ouvrages de Wagner. […] Saint-Saëns fait appel, pour défendre la description, au goût du public ; mais ne sait-il pas que, pour ce public, tous les chefs orchestraux paraissent grossiers, comparés aux vocalises de M.
Dans Valérie, en effet, plus que chez Mme de Staël, l’inspiration germanique, si sentimentale qu’elle soit, se corrige en s’exprimant, et, pour ainsi dire, se termine avec un certain goût toujours, et par une certaine forme discrète et française. […] Mais ces défauts de goût y sont rares, aussi bien que quelques locutions vicieuses (en imposer pour imposer), qu’un trait de plume corrigerait.
Gosselin, le premier de mes patrons typographiques, homme de cœur, de goût et d’initiative, quelques pages poétiques recueillies en une très mince brochure, fasciculus relié en papier jaune et intitulé : Méditations. […] Pasquier, encore vivant et vivant tout entier aujourd’hui, qui distribuait alors ces faveurs en qualité de ministre des affaires étrangères de Louis XVIII : homme de goût, de cour, de tribune, de congrès, de grande société européenne.
Peut-être ce goût pour les portraits tient-il en moi à mon imagination plastique et pittoresque, qui a besoin de se représenter fortement la physionomie des choses et des hommes pendant qu’elle lit le récit des événements où ces hommes sont en scène dans le livre. […] Livré à ses déportements privés, marchandé par les puissances étrangères, vendu à la cour pour satisfaire ses goûts dispendieux, il garde dans ce trafic honteux de son caractère l’incorruptibilité de son génie.
III Relisons à tête reposée ce merveilleux livre, merveilleux d’utopie comme de saines inspirations ; laissons en pâture aux échenilleurs de mots et de formes les impropriétés de termes, les exagérations de phrases, les mauvais jeux d’esprit, les impuretés de langue, les fautes lourdes et même les saletés de goût, flatterie indigne du génie élevé d’un grand poète, cynisme de la démagogie, cette plèbe du langage, qui l’abaisse pour qu’il soit à son niveau, et qui le souille pour l’approprier à ses vices. […] On peut différer d’idées, de goûts, de convictions même, pendant qu’on flotte, mais on ne peut s’empêcher de sentir une secrète tendresse pour ce qui flotte avec vous.
Mais s’il perce dans tous ses écrits précédents un goût de prédilection pour une contrée de l’Europe, à coup sûr c’est pour l’Italie : dans vingt passages de ses ouvrages, il témoigne pour elle le plus vif enthousiasme ; il ne cesse d’y exalter cette terre du soleil, du génie et de la beauté : Délicieux vallons, où passa tour à tour Tout ce qui fut grand dans le monde ! […] — Il y a longtemps que j’en ai perdu le goût, dit-il.
Il faillit remettre en goût les pèlerinages de Sion. […] Sa vieillesse seule l’aurait retenu dans l’inaction pendant cet accès de guerre civile ; il n’aurait su à quel parti se rallier pour combattre avec lui ; son amitié pour Carrel et ses adulations aux hommes de son bord l’auraient empêché de combattre les républicains ; son légitimisme d’apparat l’aurait empêché de combattre avec les républicains patriotes et modérés ; ses principes et ses goûts aristocratiques l’auraient empêché de combattre avec les meurtriers de tout ordre et de toute civilisation ; sa soif de popularité l’aurait empêché de se prononcer contre la lie du peuple.
Les idées, les goûts, les tendances vont en sens contraire : il y a bifurcation sur tous les points importants. […] Mais, la jeune femme n’ayant pour lui qu’un goût modéré, ses chances sont nulles et absurdes ; il joue une partie perdue d’avance, avec des cartes dont on voit le dessous pipé.
C’est plus encore, c’est la France elle-même incarnée avec toutes ses misères, ses imperfections, ses vices et ses qualités d’esprit dans un seul homme ; en sorte que notre goût, ou si l’on veut notre faiblesse pour la nature diverse, sensée, raisonnable, universelle de notre pays, se trouve satisfait et flatté dans ce Protée moderne, et que notre admiration pour ce résumé vivant, spirituel, multiple de la France est une espèce de patriotisme de notre esprit, qui contemple et qui aime sa patrie intellectuelle dans ce représentant presque universel de la nation littéraire. […] XI Ce n’était pas impunément que Voltaire, Rousseau, Buffon, et les disciples éminents de ces différentes écoles et de ces différents styles, répandaient en Europe la connaissance, le goût et la passion même de notre langue ; cette littérature et cette langue contenaient l’idée moderne, l’idée française.
On commence à connaître assez les peuples de race jaune, Chinois, Japonais, Tartares, pour se faire une idée des aptitudes et des incapacités naturelles de cette race, de son goût et son talent pour les sciences pratiques et les arts mécaniques, de son éloignement pour les sciences transcendantes et pour la métaphysique, de sa rare finesse, de son étonnante subtilité d’esprit, non-seulement dans les choses de négoce, mois encore dans les plus difficiles exercices d’attention et de raisonnement. […] Enfin, en rapprochant les monuments religieux et poétiques des divers peuples de la race sémitique, et en les comparant avec les monuments religieux et poétiques du même genre chez les grands peuples de la race âryane, les Indous, les Perses et les Grecs, l’ethnographie a découvert que le génie symbolique manque absolument à la race des sémites, dont la répugnance invincible pour la doctrine des incarnations est aussi connue que le goût des peuples âryans pour les symboles de toute espèce, naturels ou anthropomorphiques.
Louis Friant, né sous le chaume à Villers-Morlancourt en Picardie, le 18 septembre 1758, se sentant du goût pour les armes, s’engagea dans les gardes françaises à vingt-deux ans, le 9 février 1781.
Comme professeur, je sens qu’il est de mon devoir de veiller avant tout aux intérêts du goût, à l’explication et au maintien de la tradition, et je crois sentir aussi que je ne ferai pas défaut à ce rôle de conservation littéraire.
C’est à regret et à mon corps défendant que je me suis vu forcé de toucher ce point littéraire et de goût, à la fin d’un récit où toute littérature s’oublie et cesse, où ce serait le triomphe de la peinture elle-même de ne point paraître une peinture, où l’histoire doit à peine laisser apercevoir l’historien, et où la page la plus belle, la plus digne du héros tombé et de la patrie vaincue avec lui, ne peut se payer que d’une larme silencieuse.
Quand Béranger dit que « le pouvoir est une cloche qui empêche ceux qui la mettent en branle d’entendre aucun son ; » et ailleurs « qu’il est des instants, pour une nation, où la meilleure musique est celle du tambour qui bat la charge ; » et encore, lorsqu’il compare les prétendus faiseurs de la révolution de Juillet à ces « greffiers de mairie qui se croiraient les pères des enfants dont ils n’ont que dressé l’acte de naissance ; » cela me paraît étonnamment rentrer dans le goût des locutions familières à Franklin.
Mais le Machiavel de Modène ne devait pas être pris si à la lettre, la vérité ici passe la vraisemblance ; et comme goût d’abord, et un peu comme justice, j’aurais voulu qu’il fût tenu compte des autres coupables dans la société, des coupables par assentiment et par égoïsme inerte, des coupables aussi par passions haineuses et brutalité, comme en offrent sans doute les rangs populaires.
Je trouve encore l’escarre du chagrin, l’anévrisme des larmes, un culte qu’on galvaude, égruger le reste de mes jours ; la ration de fiel dont vous gorges mes jours ; un nom perdu, trahi, trimballé dans la boue ; toutes les limites de la langue, du goût, de l’art, et de la douleur exprimable, sont franchies.
Un bon nombre de convictions timides s’exciteront sur la foi des refrains, et reprendront goût et courage à la cause de la civilisation, d’après l’autorité de leur poëte.
Oui, nous sommes encore et nous resterons, je l’espère, quelque chose de tout cela ; à ceux qui pensent que notre jeunesse est en train de se faire doctrinaire, à ceux qui craignent que la future République n’affecte trop un jour le goût américain, nous répondrons par ce carnaval de 1833.
Il avait le goût, la correction, la grâce.
Si étrange que soit l’objet, si éloigné des goûts contemporains, si trivial ou si sublime, il le goûte et le comprend.
Quand nous lisons ou que nous entendons prononcer le mot de Tuileries, nous prenons tous l’idée du même lieu, du jardin qui borde la Seine entre le Carrousel et les Champs-Élysées : mais des images s’éveillent en outre les mêmes pour tous, des dômes de verdure, de grises statues parmi les feuillages verts ou jaunissants, des enfants et des joueurs de ballon ; selon notre âge, nous voyons se dessiner un palais ou des ruines ; certains de nous aperçoivent les hôtes disparus de l’édifice détruit, les fameuses journées que l’histoire y compte ; selon le caprice de nos goûts et de nos études, la salle des maréchaux ou la salle des machines nous reviennent en mémoire, et nous peuplons les allées de muscadins ou de petits-maîtres.
Ce goût mièvre et mondain est comme une banqueroute de notre poésie, qui semble revenir à Charles d’Orléans, à Marot, si l’on veut, avec le naturel en moins.
Ils ont généralement peu de goût pour la casuistique qui a l’inconvénient d’insister sur les imperfections de la solidarité sociale, sur les contradictions et les incertitudes de la morale ; d’inviter par là même l’individu à examiner de près son devoir, à le discuter et à composer avec lui.
Avec ce goût de la libre critique et cette parfaite loyauté qui lui sont propres, il se plaît à citer ses adversaires, à mettre en relief certaines objections et à dire même nettement celles qu’il regarde comme insolubles.
Jude reconnaît facilement qu’il est permis de « défaire ce qu’on a fait par ignorance » et que le mariage, ignoble troc prostitueur ou pacte grotesque par lequel on promet de ne pas changer de goût, est la plus vaine et la plus immorale des formalités.
Ce prince avoit auparavant entretenu avec lui, quinze ans entiers, un commerce de lettres ; commerce philosophique d’esprit, de goût, de vers & de prose ; commerce sans exemple entre un souverain & un particulier.
Autant vaudroit, lui a-t-on répondu, qu’il y en eut une pour montrer le goût du chant.
Elle a en elle-même tous les instincts de la vieille société française, depuis longtemps éteinte, et qu’elle n’a pu deviner qu’à force de goût, d’élégance et de génie.
L’an de Rome 591, le sénat rendit un décret pour bannir les philosophes de la ville ; et, six ans après, Caton se hâta de faire renvoyer Carnéade, ambassadeur des Athéniens, « de peur, disait-il, que la jeunesse, en prenant du goût pour les subtilités des Grecs, ne perdit la simplicité des mœurs antiques ».
Il falloit que, comme nous, ils s’en rapportassent au goût et au jugement de celui qui battoit la mesure, à celui qui faisoit une profession particuliere de l’art rithmique.
En même temps que nos opinions étaient entraînées vers la démocratie, nos mœurs s’attachaient avec plus de force aux bienséances de l’aristocratie et à tous les goûts monarchiques : cette désharmonie, que bientôt nous aurons occasion d’examiner avec quelque détail, et qui subsiste toujours, nous fournira peut-être d’utiles aperçus.
La coquette et la modiste qui sont dans toute femme, c’est-à-dire la femme vraie, qui remonte toujours à la surface dans le bas-bleu, a gardé, malgré son mystique amour pour les choses sidérales et immortelles, le goût incorrigible (heureusement !)
Choc de goûts, choc de destinées !
Elle a trop de goût certainement pour pétarder des théories ; mais elle en a une cependant et on la devine sous ce qu’elle dit, comme on sentirait un parfum sous la peau de son manchon.
Mais le goût, l’applaudissement des masses, la popularité des œuvres, ne font rien, n’ajoutent rien à cette entité toute-puissante qui s’appelle le Génie et qui est parce qu’il est, comme Dieu.
Je ne sais rien personnellement du colonel Ardant du Picq, sinon qu’il est un colonel, et cela me suffit, tant j’ai de goût pour les colonels !
L’homme de goût glisse jusqu’à cette phrase : « Est-ce que, pour nous élever et pour ne pas être sali par les bassesses de la terre, il ne nous faut pas des échasses ?
Sur ce mot d’avocat, malgré le nom de Montesquieu qui vous accroche et qui vous retient, j’aurais filé et volontiers passé outre… J’ai peu de goût pour les avocats en littérature.
De bouillant devenu pacifique, il rapporta, comme une consolation, de ses guerres de Sicile, un goût plus vif pour les lettres et les arts qu’il avait cultivés toute sa vie, au milieu de la politique et des armes.
Diogène est un spiritualiste ; il n’avait pas pour la matière et ses jouissances les goûts hardis de Bellegarrigue, dont l’unique mesure intellectuelle et morale est l’argent, et dont l’épouvantable théorie nous donnerait le droit de le mépriser lui-même s’il n’est pas, à cette heure, riche comme un nabab.
Il l’est même si fort qu’il a écrit sur elle de ces mots poétiques et idéalisants qui la déguisent, et que je suis fâché de trouver sous cette plume de goût, qui devrait peindre ressemblant, en parlant d’une femme aussi connue que cette blonde espiègle : « À quinze ans, — dit-il, — Marie (c’est madame de Sévigné) n’avait rien de cette timidité virginale, ou, si l’on veut, de cette gaucherie innocente que les jeunes filles rapportent du couvent dans les plis de leur robe montante. » Et cela, je crois bien que c’est vrai ; mais que dirons-nous de ce qui suit ?
Mais, si j’écarte la grandeur divine et humaine, j’ai très volontiers accepté Gœthe comme un cerveau d’une certaine force, comme doué jusqu’à un certain point d’imagination, de réflexion et de goût.
Ferry a moins de goût que M. de Meaux, ce catholique si libéralement développé, l’auteur des Luttes religieuses au xvie siècle pourrait-il assurer que ces luttes religieuses ne vont pas, un jour ou l’autre, recommencer ?
Le dernier comte du nom vient de mourir, laissant toute une famille que Μ. de Girardin nous peint avec le goût désintéressé qu’il a pour la famille.
Il y a des gens qui vous disent que Vacquerie est un talent solennel, emphatique, emporté ; qu’il hait Racine parce qu’il a toutes les nuances du goût et de la tendresse.
Resté un enfant dans la vie, comme, du reste, cette promptitude à la colère le prouve bien, car il n’y a d’hommes forts que les sangs-froids ou les sangs-froidis, — à qui le monde appartient, disait Machiavel, — resté un enfant, comme un poète de métaphysique, par l’esprit, et un prêtre par le cœur et les habitudes (les prêtres sont toujours des enfants quand ils sont descendus de l’autel), Lamennais n’avait pas grand goût pour la réalité qui le blessait souvent, qui le faisait bondir de souffrance, cette sauvage hermine de Bretagne, et il s’en détournait, se retirant violemment en lui-même, les yeux retournés en dedans et attachés sur une idée, — une idée qui fut la vérité pendant une moitié de sa vie et une erreur pendant l’autre moitié, — mais qui, dans tous les temps, a suffi aux ardeurs et aux aspirations de cette âme désintéressée !
à son ami de Bonpland), Alexandre de Humboldt, fils de chambellan et grand seigneur dans un de ces pays qui ont une noblesse politique encore, ayant enfin toutes les fortunes en attendant celle de la gloire, qui lui fut facile, abondante, prodiguée comme éternellement lui furent toutes choses, depuis la faveur très lucide, comme on sait, des princes, jusqu’à l’admiration aveugle des femmes, Humboldt, qui n’avait pas le goût du cabinet de Buffon, — le grand Sédentaire, — se dit de bonne heure que son cabinet à lui serait l’univers, et il se fit voyageur et il se lança dans l’espace !
Dupe souvent de son faux goût en art, s’il se trompe souvent sur un tableau ou sur un vase, il se trompe rarement sur les hommes.
Charles de Mouy n’est pas un passionné et il n’a pas non plus le goût de la passion.
Quoique eux surtout, les voltairiens, n’aient de goût pour aucune espèce d’Apocalypse, — pas plus pour celle de M.
Un peu plus, il serait déclamateur, mais il s’arrête à temps et le goût est sauvé.
Il le voit entre les théories et les systèmes, constatant nettement que Buffon, tiré à deux philosophies, tenait de Descartes le goût des hypothèses, et de Newton le respect et la recherche des faits.
à son ami de Bonpland), Alexandre de Humboldt, fils de chambellan, et grand seigneur dans un de ces pays qui ont une noblesse politique encore, ayant enfin toutes les fortunes en attendant celle de la gloire, qui lui fut facile, abondante, prodiguée comme éternellement lui furent toutes choses depuis la faveur, très lucide, comme on sait, des princes, jusqu’à l’admiration aveugle des femmes, Humboldt, qui n’avait pas le goût du cabinet de Buffon, — le grand Sédentaire, — se dit de bonne heure que son cabinet à lui serait l’univers, et il se fit voyageur, et il se lança dans l’espace !
perdu le goût, il nous l’a fait sentir dans son livre avec une force nouvelle d’empoisonnement et de douce saveur.
