Quand il y en eut quelques centaines, on les imprima. « L’impression » ne fut pas « l’écueil ». […] L’impression artistique ne se produit pas, ou perd infiniment de sa force. […] J’ai longtemps cru que Comte n’écrivait mal que quand il s’appliquait, dans ses écrits destinés à l’impression. […] De même, dans une fable, dans une nouvelle, dans une impression de voyage. […] D’abord se présente à lui l’impression qu’il a à propos d’un fait, puis cette impression devient une idée, puis cette idée s’étend, s’amplifie, se déploie jusqu’à pouvoir embrasser et à embrasser en effet toute une période de l’histoire de France.
Son poème s’imprime ; il a d’avance choisi les amis qui doivent en dire du bien dans les journaux ; il les consulte sur l’impression, il les cultive tous les matins. […] Il m’avait chargé, sans que je l’en priasse, de l’impression de ses Paroles d’un croyant. […] Ces esprits si fertiles et si en train à toute heure ne sont pas faits pour recevoir une impression impartiale des autres ; ils ne les goûtent qu’autant qu’ils y rencontrent leurs idées personnelles, et ils repoussent tout ce qui s’en éloigne. […] CLXXXIII Il y a des gens qui appellent rancune l’impression indélébile que fait sur une âme fière un procédé d’indélicatesse et d’improbité. […] Il faut bien de la fermeté et de l’étendue dans l’esprit pour que le jugement triomphe de ces impressions.
Pourtant l’impression reste, de puissance et de grandeur, et oui : c’est un grand poète. […] Des mots s’imposent à lui quand il veut peindre ses impressions et la couleur de ses songes ; des mots s’imposent aussi à qui veut le définir et d’abord celui-ci, déjà écrit mais qui renaît, invincible : richesse. […] Je ne parle pas de la part très importante qu’il a eue dans la difficile conquête du vers libre ; — mon impression est plus générale et plus profonde, et doit s’entendre non seulement de la forme, mais de l’essence de son art : il y a, par Francis Vielé-Griffin, quelque chose de nouveau dans la poésie française. […] Un caractère, puis la vie pèse et le caractère fléchit ; une nouvelle pesée le redresse et le dresse selon sa vérité originelle : c’est l’essence même du drame psychologique, et si le décor participe aux modifications humaines, l’œuvre prend un air d’achèvement, de plénitude, donne une impression d’art inattendu par la logique acceptée des simplicités naturelles. […] Il y a dans son œuvre plusieurs pages qui donnent un peu l’impression de beauté que l’on pourrait ressentir devant un crapaud congrûment pustuleux, une belle syphilis ou le Château Rouge à onze heures du soir.
Mais le critique, qui croit le moins possible sur parole, et que cet excès même de précaution met sur ses gardes, ne considère que les dates publiques et constatées par l’impression. […] L’orateur, sans se douter en rien de l’impression générale, et comme s’il avait apporté avec lui son atmosphère à part, comme s’il parlait enveloppé d’un nimbe, redoublait, en avançant, de complaisance visible, de satisfaction séraphique ; il distillait chaque mot, il adonisait chaque phrase. […] Droz, l’indulgent Droz, le moins épigrammatique des hommes, traduisait ainsi l’impression qu’il avait reçue de ce discours : « M. de Vigny a commencé par dire que le public était venu là pour contempler son visage, et il a fini en disant que la littérature française avait commencé avec lui. » — « On me dit que M. de Vigny a été immolé à cette séance, ajoutait un autre académicien ; pour moi, je n’ai vu en lui qu’un pontife, et rien ne ressemblait moins à un martyr. » Le récipiendaire fut quelque temps à se faire illusion et à s’apercevoir de la réalité des choses. […] Cependant il n’y eut pas moyen pour lui de se méprendre plus longtemps sur l’impression générale, lorsque des amis l’eurent éclairé de toutes parts, comme on avait éclairé autrefois M. de Noyon ; mais ici il n’y avait rien eu de prémédité, comme cela avait eu lieu pour M. de Noyon, raillé et joué par l’abbé de Caumartin75 : la seule opposition sérieuse et réelle avait été dans la contradiction nécessaire et, s’il faut le dire, l’incompatibilité d’un esprit fin, net, positif, pratique, tel que celui de M.
