C’est ce qu’affirme d’ailleurs l’axiome d’histoire naturelle, souvent mal compris ou exagéré : Natura non facit saltum. […] L’on dresserait une balance exacte du bien et du mal qui dérivent pour un être quelconque de chaque détail de son organisation, on trouverait qu’en résultante chacun de ces détails lui est avantageux. […] La sélection naturelle ne peut modifier une espèce quelconque exclusivement pour le bien ou le mal d’une autre espèce, quoiqu’elle puisse parfaitement contribuer à former certains organes, à favoriser certaines tendances, certaines habitudes, certaines sécrétions très nuisibles ou très utiles, et même indispensables à d’autres espèces, mais en même temps toujours utiles à leurs propres possesseurs. […] Ainsi, le groupe de transition qui a donné naissance soit aux oiseaux, soit aux reptiles, peut avoir été un ordre de poissons d’une organisation très inférieure dans leur classe, mal adaptée à la natation et à la respiration aquatique, types encore flottants peut-être entre l’invertébré et le vertébré. […] Il est encore un autre ordre de considérations, c’est que ces formes de transition douées d’habitudes mal fixées, variables, mœurs intermédiaires entre celles de leurs ancêtres et celles de leurs descendants et d’une organisation également mixte et imparfaitement adaptée pour les unes ou les autres de ces habitudes, n’ont pu soutenir longtemps la concurrence, soit contre le poisson qui devenait de plus en plus parfait, relativement à ses habitudes aquatiques, et tel que nous le voyons dans le type si exclusivement ichthyomorphe du Téléostéen, ni contre les reptiles ou les oiseaux véritables, dont le type ne dut pas tarder à s’achever par une sélection rapide.
Peut-être dira-t-on qu’il n’y aurait pas eu grand mal à cela. […] Mais, assez de reproches ; il y a un arrêt qui décide que M. de Balzac est plus blanc que son Lys dans la vallée, qu’il avait vendu à la Revue de Paris, plante humble et inodore, oignon mal venu sur le terrain de ce grand génie que notre argent n’a pu féconder . […] L’auteur d’Eugénie Grandet, de l’Enfant maudit, et du Père Goriot, un écrivain qui n’a jamais pu rien terminer, et dont les œuvres sont des oignons mal venus, que l’argent de M. […] Dix ans, vous l’avez aidé à faire sa fortune littéraire et politique, dix ans il a été contraint par intérêt à dire du bien de vous ; dix ans, si nous le laissons vivre dix ans, il va être occupé à en dire du mal ; il y a des gens qui ne sauraient pardonner ni le bien qu’on leur a fait, ni les services qu’on leur a rendus. […] Je ne dirai pas non plus tout le mal qu’il en écrit maintenant : je me contenterai de rapporter le dernier article qu’il a fait contre moi ; c’est le cinquième ou sixième dont il me gratifie depuis cinq ou six mois.
J’examine les conditions où ces affections se produisent : je trouve qu’elles viennent toujours s’intercaler entre des ébranlements que je reçois du dehors et des mouvements que je vais exécuter, comme si elles devaient exercer une influence mal déterminée sur la démarche finale. […] Il y a, dans cette croyance au caractère d’abord inextensif de notre perception extérieure, tant d’illusions réunies, on trouverait, dans cette idée que nous projetons hors de nous des états purement internes, tant de malentendus, tant de réponses boiteuses à des questions mal posées, que nous ne saurions prétendre à faire la lumière tout d’un coup. […] Il y a dans la douleur quelque chose de positif et d’actif, qu’on explique mal en disant, avec certains philosophes, qu’elle consiste dans une représentation confuse. […] C’est aussi parce que l’effort est local que la douleur est absolument disproportionnée au danger couru par l’être vivant : le danger peut être mortel et la douleur légère ; la douleur peut être insupportable (comme celle d’un mal de dents) et le péril insignifiant. […] Mais elle a en outre pour elle des faits mal interprétés, qu’il convient dès maintenant d’examiner.
tu me souriais de ton sourire immortel, et tu me demandais ce que j’avais, ce que je souffrais, et l’objet de ma douce fureur : tu me disais : Qui donc t’a fait du mal, ô ma Sapho ? […] Je n’ai rien aimé de plus qu’elle et mon pauvre frère Félix, dont l’absence et l’abandon me minaient, et aussi ma pauvre sœur Cécile dont je secours si mal les dernières années. […] Puis, quand on vient à songer quel mal infini eût de tout temps à se soutenir et à subsister cette famille d’élite et d’honneur, ce groupe rare d’êtres distingués et charmants, comptant des amitiés et, ce semble, des protections sans nombre, chéris, estimés et admirés de tous, on se demande ce que c’est que notre civilisation si vantée ; on rougit pour elle.
Pourquoi faut-il que le texte, du moins, soit si sauvage, si mal digéré, et qu’un poète définitif n’ait pas mis la dernière main à une si belle matière ! […] Pour moi, je l’avoue, je me sauve de ce mauvais pas (fin du XVe siècle) dès que je le puis, et à travers ronces et broussailles, j’arrive tant bien que mal à Marot ; trop heureux d’atteindre enfin un lieu de repos et de plaisance où je respire. […] En lisant les vers de Marot, on a pour la première fois, ce me semble, le sentiment bien vif et bien net qu’on est sorti des amphigouris de la vieille langue, si mal employée par les derniers rimeurs, qu’on est sorti des broussailles gauloises ; nous sommes en France, en terre et en langue françaises, et en plein esprit français, non plus rustique, non plus écolier, non plus bourgeois, mais de Cour et de bonne compagnie.
Une société où elle n’avait pas son rang lui semblait mal faite. […] IX On accusa le général de perfidie envers le gouvernement, qu’il voulait, disait-on, remplacer en se rendant nécessaire, pendant que ce général, coupable seulement d’imprévoyance et de lenteur dans le rassemblement des troupes qu’on lui avait prodiguées, voyait avec désespoir tomber ses braves lieutenants, et se prolonger l’inexplicable conflit de toute une nation contre une émotion de faubourg, mal réprimée le matin, formidable le soir. […] Si donc Louis XVI, roi trop récemment dépossédé de la toute-puissance, roi à qui toute restitution du pouvoir au peuple devait paraître déchéance, roi mal satisfait de la part de règne qui lui restait, aspirant à reconquérir l’autre part, tiraillé d’un côté par une assemblée usurpatrice, tiraillé de l’autre par une reine inquiète, par une noblesse humiliée, par un clergé qui faisait intervenir le ciel dans sa cause, par une émigration implacable, par ses frères courant en son nom par toute l’Europe pour chercher des ennemis à la Révolution ; si Louis XVI, roi, paraissait à la nation une conspiration vivante contre sa liberté, si la nation le soupçonnait de trop regretter dans son âme le pouvoir suprême, de faire trébucher volontairement la nouvelle constitution pour profiter de ses chutes, de conduire la liberté dans des pièges, de se réjouir de l’anarchie, de désarmer la patrie, de lui souhaiter secrètement des revers, de correspondre avec ses ennemis, la nation avait le droit de le citer jusque sur son trône, de l’en faire descendre, de l’appeler à sa barre et de le déposer au nom de sa propre dictature et de son propre salut.
Cela lui suffisait, il était resté gai comme l’insouciance, pourvu que la conscience fût en repos, et qu’il contemplât comme le philosophe Vico les grandes et les petites oscillations de ce pendule alternatif des révolutions des empires, mouvement toujours, progrès quelquefois, vicissitude éternelle qui va du bien au mieux, du mieux au mal, du mal au pire, de la vie à la mort, de la vieillesse des sociétés à la mort des peuples, et qui se confie à Dieu du sort des nations ; il était content. […] À l’Assemblée législative, ils avaient pactisé longtemps avec la monarchie, mal acceptée par eux, et n’avaient pas compris qu’un peuple ne se transforme et ne se régénère presque jamais sous la main et sous le nom du pouvoir auquel il échappe.
En 1848, j’envoyai M. le comte de Circourt à Berlin, pour expliquer, dans un sens inoffensif et favorable, la révolution inopinée qui renversait la famille d’Orléans de son trône mal assis et mal défendu, pour lui substituer une république conservatrice de la paix de l’Europe. […] Une fausse démarche du jeune homme, néanmoins, dans une question de libre circulation des capitaux, ayant été mal interprétée, quoique immédiatement révoquée, donna des inquiétudes et des prétextes à Berlin.
Le curupira est un être mystérieux dont les attributs sont fort mal déterminés, car ils varient suivant les localités. […] Et sans conscience, qu’est le bien et le mal, l’honnête et le déshonnête, le vice et la vertu dans l’univers ? Vous voyez donc que votre prétendue science est obligée de se désavouer elle-même et de recourir au mystère de son instinct inné pour croire à quelque chose de surnaturel, au bien ou au mal moral sur lequel la science matérielle ne dit rien !
— Émiette, lui dis-je, tous les matins, un peu de la mie de ton pain de prison, et répands ces miettes, toutes fraîches, sur le bord intérieur du mur à hauteur d’appui où tu t’accoudes quelquefois pour regarder couler l’heure au soleil ; petit à petit, la plus hardie viendra becqueter entre les barreaux, puis jusque dans ta main ; tu lui caresseras les plumes sans la retenir, et tu la laisseras librement s’envoler, revenir et s’envoler encore ; bientôt elle aura pour toi l’amitié que toutes les bêtes ont naturellement pour l’homme qui ne leur fait point de mal, tu la prendras dans ton sein, elle becquettera jusqu’à tes lèvres, elle se laissera faire tout ce que tu voudras d’elle ; moi, de mon côté, je vais en prendre une sur la margelle du puits et l’emporter sous ma chemise, dans mon sein, là-haut, dans ma chambre ; je l’empêcherai seulement une heure ou deux de s’envoler, je lui donnerai des graines douces et du maïs sucré sur le bord de ma fenêtre, et je la lâcherai ensuite pour qu’elle rejoigne ses compagnes dans la cour ; tu la reconnaîtras au bout de fil bleu que j’aurai noué à ses jambes roses, et c’est celle-là que tu apprivoiseras de préférence en faisant peur aux autres ; au bout de deux ou trois jours, tu verras qu’elle viendra à tout moment te visiter, et qu’à tout moment aussi elle remontera de la lucarne à ma tour, pour redescendre encore de ma tour à ton cachot. […] monsieur, le sommeil n’était pas venu une heure de suite sur nos yeux depuis le jour du malheur ; nous n’avions la nuit d’autre bruit dans la cabane que le bruit confus de nos sanglots, mal étouffés sur nos bouches, et de temps en temps les cris de douleur involontaires du petit chien, couché sur le pied de mon lit, quand sa jambe coupée, qui n’était pas encore guérie, lui faisait trop mal, et qu’il implorait ma main pour le retourner sur sa paille.
Il a pleuré « Jeanne la bonne Lorraine », et il a honni par un refrain énergique « qui mal voudrait au royaume de France ». […] Voilà une poésie qui est la résonance d’une pauvre âme, battue d’outrageuses misères, et qui n’est que cela : et dans cette voix bouffonne ou plaintive, qui crie son vice ou son mal, passe parfois le cri de l’éternelle humanité : nous, honnêtes gens, paisibles bourgeois, ce louche rôdeur du xvie siècle parle de nous, parle pour nous, nous le sentons, et c’est ce qui le fait grand. […] Encore ne sais-je pas s’il se tait par conscience du mal ou par crainte de gens actuellement puissants, dont son habileté trop grande avait contrarié les vues.
Lorsqu’il pratique l’alexandrin, M. de Régnier le vivifie par une riche variété de rythmes internes en lui laissant sa force roide et ses formes sculpturales, mais en usant fréquemment, à la césure, de syllabes muettes mal amenées, qui donnent un à-coup brusque vraiment pénible et surprennent chez un habile ouvrier. […] Le Socialisme est un mal nécessaire. […] Après le pouvoir absolu et imposé des anciennes métriques, la Poésie doit s’imposer à elle-même, en chacun de ses créateurs, des lois qui sont pour elle le socialisme, le mal nécessaire.
« Elles penchent, dit-elle, la tête sur l’épaule, font des mines des yeux et de la bouche, ont une mine méprisante et une certaine affectation en tous leurs procèdes, qui est extrêmement déplaisante. » La princesse ajoute : « Il y en a peu qui dansent, parce qu’elles dansent mal. […] Les véritables précieuses auraient tort de se piquer lorsqu’on joue les ridicules qui les imitent mal. » Suivant les biographes et commentateurs, ces paroles sont une précaution contre les clameurs de l’hôtel de Rambouillet51. […] Taschereau dit aussi que « Molière, pour détourner de lui la colère de personnages puissants, crut devoir déclarer qu’il n’avait point en en vue les véritables précieuses, mais celles qui les imitaient mal.
Au reste, c’est Chœrilus qui, par sa tétralogie des Curetés, a commencé le mal. […] le mal, qui commence la souffrance par lui, car être le mal c’est pire que le faire, les peines, les douleurs, les larmes, les cris, les rumeurs ; dans l’ombre, le problème muet, l’immense silence, d’un sens inexprimable et terrible.
Ces diverses tentatives ont même été, en général, si mal conçues, qu’il en est résulté involontairement, dans la plupart des bons esprits, une prévention défavorable contre toute entreprise de ce genre. […] Au degré de développement déjà atteint par notre intelligence, ce n’est pas immédiatement que les sciences s’appliquent aux arts, du moins dans les cas les plus parfaits il existe entre ces deux ordres d’idées un ordre moyen, qui, encore mal déterminé dans son caractère philosophique, est déjà plus sensible quand on considère la classe sociale qui s’en occupe spécialement. […] N’oublions pas que, dans presque toutes les intelligences, même les plus élevées, les idées restent ordinairement enchaînées suivant l’ordre de leur acquisition première ; et que, par conséquent, c’est un mal le plus souvent irrémédiable que de n’avoir pas commencé par le commencement.
Les Héricart étaient des gens comme les La Fontaine, de bons bourgeois qui avaient exercé quelques petites charges de magistrature et qui étaient plus riches, je crois, que les La Fontaine, déjà un peu gênés, mal accommodés au moins, comme on disait alors, dans leurs affaires, depuis le père de La Fontaine. […] Le mariage, après la venue d’un fils, tourna très mal. […] D’autre part, avaient-ils de commun l’inconduite, comme Tallemant des Réaux, non seulement nous le donne à entendre, mais nous l’assure presque, et Mlle de La Fontaine comme on disait alors ; les bourgeoises n’ayant pas droit au titre de madame — et Mlle de La Fontaine, en un mot, se conduisit-elle mal ?
Ce que le roi a de mieux à faire, c’est de ne pas leur donner lieu de s’unir et de s’entendre pour traiter avec lui ; c’est de les lasser et d’avoir bon marché de chacun en détail, en les laissant se diviser et achever de se morceler de plus en plus : Tant qu’enfin étant tous mal contents les uns des autres, et désespérés de leurs impertinents desseins, il faudra que tout ce qu’il y a de Français parmi eux se vienne jeter entre vos bras par pièces et lopins, comme vous devez désirer, ne reconnaissant que votre seule royauté, ne cherchant protection, appui ni support qu’en elle, ni n’espérant d’obtenir bienfaits, dignités, charges, offices ni bénéfices que de votre seule grâce et libéralité. […] Il était, au fond, plus mal avec la plupart de ses principaux coreligionnaires qu’avec le cardinal Du Perron, de même qu’il était moins bien avec ses collègues, les Villeroi et les Jeannin, qu’avec les Guise, une fois que les Guise se furent réconciliés et convertis à la royauté.
Il se mettait si mal qu’on l’aurait pris parfois pour un vagabond et presque pour un galérien, à ce point qu’un jour il fut arrêté par des archers sur sa mine. […] Il n’est pas mal, après un temps de vogue et de renom, de s’écouler dans la foule, d’être de ceux qui aiment à vivre et à mourir aussi près de terre que possible.
On n’a pas assez remarqué que c’est de Gibbon qu’il s’agit dans une lettre de Jean-Jacques Rousseau à Moultou, datée de Môtiers et du 4 juin 1763 : Vous me donnez pour Mlle Curchod, écrit Jean-Jacques, une commission dont je m’acquitterai mal, précisément à cause de mon estime pour elle. […] Gibbon me fait mal penser de lui ; j’ai revu son livre (l’Essai sur l’étude de la littérature).
Trouvant cette Histoire assez mal ordonnée, dit-il, et mise en langage assez rude, il s’est appliqué à la polir et à la dresser en meilleur ordre qu’elle n’était auparavant. […] Mais un prud’homme de prêtre, qui était à bord, dit qu’il n’a jamais vu de maux ni de menaces d’accidents fâcheux en sa paroisse résister à trois processions faites par trois samedis de suite.
Il avait beau dire du mal des Français ; quand il y avait longtemps qu’il n’en avait vu un, et que le nouveau débarqué à Civitavecchia s’adressait à lui (s’il le trouvait homme d’esprit), combien il était heureux de se dédommager de son abstinence forcée par des conversations sans fin ! […] Cette lecture, mal rapportée, excita les imaginations au-dehors, et il y eut une sorte de concours malicieux sur le sujet qu’on supposait faussement être celui d’Olivier.
Il faut toutefois reconnaître que le genre d’ardeur qui animait les générations de ce temps-là est depuis longtemps épuisé, et que tout le bien ou même le mal qu’on en pouvait attendre en est sorti. […] Il est vrai que l’enseignement de la chimie devient plus complet en seconde et en rhétorique, mais le programme serait mal interprété, si, abusant de son étendue, on en profitait pour entrer dans des développements qui ne sont pas faits pour les classes de nos lycées.
Cette lettre, publiée par Voltaire, est devenue historique, et elle fait le plus grand honneur auprès de la postérité à l’esprit et à l’humanité de M. d’Argenson : « Vous m’avez écrit, monseigneur, lui répondait Voltaire, une lettre telle que Mme de Sévigné l’eût faite, si elle s’était trouvée au milieu d’une bataille. » Et cet éloge est mérité ; on a la description gaie, vive, émue, du combat, du danger, du succès plus qu’incertain à un moment, de la soudaine et complète victoire ; le principal honneur y est rapporté au roi : puis, après tout ce qu’un courtisan en veine de cœur et d’esprit eût pu dire, on lit les paroles d’un citoyen philosophe ou tout simplement d’un homme : Après cela, pour vous dire le mal comme le bien, j’ai remarqué une habitude trop tôt acquise de voir tranquillement sur le champ de bataille des morts nus, des ennemis agonisants, des plaies fumantes… J’observai bien nos jeunes héros ; je les trouvai trop indifférents sur cet article… Le triomphe est la plus belle chose du monde : les Vive le roi ! […] À cela et à ses vues encore vagues sur lui, mais qui allaient à le faire un jour ou ministre, ou ambassadeur, ou même premier président du Parlement, d’Argenson, sans trop résister, répondait toutefois en rappelant ce qui lui manquait : qu’il était honteux et timide au premier abord ; qu’il avait été mal élevé sur un point ; que son père, en portant ses préférences trop longtemps sur son cadet et en le méconnaissant hormis dans les deux dernières années de sa vie, l’avait découragé ou trop habitué à se renfermer en lui, et « avait par là engourdi son entrée dans le monde » ; qu’il était balourd au jeu, qu’il s’y ennuyait et ne savait qu’y perdre son argent, etc., etc.
Il y a bien encore pour moi des tracasseries à subir, quand ce ne serait qu’avec ma bourse toujours si mal garnie, toujours insuffisante, quelque privation que je m’impose ; car c’est par économie que je me suis retiré à Passy, dans une mansarde, sans bonne, et vivant à peu de frais… » Il rappelle d’autres tracasseries encore, de petits ennuis qui ne manquent jamais, — le gros ennui du moment, les forts détachés, ces fameuses bastilles tant discutées qui se construisaient alors et qui lui gâtaient ses promenades favorites du bois de Boulogne : « Vous voyez, Monsieur, disait-il en terminant, qu’il y a toujours de petites contrariétés dans ce bas monde ; mais aussi il y a quelque philosophie, et je crois en avoir une part suffisante. […] Écrivez, écrivez… » C’est, sous une autre forme, le conseil que se donnait également Nicole, et la recette qu’il avait trouvée pour se délivrer l’esprit quand il était obsédé de pensées qui lui ôtaient le sommeil : il se hâtait de les jeter sur le papier ; — et Gœthe, le grand poëte, disait aussi, dans une bien vivante image ; « Mettez au monde cet enfant qui vous tourmente, et il ne vous fera plus mal aux entrailles. » Un autre jour, lisant avec admiration les trois volumes de Philosophie de Lamennais, et l’en louant à son tour et même à outrance, Béranger fait cependant une réserve sur un point bien important ; c’est à propos de l’espèce d’analyse que le philosophe a essayé de donner de l’idée de Dieu : « Je me suis toujours élevé vers Dieu, lui dit Béranger, autant que mes ailes fangeuses me l’ont permis, mais toujours les yeux fermés, me contentant de dire : “Oh !
Louis XIV avait été très mal instruit dans son enfance ; les quelques thèmes que lui dictait Péréfixe et qu’on a retrouvés depuis ne prouvent rien. […] A peine le prince de Condé se fut aperçu de l’absence de son fils et de celle du duc de Longueville, qu’oubliant pour ainsi dire, si l’on ose parler ainsi du plus grand homme du monde, son caractère de général, et s’abandonnant tout entier aux mouvements du sang et de l’amitié tendre qu’il portait à son fils et à son neveu, accourut ou pour les empêcher de s’engager légèrement, ou pour les retirer du mauvais pas où leur courage et leur peu d’expérience auraient pu les embarquer ; il les trouva avec tous les volontaires aux mains avec les ennemis, qui, se voyant pressés et profitant du terrain qui leur était favorable, avaient tourné brusquement… « Cette action fut fort vive et fort glorieuse ; mais la blessure du prince de Condé au poignet, la mort du duc de Longueville et les blessures des ducs de La Rochefoucauld, de Coislin et de Vivonne, du jeune La Salle, de Brouilly, aide-major de mes gardes du corps, etc., et de plusieurs autres gens de qualité, en diminuèrent fort le prix et me donnèrent une grande mortification, particulièrement la blessure de M. le Prince, tant à cause de sa naissance et de son mérite singulier que de la faiblesse de son tempérament, exténué par la goutte, que j’appréhendais ne pouvoir pas résister à la violence du mal.
Son père avait rendu des services à la France lors du mariage de Madame de Savoie, fille de Henri IV, et avait obtenu de Louis XIII une pension de deux mille livres pour son fils Vaugelas, alors établi en France, pension assez mal payée de tout temps. […] Sa pension, dont on a tant parlé, lui était, à ce qu’il paraît, fort mal servie.
C’est le joyeux forestier en révolte et le roi des braconniers Robin Hood, le vaillant compère, qui n’est jamais plus en gaieté, ni plus d’humeur à jouer de l’épée ou du bâton que quand le taillis est brillant et que l’herbe est haute : « Robin Hood, c’est le héros national ; saxon d’abord et armé en guerre contre les gens de loi, « contre les évêques et archevêques » ;… généreux de plus, et donnant à un pauvre chevalier ruiné des habits, un cheval et de l’argent pour racheter sa terre engagée à un abbé rapace ; compatissant d’ailleurs et bon envers le pauvre monde, recommandant à ses gens de ne pas faire de mal aux yeomen ni aux laboureurs ; mais par-dessus tout hasardeux, hardi, fier, allant tirer de l’arc sous les yeux du shérif et à sa barbe, et prompt, aux coups, soit pour les embourser, soit pour les rendre. » Partout, d’un bout à l’autre, dans tout ce livre de M. […] Jamais le feu de l’enthousiasme pour la chose publique, jamais la grandeur et la terreur qu’inspirent ces grands sauveurs révolutionnaires, hommes de glaive et d’épée, ne trouvèrent de plus vibrants et de plus vrais accents s’échappant à flots pressés d’une poitrine sincère : « C’est folie, s’écrie le poète, de braver ou d’accuser l’éclair et la foudre du Ciel irrité : et, à parler franc, beaucoup est dû à cet homme qui, de l’enclos de ses vergers domestiques, où il vivait retiré et austère comme si son plus profond dessein eût été de planter ses poiriers et de greffer sa bergamote, a su par son industrieuse valeur gravir et s’élever jusqu’à ruiner l’œuvre antique des temps et à jeter ces vieux royaumes dans un nouveau moule. » On sent ici comme la réalité anglaise et la franchise du ton se contiennent mal sous l’imitation classique, comme elles percent et crèvent en quelque sorte l’enveloppe d’Horace.
Une société où elle n’avait pas son rang lui semblait mal faite. […] Dans une seconde lettre de Buzot, du 3 juillet, Mme Roland revient sur la même idée d’un contentement austère au sein de la captivité, et elle l’exprime avec une rare noblesse : « Mon ami, ne nous égarons pas jusqu’à frapper le sein de notre mère en disant du mal de cette vertu qu’on achète, il est vrai, par de cruels sacrifices, mais qui les paye, à son tour, par des dédommagements d’un si grand prix.
Le Dauphin et Mesdames ont en elle une confiance d’enfants mal élevés… » D’Argenson veut dire que cette confiance les porte à médire en petit comité de leur père et de ses maîtresses. […] Le roi était tombé malade à Metz le 8, et son mal avait pris aussitôt le plus pernicieux caractère.
Est-ce un mal ? […] Je n’ai point flatté les auteurs, des amis pourtant dont les qualités me sont précieuses et chères ; je me suis pris chez eux à l’essentiel, à ce qui est caractéristique et qui constitue leur nature ou la vocation qu’ils se sont donnée : mais je me serais bien mal fait comprendre, si l’on ne concluait avec moi que MM. de Goncourt sont des artistes aussi distingués que convaincus et sincères, un talent rare en deux personnes, de parfaits gentilshommes de lettres.
Ce trait seul suffirait pour juger à quel point la confiance du prince fut mal servie dans cette occasion par ceux qu’il en avait honorés. » Il était donc curieux ou plutôt actif ; il voulait moins s’instruire que se distraire et s’amuser. […] Il tomba tout d’abord assez mal et ne rencontra jamais d’honorables ni de délicates liaisons : il ne parut pas les chercher.
Il s’attache particulièrement à ces poëtes si mal famés de la littérature Louis XIII, Saint-Amant, le vieux Colletet, Cyrano, Scudéry, Scarron ; tous ensemble, ils paraissent se grouper assez bien autour du poëte Théophile, que son très-piquant et très-amusant homonyme s’efforce de réhabiliter (si le mot n’est pas trop solennel), et sur le compte duquel il s’étend avec verve, boutade et complaisance. […] peux-tu bien Tirer d’une si belle chose Un si cruel mal que le mien ?
Elle craignit pour elle, à cause de sa jeunesse et de son extrême beauté qui nous avait déjà fait tant de mal, les dangers et les propos des mauvaises gens qui hantent les grandes villes ; elle lui envoya par le père Hilario une lettre de recommandation pour la supérieure des sœurs de charité de Saint-Pierre aux Liens, couvent de Livourne. […] CCLXVI Je marchai du lever du soleil jusqu’à son coucher, mon mezaro rabattu et refermé sur mon visage pour que les passants ne m’embarrassent pas de leurs rires et de leurs mauvais propos sur la route, pensant en eux-mêmes, en me voyant si jeune et si seule, que j’étais une de ces filles mal famées de Lucques qui vont chercher à Pise et à Livourne les bonnes fortunes de leurs charmes, auprès des matelots étrangers.
Enfin, pour dernière raison, qui pourrait au besoin servir à justifier l’éditeur du recueil que nous annonçons3, si on venait à lui reprocher qu’il a tiré à peine quelques paillettes d’or d’une mine si riche, nous rappellerons le jugement de madame de Staël dans son livre de l’Allemagne : « La poésie du style de Jean Paul ressemble aux sons de l’harmonica, qui ravissent d’abord, et nous font mal au bout de quelques instants. » À tout prendre, ce petit livre est donc un présent dont nous devons remercier l’éditeur. […] Il faut croire que ses ouvrages en fourmillent, et voilà ce qui explique et justifie le mot de madame de Staël que nous avons déjà cité : « La poésie du style de Jean Paul ressemble aux sons de l’harmonica, qui ravissent d’abord et nous font mal au bout de quelques instants. » II.
L’auteur étroit et sec du livre d’Esther n’a jamais pensé au reste du monde que pour le dédaigner et lui vouloir du mal 149. […] Il n’attacha jamais beaucoup d’importance aux événements politiques de son temps, et il en était probablement mal informé.
Il parle bas dans la conversation, et il articule mal. […] C’est presque un mariage, et voilà le mal.
Frappée dans ses proches, victime d’une union mal assortie, elle aimait peu la vie ; mortellement atteinte, elle la sentait fuir, et elle avait hâte de la donner. […] C’est, je vous assure, en ce moment le seul moyen de ne faire que peu de fautes, de n’adopter que peu d’erreurs, de ne souffrir que peu de maux. — Vivre, lui disait-il encore, c’est penser et sentir son âme ; tout le reste, boire, manger, etc., quoique j’en fasse cas, ne sont que des apprêts du vivre, des moyens de l’entretenir.
Elles sont faites dans l’esprit de Tacite, qui creuse dans le mal. […] Vous ne serez pas surpris que je veuille faire mon devoir, vous que j’ai vu si scrupuleux sur le vôtre, malgré vos maux et votre blessure.
Très amoureux dans sa première jeunesse d’une jeune fille qui aimait les vers, il avait été piqué de la tarentule, et, très bien guéri d’un mal (du mal d’aimer les jeunes filles), il ne s’était jamais guéri de l’autre.
Elle est de celles que de loin on traite assez mal, mais qu’on n’aborde pas de près impunément. […] Le fait est, si l’on met toute malice à part, que Mme Scarron, durant ces années les plus périlleuses, paraît n’avoir jamais été troublée par ses sens, jamais poussée par son cœur, et qu’elle était retenue par les deux freins les plus forts de tous, un amour de la considération qui, de son aveu, était sa passion dominante, et une religion précise et pratique dont elle ne se départit jamais : « J’avais, a-t-elle dit, un grand fonds de religion, qui m’empêchait de faire aucun mal, qui m’éloignait de toute faiblesse, qui me faisait haïr tout ce qui pouvait m’attirer le mépris. » Je ne vois pas de raison pour douter de cette parole, sauf accident.
Le jour de sa réception (23 novembre 1671), il fit un remerciement qui fut très goûté de la compagnie ; mais ces remerciements, bien que déjà oratoires, se prononçaient jusqu’alors à huis clos, et, comme on louait Perrault du sien, il répondit que, si son discours avait fait plaisir à Messieurs de l’Académie, il l’aurait fait à toute la terre si elle avait pu l’entendre ; il ajouta qu’il ne serait pas mal que l’Académie ouvrît ses portes les jours de réception, et qu’elle se fît voir dans toute sa parure. […] Il prétendit que la satire de Boileau était des plus morales, des plus exemplaires, et que les imputations de Perrault, à cet égard, étaient mal fondées et outrageuses.
Trouvant de la résistance à son rappel dans l’esprit de son petit-fils et de la jeune reine, il leur écrivit en père et en roi : Vous me demandez mes conseils, disait-il à Philippe V (20 août 1704), je vous écris ce que je pense ; mais les meilleurs deviennent inutiles, lorsqu’on attend à les demander et à les suivre que le mal soit arrivé… Vous avez donné jusqu’à présent votre confiance à des gens incapables ou intéressés… (Et parlant du rappel d’Orry et d’un autre agent :) Il semble cependant que l’intérêt de ces particuliers vous occupe tout entier, et, dans le temps que vous ne le devriez être que de grandes vues, vous le rabaissez aux cabales de la princesse des Ursins, dont on ne cesse de me fatiguer. […] Si elle avait eu un fidèle attachement pour vous, elle aurait sacrifié tous ses ressentiments, bien ou mal fondés, contre le cardinal d’Estrées, au lieu de vous y faire entrer.
Or, comment expliquer une colique ou un mal de dents par un rapport de représentations ? […] Ce qui la confirme encore, selon de Hartmann, c’est que l’on peut comparer divers plaisirs ou peines ; on se demande si l’on supportera plus facilement le mal de dents pendant une journée que la douleur de se faire arracher la dent.
C’étaient Delacroix, Musset, nous autres… Eh bien là, nous avons beaucoup bu de ce petit vin, qui a une si jolie couleur de groseille : ça n’a jamais fait de mal à personne. » Depuis quelque temps, la petite Jeanne porte sa cuisse de poulet à ses yeux, à son nez, quand tout à coup elle laisse tomber sa tête dans la paume de sa main, tenant toujours la cuisse à moitié mangée, et s’endort, sa petite bouche entrouverte, et toute grasse de sauce. […] Et la montre inconsciente de sa puissante et robuste santé près de son fils mourant, fait mal.
Il serait encore assez laborieux de compter les accents en ces phrases mal déterminées ; cependant on se sent en présence de vers évidents. […] J’ai seulement voulu montrer qu’à huit siècles de distance on retrouve, en des circonstances peu analogues, la présence d’un vers qui souffre mal l’analyse prosodique, et qui est essentiellement différent de toutes les formes du vers, latines ou françaises.
Mais pour plusieurs raisons on jugeroit mal du pinceau des anciens, si l’on vouloit en juger sur ces mosaïques. […] La crainte que son enfant ne se fit mal en sucçant du sang au lieu de lait, étoit si bien marquée sur le visage de la mere, toute l’attitude de son corps accompagnoit si bien cette expression, qu’il étoit facile de comprendre quelle pensée occupoit la mourante.
Par contre, les guinné se débarrassent fréquemment de leurs enfants mal venus en les substituant à des enfants d’hommes. […] Il existe d’ailleurs des exorcistes ou conjureurs des sorciers : les bourhama (en ouolof) qui les obligent par leurs conjurations à réparer le mal causé.
Aussi serait-il mal venu à prêcher l’intégrité aux hommes. […] -F., Le cavalier qui soignait mal son cheval.
Voici, d’ailleurs, le portrait d’un poète de ce groupe, extrait d’un livre à paraître : L’Amour et la Vie : « Léon Mateau est le type bâtard du bohème romantique mâtiné de bourgeois, au fond ce qu’il y a de pire au monde ; de ces hommes qui affectent des allures excentriques et parlent un langage paradoxal uniquement pour se faire de la réclame ; un de ces braillards qui crient que tout est mal quand ils sont dans la dèche et qui, une fois parvenus à une bonne situation, deviennent les plus impitoyables tenanciers de la routine et des abus. […] « Le vêtement moderne, si favorable aux hommes mal faits, lui est désavantageux.
« Je ne pense pas mal de l’espèce humaine, nous dit-elle, car je la crois plus abusée que perverse : je la plains plus que je ne la condamne, car je la vois toujours rectifiant de plus en plus ses erreurs et redressant ses voies à mesure que s’étendent ses lumières et que s’exerce dans de plus vastes limites sa liberté. » On l’entend : c’est la ritournelle du progrès chantée aux bornes sur toutes les orgues de Barbarie philosophiques. […] Les commencements, c’est le plus beau, en tout ; mais particulièrement en républiques, lesquelles d’ordinaire commencent en belles femmes, un peu affolées, mais finissent toujours en queue de poisson, et de poisson vitement pourri, à faire mal au cœur aux républicains les plus solides !
Ils ne comprirent pas, enfin, que cet homme-là ne fut jamais plus l’homme du Pape que quand il dit du mal d’un certain Pape, et qu’il y a le mal qu’on dit de ceux qu’on aime et les morsures de l’amour !
Mais les mauvais sentiments sont bêtes, et c’était une bêtise de l’Envie ; car si le saltimbanque domine et explique le poète, il est plus surprenant que le poète lui-même… On a déplacé l’un pour donner sa place à l’autre, mais pour cela on ne s’est pas arraché à la dure nécessité, qui fait tant de mal, d’admirer ! […] Et d’autant plus que c’est l’esprit du temps qui chante dans sa voix, seulement l’esprit du temps relevé dans le poète, puissancialisé, poussé au sublime, — le sublime du mal, il est vrai.
Je pourrais prendre l’un après l’autre les différents rôles classiques du provincial : le petit marchand des villes, le gros marchand enrichi, le châtelain ignorant et vaniteux, le châtelain pauvre, le châtelain grand seigneur, les femmes surtout qui se ressemblent presque toutes dans les romans dits provinciaux, mal habillées, sentimentales, courtes d’intelligence, de dévotion étroite, intimidées et hypnotisées à la seule vue d’une Parisienne ; je pourrais prendre ces personnages et montrer que, sauf de bien légères nuances, ils n’ont pas changé en passant de livre en livre, qu’ils sont au fond les mêmes et comme immuables dans la littérature depuis trois siècles. On m’objectera ici que plusieurs grands écrivains de notre siècle ont étudié la province, et que, représentants de l’école réaliste, ils n’ont pas dû se borner à suivre une mode, à opiner de la plume parce que les anciens maîtres avaient dit du mal de la province, mais que, s’ils ont persisté à n’en pas écrire favorablement, ils ne l’ont fait qu’après enquête personnelle, scientifiquement et avec le scrupule de la réalité qu’ils apportent en leurs moindres ouvrages.
Ce qu’il y avait, par moment, d’énergique grandeur était trop mêlé de mal et de crime pour laisser à la pensée son pur éclat poétique : une fureur turbulente et souvent factice en prit la place, et parut en avoir la puissance. […] On le sent, aux cris de douleur qui lui échappent sur les vices inhumains mêlés à l’idolâtrie des Hindous, et sur tous les maux dont il faudrait les guérir pour les élever jusqu’à la foi.
A toutes les causes qu’il y a dans le régime actuel pour être mal élevé, le clergé en ajoute donc une toute spéciale à son usage, et c’est ce qui explique en partie l’incroyable grossièreté de plume des feuilles ecclésiastiques en France.
Ce noble exemple, tant ridiculisé par un monde aveugle, me paraît, à lui seul, capable de racheter les erreurs de sa vie… Il y a loin de la dignité d’action du pauvre Rousseau à la pompeuse fortune littéraire des spéculateurs en philanthropie, Voltaire et son écho lointain Beaumarchais… » M. de Balzac, après avoir, non sans raison, remarqué que cette sévérité contre les auteurs qui vendent leurs livres siérait mieux peut-être sous une plume moins privilégiée à tous égards que celle de M. de Custine, se donne carrière à son tour, se jette sur les contrefaçons, agite tout ce qu’il peut trouver de souvenirs à la fois millionnaires et littéraires : la conclusion est qu’à moins de devenir riche comme un fermier général, on se maintient mal aisément un grand écrivain.
De la dédicace et de la préface il résulte que l’auteur a reçu force compliments et cartes de visite pour sa pièce : avant la représentation, c’était le suffrage (je copie textuellement) des hommes les plus éminents dans le monde littéraire, dam le monde politique et dans le monde social ; depuis la représentation et pour contrecarrer les impertinences qu’en ont dites des critiques mal placés, « les juges réels de la pièce, ceux qui vivent parmi les choses et qui les voient, viennent tour à tour, auprès de l’auteur, s’inscrire en témoignage et lui apporter leur formelle adhésion. » Le moyen, maintenant, de refuser cette adhésion formelle et de prétendre à passer pour un juge !
Et des mots qu’ils comprennent tant mal que bien, combien y en a-t-il qui soient à leur usage ?
Ces fillettes ne s’en portaient pas plus mal.
Seulement nous la cachons mieux ; nous ne l’exprimons pas, en général, par des préfaces, mais par des actes, par toute notre conduite et par le mal que nous disons de nos confrères.
Quant au vieil équilibre européen, encore que rompu, on l’étaye au jour le jour, tant bien que mal.
Et puis ces poèmes en prose sont d’une langue neuve et bigarrée où tout se traduit en images : style qu’on imiterait mal.
Le Narcisino, dessevedo de Mal albergo, les Giangurgoli calabrais n’émigrèrent point.
Si sa mère objecte que la littérature est « mal vue », et constituera peut-être à son « établissement » futur un empêchement rédhibitoire, le père réplique qu’il faut savoir vivre avec son siècle, que la plume est un riche instrument quand on est malin comme le petit, que les histoires de littérateurs de brasserie sont des contes à dormir debout, que la Société des Gens de lettres est le plus beau des syndicats « parce qu’il est intellectuel », et que son garçon, doué certes du talent de M.
Regardez comme une lâcheté de trahir la femme qui vous a ouvert pour un moment le paradis de l’idéal ; tenez pour le plus grand des crimes de vous exposer aux malédictions futures d’un être qui vous devrait la vie et qui, par votre faute peut-être, serait voué au mal.
Il avoit toujours été d’une santé foible & chancelante, sujet aux maux d’estomac & de tête, aux crachemens de sang.
Le titre de bel-esprit & d’auteur s’allie mal d’ordinaire avec les occupations du trône.
Qu’ont de commun ses maux avec les peines d’un amant ?
Cette flagellation a été faite par deux hommes mal intentionnés, en dépit & vengeance de quelques chansons sans malice que ledit poëte avoit faites contr’eux.
La justice et la fermeté : la justice, qui n’est rien sans la fermeté ; la fermeté, qui peut être un grand mal sans la justice ; la justice, qui prévient le murmure et qui règle la bienfaisance ; la fermeté, qui donnera de la teneur à sa conduite, qui le résignera à sa destinée, et qui l’élèvera au-dessus des revers.
On imite mal une passion qu’on ne feint que du bout des lévres.
Par exemple, un comedien anglois qui mettroit autant de vivacité dans ses gestes, qui marqueroit autant d’inquiétude dans sa contenance, autant de contention dans son visage, qui placeroit des exclamations aussi fréquentes dans sa prononciation, qui les feroit aussi marquées, un comédien anglois enfin qui joüeroit comme un comédien italien, joüeroit mal.
Mais ces peintres ont mal réussi dans les autres parties de l’art, qui ne sont pas les moins importantes.
Elles nous calment, elles nous soulagent même dans les maladies du corps. " comme il arrive quelquefois que les maladies du corps sont causées par les agitations de l’esprit, il n’est pas surprenant que la musique en soulageant les maux de l’esprit, ait soulagé et même qu’elle ait gueri en certaines circonstances les maladies du corps.
On est donc mal venu à qualifier notre méthode de matérialiste.
C’est mal, Francisque ; vous finirez par collaborer avec Siraudin.
J’ai donc laissé subsister les pages 127 et 128, si mal consonantes avec l’ensemble même du livre.
I Si les livres que l’on publie aujourd’hui sont, à bien peu d’exceptions près, des productions assez tristes et assez maussades, — comme, du reste, les gens malades, malsains ou mal faits le sont presque toujours, — la littérature, mère de ces livres, n’en vient pas moins d’écrire une des pages les plus gaies du siècle.
Seulement, de même que celui qui achève un homme est plus coupable que celui qui a commencé de le frapper, Rousseau acheva le mal commencé par Descartes, et le Traité de la Méthode fut complété par le Contrat social.
Il regrette sa patrie, et c’est bien, mais il est malade du mal d’un pays bien autrement difficile à reconstituer que la Pologne.
Le mal que fait à la France la centralisation parisienne, et par suite la convenance qu’il y aurait à décentraliser, ou pour mieux dire, à multiplier les points de centralisation, je ne pense pas que personne le nie, hors les ministres qui trouvent que c’est commode de régler des intérêts tous rassemblés dans les bureaux de leur ministère.
La vision d’un Pascal était aussi aiguë quand elle s’exerçait dans les régions mal éclairées de l’âme que lorsqu’elle portait sur les choses physiques, géométriques, philosophiques.