Les poètes que Lamartine a inspirés, — car tout grand poète fait semence de poètes, — les Élisées qui ramassent le manteau du prophète et qui cherchent à s’entortiller dans ses plis d’azur et de lumière, ceux, enfin, que j’appelle les lamartiniens, — comme, par exemple, le poète d’Armelle, — ont contre eux maintenant le goût public, qu’ils ont eu pour eux si longtemps.
— mais, selon moi, c’était là que le goût et surtout l’admiration pour un pareil poète devaient s’arrêter.
Quel goût pour habiller ses fantômes.
Il n’a de goût ni pour les opulences de la pensée, ni pour les fantaisies de la forme.
Encore ces sujets, même les plus nationalement comiques et pittoresques, sont-ils toujours par Pinelli, comme par Léopold Robert, passés au crible, au tamis implacable du goût.
On en trouve aussi d’un genre plus relevé, et faites pour contenter le goût le plus austère ; telles sont les idées générales répandues sur chaque science, sur leur origine, leur progrès, leur but, les moyens de les perfectionner, leur liaison et les points de communication par où elles se touchent.
Il a trop d’esprit et de finesse, trop de goût de la clarté, de la mesure pour déclamer sciemment. […] C’est un vieux goût de la race. […] C’est la Grèce accommodée au goût du premier empire. […] Mais on peut le délier, il ne s’en ira pas, car il a pris goût à son esclavage. » C’est déjà notre poésie galante, celle qui a duré jusqu’en 1830. […] C’est le goût du public.
Leur seule étymologie suffirait à définir la Science, Il n’y a Science que dans une conformité de la pensée à l’objet, si exacte, si stricte, que cette pensée devienne identique dans tout esprit, une fois mis en présence de cet objet, à travers et malgré les différences de capacités et de goûts individuels. […] Deux caractères paraissent avoir couru d’un bout à l’autre de cette sérieuse lignée bourgeoise : le goût des idées générales et le sens des affaires. […] Comme il avait le goût instinctif des lettres, il eût senti la poésie du patois de son pays, de ses coutumes et de ses légendes. […] Où est la richesse de nature, où est la richesse d’esprit, entre un étudiant en lettre ou en droit qui sort du lycée, chétif apprenti en haute culture, mal frotté de livres et un bon ouvrier d’art, un menuisier, par exemple, dont le goût déjà exquis s’est formé à travailler d’après les chefs-d’œuvre d’un Riesener ou d’un Œben ? […] Il lui fallait, pour s’ouvrir ainsi, pour se laisser aller, pour être lui-même, un compagnon de son choix et un décor à son goût.
Vinet crut que l’auteur de Madame de Pontivy avait cédé une fois de plus à son goût de psychologie subtile et qu’il n’y avait là qu’un caprice littéraire, une fantaisie d’artiste. […] Quant à Madame de Pontivy, je sais mieux que personne la cause : celle que vous rapportez à mon goût de psychologie fine est même plus spécieuse que vraie. […] Sainte-Beuve, c’est de n’être pas purement lyrique, c’est son élément social, c’est ce goût d’observation sympathique et humaine, c’est par conséquent cet aspect d’histoire et de drame qu’elle revêt presque toujours. […] Mais ce goût de psychologie subtile a entraîné l’écrivain loin des grandes lignes qu’il serre toujours de près dans les Pensées d’Août. […] J’absous volontiers l’intention ; mais je dénonce à l’auteur ce goût de psychologie raffinée qui peut préoccuper à ce point un homme de conscience, et lui faire une si complète illusion.
Mais qu’ils se gardent de fondre en larmes, d’abuser du style exclamatif et de cultiver la pastorale dans la manière de Bernardin ou l’idylle dans le goût de Florian : les grâces fripées du xviiie siècle ne pourraient que les égarer. — Et qu’ils se gardent aussi de la Napoléonite préconisée par M. […] Le goût du lucre et du trafic malhonnête persiste chez nombre d’entre eux. […] — La haine de la nature, l’horreur de la femme, le goût maladif de l’exception, la recherche désespérée d’émotions anormales, le mépris de la méthode critique et la foi la plus aveugle dans des légendes généralement malpropres. […] Il laboure, sans goût, ce champ stérile. […] Chez la plupart, les pratiques religieuses s’allient fort bien avec le goût des choses patriotiques.
On reproche aux abréviateurs des Transactions Philosophiques, d’avoir fait un choix plûtôt qu’un abregé, parce qu’ils ont passé plusieurs mémoires, par la seule raison que ces mémoires n’étoient pas de leur goût. […] Rien de plus ordinaire parmi nous que de réaliser un emploi, une charge, une dignité ; nous personifions la raison, le goût, le génie, le naturel, les passions, l’humeur, le caractere, les vertus, les vices, l’esprit, le coeur, la fortune, le malheur, la réputation, la nature. […] Si c’est le goût, le corps est ou doux, ou amer ; ou aigre, ou fade, &c. […] Il seroit à souhaiter que chacun de ces alphabets eut été dressé par des personnes habiles, après un examen raisonnable ; il y auroit alors moins de contradictions choquantes entre la maniere d’écrire & la maniere de prononcer, & l’on apprendroit plus facilement à lire les langues étrangeres : mais dans le tems de la naissance des alphabets, après je ne sai quelles révolutions, & même avant l’invention de l’Imprimerie, les copistes & les lecteurs étoient bien moins communs qu’ils ne le sont devenus depuis ; les hommes n’étoient occupés que de leurs besoins, de leur sûreté & de leur bieu-être, & ne s’avisoient guere de songer à la perfection & à la justesse de l’art d’écrire ; & l’on peut dire que cet art ne doit sa naissance & ses progres qu’à cette sorte de génie, ou de goût épidémique qui produit quelquefois tant d’effets surprenans parmi les hommes. […] Il suffit que nous sachions que tout est gouverné par des lois générales & constantes, pour être fondés à croire que les corps qui nous paroissent semblables, ont les mêmes propriétés, que les fruits d’un même arbre ont le même goût, &c.
Est-ce bien l’esthétique, l’art, le goût, la morale qu’ils défendent ? […] L’œuvre de Wagner, mal comprise, ses goûts, ses habitudes interprétées de travers, ont encouragé ces bizarreries auxquelles nous devons quelque peu de désarroi dans une partie de notre littérature. […] Montaigne et La Boétie procédaient autrement et, pour mon goût, je les aime mieux. […] Jean Carrère a le grand goût et le courage d’aimer Victor Hugo et de le dire. […] Tous ingrats, car tous procèdent de lui : les parnassiens lui doivent la révélation de la valeur plastique des mots ; les naturalistes, le sens de la vie et le goût d’en décrire toutes les manifestations ; les symbolistes et les décadents, l’intuition des correspondances sensibles et de la musique verbale.
… Lui, Moréas, avait, pour éviter les trop folles folies, son goût délicat. […] Il était admirable pour cela autant que pour ses livres, lesquels attestent, d’ailleurs, ce goût particulier. […] Il avait le goût de la concision. […] Aussi disais-je que Saint-Marceaux fut sauvé de la renaissance italienne par son goût ancien, sa connaissance de l’art médiéval. […] L’esprit d’analyse et le goût de la spécialité poussent les gens à se cantonner dans les sciences particulières.
Vous regardez sa maison, ses meubles et son costume ; c’est pour y chercher les traces de ses habitudes et de ses goûts, le degré de son élégance ou de sa rusticité, de sa prodigalité ou de son économie, de sa sottise ou de sa finesse. […] On touche ici le fond de l’homme ; car pour expliquer cette conception, il faut considérer la race elle-même, c’est-à-dire le Germain et l’homme du Nord, sa structure de caractère et d’esprit, ses façons les plus générales de penser et de sentir, cette lenteur et cette froideur de la sensation qui l’empêchent de tomber violemment et facilement sous l’empire du plaisir sensible, cette rudesse du goût, cette irrégularité et ces soubresauts de la conception, qui arrêtent en lui la naissance des belles ordonnances et des formes harmonieuses, ce dédain des apparences, ce besoin du vrai, cette attache aux idées abstraites et nues, qui développe en lui la conscience au détriment du reste.
Le costume habituel du Tasse était, ajoute Manso, conforme à la gravité et à la simplicité de goût d’un homme qui se respecte lui-même jusque dans ses vêtements. […] Pour ses aliments, il n’aimait que les choses légères, douces, sucrées ; il avait une invincible répugnance à tout ce qui était fort ou amer ; il ne buvait que de l’eau légèrement coupée des vins liquoreux de Grèce et de Chypre ; tout était tempéré dans ses goûts comme dans son âme.
L’Anglais Forster, compagnon de Cook dans ses voyages, lui en donna le goût, pour rivaliser avec Cook. […] Par le fait, Ténériffe, première région tropicale dont Humboldt faisait la connaissance, était de nature à développer son goût pour les voyages, à soutenir son courage et à le fortifier.
Les hommes les plus marquants par leur esprit étaient ceux qui s’attachaient davantage à la faire parler ; ils lui demandaient compte de ses lectures, lui en indiquaient de nouvelles, lui donnaient le goût de l’étude en l’entretenant de ce qu’elle savait ou de ce qu’elle ignorait. » XII Dès cette époque la partialité de monsieur Necker pour les qualités brillantes de l’esprit de sa fille, et la sévérité de madame Necker, qui voyait des dangers dans la précocité de ce génie, établirent entre le père et la fille une intimité d’esprit qui blessa la mère. […] Ce fut de cette époque qu’elle prit le goût et la passion de ce qu’elle appelle sans cesse dans ses ouvrages la société, c’est-à-dire un cercle plus ou moins étendu d’hommes oisifs et de femmes désœuvrées qui se réunissent le soir dans un salon pour causer au hasard de toutes choses.
—Les Fêtes galantes, ce sont de petits vers précieux que l’ingénu rimeur croit être dans le goût du siècle dernier. […] En deux mots, ils ont sans doute été catholiques par l’imagination et par la sympathie, mais surtout pour s’isoler et en manière de protestation contre l’esprit du siècle qui est entraîné ailleurs par dédain orgueilleux de la raison dans un temps de rationalisme par un goût de paradoxe par sensualité même enfin par un artifice et un mensonge où il y a quelque chose d’un peu puéril et à la fois très émouvant : ils ont feint de croire à la loi pour goûter mieux le péché « que la loi a fait », selon le mot de saint Paul : péché de malice et péché d’amour… Catholiques non pas pour rire, mais pour jouir, dilettantes du catholicisme, qui ne se confessent point et auxquels, s’ils se confessaient, un prêtre un peu clairvoyant et sévère hésiterait peut-être à donner l’absolution.
Il y a sans doute autant de bonhomie robuste et charmante, autant de goût pour la vie simple et les détails familiers, autant de complaisance et d’art à nous faire sentir, quelle qu’en soit l’enveloppe et la condition sociale, combien c’est intéressant et digne d’attention, une âme humaine ; il y a, je le veux bien, autant de tout cela chez le Georges d’outre-Manche que chez le George français ; je dis qu’il n’y en a pas plus, parce que je crois que c’est impossible. […] Mais ils ont, plus que nous, le goût et l’habitude de la vie intérieure, et ils sont, plus que nous, religieux.
Toute ton indulgence sur le talent, que je dédaignerais complètement sans le prix que ton goût y attache, ne me console pas d’une arrière-pensée pénible qu’il aura fait naître en moi… Tu vois que j’avais raison, mon bon ange, en n’éprouvant pas l’ombre de contentement d’avoir employé du temps à barbouiller du papier au lieu de coudre nos chemises, que j’ai pourtant tâché de tenir bien en ordre, tu le sais, toi, cher camarade d’une vie qui n’a été à charge à personne. » Il suit peut-être de ces jalousies sans cesse recommençantes que, dans cette union bizarre, c’était le jeune mari qui aimait le plus ; et cela est assurément flatteur pour notre Marceline. […] Dumas est plein de chaleur et de zèle, et sa femme m’a prise en goût tout à fait… J’ai vu Bocage chez Mlle Mars, il a été d’une grâce et d’une chaleur toutes romantiques… » Tout cela dans la même lettre !
Joignez un goût d’artiste, et de Français du pays de Loire (vera et mera Gallia), et peut-être d’historien pour les vieilles choses jolies et fanées — croyances et meubles, mœurs et bibelots, pensées et fanfreluches — de cet ancien régime où nos origines plongent, qui est à nous tous et par où nous sommes tous « nobles » (Sire). […] Il y a chez lui trop de choses : des nerfs, de l’ironie, du pessimisme même et de la férocité, mais aussi de la gaîté, du comique, de la tendresse, le goût de pleurer… Pour les bonnes gens, voyez-vous, (et pour les autres aussi), Daudet possède un don qui domine tout : le « charme » ; et c’est à ce mot simple et mystérieux qu’il faut toujours en venir quand on parle de lui.
Goust, goût. […] Il faut se persuader que la satire du poète répondait au goût et aux opinions de madame de Rambouillet, loin d’effleurer sa personne ; à moins qu’on n’aime mieux croire nos biographes doués de plus de discernement et de tact qu’elle n’en avait sur ce qui la concernait elle-même.
Seulement les magistrats du théâtre les faisaient remanier au goût du jour, par des poètes en vogue : on rognait les ongles du lion et on peignait sa crinière, avant de le relancer dans l’arène. […] Aux deux derniers siècles, Eschyle effarouche le goût timoré du temps ; on le bannit de l’admiration officielle prodiguée aux moindres petits poètes de l’antiquité.
La crainte du génie est le commencement du goût. […] Nous n’avons aucun goût à rendre de ces petits services au fanatisme, qu’il soit calife ou pape, qu’il brûle les livres ou qu’il brûle les hommes.
Le maître, qui l’a fait construire au gré de son goût bizarre, n’a pas voulu y réunir les plantes précieuses, les fleurs qui réjouissent les sens par l’odorat et l’esprit par les yeux, les feuillages d’une douce et argentine verdure, les belles palmes, les grands éventails, les longues bannières flottantes, et les panaches inclinés de la végétation des Antilles. […] Comment, avec cela, en y ajoutant un peu de goût et les traditions de l’école, ne réussiraient-ils pas auprès de la foule ?
D’un goût perverti à force de recherche, — on peut l’accorder, — ils agirent avec ce goût blasé comme avec leur sang lymphatique et croupi, dont ils aiguillonnaient l’ardeur sous les morsures de ce dévorant caviar qu’ils aimaient.
C’est par une sorte d’abus, mais qui avait sa raison, que l’on a compris encore sous le nom de romantiques les poètes, comme André Chénier, qui sont amateurs de la beauté grecque et qui, par là même, sembleraient plutôt classiques ; mais les soi-disant classiques modernes étant alors, la plupart, fort peu instruits des vraies sources et se tenant à des imitations de seconde ou de troisième main, ç’a été se séparer d’eux d’une manière tranchée que de revenir aux sources mêmes, au sentiment des premiers maîtres, et d’y retremper son style ou son goût.
Quoique appartenant par sa naissance comme par ses goûts fins et délicats à l’ancien régime, il abonde dans le sens de 89.
E. de Montlaur, esprit élégant, cultivé, nourri du suc des poëtes, et qui, sous ce titre : la Vie et le Rêve 49, a recueilli des impressions légères ou touchantes, des esquisses de voyage, des lettres en vers, tout un album, image des goûts et des sentiments les plus délicats ?
La résistance de Mme Pierson, la tristesse résignée d’Octave, les sons de la voix aimée qui n’éveillent plus en lui ces transports de joie pareils à des sanglots pleins d’espérance, sa pâleur, qui réveille au contraire en elle cet instinct compatissant de sœur de charité ; puis, au premier baiser, l’évanouissement, suivi d’un si bel effroi, cette chère maîtresse éplorée, les mains irritées et tremblantes, les joues couvertes de rougeur et toutes brillantes de pourpre et de perles ; ce sont là des traits de naturelle peinture qui permettraient sans doute de trouver en cet épisode la matière d’une comparaison, souvent heureuse, avec Manon Lescaut ou Adolphe, si une idée simple et un goût harmonieux avaient ici ménagé l’ensemble, comme dans ces deux chefs-d’œuvre.
On peut se mettre au-dessus de son siècle par la morale ; mais par le goût à ce point-là, c’est impossible.
Un livre sur les principes du goût, sur la peinture, sur la musique, peut être un livre philosophique, s’il parle à l’homme tout entier, s’il réveille en lui les sentiments et les pensées qui agrandissent toutes les questions.
Le goût régnant portait les gens du côté du bel esprit, de l’éloquence, des règles classiques, de l’imitation latine ; il y cède vingt fois, mais toujours il revient à lui-même.
Je le crois ; dans le miel plante et goût ne sont qu’un : L’esprit du jardinier parfume le parfum !
