Peut-être a-t-il aussi plus d’élévation naturelle ; et la mélodie de sa plainte, pour être soutenue d’une orchestration moins bruyante., moins diverse et moins riche, n’en est que plus touchante. […] amour du paradoxe, horreur naturelle, instinctive et invincible, d’être de l’avis de quelqu’un ? […] On n’est honnête homme et bien éclairé qu’autant qu’on a pu guérir les maladies naturelles de l’âme et leurs suites. […] Il était donc assez naturel qu’aux environs de 1690, après deux cent cinquante ans passés, on commençât à trouver ce régime un peu sévère, diététique, et surtout suranné. […] Il y a plusieurs théologies, il y a plusieurs philosophies ; il n’y a qu’une physique, et il n’y a qu’une histoire naturelle.
Apparente androgyne qui repousse son rôle naturel et, naïvement ou perversement, fait l’homme. […] Elle reste encore presque naturelle dans cette fonction artificielle, presque humaine dans ce bizarre métier. […] Elle ignore « la distance naturelle qu’il y a entre les idées ». […] Et j’ai regretté que ce fruit du Quercy n’eût pas gardé sa saveur naturelle. […] Elle exige qu’on impose à l’enfant « la vérité actuellement connue des faits historiques ou naturels ».
C’était chez lui le résultat naturel de son tempérament, un travers d’esprit, un manque de goût si l’on veut ; ce n’était point une prétention. […] Le christianisme est le lieu naturel de la conscience opprimée par la société. […] Le passage est franchi qui sépare les deux conceptions antagonistes du monde, la naturelle et la morale. […] Quand elle n’a d’autre Dieu que l’univers et d’autre homme que le premier des mammifères, elle n’est plus que de l’histoire naturelle. L’histoire naturelle est la toute science des époques matérialistes, et, pour le dire en passant, c’est là que nous en sommes.
Marmier renferme beaucoup de pièces pleines de grâce et de naturel.
Rien de plus naturel, après cela, que de conclure qu’une tolérance indiscrette, telle qu’ils font semblant de la solliciter pour toutes les Sectes, est aussi chimérique en exécution, que la paix universelle de l’Abbé de Saint Pierre.
Le sujet de la Comédie du Muet est tiré de Térence ; l’intrigue en est bien conduite, le comique saillant & plein de finesse, le dialogue naturel, le style agréable & léger.
Sans le surcharger ridiculement d’un sentiment froid & puérile, sans y étaler une philosophie vaporeuse, propre à faire hurler la musique ou la dénaturer, sans le parsemer de ces petits riens à prétention, qui ne sont accueillis qu’au défaut de quelque chose, il a su y répandre de l’intérêt, du naturel, de la gaieté, de la finesse, & tous les agrémens dont il est susceptible ; il a su, en un mot, y peindre le vrai caractere de la Nation, que ses Rivaux ne s’occupent qu’à abâtardir & à défigurer.
Qu’on les lise, à l’exemple de l’illustre Archevêque de Cambrai, pour acquérir cet amour de la vertu, inséparable de celui de la Religion, ce naturel, ce ton de candeur, cet air de sérénité, si rares dans tous les Ecrits, & destinés cependant à en être le plus doux charme.
Rien n’étoit plus naturel.
Ses Poésies sont plus intéressantes ; on y trouve de la finesse, du brillant, & du naturel.
On doit trouver dans les poèmes d’Homère les deux principales sources des faits relatifs au droit naturel des gens, considéré chez les Grecs.
Jonson a pris dans le commerce des anciens l’habitude de décomposer les idées, de les dérouler pièce à pièce et dans leur ordre naturel, de se faire comprendre et de se faire croire. […] Il se gouverne et gouverne ses personnages ; il veut et sait tout ce qu’ils font et tout ce qu’il fait. — Mais par-dessus les habitudes d’ordonnance latine, il possède la grande faculté de son siècle et de sa race, le sentiment du naturel et de la vie, la connaissance exacte du détail précis, la force de manier franchement, audacieusement, les passions franches. […] Ce sage mouvement final n’est pas naturel, mais accidentel ; il n’est point spontané, il est forcé ; il n’est point inné, il est acquis. […] Ceci est le point de vue analytique : à un autre point de vue, au contraire, la raison, la santé sont des buts naturels. […] Stewart : La conception à son état naturel est croyance.
Sa poésie a une ingénuité de sentiments et d’émotions qui s’attachent à des objets pour lesquels le grand nombre n’a guère de sympathie, et où il y a plutôt travers d’esprit ou habitudes bizarres de jeune homme pauvre et souffreteux, qu’attachement naturel et poétique. […] Il en garda une mélancolie, non pas vague, mais naturelle et positive ; il ne l’oublia jamais. […] Il semble avoir eu dans sa jeunesse des passions vives auxquelles ces imperfections naturelles purent mettre des obstacles. […] Virgile me semble de cette famille, il avait la rougeur prompte et la tendresse du front (frontis mollities) ; c’était une de ces rougeurs intimes qui viennent d’un fonds durable de pudeur naturelle. […] Nous n’avons rien, dans les œuvres modernes, qui réunisse ce mérite savant et ce mérite naturel.
Au rez-de-chaussée je trouvai une seule pièce d’habitation ; aux murs étaient suspendus quelques cartes et quelques gravures, et un portrait de Goethe, de grandeur naturelle, peint par Meyer quelque temps après le retour des deux amis d’Italie. […] Les thés, les soirées avec thé, les conversations avec thé, tout cela répugne si fort à mon naturel, que la seule pensée de ces plaisirs me met mal à mon aise. […] Mais ne vous imaginez pas que l’on pourrait rendre populaire ce qui est beau et naturel ; ou du moins il faudrait pour cela avoir beaucoup de temps et recourir à des moyens désespérés. […] — Ne pourrait-on pas, demandai-je, de ces explications tirer une conséquence et dire : Une créature est belle quand elle est arrivée au sommet de son développement naturel ? […] La comparaison entre les deux écrivains n’a donc, à cette époque, rien que de naturel. » 27.
Sa doctrine, c’est le renoncement complet à tout sentiment naturel, même à ceux qui passent pour nobles et généreux, aux affections terrestres, à la science, aux ambitions intellectuelles, bref, à tout ce qui ne sert pas au « salut ». […] L’ascétisme, en même temps qu’il heurte plusieurs de nos sentiments naturels, flatte nos instincts de justice et nos révoltes contre le monde tel qu’il est. […] Et les saints eux-mêmes ne sont pas fâchés sans doute de pouvoir mépriser en sûreté de conscience, par une pensée religieuse, ce que le vulgaire déteste par un mouvement naturel. […] » Elle était « naturelle », c’est entendu. […] Je n’en vois point qui ait plus adroitement administré de plus heureux dons naturels.