Ducis, vers le munie temps, écrivait à Thomas au retour d’une course dans les montagnes du Dauphiné, et plein encore de l’impression magnifique qu’il en avait rapportée : « Le poème des Jardins, dont vous me parlez avec tant de goût, avec le goût de l’âme qui est le bon, ne m’a point donné de ces émotions-là. » Un peu avant la publication et au sortir d’une séance de l’Académie où Delille avait lu des morceaux, le même Ducis écrivait : « Parlons un peu du poème des Jardins ; on ne peut pas se tromper sur le charme de la lecture. […] Enfin, grâce aux tourmentes publiques et à l’impression qui en resta sur son cœur, une inspiration réelle lui vint ; il se fit le poëte du passé, des infortunes royales, le poëte du malheur et de la pitié. […] Enfin, de Londres, où il venait de traduire en dix-huit mois le Paradis perdu, il laissa échapper une seconde édition, très-augmentée, du poëme des Jardins, et l’Homme des Champs (1800), dont l’impression était retardée depuis trois ans. […] Il ne rentra en France que deux ans après, en 1802, pendant l’impression du poème de la Pitié.
« Pendant les deux mois au moins que dura l’impression de ces quatre tragédies, j’étais à Rome sur les charbons ardents, en proie à de continuelles palpitations, et à une fièvre d’esprit que rien ne pouvait calmer. […] » Son méprisable recueil d’épigrammes grossières et d’invectives de collège, intitulé Misogallo (haine aux Français), va confirmer bientôt ces impressions antinationales. […] J’y avais une fort belle vue, un air excellent et la solitude des champs. » Il s’y occupa trois ans de l’impression de toutes ses tragédies chez Didot, le prince des typographes français, et chez Beaumarchais, à Kehl, de l’impression de tous ses sonnets très peu dignes de Pétrarque, et d’une multitude de caprices d’auteur sans mérite et de traductions qu’il recueillait comme des reliques de lui-même à léguer in extenso à la très indifférente postérité.
Balzac était digne de se comprendre ainsi lui-même et de se mesurer tout entier devant Dieu et devant sa sœur en 1820 ; il avait tout en lui : grandeur de génie et grandeur morale, immense aristocratie de talent, immense variété d’aptitudes, universalité de sentiment de soi-même, exquise délicatesse d’impressions, bonté de femme, vertu mâle dans l’imagination, rêves d’un dieu toujours prêts à décevoir l’homme…… tout enfin, excepté la proportion de l’idéal au réel ! […] Il redoutait son père comme un implacable censeur étranger à ses impressions. […] « Le voile ne tombe, malheureusement, qu’après l’impression, et, quant aux corrections, il n’y faut pas songer, elles coûteraient plus que le livre. […] « “La vivacité d’impression que mes chagrins te causent devrait m’interdire de t’en parler, mais le moyen de ne pas épancher mon cœur trop plein près de toi ?
Ne me fiant pas à mes propres lumières et à l’impression que le discours si sérieux de Cacault avait faite sur moi, je me souviens qu’avant de retourner à ma demeure, j’allai visiter le nouveau ministre d’Espagne, chevalier de Vargas, arrivé depuis peu de jours. […] « Je ne puis exprimer l’impression que me firent et cette déclaration, et l’idée de me savoir abandonné seul dans le combat. […] Ils restèrent tout ce temps dans une ignorance parfaite de l’impression produite par leur abstention sur l’esprit de l’empereur ; car, ainsi que je l’ai raconté, ils ne quittèrent pas leurs appartements, et personne n’osa les visiter. […] L’exemple de nos collègues qui, quoique sénateurs, ne voulurent pas se joindre à ce corps, mais à celui auquel ils appartenaient depuis longtemps, ne produisit sur lui aucune impression.