Un certain goût, une certaine humeur, enfin une nature d’homme apparaît sans cesse, qui court à son plaisir, suit une curiosité personnelle dans la prise de telle matière, dans ce libre vagabondage à travers tout l’inexploré des sciences historiques et philologiques.
En même temps, le goût littéraire évoluait en tout vers la simplicité849, vers la familiarité, parfois même le débraillé : la causerie sans-façon s’est introduite à la tribune ; insensiblement les magnifiques rhéteurs se sont démodés, ont paru un peu ridicules.
Ces sensations, d’un caractère très général et les premières dans l’ordre chronologique, forment comme un genre à part ; 2° sensations organiques qui nous révèlent le bon ou le mauvais état de nos organes internes ; 3° goût ; 4° odorat ; 5° toucher ; 6° ouïe ; 7° vue.
Paris alors était plein d’architectes italiens qui, depuis Catherine de Médicis, bâtissaient avec goût et magnificence.
Sortons du collège, du conclave, du compartiment, du petit goût, du petit art, de la petite chapelle.
Cet éminent penseur n’était pas sans doute un philosophe, et il avoue lui-même qu’il avait peu de goût pour la métaphysique ; mais il possédait au plus haut degré et pratiquait merveilleusement la méthode philosophique : il avait cet esprit de réflexion et de généralisation qui, partout dans les faits particuliers, cherche et découvre les lois générales.
Telle est l’origine et la nature des règles juridiques, morales, des aphorismes et des dictons populaires, des articles de foi où les sectes religieuses ou politiques condensent leurs croyances, des codes de goût que dressent les écoles littéraires, etc.
À la rigueur, ces bons critiques passeraient condamnation sur nos exemples, mais encore les veulent-ils de leur goût et ne les avouent-ils que s’ils ne signifient rien, ou tout autre chose que ce que nous avons voulu qu’ils signifient.
L’ouvrage en question, entièrement russe, a été traduit en français par un homme d’esprit, de savoir et de goût.
Il y en a d’autres qui vous donnent l’idée du goût péremptoire de ce châtreur, qui ne reçoit qu’à mutilation les articles qu’on lui adresse.
Elles ont trop d’incrédulité cultivée pour accepter une religion quelconque, mais elles ont un vieux et incorrigible goût pour le paganisme et les sociétés qu’il a produites, parce que le paganisme est la négation naturelle du principe surnaturel qui l’a vaincu dans l’Histoire et dans la conscience du genre humain.
ni gentillesse ni goût pour la religieuse, quand elle supprime d’un signe de croix l’amazone et la sybarite !
Seulement, si l’œuvre de Léon Gozlan n’a ni le nombre des écrits ni la longueur de chaque ouvrage, — car l’auteur des Nuits du Père-Lachaise, du Dragon Rouge et du Notaire de Chantilly, n’a jamais construit de ces grandes machines romanesques si à la mode aujourd’hui, et dont Les Mystères de Paris, Monte-Cristo et Les Mousquetaires, ont donné le goût au malheureux public, — son œuvre, à lui, cet esprit si aristocratiquement artiste, se recommande d’une autre manière.
Max Nordau est assez exactement renseigné sur les goûts et sur les plaisirs des riches habitants des grandes villes d’Europe, de ceux qui s’intitulent eux-mêmes « la société ». […] Nous n’avons plus guère le goût de la controverse religieuse. […] C’est un instinct où se mêlent et se concilient deux tendances contradictoires de notre nature : le besoin de solidarité, qui nous force à marcher en troupeaux et le goût de particularisme qui nous incline à choisir et à exclure. […] » Il est vrai qu’il ajoutait aussitôt : « Un récit de voyage peut être une œuvre d’utilité publique, s’il peut inspirer aux jeunes gens de loisir et de fortune le goût des pérégrinations lointaines. […] Les plaisanteries de haut goût qui circulent dans les compagnies, et dont quelques-unes sont trop pittoresques, n’osaient atteindre le commandant.
” » Je ne relèverai pas les inexactitudes volontaires de cette page de haut goût. […] D’abord, le goût du temps avait peine à admettre un héros de tragédie qui n’était point amoureux. […] Deux siècles ont passé, et notre goût s’est fait plus hospitalier, voilà tout. […] Porel, — puis le pourvoir secrètement d’un conseil judiciaire, à cause de ses goûts néroniens. […] Soit ; et vous pourrez même expliquer ce goût par des raisons fort distinguées.
C’est l’amour de la campagne qui multipliait en lui le goût et le temps des études. […] — J’y venais prendre, lui dis-je, quelques commentateurs d’Aristote pour les lire pendant que j’en ai le loisir, ce que vous savez qui ne nous arrive guère ni à l’un ni à l’autre. — Que j’aurais bien mieux aimé, dit-il, que votre goût eût incliné pour les stoïciens ! […] « Quand j’ai vu enfin, dit-il en commençant les Tusculanes, qu’il n’y avait presque plus rien à faire pour moi, ni au forum, ni au sénat, je me suis remis à une sorte d’étude dont le goût m’était toujours resté, mais que d’autres soucis avaient toujours interrompu ou ajourné : j’entends par cette étude la philosophie, qui renferme toutes les connaissances utiles à l’homme pour bien vivre…… « Les Grecs, dit-il, ont excellé plus que nous dans la poésie et dans les arts ; nous les égalons seulement dans l’art oratoire né de la constitution même de Rome ; hors de là nous leur sommes jusqu’ici inférieurs.
Et, en effet, si je consulte là-dessus ma propre expérience, je sens très bien que ce que les classiques de l’antiquité ont insinué et laissé en moi, c’est, en somme, le goût d’une sorte de naturalisme voluptueux, les principes d’un épicurisme ou d’un stoïcisme également pleins de superbe, et des germes de vertus peut-être, mais de vertus où manque entièrement l’humilité. […] Son goût, lorsqu’il reste spontané, est à la fois très large et très pur. […] Il n’en est presque pas un sur qui son jugement ne soit double, selon les ouvrages, et aussi selon qu’il les juge davantage avec sa conscience ou avec son goût.
Il n’est pas seulement un effet de notre sensibilité : il dépend aussi un peu de notre raison, de notre goût, de notre expérience, même des dispositions et habitudes de notre conscience morale. […] Et le plus fort, c’est que, dans l’une et l’autre entreprise (j’en suis persuadé pour ma part), il a été également sincère ; j’entends qu’il a également suivi son goût et contenté son cœur et son esprit. […] Et ça finit en opérette, de façon qu’il y en ait pour tous les goûts.
Après un certain nombre de verres de gin, le goût est émoussé. […] Le goût, nécessaire au style, est le sentiment immédiat de lois plus ou moins profondes, les unes créatrices, les autres régulatrices de la vie. L’inspiration du génie n’est pas seulement réglée, mais aussi constituée en grande partie par le goût même, qui, parmi les associations innombrables que suscite le hasard, juge du premier coup, choisit.
Plus tard, en 1657, dans sa Pratique du théâtre, l’abbé d’Aubignac, d’accord avec le goût français de l’époque, écrira : « Je dis que les règles du théâtre ne sont pas fondées en autorité, mais en raison. » C’est avouer que l’emploi de ces fameuses règles n’est nullement arbitraire, mais s’impose despotique par une prescription des lois de la nature. […] Le goût artistique, l’oreille, la sensibilité saine se constitueront en normes subtiles pour déterminer la cadence de chaque strophe et le poète « obéira au rythme personnel auquel il doit d’être65 ». […] Puis le savant, en qui s’est développé par l’étude attentive le goût des enchaînements logiques et des synthèses d’idées, mais dont le mode de connaissance ne s’élève pas au-dessus d’un certain ordre de rapports constants.
Mais ces individus, enrégimentés dans l’État quant à leur fonction, sont très libres quant à leur pensée, leur croyance, leurs goûts. […] Et enfin, comme, par une gageure de régression et de contre-évolution, Luther s’attache et donne le goût de s’attacher à la Bible, qui est « un sot livre », comme si c’étaient, non pas seulement les origines du christianisme, mais les plus anciennes imaginations humaines, théologiques et autres — et qui ne sont pas du tout les origines du christianisme — que Luther recherchât d’une dilection particulière. […] En effet, la propriété est précisément le moyen qu’ont trouvé pour exercer le droit à l’oisiveté ceux qui en avaient le goût, et pour assurer et étendre leur liberté individuelle ceux qui en avaient la passion. […] Son peu de goût pour le clergé chrétien s’explique en partie par là. […] Ce qu’il s’agit donc de mettre en commun, ce n’est pas le sacrifice, l’abnégation, c’est le désir de jouir ; c’est le travail devenu attrayant, le travail devenu varié, et le goût de l’abondance.
« J’ai failli rester ici ; le goût de l’étude m’a repris dans cette ville universitaire, et, si je n’avais couru la poste, j’eusse planté là mes projets de courtisan. — Il est encore une autre circonstance qui aurait pu déterminer mon changement de plan. […] Les circonstances ont changé mon goût : à Paris, je cherchais tous les gens d’un certain âge, parce que je les trouvais instruits et aimables ; ici, les vieux sont ignorants comme les jeunes, et roides de plus. […] Il y a entre nous un point de rapprochement qui aurait surmonté toutes les différences de goûts, de caprices, d’engouements qui auraient pu s’opposer à notre bonne intelligence ; nous nous serions souvent séparés avec humeur, mais nous nous serions toujours réunis. […] Ni moi non plus, je ne vois de motifs pour rien dans ce monde, et je n’ai de goût pour rien. » Ce qui fait que Benjamin Constant est bien véritablement ce que j’ai appelé un girondin de nature, un inconséquent qui obéit non pas à des principes, mais à des instincts, et qui ne cherchera guère jamais dans les luttes publiques que de plus nobles émotions, c’est qu’il persiste, au milieu de ces dégoûts et de ces anéantissements, à être libéral et démocrate quand il est quelque chose. […] Votre lettre si bonne est venue très à propos dissiper mon chagrin, car j’avais le cœur bien serré ; votre silence m’avait fait perdre le goût de tout, et je ne trouvais plus aucun plaisir à mes occupations, parce que dans tout ce que je fais j’ai le but de vous plaire, et, dès que vous ne vous souciez (sic) plus de moi, il était inutile que je m’applique (sic).
Quand Hamlet, désespéré, se rappelle la noble figure de son père, il aperçoit les tableaux mythologiques dont le goût du temps remplissait les rues. […] Le goût du temps était aux mascarades ; leur entretien est une mascarade d’idées. […] je lui ai donné le bon moyen de regagner le Maure260. » Ajoutez à tous ces traits une verve diabolique261, une invention intarissable d’images, de caricatures, de saletés, un ton de corps de garde, des gestes et des goûts brutaux de soldat, des habitudes de dissimulation, de sang-froid et de haine, de patience, contractées dans les périls et dans les ruses de la vie militaire, dans les misères continues d’un long abaissement et d’une espérance frustrée ; vous comprendrez comment Shakspeare a pu changer la perfidie abstraite en une figure réelle, et pourquoi l’atroce vengeance d’Iago n’est qu’une suite nécessaire de son naturel, de sa vie et de son éducation. […] Il a vécu heureux jusqu’ici, occupé de nobles études, habile dans les exercices du corps et de l’esprit, ayant le goût des arts, aimé du plus noble père, épris de la plus pure et de la plus charmante des filles, confiant, généreux, n’ayant aperçu encore, du haut du trône où il est né, que la beauté, le bonheur et les grandeurs de la nature et de l’humanité289. […] La dernière scène — de cette étrange histoire accidentée — est la seconde enfance, le pur oubli de soi-même. — Plus de dents, plus d’yeux, plus de goût, plus rien309.
Je me serai certainement plus d’une fois trompé, car nul d’entre nous n’est à l’abri de l’erreur, surtout en des matières où le goût personnel tient une telle place et représente un élément déformateur propre à celui qui écrit. […] C’est peu d’avancer que Mme de Noailles, en dépit de son nom français, fait à nos yeux figure d’étrangère : elle est encore une cosmopolite, puisque ses goûts et ses premières expériences nous révèlent une formation où les images enregistrées viennent se combattre, en se confrontant les unes aux autres. […] Je sais qu’il est assez de mode et d’attitude aujourd’hui, parmi les artistes de lettres, de marquer un dédain pour un genre qui, plus que tous les autres, se subordonne aux goûts du public. […] Je ne sais rien des goûts, des habitudes, de tout ce qui constitue la personnalité effective de notre auteur, et d’ailleurs, conformément aux principes d’une critique qui s’attache uniquement aux œuvres, je me suis interdit d’en rien rechercher. […] Parfaites latines également ces romancières, Mme Henri de Régnier, Mme Marcelle Tinayre, qui surent unir de si frappantes qualités plastiques à la notation précise, implacable et cruellement désabusée des réalités de l’amour, et cette Mme de Noailles elle-même qui, pour avoir pris son bien un peu partout, pour avoir braconné sur tous les territoires, gardés ou non, de la littérature romantique n’en réussit pas moins à composer un amalgame fort divertissant pour le goût.
Elles ont toutes les conditions de la beauté, sauf le goût et l’art. […] Mieux elles seront adaptées à notre goût personnel, autrement dit plus leur valeur esthétique sera subjective, et plus elles auront de prix dans la contemplation intérieure. […] La volonté, l’intelligence, le goût critique interviennent donc de quelque manière, autant qu’il le faut pour stimuler et utiliser au mieux le travail spontané de l’imagination. […] L’imagination propose, l’intelligence et le goût disposent. […] Ce n’est pas le signe d’une moindre élévation de goûts.
Le besoin de produire une œuvre, le désir de plaire aux lecteurs, le sentiment des goûts du public viennent se combiner avec les souvenirs d’enfance et les réalités journalières de la vie pour suggérer l’invention, pour faire naître l’idée synthétique. […] Toute impression lui vient par les sens, le goût, le toucher, les yeux, et en cela il est vraiment le musicien de son temps9. » Cette invention par transposition de sens ne paraît pas rare chez les musiciens. […] Et s’il n’en était pas ainsi, l’esprit n’inventerait plus rien, ou presque plus rien, parce que toutes les conséquences de ses idées et de ses goûts qu’il porte inconsciemment en lui, il les aurait débrouillées depuis longtemps. […] Ayant donc fait choix d’un sujet de roman et ensuite d’un vigoureux effet à produire, je cherche s’il vaut mieux le mettre en lumière par les incidents ou par le ton, — ou par des incidents vulgaires et un ton particulier, — ou par des incidents singuliers et un ton ordinaire, — ou par une égale singularité de tons et d’incidents ; — et puis, je cherche autour de moi, ou plutôt en moi-même, les combinaisons d’événements ou de tons qui peuvent être les plus propres à créer l’effet en question. » Ayant ainsi expliqué le procédé général, Poë en montre une application dans la genèse de son poème Le Corbeau : « Mon dessein est de démontrer qu’aucun point de la composition ne peut être attribué au hasard ou à l’intuition, et que l’ouvrage a marché, pas à pas, vers sa solution avec la précision et la rigoureuse logique d’un problème mathématique. » Et, partant simplement de l’intention « de composer un poème qui satisfît à la fois le goût populaire et le goût critique », Poë se montre forcément amené à choisir les dimensions de son poème et l’impression à produire, l’usage du refrain, la nature de ce refrain et sa longueur — un mot unique. […] Au second acte de Lohengrin, par exemple, après des scènes vraiment « vagnériennes », on retrouve des chœurs dans le goût de l’ancien opéra.
Car tu sauras que, plus je perds le goût des autres plaisirs, plus ceux de la conversation ont pour moi de charme. […] Ce n’est qu’après le règne du sacerdoce que son gouvernement despotique devait se détendre, et que la monarchie représentative devait y introduire le goût et les institutions de la liberté.
Qu’il ait été puissamment secondé, personne ne le nie ; mais si, aujourd’hui, des hommes mûrs, des jeunes gens, des femmes du monde ont le sentiment de la belle poésie, de la poésie profondément rythmée et vivement colorée, si le goût public s’est haussé vers des jouissances qu’il avait oubliées, c’est à Victor Hugo qu’on le doit. […] Il n’avait pas le temps d’avoir du goût, et cela, d’ailleurs, lui eût peu servi.
Ou bien son goût musical tombe à une profondeur qui n’est connue, je l’espère bien, dans aucun pays autant que dans le nôtre. […] L’art véritable doit créer la vie en dehors des modes et des goûts mercantiles du monde moderne.