Et ce bonheur est possible, naturel, aisé ; nous le pouvons acquérir dans le monde présent. […] « Ayons donc devant nous la vie, dans sa réalité : et ce sera toute la religion, et nous rachèterons le bonheur naturel, dit Wagner. » Où donc est ce bonheur ? […] Renonçons les égoïsmes, nullement à la fin de nous anéantir, non par une pessimiste résignation, mais parce qu’en le renoncement est le suprême bonheur et notre naturelle destination. […] Il n’arrive pas à son âge naturel, et n’a pas une mort douce ; mais il est précipité à travers des misères morales et des souffrances physiques qu’il est seul à connaître (R. et A.). […] Nous devons chasser les besoins naturels et non nécessaires, et les besoins nécessaires, et vider nos âmes.
L’attention a joué un rôle considérable dans la sélection naturelle, pour protéger l’individu contre les influences destructives et pour lui donner le pouvoir, non seulement de s’adapter au milieu, mais d’adapter le milieu à soi. […] Si un pianiste exercé veut faire attention à toutes les notes d’une gamme rapide, il contrarie en le suspendant le jeu automatique de ses mains avec les associations inconscientes de ses mouvements ; il leur enlève au profit de sa conscience analytique une partie de l’innervation nécessaire, et la synthèse naturelle se fait mal. […] Le lien entre nos représentations n’est autre, à l’origine, que la réflexion de l’attention sur leur association naturelle dans notre conscience. […] La tendance à projeter dans l’avenir les similitudes observées dans le passé naît donc bien, comme nous l’avons dit, de l’absence de toute dissimilitude à nous connue dans les cas à venir ; elle n’est qu’une continuation et un prolongement naturel des ressemblances observées. […] Comme tout autre raisonnement, elle peut prendre la forme d’une proportion ; l’étincelle électrique et ses propriétés sont à l’électricité artificielle ce que la foudre et ses propriétés sont à x (l’électricité naturelle).
D’autres périls plus naturels l’attendaient, auxquels n’échappent guère ces fières héroïnes, et qu’elles recherchent peut-être en secret sous tout ce bruit. […] Mercure, au contraire, plaide les avantages et les prérogatives de Folie, cette fille de Jeunesse, et son alliance intime, naturelle et nécessaire avec Amour. […] Mais toutes ces critiques incontestables se taisent devant de petits tableaux achevés comme celui-ci, où se résument au naturel les mille gracieuses versatilités et contradictions d’amour : Je vis, je meurs ; je me brusle et me noye ; J’ai chaud extresme en endurant froidure ; La vie m’est et trop molle et trop dure ; J’ai grands ennuis entremeslés de joye. […] C’est qu’aussi Louise Labé, telle qu’on la rêve de loin et telle que nous l’avons devinée d’après ses aveux, demeure, par plus d’un aspect, le type poétique et brillant de la race des femmes lyonnaises, éprises qu’elles sont de certaines fêtes naturelles de la vie, se visitant volontiers entre elles avec des bouquets à la main, et goûtant d’instinct les vives élégances, les fleurs et les parfums.
Mais depuis lors, et par une loi naturelle aux esprits, laquelle a reçu chez lui une application plus prompte, c’est dans le miroir, dans l’intelligence et l’exposition des choses, qu’il s’est par degrés replié et qu’il se déploie aujourd’hui de préférence. […] Mais tout lac, en reflétant les objets, les décolore et leur imprime une sorte d’humide frisson conforme à son onde, au lieu de la chaleur naturelle et de la vie. […] C’étaient encore, dans cette correspondance, des retours de désir vers le pays natal, vers la montagne d’où il tirait sa source, et le besoin de peindre à ses amis qui les ignoraient, ces grands tableaux naturels dont il était sevré : « Qui vous dira la fraîcheur de nos fontaines, la modeste rougeur de nos fraises ? […] Nul, s’il l’avait voulu, n’aurait eu plus que lui, au service de sa pensée, de ces grandes images agrestes et naturelles.
Une convenance naturelle ; ce bon ton inné, qui n’est que le rapport juste de l’homme avec tout homme ou avec toute chose ; un langage sonore, cadencé et grave, quoique gracieux dans ses inflexions un peu lentes ; un recueillement respectueux, mais nullement bas ou servile, devant ceux qu’il écoutait ; la dignité d’un cœur libre dans la déférence d’un disciple ou d’un fils : voilà ce rare jeune homme. […] Assez d’autres, jusqu’ici, avaient fait marcher le vers sur des échasses académiques : il faut enfin le déchausser de son cothurne et de ses sandales à bandelettes d’or et de pourpre, de ses ailes aux talons ; il faut le déshabituer de ses pas en trois temps sur des planches, comme les pas de nos tragédiennes sur le théâtre, pour le faire marcher pieds nus sur la terre nue comme vous et moi, au pas naturel, musa pedestris , selon la définition si juste d’Horace. […] C’est surtout dans ce genre en dehors de tous les genres, puisqu’il est le naturel, que M. […] Cela doit être d’autant plus poétique que la poésie a négligé davantage jusqu’ici ces trésors de descriptions, de sensibilité, de naturel, de passions douces, enfouis à notre insu sous la pierre du foyer domestique, dans le jardin, dans le verger, dans la prairie, dans la vigne, dans la montagne qui borne le court horizon, dans le coin de ciel en vue de la fenêtre où se couche le soleil, où se lève l’étoile, dans l’enfant à la mamelle, dans la mère souriante, dans le père sérieux, dans l’aïeul prévoyant, dans le fils docile, dans la jeune fille rêveuse, dans la servante attachée à l’âtre, seconde mère des enfants, et jusque dans le chien nourri d’affection, qui cherche aussi souvent la tendresse dans les yeux que le pain sous la table.
