Dans le domaine de la pensée, la modération même de la solution où l’on a voulu s’arrêter suppose qu’on a passé en revue toutes les autres et qu’on s’est imaginé les divers états d’esprit auxquels elles correspondent, ce qui est un grand plaisir.
Il suppose nécessairement la foi.
L’esclave païen est supposé par essence méchant, immoral.
Il est injurieux de supposer sans preuve la mauvaise foi du critique.
Conclusions erronées ; car elles supposent que la régularisation des conditions extérieures de la production intellectuelle est favorable à cette production, tandis que cette production dépend uniquement de l’abondance de la sève interne et vivante de l’humanité.
Il faut se rappeler que, dans les idées juives, antipathiques à l’art et à la mythologie, la simple forme de l’homme avait une supériorité sur celle des chérubs et des animaux fantastiques que l’imagination du peuple, depuis qu’elle avait subi l’influence de l’Assyrie, supposait rangés autour de la divine majesté.
, I, 7) suppose que ce furent les parents de Jésus qui, réfugiés en Batanée, essayèrent de recomposer les généalogies.
Nous supposons que cette dernière phase de l’activité de Jésus dura environ dix-huit mois, depuis son retour du pèlerinage pour la Pâque de l’an 31 jusqu’à son voyage pour la fête des Tabernacles de l’an 32 768.
Il faudrait supposer madame de Maintenon une femme sans jugement et tout à fait vulgaire pour croire qu’elle ait pu être dupe d’un aussi petit esprit et d’un caractère aussi ignoble que Gobelin : et pour faire une telle supposition, il faudrait ne pas lire sa correspondance avec le directeur dont elle dirigeait les directions.
D’après son rang et les principes qu’il suppose, ce serait lui qui devrait repousser le mariage de Jacques, comme une mésalliance.
supposez un moment qu’après tout à l’heure deux siècles, d’Hacqueville soit revenu au monde, qu’il se mette à se ressouvenir de ce temps-là, à nous entretenir de Mme de Sévigné et de ses amis, à vouloir tout nous dire et ne rien oublier ; imaginez le récit intime, abondant, interminable, que cela ferait, un récit doublé et redoublé de circuits sans nombre et de toutes sortes de parenthèses ; ou, mieux encore, imaginez une promenade que nous ferions à Saint-Germain ou à Versailles en pleine cour de Louis XIV, avec d’Hacqueville pour maître des cérémonies et pour guide : il donne le bras à Mme de Sévigné, mais il s’arrête à chaque pas, avec chaque personne qu’il rencontre, car il connaît tous les masques, il les accoste un à un, il les questionne pour mieux nous informer ; il revient à Mme de Sévigné toujours, et elle lui dirait : « Mais, les d’Hacqueville, à ce train-là, nous n’en sortirons jamais. » C’est tout à fait l’idée qu’on peut prendre du livre de M.
Rollin, en condamnant l’usage des fictions dans un poëte chrétien, n’interdit point certaines figures hardies qui font image, & par lesquelles on donne de la voix, du sentiment, de l’action même aux choses inanimées : « Il sera toujours permis, dit il, d’adresser la parole aux cieux & à la terre ; d’inviter la nature à louer son auteur ; de supposer des aîles aux vents pour en faire les messagers de dieu ; de prêter une voix de tonnerre aux cieux pour publier sa gloire ; de personnifier les vertus & les vices.
On est par là conduit à supposer que les animaux seront plus intelligents à mesure que leur cerveau ressemblera plus au cerveau humain ; mais cette règle est loin d’être sans exception.
Le parallèle des anciens peuples avec les Amériquains suppose une grande connoissance de l’antiquité ; mais il est plus ingénieux que sensé ; & s’il y a dans ce livre beaucoup de choses intéressantes, il y a aussi un grand nombre d’idées fausses.
On pourrait citer celle de Cateau-la-Borgnesse (page 178), et la plaisanterie un peu forte de l’accouchement supposé de Marie-Anne Mancini, à qui, jeune fille, le cardinal Mazarin voulut persuader qu’elle avait fait un enfant (page 372).
Il faut lui supposer une conformation particulière de son être intime, pour qu’il puisse concilier le sentiment de sa faiblesse et celle de sa supériorité, la conscience de sa médiocrité et celle de sa prospérité.
Ils supposent l’esprit de l’homme plein et comblé d’idées de toutes sortes, entrées par cent sortes de voies, obscures, confuses, perverties par les mots, telles que nous les avons lorsque nous commençons à réfléchir sur nous-mêmes, après avoir pensé longtemps et au hasard.
La syllabe métrique d’une rime féminine est un tout accentuel indivisible, et sa raison d’être c’est qu’elle renforce nécessairement l’accent à la rime, à supposer qu’elle soit réellement et non pas visuellement féminine (et encore, il y a là une question de prononciation dans laquelle je ne puis entrer).
» Enfin un fragment, douteux encore dans sa tristesse, ferait supposer que Sapho eut la douleur de survivre à sa fille ; et on voudrait qu’il n’y eût pas eu plus grand deuil dans sa vie.