. — Moi, pour travailler, il me faut l’hiver, une gelée comme nous en avons en Russie, un froid astringent, avec des arbres chargés de cristaux, alors… Je travaille cependant encore mieux en automne, vous savez, par ces temps où il n’y a pas de vent, pas de vent du tout, où le sol est élastique, où l’air a comme un goût vineux… Mon chez moi, c’est une petite maison en bois, avec un jardin planté d’acacias jaunes, — nous n’avons pas d’acacias blancs. — À l’automne, la terre est toute couverte de gousses, qui crépitent, quand on marche dessus, et l’air est tout rempli de ces oiseaux qui imitent les autres… oui, des pies grièches. […] Mardi 15 août Je crois qu’un curieux d’art ne naît pas comme un champignon, et que le raffinement de son goût est produit par l’ascension de deux ou trois générations, vers la distinction des choses usuelles.
La présentation de l’œuvre dada est toujours pleine de goût pour l’œil, qu’il s’agisse des tableaux aux couleurs charmantes, très mode, ou des livres et revues toujours délicieusement mis en pages, selon des ordonnances de catalogues de parfumerie. […] Des vers qui sculptent avec des mots les rocailles de rivages africains, qui peignent les ciels polychromes, donnent l’anhèlementbf des atmosphères tropicales, le goût des alcools et le toucher des peaux nègres.
L’impitoyabilité du gouvernement de Philippe II n’était ni dans les idées, ni dans la pratique, ni dans les goûts de la cour romaine. […] L’homme politique que j’ai tant signalé dans Forneron, le modéré, le libéral, dont on aperçoit l’opinion à travers le goût et l’estime qu’il a pour Louis XVIII, l’auteur de la Charte future, laisse échapper que la modération, avec laquelle seule on puisse gouverner les peuples, a pour destinée d’être écrasée toujours… Pour ma part, je le crois aussi, mais c’est, précisément, parce que ce n’est pas avec elle seule qu’on peut gouverner les peuples… Véritablement, ils ne sont pas si faciles à mener que cela !
Il se tenait et marchait un peu courbé, avec un faux air plus humble que modeste, et rasait toujours les murailles pour se faire faire place avec plus de bruit, et n’avançait qu’à force de révérences respectueuses, et comme honteuses, à droite et à gauche à Versailles. » Voilà une des raisons qui rendent aujourd’hui Saint-Simon si populaire ; il décrit l’extérieur, comme Walter Scott, Balzac et tous les romanciers contemporains, lesquels sont volontiers antiquaires, commissaires-priseurs et marchandes à la toilette ; son talent et notre goût se rencontrent ; les révolutions de l’esprit nous ont portés jusqu’à lui. — Il voit aussi distinctement le moral que le physique, et il le peint parce qu’il le distingue. […] Il n’écrivait pas sur des sujets d’imagination, lesquels dépendent du goût régnant, mais sur des choses personnelles et intimes, uniquement occupé à conserver ses souvenirs et à se faire plaisir.
Taine, inclinent vers une explication des choses qui satisfait à ce point leur besoin de synthèse et leur goût pour les formules simples et précises ? […] Qu’on ne s’y trompe pas, notre siècle positif a encore moins de goût pour les analyses psychologiques que pour les spéculations métaphysiques.
Roederer, poussé par son goût pour la vérité nue et la réalité, a mieux fait pourtant : il a copié aussi des scènes qu’il avait sous les yeux, de vraies conversations de son temps, toutes naturelles, toutes vives.
Cette éloquence douce et insinuante a toujours été de son goût.
Lorsque je vins en Russie, et les premières années de notre union, pour peu que ce prince eût voulu se rendre supportable, mon cœur aurait été ouvert pour lui ; il n’est pas du tout surnaturel que quand je vis que de tous les objets possibles j’étais celui auquel il prêtait le moins d’attention, précisément parce que j’étais sa femme, je ne trouvai pas cette situation ni agréable ni de mon goût, qu’elle m’ennuyait et peut-être me chagrinait.
Les Martyrs, qui n’avaient parlé qu’à mon imagination et à mon goût de jeune homme, leur parlaient encore sans doute, mais ils trouvaient dans ma foi un second abîme ouvert à côté de l’autre, et c’était le mélange de deux mondes, le divin et l’humain, qui, tombant à la fois dans mon âme, l’avait saisie sous l’étreinte d’une double éloquence, celle de l’homme et celle de Dieu82.
On a fort discuté sur ce que pouvait être cette préparation appliquée à une statue ; sans prétendre l’assimiler exactement à l’office et aux soins d’éditeur, j’aime à croire, sur la foi de toute l’antiquité, qu’Homère également, si on pouvait l’interroger, répondrait : « De toutes mes Iliades, il en est une que je préfère, c’est celle à laquelle Aristarque a mis la main. » A moins de redevenir grammairien, c’est bien à elle, en effet, que l’homme de goût peut se confier et se tenir.
Dom Prevost commença à faire connoître son goût pour les lettres par une pièce contre les amours du Régent.
Mais le goût a parfois à souffrir aussi de certaines duretés, de rocailles, pour ainsi dire, que rachètent bientôt après, comme dans une marche alpestre, la pureté de l’air et la fraîcheur.
. — Hallucinations de l’odorat : « Sa chambre embauma la frangipane ; il vérifia si un flacon ne traînait pas débouché, il n’y avait pas de flacon dans la pièce ; il passa dans son cabinet de travail, dans sa salle à manger, l’odeur persista. » Puis, à la suite de la symphonie olfactive, « à nouveau la frangipane dont son odorat avait perçu les éléments… assaillit ses narines excédées, ébranlant encore ses nerfs rompus… » Perversions du goût : Il a le désir d’une « immonde tartine » mâchée par un « sordide gamin ».
Que Boccace arrange des meurtres, des empoisonnements, des avortements, des goûts contre nature et toutes sortes de vilenies sanglantes ; qu’il mette des amants sur le bûcher, cela est bon pour des nerfs du quatorzième siècle.
Leur goût se développerait et s’affinerait, à faire ainsi la part du tempérament de l’artiste et du génie de son siècle, à reconnaître la couleur et la forme accidentelles que peut prendre une vérité universelle.
Chacune d’elles a sa mesure, relative à celle du tout et des parties voisines, que la logique et le goût indiquent.
Une puissance de création médiocre ; un peu de jalousie, de malignité à l’égard des grands contemporains, où l’on sent un dépit de n’avoir pas percé soi-même au premier rang ; un excès de sévérité pour les vaincus du combat politique qui ne sont pas satisfaits de leur défaite, une insistance à les convertir, où le journaliste officiel, payé, protégé, se découvre trop, et qui fait que des Lundis, à les lire tout d’une suite, émane un déplaisant parfum de servilité ; certain goût de commérages et d’investigations scabreuses, où l’on devine que, sous prétexte d’exactitude historique, se satisfait une imagination inapaisée de vieux libertin : voilà le mal qu’on peut dire de Sainte-Beuve857 .
Et c’est la « jeune dame » par-ci, « la belle paresseuse par-là » ; et « la chère rêveuse » avec sa « charmante petite moue », et le mari qui est « le cher tyran », et les apostrophes dans le goût du siècle dernier : « Objet sacré, ne craignez rien !
La bête humaine, si la prévoyance des législations s’appliquait de plus en plus à la sevrer de sang, finirait peut-être par en perdre un peu le goût.
Auguste Vacquerie Toi qu’on disait l’artiste ardent mais l’homme tiède, Le rimeur égoïste et sourd à tous nos cris, Le jour où l’Allemagne assiégea ce Paris Haï des nations parce qu’il les précède, Quand sachant que Paris difficilement cède Et que, criblé, haché, broyé sous les débris, Les obus n’obtiendraient de lui que son mépris, L’Allemagne appela la famine à son aide, Quand plusieurs étaient pris du goût de voyager, Toi qui dans ce moment étais à l’étranger, Chez des amis, avec une fille chérie, Dans un libre pays, au bord d’un lac divin, Pouvant vivre tranquille et manger à ta faim, Tu choisis de venir mourir pour la patrie.
C’est une sensibilité reposée, méditative, avec le goût des mouvements et des spectacles de la vie, le génie de la solitude avec l’amour des hommes, une ravissante volupté sous les dogmes de la morale universelle.
Catherine de Médicis en avait introduit l’usage à la cour de France et inspiré le goût à ses enfants.
Il suffit de se rappeler ce que dit Brantôme du goût de Catherine de Médicis pour les spectacles de la commedia dell’arte, pour qu’on ne doute pas que l’apparition des artistes italiens parmi nous dût suivre de près le mariage de cette princesse et devenir, dès lors, de plus en plus fréquente.
A côté de l’idée fausse, froide, impossible d’un avènement de parade, il a conçu la réelle cité de Dieu, la « palingénésie » véritable, le Sermon sur la montagne, l’apothéose du faible, l’amour du peuple, le goût du pauvre, la réhabilitation de tout ce qui est humble, vrai et naïf.
L’exercice de nos sens musculaire, organique du goût, de l’odorat, de l’ouïe, du toucher, de la vue ne peut devenir volontaire qu’après de nombreux efforts et des tâtonnements quelquefois infructueux.
Ce fut un témoignage de l’honnêteté de mœurs, de la sagesse d’esprit, de la pureté de principes et de goût qui régnaient dans cette société, de la considération qu’y avait acquise madame Scarron, et du fonds de raison qui caractérisait Louis XIV.
Toutes ces qualités et ces mérites, sauf les légers inconvénients que le goût nous obligeait de ressentir, font, à nos yeux, de M.
C’est ce que firent à la fois en Allemagne et en France deux grands penseurs, Fichte et Biran, le premier plus porté au spéculatif suivant le goût et le génie de sa nation, le second plus psychologue, plus observateur, — le premier liant la métaphysique à la politique, passionné pour les idées du xviiie siècle et de la révolution, le second royaliste dans la pratique, assez indifférent pour ces sortes de recherches et occupé d’une manière tout abstraite à l’étude de la vie intérieure, — tous deux enfin, par une rencontre singulière et selon toute apparence par des raisons analogues, ayant terminé leur carrière par le mysticisme, mais le premier par un mysticisme inclinant au panthéisme, le second par le mysticisme chrétien.
Chaque âge a ses goûts.
Dans ces sciences on n’a besoin de personne pour se juger : dans les matières de goût on n’est vraiment apprécié que par le jugement public.
Pour des raisons que nous indiquerons tout à l’heure, la philosophie française n’a jamais eu beaucoup de goût pour les grandes constructions métaphysiques ; mais quand il lui a plu d’entreprendre des spéculations de ce genre, elle a montré ce qu’elle était capable de faire, et avec quelle facilité elle le faisait.
Ces ornements employés avec tant de mesure et placés avec tant de goût ne sont point le principal charme de son style.
Et si sa mangeaille ne se rachète par aucune délicatesse du goût, non plus que sa débauche par aucun raffinement dans ce qu’il appelle le « déduit », gardez-vous d’en faire honneur à la naïveté de nos ancêtres. […] Nul, grâce à Dieu, n’eut moins de goût ni de réserve que lui. […] Homme étrange alors, ce Parny, vraiment ému, je le crois, et singulier par le choix des sujets, et pittoresque par le goût de l’exotisme, et de qui l’Éléonore — qui sait ? […] et les morceaux de haut goût où il suffit de s’écrier : “L’âme est immortelle” ou “Le chien est l’ami de l’homme” pour être considéré comme un penseur. […] n’importe, c’est de l’esprit grec qu’il tient le goût de l’ordre, de la mesure, le mépris de l’excès, — l’harmonie.
Latin de race et de goûts, M. […] Je me souviens de quelque chose dans ce goût rapporté par M. […] Il reste Ériphyle, mince recueil fait d’un poème et de quatre « sylves », le tout dans le goût de la Renaissance et destiné à être le cahier d’exemples où les jeunes « Romans », aiguillonnés aussi par les invectives un peu intempérantes de M. […] Le procédé inverse est plus conforme au vieux goût des hommes de prêter aux choses de vagues sentiments et une obscure conscience ; il reste fidèle à la tradition panthéiste et animiste, sans laquelle il n’y aurait de possible ni art ni poésie : c’est la profonde source ou viennent se remplir toutes les autres, eau pure que le moindre soleil transforme en pierreries vivantes comme les colliers des fées.
Le Français est irréligieux ou peu religieux d’abord en raison d’une de ses qualités, et c’est à savoir parce qu’il a l’esprit clair et le goût de la clarté. […] Le trop grand goût de clarté, c’est ce qu’on a appelé le simplisme. […] Ni le gouvernement, dans un pays partagé entre protestants, juifs, catholiques et libres penseurs, ne peut avoir une religion d’État ; ni il ne peut, sans de grands inconvénients, partager le gouvernement de l’Église catholique avec un chef spirituel qui est un étranger ; ni il ne peut se mêler de légiférer ecclésiastiquement et imposer à l’Église catholique des lois religieuses selon son goût à lui et contre son goût à elle. […] Sauf ces deux époques, où il a existé une unité morale, qui, du reste, n’est pas du tout de mon goût, l’unité morale de la France n’a jamais été. […] Il est remarquable comme le goût de l’unité ne donne que la passion de la guerre civile.
Ils étaient fails apparemment avant que la Pensylvanie se fût ouvertement déclarée contre le Parlement d’Angleterre… » Peu de goût pour sa patrie et peu de goût pour les gens qui aiment la leur, c’est tout Voltaire relativement à cette question de l’idée de Patrie. […] Mais il a été amené par les circonstances à dire son opinion sur les diverses libertés qui étaient réclamées par ses contemporains et on voit assez qu’il n’en est absolument aucune qui soit de son goût. […] Les Saints-Médardiens s’élèvent contre les goûts les plus innocents pour imposer le joug affreux du fanatisme. […] Le gouvernement despotique est le gouvernement naturel, quelque goût (pie les hommes aient pour être libres, parce qu’il est très facile à établir. […] C’est l’éducation qui doit donner aux âmes la forme nationale, et diriger tellement leurs opinions et leurs goûts qu’elles soient patriotes par inclination, par passion, par nécessité.
» Deux hommes de loi feront également partie de chaque convoi, et pourront, s’il y a lieu, recevoir les dispositions testamentaires des voyageurs qui parcourent les chemins de fer du Nouveau-Monde, — avec embranchement sur l’autre. » *** À l’époque où il n’était ni millionnaire, ni commandeur d’ordres étrangers, mais simplement un homme de beaucoup d’esprit, ***, qui a toujours eu le goût de la représentation, invitait souvent des amis à dîner chez lui. […] — M*** demanda des échantillons, fut très-satisfait… donna l’argent, une grosse somme, ma foi, et dit à la sylphide de faire descendre le vin à la cave, avec ordre d’en mettre sur la table chaque fois qu’il dînerait. — Au bout de quelques jours, il s’aperçut que le bordeaux qu’on lui servait— avait un goût détestable, — un vrai bordeaux de dîner à prix fixe. […] — Moyennant finances, il trouve un libraire qui consent à lui imprimer un volume, en tête duquel le monsieur qui s’occupe de littérature met une préface qui commence invariablement par ces mots : « Cédant aux nombreuses sollicitations de quelques amis d’un goût sûr et approuvé, l’auteur de ce volume se présente pour la première fois devant le public, etc., etc. » — Ici, le personnage devient nuisible et dangereux. — Ce n’est plus le monsieur qui s’occupe de littérature, c’est l’homme de lettres amateur, — désigné quelquefois plus communément et plus justement, sous le nom de Charançon de lettres. […] Cependant un jeune homme qui sait adroitement jeter quelque ô mon Dieur-je dans la conversation peut encore se présenter dans un salon. — Si l’Alboni chante, on la fera taire. — Ce sera d’abord une occasion d’éviter l’art, une chose que le public moderne n’aime pas, parce qu’elle offense la vulgarité de ses goûts. […] Au théâtre, les ouvrages sérieux ou d’apparence sérieuse attirent bien le public, mais on pourrait croire qu’il y vient plutôt par curiosité, par désœuvrement, que par goût.
Rien ne subsiste de sa prodigieuse jactance, de son goût de l’aventure, de son désir d’inspirer la terreur. […] Des villas dont l’agencement et l’ornementation démontrent l’extrême raffinement du goût, parsèment les campagnes où le barbare d’hier poursuivait les fauves, à demi fauve lui-même. […] Dans l’impossibilité de s’affranchir de Rome, je sens une nation rivée encore après seize siècles au dur anneau de Jules César ; elle a pris goût à sa chaîne. […] L’universel scepticisme, la facilité de vivre, l’esprit, les mœurs, le goût qui y règnent en font comme le play-ground du monde. […] Orné et disposé avec goût, l’aspect en devrait être plaisant, intime, cordial, et l’atmosphère réchauffante, reposante, douce.
” Nous négligeons ici quelques défauts de conception et de goût dans l’œuvre d’art de Victor Hugo, et nous disons en nous résumant : Le livre est dangereux, parce que le danger suprême en fait de sociabilité, l’excès séduisant l’idéal, le pervertit. […] Ils n’y ont pas pensé ; les morceaux ont le même goût à leur banquet de Platon, de J.
