« Je savais, dit Rousseau, pour expliquer son refus d’une place au Journal des Savants, que tout mon talent ne venait que d’une certaine chaleur d’âme sur les matières que j’avais à traiter, et qu’il n’y avait que l’amour du grand, du vrai, du beau qui pût animer mon génie. […] Point de départ : Bientôt le crépuscule envahira mon âme « Je n’ai pas encore de sujet. […] Ayant toujours en vue l’originalité car il est traître envers lui-même, celui qui risque de se passer d’un moyen d’intérêt aussi évident et aussi facile, je me dis avant tout : parmi les innombrables effets ou impressions que le cœur, l’intelligence ou, pour parler plus généralement, l’âme est susceptible de recevoir, quel est l’unique effet que je dois choisir dans le cas présent ? […] Si, par exemple, une idée de tragédie germe en l’âme d’un poète, nous ne pouvons pas, même en connaissant le sujet, prédire tous les incidents, ni savoir à l’avance quel sera le nombre des personnages, etc., mais nous savons cependant que certaines formes générales, qu’une allure à peu près déterminée lui seront imposées. […] Mon âme s’enflamme alors, si toutefois rien ne vient me déranger.
Des journées à aller, à venir dans cette maison, comme une âme en peine. […] Jeudi 10 novembre C’est général, comme dans ces temps-ci, tout le monde que je vois, a un besoin instant de tranquillité d’âme, de repos d’esprit, de fuite de Paris. […] Et ce qui avait survécu de ces sentiments idéaux, notre premier sauveur, Louis-Philippe l’a achevé avec la phrase de son premier ministre : « Enrichissez-vous » ; et notre second sauveur, Napoléon III, avec son exemple et celui de sa cour, qui disait : « Jouissez. » Puis, quand toutes les religions désintéressées des âmes étaient mortes, on faisait, par le suffrage universel, du vote destructif et désorganisateur du bas de notre société, la véritable souveraineté française. […] Je regardais tous ces travaux qui ne devaient pas protester contre la victoire allemande, je sentais à l’attitude des ouvriers, des gardes nationaux, des soldats, à ce que l’âme des gens confesse d’eux, autour d’eux, je sentais que la paix était signée d’avance, et telle que l’exigerait M. de Bismarck, et je souffrais bêtement comme d’une déception, d’une désillusion sur le compte d’un être aimé ! […] Une pauvre vieille femme avait toute sa vie et toute son âme concentrées sur un fils qui, d’employé de la banque, est devenu, à l’heure présente, soldat.
Joseph Scaliger ne pouvait lire cette lettre sans être ravi : « Pour moi, déclare-t-il, je puis dire que je n’ai jamais rien lu dans l’histoire ecclésiastique qui m’emporte si fort hors de moi-même, qui me laisse si transporté de zèle et d’ardeur pour la foi, et qui me change en une autre personne que je ne suis. » Nulle histoire, en effet, nulle légende sainte ne justifie mieux ce mot de Pascal, qu’avec Jésus-Christ, le nouveau modèle d’une âme parfaitement héroïque a été créé et proposé aux hommes. […] Mais autour de quelle syllabe s’est-il ainsi contracté, croqué en quelque sorte (corripere), sinon autour de celle sur laquelle portait l’accent, l’âme du mot ?
Si les ombres rient dans l’éternité, l’âme beaucoup trop rieuse de celui qui fut ici-bas le comte de Maistre doit bien rire en voyant son nom servir d’autorité à une révolution. […] XVI Sa correspondance avec sa famille et ses amis, à dater de son arrivée à Pétersbourg, ne laisse rien dans l’ombre de son âme et de son esprit, de sa vie publique et de sa vie domestique.
On venait de trouver le moyen de faire passer le spectateur dans la même soirée par les deux états extrêmes de l’âme, le rire et les larmes. […] Tout est indifférent pour les âmes sublimes.