Rousseau, il est vrai, dans une partie de son œuvre théorique, ne méconnaît pas que l’intelligence humaine n’a pu se développer sans le secours du langage et que la perfection du langage suppose l’avancement de la civilisation : aussi place-t-il le véritable bonheur et la véritable majesté de l’homme dans « l’imbécillité » innocente. […] A supposer qu’il n’y eût plus un phénomène dont la loi nous échappât, encore ne s’agirait-il que des phénomènes accessibles à nos sens ou aux instruments que nos sens nous permettent de construire. […] La conscience de la « passion », surtout à ce degré de force où il lui faut fuir ou succomber, suppose l’expérience des sens ; mais le sentiment d’une passion « criminelle », ce vertige d’ardeur pour un frère, suppose de l’excès et du raffinement dans cette expérience. […] Sans insister davantage sur un jugement dont je ne prétends avoir qu’effleuré les motifs, j’en ai dit assez, je suppose, pour faire admettre l’inutilité d’une étude particulière de Lamartine dans un ouvrage qui a pour but de définir et d’épuiser l’essence du romantisme. […] RUY BLAS Invente, imagine, suppose.
Montesquieu reprochait surtout à Louis XIV d’avoir été un sot (Persanes, xxxvii) ; il disait : « le despotisme… tout le monde est bon pour cela… L’extrême obéissance suppose de l’ignorance chez celui qui obéit ; elle en suppose même chez celui qui commande. » Commynes a les mêmes principes parce qu’il a les mêmes répulsions. […] C’est principalement quand il suppose des lettres écrites par eux qu’il glisse à ce travers. […] Toutes les bonnes œuvres de toute l’humanité supposée sainte, devant Dieu seraient encore une fumée. […] Il suppose encore (ceci moins nettement) qu’ils ont eu peur du fatalisme oriental, et que, de ce chef, une confusion ne s’établît. […] Quelques recherches récentes font supposer qu’elle était plutôt flamande, et anoblie seulement du xve siècle.
Feuillet, voici, je suppose, en quels termes il s’exprimerait : « À l’époque où l’auteur de Dalila entra dans la vie, la société française n’était plus ce qu’on l’avait vue dans les années qui suivirent la révolution de 1830. […] Immoral sans perversité, brutal sans grossièreté, roué sans finesse, dévoué sans discernement, Carnioli est une représentation très heureuse de cette classe d’hommes qui en vous n’aiment qu’eux-mêmes, vous veulent semblable à eux pour vous aimer, et supposent que leurs amis doivent être comme eux à l’abri des maux de nerfs et de la phtisie. […] Alors il aura vraiment une grandeur éternelle ; il sera plus et mieux qu’un type, car le type suppose une systématisation de ce qui ne doit pas être systématisé, une limitation de ce qui ne doit pas être limité ; il suppose que la vie morale s’est figée et cristallisée en une certaine forme, et que ses eaux, qui sont faites pour couler sans obstacles, ont rencontré une barrière artificielle qui les a arrêtées. […] Supposez encore quelque psychologue à la noire analyse, Nathaniel Hawthorne par exemple, s’emparant de ce personnage, comme il aurait su faire ressortir les souffrances de ce malheur atroce, de cette infirmité fatale faite pour arracher des larmes au plus dur Dolope de la vie mondaine, l’impuissance d’être aimé ! […] Comme je suppose que le livre a été lu par tout le monde, j’en viens tout de suite au point unique que je veux mettre en lumière, et j’avoue qu’il m’est impossible de parvenir à comprendre la chute de l’héroïne.
Septième tableau, au Carmel d’Olmedo, Ximeira s’introduit, avec les noirs projets que vous pouvez lui supposer, dans la crypte du couvent. […] Il est < roi en exil » depuis dix ans, supposons, je ne crois pas que ce soit déterminé dans le texte. […] La scène est hardie, un peu cynique, un peu gênante, assez gênante, sinon pour le public des premières, qui a su se faire un front qui ne rougit jamais, du moins pour le public que je suppose assistant à la pièce au moment que j’écris. […] En tout cas, il y avait dans la pièce de quoi faire supposer au public que les choses finiraient par bien s’arranger, et il n’y a pas à lui en vouloir de l’avoir évidemment cru, au moins un instant, et d’avoir eu une déception qui s’est manifestement traduite par quelque froideur. […] Je reconnais qu’on peut supposer qu’elle est à l’extrême limite de l’héroïsme qui lui est départi.
Je suppose qu’ils ne s’en inquiètent guère : il n’y a pas si longtemps qu’on a commencé à paver les rues de Londres, et quand on a pratiqué comme eux les cloaques et les fanges, on n’a pas peur de s’enrhumer. […] Mais toutes ces peurs, sitôt qu’elles sentent la flamme des pensées nobles, s’envolent et s’évanouissent comme des nuages. — Supposez que ce soit la mort. — Je l’ai supposé […] Suppose it death !
