Quand vous avez donné à la société votre science, votre industrie, votre travail, votre argent, vous réclamez votre payement en jouissances du corps, de la raison et de l’imagination. […] Les affinités chimiques sont la raison pour laquelle la nature ne peut pas commettre de fautes dans l’arrangement de ces tons ; car, pour elle, forme et couleur sont un. […] Cette année-ci m’a donné raison. […] Les purs dessinateurs sont des naturalistes doués d’un sens excellent ; mais ils dessinent par raison, tandis que les coloristes, les grands coloristes, dessinent par tempérament, presque à leur insu. […] Faute ridicule pour deux raisons : d’abord la poésie n’est pas le but immédiat du peintre ; quand elle se trouve mêlée à la peinture, l’œuvre n’en vaut que mieux, mais elle ne peut pas en déguiser les faiblesses.
N’est-ce pas l’influence des raisonnements de notre âge qui a refroidi les tableaux offerts à sa raison suprême, et substitué la métaphysique des maximes au mouvement des caractères ? […] C’est pourquoi cette grande épopée, recommandable par tant de raisons, l’est surtout par la coordonnance des mœurs idéales que Milton y a créées. […] Ce n’est pas la seule fois que le génie eut raison contre la critique, et se dirigea mieux en s’écoutant lui-même. […] Sont-ce les arguments de la raison humaine qui l’aideront à les constater ? […] À plus forte raison, dans les arts et la poésie, les exemples n’accroissent pas le pouvoir de l’invention au-delà du vrai beau qu’accomplit un génie suprême.
À chacun son règne, à chacun son sceptre ; la comédie a ses causes, la critique a les siennes ; pas un livre et pas une censure de ce livre qui n’eût sa raison d’être. […] s’il n’est pas défendu à la critique d’indiquer le sommeil d’Homère, à plus forte raison il lui est permis de se brûler les mains (elles n’ont pas de manchettes) pour tirer du néant quelque brouillon qui va périr. […] Sganarelle poussé à bout par ce bon conseil, qu’il a imploré avec tant d’instance, met en avant des raisons sans réplique. — Il est résolu de se marier […] On disait, de son temps, qu’Alceste c’était M. de Montausier, M. de Montausier répondait que, s’il était vrai, Molière lui avait fait trop d’honneur ; M. de Montausier avait raison. […] Avec quelle dignité il gourmande les défauts de la personne aimée, et comme il se représente lui-même, tel qu’il était à son dire : Ne se servant de sa raison que pour mieux connaître sa faiblesse !
Pour une raison commerciale, la même qui lui fait exagérer ses sentiments afin qu’ils prêtent à des développements plus longs. […] Les femmes se vantent — et avec raison depuis que nous votons — de nous être supérieures en moralité. […] Comme le poète, elle aura tort devant la réflexion équitable, raison devant notre émotion. […] Mais, critique candide, je persiste à chercher dans les livres loués la raison des louanges. […] Il a raison : les définitions géométriques sont génératrices ; les définitions fines sont annihilatrices.
Or, cette raison vous déshonore puisqu’elle rend évidents le mensonge de votre athéisme et le charlatanisme pervers de votre enfantillage éternel ! […] L’auteur des Origines du Christianisme a raison de ne pas s’en montrer dédaigneux. […] Pour cette raison, il n’y eut jamais de moine mendiant à qui l’action de tendre la main ait moins coûté. […] D’ailleurs, il y a une autre raison. […] Trois raisons fortes pour que les Français du dix-neuvième siècle le mettent dans leur paradis de statues.
. — Sans doute il a manqué là une belle occasion de mourir, mais la raison qui la lui a fait manquer est bien simple : un mort ne peut pas courir à la mort. […] Il pouvait s’en aller en Allemagne comme les autres ; elle fut la première à lui écrire : « Tu as eu raison de t’évader. […] Halévy, et il aurait raison, car le charme et la grâce ne sont pas tant à dédaigner. […] Ajoutons qu’il présente de plus un intérêt spécial pour les bibliophiles, en raison des soins qui ont été apportés à son exécution. […] La raison de l’humanité est plus forte que celle de Philinte, le cœur d’Alceste ne vaut pas le cœur de l’humanité.
Alors, lentes d’abord, indécises comme une aube, les raisons sourdirent. […] Ils vous entreprennent d’abord par le raisonnement, et trouvent des raisons inouïes, des raisons auxquelles on est quelque fois sur le point de se laisser prendre, quoiqu’on sache pourquoi et comment ils se trouvent là ! […] Je mets des épithètes gracieuses sur tes traits, mais est-ce une raison ? […] La première fois que je fus le témoin d’une pareille horreur, je pensai perdre la raison, de panique, de saisissement. […] Elle a eu raison, la pauvre femme.
Pierre Veber insiste avec raison. […] Les raisons de M. […] Hervieu regarde ses contemporains et il a raison. […] André Hallays préférait Munich et nous disait — trop rarement — les raisons de sa préférence. […] Cela, pour beaucoup de raisons, qui seraient trop longues à énumérer, car la matière est infinie.
La raison en est simple ; l’édifice a beau être défectueux, il offre un abri. […] C’est ce qu’on peut appeler, avec raison, le paiement de nos dettes avec l’argent des autres. […] Shakespeare s’était donc bien jugé, et la mort, qui approchait rapidement, ne lui donna que trop raison. […] Il y a un vrai plaisir à rendre cette justice au pauvre Laurence ; on a tant de raisons d’être sévère pour lui ! […] Nous ne savons rien des raisons qui poussèrent Sterne à sortir d’un repos qu’il avait gardé jusqu’à l’âge de cinquante ans.
La fin de Don Quichotte nous montre Cervantès donnant raison à son chimérique et si noble héros contre le grossier bon sens de Sancho Pança. […] Les raisons de croire qu’il vous donne, il se les donne à lui-même. […] « Humiliez-vous, raison impuissante. […] Au nom de quoi les arts, si Pococurante a raison dans ses dégoûts, écœuré de Raphaël et d’Homère ? […] C’est une raison de plus pour ceux qui restent de méditer cette vie intellectuelle de Barrès et son enseignement.
M. de Lisle eut raison. […] J’ai des raisons de croire qu’il ne connaissait que celles-là. […] Enfin, continuons d’espérer en la raison, et croyez à ma vive amitié. […] Il a raison. […] — Chansonnier, vous avez raison !
L’hexamètre, il s’y ébat en toute liberté octroyée ou prise, mais en toute raison inébranlable. […] Aussi bien j’ai une raison, au fond, d’en agir ainsi pour aujourd’hui. […] Et j’ai pourtant tant à sortir pour tant de raisons excellentes et autres ! […] Eut-il raison ? […] Mais tout passe, et ce délicieux séjour devait prendre fin, pour des raisons que je me rappelle assez vaguement.
Le reste est connu, et l’on a raison de dire avec M. […] on ne peut avoir longtemps raison contre les ours nos despotes. […] Vous et mon oncle, mon oncle et vous, vous mériteriez que je vous répondisse : Vous avez raison. […] J’aimerais l’insertion pour la raison même pour laquelle vous ne l’aimez pas. […] Le constituant, comme de raison, l’attaquait, mais sans raison lui refusait de grands talents.