Songez à cet abîme si mal exploré encore des attirances, et peut-être surtout des haines sexuelles. […] Il y a des récifs en nous, des formations sous-marines que la pensée consciente, comme un navire mal piloté, rencontre tout à coup et auxquels elle se déchire. […] Mais la complexité, ou la polymorphie des personnages de Dostoïevski est d’un ordre très spécial ; elle est surtout morale ; c’est le mélange en eux du bien et du mal, des tendances moralement antithétiques, qui fait leur complexité ; et c’est l’alternance en eux du bien et du mal comme principes de conduite qui les rend divers et complexes. […] Puis elle savait que son mensonge lésait d’ordinaire gravement l’homme à qui elle le faisait, et à la merci duquel elle allait peut-être tomber si elle mentait mal. […] N’est-il pas évident que le plus grand bonheur que puisse apporter l’amour est ou bien une exaltation solitaire, dont l’autre être est le prétexte et non pas la cause, ou bien simplement un apaisement momentané, souvent par suite d’une phrase mal comprise — de quelque douleur en nous trop aiguë ?
Les médecins ont pour certaines maladies à syndrome complexe, ainsi le mal de Graves ou de Basedow, un terme expressif. […] Taine, plus touchants de pathétique intellectuel que la description de ce pauvre petit collégien mal vêtu, mal nourri, prisonnier d’un sort précaire, et qui soudain découvre avec extase l’univers des idées. […] Qu’est-ce qui est mal ? […] Il a nommé ce mal d’un mot qui restera, précisément à cause de son double sens. […] Que devenait la réalité en passant par ce cerveau toujours en mal de création ?
Le monde est plein de mal, de toute sorte de mal. […] C’est alors que naissent ces mécontentements méditatifs, ces impressions partiales et irritées, cet entier oubli des biens, cette susceptibilité passionnée devant les maux de la condition humaine, et toute cette colère savante de l’homme contre l’ordre et les lois de cet univers. […] Quelle profonde connaissance du cœur humain décèle le caractère de ce don Juan, cet homme essentiellement insociable, pour qui faire le mal est un besoin, et qui s’irrite contre les bienfaits de son propre frère ! […] Passe, lecteur, en me donnant male heure, Seulement passe, et me va maudissant. […] Sa patience nous fait sourire ; on a peine à croire à ses emportements qui, du reste, comme l’observe Schlegel, ne font mal à personne.
Et pourtant il pèse et mord moins cruellement le mal qui blesse avec douleur, que l’ennui qui étouffe. […] Elle n’a pas changé, Lune toujours chérie ; Je souffre ; et de mes maux pourtant la rêverie M’entretient et me plaît ; j’aime le compte amer De mes jours douloureux. […] Sinon que, pour consolation en ces derniers temps, j’ai acquis des amis tels que vous ; et votre compagnie, qui me tient lieu de l’étude, et de tout plaisir et de toute espérance, serait presque une compensation à mes maux, si la maladie me permettait d’en jouir comme je le voudrais, et si je ne prévoyais que bientôt peut-être ma fortune va m’en priver encore, en me forçant à consumer les années qui me restent, sevré des douceurs de la société, en un lieu beaucoup mieux habité par les morts que par les vivants ; votre amitié me suivra toutefois, et peut-être la conserverai-je même après que mon corps, qui déjà ne vit plus, sera devenu poussière. […] L’autre à son tour fait taire, apaise en souveraine Tout mal, toute douleur, si vive qu’elle prenne.
L’intervention des idées morales sur la scène efface, avec toute la gaieté du drame comique, toute sa poésie, et je me souviens d’avoir entendu M. de Schlegel dire, avec une familiarité de langage dont le sel n’excuse point l’irrévérence, que grâce à cette parfaite symétrie du mal et du bien, du faux et du vrai, de l’absurde et du raisonnable dans les comédies de Molière, chacune d’elles présentait à son œil édifié cet aspect régulier et satisfaisant qui caractérise une pincette. […] Cependant, il conserve jusqu’à la fin la foi la plus naïve et la plus sérieuse en sa mission239, et lorsqu’un ecclésiastique ose en sa présence douter et médire des chevaliers errants, le visage enflammé de colère et tremblant des pieds à la tête, don Quichotte lui répond ainsi : « Est-ce, par hasard, une vaine occupation, est-ce un temps mal employé que celui que l’on consacre à courir le monde, non point pour en chercher les douceurs, mais bien les épines ? […] Mes intentions sont toujours dirigées à bonne fin, c’est-à-dire à faire du bien à fous, à ne faire du mal à personne. […] Que le crime de Clytemnestre ne soit pas puni, qu’Antigone meure pour avoir accompli un devoir fraternel, c’est là une injustice, un mal en soi.
Il mange trop, en enfant gâté ; il veut des mets forts, épicés, et se fait mal à l’estomac. […] Pour ce qui est du mal qui s’y rencontre ou s’y peut rencontrer, je laisse à Dieu seul le soin de les corriger ou de les réformer. […] Nous continuons par conscience, et, dans la peinture de la Mélancolie et de son palais, nous trouvons des figures bien autrement étranges : « une jarre qui soupire, un pâté d’oie qui parle, des hommes qui, travaillés par l’imagination, se disent en mal d’enfant, des filles qui se croient changées en bouteilles et demandent à grands cris un bouchon1117. » Nous nous disons alors que nous sommes en Chine ; qu’à une si grande distance de Paris et de Voltaire il ne faut s’étonner de rien, que ces gens ont d’autres oreilles que les nôtres, et qu’à Pékin un mandarin goûte avec délices un concert de chaudrons. […] VI Tout cela s’encadre assez mal dans la dorure classique.
Dieu nous a envoyé une petite croix, et nous rendons grâce à son infinie miséricorde que tout se soit passé sans trop de mal. […] « Ma chère maman, dit-il, je ne peux pas écrire tant les doigts me font mal à force d’écrire des récitatifs ; je te prie, chère mère, de prier pour moi que mon opéra réussisse, et qu’après cela nous nous trouvions tous réunis heureusement ensemble. » Le jour terrible de la représentation de son premier opéra à Milan approche. […] Mais la Providence et la volonté de Dieu ont ordonné les choses de façon qu’il faut que de nouveau je me résigne à la dure nécessité de donner des leçons, et cela dans une ville où la peine est si mal payée qu’on ne peut en tirer de quoi s’entretenir soi et les siens ; et, malgré cela, il faut être content et s’exténuer à parler pour encaisser du moins quelque chose au bout du mois. […] J’étais glacé, non seulement des mains et des pieds, mais de tout le corps, et la tête commençait à me faire mal.
Quelques femmes qui, d’après leur langage et leurs vêtements, paraissaient être des personnes d’un rang élevé, reçurent autour d’un grand feu ce groupe d’officiers français que, par crainte autant que par politesse, on se serait bien gardé de mal accueillir. […] XII À peine rentré en France il se repent de n’avoir ni anéanti la Prusse ni reconstitué la Pologne ; il se fie à l’alliance ambitieuse du jeune empereur de Russie, à l’alliance humiliée de la Prusse, à l’alliance mal désarmée de l’Autriche ; ses pensées grandissent vers le Midi plus que sa base dans le Nord ; il laisse l’élite de ses forces de la Vistule au Rhin et il forme des armées équivoques destinées éventuellement contre l’Espagne et le Portugal. […] Aussi ce livre sera-t-il à jamais le manuel des administrateurs et des militaires ; les philosophes, les politiques, les hommes de pensée, les hommes de liberté, les hommes de religion, les hommes d’humanité, les hommes de bien écriront à leur tour cette histoire en se plaçant à un autre point de vue que le champ de bataille, au point de vue du bien ou du mal fait au genre humain par ce héros de l’armée et par ce héros du despotisme. […] Sentez-vous cette édification consciencieuse, cet équilibre intérieur, cette justice satisfaite du bien et du mal qu’une aussi longue histoire doit laisser dans l’âme comme la conclusion historique de tant d’événements et de tant de beaux récits ?
D’un autre côté, il serait juste d’énumérer, non pas seulement les maux, mais aussi les avantages que la communauté détruit ; avec elle, l’existence me paraît tout à fait impraticable. […] Si ces désirs sont désordonnés, les hommes auront recours au crime pour guérir le mal qui les tourmente ; et j’ajoute même qu’ils s’y livreront non-seulement par cette raison, mais aussi par le simple motif, si leurs caprices les y portent, de n’être point troublés dans leurs jouissances. « À ces trois maux, quel sera le remède ? […] On ne remarque point le mal tant qu’il est léger ; mais il s’accroît, et il frappe alors tous les yeux.
C’est plutôt par des jugements et par des pensées, par mes idées et par leur forme qu’en ce travail, comme partout, je m’efforce bien ou mal, d’être assez neuf ou assez intéressant pour mériter l’attention des quelques lecteurs dont l’approbation m’est chère. […] On l’y a tellement purgée de tout préjugé destructeur, qu’elle n’y peut faire de mal et qu’elle y peut faire au contraire une infinité de biens… En Angleterre, tout homme qui attaque la religion, l’attaque sans intérêt, et quand même il aurait raison dans le fond, il ne ferait que détruire une infinité de biens pratiques pour des vérités purement spéculatives. » Mais en parlant, en toute occasion, avec la mâle liberté de Montesquieu, Swift oubliait qu’il était membre et membre ambitieux de l’Église anglicane. […] Et nous ne connaissons qu’une partie de ses épreuves ; nous comptons aisément ce que le neveu négligé de Godwin, ce que l’ami mal récompensé d’Oxford, ce que le courtisan trahi du prince de Galles, a enduré d’humiliations et nourri de ressentiments ; mais nous ne saurons jamais ce qu’a souffert par un juste retour le meurtrier de Vanessa, l’indigne époux de Stella, ni quels fantômes l’ont hanté pendant dix années de folie. […] Mais les maux de la vie, le sentiment de sa brièveté, des échecs irréparables, parfois un penchant naturel de l’âme donnent, pour nous, au monde et à la vie une tout autre figure.
Dans cette multiplicité d’aveux échappés aux plus cruels tournions, le chant, le récitatif, la parole, l’interjection, le cri, le rire sardonique se succèdent et s’entremêlent avec une telle vérité pathologique, une telle science toxicologique, une telle variété de mouvements passionnés, désolés et révoltés, selon que les espérances accordées et frustrées, la pitié due à un cuisant remords obstinément déniée, le pardon d’une faute amèrement déplorée à jamais rendu impossible, les instantes supplications repoussées, les repentirs ardents dédaignés, enfin le terrifiement dernier du désastre irrémédiable viennent se retracer dans une énumération haletante, que es moment forme à lui seul un drame dans le grand drame, et par ses sombres couleurs et son épouvantable angoisse, se détache de ce qui l’a précédé ainsi que de ce qui va suivre, comme une évocation qui aurait brisé les scellés de l’abîme des maux, pour surgir devant nos regards pétrifiés, pour leur dévoiler subitement tout l’infini de la douleur, et chacun de ses râles impuissants. […] Encore ces fleurs, un peu maladives, du génie grec, les tragédies d’Euripide : « Vos dieux sont en vos âmes : ils sont les cruelles passions, détruisant l’équilibre salutaire des besoins : voyez les effets de ces maux ; tenez Hermione et Phèdre pour les images de vos passions. » Mais à cette race exemplaire de dialecticiens ni le récit ni le drame ne pouvaient suffire longtemps : ils exigeaient une vie toute de notions pures, bellement enchaînées : ils exigeaient la forme du roman dialectique. […] Ses livres sont mal composés, les notions ne s’expliquent point l’une par l’autre : par instants, malgré ces défauts, une phrase surgit, qui bouleverse l’âme et la force à créer la plus intense vie d’une émotion précise. […] La composition, comme toujours, est faible : un directeur de théâtre serait fou, qui accueillerait un drame aussi mal construit.
Si un pianiste exercé veut faire attention à toutes les notes d’une gamme rapide, il contrarie en le suspendant le jeu automatique de ses mains avec les associations inconscientes de ses mouvements ; il leur enlève au profit de sa conscience analytique une partie de l’innervation nécessaire, et la synthèse naturelle se fait mal. […] Quelle est maintenant (chose plus importante et généralement mal expliquée) la nature du lien des représentations avec l’objet extérieur, qui fait que nous attribuons une valeur objective à notre jugement et complétons ainsi notre affirmation ? […] On peut, par le langage, mal traduire l’état réel de son intelligence, mais la croyance interne et vraie est toujours une traduction exacte de la contrainte subie par nos facultés sensitives et représentatives. […] Il n’y a plus qu’à savoir si on ne s’est point trompé de principe, en prenant par exemple le feu pour principe de la brûlure : c’est une simple affaire de vérification et d’expérimentation ; mais présomptivement, nous sommes certains que le principe (bien ou mal connu) aura toujours la même conséquence.
à ces grands faiseurs de silhouettes crayonnées sur les murs de l’antichambre, je préfère encore les satiriques, race acharnée et mal élevée, il est vrai, mais la satire même finit par arriver à je ne sais quelle ressemblance violente, qui ressemble à la comédie ou à l’histoire, comme le bistouri qui sauve ressemble au couteau qui égorge ! […] Cette représentation, où Marivaux et sa légitime interprète se montraient dans tout leur éclat, pour la dernière fois, fut empreinte de je ne sais quelle fièvre inquiète avec toutes les agitations de la fièvre ; et le public et les comédiens semblaient animés des mêmes regrets ; les comédiens jouaient mal, le public écoutait mal, Tartuffe (on jouait encore Tartuffe !) […] L’homme, de son côté, tout honteux d’être si ému, s’était retourné contre la muraille, et il tenait sa tête dans ses mains ; ses épais cheveux, mal en ordre, retombaient sur ses mains, et il pleurait.
À cela je ne vois aucun mal. […] Mais quand c’est le même sujet qui revient toujours, qui s’impose à l’artiste comme une idée fixe, qu’il s’insinue sous toutes les formes même là où il n’a rien à faire, c’est que le créateur, atteint d’un mal secret, a capitulé devant les éléments. […] Quand on leur reproche à tous deux d’avoir mal compris la mythologie et l’histoire antiques, d’avoir faussé l’esprit de la tragédie grecque, on oublie ce que furent leurs précurseurs, on oublie les obligations auxquelles ils ne pouvaient alors se soustraire, on méconnaît leur modernité si hardie, et c’est comme si on leur reprochait d’avoir été des artistes et non des archéologues. […] — Et les principes directeurs offrent une probabilité du même genre : le christianisme, qui fut un élément essentiel du moyen Âge, semble étranger au principe de la Renaissance et à celui de la Révolution ; en théorie, oui ; dans la pratique, il a gardé une importance considérable, non seulement en ce qu’il a d’éternellement vrai, mais aussi en ce que ses dogmes ont de suranné et d’inhumain : l’Église romaine commande encore à des millions de consciences ; la notion chrétienne du Mal trouble encore notre morale et même notre droit pénal ; bien plus : l’intolérance haineuse des « libres penseurs » est elle-même une action du christianisme qui entrave ainsi l’évolution de cette humanité qu’il avait jadis délivrée.
Ses Bergeries, publiées pour la première fois en 1625, ne sont qu’une espèce de comédie pastorale en cinq actes, assez mal cousus ensemble, où les personnages ne parlent qu’un langage de convention, qui n’est ni celui de la Cour ni celui du village, mais dont le mélange dut plaire, en effet, aux ruelles de ce temps-là, où régnaient les bergers de L’Astrée. […] On voit que Maynard prêterait un peu au ridicule et qu’il offrirait au besoin un type de l’écrivain atteint du mal de province et qui a la peur d’être devenu suranné avant l’âge.
Le nom de Meilhan d’abord y est mal écrit Meillan), ce nom que la vraie marquise avait tant de fois mis de sa main et très correctement sur l’adresse de ses lettres à son ami. […] On rajusta tant bien que mal un semblant de biographie ; Crispin en marquise fit tous ses grands airs, et la comédie a réussi.
On se donne bien du mal pour arriver à être juste, à voir juste, et quand on a à peu près atteint le point, entrent à l’instant de nouveaux venus qui brouillent tout encore une fois, remettent tout en jeu, et, au nom de leurs passions ou de leurs convictions, ne veulent voir qu’un côté, sont excessifs dans l’enthousiasme comme dans l’invective ; et c’est ainsi que tout est à recommencer toujours. […] Si l’on a égard à son humeur, à ses pétulances et au caractère aussi de la marquise, on trouvera qu’il ne tint pas trop mal sa gageure, puisque cette liaison dura plus de quinze ans et ne fut rompue que par la mort.
. — « Douleur, tu n’es pas un mal », dit le philosophe stoïcien que le mal dévore.
Il avait eu une grande part à la Paix de l’Église ; il savait ce qu’elle avait coûté de peines et de travaux… L’archevêque étouffait d’abord, autant qu’il le pouvait, toutes les semences de discordes, persuadé, comme tous ceux qui sont propres au gouvernement, que jamais une affaire n’est plus aisée à terminer que dans le moment de sa naissance, et qu’il est incomparablement plus aisé de prévenir les maux que de les guérir. […] L’un et l’autre s’acquittèrent assez mal de leur tâche : « Le prélat n’en fut point fâché, remarque à ce sujet Legendre, qui a bien son grain de causticité ; il aimait à briller aux dépens d’autrui ; c’était assez sa coutume de faire agiter devant lui des problèmes de toute sorte, afin d’avoir le plaisir de donner à ce qu’on avait dit, et qu’il ne manquait point de résumer exactement, un tour si fin, si délicat, que l’on admirait dans sa bouche ce qui avait paru plat dans celle des autres. » On aime d’ordinaire ce qu’on fait bien : le prélat aimait à jouer aux arbitrages.
Les dix années qu’elle passa avec son ami furent tout entières consacrées par elle à adoucir son amertume, à favoriser ses goûts, à y entrer autant qu’elle le pouvait, soit qu’il voulût jouer la tragédie, — ses propres tragédies, — à domicile (ce qu’il fit d’abord avec le feu et l’acharnement qu’il mettait à toute chose), soit qu’il lui plût de s’enfermer et de tirer le verrou pour travailler comme un forçat, versifier jour et nuit ou étudier le grec à mort : c’étaient les seules diversions assez fortes pour l’absorber et pour l’aider, tant bien que mal, à endurer les invasions intermittentes de la Toscane par les armées républicaines. […] Où est en cela le mal ?
Fromentin lui même, quoiqu’il affirme « qu’avec le burnouss saharien ou le mach’la de Syrie on ne représentera jamais que des Bédouins », et non d’antiques Hébreux, ne peut s’empêcher quand il voit les Arabes sous un beau jour et quelque noble tribu en marche, quelque noble chef donnant audience ou exerçant dignement l’hospitalité, d’être frappé avant toute réflexion et de faire un rapprochement instantané, involontaire, avec cette antique civilisation patriarcale ; sa sensation de peintre vient, bon gré, mal gré, à la traverse de sa doctrine classique par trop respectueuse. […] Pénétrer plus avant qu’il n’est permis dans la vie arabe, me semble d’une curiosité mal entendue.
À un moment, cette reine fière, sensible, élégante, bonne au fond et d’un cœur bienfaisant, s’aperçut avec douleur, avec indignation, qu’elle était méconnue, calomniée, outragée même du peuple de Paris ; qu’elle était impopulaire : Versailles était alors bien loin de Paris, et tout ce qu’on en racontait en mal était accueilli avidement et grossi à l’envi par la crédulité ou par la haine. […] Je m’en suis tirée en Dauphine un peu novice, mais cela n’a pas mal fait… » J’aime à observer ce premier développement d’une nature pure, honnête et droite ; c’est, quoi qu’il arrive, un premier fonds inestimable.
Je ne sais quel est son projet dans ce moment : nous vivions fort bien ensemble, et même, depuis quelque temps, on me faisait compliment de mes attentions pour lui et sa femme ; il a imaginé de chercher l’intimité, et, pour s’y introduire, il a écrit (c’est son expédient ordinaire dans les grandes affaires, quoique jusqu’ici il y ait assez mal réussi) ; sa lettre est adressée à un homme de sa maison, mais en même temps il lui a indiqué un homme en qui j’ai confiance, pour me la montrer. […] On pourra sourire de quelques détails qui sentent la maman. — Ayez plus soin de vos dents, on dit que vous les négligez. — Mettez un corset, crainte, comme on dit en allemand, d’élargir et de paraître déjà la taille d’une femme sans l’être. — Le monter à cheval gâte le teint, et votre taille à la longue s’en ressentira et paraîtra encore plus. — Les premières lettres sont remplies de ces prescriptions qui tiennent au corps, à la santé, et qui ont des conséquences morales aussi pour les personnes en évidence et dont toute la vie se passe en public : « Je vous prie, ne vous laissez pas aller à la négligence ; à votre âge cela ne convient pas, à votre place encore moins ; cela attire après soi la malpropreté, la négligence et l’indifférence même dans tout le reste de vos actions, et cela ferait votre mal ; c’est la raison pourquoi je vous tourmente, et je ne saurais assez prévenir les moindres circonstances qui pourraient vous entraîner dans les défauts où toute la famille royale de France est tombée depuis longues années64 ; ils sont bons, vertueux pour eux-mêmes, mais nullement faits pour paraître, donner le ton, ou pour s’amuser honnêtement, ce qui a été la cause ordinaire des égarements de leurs chefs qui, ne trouvant aucune ressource chez eux, ont cru devoir en chercher au dehors et ailleurs.
Après le départ de l’Empereur, ses lieutenants de l’armée d’Espagne s’entendent mal entre eux ou ne se concertent qu’imparfaitement. […] Ils n’ont pas tant de troupes à aventurer sur le continent. » — Jomini prit la liberté de répliquer que « s’il était puéril de croire toujours à des combinaisons parfaites de la part de ses adversaires, il serait dangereux de croire toujours à leur incapacité ; que Wellesley (Wellington), au milieu du pays soulevé pour lui et appuyé de 80 à 400,000 Espagnols, ayant sa retraite dans tous les ports de l’Espagne sur les quatre points cardinaux, pouvait sans danger entreprendre une opération qui déciderait du sort de l’Espagne. » — L’Empereur coupa court à la discussion en disant : « Le mal est fait ; la suite apprendra s’il doit en résulter un bien. » Jomini en vint ensuite à la partie délicate des griefs de Ney, qui résistait à être mis sous les ordres de Soult, quoique celui-ci fût son ancien.
Je barbouille du papier à force, quand la tête me fait mal ; j’écris tout ce qui me vient en idée : cela me purge le cerveau… Adieu, j’attends une cousine qui doit nous emmener à la promenade ; mon imagination galope, ma plume trotte, mes sens sont agités, les pieds me brûlent. — Mon cœur est tout à toi. » Si calme, si saine qu’on soit au fond par nature, il semble difficile qu’en ce jeune train d’émotions et de pensées, on reste longtemps à l’entière froideur, avec tant de sollicitations d’être touchée. […] Dans ces pages que les yeux contemporains, atteints du même mal et épris de la même couleur jaunissante, admirent comme également belles, et qu’une sorte d’unanimité complaisante proclame, le temps, d’une aile humide, flétrit vite ce qui doit passer, et laisse, au plein milieu des objets décrits, de grandes plaques injurieuses qui font mieux ressortir l’inaltérable du petit nombre des couleurs légitimes et respectées.
Le mot de Voltaire, Ne disons pas de mal de Nicolas, cela porte malheur, fit fortune et passa en proverbe ; les idées positives du xviiie siècle et la philosophie condillacienne, en triomphant, semblèrent marquer d’un sceau plus durable la renommée du plus sensé, du plus logique et du plus correct des poëtes. […] Ce sont des médecins empiriques ; ils s’attaquent à des vices réels, mais extérieurs, à des symptômes d’une poésie déjà corrompue au fond ; et, pour la régénérer, ils ne remontent pas au cœur du mal.
Par la raison que leurs crimes, leurs injustices, le mal qu’ils justifient par l’utilité et le bien public, que tout cela ne sert à rien : leurs agitations sont vaines et ne changeront rien à l’action toute-puissante de causes éternelles. […] On n’aime pas alors l’histoire pour elle-même ; et il n’est personne, dans ces études, qui ne recherche les remèdes des maux dont souffre la monarchie française.
Par suite, une juste proportion entre l’histoire et la réalité qu’elle veut retracer exige qu’on mette en pleine lumière la tragicomédie dont l’apparition est devenue une date du théâtre français en laissant dans la pénombre ses deux sœurs mal nées. […] Telle œuvre est supérieure, parce qu’elle exprime et éveille beaucoup de sentiments tempérés (Gil Blas) ; telle autre, parce qu’elle peint une passion déchaînée dans toute sa violence (Manon Lescaut, le Père Goriot) ; celle-ci, parce qu’elle suscite des émotions nobles, comme la pitié pour les faibles, l’amour de la justice, la sympathie pour la vie universelle (les Misérables) ; celle-là, parce qu’elle va toucher au fond du cœur des fibres secrètes, rarement ou jamais atteintes jusque-là, parce qu’elle donne, comme on l’a dit, un nouveau frisson (les Fleurs du mal).
Adrienne jouait Pauline, et n’était pas trop mal secondée par ses camarades ; il y avait un Sévère qui se distinguait par la vérité de son jeu. […] On expliqua plus naturellement cette mort par une dose d’ipécacuanha prise mal à propos.
Cependant, après avoir lu ce morceau d’une exactitude inexorable, et l’avoir goûté en ce qu’il a de sobriété piquante, je n’ai pu m’empêcher d’écrire en marge cette impression plutôt morale que littéraire : « C’est très bien, mais pourquoi cette âcreté mal dissimulée pour des choses si simples ? […] Et ce cœur souffrait d’un mal celé jusqu’à sa dernière minute.
Fillars, méchante gazette de l’endroit, homme envieux, « qui va tout doucement, et qui n’a pas de plus grand plaisir que quand il voit tomber ceux qui voulaient courir plus vite que lui » ; qui est au courant de tout ce qui fait le mal d’autrui, et qui, s’il rencontre des gens heureux, se dit : Je les attends, ce caractère est parfaitement dessiné et mis en jeu. […] C’est ainsi encore qu’il fera dire à un solliciteur, dans L’Intrigant malencontreux : « Monsieur Mitis, tâchez donc de placer mon fils dans un bureau ; vous me rendrez un grand service : il n’est bon à rien du tout. » Et ceci encore, dans le proverbe de Madame Sorbet, à qui on propose de jouer la comédie : « La comédie, je crois que nous la jouerions fort mal tous les deux ; nous avons trop de franchise, trop de naturel pour faire jamais de bons acteurs. » Marmontel, définissant un genre de finesse analogue à celui-ci, l’appelle une certaine obliquité dans l’expression qui donne à la pensée un air de fausseté au premier abord.
La joie était le fond de son âme et comme l’expression de la santé de son esprit ; c’est elle qui a écrit à Saint-Évremond : « La joie de l’esprit en marque la force. » On a dit d’elle qu’à table, tant elle s’y montrait animée et enjouée, « elle était ivre dès la soupe » ; ivre de belle humeur et de saillies, car elle ne buvait que de l’eau, et les ivrognes, qu’on les appelât Chapelle ou Vendôme, furent toujours mal venus près d’elle. […] Ninon ajoute : J’ai lu devant lui votre lettre avec des lunettes, mais elles ne me siéent pas mal ; j’ai toujours eu la mine grave.
Vieux, devenu gros et replet, il eut une faiblesse de jambes dont il se traita d’abord assez mal ; il en résulta un affaiblissement même de l’esprit : Comme je fus longtemps privé de tout commerce, dit-il, le bruit se répandit que mon esprit n’était plus comme auparavant, et peut-être sur quelque fondement. […] Il avait peu, on le voit, le sentiment du bien et du mal, du juste et de l’injuste.
Après vingt ans d’absence ou de négligence, en rentrant dans l’héritage paternel, il a à défendre ses intérêts, à regagner ce qu’il a perdu par la mauvaise foi du paysan ; ses voisins ont empiété tant qu’ils ont pu sur lui et lui ont rogné ses terres ; ses fermiers le paient mal, ses marchands de bois ne le paient pas du tout ; il chicane, il menace, il montre qu’il n’est pas homme « à se laisser manger la laine sur le dos » ; enfin, aux champs comme ailleurs, et plus qu’ailleurs, il retrouve la même espèce humaine qui obéit à ses intérêts, à ses cupidités, tant qu’elle peut et aussi longtemps qu’on la laisse faire. […] Là, il eut affaire à son maire, avec qui son garde était mal, et il entra dans les procès et les tracasseries pour n’en plus sortir.
— « Penses-y deux fois, je t’en prie : À jeun, mal chaussé, mal vêtu, Pauvre diable, comment peux-tu Sur un billet de loterie Mettre ainsi ton dernier écu ?
— Saint-Simon croyait au mal absolu et héréditaire de la bâtardise. […] X Encore une fois, ce fut celle-là qui acheva le mal commencé par les autres, et qui fut la fin de cette monarchie française d’une durée de dix-sept siècles !
Il la hait quoique moraliste et quoique chrétien, mais c’est qu’il est un moraliste chrétien d’une espèce très particulière, très passionnée et très ardente… Il brûle de la flamme du bien contre le mal. […] Le miracle, qui est le signe des Saints (hoc signo vinces), le miracle, qui démonte tant de gens mal en selle, ne le démonte point.
Mais en sortant de table, une très jeune fille, qui avait bien écouté, vint me dire : « Il me semble que le docteur raisonnait mal tout à l’heure. […] Telle ou telle d’entre elles pourrait cependant, ici encore, passer en contrebande, surtout quand les mécanismes inhibitifs fonctionnent mal ; et sur elles encore s’exercerait la « recherche psychique ».
Puisque, dans les représentations scéniques qui sont plus particulièrement à l’usage du peuple, dans cette suite de tableaux compliqués et vastes où il se dépense souvent tant d’artifice et de talent, les auteurs ne visent point à cette reproduction entière et profonde de la nature, qui est le suprême de l’art, puisqu’ils font des sacrifices à l’appareil, à l’émotion, et, pour tout dire, à l’effet, il est tout simple qu’on leur demande plus ouvertement de pousser au bien plutôt qu’au mal, et à la vertu plutôt qu’au vice.
La quinzaine n’a pas été trop mal remplie.
Par ses journaux du soir, l’Étoile puis la Gazette, il a dit et fait tout le mal possible, il a conseillé et loué toutes les mesures perverses et violentes, les censures, etc.
Cela a paru même aller quelquefois jusqu’à la faiblesse et à la peur ; ils en sont bien mal payés aujourd’hui.
Venir s’y attaquer comme à l’un de ceux qui offrent le plus d’exemples de mauvais goût, c’est mal tomber vraiment et c’est avoir la main malheureuse.
On l’avait vu quelquefois, malgré sa timidité un peu gauche, accorder sa confiance à des dames de la cour, telles que mesdemoiselles de Hautefort et de La Fayette ; ces intimités n’étonnaient pas dans un prince chaste et dévot, car on savait que la sagesse du roi égalait quasi celle des dames les plus modestes ; et ces intrigues, non moins innocentes que frivoles, ne ressemblaient pas mal aux platoniques tendresses des romans de Scudéry, ou, si l’on aime mieux, à des chuchotages entre les novices d’un couvent.
Toujours fidèle à la destinée de la patrie, qui n’est que la destinée de la Révolution, il se range parmi ceux qui défendent et sauvent cette grande cause ; en sont-ils indignes en eux-mêmes, il les suit encore par devoir à travers les maux qu’ils infligent, et dont il gémit sans que sa constance s’ébranle : Mens immota manet, lacrymæ volvuntur inanes.
Il est curieux de la voir, dans cette correspondance, protester à tout propos contre l’idée qu’on pouvait avoir de son crédit : « Je ne suis qu’une particulière assez peu importante ; je ne sais pas les affaires, on ne veut point que je m’en mêle, et je ne veux point m’en mêler. » Tantôt elle se compare avec pruderie à une ingénue de quinze ans : « Je suis un peu comme Agnès, je crois ce qu’on me dit, et ne creuse pas davantage. » Tantôt elle se vieillit avec une complaisance qui fait sourire : « Si vous me voyiez, madame, vous conviendriez, que je fais bien de me cacher : je ne vois presque plus ; j’entends encore plus mal ; on ne m’entend plus, parce que ma prononciation s’en est allée avec mes dents, la mémoire commence à s’égarer ; je ne me souviens plus des noms propres, je confonds tous les temps, et nos malheurs joints à mon âge me font pleurer comme toutes les vieilles que vous avez vues. » Sans croire tout à fait à ce renoncement absolu au monde, on est pourtant forcé de reconnaître qu’il y a dans ce langage de madame de Maintenon plus de manie que d’hypocrisie, et qu’à force de se faire, en paroles, insignifiante et inactive, elle l’était sur la fin réellement devenue.
On voit que la mesure académique a varié depuis six ans ; elle n’avait déjà pas mal varié depuis Atala ; espérons qu’elle se modifiera encore.
Elle ne produisit que peu de bien ; elle n’empêcha que peu de mal, en raison des préjugés, des passions, des souvenirs flagrants qui s’agitaient dans la société.
« On parle, ajoutait-il, et l’on écrit, en général, pour être compris et les mots qui s’appliquent nettement et exclusivement à la chose qu’on veut désigner sont nettement les meilleurs. » 91 « Il ne s’agit pas, développe encore Rémy de Gourmont en l’ouvrage précité, il ne s’agit pas de bannir les termes techniques, il s’agit de ne pas traduire en grec les mots légitimes de la langue française et de ne pas appeler céphalalgie le mal de tête.
L’imitation sied particulièrement mal aux Anglais ; leurs essais dans le genre de grâce et de gaieté qui caractérise la littérature française, manquent pour la plupart de finesse et d’agrément.
La tendresse conjugale, lorsqu’elle existe, donne, ou les jouissances de l’amour ou celles de l’amitié, et je crois avoir déjà analysé les unes et les autres, il y a dans ce lien cependant quelque chose de particulier, en bien et en mal, qu’il faut examiner.
Malheur aussi à celui dont l’évolution trop violente et trop brusque a mal équilibré l’économie intérieure, et qui, par l’exagération de son appareil directeur, par l’altération de ses organes profonds, par l’appauvrissement graduel de sa substance vivante, est condamné aux coups de tête, à la débilité, à l’impuissance, au milieu de voisins mieux proportionnés et plus sains !
. — Un cri aigu d’un certain timbre part d’une chambre voisine, et l’on se figure un visage d’enfant qui pleure parce que sans doute il s’est fait mal. — La plupart de nos jugements ordinaires se composent de liaisons semblables.
Il est plus facile à un orateur politique d’écraser ses ennemis, de conjurer des spectres, de contenir des torrents, de figurer vivement le mal que fera le parti contraire, et le bien que son parti fera, que d’indiquer en termes propres un seul moyen d’écarter le moindre des dangers et de produire le plus léger des biens : on manque d’ordinaire à la transformation des métaphores en idées.
Il peut abuser des faits, mal raisonner sur eux : c’est d’eux qu’il part, et par eux qu’il se guide.
Cet hymne est vraiment trop plébéien et se plie mal à saluer les rois.
Cela expie son égoïsme et sanctifie son bien souvent mal acquis et dont il fait mauvais usage.
Le mal de notre temps, c’est l’âpreté dans les jugements, quelque chose de rogue et de dur, un ton âpre que l’on aurait tout au plus droit de prendre, si l’on était en possession de la vérité absolue.
Ce qu’il y a de moins mal, c’est l’éloge qu’il fait de l’utilité & de la noblesse de la profession d’avocat.
Trente Vadius ne feront jamais autant de mal aux lettres qu’un écolier en bonnet de docteur… » (Itinéraire de Paris à Jérusalem).
« L’amour veut être libre et dégagé des affections de la terre, de peur que sa lumière intérieure ne se trouve offusquée, et qu’il ne se trouve ou embarrassé dans les biens, ou abattu par les maux du monde.
Ainsi les ouvrages de ces hommes célèbres portent, en bien et en mal, l’empreinte de ce qu’ils ont choisi et de ce qu’ils ont rejeté eux-mêmes de la religion.
Vous vous moquez ; ils ne sont que mal faits. " ces copistes d’un modèle bizarre sont insipides, parce que leur bizarrerie est d’emprunt ; leur vice ne leur appartient pas ; ce sont des singes de Sénèque, de Fontenelle et de Boucher.
Un mouvement que la raison réprime mal, fait courir bien des personnes après les objets les plus propres à déchirer le coeur.
Le public a voulu juger quand il étoit encore mal informé des faits.
Il en serait fort mal récompensé s’il était d’un naturel confiant mais sire lièvre escompte d’avance l’ingratitude de son obligé, ce qui lui permet d’en esquiver les manifestations.
Pour qu’il tombe de plus haut et qu’il se brise mieux, il l’élève ; puis, quand il l’a mis au plus haut de ses facultés exagérées, il le précipite dans cette conclusion (page 129) : « Il est le modèle achevé, pour ainsi dire idéal, de ces riches et pauvres natures, communes à toutes les époques, mais qu’il était donné à notre xixe siècle de mettre en pleine lumière… qui sont à la fois sincères et fausses, aptes et inaptes à tout, font le bien avec ardeur, le mal avec passion, aiment l’idée pour l’idée, l’art pour l’art, et, sublimes égoïstes, se prêtent toujours pour ne se donner jamais.
Forcément il sera toujours, dans le mal qu’il veut continuer, au-dessous de ce qu’il a été.
47. » Dans cet ouvrage, qui est, comme on le voit, un véritable éloge, Tacite a réuni la philosophie à l’histoire, et l’histoire à l’éloquence : on y retrouve à chaque ligne l’âme d’un citoyen qui porte tout le poids du malheur de la vertu, et qui, en peignant les maux de sa patrie, les éprouve une seconde fois.
Quand un nombre suffisant d’hommes et d’esprits sont arrivés à penser sur un point donné d’une certaine manière ; quand le groupe est devenu assez nombreux, assez considérable, bon gré, mal gré, on compte avec lui, on le reconnaît, on le respecte, ne pouvant l’exterminer, ni l’écraser, ni le proscrire, comme on faisait autrefois. […] Vous êtes mal venus ensuite à vous plaindre de ces ovations décernées à vos adversaires, et ne voyez-vous pas que c’est vous-mêmes qui les avez préparées ? […] Cette école essaye aujourd’hui, un peu tard et après coup, par quelques-uns de ses disciples les plus distingués, de réparer le temps perdu et de se mettre tant bien que mal au courant.
Le visage décomposé de Faust contraste avec le sourire mal déguisé, mais triomphant, du génie du mal. […] ” « Le pasteur explique tout à la jeune fille et restitue le véritable sens aux propos mal compris du père.
XI Parlons donc en peu de mots de ces deux questions, si mal posées et si mal résolues par les théoriciens de la fantaisie et par les romanciers diplomatiques. […] Ils administrent mal, voilà tout leur crime aux yeux des Européens.
La mort seule est juste, et dit hardiment à nos mémoires le bien et le mal ; elle nous fait notre épitaphe sur une pierre de granit, que ni les flatteurs ni les dénigreurs n’effaceront plus. […] Votre Europe si corrompue fait mal à voir. […] Je ne sais pas comment se nomme mon culte ; mais j’adore un Dieu maître du monde qui me récompensera si je fais le bien, et me punira si je fais le mal.
Cependant je suis de plus en plus décidé à ne pas quitter le service du duc, car, outre que mes obligations envers lui sont telles que, quand je lui sacrifierais ma vie, ce ne serait pas encore assez pour payer ma dette, je crains bien de ne pas trouver à une autre cour plus de repos que dans ses États ; les maux que je subis sont de telle nature qu’ils m’atteindront partout ailleurs autant qu’à Ferrare. » Ces lettres sont d’autant moins suspectes d’adulation pour le duc de Ferrare, qu’elles sont écrites hors des États de ce prince, et adressées à un de ses ennemis, Scipion Gonzague, parent et ami des Médicis. Quelques expressions attestent déjà, dans ces lettres, que le Tasse portait son mal en lui-même, et ne l’attribuait pas encore à la famille d’Este, qui le comblait d’égards, d’amitié, et peut-être d’amour. […] « Sans égard, dit-il, pour ma santé et pour ma vie, j’ai volontairement aggravé mon mal par les excès d’une intempérance sans borne, de telle façon que ma mort pourrait en être la conséquence (8e volume des Lettres).
Quand donc me viendrez-vous ici visiter, madame ma bonne amie, étant bien désireuse de votre vue, qui me ragaillardiroit en tous mes chagrins que fussent-ils que montant tout vous pèse et se tourne à mal contre vous ? […] La reine et ce favori, mal servis par une cour désaffectionnée, ne soupçonnaient rien encore de la conjuration, que les conjurés, accourus, pour le crime, des châteaux les plus éloignés de l’Écosse, étaient déjà rassemblés, armés et debout dans l’antichambre de la reine. […] Melvil, un de ses confidents les plus intimes, dit dans les mémoires qu’il écrivit sur le règne de sa maîtresse : « Je lui trouve toujours, depuis le meurtre de Rizzio, un cœur plein de rancune, et c’était mal lui faire sa cour que de lui parler de sa réconciliation avec le roi !
Bergson est presque aussi mal comprise par ses adversaires que par ses partisans. […] Quand il s’esquintait pour être et à être romantique il se donnait un mal de chien pour obtenir un mystérieux en papier d’emballage. […] (Car on voit mal comment un éther serait un conducteur parfait de l’attraction et de la gravitation, comment un éther conduirait instantanément de l’attraction et de la gravitation à distance, comment un éther ferait des transports instantanés de forces qui seraient celles de l’attraction et de la gravitation.)
Les jarres mêmes du cellier, les cratères et les rythons du festin, Céramos, Pithos, Cantharos, vaguement modelés en échansons d’argile, escortent péniblement les buveurs : ils trébuchent sur leurs pieds encore pris dans le moule du socle, comme des cruches mal équilibrées, et laissent couler par leurs fissures la rouge liqueur dont ils sont gorgés. […] Cette école du mal mettait en pratique ses dogmes atroces, Locuste y faisait son apprentissage. […] La nuit, tu affublais les candidats d’une peau de faon, tu leur versais du vin, tu les aspergeais d’eau lustrale, tu les frottais de son et d’argile ; après la cérémonie, tu leur faisais dire : « J’ai fait le mal et j’ai trouvé le bien. » Tu te vantais de hurler mieux que personne, et je le crois ; avec une aussi belle voix, on doit primer par l’éclat des hurlements.
Rien n’est mal et rien n’est bien. […] Les figurants se tiennent mal, et ne vagissent que des expressions sans nouveauté, mais une scène est écrite. […] Le premier Chant de Maldoror, sous sa première forme (1868) est un poème dans lequel l’esprit du mal (Maldoror), après avoir refusé d’être sauvé par Dazet, l’esprit du bien, est maudit par lui.
Après François Ier, c’est Henri II, dont le règne passa entre le coup d’épée de Jarnac et le coup de lance de Montgomery ; Henri II, livré à un autre croissant, non moins honteux que celui du Turc, car c’était le croissant de Diane, la concubine de son père, contre lequel l’auteur des Guise ne trouve que cette phrase à coller : « Guerres malheureuses, pays plus malheureux encore, prodigalités mal placées ; il n’en fut pas moins pleuré par les Français. » Et cela le désarme, ces larmes françaises. […] C’est que, tel coup joué, et même tous les coups joués par Philippe II dans la politique de son temps, ont été mal joués ; — car il a perdu la partie, car le Catholicisme, la Papauté, le monde chrétien organisé pendant tant de siècles, sont maintenant perdus, et ce n’est plus avec ces sublimes enjeux qu’on recommencerait la partie ! […] Seulement, pourquoi, — s’il n’est qu’un joueur en perte par le fait d’une succession de fautes épinglées si minutieusement dans l’histoire de Forneron, et auxquelles j’ajoute, moi, pour le compte du Catholicisme, la faute de s’être trop pris pour la Papauté, par amour de la Papauté, — pourquoi l’homme victime de tant de fautes nous paraît-il obstinément plus grand, pourtant, qu’un joueur en perte aux échecs mal compris de la politique, et reste-t-il, malgré ses fautes, dans le sentiment de l’Histoire, quelque chose qu’il est impossible de rapetisser ou de déshonorer, et qui est toujours Philippe II, l’imposant Philippe II.