En voici un vestige dans un morceau presque digne de Swift, et qui est l’abrégé de ses émotions habituelles en même temps que sa conclusion sur l’âge où nous voici1410 : « Supposons, dit-il, que des cochons (j’entends des cochons à quatre pieds), doués de sensibilité et d’une aptitude logique supérieure, ayant atteint quelque culture, puissent, après examen et réflexion, coucher sur le papier, pour notre usage, leur idée de l’univers, de leurs intérêts et de leurs devoirs ; ces idées pourraient intéresser un public plein de discernement comme le nôtre, et leurs propositions en gros seraient celles qui suivent : « 1º L’univers, autant qu’une saine conjecture peut le définir, est une immense auge à porcs, consistant en solides et en liquides, et autres variétés ou contrastes, mais spécialement en relavures qu’on peut atteindre et en relavures qu’on ne peut pas atteindre, ces dernières étant en quantité infiniment plus grande pour la majorité des cochons. […] Pour relier les petits fragments que nous pouvons atteindre, il faut le plus souvent supposer des causes ou employer des idées générales tellement vastes, qu’elles peuvent convenir à tous les faits ; il faut avoir recours à l’hypothèse ou à l’abstraction, inventer des explications arbitraires ou se perdre dans les explications vagues. […] Ces pauvres gens, boutiquiers et fermiers, croyaient de tout leur cœur à un Dieu sublime et terrible, et ce n’était pas une petite chose pour eux que la façon de l’adorer1460. « Supposez qu’il s’agisse pour vous d’un intérêt vital et infini, que votre âme tout entière, rendue muette par l’excès de son émotion, ne puisse en aucune façon l’exprimer, en sorte qu’elle préfère le silence à toute expression possible, que diriez-vous d’un homme qui s’avancerait pour l’exprimer à votre place au moyen d’une mascarade et à la façon d’un tapissier décorateur ? […] Suppose now it were some matter of vital concernment, some transcendant matter (as Divine worship is) about which your whole soul struck dumb with its excess of feeling knew not how to form itself into utterance at all, and preferred formless silence to any utterance there possible. — What should we say of a man coming forward to represent or utter it for you in the way of upholsterer-mummery ?
La vertu, selon lui, sans doute, et je le pense également, la vertu suppose le génie ; l’immoralité au contraire témoigne d’une complète mesquinerie et d’une stérilité certaine. […] D’une telle élévation littéraire et morale (« la vertu suppose le génie11 » ; la réciproque, je pense, doit surtout être vraie) ne serais-je que taupe dégringolée ? […] La vertu, ne l’oublions pas, suppose le génie. — (Décidément, M. […] D’ailleurs, sans même supposer un pareil cataclysme, êtes-vous bien sûr que la grande ombre sur laquelle vous étendez le linceul de votre mépris ne va pas se redresser triomphante dans le recul de la postérité ?
Si le poète change les principales circonstances de l’action, que l’on suppose être un événement connu, son poème cesse d’être vraisemblable. […] Pour que l’amour soit intéressant, il faut que le spectateur le suppose au comble, que ce sentiment subsiste depuis longtemps, qu’il ne soit pas né devant lui comme dans les pièces de la Grange-Chancel et de quelques autres, où des princesses deviennent amoureuses pour avoir vu le héros un moment ; il faut que l’on n’aime pas une femme uniquement pour sa beauté. […] L’effet du comique résulte de la comparaison qu’on fait, même sans s’en apercevoir, de ses mœurs avec les mœurs qu’on voit tourner en ridicule, et suppose entre le spectateur et le personnage représenté une différence avantageuse pour le premier. […] Pour bien concevoir ces deux révolutions, supposez, sur le théâtre, une reine de Phénicie, qui, par ses grâces et sa beauté, ait attendri, intéressé pour elle les chefs les plus vaillants de l’armée de Godefroi, qui en ait même attiré quelques-uns dans sa cour, y ait donné asyle au fier Renaud dans sa disgrâce, l’ait aimé, ait tout fait pour lui, et qu’elle voie s’arracher aux plaisirs pour suivre les pas de la gloire : voilà le sujet d’Armide en tragédie.
Je suppose qu’aujourd’hui l’Académie, des sciences analyse le chocolat de M. […] On suppose plutôt que le dramatiste voilé est un grand personnage politique, qui n’a pas voulu risquer sa considération dans une comédie ; ou bien que c’est Dumas lui-même essayant des hardiesses nouvelles, qui cette fois se dérobe pour en examiner l’effet sur un public non prévenu. […] Pour qu’il ne surgisse jamais, il n’est point nécessaire de supposer la noire envie et je ne sais quelle horrible conspiration du silence ; l’ignorance et la paresse suffisent. […] Le contraste de la grandeur d’âme, qu’on suppose en principe et par définition chez les hommes supérieurs au vulgaire, avec cette misérable soif des « louanges de ceux qui ne furent jamais loués », comme disait le peintre Poussin, a quelque chose de comique et de dégradant. […] Comme il ne s’agit ici ni d’un artiste, ni d’un penseur, ni même d’un écrivain à proprement parler, on peut supposer simplement que le malheureux désirait attester certains faits intéressants pour l’histoire et sans doute utiles à sa mémoire personnelle.