Pour les partisans de l’explication psychologique, au contraire, le plaisir et la douleur sont en quelque sorte l’âme même du mécanisme, les vrais moteurs de la machine vivante, tout au moins des « facteurs » impossibles à négliger dans le calcul philosophique des forces internes et ayant leur efficacité dans l’évolution de la vie25. […] C’est là, nous l’avons vu, ce que les anciens appelaient le plaisir en mouvement, ἡδονή ἐν ϰινήσει, ce que nous nommons des émotions, des troubles, des perturbations de l’âme.
vous, c’est encore autre chose que vous voulez… C’est du mouvement dans la couleur, comme vous dites… C’est l’âme des choses… C’est impossible… Je ne sais pas, moi, comme on prendra cela plus tard, et où on ira ! […] 14 décembre Toutes les douleurs morales se transforment dans les maladies nerveuses en douleurs physiques, en sorte qu’il semble que le corps souffre, une seconde fois, ce que l’âme a souffert.
C’est jusqu’à présent l’homme que j’ai vu le mieux attraper, dans la copie de la vie moderne, l’âme de cette vie. […] Et sans s’occuper de ceux qui étaient là, et comme pour se faire plaisir à elles-mêmes, toutes à leur chant, ces femmes ont continué à vous remuer douloureusement l’âme, avec leurs voix.
Les côtés excessifs et disparates du caractère de Madame sont déjà assez visibles et assez connus : je voudrais ne pas négliger de faire apercevoir les parties fermes et élevées de son âme.
C’était l’âme la plus sincère et la plus candide que j’aie jamais connue : jamais de déguisement, je ne sais s’il a menti en sa vie.
Et de plus, quelque chose de l’âme de ceux qu’il expose, et dont il nous exprime les œuvres et la vie, semble le soutenir jusque dans ce travail assez ingrat d’annotateur.
Arnauld a honoré de son estime et de son amitié pendant sa vie, de le décrier après sa mort, pour faire votre cour à des gens qui dans l’âme se moquent de vous et ne vous en savent aucun gré ?
Et surtout il y avait alors dans l’air un grand souffle et un grand courant qui enlevait et qui embrasait toutes les âmes studieuses, et, parmi les ignorants mêmes, tous ceux qui étaient capables d’une ambition vraiment libérale.
C’est son plus beau moment, où sa générosité, sa fierté d’âme, son courage et ses ressources d’esprit se déploient avec bien de l’avantage, et tournent au bien public comme à son honneur. « Laissez faire, disait quelque temps auparavant un spirituel étranger54 aux nobles Espagnols irrités contre elle ; si l’on touche à l’Espagne, elle sera plus Espagnole qu’aucun de vous. » Elle justifia ce pronostic.
convaincu peut-être et converti, et cela dans une Compagnie dont l’égalité est le principe et dont la parole est l’âme ; — oui, être menacé de ne plus sortir d’une même nuance et bientôt d’une même famille, être destiné, si l’on vit encore vingt ans, à voir se vérifier ce mot de M.
On raconte que, bien des années après, et dans les mois qui précédèrent sa fin, ce roi mélancolique, infirme, tourmenté de scrupules, ne sachant à qui léguer en conscience ses États, environné d’intrigues inextricables, fuyant les cris du peuple ameuté à Madrid sous son balcon, alla s’enfermer seul dans l’Escurial, et voulut descendre dans le caveau du Panthéon pour visiter les corps de ses ancêtres qui y sont déposés ; il espérait trouver quelque trêve à ses maux de corps et d’esprit par l’intercession de leurs âmes.
En quoi l’on a sujet d’admirer la grandeur de son âme et la patience extraordinaire de ce prince, accompagnée d’une volonté admirable… » Tel il sera jusqu’au dernier jour. — (Ne jamais perdre de vue ce point-là, en lisant le Journal.)
Saint-Évremond, l’épicurien à l’âme ferme, avait appris à ce jeu où il semble n’être entré que pour mieux voir, à connaître de près le caractère des grands personnages de l’histoire et à deviner, presque en homme pratique, le génie des anciens peuples.
Que si vous m’opposez Shakespeare que cette préoccupation ne retenait pas, et qui prenait les hommes avec leurs passions et les âmes avec leurs abîmes, ne s’épargnant aucune situation franche, fût-elle horrible, aucune expression sincère, fût-elle violente, je m’en accommode très-bien, et je vous dis : Faites comme lui, montrez-nous gens et choses tels qu’ils sont, pas plus beaux qu’ils ne sont, mais aussi pas plus laids ni pires qu’ils ne sont.