Telle est l’impression qui reste de la Théorie de la Terre, le premier ouvrage français où l’éloquence, comme on l’entendait au dix-septième siècle, c’est-à-dire l’art de persuader la vérité, a passé des lettres dans la science, et mis au service des vérités de l’ordre physique la grande langue employée jusqu’alors à l’expression des vérités de l’ordre moral. […] Il vaut mieux que ce qu’il fait, et la faiblesse qui le fait succomber est d’une âme tout aussi docile aux impressions du bien qu’à celles du mal. […] Il est chrétien, comme le sont la plupart d’entre nous, par le souvenir du clocher natal, moins oublié peut-être que les parents ; il l’est par tout ce que laisse d’impressions ineffaçables dans un cœur où le mal n’est pas le maître, la doctrine de l’Evangile, transmise, aux jours d’innocence, d’une pieuse mère à son fils, d’un prêtre à un enfant. […] Il reste, à quiconque lit Rollin avec candeur, non des impressions de style, mais une amitié de toute la vie pour l’homme.
Il se mêle à tous ses récits : le narré simple et objectif du fait lui est impossible ; il ne sait point l’isoler du jugement qu’il en a porté et de l’impression personnelle qui lui en est restée. […] Et, quoiqu’il semble paradoxal de soutenir la même chose pour nos langues métaphysiques, tourmentées par tant de révolutions, on peut affirmer sans crainte qu’elles ne renferment pas un mot, pas un procédé qu’on ne puisse rat-tacher par une filiation directe aux premières impressions des premiers enfants de Dieu. […] Enfin Lowth, plus insipide que tous les autres, nous fait un traité de rhétorique aristotélicienne sur la Poésie des Hébreux, où l’on trouve un chapitre sur les métaphores de la Bible, un autre sur les comparaisons, un autre sur les prosopopées, un autre sur le sublime de diction, etc., sans soupçonner un instant ce qui fait la beauté de ces antiques poèmes, savoir l’inspiration spontanée, indépendante des formes artificielles et réfléchies de l’esprit humain jeune et neuf dans le monde, portant partout le Dieu dont il conserve encore la récente impression. […] Or, que l’on mette en face l’Évangile et le recueil des apophtegmes moraux des rabbins contemporains de Jésus, le Pirké Aboth, et que l’on compare l’impression morale qui résulte de ces deux livres !
Comme l’ont dit Platon et Aristote, il n’y a probablement chez l’homme ni plaisir ni déplaisir absolument pur : les deux sentiments se trouvent mélangés à doses inégales par l’art subtil de la nature, et l’impression définitive dans notre conscience est une résultante où l’emporte un des cléments. […] Chez les animaux inférieurs, chaque partie de l’organisme semble encore jouir ou souffrir pour son propre compte, comme dans le ver coupé en deux ; chez les animaux supérieurs, il se produit une sélection et une fusion finale des impressions élémentaires qui aboutissent au cerveau. […] De même, selon Schneider, pourquoi la contemplation d’un coucher de soleil nous donne-t-elle une impression de calme et de paix ? […] Rien de plus mobile, sans doute, rien de plus relatif que les objets et les circonstances de nos plaisirs ou de nos peines : l’impression produite par le même objet sur la sensibilité « est tantôt agréable, tantôt désagréable, tantôt indifférente ; le même mets qui me plaisait tout à l’heure excite maintenant mon dégoût » ; mais, de ce que nos plaisirs et nos peines sont en relation avec une multiplicité de circonstances, a-t-on le droit de conclure qu’ils soient eux-mêmes de pures relations ?