Quant à la bonté qui est dans son théâtre… oui, sans doute, elle y est ; plus exactement, on l’y suppose sans trop de peine et on l’en peut déduire. […] Car, outre que la poésie, si on la considère comme un méchant métier, suppose en général un méritoire détachement du gain matériel, elle implique la faculté d’être ému, la puissance d’aimer, l’intelligence et le goût de l’ordre et de l’harmonie. […] Mais voyez que de vertus suppose d’ordinaire cette manie inoffensive. […] songez à ce que cette entreprise suppose aujourd’hui de courage, de persévérance, de gravité et de foi ! […] Je ne pourrai plus, comme je l’ai fait pieusement trois années de suite, vous consacrer un couplet descriptif tout plein d’épouvante, ni supputer en imagination ce que l’expression naturelle de votre visage suppose de crimes, de testaments fabriqués, d’infanticides, d’enlèvements, de viols, d’empoisonnements et d’assassinats !
Le goût suppose de la sensibilité, de l’imagination, de l’esprit, du sentiment et surtout de la délicatesse. […] Le style descriptif suppose la couleur, le relief, l’imagination, l’image, la magie plastique des mots, la vie représentative et physique : description, tableau, observation, gestes, portraits, détails. […] Je suppose qu’il était d’abord soulevé par un souffle impétueux ; puis qu’abandonné par ce souffle qui faiblissait ou même affaissé par son propre poids, il s’atténuait en s’élargissant. […] Supposons que nous ayons à décrire la morgue de l’hospice du mont Saint-Bernard. […] Je suppose que vous écriviez sur place.
Il suppose l’un inapte à tout sauf à « l’œuvre divine », tandis que l’autre, par l’équilibre d’une force souveraine, domine son temps « et marche le pas qu’il veut ». […] On pouvait supposer au moins qu’un cercle curieux regarderait un instant l’aérolithe bizarre, noir et gravé d’aucun caractère lisible, tombé là on ne sait d’où, puis que le rassemblement se disperserait. […] Supposez Goezman ou Baculard à sa place, il se fût moins démené pour eux et n’eut guère pensé à interrompre en leur faveur ses travaux et ses plaisirs pour se faire leur avocat volontaire. […] Comme le décompte des années le laisse supposer, il s’agit ici d’une coquille : Chateaubriand est bien mort le 4 juillet 1848. […] À la lumière de ces extraits, on peut supposer que le jugement de Régnier sur Sainte-Beuve doit beaucoup à celui des Goncourt, très proche à plusieurs égards.
Je vois les projets des hommes, et je m’y prête souvent, sans daigner les désabuser sur la stupidité qu’ils me supposent. […] Vous avez supposé un complot entre tous vos amis pour vous envoyer à Genève, et la supposition est fausse. […] Tandis que vous alliez, nos amis nous supposaient tous deux à la campagne ; ils n’ont su qu’hier votre départ. […] Je n’entends rien aux engagements qu’on vous suppose avec le public. […] Luneau n’exerce pas ce despotisme-là, c’est son affaire ; mais je vois qu’il vous suppose une importance avec moi qu’assurément son libraire ne prend pas avec lui.
Gardons-nous de le supposer ; il n’a point dissimulé les défauts de son modèle. […] Je chassai Arina, et je supposais qu’avec le temps elle reviendrait à de meilleurs sentiments ; il me répugne, vous savez, de croire au mal et à la noire ingratitude du cœur humain. […] Mais supposons que la chasse ne soit point de votre goût ; vous n’en aimez pas moins la nature, et par conséquent il est impossible que vous ne nous portiez envie à nous autres chasseurs… Écoutez !
Les impôts et les emprunts dont il avait fallu charger la propriété, après les deux invasions dont la Restauration était innocente, puisqu’il fallait payer la rançon du territoire, les fureurs mal contenues de la Chambre de 1815, les massacres de Nîmes et de Toulouse, les listes de proscription dressées à regret par le roi sous le doigt impérieux d’une Chambre vengeresse ; les meurtres incléments et impolitiques des généraux, de Labédoyère, du maréchal Ney, meurtres qui, dans quelques hommes, atteignaient l’armée tout entière ; les procès pour cause de libelles, les prisons pour cause de couplets, les missions plus royalistes que religieuses parcourant le pays, présentant la croix à la pointe des baïonnettes, et répandant sur toute la surface de la France moins des apôtres de religion que des proconsuls d’agitations civiles ; la guerre d’Espagne, guerre qui était en réalité française, mais qui paraissait une guerre intéressée de la maison de Bourbon seule contre la liberté des peuples ; enfin la mort de Louis XVIII, ce modérateur emporté malgré lui par l’emportement de son parti ; l’avènement de Charles X, qu’on supposait le Joas vieilli d’un souverain pontife prêt à lui inféoder le royaume ; les oscillations de son gouvernement, jeté, des mains prudentes de M. de Villèle, aux mains conciliantes de M. de Martignac, pour passer aux mains égarées de M. de Polignac ; l’abolition de la garde nationale de Paris, cette déclaration de guerre entre la bourgeoisie et le trône : toutes ces circonstances, tous ces malheurs, tous ces excès, toutes ces fautes, toutes ces faiblesses, toutes ces violences, toutes ces folies avaient progressivement fait de l’opposition populaire en France une puissance plus forte que le Gouvernement. […] Ce billet était daté de cinq heures du matin ; le prince, que l’on aurait supposé si peu susceptible d’une impression poétique et d’une insomnie littéraire, disait à son amie « qu’il n’avait pas dormi avant d’avoir lu le volume, et qu’un poète était né cette nuit. » M. de Talleyrand et Béranger, deux hommes si semblables d’esprit, si divers de caractères, parrains de mon avenir ! […] Je me suis dit de bonne heure : l’homme sensé ne peut pas vivre sans Dieu et sans religion : ce serait un effet qui voudrait subsister sans relation avec sa cause ; mais la foi en Dieu suppose un culte qui l’adore, une morale qui se conforme à ses perfections, une action qui concourt à sa divine et souveraine volonté.