Et l’on ne saurait concevoir pour les âmes un exercice plus salutaire que l’effort à faire pour triompher de l’orgueil et de l’esprit de domination, qui n’ont jamais été plus redoutables que quand ils ont pu se fonder sur la défense des grands intérêts sociaux. » On n’arrive pas du premier jour à ce degré de conviction et de vertu.
Ne dites mot de cela à âme qui vive. — Adieu, mon cher maréchal, je vous aime autant que je vous admire, et c’est beaucoup dire. » Mme de Pompadour parle de ce brevet du prince de Conti comme elle ferait du bon billet de La Châtre.
Ainsi, pour le mot lyrique par exemple, dont le sens ne se borne plus à des pièces d’opéra, comme du temps de Quinault ou de M. de Jouy, mais qui comprend et embrasse, selon les meilleurs critiques, tout un vaste ensemble de poésie intime ou personnelle et d’épanchements de l’âme, en regard et à côté des genres épique et dramatique : il faudra, bon gré, mal gré, tenir compte de ces progrès de l’Esthétique, comme on dit.
Malouet eut fort à se louer, en cette circonstance, du comte de Broglie, l’ancien correspondant de Louis xv, caractère passionné, âme ferme, et qui se fit spontanément l’avocat et le champion de l’honnête homme calomnié.
Il n’avait point la haute et noble ambition de ces âmes immodérées à la Richelieu, comme les appelait Saint-Evremond.
Dans ces hautes influences philosophiques qu’il ne se refuse pas, il est, par rapport à tous, une simple précaution à garder : c’est de songer parfois à ceux qui sondent à d’autres points la sphère infinie, ou qui même, lassés, ne la sondent plus, et de se rappeler aussi que l’actuel espoir, l’impétueux désir des fortes âmes n’est pas le but trouvé.
Cicéron ne s’en passait pas ; si corrompu qu’on fût à Rome à cette date, il y avait encore dans quelques âmes de beaux restes de ce ce qu’on peut appeler la religion romaine (jus), des fantômes, si vous voulez, mais de beaux fantômes.
J’entends tous les états de l’âme, et ce qu’il y a de général dans ces états.
Tout le but de cette exposition esthétique, c’est de montrer « que l’harmonie est l’âme de l’art. » Pour cela, il faut s’attacher particulièrement aux deux sens esthétiques.
Réservez votre doctrine secrète pour un petit nombre d’amis sûrs, dans le sein de qui votre âme puisse s’épancher sans contrainte, et qui soient dignes de cultiver avec vous la philosophie et de rendre honneur à la vérité.
À propos du soleil, âme de la nature, dont il trace un éclatant tableau, il en vient à parler de Dieu.
Il s’y refusait sans faste, avec une dignité simple et qui laissait voir la hauteur naturelle de l’âme.
Et elle ajoute naïvement en y mêlant son érudition chrétienne : « Il eut volontiers dit comme saint Pierre : Faisons ici nos tabernacles, si le courage tout royal qu’il avait et la générosité de son âme ne l’eussent appelé à choses plus grandes. » Pour elle, on conçoit qu’elle y serait volontiers restée, prolongeant sans regret l’enchantement ; elle eût arrangé volontiers la vie comme ce beau jardin de Nérac dont elle nous parle encore « qui avait des allées de lauriers et de cyprès fort longues », ou comme ce parc qu’elle y avait fait faire, avec des promenoirs de trois mille pas de long au bord de la rivière, la chapelle étant tout près de là pour la messe du matin, et les violons à ses ordres pour le bal tous les soirs.
Non, non, il n’y pas de séparation entre l’âme et le corps. » 27 juillet Je vais voir Rouland pour savoir si je puis publier La Lorette sans retourner en police correctionnelle.
Lorsqu’il se présente un homme d’une intelligence supérieure, il faut, pour expliquer cette supériorité, faire la part 1° de la spontanéité de l’âme ; car, comment prouver qu’elle soit nulle ?