A Rome je ne vois à y ranger que Plaute, Plaute mal apprécié encore1, peintre profond et divers, directeur de troupe, acteur et auteur, comme Shakspeare et comme Molière, dont il faut le compter pour un des plus légitimes ancêtres. […] C’est lui qui, dans la scène du Pauvre, a pu faire dire à don Juan, sans penser à mal, ce mot qu’il lui fallut retirer, tant il souleva d’orages : « Tu passes ta vie à prier Dieu, et tu meurs de faim ; prends cet argent, je te le donne pour l’amour de l’humanité. » La bienfaisance et la philanthropie du xviiie siècle, celle de d’Alembert, de Diderot, de d’Holbach, se retrouve tout entière dans ce mot-là. […] On a cru, d’après un passage de la préface des Fâcheux, qu’il aurait eu dessein de faire imprimer ses remarques et presque sa poétique, à l’occasion de ses pièces ; mais, à mieux entendre le passage, il en ressort que cette promesse, mal d’accord avec sa tournure de génie, n’est pas sérieuse en effet ; ce serait plutôt de sa part une raillerie contre les grands raisonneurs selon Horace et Aristote. […] Sa présence me fit oublier mes résolutions, et les premières paroles qu’elle me dit pour sa défense me laissèrent si convaincu que mes soupçons étoient mal fondés, que je lui demandai pardon d’avoir été si crédule. […] Mais, ajouta-t-il, vous me paraissez plus mal que tantôt. — Cela est vrai, lui répondit Molière, j’ai un froid qui me tue. — Baron, après lui avoir touché les mains qu’il trouva glacées, les lui mit dans son manchon pour les réchauffer ; il envoya chercher ses porteurs pour le porter promptement chez lui, et il ne quitta point sa chaise, de peur qu’il ne lui arrivât quelque accident du Palais-Royal dans la rue Richelieu, où il logeoit.
C’est une vie philosophique et qui nous présente Yousouf comme un sage méditatif, un peu triste dans son amour hautain et rempli d’une quasi certitude du mal universel. […] Le Mal. […] Ce n’est pas mal du tout. […] « La dernière soirée des amis », qui précède leur départ pour l’armée, est le chapitre IX de la Première partie (Le Mal. 1914-1917, La-Chaux-de-fonds, Éditions d’Action sociale, 1918, p. 34-42). […] À partir de 1923 et surtout de 1925, la presse s’intéresse beaucoup plus à la littérature allemande, mais l’expressionnisme, alors sur le déclin, reste très mal connu.
Innocente illusion, secret subterfuge de l’amour propre qui ne fait de mal à personne et qui console toujours un peu : il est doux de se dire, quand on a jeté le pinceau pour la plume : Quel grand peintre j’aurais été ! […] Il était mince, élancé, fluet comme les colonnes fuselées des nefs du quinzième siècle et les boucles de sa chevelure ne figuraient pas mal les acanthes des chapiteaux. […] Le costume, il faut en convenir, n’était pas mal combiné pour irriter et scandaliser les philistins. […] C’est à contrecœur qu’ils eussent applaudi Victor Hugo : leurs hommes étaient alors Casimir Delavigne et Scribe, et l’auteur courait risque, si l’affaire tournait mal, d’être abandonné au plus fort de la bataille. […] Nous arrivons à une époque décisive de la vie de l’artiste : déjà frappé du mal dont il est mort, il était allé demander des forces à l’air tiède du Midi.
Par eux on descend le long de la montagne triste jusqu’en la cité dolente des Fleurs du Mal. […] Comme Balzac, mais en bien moindre quantité, il écrivit, très jeune, d’exécrables tomes, où nul n’aurait pu prévoir le génie futur d’une intelligence vraiment cyclique ; La Force du mal n’est pas plus en germe dans le Thé chez Miranda que le Père Goriot dans Jane la Pâle ou le Vicaire des Ardennes. […] Paul Adam a certainement souffert de cette crise de mépris : des lettrés mal informés ont cru longtemps que ses romans étaient pareils à tous les autres. […] Unique ce livre le demeurera, et dès maintenant il reste acquis à la liste des œuvres qui, à l’exclusion de tout classicisme, forment la brève bibliothèque et la seule littérature admissibles pour ceux dont l’esprit, mal fait, se refuse aux joies, moins rares, du lieu commun et de la morale conventionnelle. […] Il est fâcheux que sa vie, si mal connue, n’ait pas été toute la vraie vita abscondita ; ce qu’on en sait dégoûte de ce qu’on pourrait en apprendre.
Tout en disant assez de mal de l’extrême civilisation, M. de Meilhan, qui en demeure très atteint et très marqué, pense donc que la vie est une étoffe qui ne vaut pas grand-chose par elle-même, « et dont la broderie fait tout le prix ». […] Necker n’a jamais dit de mal ; le pire qu’on peut dire de lui, c’est qu’il n’a point connu les souverains et les Français, et qu’il s’est et a été trompé.
Il avait perdu sa mère, mais il trouva dans une belle-mère une tendresse inaccoutumée : J’ai une belle-mère à qui je dois peut-être tout mon bonheur, puisque c’est elle qui m’a donné les premiers éléments de cette éducation douce, attentive et pieuse qui m’a fait aimer de Dieu et des hommes… Ma pensée était libre auprès d’elle et l’eût toujours été si nous n’avions eu que nous pour témoins ; mais il y en avait un dont nous étions obligés de nous cacher comme si nous avions voulu faire du mal. […] Ce n’était pas, comme l’avait été Vauvenargues, un jeune stoïque croyant fermement aux vérités morales et se fondant sur les points élevés de la conscience pour fuir le mal et pour pratiquer le bien, ce n’était point une âme héroïque condamnée par le sort à la souffrance et à la gêne de l’inaction : c’était une âme tendre, timide, ardente, pleine de désirs pieux et fervents, inhabile au monde et à ces scènes changeantes où elle ne voyait que des échelons et des figures, avide de se fondre dans l’esprit divin qui remplit tout, de frayer sans cesse avec Dieu, de le faire passer et parler en soi, une âme née pour être de la famille des chastes et des saints, de l’ordre des pieux acolytes, et à qui il ne manquait que son grand-prêtre.
A-t-elle mal servi, à ces differents égards, Corneille, Racine, Molière, Despréaux, La Fontaine ? […] Les mots y sont presque toujours dans une attitude contrainte et forcée ; il faut souvent aider à la lettre pour les entendre, et je suis persuadé que s’ils avaient la liberté de se plaindre, ils avoueraient qu’ils se trouvent bien plus en presse et plus mal à leur aise dans sa prose et dans d’autres ouvrages pareils, qu’ils ne le sont dans les bons vers.
Je suis sûre que cela leur fait mal et qu’ils respirent difficilement. […] Penser par soi-même est fort rare en France dans le monde, et chez une femme c’est assez mal vu d’ordinaire ; on s’en indigne ou l’on en sourit.
Dans les villes où il passe, à Montpellier, à Nîmes, Pelleport est des plus mal accueillis par les bourgeois pour qui il a un billet de logement. […] Jusque-là il n’y avait pas de mal, et nos relations se passaient sur le pied de la plus grande politesse, lorsqu’un jour il aborda carrément l’affaire en question, et m’offrit une somme énorme pour laisser pénétrer quelques petits ballots de marchandises en Hollande.
Ce défaut a été le mien aussi, et je sais le mal qu’il m’a fait. […] « La partie n’est pas égale, disait-il ; elle n’est pas loyale de la part de ces yeux armés qui sont tout occupés à m’observer et qui se dérobent. » Le fait est que les lunettes dont se servait, même dans les circonstances solennelles, un Charles-Quint, se concevraient mal sur le nez d’un Sophocle ou d’un Périclès.
Les petits détails des armes, dans lesquels on sent encore le paysan, le mauvais cheval avec son harnachement mal tenu, et le flegme italien de ce drôle barbu, en font un charmant petit tableau. […] Les autres membres de la famille, comme je vous l’ai déjà dit, ne sont pas mal non plus ; en entendant le vieux Carle parler de son père Joseph, on éprouve du respect pour ces gens-là, et je prétends, moi, qu’ils sont nobles. » — Et c’est ainsi qu’une vive nature d’artiste sympathise avec ses semblables, les reconnaît à travers les diversités de genre et de langue, les salue, les aime, les fait revivre… et l’on est à cent lieues du cuistre, de l’être immonde, arrogant et dur.
Chimène plaide bien, mais pour la forme : on sent un peu qu’elle déclame, et il n’y a pas de mal qu’on le sente. […] Il reste en effet ; tous deux se rapprochent et se mettent à rêver, comme dans Roméo et Juliette : « Que de maux et de pleurs nous coûteront nos pères !
Cornélie, Porcie, Arrie, ces nobles dames transportées dans la situation, les eussent pu écrire à quelques égards ; elles sont d’un stoïcisme légèrement attendri, et la Française non plus, la républicaine un peu étonnée de l’être, n’y est pas absente ; le ton une fois admis, il y respire un sentiment vrai et comme de la douceur : « Puisse cette lettre te parvenir bientôt, te porter un nouveau témoignage de mes sentiments inaltérables, te communiquer la tranquillité que je goûte, et joindre à tout ce que tu peux éprouver et faire de généreux et d’utile le charme inexprimable des affections que les tyrans ne connurent jamais, des affections qui servent à la fois d’épreuves et de récompenses ‘a la vertu, des affections qui donnent du prix à la vie et rendent supérieur à tous les maux ! […] Quiconque sait aimer comme nous porte avec soi le principe des plus grandes et des meilleures actions, le prix des sacrifices les plus pénibles, le dédommagement de tous les maux. » Enfin, dans une dernière lettre du 7 juillet, elle se livre à quelques pensées d’avenir et d’espérance.
Ce n’est pas la gloire que j’irai chercher, ce n’est pas non plus une maladie morale que j’irai guérir, ce sont des maux physiques et l’ennui d’une position à laquelle je ne puis plus faire honneur, auxquels j’irai mettre un terme66. […] fit-on mal ?
Il ouvre les veines du corps social pour guérir le mal ; mais il en laisse couler la vie, pure ou impure, avec indifférence, sans se jeter entre les victimes et les bourreaux. […] Un historien n’a pas le droit de jeter ainsi son manteau sur les nudités hideuses de son siècle et de dire : « Tout est bien », quand le bien et le mal sont là sous ses yeux, demandant chacun qu’on lui fasse sur la terre la part que Dieu lui-même lui doit dans sa rétribution divine.
Auprès d’un humble feu et d’une lumière vacillante, certain de n’être point entendu, on s’attendrit sur les maux imaginaires des Clarisse, des Clémentine, des Héloïse, des Cécilia. […] L’adulation qu’il y respirait le préparait mal à la haine.
Hugo : Les mots bien ou mal nés vivaient parqués en castes : Les uns nobles, hantant les Phèdres, les Jocastes, Les Méropes ; ayant le décorum pour loi, Et montant à Versailles aux carrosses du roi… Et il est vrai pourtant que les deux images s’équivalent, si l’on tient compte de la différence des temps. […] L’idée chasse la sensation, et la notion de vérité ou d’erreur, de bien ou de mal, vient se jeter à la traverse d’une perception de forme et de couleur.
Nous sommes touchés de ce qu’une personne nous plaît plus qu’elle ne nous a paru d’abord devoir nous plaire ; & nous sommes agréablement surpris de ce qu’elle a sû vaincre des défauts que nos yeux nous montrent, & que le coeur ne croit plus : voilà pourquoi les femmes laides ont très souvent des graces, & qu’il est rare que les belles en ayent ; car une belle personne fait ordinairement le contraire de ce que nous avions attendu ; elle parvient à nous paroître moins aimable ; après nous avoir surpris en bien, elle nous surprend en mal : mais l’impression du bien est ancienne, celle du mal nouvelle ; aussi les belles personnes font elles rarement les grandes passions, presque toûjours reservées à celles qui ont des graces, c’est-à-dire des agrémens que nous n’attendions point, & que nous n’avions pas sujet d’attendre.
Que si ultérieurement la variété des esprits devait disparaître devant une culture plus avancée, ce ne serait plus un mal. […] Les habitudes de la société française, si sévères pour toute originalité, sont à ce point de vue tout à fait regrettables. « Ce qui fait l’existence individuelle, dit Mme de Staël, étant toujours une singularité quelconque, cette singularité prête à la plaisanterie : aussi l’homme qui la craint avant tout cherche-t-il, autant que possible, à faire disparaître en lui ce qui pourrait le signaler de quelque manière, soit en bien, soit en mal. » Les natures vraiment belles et riches ne sont pas celles où des éléments opposés se neutralisent et s’anéantissent ; ce sont celles où les extrêmes se réunissent, non pas simultanément, mais successivement, et selon la face des choses qu’il s’agit d’esquisser.
L’Eglise catholique pourrait par suite répéter du corps des écrivains ce que Corneille disait de Richelieu : Il m’a fait trop de bien pour en dire du mal ; Il m’a fait trop de mal pour en dire du bien.
La bonté de votre âme est pour les autres aussi bien que pour Dieu, car vous êtes commode, point critique, et si peu porté à juger mal, que je crois que votre bonté pourrait même quelquefois duper votre esprit. […] Ce sont, après tout, les ignorants comme Pascal, comme Descartes, comme Rousseau, ces hommes qui ont peu lu, mais qui pensent et qui osent, ce sont ceux-là qui remuent bien ou mal et qui font aller le monde16.
après avoir mal commencé, il a bien fini. […] On n’en saurait douter, c’est habituellement de cette dernière qu’entend parler Camille, c’est elle dont il tient en main la ficelle et qu’il se plaît à faire danser méchamment et par manière de niche aux yeux de ses adversaires ; c’est avec elle qu’il joue comme un enfant gâté, dira Robespierre, et nous nous dirons, comme le gamin insolent, insouciant et cruel, qui n’a pas en lui le sentiment du bien et du mal, qui ne l’aura que tard et par accès, et qui périra par où il s’est trop joué.
Je cause rarement ici de poésie, précisément parce que je l’ai beaucoup aimée et que je l’aime encore plus que toute chose : je craindrais d’en mal parler, ou du moins de n’avoir pas à en bien parler, à en dire assez de bien. […] Dire cela au peuple est mal, l’aider à le chanter est pis encore.
(Ailleurs, il dit : Il lui prit une tranchée de bel esprit… C’est un mal qui la frappa tout d’un coup et dont elle est morte incurable. […] Mme de Lambert, comme Mlle de Scudéry, pense que rien n’est si mal entendu que l’éducation qu’on donne aux jeunes personnes : « On les destine à plaire ; on ne leur donne des leçons que pour les agréments. » Elle, au contraire, fille d’une mère telle que nous l’avons dite, elle a senti de bonne heure le besoin qu’ont les femmes d’être raisonnables et d’être fortifiées contre leurs passions.
Son bon jugement se faisait jour et maintenait tant bien que mal sa ligne à travers toutes ces saillies, ces légèretés et ces pétulances. […] Une des meilleures épigrammes du poète Le Brun est contre l’abbé Maury ; elle a cela de piquant, qu’elle a, d’un bout à l’autre, un faux air d’éloge ou d’apologie, et que c’est le lecteur seul qui, en contredisant à chaque vers, est comme forcé de faire lui-même l’épigramme ; le satirique, dans ce cas, a besoin de compter sur la complicité de tout le monde : L’abbé Maury n’a point l’air impudent ; L’abbé Maury n’a point le ton pédant ; L’abbé Maury n’est point homme d’intrigue ; L’abbé Maury n’aime l’or ni la brigue ; L’abbé Maury n’est point un envieux ; L’abbé Maury n’est point un ennuyeux ; L’abbé Maury n’est cauteleux ni traître ; L’abbé Maury n’est point un mauvais prêtre ; L’abbé Maury du mal n’a jamais ri : Dieu soit en aide au bon abbé Maury !
Tout le règne actuel peut se réduire à quinze ans de faiblesse et à un jour de force mal employée. » Dans tout le cours de ce Journal, Rivarol se dessine avec énergie, éclat, indépendance, et comme un de ces écrivains (et ils sont en petit nombre) « que l’événement n’a point corrompus. » Dès les premiers numéros du Journal et dans l’intervalle du 14 Juillet au retour de M. […] Or, l’esprit est le côté partiel de l’homme ; le cœur est tout… Aussi la religion, même la plus mal conçue, est-elle infiniment plus favorable à l’ordre politique, et plus conforme à la nature humaine en général, que la philosophie, parce qu’elle ne dit pas à l’homme d’aimer Dieu de tout son esprit, mais de tout son cœur : elle nous prend par ce côté sensible et vaste qui est à peu près le même dans tous les individus, et non par le côté raisonneur, inégal et borné, qu’on appelle esprit.
De l’autre côté, il y avait des intérêts civils, patriotiques aussi, mais surtout positifs, des idées longtemps étouffées et qui voulaient renaître ; idées en travail, intérêts en souffrance, lassitude profonde et besoin de paix, chez quelques-uns d’anciens sentiments qui se réveillaient, c’était tout un ensemble d’opinion déjà puissante et mal définie ; mais surtout, à ces premiers jours de 1814, et en face d’une religion militaire qui épuisait ses derniers miracles, il y avait une raison. […] Car, ne l’oublions pas, une transaction alors, dans une affaire si mal engagée, était la seule solution possible.
« Le mensonge n’est un vice que quand il fait du mal, écrivait Voltaire à Thieriot ; c’est une très grande vertu quand il fait du bien. » Il ne songeait, en écrivant ainsi, qu’à désavouer son Enfant prodigue et à tâcher que l’ouvrage ne passât point pour être de lui : « Si vous avez mis Sauveau du secret, ajoutait-il, mettez-le du mensonge. […] Être sincère et de bonne foi, fût-ce dans notre erreur, ce serait déjà avoir beaucoup fait pour éviter le mal et pour conserver l’honnête homme en nous.
Entendant le solitaire mélancolique accuser hautement la fatalité et le sort de tous les maux, qui affligent tour à tour les diverses nations, il l’en reprendra au nom de ces ruines et lui dira d’y lire les leçons qu’elles présentent : « Et vous, témoins de vingt siècles divers, temples saints ! […] Le Génie analyse l’amour de soi dans toutes ses transformations, découvre que les maux des sociétés viennent des désirs effrénés, de la Cupidité, fille et compagne de l’Ignorance, etc.
Entre le bien et le mal, il n’apercevait plus d’opposition irréductible. […] Une partie du public en est venue à préférer l’ébauche au travail achevé, à aimer les œuvres informes, mal composées, sous prétexte qu’elles sont plus proches de la vérité.
La conversation s’engagea mal, sur la Guerre. […] Cette jeunesse enseigne la destruction de la réalité en bloc, qui n’est que la cristallisation de la bêtise et de l’infériorité soushumaine, Tous les maux dont nous souffrons peuvent être dérivés de la prédominance de la matière et le réel est synonyme de vide mental.
Jamais le mal moderne n’a eu, pour le peindre, une expression de ce hâve, de ce fiévreux — de cette transe ! […] V Quand on est d’organisation aussi poète que le fut l’auteur des Poésies de Joseph Delorme, il faut se donner beaucoup de mal pour cesser de l’être.
Pour un bonheur imperceptible, Souffrir un mal intraduisible À tous les langages humains ! […] Amédée Pommier, qui fut toujours un esprit outré, comme disent les esprits modestes, qui ont de bonnes raisons pour l’être, le rappelle en des vers excellents, dans son ancienne manière connue, d’une bonhomie comique et mordante : … Les philistins, les pédants et les cuistres, Qui m’ont en mal déjà noté sur leurs registres Pour avoir cultivé, rimeur émancipé, Le genre mors aux dents ou cheval échappé, Trouvant que de nouveau je prêche et prévarique, Élèveront encore leur voix charivarique, Et se scandalisant de ma ténacité, Crieront au mauvais goût, — à l’excentricité.
Je me rappelle encore toutes les précautions qu’il nous fallut prendre : il était absent de Paris, on choisit exprès cet instant-là ; on usa de ruse ; on ne s’adressa pas à lui pour le peu d’indications biographiques qui étaient indispensables et qui eussent trop coûté à arracher, sans compter qu’on ne les eût obtenues sans doute qu’arrangées et embellies : ses plus anciens amis et principalement Émile Deschamps, son intime d’alors (et envers qui il a fait preuve, depuis leur brouille, d’une froide rancune irréconciliable), voulurent bien me renseigner tant bien que mal, et il n’y a rien d’étonnant qu’on se soit mépris d’abord sur quelques points et circonstances d’un intérêt tout domestique, notamment sur son mode et son degré de parenté avec l’amiral de Baraudin.
Nous disons habituellement assez de mal de ceux-ci54 pour qu’on nous croie si par hasard nous leur sommes moins sévère.
Jusque-là, son pouvoir avait été précaire et contesté ; et, si elle avait terminé sa vie politique en 1705, elle n’aurait offert au jugement de l’histoire qu’un caractère équivoque et mal éclairci.
Lorsqu’il est las de chanter aux hommes, c’est au sein de Dieu qu’il va se reposer des fatigues et des dégoûts du message : Je vous rapporte, ô Dieu, le rameau d’espérance ; Voici le divin glaive et la céleste lance : J’ai mal atteint le but où j’étais envoyé.
En ce qui concerne la littérature de ce temps, est-ce donc un si grand mal, dira-t-on, que de s’arranger d’avance pour en négliger et en ignorer une bonne partie ?
Çà et là quelque sobriété et simplicité de plume ne lui siéraient pas mal ; il aura beau se retenir, il lui restera encore bien suffisamment d’esprit.
Egger, dit beaucoup de mal de la France, de la littérature française, et “du petit homme aimable et spirituel” qu’il considère toujours comme le type de notre “nation”.
Prostitués On a mal dit : « L’homme n’est ni ange ni bête. » Il faut affirmer : L’homme est à la fois ange et bête.
Sans doute il y a des moments où les affaires matérielles de la société vont mal, où le courant ne les porte pas, où, accrochées à tous les accidents politiques qui se rencontrent chemin faisant, elles se gênent, s’engorgent, se barrent et s’embarrassent les unes dans les autres.
Quel mal avaient fait ces pauvres conviés et ces échansons ?
On ne fera pas mal d’y joindre un livre où la morale & la métaphysique sont heureusement alliées.
Que les bras de cette figure d’ailleurs charmante, sont roides, secs, mal peints et sans détails… Oh pour cela, rien n’est plus vrai.
Combien y a-t-il de spectateurs qui ne comprennent pas la moitié des plaisanteries de dom Japhet ; celle par exemple, qui roule sur le reproche que les castillans qui prononcent bien et nettement font aux portuguais qui prononcent mal, et qui mangent une partie des sillabes : ce sont les guenons qui parlent portuguais.
Premierement, l’air de la ville de Rome, à l’exception du quartier de la trinité du mont et celui du Quirinal, est si mal sain durant le grand été, qu’il ne sçauroit être supporté que par ceux qui s’y sont habituez peu à peu, et comme Mithridate s’étoit accoutumé au poison.
Si pendant ces temps derniers, elle paraît avoir souffert d’un certain discrédit, c’est pour avoir été mal comprise.
Je dis ceci : qu’un homme mal habillé a besoin de se déshabiller pour bien s’habiller.
Ce sont surtout les philosophes, les moralistes, les penseurs, qu’on relit dans ce dessein, et ce n’est pas mal fait ; mais il n’est auteur qu’on ne puisse relire dans cette intention, et il en est qui sont tellement dignes d’être relus qu’on doit les relire pour cet objet.
Nous répétons à satiété, dans le chapitre qu’on a si mal lu, que l’imitation consiste à « s’approprier pour le traduire autrement, ce qu’il y a de beau dans un auteur, les conceptions et les développements d’autrui, et à les mettre en oeuvre suivant ses qualités personnelles et sa tournure d’esprit », et que « l’imitation est une continuelle invention ».
Mais ce qui va bien au paysage et à son peintre : la vapeur, les traits indistincts, les lointains fuyants, mal accusés, noyés, perdus, ne va plus au peintre de l’âme, au moraliste, à l’observateur de la nature humaine qui doit voir clair, tout discerner, tout accuser d’une ligne pure et inflexible.
« L’idylle hébélienne — disait en 1847 un critique distingué, le professeur Rapp de Tübingen, — est dans la littérature allemande quelque chose de si complètement à part, que nous ne la comprenons pas nous-mêmes dans le cercle ordinaire de la littérature, À nous, Allemands du sud, à qui Hebel tient si fortement au cœur, cela fait déjà mal quand on nous dit que quelqu’un a cherché à traduire ces poésies en haut allemand ; car il y a pour nous comme une profanation de l’intimité avec laquelle nous honorons ces produits. » Et le mot produits est bien dit, il marque mieux qu’un autre l’autochtonie du talent de Hebel.
Nous verrons si le mal est aux sources mêmes d’une littérature qui tarit, ou s’il tient seulement à un simple détournement de ses eaux.
Nous avons frappé les Perses au cœur, les accablant de maux, souvenir de leur affreuse défaite sur mer.
Le bien et le mal alors perdent pour eux leur nom ; toutes les choses se renversent : « Combien tu rends chère et aimable la honte — qui, comme un ver dans la rose parfumée, — souille la beauté de ton nom florissant ! […] Ils sentent trop profondément leurs biens et leurs maux, ils amplifient trop largement par une sorte de roman involontaire chaque état de leur âme. […] comme ma tête me fait mal ! […] Je m’enfuis le grand pas quand approchent les coups : est-ce que les coups ne font pas mal ? […] Elle était brune, ni belle, ni jeune, et mal famée.
Son prétendu Fragment d’Alcée confesse ouvertement quelques-unes des maximes les plus usuelles de ce code relâché : Quel mal ferait aux Dieux cette volupté pure ? […] Lamartine, c’est-à-dire le grand élégiaque qui a détrôné Parny, sait encore par cœur cette élégie désespérée : J’ai cherché dans l’absence un remède à mes maux ; J’ai fui les lieux charmants qu’embellit l’infidèle. […] Telle critique nécessiterait deux pages d’écriture ; et même ces deux pages diraient mal et ne diraient pas du tout.
VIII C’était le lendemain de la révolution de 1830 ; cette révolution, provoquée, mais mal inspirée, avait proscrit un berceau plein d’innocence ; elle avait donné le trône de l’infortuné Louis XVI, victime de ses vertus, au fils d’un prince qui avait démérité de son sang ; cette odieuse rétribution de la Providence révoltait et révolte encore la justice innée en moi. […] Il ajoute au mal, mais il ne l’invente jamais ; aussi je crois que l’on perd sa réputation par sa faute. » Cette circonstance établit entre Juliette et M. de Chateaubriand des rapports de société ; ces rapports devinrent promptement passion dans l’âme passionnée du poète, goût et orgueil dans l’âme platonique de madame Récamier. […] » Disons cependant ici une chose que madame Lenormant ne dit pas, et qu’elle ne pouvait pas dire : c’est qu’une autre personne à Londres, mal cachée sous le rideau de la discrétion officielle, partageait, si elle ne la possédait pas, l’attention de M. de Chateaubriand.
. — Tu es étonnée de mes discours ; mais sois tranquille : les choses que le mal a commencées se consolident par le mal. […] Je vous prie, ne lui parlez pas ; son mal ne fait qu’empirer : les questions le mettent en fureur.
La Bruyère, Fénelon, Vauvenargues, Schérer l’ont accusé de mal écrire387. […] Une des études où Molière s’est complu, c’est le ravage que fait le vice dans l’homme, puis hors de l’homme en qui il vit, les destructions ou altérations de sentiments naturels qui en résultent, les longues traînées de misère ou de mal qui le prolongent de tous côtés : et rien n’a donné plus de largeur ni plus de sérieuse portée à ses pièces. […] Mais un irait bien remarquable de cette morale, c’est son caractère profondément bourgeois : ce comédien longtemps nomade, enfoncé toute sa vie à des titres divers dans cette louche famille des Béjart, mal marié, et qui n’a connu du ménage que les ennuis, a été hanté de l’idéal du bonheur bourgeois, de la vie de famille régulière et paisible.
Il a affaire à des malades qui souvent ne voient pas leur mal : il faut leur en donner le sentiment cuisant et non la connaissance théorique, et il faut leur faire apercevoir, désirer, tenter le remède. […] Il a pu mal juger la révolution d’Angleterre, ou la révocation de l’édit de Nantes : il ne les a pas jugées autrement dans ses oraisons funèbres que dans ses autres ouvrages ; il n’a dit que ce qu’il a constamment pensé. […] Aussi tout son raisonnement tendait-il à faire apparaître le mal, en réduisant le protestantisme à l’individualisme effréne, rationalisme ou illuminisme ; et il ne lui donnait le choix qu’entre ces deux excès.
Quand il a produit son œuvre, il demande au public : Est-ce bien ou mal ? […] Il devait donc arriver que les âmes les plus frappées de la tristesse de cette Humanité livrée au hasard, et de cette incertitude de l’esprit humain en présence d’une science en apparence purement critique et négative, rechercheraient les solutions chrétiennes, et se rapprocheraient des hommes qui souffrirent les mêmes maux de l’âme dans une époque analogue de l’Humanité. […] Et remarquez qu’il y avait eu avant ces Pères de l’Église, et qu’il y avait en même temps qu’eux, des âmes généreuses qui souffraient comme eux du même mal, mais qui, n’ayant pu apercevoir l’étoile nouvelle, mais encore petite et obscure, de l’avenir, cherchaient leur lumière dans le passé éteint, et se réfugiaient dans le stoïcisme, dans les souvenirs de la république, ou dans les mystères.
La Bruyère. « L’opéra n’est qu’un rendez-vous public où l’on s’assemble à certains jours sans trop savoir pourquoi ; c’est une maison où tout le monde va, quoiqu’on pense mal du maître et qu’il soit assez ennuyeux. » Qui parle ainsi ? […] Elle regardait de loin, pleine d’étonnement, les coupables morbidesses de sa sœur italienne qui s’étirait avec des langueurs de sieste, dans une alcôve mal fermée. […] Dès le commencement, l’alternative du bien et du mal, de la puissance et de la vertu, sera offerte à tout ce qui existe.
Pour qui les juge en philosophe, leur point de départ est ruineux, mal établi, non discuté ; mais si la philosophie les condamne, l’expérience les absout. […] Quand la philosophie sera devenue ce qu’elle doit être, qu’il n’y aura plus en elle que du général, des abstractions, des idées, qu’elle sera complètement en dehors des faits, alors il apparaîtra clairement aux yeux de tous qu’elle est une œuvre d’art plutôt que de science : poésie ennuyeuse et mal écrite pour les uns, élevée, puissante, vraiment divine pour les autres. […] Les discussions sur le libre arbitre pourraient bien être de cette nature ; le problème n’étant peut-être inextricable que parce qu’il est mal posé4.
Quand un homme a la vie, l’habit, une chambre et du feu, les autres maux s’évanouissent. […] Si sa plainte était parvenue à dominer les cris de la place publique et le tumulte des batailles, les Renés qui n’étaient plus affamés de pain et de viande lui auraient répondu : — Que nous importe votre mémoire qui décline et votre santé qui se délabre ; nous aussi nous avons nos maux et nos douleurs ; la bête de nos entrailles est gorgée ; il nous faut soûler les démons de notre cœur et de notre tête. […] quel cœur si mal fait n’a tressailli au bruit des cloches… Tout se retrouve dans les rêveries enchantées, où nous plonge le bruit de la cloche natale : religion, famille, patrie, et le berceau et la tombe, et le passé et l’avenir. » Les révolutionnaires avaient proscrit les sonneries des cloches et coulé des canons avec leur métal.
Oui, j’ai été longtemps bien malheureuse ; mais dans ce moment ma joie surpasse tous les maux que j’ai soufferts, puisque le fils de mon seigneur daigne avoir pitié de moi. […] La quatrième règle concerne le dénouement ; il doit être toujours heureux, c’est-à-dire conforme à la justice et à la bonté divine, qui prévalent, à la fin de toutes choses, sur le mal et sur le crime. […] Vous le jugez mal : une statue d’or de sa chère Sita est sans cesse sous ses yeux.
L’ Art de l’Eloquence, cultivé avec tant d’ardeur par les Grecs & par les Romains, a fait quelquefois chez eux plus de mal que de bien. […] Un malheureux écolier, devenu imbécile pour avoir été forcé pendant quatre ans d’apprendre par cœur Jean Despautere, & ensuite devenu raisonneur pour avoir soutenu une thèse sur l’universel de la part de la chose & de la pensée, & sur les cathégories, recevoit en public son bonnet, & sans connoître ni sa portée, ni ses talens, s’en alloit prêcher devant un auditoire, dont les trois quarts étoient plus imbéciles que lui & plus mal élevés. […] M. de Mairan, successeur de M. de Fontenelle dans la place de Secrétaire de l’Académie des Sciences, ne l’imita pas servilement ; mais il ne parut pas loin de son modèle dans l’art délicat de dire le bien & le mal sans partialité & sans flatterie, & de tracer des portraits ressemblans entremêlés de particularités piquantes.
Et, pour beaucoup d’entre eux, mal définis encore, le moment n’est pas venu de tenter une explication. […] Celle-là, une fois installée dans la conscience, permet à une foule de souvenirs de luxe de s’introduire en vertu de quelque ressemblance, même dépourvue d’intérêt actuel : ainsi s’explique que nous puissions rêver un peu en agissant ; mais ce sont les nécessités de l’action qui ont déterminé les lois du rappel ; elles seules détiennent les clefs de la conscience, et les souvenirs de rêve ne s’introduisent qu’en profitant de ce qu’il y a de lâche, de mal défini, dans la relation de ressemblance qui donne l’autorisation d’entrer. […] Là où une insuffisance de l’attention risquerait de se traduire par un passage définitif de l’état de veille à l’état de rêve, la conscience localise le mal sur quelques points où elle ménage à l’attention autant de courts arrêts : l’attention pourra ainsi se maintenir, tout le reste du temps, en contact avec la réalité.
Le fer qui les tua leur donna cette grâce, Que si de faire bien ils n’eurent pas l’espace, Ils n’eurent pas le temps de faire mal aussi. […] Malherbe est monarchique ; il est par nature homme d’ordre et d’autorité ; il est d’avis qu’il faut laisser les affaires d’État à ceux qui y sont commis ; et ce n’est pas seulement dans une Épître dédicatoire qu’il disait : « Pour moi qui ai toujours gardé cette discrétion de me taire de la conduite d’un vaisseau où je n’ai autre qualité que de simple passager, le meilleur avis que je puisse donner à ceux qui n’y sont que ce que je suis, c’est de s’en rapporter aux mariniers et se représenter que la voie ordinaire que tiennent les factieux pour exciter les peuples à mal obéir, c’est de leur faire entendre qu’ils ne sont pas bien commandés. » Il pensait et s’exprimait ainsi en toute circonstance. […] La chose semble mal aisée et l’est à la vérité ; mais puisqu’il l’entreprend, il le fera. […] C’était l’année décisive dans laquelle Richelieu, après quelques semblants de dégoût et des offres de démission pour tâter le maître, s’était affermi dans sa confiance, s’était démontré nécessaire, avait pris l’offensive contre ses ennemis, et avait obtenu, comme malgré lui, une garde particulière ; mais encore, en obtenant ce qu’au fond il désirait, il avait voulu en faire les frais lui-même, et cette nouvelle marque de générosité avait séduit Malherbe : « Le roi qui le voit mal voulu de tous ceux qui aiment le désordre (et vous savez qu’ils ne sont pas en petit nombre) a désiré qu’il ait quelques soldats pour le garder.
Il console une femme qui a perdu son fiancé en lui représentant les infortunes de tant d’autres personnes qui souffrent en ce moment de plus grands maux. […] C’est le cœur qui voit le ciel ; si vous voulez m’y faire croire, comme vous me faites croire aux antipodes par des récits et des vraisemblances géographiques, j’y croirai mal ou je n’y croirai point. […] Elles ne sont plus élues dans les clubs quand on nomme les belles dont on boit la santé ; elles sont obligées par leurs principes de se coller une mouche sur le côté du front où cela va le plus mal ; elles se condamnent à perdre les toilettes du jour de naissance ; il ne leur sert de rien qu’il y ait une armée et tant de jeunes gens porteurs de chapeaux à plumes ; elles sont forcées de vivre à la campagne et de nourrir leurs poulets, juste dans le temps où elles auraient pu se montrer à la cour et étaler une robe de brocart, si elles voulaient se bien conduire… Un homme est choqué de voir un beau sein soulevé par une rage politique qui est déplaisante même dans un sexe plus rude et plus âpre… Et cependant nous avons souvent le chagrin de voir un corset près d’être rompu par l’effort d’une colère séditieuse, et d’entendre les passions les plus viriles exprimées par les plus douces voix… » Mais, heureusement, ce chagrin est rare ; « là où croissent un grand nombre de fleurs, la terre de loin en semble couverte ; on est obligé d’avancer et d’entrer, avant de distinguer le petit nombre de mauvaises herbes qui ont poussé dans ce bel assemblage de couleurs. » Cette galanterie est trop posée ; on est un peu choqué de voir une femme touchée de si près par des mains si réfléchies. […] She admits a male visitant to her bed-side, plays with him a whole afternoon at picquette, walks with him two or three hours by moon-light.
Longtemps avant le coup de la grâce, le catholicisme commençait d’apparaître à Veuillot comme le grand et seul remède aux maux humains : aux troubles de l’âme par la certitude ; aux souffrances et aux injustices sociales, soit par la charité chrétienne, soit par la sanction après la mort. […] Et ceci, d’une si belle et courageuse sincérité, et qui me paraît aller loin dans la connaissance de notre misérable cœur : … Évidemment cette lutte doit se terminer par le triomphe du bien ; mais elle est longue et douloureuse en raison du mal qu’on a commis : car on n’a pas fait une faute, si odieuse soit-elle, qu’on ne désire la faire encore, et faire pis. […] Et puis, par un sentiment que je conçois mal, j’ai toujours été tenté d’accorder sur moi, à ceux dont la foi est absolue, des droits que je ne me reconnais pas sur eux. […] Vous reprendrez : « Alors le mal est dans votre coeur et dans votre volonté. » Mais, voyons, est-ce que, sérieusement, vous me regardez comme un méchant ?
Les planches sont mal jointes et il vous tombe des gouttes d’eau partout. […] Il est moins nécessaire qu’une fibre sympathique me relie à ce magnifique scélérat en écharpe rouge et plumet vert qu’à ce vulgaire citoyen qui pèse mon sucre, en cravate et en gilet mal assortis… Je ne voudrais pas, même si j’en avais le choix, être l’habile romancier qui pourrait créer un monde tellement supérieur à celui où nous vivons, où nous nous levons pour nous livrer à nos travaux journaliers, que vous en viendriez peut-être à regarder d’un œil indifférent, et nos routes poudreuses et les champs d’un vert ordinaire, les hommes et les femmes réellement existants… » Certes la vie est une partout et toujours ; sous tels dehors qu’il vous plaira de l’observer, vous la trouverez avec ses mêmes joies et ses mêmes peines. […] Il y a les beaux romans et les méchants ; il n’y a pas les romans bien composés et les romans mal composés. […] On pourrait citer dans l’histoire des littératures des chefs-d’œuvre à peu près aussi mal composés que Manette. » (Jules Lemaître, Étude sur les Goncourt. — Revue bleue, 30 septembre 1882.)
Mais avoir su se créer une place du vivant même de ce géant, Victor Hugo, avoir été si mal payé de ses efforts vers le mieux, avoir si singulièrement préparé sa gloire, avoir recueilli tant de dédain, tant de haussements d’épaules, me font considérer Charles Baudelaire comme le type du poète mort que je dois le plus vénérer. […] Mal, Sagesse, et La Légende des Siècles, ont à mon avis, et croyez que j’en suis convaincu, chacun une personnalité remarquable. […] À ceux qui s’étonneraient, je répondrai : « Considérez que ce poète, peu lu et mal connu, jugé d’après ses théories étroites et paradoxales, fut harmonieux comme Lamartine, profond comme Baudelaire, poignant comme Musset, grave comme Alfred de Vigny et musical comme Verlaine ; songez que les Poèmes barbares ont précédé la Légende des Siècles et la surpassent certainement en largeur épique ; méditez enfin religieusement cette œuvre parfaite, où la langue poétique n’a été maniée qu’avec ce respect sacré que possèdent seuls les génies. […] J’ai attendu, jusqu’à la dernière heure, pour vous adresser ma réponse dans l’éventualité — non dans le désir — que fût dans cet extrême délai, par un imprévu trépas, rayé du nombre des vivants, l’un de mes plus chers parmi les poètes qu’afflige encore le mal de vivre.
Est-ce donc là un si grand mal ?
En même temps que des chroniques et des mémoires sans nombre jettent chaque jour des clartés nouvelles sur notre histoire passée ou contemporaine, notre curiosité, dont les besoins s’accroissent, se transporte au-delà des mers vers des nations encore mal connues, et s’enquiert aux voyageurs de ces grandes contrées du monde, réclamant d’eux du vrai et du nouveau, et accueillant avidement leurs récits.
Cette belle raisonneuse de madame Legendre y prêtait assez ; c’était la sœur de mademoiselle Voland, prudente, sérieuse, réfléchie, de réputation sévère, ne méritant pas mal le sobriquet d’Uranie qu’on lui avait donné.
Cet acte irréparable, cet acte qui seul donne à l’homme un pouvoir sur l’éternité, et lui fait exercer une faculté qui n’est sans bornes que dans l’empire du malheur ; cet acte, quand on a pu, dans la réflexion, le concevoir et l’ordonner, jette l’homme dans un monde nouveau, le sang est traversé ; de ce jour, il sent que le repentir est impossible, comme le mal est ineffaçable ; il ne se croit plus de la même espèce que tout ce qui traite du passé avec l’avenir.
Elle badine volontiers sur les assassinats, se joue autour de la guillotine ; et les plus effroyables manifestations du mal physique, les pires cruautés de la nature mauvaise, incendie, inondations, tremblements de terre, catastrophes de toute espèce, lui sont matière à calembours et à coq-à-l’âne.
Certes, nombre de littérateurs du temps jadis écrivaient faiblement : ils n’écrivaient jamais mal.
C’est en effet mal comprendre le rôle et la nature des langues classiques que de donner à cette dénomination un sens absolu, et de la restreindre à un ou deux idiomes, comme si c’était par un privilège essentiel et résultant de leur nature qu’ils fussent prédestinés à être l’instrument d’éducation de tous les peuples.
Autour de cette maison, ils plantent un petit jardin, et ils jettent les hauts cris si quelqu’un, y avisant des fleurs qui lui plaisent pour leurs nuances et leur parfum, mais à son goût mal disposées, les loue en peu de termes tout en faisant ses réserves sur le style décoratif du jardin.
C’est ainsi que les vrais Grands Hommes ont la gloire de se former des successeurs, au lieu que tant de louanges prodiguées si mal à propos aux jeunes gens qui commencent, & dont on veut se faire des Panégyristes, ne sont propres qu’à produire des hommes vains & médiocres.
Par-delà le Bien et le Mal (Éd. du Mercure de France), p. 105.
On admire avec raison dans l’Iliade les Prières boiteuses, qui suivent l’Injure pour réparer les maux qu’elle a faits.
Job est la figure de l’humanité souffrante, et l’écrivain inspiré a trouvé assez de plaintes pour la multitude des maux partagés entre la race humaine.
De ces préparations, le pharmacien abandonne les unes à la négligence de ses garçons, et celles-ci, mal faites, ne produisent plus l’effet qu’on en attend et tombent en désuétude.