À la satisfaction du public, qui ne supposa point la supercherie, le comique imita le chien pendant les vingt représentations premières. — Mais, comme les gens qui gasconnent ou grasseyent en voulant imiter le jargon girondin ou marseillais, l’artiste s’aperçut avec inquiétude qu’il commençait à parler chien pour de bon, dans la vie privée. […] Comment pouvait-on supposer qu’il eût dans sa propriété de ces dangereuses inventions d’une chimie incendiaire ? […] Il affectera de lorgner les femmes en réputation, qui garnissent les avant-scènes et les premières loges, et il les saluera de manière à faire supposer qu’elles font partie de ses souvenirs ou de ses espérances. […] On supposerait qu’ils viennent d’être frappés par un malheur commun. […] Ce commerçant, recelait même un caisson aux armes royales, avec le By appointement traditionnel, ce qui pourrait faire supposer qu’il était autorisé par le gouvernement.
La sincérité de la peinture ne saurait-elle racheter la part d’orgueil qu’elle suppose ? […] Il n’est pas besoin qu’elle soit très universelle, ni très radicale ; elle ne suppose pas l’introduction de mobiles inconnus, mais le renforcement de certains mobiles par rapport aux autres. […] La lutte des deux pouvoirs, spirituel et séculier, que soutenait le moyen âge, aboutit à une dissociation plus radicale et plus complète qu’on ne pouvait le supposer d’abord. […] Il ne s’aperçoit pas que cette innovation amène ou suppose une révolution radicale dans la science chrétienne, et, si, ce n’est dans la foi, du moins dans la manière de la concevoir et de la fonder. […] « En demandant le pourquoi de l’univers, vous supposez que l’univers a eu un commencement et par conséquent une cause, qu’il va à un but et par conséquent qu’il est le fruit d’une intention.
Il est même inutile de supposer un calcul là où il n’y a, en réalité, que l’association ingénue d’un mot et d’un sentiment. […] Il nous prend par la main, nous frappe sur l’épaule : « Supposons que nous ayons à décrire la morgue de l’hospice du mont Saint-Bernard … » Mais je refuse d’entrer dans cette supposition et dans cette morgue artificielle. […] C’était l’illusion de cet homme trop intelligent de croire que les hommes étaient à la hauteur de son oreille ; comme il comprenait la moindre nuance d’idée suggérée par un mot, il supposait tout esprit de bonne volonté capable du même effort intellectuel. […] Je suppose que dans l’état actuel de l’Europe, un livre de littérature véritable, d’art sincère, ne peut pas conquérir un public beaucoup plus étendu qu’au XVIIe siècle. […] La forme normale serait forfuyant, d’après l’ancien français forfuiance, et le verbe logiquement supposé forfuir.
Il est à supposer que Parny n’apprit que plus tard le mariage d’Éléonore, résultat de son absence. […] le donnerai ici une ode au Plaisir qu’on peut supposer traduite en prose d’un élégiaque étranger, allemand ou anglais ; elle exprime sous une autre forme la pensée que nous venons de rencontrer à propos de Parny ; mais il y faudrait la fraîcheur de touche d’un Gray ou d’un Collins : « O doux et cher Génie, au regard vif et tendre ; au vol capricieux, rapide ; à l’accent vibrant, argenté, mélodieux ; dont la chevelure exhale un parfum sous la couronne à demi penchée ; dont la main porte un rameau de myrte en fleur, ou d’amandier tout humide de gouttes de rosée qui brillent au soleil du matin ; ou qui, le soir, assoupis tes pas sur les gazons veloutés aux rayons de la lune ; « O Dieu de la jeunesse et de la tendresse, langoureux comme une femme, hardi comme un amant ; volage, imprévu, consolateur ; — ô Plaisir, à toi, avant que ma voix ait perdu son timbre qui pénètre et cet accent que tu connais, à toi mes adieux !