Ils auraient raison, si la définition devait se faire ici comme dans les sciences mathématiques et physiques, par certains attributs statiques que l’objet défini possède et que les autres ne possèdent pas. […] Les premières sont proprement plastiques, destinées à refaire les tissus, — encore qu’elles puissent, en raison du carbone qu’elles contiennent, devenir énergétiques à l’occasion. […] Chaque espèce aurait sa raison d’être, sa fonction, sa destination. […] En quoi ils auraient raison, si le point de vue où nous nous plaçons dans le présent chapitre devait être notre point de vue définitif. […] De sorte qu’en dernière analyse l’homme serait la raison d’être de l’organisation entière de la vie sur notre planète.
Cette première difficulté levée, c’est, selon nous, dans la nature de la sensibilité et de la volonté qu’on doit chercher les raisons les plus profondes de la conception de la durée ; c’est par son rapport à la sensibilité et à l’activité motrice que chaque représentation, chaque idée est une force psychique, et c’est parce qu’elle est une force en ce sens qu’elle peut, nous allons le voir, produire la conscience du temps. […] Quant à l’ordre dans lequel les souvenirs se disposent et se réveillent, il est, selon nous, déterminé surtout par des raisons d’intensité. […] C’est donc avec raison que nous faisons du temps une forme de l’appétition et non de la représentation. […] S’imaginer que l’astronome eut voulu ce Voyage en vertu de raisons toutes mécaniques, alors même que l’idée du temps et de l’éclipse future n’eût point existé dans sa conscience, c’est la plus gratuite des hypothèses. […] C’est donc « au moyen de la sensibilité que des objets nous sont donnés, et elle seule nous fournit des intuitions » (Critique de la Raison pure, t. 1.
Mais certains états de l’âme nous paraissent, à tort ou à raison, se suffire à eux-mêmes : telles sont les joies et les tristesses profondes, les passions réfléchies, les émotions esthétiques. […] Si le plaisir et la douleur se produisent chez quelques privilégiés, c’est vraisemblablement pour autoriser de leur part une résistance à la réaction automatique qui se produirait ; ou la sensation n’a pas de raison d’être, ou c’est un commencement de liberté. […] Mais les mouvements automatiques qui tendent à suivre l’excitation subie, et qui en constitueraient le prolongement naturel, sont vraisemblablement conscients en tant que mouvements : ou bien alors la sensation elle-même, dont le rôle est de nous inviter à un choix entre cette réaction automatique et d’autres mouvements possibles, n’aurait aucune raison d’être. […] Delbœuf a été de choisir un cas particulier où la conscience parût donner raison à Fechner, et où le sens commun fût lui-même psychophysicien. […] Que si, pour couper court à toute question de ce genre, on distingue deux espèces de quantité, l’une intensive, qui comporte seulement le plus et le moins, l’autre extensive, qui se prête à la mesure, on est bien près de donner raison à Fechner et aux psychophysiciens.
Chercher la cause et la raison des choses, trouver leurs lois, le tente, et là où d’autres passent avec indifférence ou se laissent bercer dans la contemplation par le sentiment, il est poussé à voir au-delà et il pénètre. […] … Modérez-vous sur les choses indifférentes de la vie, et vous parviendrez à être modéré sur les choses importantes… Et pour conclusion finale : Ceux qui nous connaîtraient bien comprendraient la raison des inconséquences de Jean-Jacques Rousseau. […] Cousin a remarqué que ce qui manque à la philosophie de M. de Biran, où la volonté réhabilitée joue le principal rôle, c’est l’admission de l’intelligence, de la raison, distincte comme faculté, avec tout son cortége d’idées générales, de conceptions. […] Dès l’abord, dans la psychologie de ceux-ci, on distingue sensibilité, raison, activité libre, et on suit chacune séparément, toujours occupé, en quelque sorte, de préserver l’une de ces facultés du contact des autres, de peur qu’on ne les croie mêlées en nature et qu’on ne les confonde. […] Ampère, et lui fit ajouter à ce sujet une foule de raisons et d’analogies curieuses, qui se trouvent consignées au tome second des Annales des Sciences naturelles 123.
Si bien qu’en cet âge de trouble et de misère, l’Université, sous son vêtement ecclésiastique, sous les privilèges de ses clercs et de ses docteurs, abritera la raison indépendante, pour lui permettre d’atteindre le temps où elle pourra jeter bas la défroque scolastique et se risquer hors de la rue du Fouarre ou du Clos-Bruneau. […] Charles VI aussi les lisait dans ses moments de calme raison. […] Ils émancipent, éclairent la raison humaine. […] Oresme a fait encore un Traité des monnaies, où sans déclamation, par bonnes et solides raisons, appuyées sur l’amour du bien public, il condamne fortement les rois et princes qui les altèrent : il pose très nettement à ce propos la limite des droits du roi, mettant au-dessus de sa volonté l’intérêt de la communauté, qu’il a charge de procurer. […] Pour les poètes, il avait peut-être raison ; pour les orateurs, il avait tort.
Crébillon, d’ordinaire si incorrect, et qui semble recevoir ses mots de la rime, les a tirés cette fois de son cœur et de sa raison. […] Veut-il justifier son théâtre, ces développements, ces dialogues deviennent des « conversations trop longues », que les étrangers ont raison de reprocher au théâtre français. […] Si nous n’avons pas le plaisir de voir la passion se former au fond du cœur de ses personnages, croître et s’exalter par sa lutte même avec l’intérêt ou le devoir, Se servir de l’esprit, de la raison, de la bonne foi même, pour se justifier, nous voyons des actions qui se précipitent, des péripéties imprévues, des coups d’épée qui tranchent les situations. […] Nous voulons bien que les héros du théâtre aient plus d’esprit que nous, que leur sensibilité soit plus profonde, leur imagination plus riche, leur raison plus hardie que la nôtre ; qu’ils soient les premiers, mais les premiers parmi leurs pareils. […] Il n’était point incapable de politique ni d’affaires ; il avait beaucoup de cet esprit qu’il a si bien défini : Esprit, raison qui finement s’exprime.
Leur laideur la choque bien un peu, mais sa haute raison contient sa répugnance, elle les apostrophe sans mépris. […] Sa raison perçante scrute leurs ténèbres ; elle y discerne du bien mêlé à du mal, des excès à corriger dans une puissance qu’il faut maintenir. […] C’est une lutte admirable que celle de cette raison sereine contre cette démence forcenée. […] » — Sans s’irriter, Pallas leur laisse entendre pourtant qu’elle est la plus forte : on sent qu’elle aurait envie, à ce moment-là, de leur rendre la raison, comme elle fit pour Hercule, furieux, en leur jetant une pierre à la tête. […] L’hérédité du châtiment abolie, la chaîne brisée entre le destin du père et le sort du fils ; la responsabilité qui enveloppait aveuglément toute une race pour le forfait d’un des siens, restreinte à la personne du coupable ; la peine du talion, quelquefois inique quand elle égalise, toujours atroce quand elle excède, définitivement supprimée ; l’expiation rituelle qui implique le repentir, remplaçant l’expiation du sang ; le motif ajouté à la faute dans les considérations du jugement porté, et l’allégeant lorsqu’il l’atténue, de son poids mortel ; tels sont les effets de l’arrêt d’Athènes inspiré par la raison de Pallas.