Cette noblesse d’âme va jusqu’à la naïveté ; il traite les autres sur le même pied que lui-même, et leur conseille ce qu’il pratique : suivre sa vocation, chercher dans le grand champ du travail l’endroit où l’on peut être le plus utile, creuser son sillon ou sa fosse, voilà, selon lui, la grande affaire ; le reste est indifférent.
Vous avez livré un corps, mais non l’âme qui l’habite. Cette âme, votre pensée, en effet, est susceptible d’une sorte de propriété que le Code civil ignore et qui, inscrite dans des lois spéciales, porte le nom de propriété littéraire. […] Une lettre missive n’a été établie qu’en vue d’être donnée, sans distinction entre son corps et son âme.
Saint Louis, né le 25 avril 1214 ou 121588, roi en 1226 à l’âge de douze ans sous la tutelle de sa sage et prudente mère, arrivé à sa majorité vers 1236, avait grandement commencé à ordonner son royaume d’après de bonnes lois, à y réprimer les entreprises des seigneurs, à y faire prévaloir la justice, la piété, à se faire respecter de ses voisins pour son amour de la paix et sa fidélité à ses engagements, lorsque, ayant été pris d’une grande maladie (décembre 1244), et étant tombé dans un tel état qu’on le crut mort, et qu’une dame qui le gardait voulait déjà lui tirer le drap sur le visage, il conçut au fond de son âme la pensée de se croiser ; au premier moment où il se sentit mieux et où il recouvra l’usage de ses sens, il appela à son lit l’évêque de Paris.
À défaut des grands mouvements de l’âme humaine, Duclos excelle à relever et à constater ces manies passagères de l’esprit de société, comme un bon médecin praticien qui note une variété épidémique, une maladie de saison.
Il ne comprit rien au sérieux ardent de ce nouvel apôtre et à sa prise sur les jeunes âmes : il n’y vit qu’un grotesque, par-ci par-là éloquent.
Ce qu’on a appelé ses Œuvres et ses Mémoires, et qui ont été remis en lumière récemment47, nous le montrent dès 1661, et dans les années qui précédent la guerre de 1667, déjà formé par l’âme et le caractère.
Mais de telles discussions, quelles qu’en soient les chances, honorent les esprits ornés et les âmes innocentes qui s’y complaisent et s’y renferment.
Au sortir de là et sa démission obtenue, le roi avait nommé M. de Marca, un savant homme, un ancien magistrat devenu homme d’Église, et qui mourut brusquement dans le temps même où il recevait ses bulles : on se rabattit alors à messire Hardouin de Péréfixe, ancien précepteur du roi, écrivain assez agréable dans sa Vie de Henri le Grand, assez instruit, assez bonhomme, mais sans caractère, sans élévation d’âme ni aucune dignité extérieure : il ne fut jamais au niveau de sa haute position, et il encourut en plus d’un cas le ridicule.
Ici l’on a une éloquente et passionnée réponse où Pompéa, comme une prêtresse égarée, évoque et rassemblé dans une idéale image toute la poésie et l’âme de sa jeunesse : « Je te dois tout, s’écrie-t-elle, le bien comme le mal ; pour être, j’ai attendu un signe de ta volonté, et tu m’as faite semblable à toi.
La Pluralité des Existences de l’Ame conforme à la doctrine de la Pluralité des Mondes, par M.
Camille Rousset, ne laisse pas d’être relativement honorable pour les deux correspondants ; elle l’est, après tout, pour le bon sens de Louis XV, sinon pour sa grandeur d’âme ; elle l’est davantage pour le maréchal de Noailles, et devant la postérité elle balancera, sans les couvrir entièrement, bien des mauvais propos et des médisances dont il avait été l’objet.
de Talleyrand : « Ce ministre, qui posséda si éminemment, dit-il, l’art de la société, et qui en a si souvent usé avec succès, tantôt pour imposer à ceux qu’on voulait détruire, en leur faisant perdre contenance, tantôt pour attirer à lui ceux dont on voulait se servir, fit à M. de Senfft un accueil assez froid (avril 1806). » Ce ne fut qu’un peu plus tard, lorsque M. de Talleyrand eut quitté le ministère et perdu la faveur, que Mme de Senfft, personne distinguée et généreuse, — ce qu’on appelle une belle âme, — se sentit prise pour lui d’une sorte d’attrait et de beau zèle, d’un mouvement admiratif qui n’échappa point au personnage et qui fixa pour l’avenir l’agrément de leurs relations.