C’est assez d’indiquer la source de cette contemplation intelligente qui nous élève au pur sentiment de la nature, de rechercher les causes qui, surtout dans les temps modernes, ont contribué si puissamment, en éveillant l’imagination, à propager l’étude des sciences naturelles et le goût des voyages lointains. […] Puis Cicéron, l’homme d’État malheureux, se réfugiant dans la nature, conserve dans son cœur, en proie aux passions politiques, un goût vif pour la nature et l’amour de la solitude.
Je pense donc que la musique d’un opéra n’est, comme sa poésie, qu’un nouvel art d’embellir la parole, dont il ne faut pas abuser. » Et plus loin : « Que sera-ce si le musicien orgueilleux, sans goût ou sans génie, veut dominer le poète, ou faire de sa musique une œuvre séparée ? […] Ce qu’il y a de plus encourageant, c’est que le goût pour la musique wagnérienne commence à se disséminer parmi le vrai peuple.
Laura Bridgman, quoique aveugle, sourde et muette, presque privée du goût et de l’odorat, fait des gestes instinctifs, penche la tête pour affirmer, la secoue latéralement pour nier ; elle hausse les épaules, etc. […] La bouche, organe du goût, le nez, organe de l’odorat, les mains et la surface du corps, organes du toucher, les oreilles, les yeux prennent toujours une part directe ou indirecte à l’expression de tout sentiment.
Leur bonnet était orné avec goût des fleurs de la montagne, et leur air aventurier avait quelques chose de singulièrement intéressant.
Fontenelle en son temps, et en sacrifiant au goût d’alentour, faisait de même.
L’auteur est évidemment de ceux chez qui le goût s’inspire aux sources de l’âme.
Son goût pour Vauvenargues était devenu, en effet, une véritable amitié et du dévouement à sa mémoire.
de fumets pénétrants auxquels se mêlaient l’odeur des vins et le goût des fleurs, je ne regardais pas Fanny, je ne l’écoutais même pas parler.
Je ne suis pas de ces esprits qui ne comprennent qu’une chose ; je n’ai pas le goût de diviser en deux camps mes compatriotes ; il y a, je le sais, le point de vue très plausible, très légitime à bien des égards, du bon sens et de la prudence, comme il y a le parti de l’exaltation intrépide et généreuse ; mais, si large qu’on fasse la part de la civilisation générale, de la raison humaine et de la philosophie, il est des moments où l’honneur l’emporte sur tout ; où, si adouci qu’on soit, si éclairé qu’on se flatte d’être, il convient d’être peuple, de sentir comme le peuple, si l’on veut rester nation.
Il entraîne pour moi plus de sacrifices que pour bien d’autres, parce que les goûts de mon esprit, les penchants de mon âme, toutes mes habitudes y sont complètement sacrifiées.
Est-il possible, en insistant avec vigueur, amertumeet satire (si surtout on en a le goût et le talent, si laverve vous pousse, si les doigts vous démangent sanscesse, si l’on porte jusque dans l’Univers beaucoup de son tempérament de Chignac), — est-il possible, dis-je, en arrangeant, ainsi son monde, de ne pas produire uneffet tout contraire à celui qu’on prétend chercher, dene pas instituer un combat à outrance, de ne pas rendre bientôt odieuses et la personne même de l’attaquant etjusqu’aux doctrines ?
Monmerqué, le plus instruit et le plus aimable des amateurs, le plus riche en documents, en pièces de toutes sortes, si au fait des sources et si porté à les indiquer, n’avait pas en lui l’esprit de critique et d’exacte méthode qui mène à terme et pousse à la perfection un travail de ce genre ; il fallait qu’un philologue de profession et à la fois ouvert à toutes les belles-lettres, un homme qui a fait ses preuves dans l’érudition antique la plus délicate et la plus ardue, et qui sait, à l’occasion, en sortir, apportât dans cette étude moderne les habitudes de la critique véritable et classique, pour que toutes les garanties, celles de la fidélité et du goût, se rencontrassent réunies : j’ai nommé M.
On se le demandait, et bientôt on sut qu’en artiste ironique et fier, qui prétend ne pas dépendre du public ni de son propre succès, résistant à tout conseil et à toute insinuation, opiniâtre et inflexible, il laissait de côté pour un temps le roman moderne où il avait, une première fois, presque excellé, et qu’il se transportait ailleurs avec ses goûts, ses prédilections, ses ambitions secrètes ; voyageur en Orient, il voulait revoir quelques-unes des contrées qu’il avait traversées et les étudier de nouveau pour les mieux peindre ; antiquaire, il s’éprenait d’une civilisation perdue, anéantie, et ne visait à rien moins qu’à la ressusciter, à la recréer tout entière.
Avec du goût, de l’esprit et les formes de la meilleure compagnie, il aimait à faire remarquer l’ancienneté de la famille irlandaise dont il descend.
Singulier mélange, en effet, que cet abbé de Pradt, instruit de tant de choses et qui croyait s’entendre à toutes ; homme d’Église qui l’était si peu, qui savait à fond la théologie, et qui avait à apprendre son catéchisme ; publiciste fécond, fertile en idées, en vues politiques d’avenir, ayant par moments des airs de prophète ; écrivain né des circonstances, romantique et pittoresque s’il en fut ; le roi des brochuriers, toujours le nez au vent, à l’affût de l’à-propos dans les deux mondes, le premier à fulminer contre tout congrès de la vieille Europe ou à préconiser les jeunes républiques à la Bolivar ; alliant bien des feux follets à de vraies lumières ; d’un talent qui n’allait jamais jusqu’au livre, mais qui avait partout des pages ; habile à rendre le jeu des scènes dans les tragi-comédies historiques où il avait assisté, à reproduire l’accent et la physionomie des acteurs, les entretiens rapides, originaux, à saisir au vol les paroles animées sans les amortir, à en trouver lui-même, à créer des alliances de mots qui couraient désormais le monde et qui ne se perdaient plus ; et avec cela oublieux, inconséquent, disparate, et semblant par moments sans mémoire ; sans tact certainement et sans goût ; orateur de salon, jaseur infatigable, abusant de sa verve jusqu’à l’ennui ; s’emparant des gens et ne les lâchant plus, les endoctrinant sur ce qu’ils savaient le mieux ; homme à entreprendre Ouvrard sur les finances, Jomini sur la stratégie, tenant tout un soir, chez Mme de Staël, le duc de Wellington sur la tactique militaire et la lui enseignant ; dérogeant à tout instant à sa dignité, à son caractère ecclésiastique, avec lequel la plupart de ses défauts ou, si l’on aime mieux, de ses qualités se trouvaient dans un désaccord criant ; un vrai Mirabeau-Scapin, pour parler comme lui, un archevêque Turpin et Turlupin.
Il l’a sentie par les institutions et par le génie social, autant que Fénelon a pu la sentir par la poésie et par le goût.
Voltaire écrivant à l’abbé d’Olivet disait :« Je vous demande en grâce, à vous et aux vôtres, de ne vous jamais servir de cette phrase :nul style, nul goût dans la plupart, sans y daigner mettre un verbe.
Une femme d’un talent délicat, Mme de Bawr, ramenait quelquefois, comme conseil bienveillant, les mots de goût et de grâce.
Il n’est pas vrai du tout, que dans la moralité du cœur humain, un lien ne confirme pas un penchant ; il n’est pas vrai, qu’il n’existe pas plusieurs époques dans le cours d’un attachement, où la moralité ne resserre pas les nœuds qu’un écart de l’imagination pouvait relâcher ; les liens indissolubles s’opposent au libre attrait du cœur : mais un complet degré d’indépendance rend presque impossible une tendresse durable ; il faut des souvenirs pour ébranler le cœur, et il n’y a point de souvenirs profonds, si l’on ne croit pas aux droits du passé sur l’avenir, si quelque idée de reconnaissance n’est pas la base immuable du goût qui se renouvelle : il y a des intervalles dans tout ce qui appartient à l’imagination, et si la moralité ne les remplit pas, dans l’un de ces intervalles passagers, on se séparera pour toujours.
Elles ne supposent d’ailleurs, chez ceux qui s’y sont voués, que de la patience, une sagacité moyenne et le goût d’une certaine activité sans invention, qui peut fort bien s’allier à une réelle paresse d’esprit.
Supposons qu’une fantaisie du goût eût, pendant des années, contenu le ballet dans l’immobilité du « tableau vivant », par exemple.
Lorsqu’il a été manié par des acteurs de quelque génie, il a fait les délices des plus grands rois et des gens du meilleur goût ; c’est un caméléon qui prend toutes les couleurs. » Arlequin, s’il n’était jadis naïf qu’à demi, devient alors tout à fait scélérat : « Arrogant dans la bonne fortune, dit M Jules Guillemot48, traître et rusé dans la mauvaise ; criant et pleurant à l’heure de la menace et du péril, en un mot Scapin doublé de Panurge, c’est le type du fourbe impudent, qui se sauve par son exagération même, et dont le cynisme plein de verve nous amuse précisément parce qu’il passe la mesure du possible pour tomber dans le domaine de la fantaisie. » Arlequin, avec ses nouvelles mœurs, court fréquemment le risque d’être pendu ; il n’y échappe qu’à force de lazzi.
Ils ont reçu de Wagner le goût du leitmotiv — et la manière de le traiter… Souhaitons qu’ils n’oublient point de marquer leur individualité spéciale, d’avoir, bien à eux, leur façon de sentir et leur façon d’exprimer.
« Il ne faut pas mêler l’idée de gloire à l’idée de beauté. »« Tout à fait dépendante des révolutions de la mode et du goût », la première est méprisable.
On ne lui avait jamais donné le goût ni l’idée d’une lecture sérieuse.
Il en conclut que le ministère était encore moins à son goût qu’à sa portée : « Je ne sais si je fais mon apologie en vous parlant ainsi, écrivait-il en s’adressant à Mme de Caumartin ; je ne crois pas au moins vous faire mon éloge. » Cette gloire, ce point d’honneur dont Retz nous parle toujours, et qu’il ressentait à sa manière, c’était une certaine réputation populaire, la faveur et l’amour du public, c’était d’être fidèle aux engagements envers ses amis, de ne point paraître céder à un intérêt purement direct ; vers la fin, toute sa doctrine de résistance semble n’avoir plus guère été qu’une gageure d’honneur contre le Mazarin.
Mais toutes les tentatives réunies de ces ridicules ennemis du goût & des vrais intérêts de la religion, furent inutiles & tournèrent contr’eux-mêmes.
Sans omettre les réserves du goût et de la morale, aimons ce dix-neuvième siècle français dont nous sommes les enfants et qui, dans notre pays, s’est attesté par de tels monuments de prose élevée et de poésie souveraine.
Les rouleaux dont je parle se sont anéantis avec le goût gothique : mais quelquefois les plus grands maîtres ont jugé deux ou trois mots necessaires à l’intelligence du sujet de leurs ouvrages, et même ils n’ont pas fait scrupule de les écrire dans un endroit du plan de leurs tableaux où ils ne gâtoient rien.
augmenter, par le contraste, l’arôme et la saveur des parties saines, — et c’est ce fruit-là, si difficile à apprécier, qui révolte le goût et qui l’enivre, que M.
Mais il faut bien dire qu’à notre goût scientifique elle offre, si elle prétend se suffire à elle-même et se passer du secours de la sociologie, peu d’aliment.
D’ailleurs, un goût de vérité général s’est répandu ; moins il y en a dans nos mœurs, plus on en exige dans les écrits.
Ce n’étaient pas, on peut le croire, des bienséances plus sévères, des scrupules de goût qui faisaient ces suppressions.
On a cru devoir, évidemment dans un but de réhabilitation qui n’a rien à voir ni avec la vie très honorable ni avec l’œuvre très intéressante, faire s’ouvrir le volume par une pièce intitulée Étrennes des Orphelins, laquelle assez longue pièce, dans le goût un peu Guiraud avec déjà des beautés tout autres. […] Nombre de chansons populaires sont instrumentées dans ce goût, avec la liberté toutefois en outre de rimer soit par à peu près, soit sans guère observer l’alternance des deux genres masculin et féminin, non plus que des singuliers ou des pluriels assortis, avec d’autres commodités encore. […] Ce sont les fleurs les plus étranges Et des fruits d’un goût sans pareil, Des orangers remplis d’oranges Dans des champs tout pleins de soleil. […] Barbey d’Aurevilly, s’il nous prenait la fantaisie de l’imiter, et de terminer cette trop longue marche à travers son livre par une tirade dans ce goût ?
Ou, simplement, n’est-ce pas que les bourgeois d’alors (sujet ordinaire des peintures de la comédie) étaient déjà de trop « honnêtes gens » et de trop de goût, pour mêler sans pudeur à leurs entretiens familiers les formules dévotes, comme faisaient les bonnes gens du treizième siècle et comme font les moujiks du nôtre ? […] Rzewuski est un de ceux qui ont le plus fait, depuis huit ou dix ans, pour répandre en Russie le goût de la littérature française contemporaine. […] Fiammette a un mari, Giorgio d’Ast, un aventurier qu’elle a rencontré un jour, qu’elle a épousé, le trouvant de son goût, et qui continue à vivre à sa cour, mais qu’elle a un peu oublié. […] Je vous ai connue toute petite ; déjà, vous me consultiez sur tout… Votre tour d’esprit, votre façon un peu « artiste » et généreuse de juger les choses, vos goûts intellectuels n’est-ce pas mon ouvrage ? […] C’est ce que la coquine vient raconter à son ancien amant, qui, tout à coup, se sent repris de goût pour elle.
Le poëte, chez Nodier, est déjà bien avancé, bien en train de mûrir : une circonstance particulière vint développer en lui le philologue, le lexicographe, et lui permit dès lors de pousser de front ce goût vif à côté de ses autres prédilections un peu contrastantes. […] Nodier accommode par goût l’érudition pour les estomacs rassasiés et dédaigneux.
Avant Louis XIV, le spectacle était pareil dans toute la France. « La noblesse campagnarde d’autrefois, dit le marquis de Mirabeau, buvait trop longtemps, dormait sur de vieux fauteuils ou grabats, montait à cheval, allait à la chasse de grand matin, se rassemblait à la Saint-Hubert et ne se quittait qu’après l’octave de la Saint-Martin… Cette noblesse menait une vie gaie et dure, volontairement, coûtait peu de chose à l’État, et lui produisait plus par sa résidence et son fumier que nous ne lui valons aujourd’hui par notre goût, nos recherches, nos coliques et nos vapeurs… On sait à quel point était l’habitude, et, pour ainsi dire, la manie des présents continuels que les habitants faisaient à leurs seigneurs. […] Il n’y a que Versailles pour se montrer, faire figure, se pousser, pour s’amuser, converser ou causer, au centre des nouvelles, de l’action et des affaires, avec l’élite du royaume et les arbitres du ton, de l’élégance et du goût. « Sire, disait M. de Vardes à Louis XIV, quand on est loin de Votre Majesté, non seulement on est malheureux, mais encore on est ridicule. » Il ne reste en province que la noblesse pauvre et rustique ; pour y vivre, il faut être arriéré, dégoûté ou exilé.
Mais ce goût pour la philosophie ne m’est pas si nouveau qu’on se l’imagine. […] « Dans mes quatre livres Académiques, je leur ai montré quelle sorte de philosophie me semblait la moins arrogante, la plus positive et la plus propre à former le goût.
Enfin, sa casquette était d’un goût excellent. […] Elle épouse sans goût M. le président de Bonfons, parce qu’il dirige ses affaires ; et vit chastement avec lui comme une douairière de province, ensevelie dans ses inutiles trésors.
Lui même ne pouvait être, aucunement, le serviteur du luxe ; et ainsi, sa musique devait être délivrée de toute marque de soumission à un goût frivole. […] Cette direction avait même abaissé la Musique à un tel point que le goût voluptueux lui demandait toujours quelque nouvelle chose, la Mélodie de la veille ne pouvant plus, le lendemain, être entendue.
Nos sensations du goût les plus spécifiques sont précisément celles qui sont compliquées de sensations du toucher et de sensations d’odorat : le piquant du poivre ou l’âpreté du vin sec sont des sensations factuelles, et leurs goûts aromatiques sont en réalité des odeurs14.
Mêmes réflexions pour l’odorat et le goût : la juxtaposition y demeure vague, la tendance à la pénétration, à la fusion, à la confusion y est dominante. […] Pour le goût, certains muscles difficiles à déterminer servent à donner une plus grande diffusion aux substances sapides de la langue et du palais.