Il avait eu raison, le grand homme insulté, d’écrire sur ses poëmes cette fière et sombre dédicace : Au temps De son blasphème, il n’en fut plus question ; ce blasphème l’avait fait mourir en exil, c’était bien, c’était assez ; il fut comme non avenu. […] Musgrave a probablement raison, car les Euménides étant une pièce fort religieuse, les prêtres avaient dû la choisir pour l’accuser d’impiété. […] L’Égypte, le sentant avec raison colosse et un peu égyptien, lui décerna le nom de Pimander, qui signifie Intelligence supérieure. […] Cela dit, nous ne voyons aucune raison pour casser le verdict de l’histoire, nous adjugeons au calife la fumée des sept cent mille volumes d’Alexandrie, Eschyle compris, et nous maintenons Omar en possession de son incendie. […] Saumaise, du reste, a raison.
mais d’un Esprit des Lois relevé de plus de généralités et d’épigrammes qu’on n’en trouve dans Montesquieu… Le grand moraliste du xviie siècle a dans ses Caractères un chapitre du costume qui, par un côté, touche au sujet traité par Balzac, et par un autre s’en éloigne, mais c’était là tout ou à peu près… Qui s’était jamais avisé de superposer des axiomes à tous ces faits, jusque-là sans raison, — on le croyait du moins, — qui constituent, dans une civilisation avancée, la vie élégante, de toutes les manières de vivre la plus difficile à fixer et à caractériser ? […] « Le dandysme — dit Balzac — est une hérésie de la vie élégante », et il a raison. […] En ceci, l’habile éditeur a eu raison. […] Il a raison. […] Si donc, dans le premier de ces volumes, on trouve après La Maison du Chat qui pelote, Le Bal de Sceaux, qui est un des premiers romans de Balzac et qui sent encore sa jeunesse, et les Mémoires de deux jeunes mariées, l’un des derniers de sa maturité, et de sa maturité la plus accomplie, de deux choses l’une, et même toutes les deux : en faisant cela, les éditeurs ont interverti l’ordre prescrit par Balzac et qui avait sa profonde raison d’être, et, de plus, ils ont interverti l’ordre chronologique dans la production de sa pensée.
On a raison de bannir la galanterie ; rien ne détruit le bon amour comme le mauvais, et le cœur une fois vide d’amour devient peu sensible à l’amitié. […] Les organes matériels ne sont que des excitants ; comment créeraient-ils l’admirable ensemble de la pensée qui constitue le génie et la raison de l’homme ? […] [NdA] Ce n’est pas, dit-il, que le gouvernement de Rome soit moins animé de l’amour du bien public qu’aucun autre gouvernement de l’Europe ; mais mille raisons l’empêchent d’aller en avant avec les lumières. […] Mais toutes ces raisons de nullité disparaîtraient à la première volonté qu’il aurait d’être quelque chose ; car cet État porte en lui-même tous les éléments de prospérité.
J’étudiai néanmoins ; je lus, et c’est le résultat de ces lectures qui compose aujourd’hui la vie de Rancé. » Cette humble origine de l’ouvrage sied à l’humilité du sujet ; cette docilité de l’illustre auteur est touchante ; mais le vieux confesseur avait raison ; avec le coup d’œil du simple, il lisait dans le cœur de René plus directement peut-être que René lui-même ; il avait touché les fibres secrètes par où René était fait pour vibrer à l’unisson de Rancé. […] Le fait est (comme Saint-Simon bien informé le raconte, et je ne vois pas de raison d’en douter) que madame de Montbazon mourut de la rougeole en fort peu de jours, que M. de Rancé était auprès d’elle, ne la quitta point, lui fit recevoir les sacrements et fut présent à sa mort. […] La raison modérée a beau dire et vouloir mitiger, il y a dans les grands cœurs repentants quelque chose qui crie plus haut, une conscience qui veut se punir et ne pas être consolée à si peu de frais. […] Je ne parle pas des libelles qui coururent, mais il eut à soutenir des discussions sérieuses et dans lesquelles il ne parut pas toujours avoir raison.
Vinet en faveur de la liberté de tous les cultes, un peu antérieur, mais animé par une action si prochaine, ait été pour lui autre chose qu’une thèse philosophique où sa raison se complaisait : c’était une sainte et vivante cause ; et, à travers la surcharge des preuves et la chaîne un peu longue de la démonstration, à travers le style encore un peu roide et non assoupli, cette chaleur de foi communique à bien des parties de cet écrit, et surtout à la prière de la fin, une pénétrante éloquence. Il en faudrait dire autant, à plus forte raison, de plusieurs brochures de lui sur le même sujet, et dont une polémique de charité et de justice animait l’accent13. […] Arago, à propos des classiques grecs et latins ; et, s’il déploie dans la discussion moins de prestesse sémillante, ou de riche et poétique abandon, que nos champions de France, il y porte des raisons encore mieux enchaînées, une politesse ingénieuse non moindre. […] Vinet avait raison.
Horace, Virgile, le Tasse, sont les chefs les plus brillants de cette famille secondaire, réputée, et avec raison, inférieure à son aînée, mais d’ordinaire mieux comprise de tous, plus accessible et plus chérie. […] Je crois donc que Boileau avait raison lorsqu’il se glorifiait d’avoir appris à Racine à faire difficilement des vers faciles ; mais il allait un peu loin, si, comme on l’assure, il lui donnait pour précepte de faire ordinairement le second vers avant le premier. […] Au reste, comme nul sentiment profond n’est stérile en nous, il arrivait que cette poésie rentrée et sans issue était dans la vie comme un parfum secret qui se mêlait aux moindres actions, aux moindres paroles, y transpirait par une voie insensible, et leur communiquait une bonne odeur de mérite et de vertu : c’est le cas de Racine, c’est l’effet que nous cause aujourd’hui la lecture de ses lettres à son fils, déjà homme et lancé dans le monde, lettres simples et paternelles, écrites au coin du feu, à côté de la mère, au milieu des six autres enfants, empreintes à chaque ligne d’une tendresse grave et d’une douceur austère, et où les réprimandes sur le style, les conseils d’éviter les répétitions de mots et les locutions de la Gazette de Hollande, se mêlent naïvement aux préceptes de conduite et aux avertissements chrétiens : « Vous avez eu quelque raison d’attribuer l’heureux succès de votre voyage, par un si mauvais temps, aux prières qu’on a faites pour vous. […] Cela, au contraire, présenté disproportionnément, nous eût caché le vrai sujet, le Dieu un et spirituel, invisible et qui remplit tout. — Peu de décors dans Racine ; et il a raison au fond : l’unité du Dieu invisible en ressort mieux.