Il se livrait à la douce impression de cette lumière matinale quand une seconde apparition de bête féroce, un lion, symbole de la violence, l’épouvante. […] Le tableau est étroit, la peinture est sobre de couleurs, et l’impression est éternelle. […] Vers que je rougirais de traduire, et que M. de Lamennais lui-même a été obligé d’envelopper d’une décente circonlocution ; des bustes sans têtes portant dans leurs mains ces têtes en guise de lanterne : Di se faceva a se stesso lucerna ; Des galeux qui se déchirent la peau en se grattant avec leurs ongles, comme le couteau qui enlève les écailles du poisson ; Antée, qui prête son dos gigantesque au poète pour lui faire franchir un fossé des enfers ; des crânes de ses ennemis qu’il empoigne par la chevelure pour les sommer de parler ; d’autres damnés qui se déchirent à coups de dents comme des tigres ; des récits sans cesse brisés qui fuient derrière vous en laissant dans l’esprit l’impression de l’horreur succédant à l’horreur ; puis tout à coup un récit qui dépasse tous les autres, au trente-troisième chant, mais celui-là horreur sublime, le supplice et la mort d’Ugolin ! […] « Quand notre âme se recueille et se concentre fortement en elle-même sous une impression de plaisir ou de douleur qui s’empare tout entière d’une de ses facultés, il nous semble que toute autre faculté en nous est absorbée, et ce phénomène réfute l’erreur de ceux qui croient qu’au-dessus de notre âme unique une seconde âme nous anime !
Jamais, jusqu’ici, on n’était arrivé à nous donner à ce point l’exacte impression de cette hallucination. […] Il n’est pas d’effet plus sûr que de gambader sur un cercueil… « C’est une tournure d’esprit vers toutes les impressions. […] Mlle Yvonne Vernon, auteur d’un émouvant, enthousiaste, lumineux et harmonieux recueil d’impressions (Terres de Lumière), a repris le roman provincial dans Claire Maret. […] L’impression est navrante et grise, comme celle de certaines pages du Flaubert de l’Éducation sentimentale.
Né dans ces massacres et grandi dans ces ruines, Audin eut pour premiers spectacles les malheurs de sa ville natale ; et les premières impressions, qui pétrissent et moulent si bien l’âme d’un homme, qu’elles en arrêtent la forme à jamais, affermirent dans l’enfant lyonnais le christianisme de sa mère, et apprirent à cet être doux, fin et candide qu’il était né et qu’il resta toujours, que la religion avait besoin, dans ce temps-là, pour se défendre, de ces doux auxquels elle a promis l’empire de la terre ! […] L’historien de la réforme en ce pays ne pouvait pas se détourner de l’état dans lequel l’anglicanisme commençait de tomber, quand il entreprenait d’en raconter l’origine, et, si le Luther et le Calvin avaient causé dans la patrie du réformateur allemand, où l’on est encore fier de lui, une impression que l’admirable candeur de l’Allemagne n’a pas cachée, que n’était-on pas en droit d’attendre d’un Henri VIII, peint tel qu’il fut, dans le pays qui en a honte, et dont l’établissement politique ne satisfait aucun sentiment religieux ? […] Pèlerin du Moyen Âge attardé dans nos mauvais jours, il voulait aller à Jérusalem, non pas pour écrire à son retour ses impressions personnelles (il n’aurait pas pour si peu tracassé la poussière des chemins), mais pour en rapporter une œuvre savante, utile à sa foi, utile surtout à l’incrédulité des autres. […] Mais ces notes, — fixés d’impression qu’il devait reprendre et féconder avec cette force de souvenir qui a peut-être plus de relief que la réalité même, — sont des ébauches trop hâtées et trop incomplètes pour qu’il soit convenable de les publier.