Le Poussin que nous vantons tant aujourd’hui, fut mal soutenu par le public lorsque dans ses plus beaux jours il vint travailler en France, mais quoi qu’un peu tard, les personnes désinteressées et dont l’avis est conforme à la verité se reconnoissent, et prenant confiance dans un sentiment qu’elles voïent être le sentiment du plus grand nombre, elles se soulevent contre ceux qui voudroient faire marcher de pair deux ouvriers trop inégaux.
. — Dans ce livre d’Au lit de mort, que Mme Sand n’eût certainement pas écrit, je le reconnais, dans ce livre qui affecte l’accent chrétien, mais dans lequel la langue chrétienne est mal parlée ; où l’on sent l’âme troublée, l’idée fausse, l’esprit sans forte direction et sans guide, et cette religiosité corrompue par les sensibilités romanesques et morbides de ce temps, Mme Marie-Alexandre Dumas n’invente-t-elle pas un confesseur sans sacrement, sans fonction, sans autorité ; un confesseur qui n’est pas prêtre, un confesseur-femme, — elle-même !
Il y a dans le titre seul de cette histoire quelque chose de fastueux, d’étalé, de gonflé, qui sent son petit Tuffière historique en herbe, et qui dispose mal la critique en faveur d’un livre annonçant plus qu’il ne peut tenir.
, ni Guizot, qui a vu les mélanges du bien et du mal, mais qui n’a pu les expliquer, ni personne, enfin, parmi les gloires modernes, n’a porté la lumière et la main sur le nœud gordien de ce temps et son implication formidable, tandis que quelques vers de Shakespeare, quelques pages de Walter Scott, en font du moins passer l’âme dans nos esprits, comme une vision trop tôt évanouie !
Il les a pris tous ; mais il n’a pas pris Don Quichotte, tant il l’a contrefait, gâté, mal compris, celui-là !
Issu de Guizot le doctrinaire, mais avec un tour d’esprit autrement vivant et enflammé que celui de son maître, Dupont-White s’est contenté de recommencer la balançoire connue entre l’idée abstraite de l’État et l’idée abstraite de l’Individu, et de nous refaire, sous une autre forme, la vieille cote mal taillée entre l’autorité et le progrès reprise tant de fois !
Tout fils qu’il est, comme nous, de cette pénétrante et éparpillante civilisation qui tend de plus en plus à se substituer à toutes les patries, et qui éteindra un de ces jours jusqu’aux sons du cor de l’enfant des Alpes, l’auteur des Hirondelles a entendu, dans sa pensée, ce Ranz, qui n’était pas ailleurs, des montagnes de la Judée muette, et il en a mis l’écho dans des vers capables de donner le mal du pays aux âmes lâches qui ne l’éprouvent plus.
Génie de la nature, dans les cieux, sur la terre, sur les mers, rien ne se fait, ne se produit sans toi, excepté le mal qui sort du cœur du méchant.
On commença à César ; cet homme qui avait fait tant de mal à son pays, et qui avait commis le plus grand des crimes, celui de précipiter la corruption d’un peuple, fut loué sur cette même tribune où l’on n’aurait dû monter que pour flétrir sa mémoire.
» Et ensuite une prière à la fortune, pour qu’elle veuille bien permettre « qu’un si grand empereur remédie aux maux du genre humain désolé… Si elle regarde Rome en pitié, si elle n’a pas encore résolu d’anéantir le monde, ce prince, envoyé pour consoler l’univers, sera aussi sacré pour elle, qu’il l’est déjà pour tous les mortels26 ».
« Telle est la faiblesse humaine, disait-il ; partout les remèdes sont plus lents que les maux, et il est bien plus facile d’étouffer le génie que de le ranimer. » Malgré ces remarques générales, il y a dans le panégyrique de Pline plusieurs endroits d’une véritable éloquence, et où l’on remarque de l’élévation et de la force.
Cette tradition mal interprétée a jeté tous les politiques dans l’erreur de croire que la première forme des gouvernemens civils aurait été la monarchie.
Au pied des vieux châteaux et des vieux monastères, Chante en vers ampoulés des maux imaginaires, Fais soupirer les bois, les rochers et les fleurs ; Mais ne soupire pas si tu veux des lecteurs.
S’agit-il de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, peu s’en faut que Daunou n’attribue bon nombre des maux qui ont éclaté depuis 89 au manque de méthode et de précision qui s’est glissé dans la Déclaration première : « Tous ceux qui avaient en France l’instinct de l’aristocratie, dit-il, sentirent le danger d’un travail de ce caractère, et, saisissant avec trop de sagacité le plus infaillible moyen d’en dégrader l’exécution et d’en énerver l’influence, ils donnèrent aux méditations du patriotisme les noms décriés de métaphysique et de spéculations abstraites, bien sûrs qu’il n’en faudrait pas davantage pour armer contre toute recherche un peu profonde, contre toute analyse un peu austère, l’impatient orgueil des esprits légers et le despotisme de l’inattention. […] » Et arrivant à l’accusation de fédéralisme, dont ils sont victimes, celui qui vient de flétrir les bourreaux retrouve ses anathèmes de grammairien-idéologue contre les expressions mal définies : « Les tyrans ont eu constamment recours à certaines dénominations odieuses, à de vains noms qui, répétés sans cesse et jamais expliqués, semblaient désigner de grands crimes et n’étaient réellement que les mots d’ordre des assassinats. […] Pour simplifier les choses, il n’avait qu’un habit, et, quand il l’avait usé, il en achetait un neuf tout fait, qui, tant bien que mal, lui allait toujours. […] Il me semble au moins que le scepticisme que certaines discussions historiques provoquent ou entretiennent n’est ni la moins douce ni la moins saine habitude que l’esprit humain puisse contracter. » Bien des nobles cœurs qui veulent de la foi à tout prix se pourront scandaliser de cette conclusion à la Montaigne, qui met la santé de l’esprit là où d’autres voient son plus grand mal ; elle me plaît et me touche chez Daunou, elle est conforme à la nature de cet esprit judicieux et craintif, au moment où, battu des orages, il se retrouve dans la sphère paisible de l’étude et où il respire. […] De misérables, d’odieuses tracasseries d’architecte empoisonnèrent sa fin ; cette persécution à part, qui le mettait hors de lui-même, il supporta ses maux sans se plaindre, interrompit le plus tard qu’il put ses occupations, régla scrupuleusement les dernières affaires littéraires dont il était chargé par l’Institut.
L’oratorien Malebranche, qu’on n’a jamais appelé un révolutionnaire, pensait assez mal à l’égard de la matière. […] Taine ressuscite si mal à propos l’entraîne à la plus étrange définition de la perception extérieure. […] Jouffroy enfin essaye-t-il de prouver que la distinction du bien et du mal suppose un certain ordre absolu, c’est-à-dire une coordination des fins à laquelle toute créature rationnelle et libre est tenue de coopérer : M. […] Le monde est rempli de mal, d’erreur, de désordre, d’imperfection : comment serait-il un Dieu ? […] De même ne puis-je pas concevoir par abstraction un être dégagé des conditions imparfaites qui accompagnent partout l’existence, à savoir, l’espace, le temps, la division, le mal et l’erreur ?
Il voit dans l’amour effréné de la popularité l’origine et la cause de la plupart des maux qui affligent la France, et nous croyons qu’il a raison. […] Eugène Sue s’était proposé, dans ses romans, de démontrer, ou du moins de mettre en scène, le triomphe du mal. […] Sue est si mal assuré de ses propres idées. […] Sue est revenu malgré lui à son ancienne prédilection pour le mal. […] Mais ce serait bien mal comprendre et bien mal apprécier la construction savante de ces drames que d’y chercher et d’y voir l’intention exclusive d’exciter la curiosité et d’enchaîner l’attention par la rapide succession des incidents.
Il ne doit avoir d’autre souci que de se prémunir contre les erreurs d’observation qui pourraient lui faire voir incomplètement ou mal définir un phénomène. […] Les hommes qui ont une foi excessive dans leurs théories ou dans leurs idées sont non seulement mal disposés pour faire des découvertes, mais ils font aussi de très mauvaises observations. […] La morale chrétienne ne défend qu’une seule chose, c’est de faire du mal à son prochain. […] L’érudition mal comprise a été et est encore un des plus grands obstacles à l’avancement des sciences expérimentales. […] La critique expérimentale sera particulièrement utile dans les sciences biologiques où règnent des théories si souvent étayées par des idées fausses ou assises sur des faits mal observés.
Un déluge de maux couvre la terre ; une arche flotte au-dessus des eaux, comme jadis celle qui portait la famille du Juste ; mais cette arche-ci est demeurée vide, nul n’a été jugé digne d’y entrer ! […] Ballanche est atteint d’un mal tout à fait semblable ; il désespère de la société et de lui-même ; il voit des ruines en lui, autour de lui, et il les aime, et il ne veut pas s’en arracher. […] Ce mal est si beau dans de tendres jeunesses, il tient de si près au dévouement et à l’amour des hommes, il est, pour ainsi dire, si sacré, qu’on est tenté de l’envier pour soi, bien loin d’essayer chez d’autres de le guérir.
. — Il dit que ce que vous appelez meurtre et carnage n’est rien ; que, en égorgeant quinze ou vingt mille hommes, on ne leur fait aucun mal, que la partie immortelle de leur être non seulement se conserve, mais passe dans un meilleur monde, que l’homme assassiné qui adresserait des reproches à son assassin se rendrait coupable d’ingratitude, puisque ce dernier n’a fait que lui procurer un logement plus commode et une existence plus parfaite. Laissez-moi ; il pose très bien maintenant, et, si vous dites un mot, il s’en ira. » Il est clair que Blake imputait à Richard III ses théories et ses rêves ; son personnage était un écho qui lui renvoyait sa propre pensée. — Une folle jouait incessamment à pair impair avec un personnage absent qu’elle croyait le préfet de police ; avant de jouer, elle regardait toujours les pièces de monnaie qu’elle mettait dans sa main et savait ainsi leur nombre ; partant, le préfet devinait toujours mal et ne manquait jamais de perdre ; plus tard, elle négligea son examen préalable ; alors le préfet tantôt perdait et tantôt gagnait. — Il est clair que, dans la première période, elle fabriquait elle-même, sans s’en douter, l’erreur qu’elle prêtait au préfet. […] Répétée incessamment, chaque jour plus vive, entretenue par une passion maîtresse, par la vanité, par l’amour, par le scrupule religieux, soutenue par de fausses sensations mal interprétées, confirmée par un groupe d’explications appropriées, elle prend l’ascendant définitif, annule les souvenirs contradictoires ; n’étant plus niée, elle se trouve affirmative ; et le roman, qui d’abord avait été déclaré roman, semble une histoire vraie. — Ainsi notre idée de notre personne est un groupe d’éléments coordonnés dont les associations mutuelles, sans cesse attaquées, sans cesse triomphantes, se maintiennent pendant la veille et la raison, comme la composition d’un organe se maintient pendant la santé et la vie.
Car la représentation, quoique mal esquissé, est une esquisse, l’esquisse sensible d’un individu distinct ; en effet, si je la fais persister et que j’insiste sur elle, elle répète telle sensation visuelle particulière ; je vois mentalement tel contour qui ne convient qu’à tel araucaria, et, partant, ne peut convenir à toute la classe ; or mon idée abstraite convient à toute la classe ; elle est donc autre chose que cette représentation d’un individu. — De plus, mon idée abstraite est parfaitement nette et déterminée ; maintenant que je l’ai, je ne manque jamais de reconnaître un araucaria entre les diverses plantes qu’on me présente ; elle est donc autre chose que la représentation confuse et flottante que j’ai de tel araucaria particulier. […] On montre un chien à un très jeune enfant, et on lui dit, dans le langage des nourrices, en imitant, tant bien que mal, l’aboiement de la bête : « C’est un oua-oua. » Ses yeux suivent le geste indicateur ; il voit le chien, entend le son, et, après quelques répétitions qui sont son apprentissage, les deux images, celle du chien et celle du son, se trouvent, d’après la loi d’association des images, associées à demeure dans son esprit. […] En effet, telle qu’on la trouve dans le langage courant et telle que la fournit l’expérience vulgaire, elle correspond mal à son objet. — D’une part, elle est incomplète et vague ; en d’autres termes, les caractères généraux qu’elle note ne sont ni assez précis ni assez nombreux.
Brutus avait mal raisonné en assassinant César ; il raisonnait aussi mal en se tuant lui-même ; c’était un sophiste éloquent et courageux, mais qui poussait toujours son sophisme jusqu’au sang. […] La liberté populaire est une vertu, mais ce n’est pas une muse ; le peuple juge très bien de l’éloquence et très mal de la poésie.
Si vous pensez, comme je le pense, que les sujets historiques conviennent mal au drame musical (il y a peu d’idées au monde plus saugrenues que celle de faire chanter Robespierre ou Napoléon Ier, et c’est à cela qu’on en viendrait fatalement), si vous croyez que la légende est le domaine d’élection de la musique théâtrale, ne trouverez-vous pas dans les vieilles épopées françaises de magnifiques sources d’inspiration ? […] Roland, opéra médiocre, n’a pas été mal accueilli, et l’on a applaudi la Fille de Roland, tragédie honorable. […] Nous avons vu, précisément, que la musique a pour objet cette révélation de l’Idée même du monde : or, il en résulte que le musicien créateur doit considérer tout ce que cette idée contient ; et c’est ainsi qu’il exprime, non sa propre opinion sur le monde, mais le monde lui-même, dans lequel alternent la douleur et la joie, le bien et le mal.
Ces jeunes hommes ont pris, du mal universel, une science plus nette, et l’habitude, plus affinée, de leurs âmes, fait qu’ils ont ressenti maintes douleurs plus fines. […] L’écrit philosophique « Art et Religion »bl dit le mal de l’existence individuelle, morcelant et opposant nos intérêts ; mais il exalte le retour à l’unité universelle, pleinement bonne, pleinement sainte, — et naturelle, — et bien heureuse. […] Elle ne peut que le placer dans une des catégories, qu’elle a formées avec les données résultant des impressions ressenties antérieurement, et déclarer qu’il s’y adapte mal.
Je ne me représente pas plus spontanément l’espace que je ne sens spontanément une colique ou un mal de tête. […] De même, si on demande pourquoi nous percevons les objets sous la forme étendue, il est clair que ce qui est spécifique et irréductible dans l’étendue sera inexplicable, tout comme la douleur particulière et sui generis que cause un mal de dents. […] Dans un cerveau rudimentaire ou mal exercé, l’onde nerveuse que l’excitation provoque reste diffuse et ne se concentre pas nettement en une partie distincte et étroite.
Dans les deux premiers des Trois Contes, dont l’un, Un cœur simple, décrit l’humble vie de sacrifices d’une servante, et l’autre, la Légende de saint Julien l’hospitalier raconte la dure destinée d’un innocent parricide, l’écrivain paraît compatir aux maux qu’il montre, et peut-être est-il juste de croire qu’aux abords de la veillesse, Flaubert a senti qu’il ne convenait pas de séparer la cause des grands de celle des petits, qui, victimes autant que bourreaux, prennent sans doute leur part des souffrances qu’ils contribuent à aigrir. […] Voici qui montre son obséquiosité et son impersonnalité devant la nature : « Je me suis mal exprimé en vous disant qu’il ne fallait pas écrire avec son cœur ; j’ai voulu dire, ne pas mettre sa personnalité en scène. […] Le pessimisme que provoquait en lui la nostalgie du beau et la vue d’êtres et d’objets sans noblesse, se compliquait de celui qui affecte tous les artistes, l’acuité » pour ressentir la souffrance que cause l’excès général et délicat de la sensibilité, le pessimisme sociologique, « l’indignation » à propos de tout que donne aux grandes intelligences la vue de la bêtise se passant d’eux pour se mal conduire, la lassitude qu’implique chez l’artiste moderne sa vie d’être inutile, spolié de tout, intérêt humain4.
II On prétend quelquefois qu’elle aurait commencé par la poésie lyrique ; et, sans remonter jusqu’à ces chansons dont Salvien nous dit qu’elles servaient à nos pères de consolation de leurs maux : — cantilenis infortunia sua solantur , — on nous parle de « cantilènes » dont nos grandes épopées ne seraient que l’assemblage, et le développement. […] Car nous connaissons assez mal cette longue période qui s’est étendue de l’avènement, des premiers Valois jusqu’à l’époque de la pleine Renaissance. […] William Edwards, Recherches sur les langues celtiques ; et Zeuss, Grammatica celtica]. — Que, si l’influence de l’élément celtique se retrouve dans le français, il semble que ce soit moins dans le vocabulaire que dans la syntaxe ; — et moins peut-être encore dans la syntaxe que dans la prononciation. — Considérations à ce sujet ; et de l’influence de la conformation des organes, ou de la nature des eaux, des airs et des lieux sur la prononciation. — Que, pour mal définie que soit l’influence celtique, on ne saurait pourtant la révoquer en doute ; — et qu’on ne saurait s’expliquer sans elle la différenciation du français, et de l’italien ou de l’espagnol.
Si, sur ces entrefaites, son ami l’incomparable M. de Saumaise écrit « en faveur du roi d’Angleterre contre les Anglais qui lui ont coupé la tête », Gui Patin en parle comme ferait un pur et un fidèle : « Pour les Anglais, si vous en exceptez un petit nombre d’honnêtes gens, je leur souhaite autant de mal qu’ils en ont fait à leur roi. » Si son autre ami, et bien plus intime, Gabriel Naudé, écrit en faveur de Mazarin son volume dit Le Mascurat, il prend sur lui de ne point blâmer le livre, mais il fait aussitôt ses réserves en ajoutant : « C’est un parti duquel je ne puis être ni ne serai jamais. » La première Fronde, même après qu’elle est terminée et manquée, a tout son assentiment et son éloge : « Ceux qui décrient le parti de Paris en parlent avec passion et ignorance : c’est un mystère que peu de monde comprend. […] De telles gens sont parfois des trouble-fête ; il en faut pourtant de cette trempe et de ce ton pour faire contrepoids aux mous, aux doucereux, aux « âmes moutonnières », comme il les appelle, à tous ceux qui suivent la vogue et le succès, aux honnêtes gens prudents qui se ménagent, qui prennent leurs précautions de toutes parts, qui passent leur vie à côté du mal en se gardant bien de le voir et d’y croire, pour ne pas avoir à le dénoncer.
On causait hier, dit-il, chez un libraire au Palais-Égalité ; on parlait sans ménagement de Barère et des Jacobins ; on était unanime, lorsqu’entre un homme assez mal vêtu, la figure hâve, les cheveux à la jacobine. […] Dans les premiers jours de Brumaire et pendant qu’on discutait avec détail la révolution qui devait s’opérer le 19, Bonaparte lui disait : Il n’y a pas un homme plus pusillanime que moi quand je fais un plan militaire ; je me grossis tous les dangers et tous les maux possibles dans les circonstances ; je suis dans une agitation tout à fait pénible.
Or, faire ses preuves en amour, c’est en savoir le bien et le mal : c’est se méfier de l’amour dans ses douceurs et l’avoir aussi éprouvé dans ses amertumes. Je ne vois pas que ce sens, qui est assez fin, soit mal placé dans la bouche d’un vieillard un peu troubadour et maître, à sa manière, dans la gaie science.
cet amour-là aussi fait le même mal que l’autre ! […] C’est ainsi que Mme Valmore se consolait ou se vengeait de ses maux inconsolables, en compatissant à toutes les douleurs pareilles, en se faisant la sœur de charité des plus petits.
En ce cas, l’enfance et la première jeunesse de M. de Balzac au collége se rapportent bien à ce qu’on pourrait conjecturer : une imagination active, spirituelle ; de l’ébullition, du désordre et de la paresse ; des lectures avides, incohérentes, à contre-temps ; l’amour du merveilleux ; les études mal suivies ; un mauvais écolier sans discipline, semper aliud agens, que ses maîtres chargent de pensums et que ses camarades appellent du sobriquet de poëte. […] Il a peur de mal exprimer son amour ; il ne voit que des difficultés et s’en effraye ; il tremble de ne pas plaire ; il serait hardi s’il n’aimait pas tant.
Cette pensée secrète qui le travaillait perce déjà dans la préface de Phèdre, et dut le soutenir, plus qu’on ne croit, dans l’analyse profonde qu’il fit de cette douleur vertueuse d’une âme qui maudit le mal et s’y livre. […] Avec cette facilité excessive aux émotions, et cette sensibilité plus vive, plus inquiète de jour en jour, on explique l’effet mortel que causa à Racine le mot de Louis XIV, et ce dernier coup qui le tua ; mais il était auparavant, et depuis longtemps, malade du mal de poésie : seulement, vers la fin, cette prédisposition inconnue avait dégénéré en une sorte d’hydropisie lente qui dissolvait ses humeurs et le livrait sans ressort au moindre choc.
Le journal, suivant lui, n’est, pour ainsi dire, qu’un dessert d’esprit ; il faut faire provision de pain et de viande solide avant de se disperser aux friandises. « Je vous l’ai déjà dit, écrit-il encore à son frère, la démangeaison de savoir en gros et en général diverses choses est une maladie flatteuse (amabilis insania), qui ne laisse pas de faire beaucoup de mal. […] Il a dit de Nicole et l’on peut dire de lui que « sa coutume de pousser les raisonnements jusqu’aux derniers recoins de la dialectique le rendoit mal propre à composer des pièces d’éloquence. » Ce désintéressement où il était pour son propre compte dans l’éloquence et la poésie le rendait d’autre part plus complet, plus fidèle dans son office de rapporteur de la république des lettres.
On a souvent répété que les historiens, les auteurs comiques, tous ceux enfin qui ont étudié les hommes pour les peindre, devenaient indifférents au bien et au mal. […] Comme la nature fait quelquefois servir des maux partiels au bien général, de stupides barbares se croyaient des législateurs suprêmes, en versant sur l’espèce humaine des infortunes sans nombre, dont ils se promettaient de diriger les effets, et qui n’ont amené que le malheur et la destruction.
S’il n’y atteint pas, la faute est à nous qui l’avons mal préparé ; il y arrivera, si nous prenons la peine de l’y conduire. […] Formées par un lent et délicat tissage, à travers un long appareil de signes, parmi les tiraillements de l’orgueil, de l’enthousiasme et de l’entêtement dogmatique, combien de chances pour que, dans la meilleure tête, ces idées correspondent mal aux choses !
» XIII Saisi d’un accès de son mal sur la route, il veut frapper de sa lance le jeune harpiste qui chante et qui joue de son instrument auprès de sa couche. La lame mal dirigée est détournée par la Providence, ce hasard des grands hommes ; elle ne perce que le mur.
Lazaro fit dissoudre des perles et des diamants qui ne firent qu’accroître le mal. […] Luther insurgea l’Allemagne ; l’unité se rompit sous le poids de l’or mal acquis ; mais le génie de Léon X régnait toujours.
Il ne s’obstina pas : il ne chercha qu’à tomber avec grâce — en se faisant le moins de mal possible. […] Ce n’est pas qu’il faille toujours le croire : il fausse parfois ses portraits, non parce qu’il voit mal, mais selon l’idée qu’il veut donner de l’original.
Pendant un pèlerinage qu’elle fait avec monsieur le curé, Marie est assaillie et mise à mal par des ermites et par un santi-belli (marchand de statuettes et d’objets de piété), et elle est si parfaitement ignorante qu’elle ne se doute point de ce qui lui est arrivé. « Ils l’ont renversée, dit-elle, et l’ont mordue partout. » Quand elle sait son malheur, elle s’enfuit et parcourt longtemps la montagne. […] Mais le haineux Clochard accuse l’abbé Célestin d’avoir fait le mal avec la bergère.
Celui-ci apporterait les devoirs corrigés et raclés soigneusement d’un consciencieux élève, celui-là serait un enfant mal venu de Lamartine, revu et corrigé par M. de Strada, et je n’aurais pas pris la peine d’analyser leurs vers. […] En soi, peut-être ce dernier trait ne serait-il pas un très grand mal ; ce qui nous intéresse c’est l’homme en dehors de l’époque et du pays où vécut tel personnage ; que ce personnage fût italien, allemand, lapon, nègre ou malais, cela importerait peu si le Poète devenait à son gré lapon, malais ou italien, et s’il n’était tenté aussi de sacrifier l’esprit de son œuvre aux puérilités de la « couleur locale ».
» — « Quand on le voyait pour la première fois avec son habit marron à grandes poches, ses boutons d’or, ses manchettes de mousseline, son jabot barbouillé de tabac, sa perruque ronde mal peignée et mise de travers, et qu’on l’entendait parler avec si peu d’affectation et de recherche, quoique avec un si grand sens et tant d’érudition et d’esprit », il était impossible d’imaginer qu’on fût en présence d’un homme si vénéré. […] Un grand et vrai politique ne doit pas être bon comme un particulier ; il doit agir et gouverner en vue des bons et des honnêtes gens, voilà sa morale ; mais, pour cela, il doit croire au mal et aux méchants, y croire beaucoup et s’en défier sans relâche.
Il porte le millésime 1789, avec cette indication dérisoire : Au Vatican ; et pour toute préface, on lit ces mots qui font un singulier contraste avec la destinée prochaine de Saint-Just : « J’ai vingt ans ; j’ai mal fait ; je pourrai faire mieux. […] Dans un discours sur les subsistances (novembre 1793), il a des lueurs de justesse et des aperçus qui se rattachent encore à l’expérience : Il faudrait interroger, deviner tous les cœurs et tous les maux, et ne point traiter comme un peuple sauvage un peuple aimable, spirituel et sensible (toujours de la sensibilité : c’est encore un des mots favoris du temps), dont le seul crime est de manquer de pain.
» * * * — Rien de si mal écrit qu’un beau discours. […] Tout cela me dispose mal.
Les fleurs des anciens semblent fauées, lorsqu’elles sont cueillies par des mains mal habiles. […] On a rassemblé dans ce recueil, mal digéré, le bon comme le mauvais, & les traductions les plus élégantes, ainsi que les plus plattes.
Ainsi on peut rapprocher l’histoire de Déro et de ses frères de celle de Joseph vendu par les siens et leur rendant le bien pour le mal. […] — Il est honnête et ne soupçonne pas le mal chez autrui.
Mais je pensais : « Que peut-il m’advenir de mal de cette nature qui m’est si amie ? […] En ces heures où, à chaque instant, on expose sa vie, ils se montrent tels qu’ils sont, n’ayant plus la forfanterie du bien ni du mal.
Qu’elles se distinguent par le charme du crime ou par l’odeur de la sainteté, que leurs gestes soient alanguis ou violents, ces femmes malades du cœur ou de l’esprit ont dans les yeux le plombé de la fièvre ou la nitescence anormale et bizarre de leur mal, dans le regard, l’intensité du surnaturalisme. […] Charles Baudelaire rappelle ici une des plus belles pièces des Fleurs du Mal, la VIe, les Phares.
Assurément, l’écrivain doit connaître le mal, mais il n’est pas fait pour ne dire que cela, pour ne pas voir la santé à côté de la maladie, le remède à côté de la souffrance, et surtout, puisqu’il touche à des plaies, il n’a pas le droit de les aviver ou de les traiter comme une simple matière à description. […] Et obligés de dire le mal, de le peindre, de vous en servir comme d’un élément trop réel et trop commun, ne le faites pas aimer.
Quand Leibniz disait de la matière que c’est « un esprit instantané », ne la déclarait-il pas, bon gré, mal gré, insensible ? […] Conscience et matérialité se présentent donc comme des formes d’existence radicalement différentes, et même antagonistes, qui adoptent un modus vivendi et s’arrangent tant bien que mal entre elles.
En médecine, il est une doctrine qui prétend guérir les semblables par les semblables ; en morale, surtout au théâtre, pareille doctrine est des plus périlleuses ; chercher le retour au bien par les images prolongées et souvent attrayantes du mal, c’est aimer à rester en chemin.
Il est un personnage surtout, depuis cinquante ans, vénérable aux amis de la liberté, et que M. de Carné n’aborda jamais qu’avec une sorte d’ironie méprisante qui sied mal à une intelligence si grave, si morale, et si faite pour honorer tant de constance dans une grande cause.
Le roi de Prusse jugeait Louis XV d’après lui ; … mais il avait mal vu, et ne tarda point d’abandonner un allié dont il reconnaissait la nullité, quand il eut retiré tous les avantages qu’il attendait de la campagne. » Le roi ira-t-il ou non à l’armée ?
mon amie, ne faisons point de mal ; aimons-nous pour nous rendre meilleurs ; soyons-nous, comme nous l’avons toujours été, censeurs fidèles l’un à l’autre. » « Je disais autrefois à une femme que j’aimais et en qui je découvrais des défauts (madame de Puisieux) : Madame, prenez-y garde ; vous vous défigurez dans mon cœur : il y a là une image à laquelle vous ne ressemblez plus. » Dans une lettre, Diderot raconte comment il est tout occupé de la philosophie des Arabes, des Sarrasins et des Étrusques ; puis il s’écrie avec un élan de tendresse incomparable : « J’ai vu toute la sagesse des nations, et j’ai pensé qu’elle ne valait pas la douce folie que m’inspire mon amie, j’ai entendu leurs discours sublimes, et j’ai pensé qu’une parole de la bouche de mon amie porterait dans mon âme une émotion qu’ils ne me donneraient pas.
Une expérience rigoureuse lui avait appris qu’aux maux profonds, aux peines du dedans, il n’est de remède que le temps, le silence absolu, et aussi l’espoir de ce monde invisible où nous nous réunissons dans nos pures essences.
Soit prévention de Bonaparte, soit âpre refus de Georges aux propositions qui lui furent faites, l’entretien finit mal.
Je sais que c’est une défense peu avantageuse à prendre que celle du Système de la nature et de cette faction d’holbachienne ; mais je ne veux soutenir d’Holbach ici que comme un homme d’esprit, éclairé quoique amateur, sachant beaucoup de faits de la science physique d’alors, n’ayant pas si mal lu Hobbes et Spinosa, maltraité de Voltaire, qui le trouvait un fort lourd écrivain et un fort ennuyeux métaphysicien, mais estimé de d’Alembert, de Diderot, et dont l’influence fut grande sur Condorcet et M. de Tracy.
Nous n’avons point retrouvé, dans la Revue des Deux-Mondes, l’article sur les Reisebilder dont il est question dans cette lettre, mais il se peut bien (à moins que nous n’ayons mal cherché) que M.
Comme exemple, je citerai deux axiomes de la critique française, que bien certainement aucun esprit assez mal fait, en France, n’a jamais eu, n’aura jamais l’idée de mettre en doute.
Ce qui, mal placé, est une niaiserie ou une platitude, peut-être, dans un autre lieu, une vue profonde et fertile en conséquences.
C’est une des caractéristiques de l’organisation sociale de ce temps, que cet homme mal vu du roi, et qui n’aimait pas le roi, ait vécu plus de quinze ans près du roi, sans songer à quitter sans qu’on songeât à le renvoyer, parce que, étant duc et pair, sa place était là.
Entre 1887 et 1891, traversant une crise physiquement maladive, il écrit les Soirs, les Débâcles, les Flambeaux noirs, « abrupte et puissante trilogie trahissant ce que les heures mauvaises lui ont enseigné de lui-même » : les Soirs, la peine du corps infirmé par la douleur ; les Débâcles, la détresse de l’âme que le mal envahit et révolte.
Elle nous a appris que les lois sont infiniment précises, et que si celles que nous énonçons sont approximatives, c’est parce que nous les connaissons mal.
Ce n’est pas mal, évidemment, mais cela n’a rien à voir avec la lyre et la prose même de Courteline paraît encore trop sérieuse à la foule qui s’en détourne pour les outrances du café-concert et les déshabillés galants du music-hall.
L’aspect grossier des ruines qui couvrent la Palestine prouve que les villes qui ne furent pas reconstruites à la manière romaine étaient fort mal bâties.
Quelquefois, en effet, les Samaritains le recevaient mal, parce qu’ils le supposaient imbu des préjugés de ses coreligionnaires 665 ; de la même façon que de nos jours l’Européen libre penseur est envisagé comme un ennemi par le musulman, qui le croit toujours un chrétien fanatique.
Il est permis de croire que l’exaltation religieuse de Pascal, son renoncement si brusque et si absolu à la vie du monde, voire même à la vie scientifique, furent dus en grande partie au mal obscur et grave qui l’atteignit à la fleur de l’âge et le coucha si jeune au tombeau.
Le costume est ici mal observé ; Minos est le juge des enfers dans la Mythologie grecque, mais ne l’est point dans la religion du Mogol, qui est le mahométisme.
L’élève appellé Milot, à qui le public, la partie saine de l’académie et ses camarades avaient déféré le prix, se trouva mal.
Les évenemens y sont mal amenez, et souvent les personnages s’y trouvent dans des situations où ils n’ont naturellement rien de bon et de naturel à dire : mais on y reconnoît de temps en temps à la poësie du stile l’élevation, et même la fertilité du génie de Corneille.
Un autre mot mal interpreté a beaucoup encore contribué à cacher aux auteurs modernes l’existence de cette déclamation.
Les commentaires qu’ont voulu faire sur ces passages des sçavans illustres, mais qui ne connoissoient bien que leurs cabinets, les éclaircissent mal.
Brunetière déclare le conseil sans portée, et, pour montrer qu’une métaphore suivie peut être ridicule, il cite celle que Molière met plaisamment dans la bouche de Trissotin : Pour cette grande faim qu’à mes yeux on expose, Un seul plat de huit vers me semble peu de chose, Et je pense qu’ici je ne ferai pas mal De joindre à l’épigramme ou bien au madrigal Le ragoût d’un sonnet, qui, chez une princesse, A passé pour avoir quelque délicatesse.
Il est évident que le juré qui ne voudra pas appliquer la peine de mort, dans les cas prévus par la loi, sera obligé de trahir sa propre conscience, de mentir à l’évidence du fait, ce qui est un très grand mal, parce que c’est une sorte d’immoralité qu’on ne se reproche point.
— entre le mal que, sans le vouloir, il a fait, et le bien qu’il voulait et qu’il n’a pas su faire ; — entre les incompréhensibles faiblesses de sa vie publique et l’héroïsme surnaturel de sa mort.
Elle donne à un de ses amis des leçons du bon sens le plus vulgaire, et pour faire passer le dur pédantisme de sa leçon elle ajoute gracieusement : « Si vous le prenez mal, vous êtes un sot !
Jonathan Swift est né à Dublin, mais ses parents étaient du comté d’York ; il était donc Anglais de race, et on est bien aise de le savoir, quand on croit que la race est encore pour les hommes quelque chose… Mal élevé et malheureux dans les premiers temps de sa vie, Swift, né avec un esprit violent, fut de bonne heure misanthrope dans une société qui blessait son orgueil par toutes ses institutions, et quand le bonheur, la célébrité et l’influence sur les hommes lui vinrent, l’étoffe avait son pli et le vase était imbibé de liqueur amère.
Avec son style naturellement sans couleur, ce style blanc et doux que l’abstraction a blanchi encore, il n’a fait aucun mal aux yeux des hommes à conserves qui avaient à le juger, et ils ont tous apprécié infiniment cette flanelle… Certainement, pour manquer le prix, il fallait s’y prendre de toute autre manière.
Enfantin représente la foi, la volonté, le consentement de plusieurs, en faisant la déclaration scandaleuse qu’il vient d’opposer tout à coup à l’enseignement d’un prêtre catholique, orthodoxe et respecté, nous dirons qu’il nous importe, à nous chrétiens, de savoir le danger qui nous menace, et si tout cela, comme nous le pensons bien plutôt, n’est que rêverie de visionnaire attardé qui ne peut guérir de son mal de jeunesse, il importe qu’on le sache aussi, afin que justice soit faite encore une fois de cette folie qui repousse, après vingt-trois ans, comme un polype indestructible, dans les têtes dont on le croyait arraché, et qu’enfin on n’y revienne plus !
Son secret mourait à sa bouche… Avant d’à jamais t’assoupir, Douleur déjà vieille et finie, Que de maux il fallut subir !
Le rayon, qui fait mal aux faibles yeux, il le tamise, et les faibles yeux sont reconnaissants.
Le sien, qu’il appelle une promenade, avec une modestie bien légère, — car une promenade de deux volumes in-8°, de quatre cents pages19, fait l’effet d’une assez longue route, — le sien nous apprend-il sur l’Amérique des choses intimes et profondes jusque-là inaperçues ou mal observées ?
Considérons en dernier lieu si nous pouvons concevoir dans telle occasion, dans tel lieu, dans tel temps, quelques bienfaits divins qui eussent pu mieux conduire et conserver la société humaine, au milieu des besoins et des maux éprouvés par les hommes ; voilà les preuves que nous fournit l’éternelle bonté de Dieu. — Ces trois sortes de preuves peuvent se ramener à une seule : Dans toute la série des choses possibles, notre esprit peut-il imaginer des causes plus nombreuses, moins nombreuses, ou autres, que celles dont le monde social est résulté ?
Tant la religion peut enfanter de maux !
On croiroit d’abord que le courage seroit d’autant plus digne d’admiration, qu’il se resoud à un plus grand mal pour un plus petit avantage : mais il n’en est pas ainsi. […] Un honnête homme n’est-il pas bien surpris d’avoir été amené jusqu’à cet air de mauvaise foi par l’intérêt mal entendu de soûtenir une fausse critique ? […] Ignorent-ils que s’il faut être si circonspect, pour ne pas faillir, il faut l’être encore davantage, pour ne pas reprendre mal à propos, puisque c’est faillir doublement que d’ajoûter l’injustice à l’erreur ? […] Tout ne va mal dans le monde selon eux, que parce qu’on n’y sait pas assez la musique et la danse. […] Que l’on y trouveroit de choses aussi mal arrangées que ces quatre vers de Monsieur Despreaux !
Il a montré dans l’analyse du mal une habileté consommée, malheureusement il n’a pas indiqué avec autant de précision le remède qui doit le guérir. […] M. de Lamartine, comme tous les hommes doués d’un génie éminent, est entouré de flatteurs qui lui répètent chaque jour : Tu ne peux mal faire. […] Une nuit, il avait mal dormi ; tranchons le mot, il avait passé une nuit blanche ; il se lève au point du jour, il se met à sa table, il commence la pièce qui s’appelle Novissima Verba, ou Mon âme est triste jusqu’à la mort. […] Les autres poèmes de Byron, que M. de Lamartine accuse de célébrer éternellement le triomphe du mal, se défendent par eux-mêmes. […] Lorsqu’elle chantait des couplets mal rimés, elle n’était qu’une femme ; inspirée de M.
C’est pis en Angleterre, où il est plus extérieur et plus mal appliqué qu’en France, où des mains étrangères l’ont plaqué ; et où il n’a pu recouvrir qu’à demi la croûte saxonne, où cette croûte est demeurée fruste et rude. […] En effet, c’est le héros national : Saxon d’abord, et armé en guerre contre les gens de loi, « contre les évêques et archevêques », dont les juridictions sont si pesantes ; généreux de plus, et donnant à un pauvre chevalier ruiné des habits, un cheval et de l’argent pour racheter sa terre engagée à un abbé rapace ; compatissant d’ailleurs et bon envers le pauvre monde, recommandant à ses gens de ne pas faire de mal aux yeomen ni aux laboureurs ; mais par-dessus tout hasardeux, hardi, fier, allant tirer de l’arc sous les yeux du shérif et à sa barbe, et prompt aux coups, soit pour les embourser, soit pour les rendre. […] Il a songé « qu’il était dans un désert, — il ne put jamais savoir en quel endroit, — et comme il regardait en l’air, — du côté du soleil, — il vit une tour sur une hauteur, — royalement bâtie, — une profonde vallée au-dessous, — et là-dedans un donjon, — avec de profonds fossés noirs, — et terribles à voir. » Puis, entre les deux, une grande plaine remplie de monde, « d’hommes de toutes sortes, — pauvres et riches, — travaillant et s’agitent, — comme le veut le monde ; — quelques-uns à la charrue — labouraient avec un grand effort, — pour ensemencer et planter, — et peinaient durement, — gagnant ce que des prodigues venaient détruire et engloutir164. » Lugubre peinture du monde, pareille aux rêves formidables qui reviennent si souvent chez Albert Durer et chez Luther ; les premiers réformateurs sont persuadés que la terre est livrée au mal, que le diable y a son empire et ses officiers, que l’Antechrist, assis sur le trône de Rome, étale les pompes ecclésiastiques pour séduire les âmes et les précipiter dans le feu de l’enfer. […] Au commandement de Conscience, voici que Nature envoie d’en haut l’escadron des fléaux et des maladies, « fièvres et fluxions, — toux et maux de cœur, — crampes et maux de dents, — rhumatismes et rougeoles, — teignes et gales de la tête, — inflammations et tumeurs — et enflures brûlantes, — frénésies et maladies ignobles, — fourriers de Nature. » Des cris partent : « Au secours !
Il séjourna chez différents patrons, vécut à Moscou comme dans les chefs-lieux de gouvernement, souffrit et supporta mille maux, connut la misère, et eut recours à tous les expédients imaginables. […] Il fut donc réduit, bon gré, mal gré, à s’en retourner au village de son père. […] Lavretzky goûta la soupe et en retira la poule, dont les tendons se dissimulaient mal sous la peau dure et coriace ; la chair avait la saveur d’un morceau de bois. […] « Je vous prie, dit-il d’une voix mal assurée, ne me raillez pas ainsi ; je ne suis pas un fou. […] — Parce que je commence à soupçonner de quelle nature sera ma résolution. » Elle prétexta un mal de tête et monta à sa chambre, en lui tendant d’un air irrésolu le bout de ses petits doigts.
À une allusion sur la vente de ces jours, il laisse échapper un petit mouvement nerveux, et d’une voix rêche, dit que les amateurs sont des brocanteurs en chambre, dissimulant mal son effroi des ventes, où le haut chiffre où sont cotés ses tableaux aujourd’hui, peut faiblir demain. […] ces messieurs et ces dames se fichent pas mal des tableaux et des sculptures ! […] Vendredi 14 septembre Les éléments de la cuisine (viande de boucherie, gibier, poisson, légumes) sont si mauvais en Picardie, cette province, où règne le veau aux pruneaux, que Rattier père, qui était un gourmet supérieur, après avoir passé une journée à Doullens, où son fils était sous-préfet, lui dit : « Fais-toi nommer à Bayonne, ou n’importe où, et aussi loin que tu voudras… j’irai te voir… mais ici, jamais je ne reviendrai, on mange trop mal ! […] Or, les Français étaient derrière les murailles d’un Fort, avaient des provisions et des munitions pour trois mois, et se trouvaient en présence d’ennemis mal armés, qui n’avaient ni canons, ni échelles. […] Dans une pièce, où l’actrice avait à dire d’une fille, qui s’était mal conduite, qu’elle n’avait plus de fille, il la voyait soudain, sans souci du public, faire un signe de croix à sa ceinture, et envoyer un baiser à la cantonade, — un baiser à sa vraie fille, qu’elle adore.
Sans nous attarder aux brillantes tentatives du xviie et du xviiie siècle, et tout en donnant cette opinion de Voltaire qui veut que « les vers soient tellement faits que le lecteur ne s’aperçoive pas qu’on a été occupé de la rime », rappelons que Fabre d’Olivet, au commencement de ce siècle, s’éleva contre les ennemis de la rime, déclarant que « tout le mal que l’on dit d’elle n’est vrai qu’entre les mains d’un homme sans génie ou qui plaint sa peine », ce qui n’empêchera pas Mistral de nous donner une merveilleuse épopée et quelques poètes contemporains de mener bataille contre la rime. […] — Là, par exemple, écoutez, ne nous hâtons pas de dire trop de mal des snobs. […] ……………………………………… Il est impossible que récuse cet impromptu celui qui ressuscita la « grand-pitié » de Michelet pour les ardentes et attirantes névroses du Mal dans ce livre tumultueux et tant effarant, le Satanisme et la Magie, mais qu’il nous absolve puisque nous citerons cette sienne strophe d’une hymne éperdue : Tu dévoras mon cœur, ô Mage insatiable ! […] Même en admettant qu’il n’écrive pas en langue morte, je soupçonne dans sa manière un souci classique, homérique et virgilien, orienté aux plus orgueilleuses comparaisons et mal d’accord avec la naïveté célèbre qui ne permet pas à ce poète de se laisser inscrire parmi les Quarante… » Mais, je vous le répète, sur ce point, je n’affirme pas ! […] monsieur Retté, cela serait vraiment très mal pour un — aimable d’ailleurs — anarchiste aussi convaincu que vous l’êtes !