Ils les suivent servilement ou les altèrent sans raison. […] » Mais, comme je l’ai dit, le thème fondamental de la farce, c’est l’antagonisme du ménage : en ce genre, on a depuis longtemps cité, et on a eu raison de citer, la Cornette 156 et le Cuvier 157. […] Pour celui qui l’a écrite, pour ceux qui la voyaient, l’action de Patelin était une folie, et l’esprit de Patelin était la vérité même, la raison et la vie. […] Mais, et précisément pour cette raison, il ne faut pas juger du genre de la farce par Patelin qui est resté unique, qui n’a rien continué, rien commencé, que nous sachions, dans l’histoire de notre théâtre, qui par conséquent est en dehors du cours normal de son développement.
J’ajoute que c’est peut-être pendant ces dix années-là que j’ai eu raison. […] Mais, d’abord, je trouve, à tort ou à raison, plus de substance dans leur œuvre, plus de rêve et aussi de pensée chez l’un et à coup sûr, plus de passion chez l’autre. […] Mon ami avait raison de dire que, s’il me plaisait de mal parler de Hugo, je devais prendre son œuvre entière. […] On ne le peut que par des raisons étrangères à la littérature.
Une heure et quart, de trains, vers les cités savantes ; j’avais une raison. […] Le jour ainsi fait sur quelque étrangeté d’un commerce, dont l’heure de rêverie loisible au cours de leur carrière n’a pas été sans impressionner le galant homme inclus en MM. les éditeurs ; cet être de raison, je crois, se réjouira de comprendre ici précisé clairement l’embarras qui put le gêner. […] Ainsi la loi ne supprime pas l’hérédité, par la raison qu’elle ne peut, l’héritage déviant aux mains d’un tiers, ou de plusieurs exempts de titres ; mais elle se propose de l’interrompre. […] Il convient d’en parler déjà, ainsi qu’un invité voyageur tout de suite se décharge par traits haletants de témoignage d’un accident su et le poursuivant : en raison que le vers est tout, dès qu’on écrit.
L’intermédiaire de ce continu physique, susceptible de représentation, est indispensable ; parce que nous ne pouvons nous représenter l’espace et cela pour une foule de raisons. […] N’aurions-nous pas toujours pu justifier ces coups de pouce par les mêmes raisons ? […] À ce compte, on n’aurait pas non plus celle de l’espace, car, lui aussi, on ne peut pas se le représenter, au sens propre du mot, pour les raisons que j’ai dites. […] § 7. — Rôle des canaux semi-circulaires Je n’ai pas parlé jusqu’ici du rôle de certains organes auxquels les physiologistes attribuent avec raison une importance capitale, je veux parler des canaux semi-circulaires.
Voici comment il l’établit98 : Les raisons que l’on fait valoir pour accorder à ces vérités une origine particulière se réduisent à deux : elles sont à priori, elles sont nécessaires. […] « On a remarqué avec quelle admirable sûreté les hommes doués d’un esprit pratique supérieur adaptent les moyens à leurs fins, sans être en état de donner des raisons satisfaisantes de ce qu’ils font. […] Ces deux doctrines ont en partie tort et en partie raison. […] Nous sentons que nous ne sommes pas forcés, comme par un charme magique, d’obéir à un motif particulier Bien des gens ne croient pas et peu sentent dans la pratique que la causation n’est qu’une succession invariable, certaine et inconditionnelle : et il en est peu à qui la simple constance de la succession semble un lien assez fort pour une relation aussi spéciale que celle de cause à effet Ceux qui pensent que les causes traînent leurs effets après elles par un lien mystique, ont raison de croire que la relation entre les volitions et leurs antécédents est d’une autre nature.
Quiconque le voudrait prendre purement et simplement comme un homme politique, et prétendrait découvrir par des raisons de cet ordre les motifs fondés de ses variations et de ses disparates, n’en viendrait jamais à bout. […] le roi le met sur la nomination de Fouché, et, au lieu de dire ses raisons, de montrer les inconvénients et les suites, d’indiquer les moyens de se passer ou de se débarrasser de ce choix funeste, il demande d’abord à se taire ; puis il ne parle que pour dire : La monarchie est finie. […] Les adversaires, émus d’une si vive attaque, firent remarquer « que l’auteur de ces articles ne différait en rien, dans ses opinions, de tels rédacteurs de La Minerve et du Constitutionnel », et ils avaient raison. […] Ceux pourtant qui continuent d’aimer les phrases, les belles pensées détachées, les fragments spécieux de théorie, les prédictions inutiles et frappantes, les fantaisies poétiques dont on peut faire collection, trouveront amplement encore, en le lisant, de quoi se satisfaire ; mais les esprits qui demandent de la suite, de la raison, un but, quelque conséquence dans les actes et dans la conduite, savent désormais à quoi s’en tenir sur la valeur de l’écrivain éminent qui, avec de si hautes parties, n’a été en politique qu’un grand polémiste toujours personnel, et un agent lumineux de dissolution.
Voltaire en revenait à ses moutons, à sa prédilection pour les brachmanes, qu’il tenait pour plus d’une raison à opposer à d’autres sages anciens ; il faisait semblant de croire que c’était là l’idée de Bailly, laquelle était tout autre en effet, et qui dépossédait les brachmanes indiens, tout aussi bien que les sages Chinois, de la science primitive originale, pour en doter un autre peuple plus ancien et sans nom. Bailly s’en expliqua par lettre auprès de Voltaire, lequel répliqua à son tour et résista par toutes les raisons que le bon sens trouve au premier abord, et que le sien rendait si piquantes et si gaies ; il répugnait à admettre que l’âge d’or des sciences, et de l’astronomie en particulier, eût été se loger d’emblée en Sibérie : J’ose toujours, monsieur, vous demander grâce pour les brachmanes. […] Un jeune homme, fort de raisons et de vérités, a-t-il jamais fait changer l’opinion d’un vieillard ?
Sur Mme de Genlis, dont elle parle au long dans deux lettres qui ne sont pas adressées à M. de Meilhan, elle développe les raisons de son antipathie et nous explique ses sévérités. […] La raison ni les principes n’arrêtent jamais les premiers ; ils se permettent tout, et ils obtiennent tout. […] La langue du monde, telle que ces deux personnes d’une raison si charmante et leur ancienne 483 amie Mme de Maintenon la parlèrent et la firent, était le suprême de cette exquise et simple élégance où le soin disparaît dans la facilité.
Qu’est-ce qui vaut mieux en principe, pour un peuple, de se gouverner soi-même par des représentants directement élus et selon les lois de la raison et d’une opinion publique éclairée et mûrie par la discussion, de telle sorte que le bon sens triomphe invariablement après que tous auront été persuadés, ou d’être gouverné par un seul, même le plus habile ? […] Si l’on pouvait un moment avoir raison de la passion et du système qui s’identifient dans les intelligences élevées avec une idée exagérée de dignité et d’honneur, je ne demanderais qu’une chose aux esprits restés politiques ou destinés à le devenir : ne retombons pas dans la même faute qu’ont faite, sous la Restauration et sous le régime des dix-huit ans, les générations obstinées et excessives ; ne soyons pas, de parti pris, et au nom d’un principe, irréconciliables. […] Un régime où toutes nos facultés ont leur action et leur jeu, à plus forte raison leur triomphe, nous paraît aisément le plus légitime, le seul légitime.