Si nous pouvions étirer cette durée, c’est-à-dire la vivre dans un rythme plus lent, ne verrions-nous pas, à mesure que ce rythme se ralentirait, les couleurs pâlir et s’allonger en impressions successives, encore colorées sans doute, mais de plus en plus près de se confondre avec des ébranlements purs ? […] Si les impressions de deux sens différents ne se ressemblent pas plus que les mots de deux langues, c’est en vain qu’on chercherait à déduire les données de l’un des données de l’autre ; elles n’ont pas d’élément commun. […] Mais on nous fera difficilement comprendre comment la perception visuelle du relief, par exemple, perception qui fait sur nous une impression sui generis, d’ailleurs indescriptible, coïncide avec le simple souvenir d’une sensation du toucher. L’association d’un souvenir à une perception présente peut compliquer cette perception en l’enrichissant d’un élément connu, mais non pas créer un nouveau genre d’impression, une nouvelle qualité de perception : or la perception visuelle de relief présente un caractère absolument original.
Le genre de beauté de Gabrielle une fois attesté par l’impression générale, on peut s’en rendre compte d’après ses portraits et le conclure encore plus que l’y voir à travers la raideur qui n’est que dans l’image, et sous la parure qui de loin la surcharge un peu. […] Un historien du temps a très bien rendu ce caractère conciliant, adroit et facile, qui était une des puissances de Gabrielle, et c’est un correctif nécessaire à l’impression que laisserait, sans cela, le récit un peu aigre de Sully : Le plaisir, dit l’historien Matthieu en parlant de cet amour de Henri IV, n’était pas le principal objet de ses affections, il en tirait du service au démêlement de plusieurs brouilleries dont la Cour n’est que trop féconde.
Je ne viens pas concourir comme bien l’on pense, ni anticiper non plus sur un jugement dans lequel j’entrerai très peu : je ne veux que rendre à ma manière, et comme quelqu’un du dehors, l’impression qu’a faite sur moi la lecture de Froissart, la rejoindre et la comparer à cette autre impression que m’ont produite les mémoires de Joinville.
Lorsque sa traduction parut, ils se dirent : « Voilà donc cet Homère dont on parle tant », et ils firent bientôt toutes les critiques qu’une première impression suggère quand on ne se met pas au point de vue de l’Antiquité ou qu’à défaut d’une connaissance véritable on n’est pas retenu par le respect de la tradition. […] Dans le public, l’impression de cette querelle fut plutôt à l’avantage de La Motte ; on ne jugea point du fond, mais uniquement de la manière, selon notre habitude.
Il nous en est resté une si forte impression qu’entre nous-mêmes nous n’avons jamais eu un compte en litige, et nous n’en avons jamais. […] Ce premier tableau un peu grand, qui fut celui de Corinne, devenu plus tard L’Improvisateur, lui avait coûté bien de la peine ; ce devait être sa condition de faire et son élément : « D’ailleurs, disait-il, chacun a sa manière de jouir au monde : la mienne est de me donner beaucoup de peine, ce qui naturellement doit m’occuper beaucoup la tête, l’esprit et l’âme, avantage que j’ai toujours apprécié. » Malgré l’impression de sérieux et d’élévation que font à bon droit les œuvres de Léopold Robert et la lecture de ses lettres citées par M.
À celle nouvelle, il éprouva une impression soudaine et qu’il a rendue bien énergiquement ; tout son sang se glaça, en écoutant le gentilhomme qui lui faisait ce récit : « S’il m’eût donné, dit-il, deux coups de dague, je crois que je n’eusse point saigné ; car le cœur me serra et fit mal d’ouïr ces nouvelles ; et demeurai plus de trois nuits en cette peur, m’éveillant sur le songe de la perte. » Il se représentait la scène du conseil, sa promesse solennelle de la victoire, la conséquence incalculable dont une défaite eût été pour la France, et dans ce prompt tableau que son imagination frappée lui développa tout d’un coup, cet homme intrépide retrouva la peur à laquelle il était fermé par tout autre côté. Ce qui est touchant, c’est la tristesse de M. d’Enghien, ce jeune vainqueur, lorsque Montluc l’aborda ; il avait encore dans le cœur et sur le front une ombre de l’impression désespérée qui l’avait si longtemps et si cruellement oppressé.