Dans la description des lieux où ils se meuvent, l’écrivain ne tâche qu’à rendre aussi clairement que dans la délinéation de leur caractère, quelque impression sentimentale, une manière de voir, une suggestion morale ; dans les scènes où il les met en présence, il ne tend qu’à exagérer encore la saillie de leur tempérament, tout en accusant le sens et la tendance propres de l’épisode même, qui, grossi sans mesure, infléchit brusquement toute la marche du récit au gré du goût de l’auteur plus soucieux d’incidents intéressants que de l’équilibre et du progrès de l’œuvre. […] L’enfant qui était alors chétif et faible, qui avait des goûts studieux, un peu pédants même, bien rares parmi ses compatriotes, se pénétra de tous ces livres ; il passa dans sa famille pour un petit prodige et, comme il était habile à retenir les chansons de café-concert qu’on le menait entendre, on l’exhibait souvent aux voisins, juché sur une table et faisant montre de ses talents.
Ma mère, qui est de Paris et qui a été élevée à la cour, nous a transmis les goûts et les sentiments délicats du monde où elle a vécu dans son premier âge. […] Voilà ce qui nous distingue et ce qui distingue la France de ceux qui se sont appelés hier les romantiques, et qui s’appellent aujourd’hui les réalistes ; deux hérésies pleines de talents égarés, mais qui, en rentrant dans la vérité, feront faire de nouvelles conquêtes à la religion du goût et des lettres.
. — En observant qu’elles sont toutes, ou à peu près, du même temps, on s’aperçoit que l’« allégorie » caractérise toute une « époque » de la littérature du Moyen Âge ; — et on est conduit à chercher les raisons de ce goût pour l’allégorie. — Il s’en trouve de sociales, comme le danger qu’on pouvait courir à « satiriser » ouvertement un plus puissant que soi ; — mais il y en a surtout de littéraires, qui se tirent — du peu d’étendue de l’observation « directe » de la réalité au Moyen Âge ; — du peu d’aptitude de la langue à exprimer les idées générales sans l’intermédiaire d’une personnification matérielle ; — et de la tendance des « beaux esprits » de tout temps à parler un langage qui ne soit pas entendu de tout le monde. […] Les Miracles. — Les Miracles sont une aventure de la vie commune, dénouée par l’intervention de la Vierge ou d’un saint ; — dont le dénouement même, et surtout « l’intrigue », n’ont rien d’obligatoire ; — les personnages n’en ont rien de forcément plus ou moins historique ; — c’est à peine si l’on peut dire qu’ils visent à l’édification, et moins encore à renseignement ; — ils sont d’ailleurs souvent hostiles au clergé ; — et on ne voit pas que l’Église les ait pris sous sa protection. — La principale relation qu’ils aient avec les Mystères est donc d’avoir entretenu le goût du théâtre ; — et, si l’on le veut, de l’avoir développé par l’intermédiaire des confréries, puys ou chambres de rhétorique. — Que, par opposition à ces caractères, les Mystères, eux, sont vraiment la mise en scène des « mystères » de la religion ; — ce qui nous dispense d’épiloguer sur la signification et l’étymologie de leur nom. — Aussi leur véritable caractère est-il bien là, non ailleurs ; — et les scènes épisodiques dont ils sont remplis ne l’ont pas altéré ; — ce que prouve d’ailleurs la seule classification qu’on en puisse donner.
Prêtre, avec l’instinct des races militaires, il se trouva placé entre ses goûts et la convenance. […] Rien de moins bourgeois que Mme de Staël ; elle avait bien des défauts et nous les reconnaissons… Pédante, si l’on veut, quelquefois sans grâce et précieuse, esprit faux en philosophie, bas-bleu, à ravir l’Angleterre de l’éclat enragé de son indigo, Mme de Staël, par la distinction de sa pensée, par la subtilité de son observation sociale, par son style brillant d’aperçus, par ses goûts, ses préoccupations, ses passions même, tendait vers la plus haute aristocratie, vers la civilisation la plus raffinée.
Peu s’en faut, dans sa légèreté et son inattention, qu’il n’y voie un présage de la décadence du goût, et il se fait un plaisir de mêler et brouiller tout cela avec les mauvais vers de ce libertin d’abbé Pellegrin : Voilà une Pélopée de l’abbé Pellegrin qui réussit, écrivait-il à son ami Formont (26 juillet) ; o tempora !
En France, au contraire, où il y a une Académie française et où surtout la nation est de sa nature assez académique, où le Suard, au moment où on le croit fini, recommence ; où il n’est pas d’homme comme il faut, dans son cercle, qui ne parle aussitôt de goût ; où il n’est pas de grisette qui, rendant son volume de roman au cabinet de lecture, ne dise pour premier mot : C’est bien écrit, on doit trouver qu’un tel style est une très grande nouveauté, et le succès qu’il a obtenu un événement : il a fallu bien des circonstances pour y préparer.
Cela m’a remis en goût de relire çà et là de l’abbé Prévost, et particulièrement Manon Lescaut, le livre par lequel il vivra.
Dorat leur avait rendu le même service qu’au drame et avait pris avec elles les mêmes libertés ; il avait corrigé, arrangé le tout au goût de Paris et du beau sexe ; et dès la première pièce ou dédicace en prose, là où on lisait dans l’original : « Sophie, c’est loin de vous, c’est dans un autre climat que tristement assis à l’ombre des mélèzes, je me rappelle tant de vœux rejetés, tant d’espérances déçues » ; Dorât avait substitué les platanes aux mélèzes.
Ce besoin qu’il avait de l’entretien habituel d’un homme instruit, fait honneur à Dangeau et nous est un témoignage de plus de ses goûts littéraires.
On y voit Reynier, officier savant et d’ordinaire peu heureux, ayant en lui je ne sais quel défaut qui paralysait ses excellentes qualités et justifiait cette défaveur de la fortune, « fort possédé du goût d’écrire sur les événements auxquels il assistait, et dissertant sur les opérations qu’on aurait pu entreprendre ».
Ce qui lui valait cet honneur posthume d’être ainsi classé à l’improviste, à son rang d’étoile, parmi les poètes de la France, était une magnifique et singulière composition, Le Centaure, où toutes les puissances naturelles primitives étaient senties, exprimées, personnifiées énergiquement, avec goût toutefois, avec mesure, et où se déclarait du premier coup un maître, « l’André Chénier du panthéisme », comme un ami l’avait déjà surnommé.
Un peu de prêcherie n’y messied pas, c’est accordé : il ne s’agit que d’y observer le goût, la vraisemblance, la raison, d’y entretenir l’intérêt, de n’y pas introduire l’ennui.
Sa maison seule, qui est fort belle, ses escaliers ornés de statues d’un goût parfait, la beauté de ses tableaux, la profusion des dessins qu’on trouve jusque dans ses antichambres, et les raretés de toute espèce et de tous les siècles qu’on rencontre à chaque pas, auraient suffi pour m’apprendre que j’entrais chez le prince de la littérature allemande.
J’ai bien peur, pour le goût de M.
Le comte de Gisors y fit l’apprentissage de l’une et de l’autre ; et il semble que, s’il eût vécu davantage, c’est à cette seconde carrière, la diplomatie, que sa délicate santé comme ses goûts l’eussent définitivement porté.
Sainte-Beuve, à cause d’une critique de goût et toute littéraire qu’il contenait à l’adresse de M. l’évêque de Montpellier.
Il montrait des goûts militaires très prononcés ; mais les circonstances étant peu favorables, les régiments suisses en France se trouvant licenciés par le fait de la Révolution, on le destina au commerce.
Ils agréent chacun dans sa forme ; on a, si on l’osait dire, du goût pour eux.
Chacun reviendra à ses goûts et à sa nature.
Il mêle ses sentiments à son récit ; il juge ses personnages, il a oublié qu’ils sont des fictions ; il les raille ou en prend pitié, les gourmande ou les admire ; il monte avec eux sur le théâtre, et devient lui-même le principal spectacle ; nous connaissons dorénavant ses goûts, ses habitudes, son histoire même ; nous suivons à chaque ligne les mouvements de son imagination ou de son âme.
Et maintenant me reprochera-t-on, une fois de plus, trop de complaisance à plaider le pour et le contre, et trop de goût pour de « vains exercices de rhétorique » ?
Le théâtre italien de l’Hôtel de Bourgogne montre un goût tout particulier pour la peinture des coutumes locales : il donne des pièces sur les Promenades de Paris58, sur les Bains de la Porte Saint-Bernard59.
Donner vaut mieux que recevoir 237. » « Celui qui s’humilie sera élevé ; celui qui s’élève sera humilié 238. » Sur l’aumône, la pitié, les bonnes œuvres, la douceur, le goût de la paix, le complet désintéressement du cœur, il avait peu de chose à ajouter à la doctrine de la synagogue 239.
Quels furent ses goûts, ses occupations, l’emploi de ses heures et de ses années dans l’exil ?
Une œuvre d’art peut donner des renseignements sur son producteur, des facultés de qui elle est l’image, sur ses admirateurs, du goût desquels elle est encore indicatrice.
Chacun trouve quelque chose qui pique son goût particulier dans des tableaux où le peintre a répresenté un point d’histoire dans toute sa verité, c’est-à-dire sans en alterer la vrai-semblance historique.
Cela était finement pensé, ingénieusement dit ; moi et bien d’autres, nous avions pris goût aux innocentes causeries du petit vieillard.
Elle a dit, à propos des Névroses, ses goûts ou ses dégoûts, à elle, ses préférences et ses horreurs, tirant tout de sa propre personnalité, faisant comme les peintres, qui se peignent plus que les gens qu’ils peignent, dans leur peinture.
Et quand ces écrits sont des articles, lus à distance les uns des autres, c’est charmant ; mais quand le tout est ramassé et massé dans un seul volume, qu’on lit d’une haleine, on finit par trouver que c’est trop de poudre comme cela, et on pense malgré soi à la fameuse anecdote du glorieux bailly de Suffren, qui avait l’habitude de fourrer de bien autres poudres que celles-ci dans son tabac d’Espagne, et qui, un jour qu’on voulut l’attraper et le corriger de ce goût étrange, en ne mettant, au lieu de tabac, que de cette poudrette dans sa tabatière, dit avec la majesté du connaisseur, après avoir aspiré fortement jusqu’au fin fond de son nez héroïque ce qu’il croyait du tabac encore : « Il est bon, mais il y en a trop !
Il a le don et le goût de l’éloquence ; vous trouverez en lui toutes les qualités qui peuvent la nourrir ou l’orner.
En somme, le pessimisme avec le besoin et le goût de l’action. […] Emma est de plus fine essence que le pauvre Charles ; elle a été élevée autrement ; elle a des goûts plus « distingués »… De là ce que nous appellerons, si vous le voulez bien, des tiraillements dans le ménage. […] Or, autant nos pères avaient le goût sévère et même étroit quand il s’agissait de haute littérature et de « genres » officiels et classés, autant, lorsqu’ils ne cherchaient qu’à se divertir après boire, ils avaient l’estomac robuste et faisaient peu les renchéris. […] etc… Et dire que ce vieux goût romantique pour Marie-Madeleine est peut-être tout ce qui reste de christianisme à la plupart de nos contemporains ! […] C’est mieux qu’une revue : c’est la revue de Loulou, c’est l’abrégé turbulent des goûts et des antipathies de cette délicieuse et inquiétante ponette, la préférée de Gyp.
. — Pas sans que je guide votre goût ; car je suis ici pour cela. […] On ne rend guère plus compte d’un recueil de poésies que d’un bouquet, de son odeur et de sa couleur ; c’est affaire de goût, d’impression personnels. […] Croyez-le : ceux qui ont fondé l’Académie de France à Rome ont voulu donner aux artistes l’occasion de perfectionner leurs goûts ; mais ils ont surtout prétendu les mettre à même de tirer tout le parti possible de leur génie. […] Le temps évidemment fera de ce goût ce qu’il fait de tout, mais c’est lui seul qui décrète le commencement et la fin de toutes choses, sans se soucier des révolutions humaines qui n’ont jamais fait que retarder sa marche sans jamais parvenir à l’arrêter. […] Ce goût lui vient de ce que les abeilles vont chercher leur butin sur les fleurs de l’arbousier.
Tascher de La Pagerie, sucrier aux Antilles, se ruina dans des spéculations malheureuses auxquelles il ajouta la passion du jeu et le goût des mulâtresses. […] Mais il s’est très vite accoutumé à l’idée d’un mariage où l’engagent les suggestions de ses conseillers, les intérêts de sa politique et sans doute aussi ce goût de nouveauté que détermine habituellement, chez les hommes résistants, la crise de l’âge mûr. […] Il insista sur les goûts champêtres du général. […] Son goût pour les arts se réduit à l’envie de se faire un nom ; ses ouvrages lui appartiennent parce qu’il les a payés. » Tout ce que faisait ou disait M. de Choiseul était régulièrement contrecarré par sir Robert Ainslie, ambassadeur d’Angleterre. […] Trop de psychologues ont blasé notre goût par la saveur quintessenciée des amours perverses.
Ne devant rien faire de sérieux en musique, je n’en sais que ce qu’il faut pour une personne de goût qui ne veut pas composer. […] Ainsi, vous voyez bien, tout s’oppose, la chronologie aussi bien que mes goûts, à ce que j’accepte le rôle de vieille élève dévoyée dont vous voulez me gratifier. […] Simmons, c’est un homme de goût, de toutes façons. […] Pour ce qui est du charme que peut ajouter le mystère, tout dépend des goûts… Que ça ne vous amuse pas, bien ; mais moi ça m’amuse follement, je le confesse en toute sincérité, de même que la joie enfantine causée par votre lettre, telle quelle. […] Quant à Montesquieu, si j’ose m’exprimer ainsi, son goût pour l’étude fut si vif que s’il fut la source de sa gloire, il fut aussi celle de son bonheur, comme dirait la sous-maîtresse de votre fantastique pensionnat.
C’est un sujet de thèse que je propose à d’autres : la passion littéraire et le goût de l’esprit chez les femmes dans l’Antiquité. […] Boileau si cher aux bons esprits, aux hommes de sens et de goût, n’était guère de nature par son talent à faire vibrer une corde au cœur des femmes.
Le xviie siècle littéraire, qui s’inaugurait sous les auspices de Malherbe et de Balzac, avait trop à faire, trop à songer à ses propres œuvres, à sa propre gloire pour revenir ainsi en arrière ; il avait sa langue immortelle à épurer, à fixer : il eût craint de se gâter l’élocution et le goût en retournant à de vieux jargons. […] Ce que ces deux hommes de goût ont écrit sur la Chanson de Roland laisse peu à dire à ceux qui viennent après. — M.
Voilà ce monde élégant et sensé, raffiné en fait de bien-être, réglé en fait de conduite, que ses goûts de dilettante et ses principes de moraliste renferment dans une sorte d’enceinte fleurie et empêchent de regarder ailleurs. […] Mais ce n’est point parmi eux que nous trouverons, comme en Angleterre, le monde pensant, élégant, qui par la finesse de son goût et la supériorité de son esprit devient le guide de la nation et l’arbitre du beau.
Rousseau, mais plus candides, plus naturels, moins sophistiqués et moins déclamatoires, on s’aperçoit qu’après ses relations avec Mozart, le goût, ou du moins le regret de la vertu, respire dans cet homme d’aventures qui a respiré de près l’âme d’un homme de régularité et de piété. […] La salle était vaste, décorée avec goût et éclairée d’une façon brillante ; les loges et le parterre étaient chargés de monde.
“Il y aura toujours assez d’hommes enclins à gouverner les autres hommes, leur répondait-il, il n’y en aura jamais assez pour leur enseigner les règles morales de la vie privée et de la vie publique.” » Sa réputation de science et de sagesse groupa bientôt autour de lui un petit nombre de ces hommes de bonne volonté qui ont un goût naturel pour la supériorité de l’esprit ou de l’âme et que la Providence semble appeler spécialement dans tous les pays et dans tous les temps à faire écho et cortège aux grandes intelligences. […] Il conservait encore à soixante-dix ans le goût et le talent des vers.
J’étais déjà prématurément connu littérairement alors ; elle était illustre par son rang, ses malheurs, son goût pour les lettres, son talent pour la musique ; elle voulait me voir ; elle me fit témoigner le désir de me rencontrer, comme par hasard, dans une allée des Cascines, où j’avais l’habitude de me promener à cheval ; elle m’assigna plusieurs fois la place et l’heure. […] Ces hommes de cœur et de goût furent la Providence de sa fortune et de sa renommée : que son nom rayonne sur eux, ce n’est que justice ; leur opulence et leur amitié ont rayonné longtemps sur son obscurité ; la postérité doit reconnaissance à ceux qui furent les nourriciers de ses grands artistes.
Cette superficie de littérature française donne aux plus lettrés d’entre eux le goût et quelquefois l’émulation d’écrire. […] La vérité pure ne lui plaisait pas assez ; il lui fallait le sel de l’exagération pour l’assaisonner au goût de sa caste.