Biot, parce que pour une raison ou pour une autre, et sans doute parce qu’il l’estimait trop accentué dans le sens philosophique, dans le sens de Condorcet dont il était fort revenu, il n’a pas jugé à propos de le recueillir dans ses trois volumes de Mélanges. […] On y voit se développer ce caractère ondoyant et complexe « avec toute la progression de ses sentiments, depuis les premiers mouvements d’une bonté naturelle jusqu’aux tristes jouissances d’un égoïsme raisonné. » Le sceptique y est combattu par de bonnes raisons, et les seules dignes d’un philosophe moderne. […] En voulez-vous la raison ?
Un changement survenu dans la direction était la raison plausible et l’excuse. […] Sans entrer ici (ce qui me conviendrait moins qu’à personne) dans aucune des questions controversées entre les savants et les théologiens des diverses communions et en me gardant pour vingt raisons excellentes d’aller m’y heurter, il est bien clair à mes yeux, comme aux yeux de tout le monde, que puisqu’il y a quatre Évangiles canoniques et non pas un seul, il y a des différences, au moins apparentes, entre ces Évangiles également reçus, et il a été de tout temps réputé utile de s’en rendre compte pour se former une idée plus exacte, plus suivie et mieux ordonnée, de la vie et de la prédication de Jésus. […] Ce qui caractérise le Discours de la montagne et les autres paroles et paraboles de Jésus, ce n’est pas cette charité qui se rapporte uniquement à l’équité et à la stricte justice et à laquelle on arrive avec un cœur sain et un esprit droit, c’est quelque chose d’inconnu à la chair et au sang et à la seule raison, c’est une sorte d’ivresse innocente et pure, échappant à la règle et supérieure à la loi, saintement imprévoyante, étrangère à tout calcul, à toute prévision positive, confiante sans réserve en Celui qui voit et qui sait tout, et comptant, pour récompense dernière, sur l’avènement de ce royaume de Dieu dont les promesses ne sauraient manquer : « Et moi je vous dis de ne point résister au mal que l’on veut vous faire : mais si quelqu’un vous a frappé sur la joue droite, présentez-lui encore l’autre.
Ajoutez que la pièce est dans la vraie mesure de l’art ; la moralité y est plutôt conclue qu’affichée ; elle reste à tirer, l’auteur ne l’impose pas ; et si l’on veut à toute force conjecturer que le jeune artiste au cœur trop faible, s’il avait écarté différemment, aurait trouvé un autre genre d’écueil dans le bonheur somnolent du mariage, comme il a trouvé sa perte sur la mer orageuse de la passion, il n’y a pas de raison absolue qui s’y oppose : vous êtes libre d’y rêver tout à votre aise. […] Un peu de prêcherie n’y messied pas, c’est accordé : il ne s’agit que d’y observer le goût, la vraisemblance, la raison, d’y entretenir l’intérêt, de n’y pas introduire l’ennui. […] Il y a une scène fort belle où Sibylle ne me paraît pas excéder la mesure du possible : c’est lorsque la duchesse Blanche, son amie, mariée par raison à un homme estimable, retrouve après des années celui que toute jeune elle préférait et de qui elle aurait aimé à faire choix, et lorsque entraînée sur une pente rapide elle se sent bien près de manquer à ses devoirs : dans son trouble, elle s’ouvre tout d’un coup à Sibylle, à cette jeune fille grave, et pour qui elle a conçu une haute estime.
On croirait qu’il a pensé au poème du Tasse, s’il n’ajoutait expressément que cette épopée, qui réunirait tant d’avantages et qui atteindrait à la perfection, serait en prose : « car l’épopée, dit-il, peut aussi bien s’écrire en prose qu’en vers. » Cervantes, par la bouche de son chanoine, a proposé là l’idée d’une sorte de Télémaque de la chevalerie, et on a quelque raison de croire qu’en composant son dernier ouvrage posthume, celui qui suivit Don Quichotte, son Persilès et Sigismonde, il s’était flatté de réaliser en grande partie cet idéal. […] « Démontrer que Gœthe s’est inspiré de Cervantes serait déjà un sujet de critique assez piquant, mais c’est une raison plus forte qui me pousse à insister sur la filiation des deux caractères. […] Certes, dans la conduite et les déportements de son Don Quichotte, de ce fou à idée fixe, Cervantes a observé suffisamment le vraisemblable, et on lui accorde, en le lisant, cette singulière et perpétuelle intermittence, chez son héros, cette coexistence bizarre d’hallucination et de raison.
Il croyait non-seulement aux anciens miracles, mais aux nouveaux : sa raison n’élevait aucune objection contre. […] Vuillart, mais par une autre raison. […] Chez Boileau il n’y avait pas lieu à un si complet retour : le vieil homme, de tout temps moins tendre, n’avait pas à revenir de si loin ni à s’anéantir absolument dans le chrétien ; le poëte ne croyait pas avoir à se repentir ni à se dédire ; il gardait le plus qu’il pouvait de sa verdeur, et se passait encore bien des boutades mordantes que sa probité et sa raison ne lui reprochaient pas.
La raison, après tout, en est simple : la haute critique, en quelque genre que ce soit, ne précède pas les chefs-d’œuvre de l’art ; elle les suit. […] Si ignorant du métier que l’on soit, à le lire avec soin, il semble en vérité qu’il ait presque toujours raison, même contre les généraux les plus célèbres. […] Ce qu’il y a d’assez piquant, c’est que Napoléon, dans son Précis des Guerres de Frédéric, tout en n’épargnant pas au roi-capitaine les critiques de détail, lui a donné raison contre Jomini sur ce point ; on lit dans les dictées de Sainte-Hélène : « Des écrivains militaires ont avancé que le roi de Prusse devait pénétrer par la Moravie sur Vienne, et terminer la guerre par la prise de cette capitale.
Quand on lui parle, on ne peut jamais obtenir de lui une réponse, l’engagement qu’il fera la chose demandée, au nom de cette raison. […] Il existe un second mode d’observation objective, plus impersonnelle encore, et ainsi plus rigoureuse : C’est l’observation Ignorante 34, vierge d’étiquette nosologique, l’exposé du symptôme pour lui-même, et non plus en raison d’un diagnostic initial qu’il s’agirait de fortifier. […] Au point de vue dramatique, le personnage d’Hamlet est double, nettement et consciemment : il y a le « fol par raison d’État et de vengeance » 35 ; il y a le mélancolique et dolent.
Ainsi donc les mêmes causes qui faisaient renaître les lettres en Italie, s’opposaient au développement de la raison naturelle. […] À côté du fanatisme existait quelquefois l’incrédulité, jamais la saine raison. […] Ils ne songeaient point à fortifier leur raison.
Ledru-Rollin, craignant avec raison qu’ils ne fussent massacrés par le peuple en allant à Vincennes, eut l’heureuse pensée de les garder jusqu’à la nuit à l’Hôtel de ville. […] Royer-Collard ne trouva pas de bonnes raisons pour défendre l’adresse, et me parut un homme qui avait voulu conserver sa popularité à un prix trop dangereux et flatter les 221 au-delà de leur droit. […] Peu de mois après, il vit que j’avais raison : le défi était porté par la Chambre, et le coup d’État qui y avait répondu avait renversé la Restauration par le gouvernement de 1830.