Quand nous voyons dans la série des lettres missives de Henri IV son voyage en Limousin, dans l’automne de 1605, pour y étouffer quelque rébellion, sa lettre écrite de Bellac au landgrave de Hesse, où il se plaint des menées du duc de Bouillon, ce chef astucieux d’une intrigante famille laquelle a eu grand besoin de Turenne pour se faire pardonner de la France tous ses méfaitsq ; quand on lit ces pièces instructives, on n’a pas encore l’impression soudaine que faisait éprouver aux hommes de sens et aux amis de leur pays le réveil de ces remuements funestes, chers à quelques ambitieux mécontents ; et c’est ce que Malherbe, si sensé quoique poète69, a rendu dans une strophe admirable de son ode, ou plutôt de sa prière à Dieu pour le roi allant en Limousin : Un malheur inconnu glisse parmi les hommes, Qui les rend ennemis du repos où nous sommes : La plupart de leurs vœux tendent au changement ; Et comme s’ils vivaient des misères publiques, Pour les renouveler ils font tant de pratiques, Que qui n’a point de peur, n’a point de jugement. […] Le marquis d’Argenson, qui avait conseillé à l’abbé ce travail, écrivait en ces termes naïfs l’impression qu’il avait reçue à la lecture : « Excellent livre, qu’on ne peut trop lire.
On conjecture que, né dans un village près de Dourdan, il fut élevé à la campagne ; car il garda toujours de la nature une impression vive qu’il a exprimée avec bonheur, et il porte à l’homme des champs, pour l’avoir vu de près à la peine, un sentiment de compassion et d’humanité qu’il a rendu d’une manière poignante. […] Attaqué avec tant de mauvaise foi et de violence, La Bruyère crut devoir répondre en faisant précéder son Discours, à l’impression, d’une Préface excellente, bien qu’un peu longue.
La passion que Charles II avait pour elle, et dont il garda l’impression profonde, pouvait seule contrebalancer son aversion pour la France. […] Sous l’empire de cette fantaisie lugubre, l’arrière-petit-fils de Charles-Quint, comme s’il eût voulu remonter tout le cours de sa race, se fit ouvrir les cercueils : celui de la reine sa mère qui fut ouvert le premier ne fit pas sur lui grande impression ; mais quand ce fut le tour de sa première femme, de cette jeune reine qu’il avait tant aimée, quand il revit ce visage altéré à peine et sa beauté encore reconnaissable à travers la mort, le coeur lui faillit, il recula en disant : « J’irai la rejoindre bientôt dans le Ciel. » — Et cette image suprême ne dut pas être étrangère à sa pensée, quand, peu après, lui le haïsseur des Français, il fit son testament en faveur de la France.
Avant de chercher à rendre l’impression qui m’est venue (par simple ouï-dire, hélas !) […] Peut-on s’étonner pourtant qu’il en ait été d’un tel talent comme de celui des improvisateurs et des orateurs ; que ce qu’on a d’elle par écrit ne la représente pas entièrement, et qu’il faille, pour être fidèle, y ajouter en idée un ensemble et une spontanéité d’impressions qui n’était que dans la personne et sur son théâtre ?
Vallot a très bien remarqué tout d’abord que l’apparence de force et de vigueur de Louis XIV en sa jeunesse tenait à ce que la bonté du tempérament héroïque de sa mère avait rectifié et corrigé en partie les mauvaises impressions qu’avait dû laisser dans l’enfant le tempérament affaibli d’un père valétudinaire ; mais cette force et cette vigueur n’étaient qu’à la condition d’éviter les excès et d’observer bien des précautions pour se soutenir. […] L’effet général, pourtant, qu’à la réflexion je tire de cette lecture, la dernière impression qui pour moi subsiste et surnage à l’égard du prince si travaillé au dedans, si distrait par ses maux corporels, qui a dû prendre si souvent sur lui, et qui a su faire si constamment, si également, si noblement son personnage public, c’est, — toutes misères tant royales qu’humaines mises en compte, — c’est encore le respect.