Quant aux vrais principes d’une république unanime appelant toutes les classes et tous les citoyens sans exception à apporter, par le suffrage universel, leur part juste de souveraineté naturelle dans une première assemblée, pour que cette première assemblée dictatoriale régularisât à loisir les degrés divers de ce suffrage universel, pour que la souveraineté brutale du nombre, équilibrée par la souveraineté morale de la lumière et de la raison, donnât la majorité au droit général qui fait de l’intelligence une condition de tout droit humain ; je ne les répudie pas davantage. […] La seconde de ces tendances, c’est la liberté religieuse, longtemps effacée des constitutions civiles de l’Europe, et devant, selon moi, reprendre sa place naturelle, c’est-à-dire la première place, dans les indépendances de l’âme et par l’indépendance des cultes desservis par eux-mêmes, avec indemnité préalable des établissements et des individus consacrés antérieurement au culte de l’État. […] Quant au style, je ne m’en occupai pas ; j’étais sûr que les événements eux-mêmes m’inspireraient, malgré mon peu d’habitude de la prose, la clarté, l’ordre, la lumière, le naturel et même la seule éloquence de l’histoire, la sensibilité communicative qui mêle du cœur au récit. […] Un magnifique portrait au pastel, de grandeur naturelle, de Saint-Just, ce Barbaroux des terroristes, cet Antinoüs des Jacobins, s’étalait dans un cadre d’or poudreux contre la muraille entre les rideaux du lit et la porte, objet d’un culte de souvenir de jeune fille pour le plus séduisant des disciples du tribun de la mort.
Elle est plus naturelle et par conséquent plus vraie. […] Le premier prince du sang, tuteur naturel de son neveu, au lieu de se jeter entre le roi et le peuple, et de prendre la lieutenance générale du royaume, se cacha, se déclara chef des rebelles, puis roi des Français. […] Ses premiers exils en Amérique, son émigration, ses misères, même en Angleterre, avaient été subis sous l’influence des sentiments chrétiens ; les grands spectacles de la solitude, du ciel, de la mer, des forêts, des fleuves, des cascades, qui l’avaient frappé dans son voyage, étaient empreints de cette couleur ; il les avait reflétés dans Atala et dans René, ses premières ébauches ; il avait pensé, il avait rêvé en chrétien ; sa haine même, si naturelle, contre les persécutions et les martyres des croyances de sa jeunesse leur avait donné quelque chose de tendre comme les souvenirs de la demeure paternelle, de sacré comme le foyer de ses pères ; tout son cœur et toute son imagination étaient restés ainsi de la religion du Christ. […] C’est être ridicule ou fanfaron ; son génie l’empêchait d’être ridicule, il ne lui restait que de vaines fanfaronnades royalistes ; ou bien de s’allier avec les républicains alors impuissants et d’emprunter quelque fausse popularité à ses ennemis naturels.
Peut-être faut-il attribuer en partie à la contrainte et à la solitude de sa première enfance la sécheresse de son œuvre et la courte haleine de sa verse ; il fut habitué à se renfermer, et jamais une indulgente affection ne l’encouragea à laisser librement jaillir ses émotions dans leur vive et naturelle abondance. […] Il paraît que l’on n’enseignait pas encore l’histoire naturelle dans les collèges. […] À défaut de protecteurs, notre poète de vingt-trois ans trouva vite des alliés, et à défaut de frère, des amis : Furetière d’abord, esprit mordant et sensé, puis Racine, attiré vers l’homme par la pénétrante justesse de quelques observations critiques qu’on lui rapporta ; puis La Fontaine et Molière, enfin Chapelle, un homme d’esprit à qui son extrême paresse donnait le goût du naturel. […] Aux yeux de tous, et par leurs allures, leurs habitudes, leurs propos, ce sont deux bourgeois qui devraient être ailleurs : ni Voiture, ni Sarrazin, ni Saint-Amant, aucun des poètes de l’âge précédent, n’eût paru aussi dépaysé, et leur présence eût semblé naturelle dans la foule des gentilshommes qui suivaient le roi.
Être, c’est être soi ; la vertu, comme le bonheur, c’est de conserver, de concentrer, de cultiver le moi ; il faut empêcher le monde extérieur de pénétrer ce moi, de l’altérer, de le dissoudre ; et il faut développer toutes les puissances de ce moi, toutes légitimes, dès lors que naturelles. […] Mais hors de la nécessité du dialogue, elle n’est mondaine que par l’exquise distinction de son style naturel. […] Colomba, Tamunjo, Matteo Falcone, le corps du récit de Carmen, etc. ; Mérimée s’efface ; ce n’est plus qu’un scrupuleux artiste qui s’efforce à faire sortir le caractère du modèle naturel. […] Ce sont des aventures singulières, qui à la rigueur se peuvent expliquer par un concours de circonstances naturelles, qui laissent pourtant une sorte de saisissement dont on ne peut se défendre, comme devant une apparition authentique du surnaturel.
Cette impassibilité qu’on ne saurait nier, on voudrait savoir si elle est bien l’état naturel de l’âme de l’artiste. […] Là mieux que chez nous, il put sentir l’énormité indomptable des forces naturelles et les lourds midis endormeurs de la conscience et de la volonté. […] chez cette merveilleuse race, l’homme aime l’action, même quand il la sait inutile et décevante. « Laissons ces discours sur l’existence humaine, quoiqu’elle soit ce que tu la décris12 » Les durs commencements dans une terre toute neuve et qui n’était pas toujours clémente, les longues luttes entre Pélasges, Hellènes, Doriens, Ioniens, et aussi les grands cataclysmes naturels dont plusieurs de leurs mythes ont conservé le souvenir, avaient fait aux Grecs une âme à la fois active et résignée, où le plaisir de vivre et d’agir se tempérait par instants de mélancolie fataliste. […] C’est un goût naturel qui tous deux nous emporte Vers l’accomplissement de notre double vœu.
Je ne peux pas dire que le bon saint Yves ait merveilleusement géré nos affaires, ni surtout qu’il m’ait donné une remarquable entente de mes intérêts ; mais je lui dois mieux que cela ; il m’a donné contentement qui passe richesse et une bonne humeur naturelle qui m’a tenu en joie jusqu’à ce jour. […] Les études d’histoire et de sciences naturelles étaient également nulles. […] Cela nous paraissait naturel ; une seule chose excitait notre surprise. […] Tout était peuple en elle, et son esprit naturel donnait une vie surprenante aux longues histoires qu’elle racontait et qu’elle était presque seule à savoir.