Voici le portrait vrai, d’une touche très fine, qu’en fait madame Lenormant à cette date : « Madame Récamier trouvait d’ailleurs dans la duchesse de Devonshire la douceur d’une société intime et les plus agréables sympathies de goût et d’humeur. […] Nous ne sommes pas suspect en blâmant l’accent de ces pamphlets, car nous n’avions pas plus de goût que lui pour les institutions et pour les rois de 1830 ; mais toutes les armes ne sont pas bonnes pour combattre des ennemis politiques, et le pamphlet à deux tranchants ne convient pas aux mains loyales.
.… Il y a dans le Roland furieux un mérite inconnu à toute l’antiquité, ce sont les exordes de ses chants ; chaque chant est comme un palais enchanté dont le vestibule est toujours dans un goût différent : tantôt majestueux, tantôt simple, même grotesque ; c’est de la morale, de la gaieté, de la galanterie et toujours du naturel et de la vérité. » (Ici Voltaire traduit en vers, mais traduit faiblement, quelques-uns des délicieux exordes que j’essayerai, à mon tour, de vous traduire en prose.) […] La magnifique invention du sujet, qui appartient tout à l’Arioste, a donné à cette tragédie de Voltaire un effet théâtral immense : mais Voltaire fait déclamer pompeusement la passion dans sa tragédie, et Arioste la fait chanter, raconter et pleurer comme la nature ; il n’y a pas un homme de goût, dans aucun pays, qui puisse comparer de bonne foi les vers sonores et faibles de la tragédie avec les stances simples et pleines du poème.
VII Ces aptitudes et ces goûts oratoires et littéraires de la famille de Cicéron, et la tendresse qui se change en ambition pour son fils dans le cœur d’une noble mère, firent élever dans les lettres grecques et romaines l’enfant, qui promettait de bonne heure tant de gloire à sa maison. […] XVII Cependant le père, la mère, les oncles de Cicéron et ses amis le conjuraient de faire violence à son goût pour la retraite, et de ne pas priver la république, dans des temps difficiles, des dons que les dieux, l’étude, les lettres, les voyages, avaient accumulés en lui. « La vertu et l’éloquence ne lui avaient été données, lui disaient-ils, que comme deux armes divines pour la grande lutte qui se balançait entre les hommes de bien et les scélérats, entre la république et la tyrannie, entre l’anarchie des démagogues et la liberté des bons citoyens. » Cicéron céda à leurs instances, et sollicita la questure la même année où les deux plus grands orateurs du temps, ses maîtres et ses modèles Hortensius et Cotta, sollicitèrent le consulat, première magistrature de Rome, qui durait un an.
Il est sans doute à quelque degré de la famille des Brossette et des Boswell, de ceux qui se font volontiers les greffiers et les rapporteurs des hommes célèbres ; mais il choisit bien son objet, il l’a adopté par choix et par goût, non par banalité ni par badauderie aucune ; il n’a rien du gobe-mouche, et ses procès-verbaux portent en général sur les matières les plus élevées et les plus intéressantes dont il se pénètre tout le premier et qu’il nous transmet en auditeur intelligent. […] L’intérieur de sa maison me fit une très agréable impression ; sans être riche, tout a beaucoup de noblesse et de simplicité ; quelques plâtres de statues antiques placés dans l’escalier rappellent le goût prononcé de Goethe pour l’art plastique et pour l’antiquité grecque.
Et voici que ces mêmes gens, ont aujourd’hui l’esprit tellement faussé par tout ce qui se dit sur Wagner et le goût tellement dépravé par ce qui se passe dans les salles de concert, qu’ils battent des mains et trouvent cela beau ! […] On nous a souvent reproché, à nous, Wagnériens convaincus, d’être une cause principale de ces malentendus, de cet égarement du goût.
Elle est — espérons-le — à l’abri de ces déplorables représentations qui dépravent le goût en Allemagne, et qui font qu’il devient tous les jours plus impossible défaire comprendre aux compatriotes du maître de quoi il s’agit dans la réforme de l’art qu’il avait rêvée. […] Elle est au contraire absurde, malsaine, elle défigure complètement la pensée wagnérienne, et elle ne peut que dépraver le goût et que donner un funeste exemple ; et en même temps cette musique s’impose à tel point, que nul ne pourra se soustraire à son influence.
Mais que si la maîtresse a été frottée d’un peu de monde, d’un peu d’art, d’un peu de littérature, et qu’elle veuille s’entretenir de plain-pied avec notre pensée et notre conscience du beau, et qu’elle ait l’ambition de se faire la compagne du livre en gestation ou de nos goûts ; elle devient pour nous insupportable comme un piano faux, — et bien vite un objet d’antipathie. […] Là, le vieux père Maire, servait lui-même en personne, et dans de la vraie argenterie, aux gens dont il estimait le goût culinaire, servait un haricot de mouton aux morilles, un macaroni aux truffes inénarrable : le tout arrosé de plusieurs bouteilles de ces jolis petits bourgognes, venant de la cave du roi Louis-Philippe, dont il avait acheté la cave presque tout entière.
Rien ne repousse chez moi des goûts qui m’attachaient à la vie. […] Oui, lui dis-je, je comprends votre goût, et les romans que mon frère et moi avons faits, et ceux surtout, que nous voulions dorénavant écrire, étaient les romans que vous rêvez.
Et pourtant, n’est-ce pas l’auteur même des Fleurs du mal qui, en une heure de philosophie, écrivait cette dissertation édifiante : « L’intellect pur vise à la vérité, le goût nous montre la beauté et le sens moral nous enseigne le devoir. […] Aussi, ce qui exaspère surtout l’homme de goût dans le spectacle du vice, c’est sa difformité ou disproportion.
Quant aux Aryas qui firent la conquête de l’Inde, les Védas sont là pour attester qu’ils eurent un sens très vif de la réalité et de la pratique, un goût très décidé pour les biens de ce monde, une vigueur et une santé morales tout à fait inexplicables dans la période de l’infini. […] Bacon a cru pouvoir formuler cette loi : « dans la jeunesse d’un état, c’est le métier des armes qui fleurit ; dans l’âge mûr, c’est encore pendant quelque temps le goût de la guerre, et aussi la science, qui devient peu à peu prépondérante ; au déclin, ce sont les arts mécaniques et le commerce. » Un penseur bavarois, Ernest de Lasaulx, a repris pour son compte cette vue du lord chancelier ; il en trouve la confirmation dans l’histoire de la Grèce et de Rome, et craint de la vérifier pour son propre pays.
Fût-ce réellement ce motif qui détermina Audin à repousser une profession vers laquelle il semblait se porter avec tant de goût et de pente ? […] Mais son goût épuré pour les livres rares, lequel avait l’ardeur d’une passion, ne l’empêcha pas d’être le commerçant le plus rassis et le plus positif.
Il y a des intervalles de silence entre les sons, car l’ouïe n’est pas toujours occupée ; entre les odeurs, entre les saveurs on trouve des vides, comme si l’odorat et le goût ne fonctionnaient qu’accidentellement : au contraire, dès que nous ouvrons les yeux, notre champ visuel tout entier se colore, et puisque les solides sont nécessairement contigus les uns aux autres, notre toucher doit suivre la superficie ou les arêtes des objets sans jamais rencontrer d’interruption véritable. […] On pourra, à la rigueur, refuser l’extension aux données de l’ouïe, de l’odorat et du goût ; mais il faudra au moins expliquer la genèse d’un espace visuel, correspondant à l’espace tactile.
Elle était complètement femme dans ses goûts, dans ses ambitions, dans ses défauts mêmes.
Venu au monde la même année que Buffon (1707), d’une famille de paysans et de ministres ou vicaires de campagne, il prit goût aux plantes tout en se jouant dans le jardin du presbytère paternel ; son père occupait ses loisirs à cette culture, et l’on raconte que la mère de Linné, pendant sa grossesse, ne cessait de suivre avec intérêt les travaux de son mari.
Les taches de goût même et les exagérations de style que nous avons pu y remarquer sont des garants de plus, des témoins de l’entière sincérité.
Ce petit livret amical et galant rentre tout à fait dans le goût des rondes ou des inscriptions pastorales faites pour embellir les divertissements de Chaillot.
Tel était le goût de ce roi.
Qu’on veuille bien se reporter au temps : des membres du Parlement comme les Harlay, plus tard les Molé, les Lamoignon, étaient de bons et fidèles sujets, et à la fois ils étaient ou ils se croyaient un peu Romains : il y en avait qui étaient Pompéiens, c’est-à-dire pour Pompée et le parti de la république contre César, ce qui ne les empêchait pas d’être en réalité de bons royalistes ; de même jusqu’à un certain point alors, quand on était homme d’étude et de cabinet, on était stoïcien ou sceptique en philosophie, on était partisan de Sénèque ou d’Épictète ou de Cicéron (selon son goût et son humeur), et l’on était cependant chrétien dans la pratique et l’habitude, dans le cœur même un peu.
C’est auprès d’un de ces vieillards respectables, M. de Caumartin, ancien conseiller d’État, que Voltaire, pendant un séjour à la campagne, se prit d’enthousiasme pour cette grande renommée royale ; et il se mit aussitôt à la célébrer, tout en l’accommodant à sa manière et en la traitant dans le goût des temps nouveaux : il fit La Henriade, et plus tard le chapitre de l’Essai sur les mœurs, intitulé : « De Henri IV ».
Pour un homme qu’on dit n’avoir pas eu de goût aux études classiques, il s’occupe beaucoup des antiquités, et il cite assez de latin pour qu’on puisse croire que son premier biographe a exagéré sa répugnance et son ignorance à cet égard43.
Il en fait assez pour que l’on consente à entendre à une paix générale : « Je fis savoir à la Cour (c’est-à-dire au quartier du roi) que je mourrais gaiement, avec la plupart de tout le parti, plutôt que de n’obtenir une paix générale ; qu’il était dangereux d’ôter tout espoir de salut à des personnes qui ont les armes à la main ; que je ne la traiterais jamais tout seul… » Le roi écoutait les propositions avec plaisir ; mais le cardinal confesse, dans ses mémoires, avoir fort hésité à cette heure sur ce qu’il conseillerait à son maître : tout lui disait qu’on allait avoir raison des rebelles et de leur chef par la force, ce qui était fort de son goût, et qu’ils seraient réduits, après un prochain échec infaillible, à demander merci : la prudence toutefois l’emportant sur l’humeur, et cette idée que Rohan dans sa proposition de paix cette fois était sincère, lui firent conseiller de traiter.
Je ne réponds pas du goût parfait de toutes les plaisanteries qu’on trouve dans ces premières lettres de la margrave ; elle est beaucoup de son siècle, et un peu de son pays.
En lisant son Journal, on ne saurait lui accorder que des qualités solides, du sens, de la droiture, du jugement, une parfaite sincérité ; mais il a l’esprit peu éclairé (accessible aux superstitions, aux dires populaires), il a peu d’esprit dans l’acception vive du mot ; jamais un trait ne lui échappe, jamais une étincelle ; et de plus son goût, quoique sain et sobre en soi, ne l’empêche pas de trouver merveilleux les amphigouris métaphoriques de M.
On n’a pas à craindre cet inconvénient avec Mme Elliott ; M. de Bâillon s’est borné à la traduire, et il l’a fait en homme d’esprit sans doute et en homme de goût, mais en la laissant d’autant plus elle-même, d’autant plus naturelle, tellement que ce livre a l’air d’avoir été écrit et raconté sous sa forme originale en français.
Quand elle alla, en 1803-1804, à Weimar et qu’elle noua avec la grande-duchesse régnante cette relation d’enthousiasme et d’amitié, dont les témoignages subsistent, Mme de Staël était encore une femme du xviiie siècle par les opinions, par le goût exclusif de la raison et de l’analyse, par son aversion du mystique et du surnaturel.
Je ne saurais l’admettre, et en reconnaissant à ce beau xviie siècle la supériorité du goût, je persiste à croire que le xviiie , avec et nonobstant ses erreurs, était plus éclairé.
« J’ai connu dans ma province, disait-il, des savants qui ne pouvaient lire que dans leur propre bréviaire. » — « Il en est de messieurs les savants, disait-il encore, comme de nos relieurs de Weimar : le chef-d’œuvre qu’on demande au nouveau venu, pour être reçu dans la corporation, n’est pas du tout une jolie reliure dans le goût le plus moderne.
Il était des amis de mon père et des miens, homme d’un esprit doux, aimable dans la société, orné de plusieurs connaissances et ayant du goût pour les lettres comme pour ceux qui les cultivent ; mais, soit par un dévouement trop ordinaire aux intendants pour les ordres de la Cour, soit parce qu’il croyait, comme bien d’autres, qu’il ne restait plus dans le parti protestant qu’une opiniâtreté qu’il fallait vaincre ou plutôt écraser par le poids de l’autorité, il eut le malheur de donner au reste du royaume un exemple qui n’y fut que trop suivi et dont le succès surpassa d’abord les espérances même de ceux qui le faisaient agir.
Goethe, qu’on n’accusera pas d’étroitesse et qui comprenait tout, ce critique universel au goût le plus large et le plus hospitalier, reculait toutefois devant les tableaux odieux et hideux trop prolongés ; il voulait que l’art tournât en définitive au beau, au digne, à l’agréable.
Une grande Assemblée consultée n’a-t-elle pas déclaré, par la bouche de l’un de ses plus hommes de goût, que ce n’était pas possible pour le moment, et qu’il n’y avait pas lieu ?
Le goût littéraire, plus scrupuleux et plus vite lassé que le talent politique, ne l’avertit pas de cesser.
Chacun, dès que le grand homme paraît et se déclare, après l’avoir admis volontiers au premier degré, s’empresse aussitôt de le continuer à sa guise, de l’achever à sa manière et selon ses goûts, de lui dicter son rôle de demain ; et si le personnage ne répond pas à cette idée qu’on s’en fait et ne suit pas le programme, on est bien près de le renier, de s’écrier qu’il fait fausse route et qu’il se perd, ce qui arrive quelquefois, mais par d’autres raisons le plus souvent que celles dont on se payait d’abord assez à la légère.
Lerminier fût accomplie : « Il a le goût du schisme !
J’ai montré comment, en littérature, le goût a dû s’altérer ; et dans la politique, les événements ayant devancé les idées, les idées rétrogradent par-delà leur point de départ.
Enfin, par son impartiale représentation de la vie, dont nulle étroitesse de doctrine, nul scrupule de goût, nul parti pris d’art ne l’empêche de fixer tous les multiples et inégaux aspects, il est et demeure la source de tout réalisme, plus large à lui seul que tous les courants qui se séparèrent après lui.
Tant de choses écartent du mariage : le goût du plaisir, le souci des affaires, la peur des responsabilités et même de nobles scrupules.
Joachim Gasquet le compare à Prométhée : « Mallarmé, écrit-il, par le spectacle d’un immense génie fourvoyé, nous a donné le goût de l’héroïsme et l’impérieux besoin de la victoire. » Ainsi donc, le Mallarmisme a cessé d’être une doctrine littéraire pour devenir une religion.
Quand cette uniformité n’existe pas dans nos perceptions (celles du goût par exemple), alors le critérium manque. « Il n’y a pas plus de conscience universelle que de raison universelle ; la conscience comme la raison est toujours individuelle.
Après avoir fait bravement son devoir de citoyen, il rentra dans ses foyers ; la délicatesse de sa santé lui fit accorder son congé définitif en l’an IV, et il put se livrer sans partage à son goût pour les lettres et pour la philosophie morale.
Le premier de ces écrits, intitulé : Des préjugés (1762), indique un esprit tourné par goût aux considérations morales ; c’est comme un chapitre des Essais de Nicole, dans lequel sont distingués les préjugés de divers genre et de diverse nature : les préjugés d’usage et de société, ceux de parti, ceux qui tiennent au siècle, etc.
Il ne faut pas sans doute attacher trop d’importance au charme que nous trouvons dans certains travaux : les livres faits avec plus de goût courent risque d’être faits avec moins de charité.
Une de ses plus gracieuses correspondantes d’Angleterre, miss Georgiana Shipley, à qui il avait envoyé son Dialogue avec la Goutte et autres riens qu’il s’amusait à écrire et, qui plus est, à imprimer lui-même, lui rappelait les heures charmantes et sérieuses qu’elle avait autrefois passées dans sa société, et où elle avait pris goût « pour la conversation badinante et réfléchie ».
A cette époque, en effet, on avait le goût de la plus haute généralité possible dans l’interprétation des faits humains.
Dans un pays où le bien-être social consiste en des choses de délicatesse et de goût, où l’existence intime repose sur l’honneur, où les discours légers ont tant de gravité, où les interprétations d’une conduite exempte de tout reproche peuvent être si fatales, ou les femmes sont tellement mêlées à la société, et y mêlent tellement toutes les sortes de susceptibilités, et j’oserais dire toutes les sortes de pudeur, où tous les amours-propres sont toujours éveillés et si facilement irritables ; dans un tel pays, avouons-le, la médisance devient de la calomnie, les écrits indiscrets feront des blessures profondes que nulle puissance au inonde ne pourra guérir, la censure deviendra un tribunal public dont les arrêts justes ou injustes seront trop souvent des outrages.