Thiers, au contraire, semble par moments s’être méfié davantage de sa plume, et il a redoublé, à l’égard des personnes, de précautions et de ménagements qui sont chez lui du meilleur, goût ; il y a mis proprement de la courtoisie ; mais le résultat, le fin mot est le même : l’impossibilité d’une durée pour ce premier essai de Restauration si mal conduit est également évidente.
Pour moi, je l’avoue, j’en veux moins aux grands esprits tels que le sien, même quand je ne les épouse pas ; je m’y attache, bon gré, mal gré, en les étudiant, en les suivant, ne fût-ce que dans leur correspondance ; et celle de Swift avec les illustres amis dont il vivait séparé n’est pas sans charme.
W. de Schlegel, cet illustre critique, a toujours été assez injuste, et, malgré les années qu’il a vécu ici, toujours assez mal informé à notre égard.
Sans doute, le plus efficace des repentirs, serait des actions vertueuses ; mais à la fin de la vie, mais même dans la jeunesse, quel coupable peut espérer de faire autant de bien qu’il a causé de mal ?
Calvin la condamme par le mal.
Commencez à l’épousseter, et gardez-vous de faire mal aux habits qui ne sont pas coupables.
Toujours est-il qu’Edmond Girard, dénué de roublardise commerciale et d’habileté financière, dut battre en retraite au début de la bataille, laissant tous ses canons à l’ennemi ; mais ce serait bien mal le connaître que de le croire découragé.
Il roule d’un monde sur l’autre, ou plutôt des mondes mal harmonisés se heurtent dans son sein.
Où trouver une touche plus philosophique, que dans la Description des maux qui suivent la mollesse & l’oisiveté ?
Parmi ceux qui, dans leur jeunesse, avoient étudié le Latin, combien l’ont toujours mal sçu, ou l’ont négligé depuis, & même oublié ?
Le peuple n’approuve guère que ce qui est bien ; le prêtre, au contraire, n’approuve guère que ce qui est mal.
Donoso Cortès n’avait pas prévu davantage que l’Empire, sorti d’un coup d’État et qu’il a bien jugé dans son effet immédiat, serait un temps d’arrêt infligé, pendant dix-huit ans, à la Révolution, qui n’a vaincu que parce que l’Empire, mal inspiré, après l’avoir été si bien, s’est lâchement abandonné à elle.
Digne par la proportion de son modèle, le portrait de Chateaubriand a donc été une toile à l’huile parmi les aquarelles de Monselet, et si vous ôtez quelques taches de goût, grandes comme des mouchetures sur une glace limpide13, vous avez là une pure et lumineuse peinture d’histoire littéraire dans laquelle le Monselet du xviiie siècle n’a eu absolument rien à faire ni rien à voir… On sait si le génie de Chateaubriand, à part même son christianisme, fut antipathique au xviiie siècle, et aujourd’hui que le xviiie siècle, mal mort, voudrait recommencer de vivre, Chateaubriand, moqué par Morellet et Chénier, a retrouvé dernièrement un nouveau Morellet dans Stendhal.
Lisez, pour en juger, son chapitre sur les médecins, ces confesseurs du corps qui tiennent, par en bas, une société matérialiste, et dont on ne dira jamais le mal qu’on a dit des confesseurs de l’âme, qui, du moins, tenaient la société par en haut !
Le plus grand mal qu’ait produit la Révolution, ce n’est pas d’avoir fui des révolutionnaires, — elle n’était dans le monde que pour cela !
le ton qu’on avait, en ce moment-là, à Paris, et qu’il prit bientôt, comme Alcibiade — cet autre Arlequin de l’Antiquité — prit le ton persan chez les Persans, déplut tout d’abord à cet homme que dix ans de travaux scientifiques avaient passé à leur empois… mais qui, en deux temps, fut désenglutiné et devint Français et Parisien, et tellement Parisien que quand il fut obligé de quitter Paris il eut le mal du pays d’un pays qui n’était pas le sien et qu’il emporta dans le sien pour lui gâter éternellement sa patrie !
Mais ce mal, qui vient de l’oubli d’un principe, sera détruit par le principe même.
Le monde du Croissant avait, tant de fois, essayé de faire tant de mal au monde de la Croix, qu’il eût été tout simple que les |philosophes du xviiie siècle eussent gardé pour cela à Mahomet un peu de reconnaissance.
Cette anarchie incontestable, et que vous voyez, est-elle le mal irrémédiable d’une société condamnée par elle-même à mourir ?
Il sera possible dans toutes les langues et quelle que soit celle dans laquelle il chante, — que ce soit une langue qu’on ne parle plus ou une langue qu’on parle mal encore, — que ce soit un idiome incertain ou usé !
Quand l’Inspiration, dont le caractère semble être d’agrandir notre âme aux dépens de notre corps, ne nous a pas, comme dans le livre dont il s’agit ici, allégé le poids de nos organes, et qu’on a été soumis au martelage tellement appuyé de ce double coup, la sensibilité en est comme stupéfiée, on est accablé de cette matérielle perfection, et on éprouve le désir de retourner à quelque négligé divin, à quelque mal rimé, puissant ou exquis, comme Alfred de Musset ou Maurice de Guérin, par exemple.
Cette valse à deux temps qui me fit bien du mal ; Le fifre au rire aigu raillait le violoncelle, Qui pleurait sous l’archet ses notes de cristal.
Théophile Gautier ne ferait pas, s’il pouvait saigner, ni personne de cette école qui voudrait dorer l’or et blanchir le lis, et qui laisserait tout ce vermillon couler avec faste, tandis que le poète, en M. de Châtillon, a la pudeur d’essuyer sa blessure et ne tache plus les choses qu’il touche que du rose d’un sang épuisé, qui fait bien plus de mal à voir que s’il était couleur de pourpre !
Didier est un lourd qui ne donnera pas à cet Oubli plus de mal qu’un autre pour l’emporter.
Les grands poètes du règne de Louis XIV, et leur gloire solide, se prêtaient mal à la gentillesse de rôle que suppose ce titre raffiné. […] Nous avons voulu dire simplement que, quand Delille donnait une séance au Lycée, celle séance était rétribuée, comme pareille chose se pratique tous les jours pour d’autres artistes estimables, chanteurs, acteurs ; il n’y a, en fait, aucun mal moral à cela. […] L’abbé de Tressan, mal reçu d’elle un jour, ne put s’empêcher de dire à Delille : « Quand on choisit ses nièces, on les devrait mieux choisir. » — On trouvera à la fin de cet article une note contradictoire au sujet de madame Delille : une personne respectable qui l’a beaucoup connue a cru que l’opinion était à redresser sur son compte.
Lorsque Tennyson publia ses premiers poëmes, les critiques en dirent du mal. […] Nous sommes mal à notre aise tant que nous restons collés au sol, clopinant sur nos deux pieds qui nous traînent misérablement çà et là dans l’enclos où nous sommes parqués. […] Les fenêtres sont fermées ; une lumière çà et là perce à travers un volet mal clos et montre un dahlia mort sur le rebord d’une croisée.
pendant que nous espérons, peut-être le mal est-il déjà fait ! […] Elle s’est mal conduite à mon égard ; elle s’est enfouie loin de moi, au moment où j’allais la faire participer à mon bonheur. […] ” Afin de ne pas lui faire de mal, je cherchai à surmonter ma douleur.
… Ce qui me reste de temps à vivre n’est pas destiné à guérir mes maux, mais à les finir !… Vous me reprochez le sentiment et la plainte de mes maux. […] chaque jour qui se lève accroît mes maux au lieu de les soulager.
Méphistophélès, portrait de Goethe au fond, fut l’indifférence railleuse entre le bien et le mal, l’éternel blasphème de l’humanité, représentée par la jeune et infortunée Marguerite. […] Par une sorte de flatterie envers les Allemands, auxquels il devait faire tant de mal, il avait pris quelque connaissance de la littérature allemande ; il était d’ailleurs versé dans la littérature latine, et avait édité Horace. […] Est-ce tout à fait un mal ?
Wilder écrit : « C’est peu de chose, moins de mal que de peur » (10). […] « Le mal que le traducteur a cru devoir se donner, c’est de décorer sa langue vulgaire de rimes ineptes, quoique dans le chant on ne s’aperçoive presque jamais de la rime. […] Non ; le mal vient en premier lieu de ces quelques personnes, qui a beaucoup de talent et à beaucoup de zèle joignent une très malheureuse ignorance de ce qu’est le drame wagnérien.
Celle qui suit commence par de très beaux vers sur le métier du satiriste : Muse, changeons de style et quittons la satire ; C’est un méchant métier que celui de médire ; À l’auteur qui l’embrasse il est toujours fatal : Le mal qu’on dit d’autrui ne produit que du mal. […] En d’autres termes, la critique est la recherche et la manifestation de cette règle logique et intime qui préside et doit présider à toute création de notre intelligence ; sorte de conscience de l’esprit qui, au lieu de nous dire : Cela est bien, cela est mal, nous dit avec la même autorité : Cela est beau, cela est laid ; cela est proportionné, cela est disproportionné ; cela est dans la mesure, cela est dans l’excès ; cela est dans la vérité, ou cela est dans la chimère.
La douleur n’exagère point ici l’excès de ses maux ; ils sont attestés par les proclamations de ceux qui nous frappent. […] Jouet de son humeur bizarre, Je dois compatir à tes maux ; Tiens, que ce faible don répare Le prix qu’attendaient tes travaux. […] Inspire-moi ces vers qu’on aime, Qui, tels que toi, plaisent toujours ; Répands-y le charme suprême Et des plaisirs, et des maux même, Que je t’ai dus dans mes beaux jours. […] Mais les habitudes du style poétique du xviiie et même du xviie siècle, familières à Fontanes, vont mal avec cette tournure hardie, avec ce relief heureux et rajeunissant, ici nécessaire, qu’André Chénier possède si bien et qu’atteignit même Ronsard. […] Non est Dea nescia nostri Quae dulcem curis miscet amaritiem ; ce qui revient à l’ode de Fontanes : Répands-y le charme suprême Et des plaisirs, et des maux même, Que je t’ai dus dans mes beaux jours.
Goethe (et il l’a dit) s’est guéri lui-même en faisant Werther ; il s’est débarrassé de son mal en le peignant, mais il l’a en même temps inoculé aux autres ; et alors pourquoi leur a-t-il indiqué un faux remède ? […] La vraie conclusion de Werther pour les artistes (car Werther est un artiste ou veut l’être), ce serait la conclusion qu’a choisie Goethe lui-même, s’occuper, produire, se guérir en s’appliquant ne fût-ce qu’à se peindre ; et si tous, dans cette tâche, n’atteignaient pas aussi haut qu’un Goethe le peut faire, ils y gagneraient du moins de sortir de leur mal, de le traverser, et de se rattacher bientôt derechef aux attraits puissants de la vie.
Des deux parts on a raison jusqu’à un certain point, et l’on a tort ; on est entre deux écueils : — l’inquiétude, la démangeaison perpétuelle du bien parler, ou la ressource et la théorie du mal écrire. […] Impressionner dont vous ne voulez pas, n’est pas plus mal formé qu’ambitionner qui a fait doute à son heure et qui a eu le dessus.
Ceux qui écoutent aux portes sont trop peu au fait des us et coutumes de l’Académie pour ne pas mal entendre. […] Oui, mais la société a marché depuis ; bien ou mal, son milieu s’est déplacé ; ce déluge qu’annonçait et prophétisait Royer-Collard, la démocratie, a débordé dans toutes les sphères ; le gémissement est inutile, et il n’est pas permis de se renfermer dans le même cercle restreint, élevé, infranchissable.
A voir la fatale et croissante préoccupation qu’inspirent aux survenants ces figures gigantesques, trop souvent salies de boue ou livides de sang en même temps qu’éclairées du tonnerre, à voir la logique intrépide des doctrines qui s’y rattachent et qui servent tout aussitôt d’occasion ou de prétexte à des craintes et à des répressions contraires, on peut juger que le mal, les moyens violents, iniques, inhumains, même en supposant qu’ils aient durant le moment de crise une apparence d’utilité immédiate, laissent ensuite, ne fût-ce que sur les imaginations frappées des neveux, de longues traces funestes, contagieuses, soit en des imitations théoriques exagérées, soit en des craintes étroites et pusillanimes. […] Le détail des champs, la couleur des vignes et des noyers, les sueurs des vignerons, la récolte, la basse-cour, les réserves de fruits secs, les poires tapées, l’occupent et la passionnent : « J’asine à force, » écrit-elle à Bosc dans une petite lettre richement et admirablement rustique, foisonnante pour ainsi dire83, qui aurait assez mal sonné, je crois, sous les ombrages majestueux de Coppet84, mais telle que notre pseudonyme George Sand en écrirait du fond de son Berry en ses meilleurs jours.
Il y a des jours où, sans le vouloir, nous repassons en esprit un morceau de notre vie, telle journée de voyage, telle soirée d’opéra, telle conversation intéressante ; nous nous sentons ramenés d’une manière fixe à l’ancien état ; les idées qui essayent de se jeter à la traverse sont mal venues ; elles sont chassées, ou s’arrêtent sur le seuil ; si au premier moment quelque lacune se rencontre dans notre souvenir, elle finit le plus souvent par se combler d’elle-même ; un détail oublié surgit à l’improviste. — Je me rappelle en ce moment une soirée passée à Laveno, sur le lac Majeur, et, à mesure que j’insiste, je revois mon dîner d’auberge, la grosse nappe toute blanche, la jolie servante effarée ; puis, un peu après, le sentier tortueux parmi les thyms et les lavandes, le lac d’un gris bleuâtre sous une enveloppe moite de vapeur, les plaques de lumière, les traînées scintillantes, les broderies d’argent qu’un rayon égaré semait çà et là sur la nappe unie, le bruissement imperceptible des petits flots qui venaient mourir sur la grève, et les clochettes des vaches qui tintaient çà et là dans le silence. […] Abernethy, à la suite d’une blessure à la tête, il parlait toujours français. » En d’autres cas, la même réviviscence a été observée pour d’autres langues. « Un célèbre médecin de mes amis, dit encore le même auteur, m’apprend qu’ayant un jour la fièvre, mais sans aucun délire, il répéta de longs passages d’Homère, chose qu’il ne pouvait faire étant bien portant. » Un autre, qui, en santé, était fort mal doué pour la musique et avait presque oublié la langue gaélique, chantait, étant malade, des chansons gaéliques, et cela avec une grande précision, quoique la mélodie fût difficile et qu’auparavant il fût tout à fait incapable de les chanter.
Cette cloche, grâce à un mécanisme mal connu, correspond par divers fils, qui sont les fibres de la couronne de Reil, à un système de petites sonnettes qui composent les hémisphères et dont les sonneries, mutuellement excitables, répètent exactement ses tintements avec leur acuité et leur timbre ; ces sonneries sont les images. […] À ce moment, complétée par des détails précis, et confrontée avec les images abréviatives par lesquelles nous résumons une journée, une semaine, elle a glissé une seconde fois en arrière, au-delà de la journée présente, de la journée d’hier, de la journée d’avant-hier, de la semaine, plus loin encore, au-delà de la masse mal délimitée que constituent nos souvenirs prochains.
Ses gros souliers, ses bas de laine noire mal étirés sur ses jambes grêles, sa redingote étroite et râpée suivait et dessinait la charpente de ses côtes. […] Vous ne tenez pas plus que moi à l’ordre de choses sous lequel nous avons le bonheur de vivre ; mais vous ne voudriez pas, je le sais, jeter le pays dans une révolution mal préparée et dangereuse, qui retomberait sur votre responsabilité.
Mendès cherche le beau et la lumière, et tombe dans le mal et dans la nuit, non involontairement et par imprudence, mais de propos délibéré. […] Je renais ; mal, tu te dérobes ; J’entends des murmures de robes ; Je suis frôlé par des frisons ; Les murs des chambres, mes prisons, Se peignent d’heureux horizons ; Les rires tintent, en clarines, Je vois des lèvres purpurines, Au diable les antipyrines !
Les deux partis qu’irritait son indifférence railleuse avaient un égal intérêt à le faire mal mourir. […] Voilà trois siècles que nous voyons au milieu de nous bon nombre des personnages qu’il a créés, et que nous nous reconnaissons dans les deux principaux, Pantagruel et Panurge : l’un le type du bon relatif, plutôt que de la perfection romanesque ; l’autre le type du médiocre plutôt que du mal, et à cause de cela pas plus haïssable que l’autre n’est admirable.
La plupart, interprétant mal l’étymologie de son nom, s’imaginent qu’il ne travaille que sur les mots (quoi, dit-on, de plus frivole ?) […] Si le Moyen Âge, par exemple, a si mal compris la philosophie ancienne, est-ce faute de l’avoir suffisamment étudiée ?
Souvenirs wagnériens Ce n’est jamais sans émotion que je pense à l’époque de ma vie où j’ai vécu, pour ainsi dire, en communauté absolue avec l’œuvre de Wagner, allant presque chaque soir l’entendre à l’Opernhaus, aux concerts de Bilse, à l’Académie de chant où la jalousie des Berlinois siffla madame Materna, ou à l’une des auditions du « Wagner-Verein » dans lesquelles le grave talent de Betz interprétait des fragments de la tétralogie encore inconnue dans l’Allemagne du Nord ; — déchiffrant tant bien que mal, sur un mauvais piano de louage, les partitions que je ne connaissais jamais assez ; — lisant ses écrits qui venaient d’être réunis en édition définitive ; — causant surtout de lui avec quelques jeunes musiciens enthousiastes comme moi. […] Et tous ces menus détails, le palais, le lac, la grande salle d’hôtel remplie de figures étrangères et résonnante d’une langue que je comprenais mal, tout cela se perd dans le rayonnement de la représentation dont les moindres détails sont demeurés gravés en moi.
La vieille légende du Charme du Vendredi Saint revînt à sa mémoire ; ce jour où Dieu, par pitié donna sa vie pour l’homme, l’homme lui-même a pitié des animaux et des plantes, il ne leur fait point de mal, et ses larmes de repentir arrosent les prés et les font fleurir. […] Bl., 1878, 100), et le sommeil de Kundry, d’où elle se réveille sans force, est analogue à celui de Brunnhilde ; Klingsor, qui se mutile pour s’approcher du Gral et qui devient ainsi la cause efficiente du drame, est évidemment conçu d’après le prototype Alberich, qui « maudit l’amour » pour se saisir de l’Or du Rhin … Connaissant cette intention, on pourrait poursuivre ces analogies sans crainte d’aller trop loin : la lance, par exemple, qui a donné tant de mal aux savants critiques, parce qu’ils ne la retrouvaient pas (sous cette forme) dans les poèmes qui racontent les légendes de Parsifal et du Gral, cette lance que Parsifal conquiert par la chasteté on l’aurait trouvée, si on avait songé à la « sainte lance » de Wotan, taillée dans le bois de « l’arbre du monde » … Nous expliquerons la raison de cette intention poétique ; pour le moment, il nous suffît d’avoir établi par quelques indications précises, l’existence dans Parsifal d’une parenté, ou antithèse, voulue avec le Ring39.
Darwin (Erasme) professe la même théorie, en substituant au mot « vibration » l’expression « mouvements sensoriels. » Bien que son système soit plein d’ « hypothèses absurdes », il a eu le mérite de voir que la psychologie est subordonnée aux lois de la vie, et de couper court par là à des questions mal posées et à des problèmes factices. […] On connaissait beaucoup de faits comme ceux-ci : un mal de dent qui disparait quand on entre chez le dentiste ; prendre de l’eau en s’imaginant que c’est de l’émétique, et vomir, etc.
L’idée plaisante que le fourmi-lion est le « lion des fourmis » égaie quelques dictionnaires : que de mal ont pris les grammairiens pour expliquer logiquement les mœurs d’un insecte par une déformation linguistique ! […] Son nom grec [mot en caractères grecs] lui venait de ce qu’elle servait, d’après Dioscoride, à guérir [mot en caractères grecs] ; l’idée de blanc est contenue dans le nom du mal (ulcère blanc) et non dans celui de la fleur.
Malgré cela, tout le monde dit du mal de cet historien ; mais dans le fond, que lui reproche-t’on, demande M. l’Abbé de la Porte ? […] Ce projet étoit louable ; mais l’auteur l’a mal exécuté : & en voulant en faire un livre d’agrément, il l’a rendu ridicule.
Le bien et le mal n’existent pas à ses yeux. […] Le crime, de son côté, ne doit plus être conçu comme un mal qui ne saurait être contenu dans de trop étroites limites ; mais, bien loin qu’il y ait lieu de se féliciter quand il lui arrive de descendre trop sensiblement au-dessous du niveau ordinaire, on peut être certain que ce progrès apparent est à la fois contemporain et solidaire de quelque perturbation sociale.
« De l’Asie et de la merveilleuse Égypte sont venus des Arabes, des Africains légers, et ceux que la Grèce leur a mal associés, guerriers à la fière encolure, d’une grande force et en nombre infini. […] pour avoir, après tant de maux soufferts, après nos fautes et nos châtiments, brisé l’antique orgueil de l’ennemi !
Lui, il était un mal pensant.
Ce qu’il dit de l’infection, de la lubricité des théâtres, de l’enfant vicieux et flétri des grandes villes, de la populace des ateliers et de celle des antichambres, n’a rien que d’exact, et, tant que les maux ne seront pas guéris, tant qu’ils seront méconnus et niés, une sorte de convenance supérieure commandera à qui les sent de les révéler au vif et de ne les enjoliver en rien.
Depuis des années, il avait si souvent parlé de la mort, et nous l’avions en toute rencontre retrouvé si vivant par l’esprit qu’on ne pouvait se figurer qu’il ne s’exagérât pas un peu ses maux, et à lui aussi on pourrait appliquer ce qu’on disait de M.
On a donc moins à espérer de retrouver beaucoup d’ouvrages inédits des maîtres de ces époques ; cependant, il y a lieu de rechercher si l’on ne découvrirait pas quelques fragments de professeurs célèbres, tels par exemple qu’Occam, qui a enseigné à Paris, et qui, ayant été mal avec l’autorité ecclésiastique, n’a pas eu le bonheur de la plupart des autres maîtres, dont leurs ordres ont recueilli avec soin les ouvrages.
Mais tenons-nous-en à l’usage commun de la langue : sans prétendre mesurer à la rigueur à quel point ce que nous nommons cause est vraiment cause, il suffit, pour notre sujet, que notre raison n’est pas satisfaite, tant qu’elle n’a pas expliqué bien ou mal pourquoi les choses sont comme elles sont et ce qui en résulte.
Il n’avouait qu’un sentiment, un commencement de passion : « un peu de faiblesse pour ce qui est beau, disait-il, voilà mon mal ».
J’avais accepté d’écrire « un Salon », mais à la vérité les jugements que j’allais avancera la légère ne me parurent point, sur mes notes, différents de ceux des critiques indulgents aux modernes ; et par où j’en différais j’étais trop mal ferme en mes impressions pour être sûr d’avoir raison contre eux.
La réflexion personnelle, la lucidité d’esprit, l’indépendance du jugement sont des hôtes mal accueillis dans ces séances qui finissent généralement dans la plus horrible confusion.
Mais enfin, sans querelle, sans reproche, sans éclat, sans le chasser, sans éclaircissement, sans vouloir le confondre, elle s’est éclipsée elle-même ; et, sans quitter sa maison, où elle retourne encore quelquefois, sans avoir dit qu’elle renonçait à tout, elle se trouve si bien aux Incurables, qu’elle y passe quasi toute sa vie, sentant avec plaisir que son mal n’était pas comme celui des malades qu’elle sert.
Il vous dira qu' il doit gouverner comme la Nature, par des principes invariables & simples, bien organiser l'ensemble, pour que les détails roulent d'eux-mêmes ; qu'il doit, pour bien juger d'un seul ressort, regarder la machine entiere, calculer l'influence de toutes les parties les unes sur les autres & de chacune sur le tout, saisir la multitude des rapports entre les intérêts qui paroissent éloignés ; qu'il doit faire concourir les divisions même à l'harmonie du tout, veiller sans cesse à retrancher la somme des maux qu'entraînent l'embarras de chaque jour, le tourment des affaires, le choc & le contraste éternel de ce qui seroit possible dans la Nature & de ce qui cesse de l'être par les passions *.
Nous y voyons notre image comme en un miroir, mais une image qui se retourne contre nous, nous bat, nous fait mal, nous résiste : le non-moi devient autrui, il devient vous ou lui, un autre homme, un autre être vivant en chair et en os.
C’est aussi son inconvénient : fausse ou mal formée, elle échappe au contrôle, car rendant inutile l’expérience personnelle, elle tend il la supprimer ; aussi propage-t-elle le mensonge et l’erreur avec la même force, avec laquelle elle propage les vérités.
Voilà le profit, voilà le point important ; c’est cela que nous voulons, c’est cela que nous conseillons, d’accord avec tous les grands écrivains qui, de Ronsard à Chénier, ne se sont point mal trouvés d’avoir étudié et aimé le divin poète « depuis trois mille ans jeune encore de gloire et d’immortalité » !
Je suis sûr qu’elle montait mal à cheval… Femme avant tout, — après tout, — toujours femme, même après sa gloire !
Leur style, trop souvent incorrect et qui ajoute à l’incorrection naturelle le mal bien plus grand d’une incorrection systématique, leur style, malgré de graves défauts et même quelques ridicules, a de la couleur, sans transparence, mais non pas, certes !
On a retrouvé les faits matériels de la chronique de Kœnigsmark, le Disparu de l’Histoire sans laisser derrière lui, quelque part, comme le dernier des Ravenswood, la plume noire de sa toque, pour dire : « C’est là qu’il a passé et qu’il fut englouti. » Mais les causes de ces faits, étudiées à leur sinistre clarté, dans ces âmes d’une énergie presque fabuleuse en ces temps où, pour le bien comme pour le mal, l’âme humaine se ramollissait, pouvons-nous dire que nous les ayons ?
Ils ont leurs principes, leurs opinions, leurs passions, leurs traditions, voire leurs vices, et vous croyez donc qu’ils vont oublier tout cela parce que, très honnête, mais un peu candide, vous invoquez contre eux le besoin de refaire, tant bien que mal, une monarchie et un patriotisme qui ne voit pas les choses comme votre patriotisme, à vous !
Et en effet, en les posant, il les renverse… Et, même, de telle façon, que si jamais un téméraire en critique critique avait vainement cherché un moyen de ne pas trop révolter les habitudes faites en abaissant dans l’opinion, qu’il croirait mal informée ou superficielle, cette renommée effrayante de grandeur et de fixité qu’on appelle « l’histoire de Thucydide », il n’aurait, maintenant, rien de mieux à prendre que les motifs consciencieusement cherchés et savamment déduits de l’admiration de M.
Il y a celle qui soutient que l’homme est bon et que la société le déprave ; celle qui prétend qu’il est également propre au bien comme au mal ; et enfin celle qui pose, comme le catholicisme, avec sa netteté souveraine, que l’homme est en chute, mais qu’il peut glorieusement se relever !
Félix Rocquain est un esprit de ce temps, de ce temps sceptique et lassé, qui n’a plus d’enthousiasme même pour le mal qu’il fait cependant ; qui n’a pas plus de flamme infernale que de flamme divine !
D’un côté, vous avez un fat de quarante ans, un bellâtre gauche et impudent, une de ces âmes comme celle de Rousseau, coquinement honnêtes, qui se passionnent d’esprit pour le bien et de volonté pour le mal ; et de l’autre vous avez un bas-bleu du xiie siècle, froide de cœur comme toutes ces folles Ménades de la gloire qui l’appellent « un deuil éclatant du bonheur », et qui s’est, comme on dit vulgairement, monté la tête, non pour l’homme tel qu’il soit, mais pour le professeur le plus renommé de son temps.
Et voilà le mal !
Nous avons tant de mal à dire de ce poème, que nous commencerons par le bien que nous avons à dire aussi du traducteur.
D’un côté, vous avez un fat de quarante ans, un bellâtre gauche et impudent, une de ces âmes comme celle de Rousseau, coquinement honnêtes, qui se passionnent d’esprit pour le bien et de volonté pour le mal ; et de l’autre vous avez un bas-bleu du douzième siècle, froide de cœur comme toutes ces folles Ménades de la gloire qui l’appellent « un deuil éclatant du bonheur », et qui s’est, comme on dit vulgairement, monté la tête, non pour l’homme tel qu’il soit, mais pour le professeur le plus renommé de son temps.
Il n’y a pas de mal, d’ailleurs, à ce qu’un peu de mystère et de l’esprit du Moyen Âge restent sur ces points en litige.
… III Il l’obtient, comme Hugo, qu’il rappelle partout et sans cesse, au prix de l’invraisemblable, du faux, de l’impossible, de tout ce qui n’est plus la vie, même la vie intense, la vie passionnée, la vie montée à sa plus haute puissance, soit dans le mal, soit dans le bien !
je n’en entendrai pas moins partir de toutes parts le cri du désarmement : pourquoi dire du mal de ce pauvre Gautier, qui est si bienveillant ?
« Ainsi, tu as partout harmonisé le bien au mal, de sorte qu’il existe pour tous une seule loi, toujours la même, que désertent par leur fuite tous ceux des mortels qui deviennent méchants ; infortunés qui, désirant toujours la possession des biens, n’aperçoivent pas la loi générale de Dieu, n’écoutent pas cette loi, à laquelle s’ils obéissaient, ils auraient, avec l’intelligence, le bonheur et la vie !
Son histoire a été assez mal traduite en françois par du Ryer. […] C’est un ouvrage mal digéré dans lequel on trouve trop de petits faits étrangers à son sujet, & où les grands événemens deviennent petits, tant ils sont mal rapportés. […] C’est un portrait assez mal dessiné, déchiré par lambeaux & dispersé sous un monceau de décombres.
Moralement on est tenté de dire de soi et de son temps bien du mal, mais pour l’esprit on ne prétend pas céder, et on a toutes sortes de bonnes raisons pour se prouver à soi-même qu’on en a un peu plus que ses devanciers. « Je suis fier pour mon temps, je suis fier pour mon siècle, mon pays… » Combien de fois n’avons-nous pas entendu ce langage, essentiellement moderne, dans la bouche de ceux même qui savaient et prisaient le mieux l’Antiquité !
Êtes-vous lui-même, guéri de tous les maux du corps et de l’âme ?
Ce sont des bulletins comme celui de Ledru-Rollin, d’hier (le bulletin du 14 ou 15 avril), qui font tout le mal. » Il me répondit : « Ledru-Rollin est venu ce matin à dix heures se rallier à nous, il s’est repenti.
Il me semble qu’il introduirait fort bien le livre dans le monde, et qu’il ne ressemblerait point du tout à ces fades avis d’éditeur fabriqués par l’auteur même, et qui font mal au cœur.
L’ouvrier tailleur est aigri contre le maître tailleur qui l’empêche d’aller en journée chez les bourgeois, les garçons perruquiers contre le maître perruquier qui ne leur permet pas de coiffer en ville, le pâtissier contre le boulanger qui l’empêche de cuire les pâtés des ménagères, le villageois fileur contre les filateurs de la ville qui voudraient briser son métier, les vignerons de campagne contre le bourgeois qui, dans un rayon de sept lieues, voudrait faire arracher leurs vignes792, le village contre le village voisin dont le dégrèvement l’a grevé, le paysan haut taxé contre le paysan taxé bas, la moitié de la paroisse contre ses collecteurs, qui à son détriment ont favorisé l’autre moitié. « La nation, disait tristement Turgot793, est une société composée de différents ordres mal unis, et d’un peuple dont les membres n’ont entre eux que très peu de liens, et où, par conséquent, personne n’est occupé que de son intérêt particulier.
Car comme on ne se confesse pas au public, et qu’en outre on se connaît mal d’ordinaire, ce qu’on doit dire pour se peindre au lecteur n’est pas ce qu’on dirait dans la réalité.
On n’y trouva une des lettres d’amour, parmi lesquelles étaient celles de madame de Sévigné. « Le roi prit un grand plaisir à les lire, parce qu’elles contrastaient avec les douceurs fades des autres lettres. » Le Tellier, qui les avait lues avec le roi, dit que le surintendant avait mal à propos mêlé l’amour et l’amitié42.
que ceux qui tiennent que le soleil est fixe et immuable, … etc. mais ce n’est point la faute de Monsieur Despreaux si Monsieur Perrault l’entend mal, et c’est encore moins sa faute s’il plaît à d’autres censeurs de se figurer que par ces mots, si le soleil est fixe ou tourne sur son axe, il ait voulu opposer le systême de Copernic avec le systême de Ptolomée, qui suppose que c’est le soleil qui tourne au tour de la terre.
On arriverait, avec cette explication, à trouver que d’Arlincourt lui-même n’écrivait point mal.
L’histoire a les faits et l’intérêt des faits, même mal racontés.
le mal qu’elles lui ont fait plutôt est inexprimable !
Ainsi encore, après Théroigne de Méricourt, une figure moins terrible, une sainte plus douce, mademoiselle Kéralio, madame Robert, une fille noble, mal mariée, devenue ambitieuse, et tombée, à force d’abjection et de folie, dans le mépris de madame Roland, et si bas que Michelet, ému jusqu’aux entrailles dans la personne de cette petite madame Robert, se risque à protester contre le portrait déshonorant qu’en fait madame Roland dans ses Mémoires : « Ce qui prouve — ajoute-t-il mélancoliquement — que les plus grands caractères ont leurs misères et leurs faiblesses !
Chateaubriand a dit, en parlant d’un homme plus grand que Gœthe, qu’il a jugé : « Je ne veux pas être une sotte grue et tomber du haut mal de l’admiration. » Eh bien, ni moi non plus !
L’auteur de Guy Livingstone est idéal de sentiment et d’expression, de société et de caractère, dans un temps où nous nous mourons du mal de cœur de la réalité, qu’on nous donne pour l’art ou la vie ; il est idéal parce qu’il est un byronien d’abord et ensuite un dandy, préoccupé, comme tout dandy, de la beauté des attitudes de son orgueil ; il l’est encore parce que tous les caractères de son roman sont pris dans un milieu humain et social exceptionnel, parce que le high life est la vie des classes supérieures, qui valent mieux que les autres de cela seul (comme le mot le dit) qu’elles sont au-dessus.
je serai son maréchal des logis peut-être… Sauf les exceptions, quand il y en a, toute gloire est une renommée et toute renommée est une calomnie, en bien ou en mal, mais une calomnie, si on prend ce mot pour le contraire de la vérité.
C’est par le sentiment, même quand il est inexprimé, de cette poésie terrible, plus que par sa roulette, plus que par un pamphlet toujours populaire, plus que par tout ce qu’il a fait jamais, qu’il est resté le dominateur des esprits, et même de ceux qui lui sont rebelles : car on a répondu, bien ou mal, à toutes ses raisons, et, malgré l’accablante expression de son génie, l’intelligence humaine n’est pas vaincue, mais ses sentiments emportent tout, et ceux-là qu’il n’a pu convaincre de ce qu’il croit, il les a emportés par la beauté de ce qu’il écrit, et ils conviennent qu’ils sont emportés !
Malheureusement, Cousin ne suivit pas cette vocation de vulgarisateur qui était la sienne, et qu’il a mal remplie ; car il a souvent faussé ce qu’il a vulgarisé, par la faute d’une intelligence ambitieuse qui voulut avoir ses idées et ses systèmes à elle, et qui fut toujours radicalement impuissante à en produire qu’on dût respecter.
Voilà les raconteurs de la vie publique de Calvin, — de ce dur commissaire de police religieuse, dont je n’ai pas de mal à dire, car j’aime les commissaires de police, et qui tint Genève sous sa griffe pendant des années, mais dont l’action énergique, le croira-t-on jamais ?
Ces forces sont de deux ordres opposés : celui du bien et celui du mal.
mais rusé comme un maquignon quoique poète et qui essaierait de blesser à vif la Critique pour l’intéresser à parler de lui, — fût-ce en mal, — ou bien donc une vanité truculente, comme celles des Scudéry et des Cyrano de Bergerac, ces fameux Gascons littéraires.
Dans l’introduction de son nouveau volume, écrite avec la distinction qui est le caractère de cette plume toujours à cent pieds de la chose ou de l’expression vulgaire, Gères ne nous raconte rien, mais nous laisse cependant entrevoir qu’il a passé par la douleur suprême que madame de Staël appelle « le mal de l’irréparable ».
., toutes satires dans lesquelles Juvénal-Pierrot soufflette de sa grande manche et Boileau-Arlequin fouaille de sa batte éblouissante les sottises, les vices et les ridicules du temps, — et, malheureusement, sans leur faire le moindre mal.
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux, C’est vous qui le savez, sublimes animaux !
Avoir fait d’Hoffmann et d’Edgar Poë une combinaison honnête, avoir fait d’Hoffmann, l’halluciné de fumée de pipe, le nerveux suraigu, le labes dorsal qui vécut des années avec une moelle épinière à feu, et d’Edgar Poë, plus étonnant encore, d’Edgar Poë, l’ivresse la plus noire et la plus rouge qui se soit allumée jamais dans une tête humaine sans la faire éclater, le mangeur d’opium arrosé d’eau-de-vie, le delirium tremens devenu homme jusqu’à ce que l’homme fût entièrement tué par le delirium tremens, faire de ces deux puissants génies malades une petite créature qui ne se porte pas trop mal, et qui nous trempe l’esprit comme une mouillette dans une mixture… sans inconvénient, n’est-ce pas un début magnifique ?
L’auteur de Guy Livingstone est idéal de sentiment et d’expression, de société et de caractère, dans un temps où nous nous mourons du mal de cœur de la réalité, qu’on nous donne pour l’art ou la vie ; il est idéal, parce qu’il est un byronien d’abord et ensuite un dandy, préoccupé, comme tout dandy, de la beauté des attitudes de son orgueil ; il l’est encore parce que tous les caractères de son roman sont pris dans un milieu humain et social exceptionnel, parce que la high life est la vie des classes supérieures qui valent mieux que les autres, de cela seul (comme le mot le dit) qu’elles sont au-dessus.
Aussi arrive-t-il un moment, quand on ne lit pas l’ouvrage comme il a été fait, dans l’ordre suspendu du feuilleton avec ses interruptions et ses coupures, où le lecteur le plus intrépide et le plus cuirassé contre le mal au cœur est tenté de rejeter le livre dont un pareil homme est le héros.
Si l’on veut que les biens et les maux y soient distribués conformément aux exigences égalitaires, en quel sens réformer la justice, la confection et l’application du Droit ?
Ne pouvant encore s’autoriser contre l’usage, il fit connaître à ses amis qu’il allait à l’armée faire sa cour qu’il lui coûtait moins d’exposer sa vie que de dissimuler ses sentiments, et qu’il n’achèterait jamais ni de faveurs, ni de fortune aux dépens de sa probité. » Je pourrais encore citer d’autres endroits qui ont une beauté réelle ; mais le discours en général est au-dessous de son sujet ; on y trouve plus d’esprit que de force et de mouvement ; on s’attendait du moins à trouver quelques idées vraiment éloquentes sur l’éducation d’un dauphin, sur la nécessité de former une âme d’où peut naître un jour le bonheur et la gloire d’une nation ; sur l’art d’y faire germer les passions utiles, d’y étouffer les passions dangereuses, de lui inspirer de la sensibilité sans faiblesse, de la justice sans dureté, de l’élévation sans orgueil, de tirer parti de l’orgueil même quand il est né, et d’en faire un instrument de grandeur ; sur l’art de créer une morale à un jeune prince et de lui apprendre à rougir ; sur l’art de graver dans son cœur ces trois mots, Dieu, l’univers et la postérité, pour que ces mots lui servent de frein quand il aura le malheur de pouvoir tout ; sur l’art de faire disparaître l’intervalle qui est entre les hommes ; de lui montrer à côté de l’inégalité de pouvoir, l’humiliante égalité d’imperfection et de faiblesse ; de l’instruire par ses erreurs, par ses besoins, par ses douleurs même ; de lui faire sentir la main de la nature qui le rabaisse et le tire vers les autres hommes, tandis que l’orgueil fait effort pour le relever et l’agrandir ; sur l’art de le rendre compatissant au milieu de tout ce qui étouffe la pitié, de transporter dans son âme des maux que ses sens n’éprouveront point, de suppléer au malheur qu’il aura de ne jamais sentir l’infortune ; de l’accoutumer à lier toujours ensemble l’idée du faste qui se montre, avec l’idée de la misère et de la honte qui sont au-delà et qui se cachent ; enfin, sur l’art plus difficile encore de fortifier toutes ces leçons contre le spectacle habituel de la grandeur, contre les hommages et des serviteurs et des courtisans, c’est-à-dire contre la bassesse muette et la bassesse plus dangereuse encore qui flatte.
L’œuvre avance, au nom de la foi et de l’humanité : on s’engage à poursuivre l’abolition de l’esclavage, comme l’accomplissement même de l’Évangile ; et, malgré les résistances de l’intérêt, les raisons spécieuses de la politique, malgré la difficulté du remède accrue par l’excès du mal, on peut prédire que celle souillure sera un jour écartée du monde américain ; on peut dire au zèle de l’humanité marchant à l’ombre de la croix : In hoc signo vinces.
Dans cet esprit qui imite et qui parfois imite mal, qui tâtonne encore et çà et là laisse entrer dans ses stances polies les vieux mots naïfs ou les allégories usées des hérauts d’armes et des trouvères, voici déjà la mélancolie du Nord, l’émotion intime et douloureuse. […] Nous jouissons de leur éclat sans croire à leur consistance ; nous nous intéressons à leurs actions sans nous troubler de leurs maux. […] Y êtes-vous mal et avez-vous envie de la quitter parce qu’elle est merveilleuse ? […] Il dira que « la beauté est un mal actif-passif, parce qu’elle meurt aussi vite qu’elle tue » ; que sa maîtresse est criminelle d’employer chaque matin trois heures à sa toilette, parce que « sa beauté, qui était un gouvernement tempéré, se change par là en tyrannie arbitraire. » Après avoir lu deux cents pages, on a envie de lui donner des soufflets. […] Grands seigneurs et grandes dames, ils causent en gens mal élevés, amateurs de bouffons, de parades et de combats d’ours.
S’abstenir au lieu d’agir et de parler, ne rien faire pour le bien, voir le mal sans le combattre ne sera jamais comprendre et pratiquer la foi catholique. […] Bulwer, signifie la même chose qu’Iago, justifie très mal son origine littéraire. […] Si Louis XIV n’eût compté autour de lui que des courtisans aussi mal élevés, Versailles, assurément, n’eût pas été cité dans toute l’Europe comme un modèle achevé d’élégance et de grâce. […] Mais il paraît que l’orgueil des poètes est, de l’autre côté du détroit, aussi prompt à la colère que chez nous, et plus mal inspiré dans sa défense. […] Avant de prendre pour bru une fille mère, il n’est pas mal d’y regarder à deux fois.
Sans doute nous avons mal fait l’expérience. […] Les couleurs et les parfums peuvent donc se répondre plus ou moins, parfois très bien, parfois très mal, quel que soit d’ailleurs leur rapport d’association. […] Je ne veux dire aucun mal du réalisme. […] Le mot d’idéal sonne mal à leurs oreilles. […] Si notre œil n’était pas accoutumé à le voir, il ne saurait l’accepter : de deux formes très nobles on a fait un assemblage mal réussi.