Si l’âme qui vit dans cette musique est l’âme ce l’harmonieuse fraternité des peuples, c’est qu’elle est l’âme de l’homme idéal, — de l’homme absolument naturel, franc, vrai, fort et grand, et qui à la fois dans la plus parfaite manifestation de son être est beau, digne et plein d’amour, parce qu’il est artiste et parce que l’exprimer est l’objet même de toute harmonie. […] Mais en quoi consiste cette parenté naturelle des Français et des Allemands, nous autorisant ainsi à espérer qu’ils réaliseront un jour l’idéal de l’homme et du chrétien ? […] De là sortaient, après les premières rencontres avec les Romains sur les frontières du pays, maintes invasions très violentes ; c’était la suite naturelle des vieilles migrations Aryennes. […] Car c’est le sang de la plus noble espèce humaine naturelle, de la famille Aryenne, de la quelle seul peut naître l’homme idéal de l’avenir, parce que cet homme idéal représente seulement dans sa conscience morale la nature la plus noble de l’humanité.
Non point, certes, par une prédestination naturelle. […] Aujourd’hui la hiérarchie naturelle des esprits exige, dans les musiques, une hiérarchie pareille : aux simples âmes incultes la mélodie, la chanson ; à beaucoup la mélodie plus parfaite de la musique d’opéra : à quelques-unes les complexes langages des contrepoints, les nuances des accents et des timbres. […] Ces successions de quartes et de quintes, qui aujourd’hui signifient pour nous les émotions les plus étranges et nous paraissent les plus dures, elles étaient, pour les âmes anciennes, le signe des émotions les plus naturelles. […] Les mêmes émotions furent recréées dans le même langage, par les musiciens ultérieurs : modifié seulement par les lois naturelles qui avaient modifié les âmes.
Entre la psychologie et la physiologie, il n’y a pas de limites naturelles. […] Le lecteur peut rejeter cette opinion ; mais elle lui est soumise après bien des années de méditation, et avec cette hésitation naturelle à produire tout ce qui n’est pas susceptible de preuve265. » Si nous cherchons maintenant266 sous quelles divisions principales peuvent se grouper les phénomènes psychiques, nous trouverons que la classification populaire en sentir et penser, ou esprit et cœur, indique en gros les premiers groupes. […] Il n’est peut-être pas inutile de faire remarquer qu’il y a là un ensemble de faits qui pourraient servir de preuves en faveur de la loi d’évolution, et de la continuité des phénomènes naturels. […] Lewes, frit remarquer qu’il semble paradoxal de dire que la conscience sort d’une intégration d’états inconscients ; mais que ce qui embarrasse le métaphysicien est tout naturel pour un mathématicien Supposons que y soit une fonction de x ; (y représentant la sensation et x l’excitation) : la valeur de y diminuera comme celle de x ; à un certain moment on peut avoir y = o, ou même y peut devenir une quantité négative, x restant une quantité positive : c’est-à-dire que la sensation peut s’évanouir, l’excitation continuant encore à agir.
Facile et naturelle, cette poésie sort sans bouillonnement d’une source généreuse. […] Artiste enfin complet, elle peut non seulement se dire tout entière, mais encore, sans risque de tomber, sortir de son âme, créer par art des êtres qui lui sont étrangers et les agiter en gestes naturels qui lui déplaisent. […] Considéré seulement comme versificateur, Émile Boissier a le métier le plus souple et le plus vivant, le plus savant et le plus naturel, Coppée et Heredia sont, auprès de lui, des ignorants et des maladroits. […] Il ne méprise pas moins les simplistes qui se croient simples, les superficiels qui se proclament sincères, les naturistes qui s’affirment naturels.
Quand il veut tirer parti de ses talens, son style est naturel, vif, agréable, plein de force comique, & son Dialogue plein d’adresse & de légéreté.
Il a surtout une tournure de pensées, vive, naturelle, & délicate ; sa versification est douce, harmonieuse, & facile ; sa poésie, pleine d’images & d’agrémens ; sa morale est utile, sans être austere ; un peu trop voluptueuse, sans être cependant libertine ; philosophique, sans être hardie ni indécente.
Il est d’autant plus naturel d’espérer qu’il acquerra ces deux qualités essentielles, qu’il paroît avoir du goût pour les bons modeles & du zele pour les défendre.
Ses Bergeries ont un naturel, une délicatesse, une harmonie qui en fait retenir avec plaisir la plupart des Vers.
On seroit tenté de croire que son génie tient du naturel de la Salamandre, qui subsiste, dit-on, au milieu des flammes sans en être échauffée, & vient à bout de les éteindre.
Son génie est énervé sous la plume Académicienne, qui ne montre que de l’esprit où il faudroit de la vigueur, du naturel, de la simplicité, de l’élévation.
ne lui donneroient pas le droit de figurer parmi les Littérateurs qui écrivent avec le plus de sagesse & de naturel, nous nous serions fait un devoir de le placer dans notre Ouvrage, en faveur des vûes patriotiques qui ont animé ses travaux.
Watelet est, tout à la fois, Peintre & Poëte ; ses préceptes sont aussi solides, que ses descriptions sont justes & naturelles.
D’ailleurs les fautes réelles qui sont dans un tableau comme une figure trop courte, un bras estropié, ou un personnage qui nous présente une grimace au lieu de l’expression naturelle, sont toujours à côté de ses beautez.
Ce serait une occasion naturelle pour parler de l’ouvrage et de l’auteur, s’il était besoin pour cela d’une occasion, et si le nom de M. […] L’application, la fermeté et l’ordre, il portait ces qualités en tout, et il le faisait avec satisfaction, d’une manière qui lui était naturelle et facile. […] Venez y ranimer le goût des beaux vers en nous lisant les vôtres… Nos professeurs sont excellents : Cuvier, surtout, nous enchante ; il parle d’histoire naturelle comme Buffon, et appuie tout ce qu’il dit par des démonstrations si fortes, que la raison qui écoute n’est jamais choquée.
Mais, avec le temps, et en perdant soi-même de sa roideur et de sa morgue juvénile, on a rendu plus de justice à ce naturel parfait, à cette langue qui ne demande qu’à être l’organe rapide du plus agréable bon sens, qui l’est si souvent chez lui, et à laquelle, après tous les essors aventureux et les fatigues de style, on est heureux de se retremper et de se rafraîchir comme à la source maternelle. […] Je crois qu’il prévoyait moins cela alors, qu’il n’obéissait à un goût naturel, à un besoin chez lui très caractérisé et qu’ont noté tous ceux qui l’ont bien connu. […] Émile Du Bois Reymond, l’un des secrétaires perpétuels de l’Académie de Berlin, dans un discours prononcé en séance publique (1868), a traité de Voltaire dans ses rapports avec les sciences naturelles.