Critiques, tous deux, de sentiment et de sensation ; compréhensifs bien plus qu’exclusifs d’intelligence et de doctrine ; portant sur les choses de ce monde un regard curieux, ouvert et bienveillant ; ayant la même philosophie sans métaphysique, la même opinion politique, les mêmes goûts pour les lumières modernes et la même foi (un peu éblouie, selon moi) dans le progrès des sociétés, ils ne diffèrent guère que par la destinée, qui fait de ces charmants coups quelquefois : — c’est que Macaulay est monté plus haut dans son pays que Philarète Chasles dans le sien.
L’élégant Fervaques, avec ses instincts et ses· goûts, serait, j’en suis sûr, bien heureux, parbleu !
Les chambres sont hautes, lambrissées, avec des panneaux et des peintures dans le goût du dix-huitième siècle.
Rayonnant de gloire, plus imposant par son caractère que par sa moralité, doué de qualités éminentes, vanté par les jacobins lorsqu’ils croyaient le moins à son retour, il offrait à d’autres le mérite d’avoir préféré la république à la liberté, Mahomet à Jésus-Christ, l’Institut au généralat ; on lui savait gré ailleurs de ses égards pour le pape, le clergé et les nobles, d’un certain ton de prince et de ces goûts de cour dont on n’avait pas encore mesuré la portée. […] L’homme de 89, c’est-à-dire d’audace et d’innovation, mais avec limites et garanties, avec circonspection passé son 14 juillet, et avec arrêt devant les 10 août, l’esprit sans préjugés, courageux, qui apporte au monde sa part d’innovation et de découverte, mais qui ne prétend pas le détruire tout entier pour le refaire ; qui ouvre sa brèche, mais qui reconnaît bien vite, en avançant, de certaines mesures imposées par le bon sens et par le fait, par l’honnêteté et par le goût ; qui n’abjure pas dans les mécomptes, mais se ralentit seulement, se resserre, et attend aux endroits impossibles, sans forcer, sans renoncer… : qu’on achève le portrait, que je craindrais de faire trop vague en le traçant dans cette généralité. […] Il y a une classe d’esprits girondins ; cela est plus audacieux, plus téméraire ; ils sont plus perçants et plus étroits ; ils vont d’abord aux extrêmes, mais ils reculent à un certain moment : une certaine honnêteté de goût, de sentiment, les tient, les saisit et les sauve.
Avons-nous à étudier, nous proposons-nous d’étudier La Fontaine ; au lieu de commencer par la première fable venue, nous commencerons par l’esprit gaulois ; le ciel ; le sol ; le climat ; les aliments ; la race ; la littérature primitive ; puis l’homme ; ses mœurs ; ses goûts ; sa dépendance ; son indépendance ; sa bonté ; ses enfances ; son génie ; puis l’écrivain ; ses tâtonnements classiques ; ses escapades gauloises ; son épopée ; sa morale ; puis l’écrivain, suite ; opposition en France de la culture et de la nature ; conciliation en La Fontaine de la culture et de la nature ; comment la faculté poétique sert d’intermédiaire ; tout cela pour faire la première partie, l’artiste ; pour faire la deuxième partie, les personnages, que nous ne confondons point avec la première, d’abord les hommes ; la société française au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; le roi ; la cour ; la noblesse ; le clergé ; la bourgeoisie ; l’artisan ; le paysan ; des caractères poétiques ; puis les bêtes ; le sentiment de la nature au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; du procédé poétique ; puis les dieux ; le sentiment religieux au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; de la faculté poétique ; enfin troisième partie, l’art, qui ne se confond ni avec les deux premières ensemble, ni avec chacune des deux premières séparément ; l’action ; les détails ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope et Phèdre ; le système ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope, Rabelais, Pilpay, Cassandre ; l’expression ; du style pittoresque ; les mots propres ; les mots familiers ; les mots risqués ; les mots négligés ; le mètre cassé ; le mètre varié ; le mètre imitatif ; du style lié ; l’unité logique ; l’unité grammaticale ; l’unité musicale ; enfin théorie de la fable poétique ; nature de la poésie ; opposition de la fable philosophique à la fable poétique ; opposition de la fable primitive à la fable poétique ; c’est tout ; je me demande avec effroi où résidera dans tout cela la fable elle-même ; où se cachera, dans tout ce magnifique palais géométrique, la petite fable, où je la trouverai, la fable de La Fontaine ; elle n’y trouvera point asile, car l’auteur, dans tout cet appareil, n’y reconnaîtrait pas ses enfants. […] Dans sa grande franchise et netteté universitaire il passe d’un énorme degré les anticipations précautionneuses de Renan ; Renan ne donnerait pas prise à de tels reproches ; il ne donnerait pas matière à de telles critiques ; il ne donnerait pas cours à de tels ridicules : Renan n’était point travaillé de ces hypertrophies : lui-même il endossait trop bien le personnage de ses adversaires, de ses contradicteurs, de ses critiques éventuels ; toute sa forme de pensée, toute sa méthode, tous ses goûts, tout son passé, toute sa vie de travail, de mesure, de goût, de sagesse le gardaient contre de telles exagérations ; il n‘a jamais aimé les outrances, et, juste distributeur, autant et plus averti sur lui-même que sur les autres encore, il ne les aimait pas plus chez lui-même et pour lui-même qu’il ne les aimait chez les autres ; il aimait moins les outrances de Renan que les outrances des autres, peut-être parce qu’il aimait Renan plus qu’il n’aimait les autres ; comme Hellène il se méfiait des hommes, et des dieux immortels ; comme chrétien, il se méfiait du bon Dieu ; comme citoyen, il se méfiait des puissances ; et comme historien, des événements ; comme historien des dieux, et de Dieu, mieux que personne il savait comment en jouer, et quelles sont les limites du jeu ; il était un Hellène, un huitième sage ; il connaissait d’instinct que l’homme a des limites ; et qu’il ne faut point se brouiller avec de trop grands bons Dieux ; il s’était donc familièrement contenté de donner à l’humanité, à l’historien, les pouvoirs du Dieu tout connaissant ; il n’eût point mis à son temple d’homme un surfaîte orgueilleux et qui bravât la foudre.
Ils ont aidé à introduire dans le public le goût du document rare et, en développant la clientèle des collectionneurs, ils ont certainement sauvé de la destruction bien des pièces uniques que les héritiers auraient jetées au feu. […] Naturellement le goût de la jurisprudence, qui est celui de tous les juristes, entraîne M. […] On ne détruit plus les églises gothiques ; on restaure encore, hélas ; mais au moins sans trop accommoder les monuments au goût du jour.
D’où vient que ces deux femmes d’élite manifestent un goût commun pour l’Angleterre ? […] Mais son goût personnel la porte vers des poètes doux et lents, et elle ne déteste pas un peu de mièvrerie : elle abonde en verlainismes et elle fredonne des andantes que pourraient réclamer tantôt Paul Bourget, tantôt Jean Aicard. […] Heureusement elle n’avait point hérité de Théo le goût du paradoxe et l’outrance romantique, sans quoi elle se fût laissée entraîner à toutes les folies, au moins littéraires, par la fougue capricante de son ex-mari. […] Ensuite Mme Carette, décidément née Bouvet, suit « le développement des idées et du goût se propageant… sous la forme du fabliau ou de la romance : du roman à proprement parler ». […] Qu’il fume son havane, Et qu’à son bras, s’il veut, s’appuie et se pavane Une épouse à son goût, éprise du tabac, Moi, l’odeur en répugne à mon faible estomac, Et je n’accepte pas une lutte inégale Entre moi, s’il vous plaît, et cette herbe fatale !
Le succès de cette tentative a mis M. de Wailly en goût.
[NdA] On m’indique dans la Revue d’Édimbourg (décembre 1826) un article sur « L’éloquence de la chaire », qui paraît être de lord Brougham : Bourdaloue y est mis fort au-dessus de Bossuet par une suite de raisons qui, toutes bien déduites qu’elles sont, prouvent seulement le genre de goût et de préférence de la nation et du juge : en France, c’est le sentiment immédiat qui nous décide, et dans le cas présent il n’hésite pas.
Né vers 1629, son éducation avait été antérieure aux réformes du goût qui marquèrent la seconde moitié du xviie siècle.
Ce n’est point seulement par complaisance et pour condescendre à autrui qu’il entre dans cette variété de matières, c’est bien par goût, avec abandon et plaisir.
Il est encore tout entier dans cette lettre à un jeune homme triste, souffrant, entravé dans ses goûts, et à qui il dit pour le consoler : « Ne vous laissez pas aller aux longues et secrètes douleurs : Dieu le défend à notre nature… J’ai connu tout cela, Monsieur, voilà pourquoi je me permets de vous en parler.
Flousset aurait beaucoup le talent d’écrire et de peindre, d’être éloquent, comme on dit, dans le cas où il marcherait tout seul et où il aurait à composer, pour son compte, quelque morceau de sa propre étoffe ; mais aujourd’hui il ne nous donne pas le temps d’y songer : dans ce long travail d’analyse, d’extrait, de résumé et d’assemblage, il a fait preuve partout d’un excellent jugement, d’un goût sobre, d’un choix sévère, d’une fermeté de pensée et d’expression qui inspire toute confiance.
Je n’ai voulu que mettre en goût ceux que ce genre de lectures intimes est de nature à intéresser.
D’autres, simples assistants et hommes de désir, se plaisaient à voir le catholicisme s’essayer à des interprétations compatibles peut-être avec les progrès de la science et avec ceux de l’humanité ; ils prenaient goût à de hauts entretiens qui rappelaient ceux des philosophes ou des chrétiens alexandrins.
Le patriote ici et l’homme de goût se confondent.
C’était un Protée qui vous échappait. « On peut dire de lui, écrivait le marquis d’Arcy, ambassadeur à Turin, ce qu’on disait de Charles-Emmanuel (le contemporain de Henri IV), que son cœur est couvert de montagnes comme son pays. » Ses démonstrations et ses semblants sont pour Louis XIV : son goût est pour le prince d’Orange.
On ne commencerait pas avant Henri IV, laissant derrière soi les Valois avec leurs goûts douteux et leurs caprices bizarres ; mais, dès Louis XIII, on aurait une de ces scènes d’intérieur ou les jeunes seigneurs et gentilshommes du temps, les Montmorency, les Liancourt, en compagnie du poëte Théophile, célébraient la fête de la jeunesse et celle, dit-on, de la Nature.
Ses livres peuvent attirer et forcer l’admiration pendant quelques pages, mais bientôt leur monotonie fatigue ; car ils sont le contraire de ces écrits chers à Montaigne, pleins de suc et de moelle intérieure, pétris d’expérience et d’indulgence, qui gagnent à être exprimés et pressés, et qui de tout temps ont fait les délices des hommes de sens, des hommes de goût, des hommes vraiment humains… Au résumé, c’est un militant ; il l’est en tout et partout ; comme tel, il laissera dans l’histoire des guerres politiques et religieuses de ce temps une trace lumineuse : Lacordaire et lui, deux lieutenants de La Mennais, et qui ont continué de tenir brillamment la campagne après que leur général avait passé à l’ennemi.
non plus à ses goûts anciens, à ses gracieux amours de jeune fille, à ses lectures chéries (tout cela était trop insuffisant et dès longtemps flétri pour elle), mais à des sentiments plus mâles et plus profonds, comme à des ressources désespérées, — à son culte de la patrie, par exemple.
L’incohérence des métaphores n’est guère choquante que quand les mots qui les expriment sont étroitement subordonnés entre eux par des rapports de dépendance grammaticale, et cesse de provoquer les objections, dès qu’elles sont contenues dans des expressions juxtaposées et des propositions parallèles ; alors l’esprit voit sans chagrin défiler devant lui les images les plus différentes, dont chacune brille un moment, s’éclipse et fait place aux autres, et il n’y a à craindre de sa part que la fatigue et l’éblouissement de tant d’éclairs successifs, non la révolte du goût offensé.
. : il montrait combien l’ignorance des sources, le manque de science et de critique, l’inintelligence de la vie du passé, le goût romanesque, la rhétorique, l’esprit philosophique, avaient partout déformé l’histoire : combien froides et fausses étaient toutes ces annales, où avortaient vite quelques bonnes intentions d’exactitude.
Il sent le mot comme son, d’abord ; et de là son goût pour les noms propres, qui, avec un minimum irréductible de sens, font tout leur effet par leurs propriétés sensibles, par la sensation auditive qu’ils procurent.
Son plus grand mérite, c’est peut-être d’avoir apporté dans l’étude de la vie élégante la franchise un peu brutale, sous la politesse de la forme, et le goût de vérité un peu misanthropique qui est si fort en faveur aujourd’hui.
« Assoiffés du désir de toutes les possessions », ils ont le même goût « pour tout ce qui est luxueux, riche, vite réalisé ».
Cela trahit, du reste, les goûts libertins que le noble auteur avait en effet dans sa vie, assurent ceux qui l’ont bien connu, mais qu’il cachait si magnifiquement dans ses premiers écrits : sa plume, en vieillissant, n’a plus su les contenir.
D’ailleurs, la personne du monde la plus propre à l’intrigue, et qui y avait passé sa vie à Rome par son goût ; beaucoup d’ambition, mais de ces ambitions vastes, fort au-dessus de son sexe et de l’ambition ordinaire des hommes, et un désir pareil d’être et de gouverner.
Dans ce pays, qu’est-ce qu’il arrive, lorsque les instincts du jeune homme sont par trop scientifiques, il se met dans une carrière satisfaisant à moitié ses goûts, à moitié son désir d’enrichissement, il devient ingénieur de chemin de fer, directeur d’usine, directeur de produits chimiques… Déjà cela commence à arriver en France, où l’École polytechnique ne fait plus de savants. » Et la conversation continuant, Berthelot ajoutait : « Que la science moderne, cette science qui n’a guère que cent ans de date, et qu’on dote d’un avenir de siècles, lui semblait presque limitée par les trente années du siècle dans lequel nous vivons.
Nous l’avons dit, malgré le bas-bleu, la blouse, la casquette, le cigare, les défis à, l’opinion chrétienne, Mme Stern, qui a tué son sexe autant qu’elle a pu dans sa personne, a pourtant gardé la chasteté de je ne sais quel goût ; elle n’a pu perdre je ne sais quelle aristocratie, et cette dernière marque de son origine doit la faire cruellement souffrir, quand elle reprend une thèse tombée si bas que personne ne la relève plus.
Quand il n’y aurait que son goût et son respect pour les Académies !
— Mais on lit avec goût et avec empressement, par exemple, Hartmann et Schopenhauer, qui ne sont ni beaux ni vrais, mais qui ont le bonheur d’être dans le faux — un faux affreux !
Mais cet amour de la Bretagne, qui a donné un goût de terroir à ses meilleurs vers, ne fut point en lui la passion qui, à force d’intensité, monte quelquefois jusqu’au génie.
Jouffroy dit quelque part et prouve partout « qu’il avait à un assez haut degré le sens psychologique, et une grande inclination pour la science des faits intérieurs67. » Rien de plus naturel que ce goût dans un homme intérieur.
Brébant est un honnête homme, il nous préviendrait… mais le chien est une viande impure, — fait-il avec une horreur comique, — du cheval, oui, mais pas du chien. » — « Chien ou mouton, bredouille Nefftzer, la bouche pleine, je n’ai jamais mangé un si bon rôti… mais si Brébant vous donnait du rat… moi je connais ça… C’est très bon… le goût en est comme un mélange de porc et de perdreau ! […] Vendredi 24 février Aujourd’hui m’est revenu comme un goût de littérature. […] Ces dégoûtants vainqueurs ont embrené la France, avec tant de recherches, d’inventions, d’imaginations dans ce genre, qu’elles méritent vraiment une étude psychologique, sur le goût de ces peuples pour la chose excrémentielle. […] Dimanche 14 mai Si jamais je fais ce roman sur la vie de théâtre, dont mon frère et moi avions eu l’idée, si jamais je fais la psychologie d’une actrice, il faut que l’idée dominante, la pensée-mère de ce livre, soit le combat des instincts peuple, des goûts canaille, venant de la procréation, de la nature, de l’éducation, avec les aspirations à l’élégance, à la distinction, à la beauté morale : qualités congéniales d’un grand talent. […] Ça avait été, ajoute-t-il, une tentative d’attraper le bonheur domestique, et la chose relative à la femme étant réglée, on pouvait se donner une bosse de travail, mais il faut faire encore de la putain, et je n’ai pour ces dames qu’un goût médiocre. » Puis il me parle d’une pointe qu’il a poussée en Italie, de la belle pâte, de la belle matière que les Vénitiens mettaient si facilement sur leurs toiles, et il est à la recherche de cette confiture qu’il veut appliquer à la vie moderne.