Mais il a de la vigueur, un enchaînement solide et efficace de raisons, et je ne sais pourquoi, quand on a ses discours du temps de la Ligue, notamment son Exhortation à la paix, ou sa Suasion de l’arrêt rendu en Parlement pour la manutention de la loi salique, on va chercher dans la Harangue de d’Aubray un modèle de l’éloquence politique du temps. […] Du Vair, faisant un traité de l’éloquence française, et des raisons pourquoi elle est demeurée si basse, blâmait le goût de vaine érudition qui gâtait tous les discours ; Pasquier s’en plaignait comme lui. […] Mais il faut noter qu’ici encore la guerre civile et l’actualité ont aidé les esprits à secouer le joug de l’érudition, et fait passer en quelque sorte l’imitation de l’extérieur à l’intérieur de l’œuvre littéraire ; la nécessité d’être lu, compris et goûté de tous a fait que les auteurs de la Ménippée, et parmi eux un lecteur royal, n’ont plus pris aux anciens que ce qu’ils ont senti être conforme à leur raison, ce qui pouvait rendre leur pensée ou plus forte, ou plus sensible, ou plus agréable aux simples Français.
En mesurant une œuvre, il se souvient de toutes celles qu’il a déjà mesurées : il porte en lui une sorte d’étalon immuable ; Il demeure le même en face des œuvres multiples qui lui sont soumises : et c’est pour cela que l’on comprend les raisons de tous ses jugements et qu’ils peuvent former un corps de doctrine. […] Il réclame pour Mme Bovary ; à plus forte raison réclamera-t-il pour Marguerite Gauthier. […] S’il adore Scribe et Dumas, c’est assurément à cause de leurs œuvres, mais aussi par la raison qu’il admire tant Gambetta (et en général tous ceux qui ont joué un grand rôle dans l’histoire) : parce qu’ils ont été forts, puissants, féconds.
Nous y chercherons une raison plus profonde. […] Cette fin lamentable des gens qui les mystifiaient ou les exaspéraient en leur parlant d’idéal, de dons inaccessibles, de vocation et de beauté intangible à leurs intelligences bornées, cette fin leur donne raison dans toute leur conception de la vie. […] Il en fera uniquement l’homme qui passe, indifférent aux lieux, aux langages et aux foules, qui passe porteur d’une âme plus pure, d’un caractère plus beau, d’une éloquence et d’une charité plus altières, l’homme qui détient le secret des lois et des méthodes psychologiques, les raisons du cœur humain, les analogies et les idées générales de la société, l’homme qui, parmi les actifs du domaine transitoire, médite les vérités permanentes et les définit à travers les fluctuations de leurs formes.
Moréas, capricieux et changeant, soucieux de ses aises, qu’il ne trouvait nulle part et qui ne s’installait dans un endroit que le temps d’y découvrir d’excellentes raisons de décamper, resta néanmoins fidèle à la Côte d’Or durant trois ou quatre saisons. […] Quand Benvenuto Cellini crucifiait un homme vivant pour étudier le jeu des muscles dans l’agonie, un pape eut raison de l’absoudre. […] C’est un métier si difficile qu’aucun autre n’a pu y réussir et qui exige une telle tension d’esprit, une telle attention de soi-même, de tous ses gestes, de toutes ses paroles, que lui-même y a laissé sa raison.
Ils veulent tous absolument que Dante soit la partie animale, ou les sens ; Virgile, la philosophie morale, ou la simple raison ; et Béatrix, la lumière révélée, ou la théologie. Ainsi l’homme grossier, représenté par Dante, après s’être égaré dans une forêt obscure, qui signifie, suivant eux, les orages de la jeunesse, est ramené par la raison à la connaissance des vices et des peines qu’ils méritent, c’est-à-dire aux Enfers et au Purgatoire : mais quand il se présente aux portes du Ciel, Béatrix se montre et Virgile disparaît. C’est la raison qui fuit devant la théologie.
Ces ressentiments extrêmes, en raison même de leur intensité, ont été pris pour modèles en la plupart des sociétés humaines. […] La même incompétence motive ses jugements : impuissant à concevoir les raisons des opinions les plus ordinaires, à ressentir les goûts les plus simples, il se prévaut de cette impuissance pour se targuer de sublimité. […] Son souci est de ne point penser selon les modes ordinaires car il ignore que les hommes ne diffèrent pas entre eux par leurs opinions qui sont marchandises communes, mais par les raisons, selon qu’elles sont superficielles ou profondes, ’grossières ou délicates, qui les persuadent de ces opinions.
Comme, au bout du compte, la raison hésite à condamner celui qui, étant mauvais et complaisant sans inquiétude pour tout ce que ses instincts l’incitent à assouvir, sourd, aveugle, insensible, fut triste cependant, puis étonné à de plus hauts appels, sut payer de sa vie sa tentative vaine d’être noblement heureux. […] Effrayé de la peur de la vie et souffrant misérablement de son horreur, pénétrant l’homme dans ses dessous farouches et douloureux, pris du triste amour de sa chair souffreteuse, ne voyant en toute transgression que le commencement du châtiment, inquiet, éperdu et aimant, obstinément attaché à débattre et à retourner le problème du mal, du péché et de la peine, interrogeant la science et violenté, dans son âme obscure et slave, par la hautaine impiété de la philosophie évolutionniste, par ces doctrines qui, extraites et résumées du cours des astres, du choc des atomes, du sourd essor de la substance organique, puisent dans leur origine matérielle une inhumaine dureté et font au ciel qu’elles mesurent et dans l’âme qu’elles analysent un épouvantable et clair vide, frémissant du tranquille déni qu’elles opposent au problème final de toute méditation irréaliste — le but et le sens de la vie, — et finalement repoussé par les sèches raisons dont elles interdisent la pitié, l’aide aux faibles, aux malades, aux méchants, par la nécessité de ne point intervenir dans la lutte de tous contre fous, qui est à la fois la loi du monde vivant et la source même de ce qui nous pousse à la violer, — Dostoïewski s’est violemment rejeté en arrière ; sortant de toute église comme de tout enseignement, maudissant toute intelligence, se contraignant à croire ce qui console non sans trembler de la peur tacite d’être déçu, il a rivé ses yeux sur l’Évangile, il s’est prosterné pleurant sur la face pleurante d’un Christ populaire, en une agonie de pitié, de douleur, d’angoisse, d’effroi, de fou désespoir et de tremblante supplication aussi tragique en sa clameur que les affres contenues de Pascal. […] Il renia son esprit, abjura sa raison, exalta la folie, l’idiotie, l’imbécillité, la candeur des idiots et la bonté des criminels ; il devint mystique, l’on a vu par quelle angoisse, et avec quelle ferveur.