Cet ouvrage, qu’il était assez naturel que La Beaumelle eût désiré d’écrire, est la Vie de Maupertuis, une autre victime immortelle de Voltaire. […] En histoire naturelle, en métaphysique, en morale, il se fatigue à découvrir quelque grand principe, et il n’y parvient pas. […] Dans sa Vénus physique, qu’il a voulu faire riante, il a mêlé une pointe d’érotisme à l’observation des choses naturelles, et il a accommodé du Réaumur à l’usage de Lycoris.
Il y a, il y avait du temps de Pellisson deux sortes d’élégance et d’urbanité, soit en causant, soit en écrivant : l’une plus vive, plus naturelle, plus aisée et plus familière, plus colorée aussi, puisée dans le commerce du grand monde et de la Cour, par ceux qui y avaient été nourris et rompus dès l’enfance ; c’était celle des Saint-Évremond, des Bussy, des Clérembault, des La Rochefoucauld, des Retz ; — l’autre plus étudiée, plus formée dans le cabinet et par la lecture, ou par l’assiduité dans certains cercles illustres et par le commerce des personnages littéraires les plus qualifiés ; cette dernière urbanité est celle des Conrart, des Vaugelas, c’est celle surtout de Pellisson qui y excelle, et qui en est le parfait modèle en son temps. Si, au sortir de quelque naturel et vivant ouvrage de cette époque, aussitôt après les Mémoires du cardinal de Retz par exemple, on lit du Pellisson, on comprendra bien ce que je veux dire. […] Il y eut en France, dans la première moitié du xviie siècle, des essais nombreux de perfectionnement et de culture pour la langue, des essais naturels et spontanés de petites sociétés ou coteries grammaticales et littéraires.
On s’étonnait qu’il n’eût point suivi, en une conjoncture si considérable, son procédé naturel, qui était de chercher à concilier. […] M. de Harlay était trop courtisan et trop voué à son ambition pour avoir le sentiment de la justice ; mais il était doux, d’un naturel humain, et il dut souffrir de ces sévérités exigées en son nom et pour sa défense. […] Chez tous on distingue une grande douceur, de la finesse, un air de persuasion ; l’œil est riant, la lèvre est entr’ouverte et belle ; mais dans celui de Nanteuil en particulier, le plus naturel des trois, on sent la force, quelque chose de mâle dans la douceur, et de capable, à un moment, d’imposer, d’éblouir et de remplir les yeux.
Insuffisant aux heures décisives et trop ému pour ne pas être quelquefois dérouté, dans l’ordre naturel et régulier des choses il est un de ces hommes de bien et de lumières dont on ne saurait trop désirer que le nombre augmente, pour le bonheur et la moralité des sociétés dont ils sont membres. […] Sa correspondance avec la comtesse est sur le pied d’une grande déférence et d’un profond respect, qui a besoin cependant d’arriver et de se fixer à une sorte d’amitié : c’était pour lui, dans toute liaison, la pente naturelle. […] Elle a consenti à se taire, à attendre, à souffrir pour retourner au milieu de tout ce qui lui est cher ; mais elle a refusé toute action, toute parole qui fût un hommage à la puissance… » Tous les personnages du groupe de Mme de Staël reviennent sans cesse dans ces lettres de Sismondi et y sont présentés avec beaucoup de naturel et de vérité.
Nous y verrons un à un tous les fils dont se compose la trame la plus solide de l’histoire, le dessous et l’envers de la tapisserie ; nous apprendrons à y connaître au naturel quelques figures de diplomates guerriers, d’hommes d’État, gens d’esprit ou même écrivains originaux, que les récits du dehors et le spectacle de l’avant-scène laissaient à peine soupçonner43. […] Il était naturel qu’on l’informât du fait important qui venait de se passer au sujet du Château-Trompette. […] Quoi qu’on en pense, il restera du moins évident pour tous qu’après cet effort et ce déploiement de vigueur et de zèle pendant les six premiers mois de l’année, Montaigne avait jeté son feu ; il avait donné son coup de collier, et il se crut quitte : il retomba aisément dans cette modération naturelle, éloignée de tout héroïsme.
Ce sont des livres qui ne ressemblent pas à des livres, et qui quelquefois même n’en sont pas ; ce sont de simples et discrètes destinées jetées par le hasard dans des sentiers de traverse, hors du grand chemin poudreux de la vie, et qui de là, lorsqu’en s’égarant soi-même on s’en approche, vous saisissent par des parfums suaves et des fleurs toutes naturelles, dont on croyait l’espèce disparue. […] Le père d’Ernest était dans les ambassades ; M. de Liron trouve naturel qu’Ernest y entre à son tour : voici l’âge ; pour l’y introduire, il a songé à l’un de ses anciens amis, M. de Thiézac, qui, de son côté, se voyant au terme décent du célibat, songe que Mlle de Liron lui pourrait convenir, et arrive à Chamalières après l’avoir demandée en mariage. […] C’est, au contraire, un trait parfait et bien naturel de la part d’une telle femme en notre temps que de lui entendre dire : « Sais-tu, Ernest, que pendant ton absence et dans l’espérance d’adoucir les regrets que j’éprouvais de ne plus te voir, j’ai fait bien des efforts pour devenir dévote à Dieu ?
Mais la gaieté naturelle, une joie de force et d’innocence corrigeait bientôt la langueur ; le calme et l’équilibre étaient maintenus ; tout en redisant quelque ode rustique à la Thompson, ou en moralisant sur les passions à réprimer, elle ajoutait avec une gravité charmante : « Je trouve dans ma religion le vrai chemin de la félicité ; soumise à ses préceptes, je vis heureuse : je chante mon Dieu, mon bonheur, mon amie : je les célèbre sur ma guitare : enfin, je jouis de moi-même. » Elle en était encore à la première saison, à la première huitaine de mai du cœur. […] Elle se fâche tout bas et se pique même contre eux autant que plus tard elle en rira : « Mes sentiments me paraissent bizarres ; je ne trouve rien de si étrange que de haïr quelqu’un parce qu’il m’aime, et cela depuis que j’ai voulu l’aimer : c’est pourtant bien vrai, je te peins au naturel ce qui se passe dans mon âme. » Les lettres à Sophie, dans ces moments de délicate confidence, deviennent plus vives, plus excitées ; il s’y fait sentir un contre-coup de mouvement et d’aiguillon. […] Ce sentiment pour La Blancherie, s’il ne mérite pas absolument le nom d’amour et s’il ne remplit pas tout à fait l’idée qu’on se pourrait faire d’une première passion en une telle âme, passait pourtant les bornes du simple intérêt ; il est tout naturel que Mme Roland dans ses Mémoires, jugeant de loin et en raccourci, l’ait un peu diminué : ici nous le voyons se dérouler avec plus d’espace.