Les chaises craquent quand on le pose, et celui qui l’a manié une heure en a moins mal à la tête qu’au bras. […] Souvent en son absence l’Imagination, qui tâche de la contrefaire, veille pour l’imiter ; mais, assemblant mal ces formes, elle ne produit souvent qu’une œuvre incohérente, principalement en songe, par un mélange bizarre de paroles et d’actions présentes ou passées509. » — Il y a de quoi rendormir la pauvre Ève. Son mari, voyant cet effet, ajoute en casuiste accrédité : « Ne sois pas triste ; le mal peut entrer et passer dans l’esprit de Dieu et de l’homme sans leur aveu, et sans laisser aucune tache ou faute derrière lui. » On reconnaît l’époux protestant confesseur de sa femme. […] Avec quel ordre industrieux, pour éviter la confusion des goûts, pour ne pas les mal assortir, pour qu’une saveur suive une saveur relevée par le plus heureux contraste ? […] Il en mérite un pire quand il envoie Raphaël avertir Adam que Satan lui veut du mal. « Qu’il sache cela, dit-il, de peur que, transgressant volontairement, il ne prenne pour prétexte la surprise, n’ayant été ni éclairé, ni prévenu519 !
Le capitaine Otter, à moitié gris, dit du mal de sa femme, qui tombe sur lui et le rosse d’importance. […] Là-dessus, on lui dit qu’il est fou, et l’on disserte devant lui sur sa maladie156. « Ce mal s’appelle en grec μανἱα, en latin insania, furor, vel ecstasis melancholica, c’est-à-dire egressio, quand un homme ex melancholico evadit fanaticus. […] Aussi bien l’élite du royaume est là, sur la scène ; ce ne sont pas des baladins qui se démènent avec des habits empruntés, mal portés, qu’ils doivent encore à leur tailleur ; ce sont les dames de la cour, les grands seigneurs, la reine, dans tout l’éclat de leur rang et de leur fierté, avec de vrais diamants, empressés d’étaler leur luxe, en sorte que toute la splendeur de la vie nationale est concentrée dans l’opéra qu’ils se donnent, comme des joyaux dans un écrin.
« Il y a tel de mes couplets », disait-il, « qui m’a coûté des semaines de réflexions. » Il ne s’en cachait pas, il ne se donnait pas pour un improvisateur comme nous, fils du hasard, tantôt bien tantôt mal servis par la loterie de leur inspiration, mais toujours incorrects, même dans leurs bonheurs de style ; il était, lui, le fils du travail, qui fait quelquefois attendre ses dons, mais qui ne trompe jamais l’homme de génie et de patience. […] Changer en mal, c’est faiblesse ; changer en bien, c’est vertu. Béranger changea d’abord en mal, selon nous ; puis il changea en bien ; et c’est de ce dernier changement que nous parlons ici.
La seule pensée de celui-ci, son ombre, lui donnait, dès l’instant qu’elle en parlait, le vertige sacré des prêtresses ; elle prédisait à tous venants sa sortie de l’île d’Elbe et les maux qui se déchaîneraient avec lui. […] Vous n’êtes point captive dans les liens de la mort, comme tout ce qui n’a eu que le domaine du mal pour régner ou pour servir. » Et elle finit en montrant la Croix laissée dans ces lieux comme un autel magnifique qui doit tout rallier, et qui dira : « Ici fut adoré Jésus-Christ par le héros et l’armée chère à son cœur : ici les peuples de l’Aquilon demandèrent le bonheur de la France. » Ces pages expriment clairement en quel sens Mme de Krüdner concevait et conseillait la sainte-alliance ; mais ce qui était son rêve, ce qui fut un moment celui d’Alexandre, se déconcerta bientôt, et s’évanouit en présence des intérêts contraires et des ambitions positives, qui eurent bon marché de ces nobles chimères.
Le préjugé français des hommes spéciaux, c’est-à-dire des hommes qui ne savent faire qu’une seule chose, ce préjugé, la plus grande bêtise nationale de ce temps-ci, ce préjugé inventé par la médiocrité pour s’en faire un rempart contre la concurrence du talent multiple, ce préjugé, émané de l’École polytechnique, qui produit d’excellents outils et peu d’hommes complets, ce préjugé, dis-je, qui m’était déjà connu, qui règne encore à l’heure où j’écris, et qui sera un jour relégué parmi les mémorables inepties de notre siècle, ce préjugé, je le répète, me faisait craindre qu’un peu de célébrité poétique, répandu mal à propos sur mon jeune nom, ne me fît rejeter comme un intrus de toute candidature diplomatique, carrière que je préférais mille fois à quelques battements de mains ou à quelques battements de cœur des poètes ou des femmes des salons de mon temps. […] Joseph Autran est un Grec mal francisé (heureusement pour lui et pour nous), qui, ayant abordé sur quelques débris de l’antique Phocée aux bords de la Provence, comme Reboul, Mistral, Méry, Barthélemy et cent autres, n’a pas pu se défaire encore de l’accent natal : il est de cette colonie grecque qui, avec des images grecques et une harmonie ionienne, reconstruit une poésie française plus colorée, plus harmonieuse et plus chaude surtout que la poésie du Nord !
Lors même que M. de Lamartine aurait écrit en son propre nom, et comme l’expression de ses propres impressions, ce qu’il n’a écrit que sous le nom d’Harold ; lors même qu’il penserait de l’Italie et de ses peuples autant de mal que le supposent gratuitement ses adversaires, le fragment cité ne mériterait aucune des épithètes qu’on se plaît à lui donner. […] De peur que les renards ou les écureuils ne leur fissent mal à terre, pendant que j’allais sarcler le maïs ou retourner les meules de foin dans le petit pré, je suspendais leur berceau sur la grosse branche basse et souple du châtaignier, et je m’en rapportais au vent pour les balancer doucement dans leur nid ; n’est-ce pas ainsi que font les oiseaux ?
La poésie d’oc, coupée et renversée après le tumulte du xiiie siècle, est demeurée, jusqu’au xxe siècle, en sommeil… Et durant tout ce temps, le Midi, qui n’a pas chanté dans sa langue, a mal chanté dans celle d’outre-Loire, ou, du moins, n’y est pas parvenu à la pointe extrême de musique. » Voilà formulée déjà, semble-t-il, avec grande précision, la question (et sa réponse) posée aujourd’hui par l’enquête des Marges d’après la récente et judicieuse remarque de M. […] de poètes, dont aucun peut-être, selon vous, n’est grand, mais qui, néanmoins, n’usent pas déjà si mal, à mon avis, d’une langue qu’ils auraient perdue !
sans doute, il y a une condition indispensable pour qu’elle ne fasse pas de mal en croyant faire du bien. […] Mots qui à force d’être savants deviennent barbares et sont en certains cas de vrais monstres ; tel le mot potassium, qui, semi-germanique et semi-romain, ressemble aux fabuleux centaures ; tel le mot centimètre, qui est le résultat d’un alliage imprévu entre Rome et la Grèce ; tels les mots kilomètre et myriamètre, enfants mal venus, estropiés en naissant par des accoucheurs maladroits.
Les choses allaient, de l’autre côté du Rhin, non moins mal que de celui-ci, quand Richard Wagner, héritier de Bach et de Beethoven, de Gluck et de Weber, entra vaillamment en lice armé de sa personnalité et de sa persévérance. […] En fait d’émotion dramatique, cela ne donne que mal à la tête, en fait d’intérêt, cela fait désirer que le spectacle soit fini le plus tôt possible.
Il chante le lied du retour, un lied mélancolique et heureux à la fois ; c’est la convalescence de ce mal qu’on nomme le mal du pays.
Enfin, lorsqu’il sait parler, il substitue la parole intérieure à l’action en disant : l’épine fait mal. […] En disant : je puis vouloir, j’ai présente à l’esprit l’idée de mon moi comme pouvant intervenir dans le problème intérieur, comme pouvant, par exemple, maîtriser un mouvement de haine. « Je puis vouloir ne pas haïr celui qui m’a fait du mal. » Voilà un jugement qui, dès qu’il se produit, a un effet sur ma haine : il la modère du coup, en retient et en retarde les conséquences ; il peut même les empêcher, grâce aux idées raisonnables auxquelles il ouvre la porte. « Je puis vouloir cette chose ou son contraire », ce jugement est l’affranchissement qui commence par rapport aux impulsions passionnelles et aveugles ; il transporte la volonté sur un sommet d’où elle a deux versants en vue.
Mais ce choix ne tombe point sur la poësie ; il caractérise seulement les différens poëtes, et non pas leur art, qui de lui-même est indifférent au bien et au mal. […] Il paroît même assez siasi de cet enthousiasme qui entraînoit Pindare ; et le mauvais succès de l’imitateur vient moins d’avoir mal suivi son modéle, que de n’avoir pas connu le génie de la langue françoise.
Voilà sans doute pourquoi il est si souvent mal gouverné. […] La plus réellement républicaine des institutions françaises sous la monarchie, c’était peut-être l’Académie, la république des lettres. » Seulement, je l’avoue, si le temps avait été donné à la république, je voulais enfoncer les portes de l’Académie française pour faire entrer en plus grande proportion et pour de plus dignes rémunérations l’armée des lettres, de la science, des arts dans cette vétérance du travail intellectuel, le plus mal rémunéré et souvent le plus indigent des travaux humains.
Une petite circonstance omise ou mal présentée décèle la maladresse du poète, et affaiblit l’intérêt. […] L’ouverture de la scène présente aux yeux une place publique, un palais, un autel ; à la porte du palais d’Œdipe, des enfants, des vieillards prosternés, demandant la fin de leurs maux.
La psychologie, au contraire, n’a pas seulement du mal à les élaborer, mais aussi à les saisir. […] On voit à quelles erreurs on est entraîné soit quand on ne définit pas, soit quand on définit mal.
« Point de moines dans ce coche ; mais, en récompense trois femmes, un marchand qui ne disait mot et un notaire qui chantait toujours et qui chantait très mal. […] Celui-ci et ses compagnons ont rencontré, marchant à pied, comme il arrivait si souvent en ce temps-là, sans doute pour monter une côte, ils ont rencontré la singulière compagnie suivante : « Après avoir passé l’Indre, nous trouvâmes au bord trois hommes d’assez bonne mine, mais mal vêtus et fort délabrés.
Seulement, cette imagination verbale, qu’il possède à un si étonnant degré, est comme toutes les grandes puissances, qui tournent à mal et à vice. […] On a dit le mal qu’il se donne pour être simple… et pour manquer son coup.
Inférer de là l’existence d’une liaison nécessaire, d’un pouvoir et d’une force, d’une cause enfin, c’est mal raisonner, c’est trop présumer. […] Mais ce serait mal apprécier la valeur d’une méthode féconde en résultats positifs ; ce serait méconnaître les services d’une école qui répond à un point de vue nouveau, dans l’étude de la nature humaine.
Tout ce qui est duplicité, tortuosité, faux-fuyants, manège, tout ce qui ressemble de près ou de loin à de l’astuce ou à de la perfidie la révolte d’instinct, aujourd’hui comme au premier jour ; l’expérience ne l’a pas corrigée : elle s’étonne du mal, de tout ce qui n’est pas honorable ; elle a la faculté de l’indignation.
La Corse a fait, depuis, assez parler d’elle, — cette petite île, par ce qu’elle a enfanté, a, depuis, assez étonné le monde —, pour nous rendre bien indifférents sur cette question de savoir si elle faisait bien ou mal de s’adresser alors à Jean-Jacques comme à un Solon moderne ou à un Lycurgue.
Car, avant de rétrograder vers Ney, et lorsqu’il était en marche sur Bry, vers cinq heures, aperçu de loin par Vandamme et mal reconnu par l’un des officiers de ce dernier général, il avait donné des inquiétudes aux nôtres à un moment décisif, et avait contribué à suspendre un mouvement victorieux jusqu’à ce qu’on fut revenu d’une première erreur ; on y perdit près de deux heures bien précieuses.
Et, d’autre part, comme ces admirateurs plus tardifs, honteux tout bas de s’être fait tant prier, et n’en voulant pas convenir, acceptent le grand écrivain dans ses dernières œuvres au détriment des premières qu’ils ont peu lues et mal jugées, comme ils sont fort empressés de le féliciter d’avoir fait un pas vers eux, public, tandis que c’est le public qui, sans y songer, a fait deux ou trois grands pas vers lui, il est du ressort d’une critique équitable de contredire ces points de vue inconsidérés et de ne pas laisser s’accréditer de faux jugements.
Fléchier a dit cela au sujet de Camus, évêque de Belley, qu’il lisait beaucoup ; il comparait son style spirituel et folâtre à une source abondante et mal ménagée dont le bon prélat s’amusait à faire des jets d’eau, tandis qu’on en aurait pu faire un canal charmant et utile.
Par lui, l’Amérique a été purgée de la lèpre doctrinaire, qui est si prompte à s’incruster et qui lâche si difficilement sa proie : elle a échappé au mal européen, qui est aussi une contagion.
Cyprien est une de ces jeunes et ardentes âmes, comme Bucheille, que le mal social agite, dévore, mûrit ou tue avant le temps ; mais Cyprien est plus ferme que Bucheille ; sous son accent amer, sous sa parole un peu fatiguée, on sent l’énergie morale ; il vivra et trouvera à sa volonté intelligente quelque application digne d’elle.
Les essais dans ce genre ont encore plus mal réussi aux Anglais qu’aux autres peuples ; ils manquent essentiellement de grâce dans tout ce qui exige de la légèreté d’esprit : ils manquent de cette promptitude, de cette facilité, de cette aisance, qui s’acquiert par le commerce habituel avec les hommes réunis en société dans le seul but de se plaire.
Lorsque la pensée peut contribuer efficacement au bonheur de l’homme, sa mission devient plus noble, son but s’agrandit ; ce n’est plus seulement une rêverie douloureuse, parcourant tous les maux de l’univers, sans pouvoir les soulager, c’est une arme puissante que la nature donne, et dont la liberté doit assurer le triomphe.
C’est comme dans les ballets de la rue Pelletier ; l’action doit être faite uniquement pour amener de beaux pas, et pour motiver, tant bien que mal, des danses agréables.
Wolff écrit fort mal ?
Oratio se plaint de sa mauvaise fortune et maudit la présence de ces comédiens dont vient tout le mal ; il s’exprime surtout en termes injurieux à l’égard de Vittoria qui lui a joué ce méchant tour.
Le cuisinier courut en avertir son maître, lequel eut tant d’affection, de faiblesse pour son favori, qu’il défendit de lui faire aucun mal.
C’est l’évaluation individuelle qui décide en dernier ressort du bien et du mal.
On oubliait d’ailleurs, à l’entendre causer, ces détails mal venus et son regard profond et doux suffisait à parer et à illuminer toute sa personne.
Dans ces maisons mal famées, on risquait de rencontrer de la mauvaise société.
Personne plus que moi n’est disposé à placer haut ce peuple unique, dont le don particulier semble avoir été de contenir dans son sein les extrêmes du bien et du mal.
J’ai senti combien la rime riche, ce joyau lourd, cet ornement barbare, allait mal à la démarche légère du petit trottin si amusant à regarder.
Derrière le décor, comme au bord de la fosse de l’Odyssée, les dieux et les héros, « les vieillards qui ont subi beaucoup de maux, les tendres vierges ayant un deuil dans l’âme, les guerriers aux armes sanglantes », attendent, « avec un frémissement immense », l’Évocateur suprême qui va les rappeler à la vie sublime.
L’homme opprimé par lui subit un péché originel cent fois plus redoutable que celui de la Genèse hébraïque : le mal qu’a fait l’ancêtre revit dans son rejeton, comme le grain d’une plante vénéneuse recompose et reproduit son poison.
Ce changement de langage cet air de modération fut mal interprêté.
Les mœurs du monde lui étoient moins connues que les passions du cœur humain ; & il réussit aussi mal à plaisanter ou à peindre des choses ridicules, qu’il excelle à exprimer le sentiment.
En premier lieu, cela arrive lorsque le geste naturel signifie une affection, comme un mal de tête ou de l’impatience.
Après deux jours de recherches, il découvrit, sur les derrières d’une grande maison mal bâtie, un petit rez-de-chaussée ouvrant sur un immense potager.
La Fontaine surtout, qu’on regarde assez mal à propos comme le poète des enfants, qui ne l’entendent guère, est à bien plus juste titre le poète chéri des vieillards : il l’est même plus que Racine.
On a mis mal à propos dans la confidence ceux qui devaient ignorer à jamais que le corps social était arrivé à un âge de crise.
Ainsi le mal est maintenant tout seul, sans correctif.
Elle l’a aimé pour l’effet plus que pour lui-même, comme elle veut s’en venger aujourd’hui, plus pour l’effet que pour lui faire mal.
Le grand bas-bleu que fut Mme George Sand, a bien failli entrer dans les vieilles culottes de l’Académie, et si elle n’y est pas entrée, c’est qu’elle est morte ; — mais pour la venger d’un retard qui a mal tourné, on a respectueusement et pour une pièce qu’elle n’a pas toute faite, planté sa statue en marbre et en pied, dans le foyer du Théâtre-Français où Molière, Regnard et Caron de Beaumarchais n’ont qu’un buste30 !
L’imagination, ce singe de l’intelligence, a dit Schiller, — ce qui n’est pas mal pour un Allemand, — l’imagination, qui est la première des facultés de la femme et d’un misérable siècle, chez qui la Raison est épouvantablement affaiblie, doit entraîner la femme, quand elle veut être littéraire, vers le roman dans lequel, d’ailleurs, elle cherche toujours un peu une place pour ses souvenirs et un miroir pour sa personne… D’un autre côté, par cela seul que le Roman est la forme la plus populaire des formes littéraires de ce temps, il rapporte du succès à plus bas prix… et l’Histoire, la sévère, l’Histoire, la désintéressée, n’a pas ces avantages… Il faut se croire très homme pour l’aborder.
Elle devait pousser, après beaucoup de siècles, il est vrai, dans le cerveau des nations chrétiennes, et nous devions la réaliser avec cette légèreté charmante « qui ne voit pas grand mal à ça », comme nous avons le droit de le dire, tant notre vieillesse, ainsi qu’on le sait, a le cœur pur !
Comme tous les hommes d’idées, et que leurs idées mènent ou entraînent, le colonel Ardant du Picq ne verse jamais dans l’utopie, ce mal ordinaire des penseurs enivrés de leurs propres pensées.
C’est qu’il n’avait ni l’une ni l’autre, ce mal affranchi, resté âme d’esclave.
(Quel mal !)
mais alors ils la guérissaient du mal dont ils avaient voulu profiter.
Esprit différent, horizon changé, vues nouvelles, c’était ce grand ouvrage qu’il fallait reprendre dans sa distribution harmonieuse ; cette histoire qui, partant des faits, cherche au moins à s’élever à des considérations supérieures ; qui conclut mal, mais qui conclut !
la véritable et la seule originalité de Gœthe, de cet Allemand qui, comme les autres Allemands, était idéaliste et poète, c’est d’avoir, Ixion infidèle, quitté la nuée pour embrasser la terre ; c’est d’avoir fait de la vie un art, bien plus qu’il n’a fait de l’art une vie ; c’est de s’être préoccupé, jusqu’à nous en faire mal au cœur, de l’utilité et de la pratique ; de jouer, enfin, au petit Machiavel, même littéraire, en n’étant qu’un petit Jérémie Bentham.
Si Charles-Quint put se tromper à la clarté de sa raison, l’Espagne ne pouvait, elle, se tromper à la clarté de sa foi, et s’il ne se repentit pas sous les désillusions de l’expérience, il dut sentir, en sa qualité de grand politique, qu’il avait profondément blessé son peuple, et cela reconnu comme un mal pour son pouvoir et pour sa race, il dut chercher à l’amoindrir et à l’effacer.
avait trouvé par trop calomnié… Mais, par ordre — m’a-t-on conté — de ses supérieurs, le Père Olivier a été obligé de s’arrêter au tiers de son œuvre, — et il ne nous a purifié que Lucrèce : Si méchamment mise à mal par Hugo !
On n’est pas pessimiste pour dire du mal du règne de Louis-Philippe !
Il tournait la chanson comme il tournait les têtes, — comme il tournait ses pouces, — et elle voulut aussi tourner la chanson, et il y en a deux, dans ses lettres, qui ne sont pas trop mal tournées ; mais, Dieu soit béni !
Là où les autres voient la santé ou une hygiène sans inconvénient et sans péril, le grand médecin voit le mal, l’empoisonnement et la mort.
« Je suis en tout de la plus grande faiblesse, dit-elle, mais, appuyée à la colonne de l’Oraison, j’en partage la force. » Malade, pendant de longues années, de maladies entremêlées et terribles qui étonnent la science par la singularité des]symptômes et par l’acuité suraiguë des douleurs, Térèse, le mal vivant, le tétanos qui dure, a vécu soixante-sept ans de l’existence la plus pleine, la plus active, la plus féconde, découvrant des horizons inconnus dans le ciel de la mysticité, et sur le terrain des réalités de ce monde, fondant, visitant et dirigeant trente monastères, quatorze d’hommes et seize de filles.
… La société actuelle est descendue dans le mal d’autant de marches qu’elle a descendu d’années depuis le temps où Raymond Brucker écrivait les Docteurs du jour.
Le mal est fini.
Pour ceux qui prennent l’existence au sérieux et qui croient qu’elle a l’importance d’un but immortel, tout est enseignement de mal ou de bien dans la vie.
Caro est un esprit très fin et très clair, d’un timbre très pur, d’une sonorité d’harmonica très agréable, mais qui peut faire mal aux nerfs, à force de douceur, aux gens organisés comme moi… C’est un esprit infiniment cultivé, d’une rare aptitude aux choses de la philosophie, qu’il a toujours maniées, ces choses lourdes, avec une grande légèreté, prestesse et même grâce de main.
Nous n’avons pas, il est vrai, parmi nous le génie et la grande figure jupitéréenne de Ronsard, sa dictature indiscutée et funeste, funeste même pour lui, car le faux système a tué sa gloire en l’écrasant dans son œuf d’aigle ; mais, si l’on cherchait bien, on trouverait Desportes, et, en disant cela, nous ne disons de mal de personne… M.
Il est incertain qu’on puisse faire littérairement plus mal que ce livre.
— Et aussi à cet endroit, où il dit des femmes qui déguisent leur envie : D’un propos contrefait tout autre que le cueur, Cachent pour t’affiner la cause qui les meine, En la même façon que la fine Clymenne Qui du beau Francion disoit mal à sa sœur.
Les Trente-deux Duels de Jean Gigon 11, nous assure leur historien, sont une histoire réelle, et il se donne beaucoup de mal pour nous le persuader.
Dans ce livre si mal nommé La Vengeance de Madame Maubrel, madame Maubrel épouse l’inconnu qui l’a respirée.
Les hommes ne disent tant de mal de l’hypocrisie que parce qu’elle blesse leur amour-propre en se jouant d’eux, et qu’ils ne veulent pas être joués, les orgueilleux !
Il aurait certainement été plus heureux avec les imbéciles d’aujourd’hui… Ils lui eussent payé cher ses lignes… S’il avait vécu dans cette glorieuse et adorable époque, il aurait peut-être gagné autant d’argent qu’Alexandre Dumas, le Roi du Feuilleton, à liste civile, — par parenthèse, le seul descendant de l’auteur de Gil Blas qui ait, je crois, dit un jour du mal de son père, pour faire croire probablement qu’il n’en était pas le fils… « Il faut égorger ceux qu’on pille », disait Rivarol.
… Nous avons lu avec l’attention que mérite toute tentative hardie le travail qu’il a publié, et nous n’y avons trouvé ni une observation inconnue, ni un reproche qui n’ait été déjà et bien ou mal à propos articulé.
On lui rend le mal qu’il vous a fait !
En effet, vrai peut-être, s’il avait été intitulé, par exemple : Les Paysans des environs de Paris, et que l’auteur eût renoncé à ses paysages de Bourgogne ou les eût remplacés, le livre de Balzac n’est plus, sous sa dénomination abstraite et dure, qui étreint mal ce qu’elle veut embrasser, de l’observation libre, impersonnelle et lumineuse !
Mal élevé comme la plupart des hommes de cette époque infortunée, tiré à deux éducations contraires qui ne valent pas mieux l’une que l’autre, et qui, le rompant dans le centre même de son être à la place où les convictions doivent se bâtir leur forteresse, le hachent en deux tronçons plus ou moins saignants qui s’agiteront, sans se rejoindre dans un impuissant scepticisme, Christian, le héros du livre, est, une fois de plus, l’éternel malade dont nous avons tant étudié la maladie sur cette race de lépreux sublimes, Werther, René, Obermann, et tant d’autres animæ viles dans lesquelles le génie s’est expérimenté lui-même.
Je ne dis pas qu’un jour le jeune écrivain, plus avancé dans la vie et dans l’expérience d’écrire, ne baissera pas de quelques tons une corde de lyre qu’il tend quelquefois trop ; je ne dis pas qu’il penchera toujours vers cette préciosité dont il ne faut pas dire trop de mal, après tout, puisqu’elle nous empêche, par un ressaut et un cabrement, de tomber dans ce vilain abîme du commun qui n’est qu’un trou, et dans lequel nous tomberions tous, comme des capucins de cartes, si nous ne nous rejetions pas entièrement de l’autre côté Mais je dis qu’il continuera d’être distingué, fût-ce malgré lui ; car la distinction est la chose, quand elle est en nous, la plus difficile à supprimer.
. — Il n’y a pas de mal. — Mais tout ce raisonnement serré sera comme une haie d’épines. — Nous nous piquerons les doigts. — Mais les trois quarts des gens jetteraient là ces spéculations comme oiseuses. — Tant pis pour eux. […] Les substances polies qui conduisent le plus mal la chaleur sont celles qui s’imprègnent le plus de rosée ; celles qui conduisent le mieux la chaleur sont celles qui s’en humectent le moins1502 : d’où l’on conclut que « l’apparition de la rosée est liée au pouvoir que possède le corps de résister au passage de la chaleur. » « Mais si nous exposons à l’air des surfaces rudes au lieu de surfaces polies, nous trouvons quelquefois cette loi renversée. […] Cela fait un mélange bizarre, et j’avoue que j’aime mieux la manière dont les Allemands ont concilié la science et la foi. — Mais leur philosophie n’est qu’une poésie mal écrite. — Peut-être. — Mais ce qu’ils appellent raison ou intuition des principes n’est que la puissance de bâtir des hypothèses. — Peut-être. — Mais les systèmes qu’ils ont arrangés n’ont pas tenu devant l’expérience. — Je vous abandonne leur œuvre. — Mais leur absolu, leur sujet, leur objet et le reste ne sont que de grands mots. — Je vous abandonne leur style. — Alors que gardez-vous ? […] Ils ont torturé leurs formules universelles pour en tirer des cas tout particuliers ; ils ont pris des suites indirectes et lointaines pour des suites directes et prochaines ; ils ont omis ou supprimé le grand jeu qui s’interpose entre les premières lois et les dernières conséquences ; ils ont écarté de leurs fondements le hasard, comme une assise indigne de la science, et ce vide qu’ils laissaient, mal rempli par des matériaux postiches, a fait écrouler tout le bâtiment.
. — Il n’y a pas de mal. — Mais tout ce raisonnement serré sera comme une haie d’épines. — Nous nous piquerons les doigts. — Mais les trois quarts des gens jetteraient là ces spéculations comme oiseuses. — Tant pis pour eux. […] Les substances polies qui conduisent le plus mal la chaleur sont celles qui s’imprègnent le plus de rosée ; celles qui conduisent le mieux la chaleur sont celles qui s’en humectent le moins31: d’où l’on conclut que “l’apparition de la rosée est liée au pouvoir que possède le corps de résister au passage de la chaleur.” […] — Mais leur philosophie n’est qu’une poésie mal écrite. — Peut-être. — Mais ce qu’ils appellent raison ou intuition des principes n’est que la puissance de bâtir des hypothèses. — Peut-être. — Mais les systèmes qu’ils ont arrangés n’ont pas tenu devant l’expérience. — Je vous abandonne leur oeuvre. — Mais leur absolu, leur sujet, leur objet et le reste ne sont que de grands mots. — Je vous abandonne leur style. […] Ils ont torturé leurs formules universelles pour en tirer des cas tout particuliers ; ils ont pris des suites indirectes et lointaines pour des suites directes et prochaines ; ils ont omis ou supprimé le grand jeu qui s’interpose entre les premières lois et les dernières conséquences ; ils ont écarté de leurs fondements le hasard, comme une assise indigne de la science, et ce vide qu’ils laissaient, mal rempli par des matériaux postiches, a fait écrouler tout le bâtiment.
Se connaissant si mal lui-même, comment connaîtrait-il les autres hommes ? […] S’il eût mis les hommes sur le premier plan et l’église à l’horizon, bon gré, mal gré, il eût été amené à invoquer le secours de la syntaxe ; renfermé dans le domaine des choses, il a dû manier exclusivement la partie matérielle de la langue. […] Quand il se décide à quitter Blanfort pour essayer de la distraire, pour étourdir, pour dérouter sa rêverie, le mal est déjà profond et irréparable. […] L’imitation ingénieuse d’André Chénier, de Shakespeare et de Tite-Live n’a pu faire illusion qu’aux yeux mal exercés. […] Le poète a beau faire, les artifices les plus ingénieux du langage déguisent mal l’immobilité à laquelle sont condamnés ces trois personnages ; l’action d’Agnès de Méranie tourne autour d’elle-même au lieu d’avancer.
Et la promenade se termine, comme pas mal de promenades de Hokousaï, par la descente de deux Japonais dans une « Maison Verte » du Yoshiwara. […] Au fond, la limite est le mal de cœur, aussi bien pour les grands buveurs que pour les apôtres de la modération. […] » Mal nourrie, mal vêtue, reléguée dans un bâtiment de ferme, condamnée aux tâches les plus fatigantes, occupée, jour et nuit, à coudre les robes de soie de ses sœurs, elle a la vie la plus triste, la plus humiliante, une vie de Cendrillon, où jamais elle n’obtient l’assistance de son père manquant de tout caractère. […] Mais la danse la plus originale, c’est la Danse du mauvais esprit, une danse diabolique avec des mouvements d’un disloquage anti-humain, et des expressions de têtes méphistophéliques, un moment sous des masques carrés aux caractères mystérieux, désignant les génies du mal, danse qui a 67 figures. […] Ce nouvel an, je n’ai ni sou ni vêtement, et j’arrive seulement à me nourrir tant bien que mal, ne voyant mon vrai nouvel an de cette année qu’au milieu de son second mois.
L’intérêt qu’ils y prennent est brutal, analogue à celui d’un Espagnol devant une course de taureaux : « cela fait mal », diront-ils. […] La véritable réponse à faire, c’est que les railways sont un mal nécessaire qui tient plutôt à la nature de l’espace qu’à la faute de l’industrie : la plus belle statue a encore besoin d’un socle, et il faut tendre la toile d’un Raphaël sur un prosaïque châssis. […] Le problème métaphysique du mal n’a été posé nulle part avec plus de force que dans le Caïn de Byron, — son chef-d’œuvre peut-être en même temps que son œuvre la plus philosophique. […] La rime ne peut pas plus les transformer en vers que l’artifice typographique par lequel on les imprime à la ligne, avec des majuscules au premier mot ; des vers blancs seraient préférables à ces phrases mal équilibrées où les consonances sembleront nécessairement produites par le hasard. […] Leur mal ne tenait point à leur langue ni à leur époque, mais à leur génie même.
Il y a une historiette, entre autres, celle du curé de Saint-Babel, qui avait surtout choqué : « On l’accusait dans le monde, dit Fléchier en parlant de ce curé condamné à mort pour ses méfaits, d’avoir instruit ses paroissiennes d’une manière toute nouvelle ; de leur avoir inspiré quelque autre amour que celui de Dieu, et de leur avoir fait des exhortations particulières, bien différentes des prônes qu’il leur faisait en public. » Et continuant sur le même ton, il raconte comment ce curé, un jour qu’il était appelé près d’une mourante pour les derniers sacrements, avait négligé la maîtresse pour la servante : « Il ne se soucia plus du salut de sa maîtresse, dans le dessein qu’il eut contre l’honneur de la servante… Au lieu d’écouter la confession de l’une, il faisait sa déclaration à l’autre ; et bien loin d’exhorter la malade à bien mourir, il sollicitait celle qui se portait bien à mal vivre ; et la prenant par la main et par le menton : — Quelle peine ! […] [NdA] À la date de 1682, Fléchier écrivait encore à Mlle des Houlières dans le style de l’hôtel Rambouillet : « J’aurais assez bien reposé la nuit, si je n’avais eu aucune inquiétude de votre mal, et je sens bien que la joie de vous voir achèvera de me guérir.
Le style en général était assez pauvre sous l’Empire et servait mal l’aspiration de la pensée. […] Quelques maux dont il vît sa tête menacée, Ithaque était toujours sa première pensée ; Quelque bien que le Ciel lui permît de choisir, Ithaque était encor son unique désir.
La bonté demande une sorte de discernement du mal : elle le voit et le pardonne. […] Il est consolant de penser que, si l’on ne devine pas tout le mal qui fuit, on ne soupçonne pas non plus tout le bien.
Ce suicide final qu’on raconte de Lucrèce ne lui semblait peut-être qu’un retour d’accès d’un mal ancien : « L’air d’autorité, écrivait-il, ne suffit pas à déguiser ses terreurs ; voyez, il s’en revient pâle comme Dante ; l’armure déguise mal l’émotion du guerrier. » Il croyait discerner, sous cet athéisme dogmatique, comme sous la foi de Pascal, le démon de la peur.
Madame Necker dissimula mal sa jalousie contre une enfant qui l’éclipsait dans son salon et jusque dans le cœur de son père. […] Mais, lorsque malgré tant de maux, il vous reste encore du bien à faire, traînerez-vous du cachot au supplice cette intéressante victime ?
Sur quelques points l’absorption fut incomplète, et le rattachement mal fait : comme dans Floovent survit un descendant de Clovis, ainsi parfois apparaissent Charles Martel et Charles le Chauve, non déguisés ou mal déguisés en Charlemagne.
Cet homme endure tous les maux avec l’humble résignation de la bête de somme ; il regarde le comte Pierre avec un bon sourire innocent ; il lui adresse des paroles naïves, des proverbes populaires au sens vague, empreints de résignation, de fraternité, de fatalisme surtout. […] Sous cette forme neutre, cette espèce de cote mal taillée qu’est une traduction, sous ces mots français recouvrant un génie qui ne l’est pas, de vieilles vérités ou des observations connues me font l’effet de nouveautés singulières.
Aussi admirai-je Tibère, outre que la politique du temps50, qui s’insinuait dans nos collèges et nous y divisait en partis, donnait à tout le mal que Chénier dit du vieux tyran de Caprée le piquant de l’à-propos. […] Il y en a eu depuis lors, et d’éminents, aux yeux de qui Agamemnon est un bon ouvrage ; et la preuve que l’étude des modèles n’inspire pas si mal, c’est que l’originalité très réelle de Lemercier, — et il la poussa souvent jusqu’à se lasser d’être raisonnable, — ne lui a rien suggéré de mieux.
laissez que je dorme mon oubli, mon léthargique assoupissement du mal : n’éveillez pas le Malade ! […] Il est dans la bouche de Beckmesser qui, irrité de l’intervention de Sachs, et pressentant dès lors deux rivaux, lui reproche de faire les vers aussi mal que la chaussure.
L’homme des foules est atteint d’un mal moral que les aliénistes peuvent classer. […] Que l’on reparcoure encore la galerie de personnages du conteur, ces aines bizarres constituées de manies inconnues, de maladies mentales mal classées et jointes à une lucidité disparate, passionnées et froides, malades et rigide ; que l’on ajoute à ces marques d’originalité artistique une originalité scientifique incontestable, certaines propositions d’ Eurêka , des vues sur la métrique confirmées depuis par les travaux allemands, la vision latérale de l’œil établie il y a peu, la connaissance de l’action délétère de l’oxygène ; il semblera que dans aucune cervelle humaine n’ont jailli plus de visions, de groupes d’images et d’idées intégralement factices.
Et dans Mithridate, quel art d’ennoblir les faiblesses d’une grande ame, et de répandre de l’intérêt sur un vieillard malheureux, occupé de vengeance et de haine, allant malgré lui chercher des consolations dans l’amour qui met le comble à tous ses maux ! […] Mais si je n’avais pas mis le lecteur à portée de le faire lui-même, j’aurais bien mal réussi.
De plus, madame Gay, après avoir possédé une opulente fortune, était tombée dans une médiocrité d’existence qu’elle ne soutenait que par le travail littéraire, souvent si mal rémunéré ; elle craignait la pauvreté après elle pour cette enfant : elle pouvait penser que le double talent de la mère et de la fille, et leur double travail, apporteraient un peu plus d’aisance à la maison, que sa fille se ferait avec ses vers une propre dot de sa gloire. […] Ton signe révéré, gage de délivrance, Prodigue à tous les maux des trésors d’espérance : La crainte et le bonheur t’invoquent tour à tour.
Les animaux restent et doivent rester emprisonnés dans leurs instincts divers : l’homme, perfectible sous le rapport de ses facultés comme sous le rapport du sentiment moral ; l’homme, à qui il est donné de savoir et de connaître ; l’homme, qui peut choisir le bien ou préférer le mal, l’homme est un être libre, et ce n’est que dans l’état social qu’il trouve à la fois et les attributs et les limites de sa liberté : alors il peut en abuser, au point de renoncer à la société elle-même, au point de faire le sacrifice de sa vie ou de s’en dépouiller de sa propre main. […] Nous avons vu l’homme vouloir usurper la prérogative de nommer : alors il a mal nommé, et le nom n’est pas resté.
Seulement, elle montrera, de plus, l’inanité dans le mal même qui est le caractère de la politique de Choiseul. […] Ils ne furent pour rien dans l’élection du Pape, créé par l’Espagne toute seule, qui, du moins, avait la puissance et la science du mal qu’elle voulait.
Assurément, si un livre semblable avait paru à la date de la langue qui s’y trouve parlée, il aurait fait le même mal que ceux de Boccace, de Marguerite de Valois, de Rabelais et de tant d’autres rieurs, charmants et coupables, et il partagerait la même condamnation et la même peine devant l’Histoire. […] D’un autre côté, ce ne sont point quelques plaisanteries de fabliau sur le mariage, lesquelles traînent dans les Gaules depuis qu’il y a des Gaules, et que toute la piété du Moyen Âge n’interdisait pas à l’esprit gaulois, qui peuvent faire un mal bien grand dans un temps où c’est l’institution même qui a été attaquée et où l’adultère a été glorifié philosophiquement comme un droit.
Ce mot a été souvent mal appliqué ; il a été surtout employé dans des sens assez différents.
les poëtes n’ont pas comme les peintres leur exposition annuelle où chaque curieux défile, où chaque critique est convié d’office et où, tant bien que mal, ils sont regardés et jugés.
Indépendamment des défauts et des torts corrélatifs, pour ainsi dire, à ses qualités, comme chez Rousseau, il en a de gratuits et par surérogation comme menteur, mal élevé, ami de Richelieu, sans décence et sans dignité dans sa grandeur.
D’ailleurs, il était paisible, confiant et bon ; il se jetait dans l’imprévu avec cette insouciance naturelle aux êtres qui ne croient pas que le mal puisse exister ; il ne se plaignait pas de la fortune, qui l’avait exposé aux chances les plus dures, et il remerciait la nature des instincts qu’elle lui avait donnés et des trésors de jouissances inconnues qu’elle avait renfermés dans son âme.
Philoctète est le seul exemple d’un effet théâtral produit par elle ; et ce sont les causes héroïques de sa blessure qui permettent de fixer l’intérêt des spectateurs sur ses maux.
Il arrive sans cesse en société, lorsqu’on écoute des hommes qui ont le dessein de faire croire à leurs vertus ou à leur sensibilité, de remarquer combien ils ont mal observé la nature, dont ils veulent imiter les signes caractéristiques.
qu’ils savent mal lire au fond des âmes !
Quels sont les deux ou trois grands hommes qui ont signalé leur existence dans ces régions, par ces hautes vertus ou par ces exécrables crimes qui font vénérer à jamais ou détester les prodiges de bien ou les monstruosités de mal qui honorent ou déshonorent notre espèce ?
Cependant deux choses tendent à ramener les ouvrages de science et d’érudition dans notre domaine : la langue française, quand on l’emploie, toute concrète encore et chargée de réalité, et dont les mots apportent, au milieu des abstractions techniques, les formes, les couleurs et comme le parfum des choses sensibles ; ensuite, le tempérament individuel, mal plié encore à la méthode scientifique, et qui jette sans cesse à la traverse des opérations de la pure intelligence l’agitation de ses émotions et les accidents de sa fortune.
Elle redouble son mal en l’analysant, elle en trouve la formule : c’est la privation du sentiment, avec la douleur de ne pouvoir s’en passer.
Larroumet aimait mieux induire lentement de faits multiples, emboiter le pas tranquillement à des jugements antérieurs qu’il reconnaissait vrais, que de jeter des aperçus mal vérifiés, ou d’étaler des fantaisies brillantes.
[Pièce — 1842 — insérée plus tard dans l’édition définitive des Fleurs du mal (1890).]
De deux horloges, nous n’avons pas le droit de dire que l’une marche bien et que l’autre marche mal ; nous pouvons dire seulement qu’on a avantage à s’en rapporter aux indications de la première.
C’est ce qu’on a appelé la pression Maxwell-Bartholdi ; elle est très petite et on a eu bien du mal à la mettre en évidence avec les radiomètres les plus sensibles ; mais il suffit qu’elle existe.
Placés ainsi aux confins du judaïsme et presque en dehors, les pauvres Galiléens n’avaient pour relever leurs espérances qu’un passage d’Isaïe assez mal interprété 593 : « Terre de Zabulon et terre de Nephtali, Voie de la mer 594, Galilée des gentils !
Lorsque le mal étoit sans conséquence, nous nous sommes bornés à l’indiquer ; lorsqu’il a paru nuisible, nous avons tâché de le mettre en évidence & de le proscrire avec vigueur.
si nous n’étions pas capables d’incarner les maux du monde ?
Très frappé des pertes graduelles, croissantes, que faisait la foi catholique au sein des jeunes générations, et qui proviennent de tant de causes combinées, M. de Montalembert, pour couper court au mal, crut qu’il fallait en dénoncer toute l’étendue, et marquer au vif la séparation entre la partie saine et celle qui, selon lui, ne l’était pas.
Il regrette — en juillet 1862 — « que la science du moraliste » encore mal organisée, soit à l’état pour ainsi dire anecdotique ; la critique reste donc un art qui demande chez celui qui l’exercice de dons innés.
Or, ils pensaient que le principal but des gouvernements est d’assurer le bien-être des populations ; seulement les gouvernements, suivant eux, s’y prenaient mal pour assurer ce bien-être, car les gouvernements croient que c’est par des règlements, des protections, des autorisations, des inspections qu’ils favorisent le progrès de l’industrie et le progrès des lumières.
C’est qu’il est de l’essence de toute traduction, de rendre aussi mal les plus grandes beautez d’un poëme, qu’elle rend fidellement les défauts du plan et des caracteres.
Je hazarderai ici une conjecture toute nouvelle, et qui peut donner l’intelligence d’un passage de Pline mal entendu jusques ici ; c’est que les anciens après s’être servi d’airain pour incruster les masques, y emploïerent ensuite des lames fort minces d’une espece de marbre.
Ces romans n’étaient point, comme on eût pu le supposer, des impies plaidoyers en faveur des désordres d’une vie effrénée, mais une attaque directe et à fond contre l’inégalité matrimoniale, assez mal commode pour l’adultère.