En général, pour les métaphysiciens, l’âme était considérée, non comme un sujet, mais comme un objet, objet de raison pure, non des sens, mais toujours conçu et aperçu du dehors, \ non du dedans. […] Entre la substance abstraite de l’âme et la substance abstraite du corps, ils ne voient aucune différence, et ils ont raison ; mais l’esprit est tout autre chose, et c’est ce qu’ils n’aperçoivent pas. […] La vie future est l’objet de la foi et de l’espérance, non d’une vision directe : de grandes raisons morales, de solides inductions rationnelles, viennent à l’appui des pressentiments naturels de l’âme ; mais l’expérience intérieure est muette sur cet anxieux problème, et, si l’induction et l’analogie nous autorisent à affirmer la permanence de notre être, nulle induction, nulle analogie, ne nous permettent de nous représenter sous une forme quelconque cet état futur de notre être dans des conditions d’existence absolument différentes de celles que nous connaissons.
Si tu ne t’adresses jamais qu’à un polisson de dix-huit ans, tu as raison, mon ami, continue à faire des culs et des tétons ; mais pour les honnêtes gens et moi, on aura beau t’exposer à la grande lumière du Salon, nous t’y laisserons pour aller chercher dans un coin obscur ce Russe charmant de le Prince, et cette jeune, honnête, décente, innocente marraine qui est debout à ses côtés. […] Sans cette balance rigoureuse, selon que l’enthousiasme ou la raison prédomine, l’artiste est extravagant ou froid. […] C’est la force motrice de la machine qui, semblable à celle qui retient les corps célestes dans leurs orbes et les entraîne, agit en raison inverse de la distance.
Pour toutes ces raisons, qui sont des lois dans la logique inflexible de nos organisations, Gustave Droz aime son enfant énergiquement, je n’en doute pas ! […] Si, par exemple, il enlevait son Bébé du livre où il se trouve, s’il le publiait à l’écart de la mauvaise compagnie du Monsieur et de la Madame avec lesquels il se trouve pour l’instant, le Bébé deviendrait le bréviaire des mères de famille… Ce serait une fortune pour l’auteur, un succès à la Picciola, qui eut, je crois, trente à quarante éditions, — et par la souveraine raison qu’un pareil livre est en équation avec les manières de sentir actuelles de la foule. […] Et pour bien des raisons.
Arrivé au bon manuscrit, il montre par des raisons logiques que toutes ses parties se tiennent, qu’elles forment un cours complet de dialectique, que des ressemblances de style et diverses autres probabilités indiquent que cette dialectique est celle d’Abailard, citée dans la Théologie chrétienne par Abailard lui-même. […] Puis tour à tour une suite de discussions excellentes, conduites avec une clarté parfaite et une raison soutenue, font voir que Roscelin fut le maître d’Abailard, qu’Abailard était très-ignorant en mathématiques, qu’il ne savait pas le grec, qu’il ne connaissait tout au plus de Platon que le Timée dans la version de Chalcidius, qu’il ne connaissait d’Aristote que l’Organum, et de l’Organum que les trois premières parties traduites par Boèce, et qu’ainsi la philosophie scolastique est sortie d’une phrase de Porphyre traduite par Boèce. […] Au reste, le jeune homme suivit tous les pas de son maître ; il fut comme lui théologien et philosophe ; il voulut comme lui allier la raison et la foi ; il accabla de superbes paroles les matérialistes qui commençaient à lever la tête ; il aima la liberté pour lui-même, et défendit contre Rome les privilèges français, qui étaient les siens.
Il y avait sans doute une autre manière plus rigoureuse, plus analytique et scientifique de traiter ce sujet de l’influence de la philosophie sur la législation ; c’eût été, dans une sorte de dépouillement des écrits des philosophes, de dénombrer les propositions essentielles le plus applicables à la société selon l’ordre religieux, civil ou politique ; de suivre la fortune positive de ces propositions diverses depuis leur mise en circulation jusqu’à leur avènement régulier, depuis leur naissance à l’état d’idées jusqu’à leur terminaison en lois ; d’épier leur entrée plus ou moins incomplète dans les codes, et d’apprécier ceux-ci dans leur raison et leur mesure. […] Nous avons regretté aussi qu’en insistant avec raison sur l’importance de l’idée et de la vérité, lorsqu’on écrit, et sur la part très secondaire qu’il faut laisser aux mobiles personnels, M.
Aujourd’hui que le Globe est placé plus qu’il ne l’a jamais été depuis la révolution de Juillet sur un terrain solide et nettement dessiné ; aujourd’hui que sa nouvelle position en politique, en économie, en philosophie, en art et en religion, devient de plus en plus appréciable et notoire ; aujourd’hui enfin, pour tout dire, que le Globe est le journal reconnu et avoué de la doctrine saint-simonienne ; nous, qui ne l’avons abandonné dans aucune de ses phases, nous qui avons assisté et contribué à sa naissance il y a sept ans, coopéré à ses divers travaux depuis lors, qui avons provoqué et produit plus particulièrement ses transformations récentes ; nous qui avons suivi toujours, et, dans quelques-unes des dernières circonstances, dirigé sa marche ; qui, sciemment et dans la plénitude de notre loyauté, l’avons poussé et mis là où il est présentement, nous croyons bon, utile, honorable de nous expliquer une première et dernière fois par devant le public, sur les variations successives du journal auquel notre nom est demeuré attaché ; de rendre un compte sincère des idées et des sentiments qui nous ont amené où nous sommes ; et de montrer la raison secrète, la logique véritable de ce qui a pu sembler pur hasard et inconsistance dans les destinées d’une feuille que le pays a toujours trouvée dans des voies d’honneur et de conviction. […] Car, nous y insistons, il y a, depuis le premier numéro du Globe jusqu’au dernier, dans sa pensée première, dans le but général qu’il poursuivait, dans une portion constante de sa direction et de ses travaux, une raison profonde pour qu’il ait suivi la marche qu’il a suivie, pour qu’il ait passé par ses transformations diverses, et pour qu’il soit aujourd’hui aux mains dans lesquelles il est.
C’est une arme facile à l’usage des gens qui sont à bout de raisons ou qui ne savent pas raisonner : que de discussions où l’on voit les adversaires se jeter mutuellement leurs vérités au nez, n’avoir souci que de se noircir réciproquement, sans toucher au sujet qui est en délibération, comme s’il suffisait de déshonorer son contradicteur pour prouver qu’on a raison sur un fait particulier !
La raison est morte — morte de trop savoir, et elle s’en va où vont les mortes, aux engloutissantes vagues d’éternité ! […] quels maîtres coups de corne administrés au goût, à la raison, au sens véritable des choses !
La Comédie Française, elle-même, avait écarté Rostand à ses débuts pour la même raison qui la faisait délaisser de plus en plus nos vieux tragiques qui ont le tort, à ses yeux, de ne pas « faire recette ». […] que ce journaliste se montrait bon prophète et qu’il avait raison de nous assurer que la prochaine rencontre des nations en champ clos aurait plus de retentissement encore, Tudieu !
A plus forte raison dédaignait-il une foule d’observances modernes, que la tradition avait ajoutées à la Loi, et qui, par cela même, étaient les plus chères aux dévots. […] Non-seulement sa religion, ce jour-là, fut la bonne religion de l’humanité, ce fut la religion absolue ; et si d’autres planètes ont des habitants doués de raison et de moralité, leur religion ne peut être différente de celle que Jésus a proclamée près du puits de Jacob.