Voici pourtant une charmante pièce naturelle et simple, où s’exprime avec vague le seul genre de sentiment tendre, et bien fantastique encore, que le discret poëte ait laissé percer dans ses chants : LA JEUNE FILLE. […] De ces premières saisons de Bertrand, en ce qu’elles avaient de suave, de franc malgré tout et d’heureux, rien ne saurait nous laisser une meilleure idée qu’une page toute naturelle, qu’il a retranchée ensuite de son volume de choix, précisément comme trop naturelle et trop prolongée sans doute, car il aimait à réfléchir à l’infini ses impressions et à les concentrer, pour ainsi dire, sous le cristal de l’art.
Impulsions destructives À quoi s’acharne la colère aveugle Méfiance contre les chefs naturels De suspects ils deviennent haïs Dispositions du peuple en 1789. […] Contre tous ses chefs naturels, contre les grands, les riches, les gens en place et revêtus d’autorité, sa défiance est invétérée et incurable. […] Quand une multitude soulevée repousse ses conducteurs naturels, il faut qu’elle en prenne ou subisse d’autres.
II Dans toutes les langues, l’homme a parlé et écrit en prose des choses nécessaires à la vie physique ou sociale, domesticité, agriculture, politique, éloquence, histoire, sciences naturelles, économie publique, correspondance épistolaire, conversation, mémoires, polémique, voyages, théories philosophiques, affaires publiques, affaires privées, tout ce qui est purement du domaine de la raison ou de l’utilité a été dévolu sans délibération à la prose. […] Fénelon, l’abbé Fleury, l’abbé de Langeron, l’élite de l’Église et de la littérature sacrée suivaient Bossuet dans sa retraite de Germigny ; ils partageaient ses loisirs sévères, ils recevaient les confidences de ses sermons, de ses oraisons funèbres, de ses traités de polémique ; ils lui soumettaient leurs essais, ils s’enrichissaient de ses entretiens familiers, dans lesquels cet homme de premier mouvement était plus sublime encore que dans sa chaire, parce qu’il était plus naturel. […] Louis XIV fut charmé de l’extérieur, de la modestie, de l’éloquence naturelle du jeune prêtre.
Taine, Émile Hennequin) considèrent l’artiste comme un produit naturel de son milieu, pondant nécessairement ses chefs-d’œuvre, suivant les lois d’une obstétrique spéciale que découvre l’histoire et que formule l’esthétique, branche de la sociologie. […] La vie en société est le seul domaine où l’artiste puisse trouver des sensations dont l’expression naturelle soit l’œuvre d’art dramatique. […] Or, en face de cette vie exubérante, le théâtre eut sa place naturelle.
Taine, Émile Hennequin) considèrent l’artiste comme un produit naturel de son milieu, pondant nécessairement ses chefs-d’œuvre, suivant les lois d’une obstétrique spéciale que découvre l’histoire et que formule l’esthétique, branche de la sociologie. […] La vie en société est le seul domaine où l’artiste puisse trouver des sensations dont l’expression naturelle soit l’œuvre d’art dramatique. […] Or, en face de cette vie exubérante, le théâtre eut sa place naturelle.
Elle en est souvent l’explication naturelle et nécessaire. […] L’Europe, secouée tout entière par cette longue commotion sociale comme par un grand cataclysme naturel, y a ravivé le sentiment d’une étroite solidarité, preuve en soit « la sainte alliance » des souverains, protectrice officielle des trônes, ou bien la mystérieuse entente des aspirations populaires, visible en ces journées de 1830 et de 1848 où l’esprit de révolte, comme une traînée de poudre, court et fait explosion de capitale en capitale, visible encore aujourd’hui dans les revendications presque identiques de tous les partis socialistes. […] Au lendemain d’une guerre on remarque aisément chez un peuple vaincu cette double propension naturelle soit à calquer les usages ou les idées du peuple vainqueur soit à en prendre le contrepied.
il était né bon et juste, et Dieu lui avait donné assez pour être un bon roi, et peut-être même un assez grand roi… Qu’il y eût dans Louis XIV un premier fonds de bonté, de douceur, d’humanité, qui disparut trop souvent dans l’idolâtrie du rang suprême, Saint-Simon le reconnaît et, même en s’en étonnant, nous l’atteste ; Mme de Motteville nous le fait remarquer comme un caractère naturel du roi enfant, et plus d’une parole de Louis XIV, dans les pages sincères de sa jeunesse, nous le confirmera. […] Tout y est simple et digne de celui qui a dit : On remarque presque toujours quelque différence entre les lettres que nous nous donnons la peine d’écrire nous-mêmes et celles que nos secrétaires les plus habiles écrivent pour nous, découvrant en ces dernières je ne sais quoi de moins naturel, et l’inquiétude d’une plume qui craint éternellement d’en faire trop ou trop peu. […] Tout s’y déroule avec calme et suite dans une netteté parfaite, et qui répond tout à fait à ce que les contemporains (Mme de Caylus, Mme de Motteville, Saint-Simon) nous ont dit de cette propriété unique et de cette noblesse aisée des paroles du roi : « ses discours les plus communs n’étaient jamais dépourvus d’une naturelle et sensible majesté 57 ».
Cela m’a semblé d’autant plus naturel, que je suis à côté de plus d’un ancien ami de M. […] Poujoulat, parut en sept volumes (1833-1835), et elle offre un intérêt très varié et très doux, quoiqu’on y pût désirer plus de naturel et de familiarité encore. […] Il était ce qu’on aurait nommé autrefois un gentil esprit, narquois, un peu risqué et pourtant de très bonne compagnie, d’une élégance naturelle, bien que très négligé sur sa personne ; il avait beau se couvrir de tabac et garder au doigt sa tache d’encre, on le sentait essentiellement distingué, fait pour plaire, et ayant tout le meilleur goût de l’ancienne société.
Car l’effet émotionnel d’un livre dépend évidemment dans une certaine mesure, de la manière dont ses parties se suivent, de l’imprévu de certaines scènes, de la succession naturelle de certaines autres, de l’emploi habile de la réticence et de l’explication, du cours uni, rapide, lent, tortueux, du récit. […] Cette influence ne sera pas plus fatale à la critique scientifique qu’elle n’a empêché le développement de la physiologie, que la philosophie de Kant, en démontrant l’impossibilité de connaître les choses en soi, n’a arrêté l’essor de toutes les sciences naturelles. […] Il est pourtant un auteur, cité quelques pages plus loin par Hennequin (p. 35), Léon Dumont, qui, dans sa Théorie scientifique de la sensibilité (Germer-Baillière, 1881), réfute la distinction entre beau naturel et beau esthétique.