Les frères pénitents vinrent plusieurs fois dans la soirée réciter les prières des agonisants pour lui dans la cour ; la dernière fois, ils ouvrirent la porte et lui dirent que la religion avait des pardons pour tout le monde, et que, s’il voulait se repentir et mourir en bon chrétien, il n’avait qu’à emprunter le lendemain l’habit de la confrérie pour marcher au supplice, où tous les pénitents noirs l’accompagneraient en priant pour son âme.
Le monde matériel a prêté tout son vocabulaire au monde spirituel : un souffle, un vent a désigné l’âme.
Qu’elles se l’avouent ou non, ce n’est point aux âmes qu’elles veulent parler.
Supposez que, dans le poème de l’Iliade, une syllabe soit douée, un moment, d’âme et de vie : cette syllabe, placée comme elle l’est, pourrait-elle comprendre le sens et le plan général du poème ?
« Bref, dit-il, son âme est immortelle, et force son corps à lui tenir compagnie. » Il y a deux traditions sur Mme Du Deffand : la tradition purement française, qui nous est arrivée à travers ceux qu’elle avait jugés si sévèrement, à travers les gens de lettres et les encyclopédistes ; il y a autre chose encore, la tradition directe et plus vraie, plus intime, et c’est chez Walpole qu’il faut l’aller puiser comme à sa source.
Une fois accueillie, en un mot, elle ne l’était pas à demi ; par la parole comme par l’action, elle y devenait l’âme, la ressource, l’agrément du lieu.
Dans une autre lettre, écrite au moment où Bernardin partait pour l’île de France, Rulhière, pour lui relever le courage, lui dit : Si vous ne faites pas, mon cher ami, la fortune que j’attends de vos talents et de votre âme, au moins ferez-vous un bon Journal (un journal de voyage), et c’est quelque chose.
Mme des Ursins, qui n’était là qu’une âme de passage, était de celles en qui la joie de plaire et le sentiment du succès redoublent les grâces.
Toute la correspondance de Mme des Ursins, durant cette année 1709, fait le plus grand honneur à sa générosité et à son élévation d’âme comme aussi à sa perspicacité de vue ; car, en définitive, l’événement lui a donné raison, et le trône des Bourbons d’Espagne est resté debout sans que celui de Louis XIV en fût trop rabaissé.
Certes, pour qui sait la disette actuelle et la difficulté de rien découvrir de vraiment nouveau dans ce champ presque épuisé de l’Antiquité, c’était là une jolie trouvaille, et de quoi réjouir délicieusement une âme d’érudit.
Ce sont là de ces tours délicats de flatterie comme en avait Boileau ; ce satirique, qui savait si bien piquer au vif, est le même qui a pu dire : La louange agréable est l’âme des beaux vers.
Jamais, mon ami, nous ne nous embrasserons dans cette demeure antique, silencieuse et sacrée, où les hommes sont venus tant de fois accuser leurs erreurs ou exposer leurs besoins, sous ce panthéon, sous ces voûtes obscures où nos âmes devoient s’ouvrir sans réserve, et verser toutes ces pensées retenues, tous ces sentiments secrets, toutes ces actions dérobées, tous ces plaisirs cachés, toutes ces peines dévorées, tous ces mystères de notre vie dont l’honnêteté scrupuleuse interdit la confidence à l’amitié même la plus intime et la moins réservée.
Le conte d’Ondine est inspiré par cette idée, puisqu’il s’agit de faire acquérir, par la petite créature des éléments, l’âme immortelle dont elle est dépourvue.
« La filiation historique est l’âme de la constitution anglaise. » Elle laisse donc intacte la force des groupements traditionnels, qui conspirent pour protéger l’individu contre l’État199.