C’est l’instant où va se produire un schisme parmi les philosophes, où Rousseau va disputer à Voltaire la royauté des intelligences, où la sensibilité va s’opposer à la raison, où le courant négatif en matière religieuse va entrer en lutte avec un courant positif qui ramène les esprits vers le christianisme et les doctrines spiritualistes. […] Pour toutes ces raisons, il serait chimérique de chercher dans les divisions de l’histoire une symétrie parfaite qui risquerait de produire la même impression que de fausses fenêtres sur la façade d’une maison.
La raison de cette différence est que la littérature d’une nation est l’expression de ses mœurs. […] L’on a mis enfin dans le discours tout l’ordre et toute la netteté dont il est capable : cela conduit insensiblement à y mettre de l’esprit57. » Ce n’est pas sans raison que La Bruyère dit : L’on a enrichi la langue de nouveaux mots.
Il faut donc le dire, la Revue Contemporaine n’a pas d’autre raison d’être que la Revue des Deux Mondes ; aussi lui répercute-t-elle son image avec la plus exacte fidélité. […] Pontmartin, lequel est un mixte négatif, qui n’est pas tout à fait Gustave Planche et qui n’est pas tout à fait Janin, composé de deux choses qui sont deux reflets : un peu de rose qui n’est qu’une nuance, et beaucoup de gris qui est à peine une couleur, aurait cependant, dans l’appréciation des œuvres littéraires et de leur moralité, le bénéfice des idées chrétiennes et la facile supériorité qu’elles donnent à tous les genres d’esprit, si les partis et les relations, la politique et la politesse, n’infirmaient jusqu’à sa raison.
Il y a mandé les doctrines les plus opposées, et en vertu de sa modération, vertu moderne, et de ce style modéré qui est le style de la maison dans laquelle il juge, il a tout arrangé à l’amiable entre la Scolastique et la Philosophie, entre les ténèbres du Moyen Âge et les lumières de cet Âge-ci, entre la foi et la raison… Les esprits absolus n’accepteront probablement pas les décisions onctueuses, gracieuses et officieuses de M. […] La gloire de celui qui fut appelé l’Ange de l’école, son influence inouïe sur un temps où la foi primait encore la raison, sa préoccupation perpétuelle et absorbante des intérêts de l’Église, et jusqu’à son genre de génie, qui ne fut vraiment original que par sa souveraine certitude et la toute-puissante clarté de son orthodoxie, furent une gloire, une influence, une préoccupation et un génie, essentiellement théologiques.
Telle est la raison pour laquelle, sans doute, on lui pardonna cette aristocratie ; car tout talent est une aristocratie, et de toutes, ne vous y trompez pas ! […] Rochereuil était le fils d’un ancien conventionnel, déporté et mort aux îles Séchelles, et l’abbé Goujet — l’Aristogiton de cet Harmodius — un prêtre qui avait brûlé sa soutane au pied des autels de la déesse de la Raison.
Dans ces jugements par les armes, ils estimaient la raison et le bon droit, d’après le hasard de la victoire. […] Ces jugements inflexibles étaient nécessaires dans des temps où les héros plaçaient dans la force la raison et le bon droit, où ils justifiaient le mot ingénieux de Plaute : pactum non pactum, non pactum pactum .
En dirai-je la raison ? […] On a pensé que oui et je crois qu’on a eu raison. […] Toujours des raisons d’à côté ! […] que la rime est la raison d’être du vers français. […] Et, notez-le bien, sans raison !
Et dire que, dans ce procès, Hésiode n’avait peut-être pas entièrement raison ! […] Le philosophe, guidé par la raison naturelle, ne peut monter plus haut. […] Il avait raison, non de l’y poursuivre, mais de l’y dénoncer. […] Et puis, — je donne cette raison pour ce qu’elle vaut ! […] Rien de plus savoureux que les raisons alléguées pour justifier sa révocation.
Je crois tant de peine inutile, et la raison de cette indifférence peut, je crois, s’expliquer en quelques lignes. […] Maintenant que j’ai fini avec vous, je n’ai plus aucune raison d’en différer l’affichage. […] Lui-même a fait pressentir, un jour, la raison de cette indifférence : « Ah ! […] la raison puissante pour s’aimer ! […] Nul ne sait aujourd’hui qui eut raison ou tort, de César ou de Pompée, maîtres du monde !
Dumas sont par eux-mêmes fort intéressants, la société n’a-t-elle pas ses raisons pour les repousser ? […] On veut aujourd’hui, et avec raison, que le théâtre serre de plus près les conditions de la vie. […] La poésie n’est pas exclusive de la raison ; ce qui est poétique n’est pas nécessairement en opposition avec le réel. […] Ce n’est pas sans raison que M. […] Une autre raison qui gâte chez M.
. — Tu as raison. […] Et, en outre, Veuillot avait quelque raison de se croire personnellement insulté sous les espèces de Déodat. […] La seule raison d’être de l’un et de l’autre, c’est qu’ils se font pendant. […] — Tu as raison, répond le malheureux. […] Il en donne, lui, une autre raison : on n’épouse pas une jeune fille qu’on a compromise ; cela serait immoral.
Son Traité sur la Prudence n’annonce pas qu’il en eut beaucoup lui-même ; les pensées en sont triviales, & le style lâche & incorrect, deux raisons pour empêcher un homme prudent d’écrire.
Quand un tel juge exprime des scrupules sur Molière, c’est une raison de réfléchir. […] Elle n’a trouvé depuis dans son théâtre, ou plutôt, et c’est ici une des merveilles d’impartialité du génie, il ne lui a fourni lui-même que trop de raisons d’excuse. […] Mais cette raison toute générale ne suffit pas pour expliquer le caractère d’acharnement qu’il porta dans cette lutte depuis 1666 jusqu’au jour de sa mort. […] La raison en est belle, et c’est par là qu’il s’empêcherait des choses44 ! […] Plaît-il toutefois avec raison ?
Quelle est alors la raison de cette casuistique singulière ? […] baptême de ma raison d’être ! […] Or, la philosophie de l’Inconscient n’exalte pas la raison humaine ; elle ne lui donne pas une place très prépondérante dans la Vie. […] Réglée désormais et soumise au contrôle de la raison, sa puissance d’hallucination va se transformer en un don prodigieux d’évocation symbolique. […] L’objectivité est la raison d’être et la condition de l’Art.
D’ailleurs, c’est enfoncer le poignard dans le cœur de vos parents que de monter sur le théâtre ; vous en savez les raisons. […] Montfleury père, qui n’était que faiblement consolé de son injure et voyait bien que la pièce de son fils était mauvaise, regardait avec assez de raison sa vengeance comme incomplète. […] Aussi se tournant vers Despréaux : « Qu’est-ce que la raison avec un filet de voix, lui dit-il, contre une gueule comme celle-là ? […] Celui-ci s’en acquitta si bien et doubla, pendant le souper, l’amphitryon avec un tel zèle, que tous les convives eurent bientôt perdu la raison, tous, jusqu’au sage Boileau lui-même. […] Je vous croyais plus de mes amis. — Il a parbleu raison, dit Chapelle ; voilà une injustice que nous lui faisions.
On fait à présent peu de cas de sa Traduction de Florus, & on a raison.