Nana est naturelle, tendre, grossière, écervelée, stupide. […] Et sans cesse aussi, ayant assimilé les âmes aux éléments, le romancier prête, en retour, aux forces naturelles, de sourdes et inarticulées passions ; parle de l’entêtement des vagues et du rut de la terre ; fait souffrir une machine des coups qui la mutilent ; assigne à une maison l’humeur rogue de ses locataires. […] Choisissant parmi ses semblables et dans les grands phénomèmes naturels ceux qui manifestent quelque emportement, les pétrissant de ses popres mains, servant indistinctement aux hommes et aux choses les impérieuses effluves qui sourdaient en lui, il rend colossales les âmes et les forces.
Ici l’une de ses deux théories est mise en échec par l’autre : son goût naturel, si sûr et si droit, s’est affranchi du joug de ses propres principes, ou du moins de l’un d’entre eux. […] Non sans doute, son goût naturel et pur sait bien que ce n’est pas dans la poésie de cour que Boileau est lui-même, que c’est dans la solide poésie bourgeoise, la poésie de la raison et de la conscience : là l’influence de la cour est nulle. […] Abandonner Saint-Germain pour Versailles, c’était quitter le naturel et l’historique pour le nouveau créé à froid.
Il prescrit la méthode qu’on doit garder pour cultiver ses dispositions naturelles, pour éclairer son esprit, diriger ses lectures, corriger ses essais, & se former peu à peu à l’exactitude de la composition. […] Il prit la défense des Anciens ; il soutint qu’il étoit dangereux de vouloir avoir plus d’esprit que Démosthènes & que Ciceron, qu’ Homère, que Virgile & qu’Horace ; que ces vains ornemens dont on étoit si amoureux faisoient une éloquence fardée, qui n’avoit plus rien de naturel ; enfin que l’affectation, l’obscurité, l’afféterie & l’enflure étoient incompatibles avec le beau style. […] Les préceptes sur les figures de Rhétorique lui paroissent encore plus inutiles ; parce que ces figures sont, selon lui, des tours si naturels à tous les discours humains, que l’art ne fait qu’y prêter des noms, pour faire souvenir que leur variété sert à en mettre dans les discours, ce qui se présente, ajoute-t’il, comme de soi-même à tout homme qui n’a pas une imagination froide.
Malgré cela, je ne saurais me dissimuler que l’ouvrage de Doyen n’ait l’air tourmenté, qu’il n’y ait ni naturel ni facilité dans la distribution des figures et des incidens, et qu’on n’y sente partout l’homme qui s’est battu les flancs. […] Une chose d’expression forte, un démoniaque qui se tord les bras, qui écume de la bouche, dont les yeux sont égarés, sera mieux senti de la multitude qu’une belle femme nue qui sommeille tranquillement et qui vous livre ses épaules et ses reins ; la multitude n’est pas faite pour recevoir toutes les chaînes imperceptibles qui émanent de cette figure, en saisir la mollesse, le naturel, la grâce, la volupté. […] Allez voir le tableau de Doyen, le soir en été, et voyez-le de loin ; allez voir celui de Vien, le même dans la même saison, et voyez-le de près ou de loin, comme il vous plaira ; restez-y jusqu’à la nuit close, et vous verrez la dégradation de toutes les parties suivre exactement la dégradation de la lumière naturelle, et la scène entière s’affaiblir comme la scène de l’univers, lorsque l’astre qui l’éclairait a disparu.
Beaucoup d’israélites, fixés parmi nous depuis des générations et des siècles, sont membres naturels du corps national, mais ils sont préoccupés que leurs coreligionnaires nouvellement venus fassent leurs preuves de loyalisme. […] Au fond des tranchées, en première ligne, il note que les seuls événements de son histoire « ce sont les changements de l’ordre naturel, la tombée de la nuit, la naissance du jour, un ciel couvert ou étoilé, la chaleur ou la fraîcheur de l’air. […] Chaque fois que je voyais qu’il fallait aller à la mort, je pensais à « Lui », et mon devoir m’apparaissait naturel, sans mérite.
Comme le comique est signe de supériorité ou de croyance à sa propre supériorité, il est naturel de croire qu’avant qu’elles aient atteint la purification absolue promise par certains prophètes mystiques, les nations verront s’augmenter en elles les motifs de comique à mesure que s’accroîtra leur supériorité. […] Or, l’orgueil humain, qui prend toujours le dessus, et qui est la cause naturelle du rire dans le cas du comique, devient aussi cause naturelle du rire dans le cas du grotesque, qui est une création mêlée d’une certaine faculté imitatrice d’éléments préexistants dans la nature.
Comprendre ainsi la vie, quand on est des privilégiés du sort, accorder le moins possible aux opinions vaines, s’en remettre à l’impression vraie, à la lumière naturelle ; distribuer ce qui vous est donné en surcroît ; remplir sa part d’un rôle auguste, et mener une existence ornée, mais simple ; jouir des arts, des élégances, de la nature aussi et de l’amitié, ce n’est pas seulement avoir un beau lot, ce n’est pas seulement savoir être heureuse, c’est répandre le bonheur et cultiver l’affection autour de soi. […] Charles Giraud (le jeune) a peint l’intérieur de l’atelier de la princesse, et le spirituel peintre d’animaux, Jadin, nous a rendu au naturel et avec finesse ses chiens favoris, ce qu’elle appelle sa petite Meute.
Mais que le tour de ces moindres billets est facile, rapide, agréable, d’une galanterie naturelle, d’une familiarité qui se joue aisément sous le respect ! […] M. le pasteur Gaberél, il est vrai, a conçu l’idée, si naturelle en effet, de rechercher tout ce que la Suisse et la Savoie possédaient de documents encore inconnus sur Jean-Jacques.
Je lui aurais dit : « Laissez-moi vous donner un conseil, qui surprendrait ceux qui ne vous connaissent pas : vous vous défiez trop de la passion, — de la passion naturelle ; c’est chez vous une théorie. […] le coquin a du talent » ; après Catherine, on pourra dire : « mais il a de l’esprit. » — Les défauts, quoique moindres, sont encore ceux des précédentes études, et je donnerai derechef pour conseil général à l’auteur : éteindre des tons trop bruyants, détendre çà et là des roideurs, assouplir, alléger sa langue dans les intervalles où le pittoresque continu n’est aucunement nécessaire ni même naturel ; se pacifier par places sans se refroidir au cœur ; garder tout son art en écrivant et s’affranchir de tout système ; — ne jamais perdre de vue que, parmi les lecteurs prévenus et à convertir, il y a aussi des malins et des délicats, et ne pas aller donner comme par un fait exprès sur les écueils qu’ils ont notés de l’œil à l’avance et où ils vous attendent.