Est-ce que l’expression, encore une fois, ne suppose pas par définition même un rapport avec le mental ? […] Maintenant, supposez une communication établie entre un plus grand nombre de disques, de manière à y produire une série d’impressions et d’expressions, vous aurez l’image mécanique de la sympathie qui relie les organismes divers et qui établit entre eux une solidarité de sentiments.
Chateaubriand s’est franchement expliqué à ce sujet : « On a fait un crime à Dumouriez de la vénalité de ses principes, dit-il ; supposé que ce reproche fût vrai, aurait-il été plus coupable que le reste de son siècle ? […] Mme de Staël constatait le même fait : « Depuis que les institutions sont changées et même dans les moments les plus calmes de la révolution, les contrastes les plus piquants, n’ont pas été l’objet d’une épigramme ou d’une plaisanterie spirituelle. » On avait supposé que cette incapacité de rire et de railler était une maladie passagère des esprits, surmenés par les événements révolutionnaires ; il n’en est rien, elle est constitutionnelle, elle tient à des causes organiques, que je ne puis rechercher dans cet article ; je me borne à signaler le fait.
Ce caractère d’innocence du théâtre indien fait supposer que les représentations étaient des fêtes religieuses ou royales, données rarement au peuple. […] Ainsi le sombre azur, qu’on suppose la couleur du dieu père et conservateur des êtres, Wichnou, est aussi la couleur de l’amour.
Et il y avait entre ces deux existences la même différence qu’entre la Vie de Bohême de Murger et, je suppose, le Disciple de Paul Bourget. […] Supposons qu’un jeune écrivain d’aujourd’hui, après quelques essais, obtienne tout à coup le succès prodigieux de Fromont jeune et Risler aîné ou de l’Assommoir qui furent les débuts d’Alphonse Daudet et de Zola dans la grande notoriété.
Comment supposer que le cervelet ne joue pas le même rôle chez les deux êtres dans la direction des mouvements ? […] Au lieu de s’arrêter à la surface de la vie humaine et de se laisser prendre à certains signes équivoques de l’état physiologique, pour peu que l’on pénètre dans l’état psychologique, on voit au contraire un développement supérieur de la raison, du sentiment, de la volonté, là où le physiologiste n’avait observé ou supposé qu’une affection pathologique.
Il conduit sa chronique avec exactitude jusqu’au moment où le marquis de Montferrat, son ami et son seigneur de prédilection, périt à son tour dans une rencontre en poursuivant les féroces Bulgares (1207) : « C’est alors, dit Gibbon, c’est à cet accident funeste que tombe la plume de Villehardouin et que sa voix expire ; et, s’il continua d’exercer l’office de maréchal de Romanie, la suite de ses exploits n’est point connue de la postérité. » On suppose qu’il mourut cinq ou six ans après, vers 1213, et il paraît certain qu’il ne retourna jamais en France.
Ils montaient au Pic, et nous demandèrent si l’on voyait la plaine bien dégagée de vapeurs, car la curiosité seule les y conduisait, et ils venaient des montagnes du Béarn… Les Alpes ne m’ont point offert d’exemple d’une pareille curiosité : elle suppose cette inquiétude de l’esprit, ces besoins de l’imagination, cet amour des choses étonnantes, lointaines, fameuses, dont le bonheur paisible de l’habitant des Alpes ne fut jamais troublé, et dont le bonheur plus romanesque de l’habitant des Pyrénées se compose.
Mais ce n’est pas là, pour l’art, une veine aussi neuve et aussi profonde que M. du Camp le suppose, et de tout temps, surtout chez nous au xviiie siècle, il y a eu des poètes descriptifs jaloux de prendre à la science ou même à l’industrie ce qui prête au tableau, aux couleurs, et de renouveler ainsi leur matière.
Ces portraits et caractères composés si savamment, mais composés et concertés, auraient pris plus de naturel et de vie ; les originaux vrais auraient apparu, se seraient développés avec ampleur, abandon, et je ne sais quel charme qui leur manque ; je le suppose toujours à l’abri du trop de facilité et du laisser-aller.
On a supposé que ce fut à l’occasion des fêtes pour la paix de Nimègue que le tour fut joué.
Et de cette même ville de Trente, après des succès auxquels il ne manquait plus que la seconde expédition dans le Tyrol allemand pour atteindre à leur plein éclat, il écrivait à son père encore, plus ambitieux que lui et qui le poussait à tous les genres d’ambition : J’ai reçu votre lettre ; vous m’y supposez bien des qualités que je n’ai pas.
Les premières fois que j’eus l’honneur de causer avec lui, je crus m’apercevoir que, si on le laissait faire, il aimait assez la méthode de Socrate, c’est-à-dire à vous supposer quelque idée fausse que souvent vous n’aviez pas, et à se donner le plaisir de la réfuter en se faisant naturellement la belle part, — un peu comme Béranger.
Quoi qu’il en soit, ces scènes vulgarisées se succèdent d’une manière assez amusante et vivante, si on les suppose vues et non lues ; et c’est ainsi qu’on arrive aux scènes de la Madeleine qui, sans être « délicieuses », comme le prétendent les enthousiastes, nous paraissent assez piquantes.