Non, je ne suis plus intéressé que par les dévoilements d’âme d’un être réel, et non de l’être chimérique qu’est toujours un héros de roman, par son amalgame avec la convention et le mensonge. […] Dans cette biographie, tout émaillée d’expressions provençales, que le raconteur de lui-même, jetait en marchant dans les allées du parc, il était question de deux mariages ; d’un mariage avec une Mistral, lui apportant des millions, et qu’il avait rompu avec une grande tristesse d’âme, en rentrant dans son domaine, sur le sentiment qu’il éprouvait de la disproportion de son avoir et de celui de sa femme, et dans la crainte que cette grande fortune ne lui fît perdre les éléments inspirateurs de sa poésie. […] Enfin il ne voit plus âme au monde, mange chez lui, se couche à neuf heures, affirmant qu’il n’a pas de maîtresse.
Après avoir nommé les personnes les plus considérables qui étaient de l’intimité de M. de Méré, l’abbé Nadal continue en ces termes : « C’étoit là toute sa société, si on ose y ajouter encore une personne illustre dont le nom emporte toutes les idées les plus sublimes de l’esprit, de la vertu, de la grandeur d’âme et de tant d’autres qualités qui mettent encore-au-dessous d’elle tout ce que la fortune a de plus élevé et de plus éblouissant. […] Pétrone, livre charmant et terrible par tout ce qu’il soulève de pensées et de doutes dans une âme saine !
Tant pis si elle absorbe son temps, son esprit, son âme, tout le meilleur de sa force active et de la force de l’État. […] Leroi, Histoire de Versailles, II, 21 (70 000 âmes de population fixe, et 10 000 de population flottante, d’après les registres de la mairie).
Soudain je pousse la porte, je lui mets la pointe de mon épée sur la poitrine, sans lui donner le temps de tirer la sienne, et je lui dis : Vil poltron, recommande ton âme à Dieu, car tu vas mourir ! […] Ces belles promesses firent tourner vers Dieu toutes les facultés de mon âme, et je baisai le pan de l’habit de Son Excellence, les larmes aux yeux.
Et d’après les paroles du dîneur, il me semble que Dostoïevsky, est dans ces années, l’auteur le plus russe, l’auteur reproduisant le plus fidèlement l’âme de ses compatriotes. […] Je veux encore m’arrêter un moment, sur ce merveilleux récit, sur cette étude apitoyée d’une humble âme de peuple qui a pour titre : Un cœur simple.
Durant ces premières luttes avec son père sur la profession d’avocat qu’il n’embrassa jamais que provisoirement, il a décrit l’intérieur de son âme et de ses pensées, et a tracé comme sa biographie morale dans des lettres à un beau-frère, M.
Image exacte, presque gaie encore et riante, qui nous atteste le calme et la sérénité d’âme de saint Louis racontant de telles détresses !
De secrets rapports font les nobles attachements d’estime et de respect ; et les grandes âmes, quoique les traits de leur grandeur soient différents, se sentent et se ressemblent.
Parlant de cette patrie excellente de Voiture : « Il n’est rien, disait-il, qui sente mieux le sel attique ou l’urbanité romaine. » Girac allait plus loin, il voyait dans quelques-unes des lettres de Voiture un caractère moral assez marqué pour qu’on pût se représenter une image de l’âme de l’auteur, de ses mœurs, de son esprit plaisant et doux, de son agréable liberté de parole ; il citait comme exemple quelques-unes des lettres adressées à M. d’Avaux, et celle entre autres où il parlait de la duchesse de Longueville faisant diversion et lumière au milieu des graves envoyés germaniques au congrès de Munster.
Il nous apprend que la duchesse de Retz, pour plus de sûreté, avait fondé à ses frais, dans l’église de Paris, un service complet et perpétuel pour y faire recommander par les prières de M.M. du Chapitre le repos de l’âme du prélat à Dieu.
.) — « Telle figure, telle âme », a dit Socrate chez Xénophon.
Mais de nos jours, au milieu des respects et des hommages individuels et publics volontiers décernés à la religion, après le triomphe encore plus complet qu’espéré d’une politique conservatrice, venir réagir au delà dans le même sens et en passant outre, pousser par système et par mode à l’aristocratie, au despotisme, à l’ultramontanisme, c’est ne prouver autre chose que l’ennui de l’âme qui s’agite à vide et la vanité de l’esprit qui se monte à froid.
Ainsi mon âme est une solitude où, sur le bord de l’abîme, une main à la vie et l’autre à la mort, je pousse un sanglot désolé.