C’était cette vieille idée de la conquête, qui fait qu’un homme, à la tête de quelques hommes comme lui, s’empare d’un pays mal gouverné, malheureux, exploité par des corrupteurs imbéciles, et le pousse dans des voies de prospérité, d’intelligence et de gouvernement.
Il lui sera d’ailleurs beaucoup pardonné parce qu’il a beaucoup donné à dîner, même sans perles au dessert, et qu’il a Sophie, tandis qu’à Buloz, chez qui on ne dîne point ou chez qui l’on dîne mal, et qui n’a que de Mars pour la cuisine… de sa littérature, il ne lui sera rien pardonné du tout !
Or, il faut savoir ce que c’est que le brigandage italien, cette âpre goutte immortelle du lait de la Louve mêlée au sang des fils de Romulus, et qui n’est jamais sortie de leurs veines, pour apprécier ce qu’il faut d’énergie à l’homme qui vient à bout de ce mal héréditaire d’une race.
Elle était née sans aucune mémoire, sans aucune imagination, disait-elle, et de plus parfaitement incapable de discourir avec l’entendement ; mais la Prière, la Prière plus forte que toutes les sécheresses, lui donna toutes les facultés qui lui manquaient ; car la Prière a fait Térèse, plus que sa mère elle-même : « Je suis en tout de la plus grande faiblesse, — dit-elle, — mais, appuyée à la colonne de l’Oraison, j’en partage la force. » Malade, pendant de longues années, de maladies entremêlées et terribles qui étonnent la science par la singularité des symptômes et par l’acuité suraiguë des douleurs, Térèse, le mal vivant, le tétanos qui dure, a vécu soixante-sept ans de l’existence la plus pleine, la plus active, la plus féconde, découvrant des horizons inconnus dans le ciel de la mysticité, et, sur le terrain des réalités de ce monde, fondant, visitant et dirigeant trente monastères : quatorze d’hommes et seize de filles.
C’est un sujet qui, malgré sa beauté, n’avait jamais tenté que des plumes ignorantes ou mal renseignées.
Or, cette histoire mal connue encore, malgré des travaux honorables dans lesquels déjà l’intelligence et la justice ont introduit leur pointe de lumière, cette histoire reprise aujourd’hui par M. de Chalambert, fera-t-elle cette fois le jour, — le grand et pur jour ?
L’homme était au fond d’un mal immense, qui ne pouvait plus augmenter.
Mais le mal est moins la calomnie que l’idée qu’il a eue qu’en se comparant à Louvet il ne se calomniait pas… A force de regarder le xviiie siècle, son regard moral s’est troublé.
Ni Le Notaire de Chantilly, à scènes si grandiosement pathétiques et qui finit si mal pour avoir voulu trop bien finir.
C’est elle-même, cette fleur de dix-sept ans et du mal, dirait Baudelaire, qui, dans cette auberge pleine, descend le matin, tire les verrous et se jette à Desgrieux qui l’enlève !
C’est très mal, très bon, très doux, très absurde.
Bientôt cet honneur devint commun ; la flatterie et le mensonge ne tardèrent point à le corrompre ; on exagéra le bien, on fit disparaître le mal, on supposa des actions qui n’avaient point été faites, on créa de fausses généalogies ; enfin, à l’aide de la ressemblance des noms, on se glissa dans des familles étrangères, tant la fureur d’exister par ce qui n’est plus, et de prendre un nom pour du mérite, a été commune à tous les siècles.
Cette science fut appelée muse, expression qu’Homère nous définit par la science du bien et du mal, qui n’est autre que la divination 44.
On rendrait mal cet oubli de toutes choses et de soi-même où elle jette un instant celui qui s’y livre, cette rêverie, ce trouble, cet abandon où l’âme, uniquement préoccupée d’une image, d’un sentiment, d’une sensation même, perd un moment le souvenir et la prévoyance, et se berce elle-même du chant qui lui échappe. […] Voltairien, libéral, métaphysicien in petto , croyant à la vérité, disposé à écrire, il sent très-bien que ce n’est point là le lieu pour étaler toutes ces choses de nature si vive et si entière, et qui vont mal avec la transaction perpétuelle dont la bonne grâce sociale se compose : « C’était son plaisir, nous dit-il, son orgueil, que de sentir fermenter secrètement en lui les idées et même les passions du siècle, au milieu de ces salons conservateurs, à opinions royalistes et religieuses modérées, mais superficielles. » De cette philosophie, en particulier, qu’il avait trop à cœur pour la risquer devant tous, il aurait dit volontiers alors ce que le poète a dit du culte de la muse : My shame in crowds, my solitary pride ! […] M. de Rémusat est de ceux du moins qui ne sauraient se faire à l’indifférence en matière de vérité ; c’est sous cette forme plutôt philosophique qu’il combat le mal présent.
Cette doctrine distingue donc nettement les uns des autres les faits psychiques coexistants : « J’aurais pu m’abstenir de tuer, dit Stuart Mill, si mon aversion pour le crime et mes craintes de ses conséquences avaient été plus faibles que la tentation qui me poussait à le commettre 33. » Et un peu plus loin : « Son désir de faire le bien et son aversion pour le mal sont assez forts pour vaincre… tout autre désir ou toute autre aversion contraires 34. » Ainsi le désir, l’aversion, la crainte, la tentation sont présentés ici comme choses distinctes, et que rien n’empêche, dans le cas actuel, de nommer séparément. […] C’est ainsi qu’en juxtaposant certaines lettres d’un alphabet commun à bien des langues on imitera tant bien que mal tel son caractéristique, propre à une langue déterminée ; mais aucune de ces lettres n’avait servi à composer le son lui-même. […] Tel est cet ensemble de sentiments et d’idées qui nous viennent d’une éducation mal comprise, celle qui s’adresse à la mémoire plutôt qu’au jugement.
Mirabeau prédit tous ces maux à son lit de mort : ils se sont trop vérifiés pendant trois années. […] Bientôt, nous en avons sa volonté pour gage, et son génie guerrier, s’il était malheureusement nécessaire, bientôt l’hymne de la paix retentira dans ce temple de la guerre ; alors le sentiment universel de la joie effacera le souvenir de toutes les injustices et de toutes les oppressions : déjà même les opprimés oublient leurs maux, en se confiant à l’avenir ; les acclamations de tous les siècles accompagneront enfin le héros qui donnera ce bienfait à la France, et au monde qu’elle ébranle depuis trop longtemps. […] la douleur n’est-elle pas toujours le résultat des maux causés par la nature et par la société ? […] Premier extrait Cet ouvrage longtemps attendu, et commencé dans les jours d’oppression et de douleur, paraît quand tous les maux se réparent, et quand toutes les persécutions finissent. […] Écartez tous les maux de nos foyers. » Di patrii, purgamus agros, purgamus agrestes : Vos mala de nostris pellile limitibus.
» Quand la loyauté demeure si profondément enracinée dans le cœur de l’homme qui s’est exposé à de tels maux pour la liberté, il faut qu’en général la liberté ne croie pas avoir beaucoup à se plaindre. […] Que m’importera qu’on me qualifie mal ou bien si vous recouvrez de fraîches couleurs ce que j’ai de mauvais, et reconnaissez ce que j’ai de bon26? […] Les profits qu’il retirait du théâtre, en qualité d’auteur et d’acteur, ont été évalués à deux cents livres sterling par an, somme considérable pour le temps ; et si les bienfaits de lord Southampton sont venus au secours de l’économie du poëte, on peut juger que du moins ils n’ont pas été mal employés. […] Dans cette condition de la nature humaine a été puisé le véritable motif des unités de temps et de lieu, si souvent et si mal à propos fondées sur une prétendue nécessité de satisfaire la raison en accommodant la durée de l’action réelle à celle de la représentation théâtrale ; comme si la raison pouvait consentir à ce que, dans l’intervalle d’un entr’acte de quelques minutes, on crût passer du soir au matin sans avoir dormi, ou du matin au soir sans avoir mangé ! […] Que l’action nous eût révélé les maux que traîne avec soi l’oppression ; que nous eussions vu Joad excité, poussé par les cris des malheureux en proie aux vexations de l’étranger ; que l’indignation patriotique et religieuse du peuple contre un pouvoir « prodigue du sang des misérables » fût venue légitimer à nos propres yeux la conduite de Joad ; l’action ainsi complétée ne laisserait dans notre âme aucune incertitude ; et Athalie nous offrirait peut-être l’idéal de la poésie dramatique, tel du moins que nous ayons pu le concevoir jusqu’à ce jour.
L’objet perçu dans sa réalité se prête mal à ces personnifications et ces métamorphoses. […] Elle conviendrait mal au poète. […] Il va de l’idée à la phrase, s’efforçant tant bien que mal d’ajuster l’une à l’autre. […] On serait tenté de sourire de l’écrivain qui se donne tant de mal pour mettre sur pied quelques phrases. […] La fusion entre les deux éléments ne se fait pas ou se fait mal, et laisse l’impression d’une sorte de placage.
En les faisant venir en France, l’oncle n’avait pas si mal spéculé pour la grandeur de sa maison et pour l’agrément de la société française. […] Quant à la hauteur, je ne sais si ce ne serait pas plutôt un bien qu’un mal, et je croirais que ce serait une bonne attention à faire dans le choix des ministres que le roi enverra ici.
Elle décrit en termes pathétiques, à l’envoyé de Charles IX à Londres, les disgrâces de son avant-dernière prison : « Elle n’est que de vieille charpenterie, écrit-elle, entr’ouverte de demy pied en demy pied, de sorte que le vent entre de tous costez en ma chambre, je ne sais comme il sera en ma puissance d’y conserver si peu de santé que j’ay recouverte ; et mon médecin, qui en ha esté en extresme peine durant ma diette, m’ha protesté qu’il se déchargeroit tout à fait de ma curation, s’il ne m’est pourveu de meilleur logis, luy mesme me veillant durant ma dite diette, ayant expérimenté la froydure incroyable qu’il faisoit la nuit en ma chambre, nonobstant les estuves et feu continuel qu’il y avoit et la chaleur de la saison de l’année ; je vous laisse à juger quel il y fera au milieu de l’hyver, cette maison assise sur une montagne au milieu d’une plaine de dix milles à l’entour, estant exposée à tous ventz et injures du ciel… Je vous prye luy faire requeste en mon nom (à la reine Élisabeth), l’asseurant qu’il y a cent païsans en ce meschant villaige, au pied de ce chasteau, mieuz logez que moy, n’ayant pour tout logis que deux méchantes petites chambres… De sorte que je n’ay lieu quelconque pour me retirer à part, comme je peux en avoir diverses occasions, ni de me promener à couvert : et pour vous dire, je n’ay esté oncques si mal commodée en Angleterre... » Les serviteurs écossais et les compagnes de sa fuite et de sa captivité succombaient un à un à cette longue agonie des prisons. […] « Dieu vous veuille prospérer, vostre femme, enfants et frères, et cousins, et surtout nostre chef, mon bon frère et cousin, et tous les siens ; la bénédiction de Dieu et celle que je donnerois à mes enfants puisse estre sur les vostres, que je ne recommande moins à Dieu que le mien, mal fortuné et abusé.
Partant de ce principe, qu’il y a plus de biens que de maux dans la vie, il recommande comme nécessaire la science par laquelle on conserve la santé, le premier bien et le fondement de tous les autres. […] Trop occupé de l’éloigner comme cessation violente d’un état où le bien lui paraissait l’emporter sur le mal, il ne songea pas à la méditer comme le commencement d’une autre vie.
Je ne puis admettre non plus que je me sois donné tant de mal pour combattre une pure chimaera bombinans. […] Mais, je le répète, quand on s’est donné bien du mal pour trouver la vérité, il en coûte d’avouer que ce sont les frivoles, ceux qui sont bien résolus à ne lire jamais saint Augustin ou saint Thomas d’Aquin, qui sont les vrais sages.
Il voit que l’adultère repose endormi entre ses deux sourcils froncés et sinistres ; il devine le mal des pays impurs qui la ronge, il sent qu’il a introduit une ennemie dans la famille, et ses remords éclatent en aigreurs, en dissentiments, en sarcasmes. […] Ce n’est pas que je n’admette pleinement son retour au mal.
Mon petit Pierre Gavarni expliquait, ce soir, assez ingénieusement, le talent de Fromentin : un manque d’études suivies, une inexpérience curieuse du métier de la grande peinture, mais le jet sur la toile d’un milieu et d’une heure, que le peintre peuple après d’Arabes et de chevaux mal dessinés et incomplètement peints, mais qui sont au fond charmants, presque vrais, et qui vivent par l’exquise et poétique trouvaille de la nature ambiante. […] Me voici donc, comme un chirurgien, qu’on arracherait à d’aimables curiosités, obligé de reprendre la cruelle autopsie moderne, la brutale prose, le travail qui fait mal, et dont tout mon système nerveux souffre, tout le temps que le volume se pense et s’écrit… * * * — Il s’élève, à l’heure qu’il est, une génération de jeunes liseurs de bouquins, aux yeux ne connaissant que le noir de l’imprimé, une génération de petits lettrés, sans passion, sans tempérament, les yeux fermés aux femmes, aux fleurs, aux objets d’art, à tout le beau de la nature, et qui croient qu’ils feront des livres.
Appliquons cette méthode à un exemple classique. « J’ai mal à votre poitrine », écrivait Mme de Sévigné à sa fille malade. […] On accentue l’humour, au contraire, en descendant de plus en plus bas à l’intérieur du mal qui est, pour en noter les particularités avec une plus froide indifférence.
L’action de la grâce y domine au point de ne plus guère laisser d’efficacité à la volonté que pour le mal et le péché. […] Si Aristote et Leibnitz ont chacun renouvelé cette dernière, s’ils ont rendu la vie et l’être véritable à cette nature si mal comprise des physiciens atomistes et des physiciens géomètres de leur époque, c’est qu’ils en avaient retrouvé le principe de spontanéité dans une autre expérience que celle des sens.
Peut-être l’ai-je mal rendu, et alors mon récit serait assez plat ; peut-être aussi faut-il, pour y trouver quelque sel, avoir devant les yeux le personnage lui-même, avec ses grandes culottes à la mameluck et la pipe à ses moustaches.
La France était lasse décidément et voulait en finir ; on s’aperçut comme soudainement alors que la raison était de son côté, « tant la justice et le droit ont de puissance sur les hommes, selon la remarque judicieuse de Villeroi, spécialement après que les maux les ont faits sages ».
Mais notre siècle, mal abrité et ouvert à tous les vents, ne permet plus ces établissements éphémères : les beaux nuages d’un Malebranche seraient de nos jours bien vite balayés par les tempêtes ou les moindres souffles qui partent chaque matin de tous les points de l’horizon.
Ce sont des espèces de victimes publiques, des Prométhées dont le foie est rongé par une fatalité intestine ; tout l’enfantement de la société retentit en eux, et les déchire ; ils souffrent et meurent du mal dont l’humanité, qui ne meurt pas, guérit, et dont elle sort régénérée.
Je vous respecte beaucoup, mais je ne vous crains nullement, et peut-être pourrois-je me faire craindre si vous en usiez mal ; car autant je suis disposé à rendre justice à la Congrégation sur ce qu’elle a de bon, autant devez-vous compter que je relèverois vivement ses endroits faibles si vous me poussiez à bout, ou si j’apprenois seulement que vous en eussiez le dessein.
Il faut bien se dire qu’il devra y avoir par tout le corps social, par toute la machine administrative de haut en bas et jusque dans les dernières branches, circulation d’un même esprit, d’une même intention, sans quoi tout ira mal, sans concert, avec décousu et tirage en sens inverse, comme ce qui s’est fait précédemment, comme ce qui se fait encore tous les jours.
Néanmoins il en est d’elle comme de tous les biens que permet notre destinée : ils ont tous des inconvénients, que l’on fait ressortir seuls, si le vent de la faction souffle dans ce sens ; mais en se livrant ainsi à l’examen des choses, quel don de la nature paraîtrait exempt de maux ?
On ne tarde pas à s’en apercevoir, et le chagrin que cause une telle découverte augmente encore le mal qu’on voudrait réparer.
Nous remarquons avec Descartes que l’on conçoit très bien un myriagone et qu’on l’imagine très mal.
Une puissance de création médiocre ; un peu de jalousie, de malignité à l’égard des grands contemporains, où l’on sent un dépit de n’avoir pas percé soi-même au premier rang ; un excès de sévérité pour les vaincus du combat politique qui ne sont pas satisfaits de leur défaite, une insistance à les convertir, où le journaliste officiel, payé, protégé, se découvre trop, et qui fait que des Lundis, à les lire tout d’une suite, émane un déplaisant parfum de servilité ; certain goût de commérages et d’investigations scabreuses, où l’on devine que, sous prétexte d’exactitude historique, se satisfait une imagination inapaisée de vieux libertin : voilà le mal qu’on peut dire de Sainte-Beuve857 .
Par nous le mal essentiel Croît au sentier de l’œuvre pie Qui vous conduit tout droit au ciel.
La raison, en présidant aux ébats du cœur et des sens, les garde de tout mal et leur permet de varier leurs aimables expériences.
Qu’elle pense par à peu près ; qu’elle soit peu apte aux idées générales ; qu’elle n’ait point la notion du juste ; qu’elle ne puisse, toute seule, résister au mal, — vous croyez peut-être que tout cela, mis ensemble, signifie que la femme est inférieure à l’homme ?
Éphraïm et La Rode ne s’entendent pas plus mal que d’autres à « mouvoir les masses. » Si la pièce était représentée (et je ne vois pas pourquoi l’Odéon n’en tenterait pas l’épreuve), peut-être paraîtrait-elle au public intéressante, colorée, violemment dramatique, qui sait ?
Francisque Sarcey Jamais les beaux vers n’ont sauvé une pièce mal faite.
Ils n’étaient guère sensibles au charme des arts ; ils devaient être surtout fort mal disposés pour les bouffons italiens qui s’en allaient divertir MM. les députés de la Ligue.
L’entraînement mutuel de ces deux cœurs, si différents et si mal connus l’un de l’autre, deviendra peu à peu irrésistible.
Longtemps les objets dont s’occupent les mathématiciens étaient pour la plupart mal définis ; on croyait les connaître, parce qu’on se les représentait avec les sens ou l’imagination ; mais on n’en avait qu’une image grossière et non une idée précise sur laquelle le raisonnement pût avoir prise.
Ce tyran s’inquiéta du levain politique mal dissimulé dans les prédications de Jean.
Peut-être un œil sagace eût-il su reconnaître dès lors le germe des récits qui devaient lui attribuer une naissance surnaturelle, soit en vertu de cette idée, fort répandue dans l’antiquité, que l’homme hors ligne ne peut être né des relations ordinaires des deux sexes ; soit pour répondre à un chapitre mal entendu d’Isaïe 685, où l’on croyait lire que le Messie naîtrait d’une vierge ; soit enfin par suite de l’idée que le « Souffle de Dieu », déjà érigé en hypostase divine, est un principe de fécondité 686.
Le mal est venu de ce que ces éditeurs sont en même temps auteurs d’une vie de madame de Maintenon ; qu’ils ont composé leur biographie avant d’avoir assez étudié les lettres pour les mettre à leur véritable place, et qu’ensuite ils ont arrangé les lettres dans l’ordre qui s’accordait avec leur composition, au lieu de composer d’après l’ordre des lettres bien vérifié.
Mais, par un retour presque forcé des lois de la famille, et que l’auteur l’ait voulu ou non, le fils qui s’institue accusateur de son père plaide si mal sa cause, qu’il la perd, comme dans la pièce précédente.
Être mal avec les Colbert, et vouloir jouer au plus fin avec Louvois, c’était se préparer un périlleux avenir.
Elle est tantôt celui des foux ; rarement celui d’un honnête-homme. » Si l’on remonte des particuliers aux princes, on verra que bien des souverains ont pensé de même ; qu’ils n’ont rien eu tant à cœur que de tenir la poësie éloignée de leurs états, comme un de ces maux contagieux qui portent la désolation & la mort partout où ils se glissent.
Les phrénologues expliquent ces faits en disant que lorsque la blessure ou le mal se produit par derrière, les parties antérieures sont sympathiquement malades ; mais on pourrait faire le raisonnement inverse avec la même autorité, et par là toutes les indications de l’anatomie pathologique sont entachées d’incertitude et d’obscurité46.
Vous voilà étendu sur votre chaise de paille, les bras posés sur vos genoux, votre bonnet de nuit renfoncé sur vos yeux, ou vos cheveux épars et mal retroussés sous un peigne courbé ; votre robe de chambre entrouverte et retombant à longs plis de l’un et de l’autre côté : vous êtes tout à fait pittoresque et beau.
On ne pourra qu’assigner vaguement un conséquent mal défini à un groupe confus et indéfini d’antécédents.
Je les crois tous mal acquis ; et, du moins, quand j’ai un arrêt en ma faveur, c’est un titre, et ma conscience est en repos (toujours Alceste).”
C’était affaire aux princes qui les employaient, et qu’importent même ces princes, qui s’appellent Philippe II, Charles IX, Catherine de Médicis, Henri III, qu’importent-ils au catholicisme, cette grande doctrine, pure de tout ce qu’on a fait de mal pour elle ?
Il ne se vante pas d’être un observateur à forcer toute confiance, il ne tient pas à regarder de près les choses, aimant mieux observer mal que de ne pas respecter l’imagination en lui.
Ceci n’est point un mal.
Je n’en fais pas grand cas ; Les Cenci m’ont coûté moins de mal qu’aucune autre œuvre d’égale étendue », Ainsi s’exprimait-il sur le compte du seul drame anglais moderne qui se puisse mettre en regard des drames élizabéthains. […] Dès que celle-ci s’amorce, tout s’arrête de bougerdw ». « Le mal de Hamlet, il le porte en soi et le serre précieusement contre son âme comme chacun étreint les misères qui le font soi-mêmedx ». […] On n’a fait don de soi qu’au prix d’une extrême violence : on ne se reprend pas au premier commandement ; et ce qu’on a eu tant de mal à s’imposer comme inviolable, on ne peut pas le considérer tout à coup comme insignifiant. […] Aussi telles de ses pages ne ressemblent à rien tant qu’à ces profils de terrains avec lesquels nous familiarisent les traités de notre enfance ; et l’opération par laquelle, géologue de terres mal connues, Proust nous fait passer d’une couche dans l’autre, s’exécute avec une agilité dans la profondeur qui constitue un des attributs les plus rares de son génie. […] » II connaîtrait bien mal Jacques Rivière celui qui de ce passage même arguerait pour mettre en doute la survie de cette « petite chose » : les petites choses, celles qui détiennent cet étrange pouvoir de « durer petitement », il n’est rien au contraire à quoi Rivière fût plus attaché ; c’étaient elles — et parce que petites — qui obtenaient de lui la fidélité plus « difficile » encore que l’amour.
Nous connaissons mal notre âme. […] Je comprends mal les réglementations autoritaires, et je ne fais aucune difficulté pour reconnaître en passant que telle forme de versification qu’on a beaucoup critiquée, comme l’utilisation de toutes les sortes de vers français confondus dans un même mouvement rythmique (mais est-ce là le prétendu « vers libre ? […] Ce sont là des ensembles de faits qu’on ne saurait méconnaître ou nier, et qui établissent jusqu’à l’évidence qu’il y a là un mode d’expression poétique, peut-être encore imprécis et mal défini, mais qui se fera de plus en plus sa place dans la poésie de l’avenir.
Il y voit avec raison le germe de bien de travers et de bien des maux : être et paraître, c’est à l’écraser et à l’extirper, ce besoin de faire effet, qu’il croit que consiste le plus fort de la morale : « Chose singulière ! […] Je n’ai jamais qu’à faible haleine Et d’un accent serré de peine Laissé tomber le mot Adieu ; Malade du mal de la terre, Tout bas soupirant après l’ère Où ce mot doit mourir en Dieu.
Dès l’abord la mer inquiète et étonne ; ce n’est pas en vain qu’un peuple est insulaire et marin, surtout avec cette mer et sur ces côtes ; leurs peintres, si mal doués, en sentent, malgré tout, l’aspect alarmant ou lugubre ; jusqu’au dix-huitième siècle, parmi les élégances de la culture française et sous la bonhomie de la tradition flamande, vous trouverez chez Gainsborough l’empreinte ineffaçable de ce grand sentiment. […] Le ministre, même au village, n’est pas un fils de paysan, mal décrassé, encore imbu du séminaire, enfermé dans une éducation monacale, séparé de la société par le célibat, à demi enfoncé dans le moyen âge1330.
La description physique de la terre, jusqu’ici assez mal limitée comme science, devint, selon ce plan, qui s’étendait à toutes les choses créées, une description physique du monde. […] XI Après cet humble portique, on entre, pendant tout le premier volume, dans une longue analyse, très mal placée, mais très bien rédigée, de ce qu’on peut appeler son cours de contemplation de la nature universelle.
Après avoir déclaré qu’en pareille matière il préfère la tradition orale aux livres, Papias mentionne deux écrits sur les actes et les paroles du Christ : 1° un écrit de Marc, interprète de l’apôtre Pierre, écrit court, incomplet, non rangé par ordre chronologique, comprenant des récits et des discours [Greek : lechthenta ê prachthenta], composé d’après les renseignements et les souvenirs de l’apôtre Pierre ; 2° un recueil de sentences [Greek : logia] écrit en hébreu 22 par Matthieu, « et que chacun a traduit comme il a pu. » Il est certain que ces deux descriptions répondent assez bien à la physionomie générale des deux livres appelés maintenant « Évangile selon Matthieu », « Évangile selon Marc », le premier caractérisé par ses longs discours, le second surtout anecdotique, beaucoup plus exact que le premier sur les petits faits, bref jusqu’à la sécheresse, pauvre en discours, assez mal composé. […] Ce n’est pas par des tirades prétentieuses, lourdes, mal écrites, disant peu de chose au sens moral, que Jésus a fondé son œuvre divine.
Des lettres anonymes, évidemment fantaisistes dans leur exagération, sont même allées jusqu’à l’avertir que la dynamite interviendrait pour faire sauter la salle, et le poignard pour mettre à mal l’habile directeur de l’Opéra-Comique. […] Vous êtes malade, en effet, mon cher Carvalho ; vous êtes atteint d’un mal incurable, de la passion de l’art que vous aimez follement, à ce point qu’aucune considération ne paraît devoir vous empêcher de monter un chef-d’œuvre, fût-il de Richard Wagner.
L’enfant mal nourri a souvent ce que les médecins appellent la main nerveuse, c’est-à-dire agitée de perpétuels tressaillements ; une nutrition encore plus mauvaise peut aboutir à la chorée. […] Si elle est trop violente ou trop inattendue, elle se trouve en opposition trop forte avec le cours antérieur des sentiments et des mouvements ; elle produit donc un choc trop violent qui peut avoir son côté pénible : « La joie fait mal, la joie fait peur. » Mais ce sont là des effets dérivés du manque d’adaptation préalable et de la résistance que rencontre alors l’émotion de la joie ; cette résistance est une peine, qui s’oppose tout d’abord au plaisir et lui dispute l’entrée de la conscience.
Nous eûmes assez de mal à retrouver le manuscrit. […] si nous avions pu écrire une seconde pièce d’amour, celle-là, je vous en réponds, eût été balayée de tout jargon romantique ou livresque, et l’on n’y eût pas rencontré une phrase comme celle-ci : « Vous étiez dans mes rêves comme il y a du bleu dans le ciel », une phrase pas mal rédigée tout de même, mais appartenant au vieux jeu.
Les deux sœurs, ses compagnes de solitude, qui s’occupaient des soins du ménage sur la galerie, se sauvèrent en emportant leurs laitues mal épluchées, comme si un profane avait troublé le mystère. […] Là, un matelas, recouvert de couvertures étendues irrégulièrement aussi sur une litière mal aplanie de volumes, servait de lit à M. de Valmont ; des livres amoncelés en forme de traversin lui servaient à relever sa tête comme un oreiller ; d’autres volumes marquaient la place des pieds par un bourrelet de livres qui encadraient cette couche.
Son style est enflé, son expression dure & gothique, ses descriptions sont basses, ses comparaisons mal choisies à quelques-unes près. […] Elles venoient de paroître, & par conséquent tout le monde affectoit d’en dire du mal.
Combien cependant mon étonnement était mal fondé ! […] C’est ce qui peut rendre compte de ce sentiment général et mal défini qui porte beaucoup de paléontologistes à admettre que l’organisation a progressé, du moins quant à l’ensemble, à la surface du monde.
Je vous demande en grâce, mon cher et grand philosophe, écrivait Voltaire à d’Alembert (13 février 1758), de me dire pourquoi Duclos en a mal usé avec vous.
Mais que j’ai hâte, malgré les preuves d’énergie et d’habileté qu’il y donne, d’être sorti bientôt avec lui de ces époques pénibles de désordre et de confusion, où le patriotisme ne sait le plus souvent à quoi se prendre, où les routes du devoir sont douteuses et obscures, où il faut se cacher et user de ruse pour faire le moindre mal dans l’impuissance du bien, où les forces de l’État se consument dans des luttes intestines, et où les âmes généreuses seraient capables, à la longue, de s’aigrir et de s’altérer !
Le coup d’œil qu’il a jeté du haut du pic du Midi sur les divers étages et les groupes des montagnes centrales, jusque-là mal démêlées dans leurs proportions respectives, a indiqué à Ramond les sommets inexplorés où il doit tendre, et c’est droit au Marboré d’abord qu’il va se diriger.
Et le poète, prenant la parole, décrit avec feu, avec rapidité, les différentes manières de le chercher ; mais, trop jeune sans doute et trop pur pour être censeur impitoyable, il s’arrête, il considère le bien à côté du mal, tant de charité, de dévouement, de patriotisme, de vertus militaires et de sacrifices, de poésie encore, tout ce trésor moral subsistant dans de belles âmes.
La naissance, le progrès, les divers temps de ce mal de jalousie chez Roger, ses soupçons tantôt irrités, tantôt assoupis, et que le moindre mot réveille, son horreur du partage, l’exaspération où il s’emporte à cette seule idée, tous ces degrés d’inquiétude et de torture jusqu’à la fatale et horrible scène où il a voulu n’en croire que ses yeux et être le témoin de sa honte, sont décrits avec un grand talent, avec un talent qui ne se refuse aucune rudesse métallique d’expression, qui ne craint pas d’étreindre, de violenter les pensées et les choses, mais qui (n’en déplaise à ceux qui n’admettent qu’une manière d’écrire, une fois trouvée) a certainement sa forme à lui et son style.
) Nous souffrons tous les maux, couchés sur la paille, buvant de l’eau, très souvent réduits à 12 ou 14 onces de pain rempli de pierres et noir comme du temps de Robespierre.
Il éprouva tout d’abord pour ce guerrier, alors très-impopulaire, un sentiment qu’il ne prodiguait pas, lerespect ; et, dans la suite, engagé au plus fort des luttes, on l’a entendu dire : « Il y a deux hommes dont je ne dirai jamais de mal, le maréchal Bugeaud et M.
Avant son intervention cependant et son installation au cœur du sujet, pour persuader aux hommes instruits qui sont entrés dans la pensée de cette édition nouvelle, qu’elle était importante, qu’elle était indispensable, qu’il ne s’agissait pas seulement de quelques points à rectifier çà et là, mais qu’il y avait lieu, en effet, à une réparation et presque à une restitution continue, il a fallu bien des instances, bien des pas et bien des paroles (je le sais, moi qui en ai été quelquefois le porteur et le messager), il a fallu montrer à l’avance bien des passages et des exemples comme preuve décisive de l’étendue du ravage et du mal profond qu’on avait à réparer.
Il ne peut faire adopter ses plans, et dégoûté, irrité, exhalant le sarcasme et l’amertume contre ceux qui l’ont si mal secondé et qui l’ont compromis, il dépose le commandement pour aller reprendre sa guerre heureuse et favorite en Cerdagne.
Le Tellier ni Louvois ne l’aimaient ; il ressentit bientôt les effets de cette défaveur, et fut envoyé de Montauban, une des meilleures intendances du royaume, dans la moindre de toutes, en Béarn, contrée inégale, difficile et mal soumise, qui avait échappé jusque-là au niveau de Louis XIV.
Au contraire, l’esclavage est le plus grand mal qui puisse atteindre les hommes.
C’est ce Roi marqué par Salomon qui dissipe tout le mal par ses regards.
Un certain goût modéré de bien-être matériel ne les révolte nullement ni ne les scandalise ; ils ne trouvent pas que le moral en souffre nécessairement, et ils se montrent disposés à prendre leur part des bienfaits acquis à tous ; ils admettent volontiers que la santé vaut mieux que la maladie ; et en se résignant aux maux inévitables, en s’y soumettant même avec constance ou douceur, il ne leur arrive plus guère, comme aux dures époques et aux âgés de fer, d’appeler à haute voix les calamités, de les demander au Ciel comme un moyen d’expiation, et de les saluer presque comme une bénédiction et comme une grâce.
Mais il a beau en être l’auteur, il a beau être le souffleur tout trouvé en chaque rencontre pour ces sortes d’à-propos monarchiques, il est mal récompensé.
C’est la mal mariée, se lamentant de son vilain jaloux et brutal.
Autrement dit, la Renaissance a-t-elle été un bien ou un mal ?
En voici deux couplets : Fa la ut a mi modo nel cantar Re mi si on non aver lingua a quel la Che sol fa profession di farme star, Mi re resto in questo La berinto, ch’ogni mal discerno Che la mi sol fa star in questo inferno.
Il faut attendre le temps du voyage de Barèges, et le faire si le petit duc le fait… J’ai grande envie d’aller à Maintenon, mais les maux de ces enfants me retiennent. » Les irrésolutions concernaient l’alternative de se retirer de la cour ou d’y continuer sa résidence.
Quand se sont produits successivement des ensembles de sensations concordantes, puis d’autres de mêmes sensations discordantes et mal concentrées, quelque chose se dégage dans la conscience qui est le contraste de l’accord avec le désaccord, et qu’on peut appeler un sentiment concret, immédiat, d’harmonie vitale, sensitive et appétitive.
Il ne parla point des prédicateurs du Nord, & peignit mal les nôtres.
Lélut croit qu’il a été mal pesé.
Ce que le peintre fait de mieux dans les autres parties du visage, peut bien engager d’excuser ce qu’il a fait de mal en dessinant la bouche, mais il ne supplée pas le trait manqué.
Et, bon an mal an, il naît, de nos jours encore, un ou deux nouveaux petits Robinsons4.
Les vêtements, il faut l’avouer, s’allient mal avec l’art statuaire ; de plus, cet art est monumental et public : on élève des statues aux héros, aux grands hommes ; mais si vous ne pouvez vous identifier avec la pensée de l’apothéose, il faut que vous renonciez au nu.
Admettons que, pour la comprendre, une certaine capacité cérébrale minima soit indispensable : on imagine mal qu’une société faite d’hommes à qui leur cerveau ne permet pas de distinguer le tien du mien ou de compter jusqu’à dix s’élève à l’égalitarisme.
C’est quelque chose de plus tragique, la peinture des maux affreux de la guerre, et l’affliction sans terme et sans espoir.
Toutefois, cela n’est pas suffisant pour la définir, Un fort mal de dents, une colique néphrétique, une jouissance intense produisent une unité momentanée de la conscience que nous ne confondons pas avec l’attention. […] Il est très vraisemblable que, dans la surprise, c’est parce qu’on sent trop qu’on connaît mal. […] Un animal organisé de telle sorte que les impressions du monde extérieur soient toutes équivalentes pour lui et restent sur le même plan dans sa conscience, sans qu’aucune prédomine et entraîne une adaptation motrice appropriée, serait bien mal armé pour sa conservation. […] Une série d’expériences faites sur la même personne ont donné comme moyenne à l’état normal 133 σ, dans le cas de mal de tête 171 σ, dans l’état de fatigue et de somnolence 183 σ.
Paul Souday, qui me persécute depuis longtemps, bien qu’il ne me veuille aucun mal, pas même s’il faut l’en croire, à ma robe ? […] Et presque sans rougir, dans la préface, heureusement rarissime, qu’il a écrite pour la seconde traduction anglaise de la soirée avec Monsieur Teste : j’étais affecté du mal aigu de la précision, je tendais à l’extrême du désir insensé de comprendre. « mal » et folie : il le sait donc bien, mais il se complaît dans ce crime fou. […] Loin d’être le rêveur, ou l’illuminé, ou le niais que vous pensez que nous exaltons, il est « intelligent » et il l’est même deux fois : d’abord, à la manière de tout le monde, formant, assemblant et dissociant des concepts comme vous et moi, bien ou mal, selon qu’il est plus ou moins doué de ce côté-là ; il l’est encore d’une autre façon, et plus haute, son expérience proprement poétique lui permettant de dépasser l’ordre abstrait des notions, des raisonnements, et d’atteindre le concret, le réel même, comme on peut l’atteindre ici-bas.
L’âme ne vaut, ne se prouve qu’en tant qu’ouvrière, créatrice, mécanicienne, et par conséquent que par le corps et grâce au corps, lequel « possède trop de fonctions et de ressources pour ne pas répondre à quelque exigence transcendante assez puissante pour le construire, pas assez puissante pour se passer de sa complication. » Le corps se définit donc comme le pouvoir de l’âme, et Valéry remarque que l’Eglise nous incline à le croire, puisque, voyant en la résurrection de la chair l’état normal et définitif de notre être, elle considère la séparation de l’âme et du corps comme un état provisoire et mal défini. […] Mais la prose de Valéry, et plus encore ses poèmes, et surtout la Jeune Parque, donnent le sentiment d’organes intérieurs comme le cerveau, dont le raccord avec notre vision ordinaire n’est pas fait, dont le mouvement est exprimé tant bien que mal par les moyens purement poétiques, et qui obligent au moins le lecteur à définir le poète, contrairement à Gautier : Un homme pour qui le monde intérieur existe. […] Mais la progression de cette vie intérieure, la « procession » de cette poésie pure, elles ne sont pas succession de hasard, elles durent, elles s’organisent en durant, cette organisation projette comme son ombre une logique qu’il est permis au critique et à sa technique propre de mettre en discours, de sorte qu’on puisse tant bien que mal remonter de ce discours à la vie intérieure et à la poésie pures, comme on a pu descendre de celles-ci au discours. […] Et l’on peut concevoir la critique comme une sorte de philologie comparée, qui établit les racines et les mouvements communs de deux langues ou de deux techniques, dont chacune comporte son développement autonome et a des chances d’être mal parlée par qui en mélangerait l’emploi.
Au surplus c’est rendre une espece d’hommage aux grands hommes que de critiquer leurs écrits : si la critique est mal fondée, elle ne leur sait aucun tort aux yeux du public qui en juge ; elle ne sert même qu’à mettre le vrai dans un plus grand jour : si elle est solide, elle empêche la contagion de l’exemple, qui est d’autant plus dangereux, que les auteurs qui le donnent ont plus de mérite & de poids ; mais dans l’un & dans l’autre cas, c’est un aveu de l’estime que l’on a bour eux ; il n’y a que les écrivains médiocres qui puissent errer sans conséquence. […] Mais si enfin l’on est forcé de reconnoître dans quelques phrases l’existence de l’hypallage, il faut la prendre pour ce qu’elle est, & avouer que l’auteur s’est mal expliqué.] […] Au reste il n’y a pas lieu de craindre que cette façon d’expliquer apprenne à mal parler françois.
J’ai un remède contre le premier mal, la censure, et je vais bientôt vous le dire. […] Monsieur, Dès qu’on parle de tragédie nationale en prose à ces hommes, pleins d’idées positives et d’un respect sans bornes pour les bonnes recettes, qui sont à la tête de l’administration des théâtres, l’on ne voit point chez eux, comme chez les auteurs qui écrivent en vers, une haine mal déguisée et se cachant avec peine sous la bénignité du sourire académique. […] Je serais en droit, si j’avais l’urbanité de M. de Jouy, de répondre à l’Académie par quelque parole mal sonnante ; mais je me respecte trop pour combattre l’Académie avec ses propres armes.
. — De même, vous recevez une bonne ou une mauvaise nouvelle, et, au bout d’une heure, vous cessez d’y penser ; et néanmoins, au bout de cette heure et souvent pendant toute la journée, vous éprouvez encore un bien-être ou une inquiétude mal définis, que vous ne savez d’abord comment expliquer, et que vous ne comprenez qu’après réflexion, lorsque vous revient le souvenir de la nouvelle. — Parmi les images ou idées latentes, il faut aussi compter toutes celles des actions que l’on exécute, l’esprit occupé par une autre image ou idée prépondérante. […] Tel est à peu près l’encéphale pour notre œil nu : une boule mollasse, pesant de deux à trois livres, recouverte d’une sorte d’écorce anfractueuse, grisâtre à la surface, blanchâtre au-dessous, à l’intérieur des couches et noyaux mal circonscrits, çà et là quelques fentes et cavités dans un mélange de portions blanches et de partions grises. […] Dans une expérience faite à Strasbourg151, Kuss, ayant amputé la tête d’un lapin avec des ciseaux mal affilés qui hachèrent les parties molles de façon à prévenir l’hémorragie, vit l’animal, réduit à sa moelle épinière, « s’élancer de la table et parcourir toute la salle avec un mouvement de locomotion parfaitement régulier ».
J’éprouve une démangeaison en un point du dos, et j’en sais l’endroit ; mais je ne le sais point ou je le sais mal, par la représentation visuelle ; je ne me figure pas clairement la vertèbre ou la côte, le renflement de muscle ou le creux d’échine, dont ce picotement est voisin ; il n’est pas associé, comme dans le pied, la main, le bras, le visage, à tel point précis d’une forme figurée à l’œil intérieur. […] Évidemment, aujourd’hui, en fait de sensations musculaires et tactiles, nous n’avons qu’un discernement grossier ; faute d’y avoir été contraints, nous démêlons mal leurs nuances. […] Si l’ébranlement nerveux qui provoque la douleur change effectivement de place, la douleur semble changer de place ; les différences d’emplacement que le jugement ordinaire suppose à tort entre deux sensations sont précisément les différences d’emplacement que l’expérience physiologique établit avec raison entre les points de départ des deux ébranlements nerveux correspondants. — Ainsi notre esprit touche juste en visant mal, et ce que nous disons par erreur de nos sensations s’applique avec une exactitude presque absolue et presque constante à l’ébranlement nerveux qui leur est lié.
Elle enfanta les premières erreurs qui affligèrent l’Eglise, & tout concourut au progrès du mal. […] Les partisans de la mode & de la nouveauté ont beau dire, que nous nous sommes enrichis d’un genre ignoré de Molière, & qu’il ne faut pas borner nos plaisirs, dont le cercle est déja trop étroit : d’accord ; mais qu’il naisse donc des la Chaussées, & que ses tristes & impitoyables imitateurs cessent de multiplier nos ennuis (dont le cercle est beaucoup trop grand) par leurs Drames éternels, échafaudés sur des fables triviales, mal conçues, sans génie, sans goût, sans vraisemblance, sans chaleur & sans style. Quels sont, en effet, la plupart de ces Drames, tant vantés par la médiocrité, & presque tous calqués les uns sur les autres, sinon des Romans aussi froidement écrits que mal dialogués, dont les aventures platement bourgeoises, irreligieuses ou révoltantes, n’excitent en nous d’autre sentiment que le dégoût, en laissant l’ame douloureusement triste, dans l’impuissance de se rendre raison de sa tristesse, & de s’y plaire ?
L’air natal vous vaudra encore mieux, il sera peut-être un baume pour votre mal. […] Je m’explique sans doute mal, mais vous savez ce que je veux dire… Il est sûr qu’outre ce cours du Salon des Arts, vous pourriez avoir, comme autrefois, des cours particuliers, ou travailler à quelque ouvrage.