Mais les femmes qui ont succombé peut-être à pareille épreuve lui savent gré d’avoir supposé qu’elles s’en sont tirées à bon marché, et de leur avoir ouvert une fausse porte pour entrer dans la bonne opinion de leur vertu.
On suppose avec vraisemblance que c’est dans ces années de séjour à Séville qu’il commença à écrire quelques-unes de ses Nouvelles publiées bien plus tard (1613), et où il devait montrer un talent particulier et tout nouveau, vérité d’observation, vivacité de descriptions, esprit, grâce, et une richesse native d’idiome qui n’a pas été égalée.
Vous ne retrouverez dans ces Mémoires que les principaux événements de notre vie commune : vous y verrez des erreurs que vous m’avez pardonnées, des mécomptes que vous avez prévus, et si votre nom ne s’y rencontre que rarement, vous savez qu’en écrivant les lignes qui suivent, votre pensée n’a pu me quitter un seul instant. » J’avoue que dans les Mémoires qui nous sont donnés, je ne vois pas trace d’erreurs dans le sens où on le pourrait supposer, dans le sens malin et français ; je n’y vois que des mécomptes.
Elle s’adresse aux lettres absentes de Louise, à ces lettres perdues à coup sûr ou errantes, car elle ne peut supposer qu’il n’y en a pas eu d’écrites, et elle a raison : « Qui sait en quelles mains tomberont ces chers souvenirs de ma chère Louise ?
De loin, il s’élèvera et paraîtra de plus en plus, aux regards d’une postérité qui aura, je le suppose, bien d’autres visées, comme une colonne, ou mieux une double ou triple pyramide un peu singulière d’aspect ; mais en approchant, en le considérant de près, que de belles et grandes choses on y retrouvera, dites pour la première fois et de cette manière durable et superbe qui ne saurait s’imiter !
Napoléon s’y suppose en idée maître et roi durant dix ans, et il en ressuscite toutes les merveilles, étendues, agrandies, multipliées, selon les données incomparables du génie moderne ; je ne me refuserai pas à rappeler les principaux traits du tableau : « Mais à quel degré de prospérité, s’écrie tout à coup l’historien conquérant, pourrait arriver ce beau pays, s’il était assez heureux pour jouir, pendant dix ans de paix, des bienfaits de l’administration française !
Cependant Racine, qui avait toutes les appréhensions pour l’amour-propre royal et qui supposait le prince des monarques aussi chatouilleux qu’un prince des poètes, craignit que cette seule apparence d’une gloire partagée ou préparée ne déplût au vainqueur de Mons : sur son conseil, le marquis de Dangeau, qui s’était chargé de lire au roi l’Epître, eut soin en la lisant, de passer par dessus la tirade jugée périlleuse.
Quel ton habituel et relâché cela fait supposer dans cette petite Cour princière !
Son Altesse Sérénissime répondit tout en piss… : « Mortaigne, prenez garde de prendre votre c… pour vos chausses. » Sans doute, ajoute M. de Voyer, que ce prince sentit l’absurdité de tirer d’un point aussi éloigné que la droite le secours nécessaire à la gauche ; mais il eut la faiblesse de ne pas s’opposer à ce ridicule arrangement. » Supposez un moment en imagination que le prince de Condé, dans la gloire des journées de Rocroy et de Lens, et à la faveur d’un songe comme le figurent les poëtes épiques, aperçoive tout à coup, dans l’avenir, un de ses descendants perdant une bataille dans une telle posture et sur un tel mot, et demandez-vous ce qu’il en dira !
J’eusse été, je suppose, en Égypte, et là, à moins que je n’eusse été intime avec le général en chef, autrement (sic) je me fusse jeté parmi les Arabes, dans le Saïd.
Il s’est supposé plus vieux qu’il ne l’est, revenu à son point de départ après l’âge des excursions, mais revenu avec l’expérience acquise.
Il y a moins de désaccord qu’on ne le supposerait, entre les vues de la jeunesse et celles de la maturité.
Elle se trouvait ainsi de neuf ans plus âgée qu’on ne l’a supposé ; non pas qu’elle ait dissimulé son âge ; elle n’indique point, il est vrai, dans ses Mémoires, la date précise de sa naissance (les dates, sous la plume des femmes, c’est toujours peu élégant) ; mais elle mentionne successivement dans le récit de sa jeunesse certaines circonstances historiques qui pouvaient mettre sur la voie.
Il n’est pas vrai, malheureusement, qu’on ne soit jamais entraîné que par les qualités qui promettent une ressemblance certaine entre les caractères et les sentiments : l’attrait d’une figure séduisante, cette espèce d’avantage qui permet à l’imagination de supposer à tous les traits qui la captivent, l’expression qu’elle souhaite, agit fortement sur un attachement, qui ne peut se passer d’enthousiasme ; la grâce des manières, de l’esprit, de la parole, la grâce, enfin, comme plus indéfinissable que tout autre charme, inspire ce sentiment qui, d’abord, ne se rendant pas compte de lui-même, naît souvent de ce qu’il ne peut s’expliquer.