La poésie alors, orale, vivante, forme naturelle et souveraine, support et enveloppe de tout, de la science, de l’histoire, de la morale, du culte, tenait au fond même de l’existence d’une race, et enserrait, comme en un tissu merveilleux, mœurs, exploits, souvenirs, les dieux et les héros d’une nation. […] Toutes les fois que cette littérature noble n’avait pas dédaigné l’autre source réelle et naturelle du fonds national, et qu’elle s’y était franchement trempée, elle y avait acquis une vie et comme une allégresse singulière, et s’était sauvée de l’affadissement.
Victor Hugo nous est une occasion naturelle d’examiner le jeune et célèbre auteur sous un point de vue assez neuf, de suivre son développement et son progrès dans un genre de composition où il débuta tout d’abord, qu’il a toujours cherché à mener de front avec les autres parties de son talent, et qu’il nous promet (le catalogue du libraire en répond) de ne pas déserter pour l’avenir. […] Le premier récit a beaucoup de simplicité : c’est une espèce de nouvelle racontée à un bivouac par le capitaine Delmar ; les commentaires plus ou moins heureux dont ses camarades entrecoupent son histoire, les interruptions du sergent Thadée, qui pourrait bien être quelque neveu dépaysé du caporal Trimm, le rôle du chien boiteux Rask, tout cela a du naturel, de l’à-propos, de la proportion.
Cela s’est déjà passé de la sorte aux autres époques de civilisation raffinée ; et du moment que la poésie, cessant d’être la voix naïve des races errantes, l’oracle de la jeunesse des peuples, a formé un art ingénieux et difficile, dont un goût particulier, un tour délicat et senti, une inspiration mêlée d’étude, ont fait quelque chose d’entièrement distinct, il a été bien naturel et presque inévitable que les hommes voués à ce rare et précieux métier se recherchassent, voulussent s’essayer entre eux et se dédommager d’avance d’une popularité lointaine, désormais fort douteuse à obtenir, par une appréciation réciproque, attentive et complaisante. […] Pour ceux-là, ils peuvent avec le temps, et sous le coup des infatigables éloges, s’égarer en des voies fantastiques qui les éloignent de leur simplicité naturelle.
Non, la statue de la Liberté n’a point l’intérêt pour base, et ce n’est pas à la philosophie de la sensation et à ses petites maximes qu’il appartient de faire les grands peuples… » Ainsi la liberté politique était invoquée en aide de la liberté morale par une sorte d’association et d’alliance naturelle qui n’était pas une confusion. […] L’inspiration première de l’éclectisme est en effet bien d’accord avec les instincts naturels et le génie propre de M.
Des scènes vraies, habiles, du comique de situation, des détails fins et de jolis mots en abondance, des endroits mêmes d’un pathétique assez naturel, tout cela monté à merveille et joué avec ensemble, remplit délicieusement deux heures de soirée, et ne laisse pas jour à la critique qui s’endort sur une agréable impression. […] C’est après tout le rôle naturel qui sied au pédantisme ignorant.
Le groupe philosophique, poétique et critique, dont les travaux et les productions forment d’habitude ce qu’on pourrait appeler le fonds de la Revue, indépendamment des portions de voyages ou de science où les faits seuls sont admis, ce groupe a une marche commune, rapprochée, sinon concertée, et constitue librement une alliance naturelle. […] Voici les préludes, qui sont, on le verra, antérieurs à l’entrée en hiérarchie du poète : Assez tarder, mon Âme, et faire violence Aux penchants naturels d’un invincible essor !
Gogol, en effet, paraît se rattacher avant tout à la fidélité des mœurs, à la reproduction du vrai, du naturel, soit dans le temps présent, soit dans un passé historique ; le génie populaire le préoccupe, et quelque part que son regard se porte, il se plaît à le découvrir et à l’étudier4. […] Le moment où le vieux Tarass apprend d’un Juif qu’Andry est dans la place et qu’il figure dans les rangs des seigneurs polonais, sa stupéfaction à cette nouvelle, ses questions réitérées, toujours les mêmes, toujours empreintes d’une opiniâtre incrédulité, ce sont là des traits naturels, profonds, et tels qu’on est accoutumé à en admirer dans les scènes de Shakspeare.
Les Fables de Gay ont de l’esprit, mais point de naturel ; et l’on ne peut jamais comparer sous aucun rapport les pièces fugitives des Anglais, leurs contes burlesques, etc., avec les écrits de Voltaire, de l’Arioste ou de La Fontaine. […] La plus féconde des idées philosophiques, le contraste des qualités naturelles et de l’hypocrisie sociale, y est mise en action avec un art infini, et l’amour, comme je l’ai dit ailleurs54, n’est que l’accessoire d’un tel sujet.
L’idée à laquelle le mot correspond exactement, a des affinités naturelles ou habituelles avec d’autres idées : chaque fois qu’elle est présente, elle tend à les rendre présents ; elle les évoque et les suscite. […] Cependant l’épithète est juste et bien appliquée : mais elle évoque des images d’animaux en bois, en plomb, en fer-blanc revêtus de tons splendidement criards, comme en ont manié tous les enfants, des formes d’hommes et de bêtes, qu’on voit dans les rues de village, pendues à des tringles, se balancer au vent et faire éclater au soleil leur luisante peinture : jamais le naturel, le vivant n’est vernissé.
Nous rencontrons d’abord la pastourelle, qui fait contraste avec la chanson : elle ragaillardissait nos aïeux de sa naturelle et saine grossièreté ; la simple franchise des amours champêtres les délassait de tant de pâles et respectueux amants qui n’osaient pas dire leur désir, ni même désirer. […] Les sentiments étaient si naturels, que les personnages finirent par être vivants : bergers et bergères devinrent de vrais paysans.
Donc, elle doit faire horreur… La femme est naturelle, c’est-à-dire abominable J’ai toujours été étonné qu’on laissât les femmes entrer dans les églises. […] Une petite sotte et une petite salope ; la plus grande imbécillité unie à la plus grande dépravation. — Le commerce est, par son essence, satanique… Le commerce est naturel, donc il est infâme », etc… Tout est de cette force.