Mon âge, mes cheveux blancs, mon embonpoint, qui font de moi un homme sans conséquence, devraient écarter tous les soupçons ; mais je connais le monde : il voit le mal souvent où il n’est pas, et il trouve des traces dans des endroits même où le pied n’a pas porté. […] « Ô doux et précieux gage que la mort m’enleva et que le ciel me garde… Toi qui vois ce qui se passe en moi et qui souffres de mon mal, toi qui peux seule changer en béatitude tant de douleur, que ton ombre au moins visite mes courts sommeils et que ta vision calme mes gémissements !
Quand je vous aurai dit des yeux bleu de mer azurés jusqu’à la nuit par l’ombre des voiles ; des cheveux de fils de la Vierge brunis au feu du soleil ; des joues de pêche veloutée dont le velours renaissait tous les matins comme pour tamiser le jour sur une peau d’enfant ; des couleurs nuancées et fondues où le blanc et le rose ne formaient qu’une teinte ; un regard qui s’ouvrait et se refermait sous des cils ruisselants d’ombre ou de lumière ; des lèvres où la langueur pensive ou la joie épanouie donnait toutes les inflexions de l’âme ; un sourire qui caressait l’air ; une taille ni grande ni petite, mais qui, par sa flexibilité, se prêtait à la majesté autant qu’à la grâce ; une démarche de reine ou de bergère tour à tour ; un étonnement de l’impression qu’elle faisait partout, comme si les regards de la foule eussent été autant de miroirs qui lui répercutaient sa figure et qui la faisaient rougir de sa miraculeuse beauté ; les pas qu’elle entraînait sur sa trace ; les murmures d’admiration qui s’élevaient à sa vue ; les exclamations mal contenues ; les femmes charmées, mais jalouses ; les hommes attirés, mais contenus par le respect de tant d’innocence sous tant d’enivrements ; quand je vous aurai dit tout cela, je ne vous aurai rien peint de visible à votre imagination. […] Cette tête attirait et pétrifiait les yeux ; des cheveux soyeux et inspirés sous leur neige, un front plein et rebombé de sa plénitude, des yeux noirs comme deux charbons mal éteints par l’âge, un nez fin et presque féminin par la délicatesse du profil ; une bouche tantôt pincée par une contraction solennelle, tantôt déridée par un sourire de cour plus que de cœur ; des joues ridées comme les joues du Dante par des années qui avaient roulé dans ces ornières autant de passions ambitieuses que de jours ; un faux air de modestie qui ressemblait à la pudeur ou plutôt au fard de la gloire, tel était l’homme principal au fond du salon, entre la cheminée et le tableau ; il recevait et il rendait les saluts de tous les arrivants avec une politesse embarrassée qui sollicitait visiblement l’indulgence.
… Je vivais heureuse de mon sort, aimée, jeune, riche, honnête et belle ; je suis maintenant avilie, misérable, malheureuse… Mon père allait assister à quelque tournoi dans la ville de Bayonne ; parmi les chevaliers qui venaient pour y figurer, soit qu’Amour me le fît ainsi apparaître, soit que sa valeur éclatât d’elle-même en lui, le seul Zerbin me sembla digne de louange ; c’était le fils du grand roi d’Écosse, « Pour lequel, après qu’il eut donné dans la lice des preuves merveilleuses de sa chevalerie, je me sentis prise d’amour, et je ne m’aperçus que trop tard que je n’étais plus à moi-même ; et, malgré tout ce que je souffre pour lui, je ne puis m’arracher de l’esprit que je n’avais pas mal placé mon cœur, mais que je l’avais donné au plus digne et au plus beau des paladins qui soit sur la terre. » Elle raconte comment ils s’aimèrent. […] Le portique, assez vaste pour contenir une foule de clients ; l’escalier de marbre blanc à rampes moulées ; la salle des gardes, presque aussi longue et aussi large que le palais lui-même ; la tribune haute qui régnait sous les corniches ; les fresques poudreuses qui décoraient le sombre plafond ; les statues de nobles Vénitiens sous leur armure, qui contemplaient les passants du fond de leurs niches autour de la salle ; le parvis négligé et humide de cette salle ; les volées de colombes qui s’y abattaient librement par les fenêtres ouvertes ; le vent de mer qui faisait tinter ces vitres, mal attachées aux châssis de plomb ; enfin le léger et mélancolique clapotement des petites vagues du canal contre les marches extérieures de l’escalier : tout cela donnait au palais de Léna une apparence et comme une odeur de sépulcre, qui imposait à tous les sens une certaine langueur molle, le caractère de la ville et des habitants.
Un vieux cartel de cuivre, incrusté d’arabesques en écaille, ornait le manteau de la cheminée en pierre blanche, mal sculpté, sur lequel était une glace verdâtre, dont les côtés, coupés en biseau pour en montrer l’épaisseur, reflétaient un filet de lumière le long d’un trumeau gothique en acier damasquiné. […] « La consultation finie, il déclara positivement à Grandet que sa femme était bien mal, mais qu’un grand calme d’esprit, un régime doux et des soins minutieux pourraient reculer l’époque de sa mort vers la fin de l’automne.
Elle cherchait à se guérir de deux maladies, restes d’une petite vérole mal soignée, ou qui n’avait pas rendu suffisamment. […] « Après le départ des cardinaux, il songea, pendant les premières heures de la nuit, à préparer les choses indispensables pour la fonction du jour suivant, et spécialement les vêtements pontificaux, que l’on a l’habitude de tenir prêts, et qui allaient mal à sa stature plutôt petite que grande.
Elle tâtonne et trébuche toujours ; elle est retenue sur la route de l’avenir par les liens mal rompus qui l’attachent au passé. […] Le peuple en tout temps, je parle du peuple mal dégrossi, tel qu’il l’est encore par la faute d’une élite trop longtemps insouciante ou malveillante à son égard, aime ce qui émeut fortement ; il a le goût du grandiose, du passionné et en même temps du simple ; il comprend peu ce qui est savant et raffiné.
On avait mal compté les cadavres en les jetant aux chiens. […] Ce bouclier était mal choisi dans le cœur de madame de Maintenon, qui n’avait couvert ni Fénelon, ni madame Guyon, ni aucun de ses amis, du moment que son crédit pouvait être compromis par ses amitiés.
Il avait aussi le malheur d’être mal écrit ; ce qui ne veut pas dire qu’il n’y eût souvent infiniment d’esprit dans les détails, et même de temps en temps d’admirables morceaux ; mais, comme l’auteur le reconnaît lui-même avec candeur dans la préface de l’édition de 1781, s’il y a partout une grande clarté logique, il y a très peu de cette autre clarté qu’il appelle esthétique, et qui naît de l’art de faire passer le lecteur du connu à l’inconnu, du facile au difficile, art si rare, surtout en Allemagne, et qui a entièrement manqué au philosophe de Koenigsberg. […] Ce n’est pas tout : indépendamment de cette langue, rude encore et mal exercée à la décomposition de la pensée, Kant a une autre langue qui lui est propre, une terminologie qui, une fois bien comprise, est d’une netteté parfaite et même d’un usage commode, mais qui, brusquement présentée et sans les préliminaires nécessaires, offusque tout, donne à tout une apparence obscure et bizarre.
Le reste, pauvre, terne, gris, effacé, l’ouvrage d’un écolier qui a mal fini ce que le maître avait bien commencé. […] Deux traits informes élancés en avant, et voilà deux bras ; deux autres traits informes, et voilà deux jambes ; deux endroits pochés au dedans d’un ovale, et voilà deux yeux ; une ovale mal terminée, et voilà une tête, et voilà une figure qui s’agite, qui court, qui regarde, qui crie.
Chasseriau trouve son bien dans Delacroix, c’est tout simple ; mais que, malgré tout son talent et l’expérience précoce qu’il a acquise, il le laisse si bien voir, là est le mal. […] Arondel Un grand entassement de gibier de toute espèce. — Ce tableau, mal composé, et dont la composition a l’air bousculé, comme si elle visait à la quantité, a néanmoins une qualité très-rare par le temps qui court — il est peint avec une grande naïveté — sans aucune prétention d’école ni aucun pédantisme d’atelier. — D’où il suit qu’il y a des parties fort bien peintes. — Certaines autres sont malheureusement d’une couleur brune et rousse, qui donne au tableau je ne sais quel aspect obscur — mais tous les tons clairs ou riches sont bien réussis. — Ce qui nous a donc frappé dans ce tableau est la maladresse mêlée à l’habileté — des inexpériences comme d’un homme qui n’aurait pas peint depuis longtemps, et de l’aplomb comme d’un homme qui aurait beaucoup peint.
combien mal lui ressemblaient ceux qui étaient allés aux autres ports pour esquiver le péril !
On voit par une réponse énergique de lui au maréchal de Bouillon (juin 1615) que, malgré son âge, il ne faiblissait pas devant les grands redevenus factieux, et qu’il leur disait assez haut leurs vérités : « La médisance contre ceux qui sont employés au maniement des affaires publiques, écrivait-il à M. de Bouillon, est un doux et agréable poison qui se coule aisément en nos esprits, et, quand ils en sont une fois infectés, il est malaisé que la vérité pour les défendre y soit reçue. » Il y donne la clef de sa conduite, qui dut consister souvent, en ces temps de trouble et de faiblesse, à tolérer, à souffrir un moindre mal pour en empêcher un pire : Le commandement n’est pas toujours absolu pendant les minorités.
M. de Lamartine aura lu par distraction Horace au lieu d’Homère, et il en a pris occasion de traiter Horace, l’ami du bon sens, presque aussi mal qu’il a traité autrefois La Fontaine41.
On dira de sa traduction tout le mal qu’on voudra, on ne lui enlèvera pas le mérite d’avoir le premier chez nous apprécié avec élévation la nature et la qualité du génie de Dante.
Ajoutons aussi que Chateaubriand, malgré une éducation classique très incomplète, avait su dans les solitaires études de sa jeunesse revenir directement et mordre tant bien que mal au texte d’Homère ; il en avait ressaisi, pour les reproduire, l’esprit, la grandeur, ou même le charme, autant qu’on le peut sans la simplicité.
., espèce de poète-orateur-philosoplie philologue ambulant, de professeur errant, partout dès l’abord s’annonçant avec éclat, mais se relâchant vite, et soutenant mal son premier feu.
Élevé par une mère indulgente et tendre, il apprenait tant bien que mal le latin au logis sous un précepteur ; il aimait surtout à lire d’anciens romans français et les autres livres qui se rencontraient alors dans une bibliothèque de campagne assez bien garnie.
Mes volets mal fermés m’ont laissé entrevoir, dès mon lever, cette grande nappe blanche qui s’est étendue en silence sur la campagne.
Mais le prix que l’auteur y met au bien et au mal, au bien surtout, paraît moins partir du cœur que de la tête, comme aussi l’effet que ses satires font va plus à la tête qu’au cœur.
Il n’était pas orateur ; son débit, d’une extrême lenteur et sans grâce, impatientait l’auditoire et donnait même le change aux moins mal disposés, sur la portée de ses paroles.
— « Non, dit le comte après y avoir pensé un moment, je ne trahirai jamais les gens avec qui j’ai dîné. » M. de Pontmartin n’a pas même cette excuse d’être ruiné, puisqu’il a, bon an mal an, il nous le répète assez, de douze à quinze mille livres de revenu et une superbe allée de marronniers.
Elle fait gratuitement du mal à elle et à un autre.
Elle naquit telle quelle, comme tant de choses naissent ou renaissent, rognée, écourtée, incomplète, une vraie côte mal taillée ; n’importe !
Mais le jour viendra, troupe mal née et criminelle, que moi, retourné pourtant aux côtés de ma dame, je te ferai sentir si je suis poète !
Surtout visez continuellement à renverser de fond en comble cette machine mal assurée des livres de chevalerie, réprouvés de tant de gens et vantés d’un bien plus grand nombre.
Ce qu’on savait moins, c’est que de prétendues beautés qui tenaient à des leçons mal lues disparaissent et s’évanouissent (ainsi le passage où il est question d’Horace, vainqueur des Curiaces et meurtrier de sa sœur, mais absous en vue de sa gloire : Et facinus intra gloriam fuit, devient tout simple et ordinaire, si on lit infra).
Lui, il portait déjà en germe le mal acquis par tant de souffrances accumulées et dont il devait mourir.
Qu’on en juge par ces quatre vers d’un sonnet ; je prends l’échantillon presque au hasard : Quand nous nous adorions, oubliant maux et tombes ; Au temps où nous disions : Comme nos jours sont beaux !
Il avait été reçu par M. de La Chapelle, directeur, qui ne parla pas mal non plus et qui dit même des choses assez neuves et très à propos à cette date de 1699, fin d’un siècle, sur les heures de perfection et de décadence littéraire pour les nations : il développa une pensée de l’historien Velleius Paterculus, et parla de cette sorte de fatalité qui fixe dans tous les arts, chez tous les peuples du monde, un point d’excellence qui ne s’avance ni ne s’étend jamais : « Ce même ordre immuable, disait-il, détermine un nombre certain d’hommes illustres, qui naissent, fleurissent, se trouvent ensemble dans un court espace de temps, où ils sont séparés du reste des hommes communs que les autres temps produisent, et comme enfermés dans un cercle, hors duquel il n’y a rien qui ne tienne ou de l’imperfection de ce qui commence ou de la corruption de ce qui vieillit. » C’était bien pensé et bien dit.
70 La triste bataille de Crefeld (23 juin), où les troupes firent si bien leur devoir, mais où elles furent si mal commandées, est exposée de point en point ; et, quoique le hasard de la guerre soit aveugle, on a quelque peine à ne pas mettre sur le compte du général en chef et de ses conseillers ou, comme on disait ironiquement, de M. l’abbé et de ses novices, cette mort du comte de Gisors qui n’était plus alors colonel de Champagne, mais qui venait d’être promu au commandement des carabiniers.
Le chapitre de son ouvrage, que Jomini avait eu l’esprit d’indiquer à lire à Napoléon au lendemain d’Austerlitz (le ive du tome II de la première édition, qui est devenu le xive de l’édition de 1851), ce chapitre n’était pas si mal choisi ni fait pour déplaire au nouvel Empereur.
Je leur dis alors que mon discours leur ayant fait quelque plaisir, il auroit fait plaisir à toute la terre, si elle avoit pu m’entendre ; qu’il me sembloit qu’il ne seroit pas mal à propos que l’Académie ouvrît ses portes aux jours de réception, et qu’elle se fit voir dans ces sortes de cérémonies, lorsqu’elle est parée… Ce que je dis parut raisonnable, et d’ailleurs la plupart s’maginèrent que cette pensée m’avoit été inspirée par M.
quel plus beau mouvement, quel plus désolé délire que dans l’étincelante élégie : J’ai cherché dans l’absence un remède à mes maux !
La chevalerie était nécessaire pour adoucir la férocité militaire par le culte des femmes et l’esprit religieux ; mais la chevalerie, comme un ordre, comme une secte, comme tout ce qui sépare les hommes au lieu de les réunir, dut être considérée comme un mal funeste, dès qu’elle cessa d’être un remède indispensable.
Dans les pays où les prêtres dominent, tous les maux et tous les préjugés se sont trouvés quelquefois réunis ; mais la diversité des gouvernements, en Italie, allégeait le joug des prêtres, en donnant lieu à des rivalités d’états ou de princes, qui assuraient l’indépendance très bornée dont les sciences et les arts ont besoin.
Récemment encore156 « les phénomènes de chaleur, d’électricité, de lumière, assez mal définis en eux-mêmes, étaient produits par autant d’agents propres, de fluides doués d’actions spéciales.
Il parut alors changer de principes en changeant de rôle : il émigra, non pas pour combattre son pays, mais pour se réfugier dans les larmes de ceux qui, en voulant faire beaucoup de bien, ont ouvert la porte à beaucoup de mal.
Voici quelques passages qui nous l’expliqueront tant bien que mal : Il y avait alors (au temps de Louis-Philippe) une délicatesse et une générosité qui donnaient le ton à la littérature et le recevaient d’elle.
Une situation singulière, une façon originale d’assister au siège de Paris, c’est assurément celle du peintre Robert Helmont, resté tout seul avec sa jambe mal guérie dans une bicoque de la forêt de Sénart.
Purifiez vos pensées ; cessez de mal faire, apprenez le bien, cherchez la justice, et venez alors 259. » Dans les derniers temps, quelques docteurs, Siméon le Juste 260, Jésus, fils de Sirach 261, Hillel 262, touchèrent presque le but, et déclarèrent que l’abrégé de la Loi était la justice.
Remonter du dernier gouffre des Enfers jusqu’au sublime sanctuaire des Cieux, embrasser la double hiérarchie des vices et des vertus, l’extrême misère et la suprême félicité, le temps et l’éternité ; peindre à la fois l’ange et l’homme, l’auteur de tout mal, et le Saint des saints ?
Au sortir, pourtant, de ce brillant et orageux épisode de l’histoire du xvie siècle, qui vient de nous être si fortement et si judicieusement rendu, tout plein encore de ces temps de violence, de trahison et d’iniquité, et sans avoir l’innocence de croire que l’humanité en ait fini à jamais avec de tels actes, on se prend à se féliciter malgré tout, à se réjouir de vivre en des âges d’une morale publique améliorée et plus adoucie ; on s’écrie avec le sieur de Tavannes, au moment où dans ses Mémoires il vient de raconter cette vie et cette mort de Marie Stuart : « Heureux qui vit sous un État certain, où le bien et le mal sont salariés et châtiés selon les mérites !
— « Enfants, dit-il, voilà une heure mal choisie pour aller à travers champs comme vous faites ; cependant vous êtes plus heureux que sages, et vous arriverez dans un instant à Fontenay. » Disant ces mots, il renfermait dans le pétrin sa miche commencée, et du pas de la porte il indiquait leur chemin aux voyageurs.
L’Avare nous montre avec son mal une hypertrophie du pouvoir de préférer aux jouissances positives des jouissances irréelles, apprêtées par l’esprit, et Le Malade imaginaire nous fait voir la physiologie même asservie à ce pouvoir d’imaginer.
* * * Cependant, sur le tard, la quarantaine passée, comme si tout ce que d’épars ils avaient produit n’eût été que pour se faire prendre patience à eux-mêmes, tant ils sentaient le mal de leurs poésies sans lien en même temps qu’ils n’acceptaient de sortir du malaise Baudelairien par aussi quelque facile acceptation du néant : esprits très rares, MM.
Le peintre Cyprien n’est à l’aise que devant certains spectacles douloureux et minables ; il préfère « la tristesse des giroflées séchant dans un pot, au rire ensoleillé des roses ouvertes en pleine terre » ; à la Vénus de Médicis, « le trottin, le petit trognon pâle, au nez un peu canaille, dont les reins branlent sur des hanches qui bougent » ; formule son idéal de paysage en ces termes : « Il avouait d’exultantes allégresses, alors qu’assis sur le talus des remparts, il plongeait au loin… Dans cette campagne, dont l’épiderme meurtri se bossèle comme de hideuses croûtes, dans ces roules écorchées où des traînées de plâtre semblent la farine détachée d’une peau malade, il voyait une plaintive accordance avec les douleurs du malheureux, rentrant de sa fabrique éreinté, suant, moulu, trébuchant sur les gravats, glissant dans les ornières, traînant les pieds, étranglé par des quintes de toux, courbé sous le cinglement de la pluie, sous le fouet du vent, tirant résigné sur son brûle-gueule. » Et sur ce dolent idéal, des Esseintes renchérit encore : « Il ne s’intéressait réellement qu’aux œuvres mal portantes, minées et irritées par la fièvre » « … se disant que parmi tous ces volumes qu’il venait de ranger, les œuvres de Barbey d’Aurevilly étaient encore les seules dont les idées et le style présentassent ces faisandages, ces taches morbides, ces épidermes talés, et cegoût blet, qu’il aimait tant à savourer parmi les écrivains décadents ».
Dans Zaïre, c’est Orosmane et Zaïre qui sont les agents de leurs maux.
Le bien ou le mal que l’histoire en raconte lui donnoit envie depuis long-tems de connoître leur physionomie.
Déjà, alors qu’il s’agit simplement de nos démarches privées, nous savons bien mal les mobiles relativement simples qui nous guident ; nous nous croyons désintéressés alors que nous agissons en égoïstes, nous croyons obéir à la haine alors que nous cédons à l’amour, à la raison alors que nous sommes les esclaves de préjugés irraisonnés, etc.
Très élégante, très spirituelle, mais très extravagante, ayant déjà les taches de la corruption parisienne sur l’esprit au moins, si elle ne les a pas sur le cœur, possédant au plus haut degré le génie de l’ironie et de la plaisanterie parisiennes, aveugle sur son père qu’elle admire d’enfance et de confiance, parce qu’il a toujours été heureux dans ses plans et qu’il est fou d’elle, madame de Manteigney est la femme amoureuse de son mari, maigre, mièvre, mal fait, chétif, jaunâtre, roussâtre, un crevé du temps, qui lui mange sa dot et ses diamants avec des filles.
Il y a donc du mal comme du bien dans le dix-septième siècle.
On ne peut comprendre, dit-il, pourquoi les éditeurs ont si mal copié et tant défiguré les lettres de la Rochefoucauld, bien faciles à lire pourtant avec leur longue et grande écriture à la Louis XIV.
Cette belle poésie grecque, si négligée alors, hormis par quelques éditeurs allemands, si mal jugée et si défigurée dans les préfaces ou les imitations tragiques de Voltaire, il la connut à fond, en antiquaire, en artiste, en poëte.
Balfour sur d’autres termes mal employés ; après quoi il lui reproche de ne rien entendre aux sciences naturelles. […] On nous a fort mal renseignés sur ce qu’est devenu le comte Tolstoï pendant les années qui suivirent. […] Les lois sont la grande cause du mal dans l’humanité. […] Mais peut-être sommes-nous indéfiniment condamnés à mal comprendre l’ensemble d’une doctrine qui contient tant d’éléments divers, et que l’auteur s’obstine à nous présenter toujours par morceaux détachés. […] Que l’on serre le texte de très près, ou qu’on le transcrive de très loin, on peut être assuré de mal traduire, et que la traduction, en tout cas, sera toute différente de l’original.
J’aurais aimé à trouver dans son Introduction d’Hippocrate quelque page vivante, animée, se détachant aisément, flottante et immortelle, une page décidément de grand écrivain et à la Buffon, comme il était certes capable de l’écrire, où fut restauré, sans un trait faux, mais éclairé de toutes les lumières probables, ce personnage d’Hippocrate, du vieillard divin, dans sa ligne idéale, tenant en main le sceptre de son art, ce sceptre enroulé du mystérieux serpent d’Épidaure ; un Hippocrate environné de disciples, au lit du malade, le front grave, au tact divinateur, au pronostic sûr et presque infaillible ; juge unique de l’ensemble des phénomènes, en saisissant le lien, embrassant d’un coup d’œil la marche du mal, l’équilibre instable de la vie, prédisant les crises ; maître dans tous les dehors de l’observation médicale, qu’il possédait comme pas un ne l’a fait depuis. […] Comment le bas latin, le latin des paysans et du peuple, de plus en plus mal parlé et estropié, mélangé et trituré avec d’anciens idiomes locaux préexistants ou des jargons d’invasion nouvelle, était-il devenu peu à peu, ici le français, là l’espagnol ou le catalan, là l’italien ?
On entendait, tant bien que mal, le beau latin, celui de la ville, et on en parlait un mauvais, un rustique. […] Il dit quelque part que le premier auteur du mal est M.
Je parle de celles qui proviennent de sensations mal interprétées ; en ce cas, il y a un objet réel, mais il diffère de l’objet apparent. […] L’enfant a cru et bientôt cesse de croire que sa balle saute et se sauve, que sa boule court sur lui et veut lui faire du mal.
Il descendait même d’une race qui avait donné des rois à un des royaumes dont se composait alors la fédération monarchique de l’empire chinois, encore mal aggloméré en seul gouvernement. […] ; D’autres, enfin, de surveiller le souverain lui-même, de lui présenter des remontrances contre ses infractions aux rites ou aux lois, et d’inscrire jusqu’à ses fautes privées ou jusqu’à ses paroles mal séantes sur les registres historiques inviolables de l’empire.
Le pape Léon X publia une bulle en faveur de ce poème et déclara excommuniés ceux qui en diraient du mal. […] Il n’avait aucune pruderie ; le fin rire et la douce piété s’accordaient parfaitement sur ses lèvres ; il n’entendait mal à rien ; son bréviaire sous le bras en sortant de la chapelle, rien ne lui paraissait plus naturel que de prendre un Arioste dans son autre main et de nous en lire quelques stances, qui finissaient souvent par un éclat de rire.
Nous avions beaucoup de mal à retenir nos chiens, qui en rencontraient des troupeaux presque à chaque pas. […] Cette opération ne prit pas mal de temps, et comme je savais par expérience que, si les oiseaux venaient à soupçonner l’existence de ce trou, ils abandonneraient l’arbre sur-le-champ, je le fis soigneusement reboucher.
» — criaient les flagellateurs tandis que leurs fouets déchiraient sa houle, — « voilà le châtiment que notre maître t’inflige, parce que tu lui as nui quand il ne t’avait fait aucun mal. […] Sparte s’affligeait d’ailleurs des maux soufferts par Athènes, et elle promettait de nourrir les familles de ses combattants aussi longtemps que durerait la lutte.
» Et qui se ressemblent tous, pourrait-il dire pour aggraver cette exaltation nationale, mais mal à propos, car si l’Étranger, partout, étudie, traduit, commente les Poètes Français et subit leur action ce sont ceux d’hier. […] Avant de dire quelle sanction humaine ressort de ces principes, nous remarquerons en passant qu’ils peuvent mettre un terme à la vieille et longue querelle occidentale entre le Matérialisme et le Spiritualisme, avatar de l’antique antagonisme du Mal et du Bien, de la Nuit et de la Lumière, double direction de l’esprit humain partie de l’Inde depuis la méditation de Vyasa, et l’emprise générale de Kapila qui tient la pensée évolutionniste moderne En notre pensée les deux termes s’unissent et l’antinomie se résout : car le spiritualisme, c’est-à-dire pour moi, le plus de conscience prise du Tout, sort perpétuellement de la Matière évoluante.
Il nous dit que quand il est triste, mal disposé, vingt vers du poète Pouchkine le retirent de l’affaissement, le remontent, le surexcitent : cela lui donne l’attendrissement admiratif qu’il n’éprouve pour aucune des grandes et généreuses actions. […] Mardi 3 avril C’est bien l’homme le plus mal élevé, et le plus furibondement comique qui soit, que ce Charles Blanc.
Il dit que le Grec avoit produit des effets singuliers dans la tête de cette dame ; qu’il y avoit dans sa personne un assemblage grotesque & plaisant des foiblesses de son sexe & de la férocité des enfants du Nord ; qu’il sied aussi mal aux femmes de se hérisser d’une certaine érudition, que de porter des moustaches ; qu’une femme sçavante a quelque chose de trop hommasse , & conclud que madame Dacier étoit peu propre à faire naître une passion. […] Ce chevalier, blanchi dans la carrière pour laquelle il combat, soutient qu’un roman n’est pas plus dangereux que le bal, la comédie, la promenade & les jeux d’exercice ; que la voie la plus courte & la plus sûre pour instruire la jeunesse & lui donner le goût des choses solides, c’est de commencer par lui présenter les choses agréables ; que le roman a cet avantage de montrer la vertu récompensée & le vice puni, au lieu que l’histoire offre souvent le contraire, les gens vertueux dans le malheur & les scélérats au faîte des grandeurs & des prospérités ; que l’abus d’un bien, d’un plaisir innocent, n’est pas une raison pour le défendre, tout étant relatif au caractère & ne devenant poison que lorsqu’on est mal disposé.
. — Mais que l’amour du pur et du pieux ne rejette point comme un haillon cette autre pureté, le mal à la vie matérielle. […] Cela n’est pas mal.
Cette région n’a encore été que mal explorée, mais d’après les témoignages concordants des voyageurs, l’aire granitique doit être immense. […] Cette induction est de la plus haute importance pour la théorie, en ce qu’elle appuie sur de nouvelles probabilités la supposition que les terrains Siluriens, où l’on trouve déjà représentés les quatre embranchements principaux du règne animal, ne sont pas les plus anciennes couches fossilifères qui aient existé ; car nous avons vu précédemment, que, s’il y a eu dénudation complète des aires granitiques, ce ne peut être que très anciennement, et lors de la première émersion de ces roches, lorsqu’elles n’étaient encore recouvertes que d’une seule formation récente et mal solidifiée, sur laquelle des eaux, peut-être plus chaudes, avaient une plus grande action dissolvante.
Il y a, au fond de cette distinction radicale entre les deux séries temporelle et spatiale, tant d’idées confuses ou mal ébauchées, tant d’hypothèses dénuées de toute valeur spéculative, que nous ne saurions en épuiser tout d’un coup l’analyse. […] Dans la première hypothèse (qui n’a guère pour elle que son apparente simplicité et son analogie avec un atomisme mal compris), chaque souvenir constitue un être indépendant et figé, dont on ne peut dire ni pourquoi il vise à s’en agréger d’autres, ni comment il choisit, pour se les associer en vertu d’une contiguïté ou d’une ressemblance, entre mille souvenirs qui auraient des droits égaux.
Il n’y a plus rien dans le monde pour moi ; je n’ai d’espérance qu’en la mort ; elle seule peut finir mes maux, il n’est pas au pouvoir de tous les hommes de me donner un moment de plaisir ; la plus aimable personne du monde n’est plus ; une personne qui ne vivait que pour moi, que la perte de la vie n’a pu occuper un moment en mourant, et qui n’a senti que la douleur de me quitter ; qui était si parfaite, que mon imagination ne me saurait fournir un endroit par où je me puisse consoler ; je ne la verrai plus.
Ses idées relatives à l’influence qu’exercent la délicatesse et le degré de développement de chaque organe sur la nature des diverses espèces, sont des idées de génie qui doivent faire la base de toute histoire naturelle philosophique, et qui ont rendu tant de services à l’art des méthodes qu’elles doivent faire pardonner à leur auteur le mal qu’il a dit de cet art.
Je vous avais mal cité le titre de l’ouvrage, le voici : Des beautés poétiques et morales de la religion chrétienne, et de sa supériorité sur tous les autres cultes de la terre.
Lorsque, après bien des retards, des difficultés et des périls, la réunion des ordres est opérée tant bien que mal le samedi 27 juin, Bailly en profite pour accorder à lui et à ses collègues quelques jours de congé et de fête ; il part aussitôt, il court pour se reposer quelques instants à sa maison de Chaillot, où il n’était pas allé depuis qu’il était président à l’Assembléel : Je partis sur-le-champ pour Chaillot, et j’emportai cette joie (de la réunion des trois ordres) que je voulus répandre tout le long de mon chemin.
Il faut l’entendre parler, quand il est chez lui et non plus dans la chaire, de ceux à qui, par crainte et faiblesse, le cœur fait mal, étant sur une haute tour et regardant en bas.
Il perdit dès le premier instant la parole, non la connaissance ; il montrait sa tête comme le siège du mal.
Les condottieri d’Italie, au xve siècle ; passaient leur vie à ferrailler les uns contre les autres sur maint petit champ de bataille et ne s’exterminaient pas ; peu de mal et beaucoup de bruit.
« J’ai encore bien des choses curieuses à vous dire sur notre état, mais ce sera pour demain : aujourd’hui, j’ai mal à la tête. » Qu’en dites-vous ?
Moi-même j’avais, j’en conviens, le caractère trop mal fait peut-être et trop rétif pour pouvoir me ranger et me fixer à demeure dans un journal qui avait le ton et les usages d’une famille ; car, une fois admis et agréé, c’était quasi un mariage que l’on contractait.
Ce travail est absurde, mais les pauvres artisans s’en trouveraient mal s’ils voulaient prouver que leurs examinateurs sont des niais. » Je ne crois pas qu’en parlant ainsi Gœthe fût équitable pour tous les savants de nos jours, et le succès de ses vues en physiologie végétale, ou même en anatomie comparée, montre assez que ce n’était pas la seule prévention qui s’opposait à son triomphe dans l’optique.
Il peut y avoir dans un ouvrage de l’habileté, des parties passables et même assez bonnes, qui font dire : Ce n’est pas trop mal, des situations touchantes, des dialogues assez vifs et assez naturels, d’heureuses reparties et d’heureuses rencontres, des hasards ou des commencements de talent plus, ou moins de main d’œuvre et de métier (la plupart de nos mélodrames actuels ont de tout cela), sans qu’il y ait véritablement beauté.
Rien n’est perdu ni compromis, et je me serais bien mal fait comprendre si je n’avais marqué mon estime même pour l’auteur, en le critiquant si longuement.
Sur ces entrefaites, de singulières bizarreries sous couvert de spiritualisme, des superstitions même d’un genre nouveau étaient venues prendre les savants au dépourvu et remettre en honneur, auprès des faibles, certains faits comme il s’en rencontre toujours aux limites du possible, des faits insoumis, mal éclaircis, et où le mystère trouve son compte.
Elle doit le regarder comme son asile, son père, et lui tout dire, bien ou mal, comme cela viendra, et ne lui rien déguiser.
« Cependant, dans cette surabondance de moyens, il me manque ceux de rendre des comptes et de m’en faire rendre ; d’assurer les approvisionnements, de pourvoir aux besoins pressants, de régler les dépenses, de résister aux consommations, de m’occuper efficacement de ce qui est nécessaire et de proscrire ce qui est inutile ou nuisible, c’est-à-dire que ce que je ne fais pas constitue l’administration, et ce que je fais pourrait en être retranché, ainsi que ma place et une grande partie des papiers et des commis. » Quand on en est là dans tous les ordres, les réformes graduées, telles que les concevait Malouet et qu’il les provoquait de ses conseils comme de ses vœux, sont-elles possibles, et n’en est-on pas venu, bon gré, mal gré, à ce point extrême où, à moins d’un génie au sommet, il n’y a d’issue qu’une révolution ?
Le bon public, qui ne crée pas, comme Jéhovah, l’homme à son image, mais qui le défigure à sa fantaisie, croit que j’ai passé trente années de ma vie à aligner des rimes et à contempler les étoiles : je n’y ai pas employé trente mois, et la poésie n’a été pour moi que ce qu’est la prière… » Nous concevons ce qu’a d’impatientant pour le poëte, et pour tout écrivain célèbre, l’idée absolue qu’on se forme de lui, et sur laquelle, bon gré, mal gré, on veut le modeler après coup.
Si lucide et si compréhensive que soit la vue intérieure, après cinq ou six, vingt ou trente lignes, tirées à grande peine, l’image se brouille et s’efface ; et cependant ma conception du myriagone n’a rien de brouillé ni d’effacé ; ce que je conçois, ce n’est pas un myriagone comme celui-ci, incomplet et tombant en ruine, c’est un myriagone achevé et dont toutes les parties subsistent ensemble ; j’imagine très mal le premier et je conçois très bien le second ; ce que je conçois est donc autre que ce que j’imagine, et ma conception n’est point la figure vacillante qui l’accompagne. — Mais d’autre part cette conception existe ; il y a en moi quelque chose qui représente le myriagone et qui lui correspond exactement.
On comprendrait mal le caractère de l’action qu’exercèrent les doctrines de Boileau après sa mort, si l’on n’examinait quel succès elles eurent auprès de ses contemporains.
Il n’y a qu’une chose qu’elle ne puisse faire pour lui : c’est d’être pauvre, mal vêtue.
Ses mots, qu’on colportait, faisaient autant de mal qu’en aurait pu faire la pièce défendue.
Et la question s’agite obscurément en lui, de savoir ce qui vaut le mieux de cette vie délicieuse, innocente, insignifiante et puérile, ou de l’autre vie, la vie d’Occident, celle qui a le vice et le mal, l’effort et la vertu.
Substituez au mot écrire le mot agir, et voilà l’explication de bien des conduites embarrassées, d’actions qui finissent mal pour avoir été commencées sans décision.
La loi, telle que la science mal informée l’aurait énoncée, et qui aurait affirmé que cet antécédent produit toujours ce conséquent, sans tenir compte des circonstances accessoires ; cette loi, dis-je, qui n’était qu’approchée et probable, doit être remplacée par une autre loi plus approchée et plus probable qui fait intervenir ces circonstances accessoires.
Taine s’est efforcé, le premier — car les indications de Herder dans ce sens ne sont ni très précises ni très méthodiques — de rattacher ses études particulières à la psychologie générale, de les utiliser en vue de la recherche de ces lois encore mal connues qui gouvernent les hommes et les sociétés.
Mais, si le roman d’aventures est mal composé, ce collier dénoué d’épisodes n’est pas tout le livre.
On est, dans ce cas, presque toujours obligé de citer le trait saillant et d’abréger le reste, c’est-à-dire qu’on est ramené insensiblement à y mettre du sien comme dans un cours ; et, une fois les conditions bien posées, je ne vois pas grand mal à cela.
Ce n’est pas que nous valions mieux au fond : pris en masse, les hommes en tout temps se valent, et ils se donnent en général le plaisir de faire à peu près tout le mal qu’ils peuvent.
Un jour qu’il se faisait lire quelque chose devant un de ses amis, celui-ci fit répéter au lecteur une phrase qui avait été mal prononcée
Il aime à dire : J’étais là, le roi me dit… J’appris du prince… Je conseillai, je prévis le bien, le mal.
Et par toutes ces circonstances malheureuses, l’armée manquant de toutes choses, et le mal étant plus prompt que le remède, nous ne pûmes jamais prendre Stenay, ni secourir Arras.
Il établit les maximes hospitalières consacrées chez tout ce qui n’est point barbare ; il y joint ses aphorismes habituels de justice et de civilisation : « Il faut faire, en temps de paix, le plus de bien, et, en temps de guerre, le moins de mal qu’il est possible. » Il cite à l’appui la belle réponse de ce gouverneur espagnol de La Havane au capitaine de vaisseau anglais, qui, au moment du naufrage, jeté dans le port par la tempête, vient se livrer à lui pendant la guerre de 1746 : « Si nous vous eussions pris dans le combat, en pleine mer ou sur nos côtes, votre vaisseau serait à nous, vous seriez nos prisonniers ; mais, battus par la tempête et poussés dans ce port par la crainte du naufrage, j’oublie et je dois oublier que ma nation est en guerre avec la vôtre.
Le procédé qu’il aime n’est nulle part peut-être plus apparent que dans la jolie nouvelle de Carmen, cette bohémienne espagnole qui mène à mal don José, l’honnête Basque, qui en fait un bandit de brave soldat qu’il était, et qui le fait finir par la potence.
Le Lac, si admirable d’inspiration et de souffle, n’est pas lui-même si bien dessiné que Les Deux Pigeons ; et, quand j’entends réciter aujourd’hui, à quelques années de distance, quelqu’une de ces belles pièces lyriques qui sont de Lamartine ou de son école, j’ai besoin, moi-même qui ai été malade en mon temps de ce mal-là, d’y appliquer toute mon attention pour la saisir, tandis que La Fontaine me parle et me rit dès l’abord dans ses peintures : Du palais d’un jeune Lapin Dame Belette, un beau matin, S’empara ; c’est une rusée.
Leroy, un grand brun avec une grosse voix ; il est l’ennemi des prêtres, des empereurs, des rois et des romantiques, et cache, sous des apparences de truculence et de férocité physique, une parfaite bonne enfance et des idées pas mal prudhommesques.
Il n’y avait plus d’espoir qu’en Dieu, en présence des maux de la terre.
Qu’on y prenne garde : chaque fois qu’une œuvre satirique mérite une place dans l’histoire littéraire, c’est que l’esprit critique s’y est enrichi d’éléments positifs ; il s’élève ainsi, par des transitions innombrables, du ricanement, qui se complaît aux vilenies humaines, et du dénigrement qui bafoue les grandes choses, jusqu’à l’indignation sacrée, qui lutte avec le mal.
Soutenez la liberté française encore mal assurée et chancelante au milieu des tombeaux et des débris qui nous environnent, par une morale qui l’affermisse à jamais ; et cette forte morale, demandons-la à jamais à cette philosophie généreuse, si honorable pour l’humanité, qui, professant les plus nobles maximes, les trouve dans notre nature, et qui nous appelle à l’honneur par la voix du simple bon sens96. — Sorti du sein des tempêtes, nourri dans le berceau d’une révolution, élevé sous la mâle discipline du génie de la guerre, le dix-neuvième siècle ne peut en vérité contempler son image et retrouver ses instincts dans une philosophie née à l’ombre des délices de Versailles, admirablement faite pour la décrépitude d’une monarchie arbitraire, mais non pour la vie laborieuse d’une jeune liberté environnée de périls97.
J’ai rendu bien mal le discours si clair et si coulant de M.
Que l’idée de cet arrangement soit mal exprimée par le nom de force, nous le voulons bien : mais ici le mot importe peu, il suffit que la réalité du fait ne soit pas discutable. […] Cependant, si l’on doit écarter de la science ces faits mal observés, on a constaté expérimentalement que des graines ont pu germer après plus d’un siècle. […] C’est encore ici un de ces termes mal précisés sur lesquels règne le plus complet désaccord. […] Prat étudie en ce moment, serait due à un produit de la putréfaction mal connu. […] En 1819, Mayer s’occupe de classer les éléments des tissus ; il emploie le premier le nom d’histologie, nom mal approprié d’ailleurs, qui a servi à désigner la science nouvelle.
Parlant, je crois, de quelque souper chez le président Hénault, qui faisait les honneurs de chez lui en mangeant beaucoup, le prince de Ligne nous dit : « Marmontel l’a secondé à merveille ; Duclos pas mal, avec sa sécheresse et son sel ordinaire ; sel de mer à la vérité, sel amer, mais qui vaut mieux que le sel attique dont on parle toujours et où je ne trouve jamais le mot pour rire. » Les portraits des gens de lettres qui terminent le fragment trop court des Mémoires de Duclos, et où l’on voit passer Fréret, Terrasson, Du Marsais, La Motte, forment un des meilleurs et des plus agréables chapitres de notre histoire littéraire.
On invente, on exagère, on empoisonne les choses, on ne les rapporte qu’à demi ; on fait valoir ses préjugés comme des vérités incontestables ; on débite cent faussetés ; on confond le général avec le particulier ; ce qu’un a mal dit, on le fait dire à tous, et ce que plusieurs ont bien dit, on ne le fait dire à personne : et tout cela, encore une fois, pour la gloire de Dieu.
Voilà, somme toute, un homme distingué, mais un poète assez mal préparé, ce semble, pour chanter les beautés de la vie retirée et champêtre, et pour en goûter toutes les douceurs.
Le roi prit mal cette espièglerie d’un homme d’esprit dans un personnage public.
Heureux d’un mariage tout récent avec une jeune et jolie créole, assuré désormais du foyer et du loisir, il fut pris d’un mal réel qui n’éclaira que trop les sources de ses habituelles faiblesses.
Tout cela est bien conduit ; un air d’hilarité mal contenue qu’il remarque de temps en temps sur les visages de la foule tempère à peine l’effroi croissant de l’accusé ; mais lorsque, invité par le magistrat à soulever le manteau qui recouvre le cadavre des victimes, il se trouve n’avoir transpercé que des outres pleines de vin, — des outres qui étaient, il est vrai, enchantées ce soir-là, — un rire frénétique, inextinguible, éclate et monte jusqu’aux cieux.
Il n’est pas difficile, après une vie longue, quand on a entendu tout le monde et vu les dénouements, de venir faire, à propos de chaque personnage célèbre, une espèce de compilation de jugements, une cote tant bien que mal taillée, et de la donner sans y mettre le relief et la façon.
Le mal d’amour est une rude peine : Lorsqu’il nous tient, il nous faut en mourir ; L’herbe des prés, quoique si souveraine… L’herbe des prés ne saurait en guérir.
C’est le seul mal au monde que vous aurez fait ; mais il peut avoir des suites funestes.