. — Sur cet indice, le microscope un jour pourra chercher ; car la ressemblance des fonctions suppose la ressemblance des organes.
Il n’est pas difficile de supposer que, l’identité des mots aidant, l’amour chrétien, aspiration éperdue vers le Dieu infini et parfait, désir affiné et subtilisé parle sentiment du néant de l’âme amoureuse devant l’incompréhensible objet de l’amour, ce sentiment de tendresse mystique a fourni le type de la dévotion galante de l’amant à sa dame.
Je suppose qu’il fallût mille existences laborieuses pour recueillir toutes les variétés locales de telle légende, de celle du juif errant par exemple.
. ― Supposons ce tableau tracé avec tout le soin possible ; une troisième espèce d’analyse interne va s’imposer à nous : l’analyse des idées.
Lumière implique ténèbres, la chaleur suppose le froid.
Comme elle était ingénieuse à le faire parler quand il se taisait, à supposer de lui des paroles aimables, bienveillantes pour les autres, qu’il lui avait dites sans doute tout à l’heure dans l’intimité, mais qu’il ne répétait pas toujours devant des témoins !
Il est des personnes dont la préoccupation consiste à nier absolument toute légèreté et toute faiblesse de cœur de Marie-Antoinette (supposé qu’il s’en rencontre quelqu’une à cette époque de sa vie).
La superstition en faveur de l’antiquité nous fait supposer que les anciens se sont toujours exprimés de la manière la plus heureuse ; notre ignorance tourne au profit du modèle et au détriment de la copie : le traducteur nous paraît toujours, non au-dessous de l’idée que l’original nous donne de lui-même, mais au-dessous de celle que nous en avons : et pour rendre la contradiction entière, nous admirons en même temps cette foule de latinistes modernes, dont la plupart, insipides dans leur propre langue, nous en imposent dans une langue qui n’est plus ; tant il est vrai qu’en fait de langues, comme en fait d’auteurs, tout ce qui est mort a grand droit à nos hommages.
Il n’y a pas de cour d’arbitrage, de société de ces nations idéales qui puisse arranger leur conflit, et on ne peut souhaiter ni même supposer, qu’un des trois disparaisse.
Si on cherche à travers tant d’éclat quel fut le bonheur des citoyens, on conviendra que les peuples, comme les hommes, ne peuvent être heureux que dans un état de calme, et loin des grands efforts que supposent de grands besoins.
Mais une telle prévision suppose chez l’auteur la connaissance approfondie des moyens techniques et, s’il a le sens inné de la scène — il ne sera jamais dramaturge s’il ne l’a pas — il n’en devra pas moins le cultiver pratiquement avec modestie et constance. […] Ainsi l’art dramatique suppose, en principe et en fait, des mœurs, une société, et, au plus noble sens du mot, un peuple. […] Ce qu’une pareille conception de l’acteur suppose d’entraînement, de probité et de culture, je ne le dirai pas. […] Il suppose une foi, une religion et la volonté ferme chez celui qui en est le bénéficiaire d’édifier sur elles son art.
On peut alléguer deux choses à la décharge d’Homere : la premiere, que dans les tems de ténebres où il vivoit, il n’a pû avoir des idées saines de la divinité, et que, quelque esprit qu’on lui suppose, il n’a pû éviter absolument la contagion des erreurs et de l’absurdité du paganisme : la seconde, qu’au travers de cette nuit épaisse, il n’a pas laissé d’entrevoir quelquefois le vrai, comme quand il dit que d’un signe de tête, symbole de la volonté, Jupiter ébranla tout le ciel ; et qu’il compare ailleurs la vitesse de la course de Junon à la rapidité de la pensée. […] La preuve de ma pensée, c’est que la plûpart des gens qui ne connoissent point Achille par l’iliade, et qui sur une fable plus connuë, l’imaginent invulnérable, au talon près, trouvent ridicule qu’on le mette à la tête des héros : tant il est vrai que l’idée de valeur suppose toujours celle du danger. […] Je n’entends pas par expressions équivalentes, les tours et les termes françois qui paroissent le mieux répondre à de certains tours, et à de certains termes grecs ; car je suppose, comme on le doit sur le témoignage de la Gréce florissante, que les tours et les termes d’Homere sont presque toûjours les plus beaux de sa langue, au lieu que les tours et les termes françois qui y répondent, ne sont pas de même les plus beaux de la nôtre. […] Il n’est pas bien sûr qu’Homere y ait pensé ; mais quoi qu’il en soit, j’ai tâché que cette vérité se sentît dans mon ouvrage ; je l’ai même établie dès la proposition, en disant que la colere d’Achille lui fut funeste à lui-même, aussi-bien qu’aux grecs (ce qu’Homere auroit dû faire, s’il avoit eu le dessein qu’on lui suppose) et après avoir ainsi préparé l’esprit à la vérité morale dont il doit s’instruire, j’ai dégagé le poëme de ce qui pourroit l’en distraire dans la suite : en un mot, je n’ai été plus court, qu’afin de dire plus nettement ce qu’on prétend qu’Homere a voulu dire.