J’ai vu dans le dépôt de Rennes plusieurs maris arrêtés sur la seule dénonciation de leurs femmes, et autant de femmes sur celle de leurs maris ; plusieurs enfants du premier lit à la sollicitation de leur belle-mère ; beaucoup de servantes grosses des œuvres du maître qu’elles servaient, enfermées sur sa dénonciation, et des filles dans le même cas, sur la dénonciation de leur séducteur ; des enfants sur la dénonciation de leur père, et des pères sur la dénonciation de leurs enfants : tous sans la moindre preuve de vagabondage et de mendicité… Il n’existe pas un seul jugement prévôtal qui ait rendu la liberté aux détenus, malgré le nombre infini de ceux qui ont été arrêtés injustement. » — Supposons qu’un intendant humain, comme celui-ci, les élargisse : les voilà sur le pavé, mendiants par la faute de la loi qui poursuit la mendicité et qui ajoute aux misérables qu’elle poursuit les misérables qu’elle fait, aigris de plus, gâtés de corps et d’âme. « Il arrive presque toujours, dit encore l’intendant, que les détenus, arrêtés à vingt-cinq ou trente lieues du dépôt, n’y sont renfermés que trois ou quatre mois après leur arrestation, et quelquefois plus longtemps.
Or, c’est précisément ce feu sacré, cette étincelle qui fait les Achille, les Alexandre et les César, être le premier en tout ce qu’on entreprend, c’est cette devise des grands cœurs et qui est celle des hommes éminents en tout genre, que la nature avait tout d’abord négligé de mettre dans l’âme honnête, mais foncièrement médiocre, du petit Stanhope : Vous paraissez manquer, lui disait son père, de ce vivida vis animi qui anime, qui excite la plupart des jeunes gens à plaire, à briller, à effacer les autres. — Quand j’étais à votre âge, lui dit-il encore, j’aurais été honteux qu’un autre eût mieux appris sa leçon, l’eût emporté sur moi à aucun jeu, et je n’aurais trouvé de repos que je n’eusse repris l’avantage.
Cette jeune âme se serait volontiers donné un plus large essor.
Mais, à côté de ces travers tout à fait désagréables du dialecticien, on aime à dégager de belles et justes pensées comme celle-ci, qu’il ne faut pas que la loi conspire avec les passions de l’homme contre sa raison : « Ainsi, du côté que l’homme penche, la loi le redresse, et elle doit interdire aujourd’hui la dissolution à des hommes dissolus, comme elle interdit, il y a quelques siècles, la vengeance privée à des hommes féroces et vindicatifs. » La conclusion de ce traité Du divorce, adressée sous forme d’allocution aux législateurs du Code civil, est d’une grave et réelle éloquence ; l’âme de l’homme de bien et du bon citoyen s’y fait jour par des accents qui ne se laissent pas méconnaître ; on y entend ce cri vertueux et ce vœu de réparation qui s’élève de la société après chaque grand désordre, et qui ne demande qu’à être régulièrement dirigé : Commandez-nous d’être bons, et nous le serons.
On verra plus tard comment à Vienne, après 1830, dans une conversation familière qu’eut le maréchal avec le duc de Reichstadt, avec le fils de Napoléon, ce jeune homme de mystérieuse et pathétique mémoire saisit l’occasion de reprendre, de rectifier en quelque sorte la parole de son père, et de porter une consolation délicate dans l’âme du noble guerrier.
Pourtant il oublie trop que Georges le laboureur, André le vigneron, Jacques le bonhomme (comme il les appelle) n’ont rien qui les élève et les moralise, qui les détache de ces intérêts privés auxquels ils sont tous acharnés et assujettis ; qu’à un moment donné, s’il faut un effort, un dévouement, une raison supérieure d’agir, ils ne la trouveront pas, et qu’à telles gens il faut une religion politique, un souvenir ou une espérance qui soit comme l’âme de la nation, quelque chose qui, sous Henri IV, s’appelait le roi, qui plus tard s’appellera l’empereur, qui, dans l’avenir, sera je ne sais quel nom : sans quoi, à l’heure du péril, l’esprit d’union et d’unité, le mot d’ordre fera faute et la masse ne se soulèvera pas.