On comprend bien que c’est moins encore pour donner une idée exacte du livre que je me suis appliqué à cette longue analyse, que pour constater au fur et à mesure la suite de mes impressions et me donner à moi-même, en les recueillant, le droit d’exprimer mon jugement sans mollir, en toute fermeté et sécurité. […] Je sais que des amis d’un esprit très-distingué lui ont dit le contraire et lui ont précisément reconnu, en tout ceci, le don et le génie de l’intuition ; mais je ne comprends pas bien à quoi ce mot s’applique, là où toute vérification et tout contrôle sont à jamais impossibles, et je ne puis parler que selon les vraisemblances et d’après mes impressions, d’après celles également de bien des esprits ayant même mesure que moi et même niveau.
C’est d’un effet singulier à première vue, et ces messieurs ne se doutent pas de l’impression que cela produit sur le spectateur honnête. […] Aussi je ne viens pas le recommander ; je me contenterai seulement de dire à ce premier jour, et après l’avoir rapidement parcouru et dévoré, que l’impression qui en résulte est de celles qui ne peuvent être que bonnes et salutaires au cœur et à l’esprit.
Ni belle ni laide, laide même, si l’on veut, mais assez agréable d’ensemble, ce fut l’impression générale qu’on eut d’elle à première vue, et chacun se louait de sa modestie, de sa raison, de sa bonté. […] Voltaire était encore à Versailles, et il nous a rendu cette impression, comme il sait faire : « Il y avait ce jour-là spectacle à la Cour : on jouait Britannicus.
Après avoir été contemporains ou fils des contemporains, après avoir passé nous-mêmes par les passions ou les suites d’impressions successives, par les flux et reflux des jugements contradictoires, complétons-nous jusqu’à la fin. […] La conclusion, ou du moins l’impression qui ressort du tableau tracé par M.
Tout cela, d’ailleurs, est si variable, si peu certain de jugement et d’impression, qu’on a dû hésiter longtemps. […] La conclusion de tout ceci est triste ; un grand trouble, en achevant ce volume et en repassant mes propres impressions, m’a saisi ; on doute de soi ; les notions du beau et du vrai se confondent : y a-t-il telle chose qu’un art, et n’est-ce pas chimère que d’y croire et de s’y dévouer ?
Sur ce sujet qui nous semble de notre ressort et de notre métier, et sur lequel, à force d’y avoir repassé, il nous est impossible désormais de retrouver notre première impression, soyez sûr que cet esprit bien fait, nourri dans d’autres habitudes, longtemps exercé dans d’autres matières, trouvera du premier coup d’œil quelque chose de neuf et d’imprévu qu’il sera utile d’entendre, surtout quand ce bon esprit, comme dans le cas présent, est à la fois un esprit très-délicat et très-fin. Ce qu’il trouvera, ce ne sera pas sans doute ce que nous savons déjà sur la façon et sur l’artifice du livre, sur ces études de l’atelier si utiles toujours, sur ces secrets de la forme qui tiennent aussi à la pensée : il est bien possible qu’il glisse sur ces choses, et il est probable qu’il en laissera de côté plusieurs ; mais sur le fond même, sur l’effet de l’ensemble, sur le rapport essentiel entre l’art et la vérité, sur le point de jonction de la poésie et de l’histoire, de l’imagination et du bon sens, c’est là qu’il y a profit de l’entendre, de saisir son impression directe, son sentiment non absorbé par les détails et non corrompu par les charmes de l’exécution ; et s’il s’agit en particulier de personnages historiques célèbres, de grands ministres ou de grands monarques que le poëte a voulu peindre, et si le bon esprit judicieux et fin dont nous parlons a vu de près quelques-uns de ces personnages mêmes, s’il a vécu dans leur familiarité, s’il sait par sa propre expérience ce que c’est que l’homme d’État véritable et quelles qualités au fond sont nécessaires à ce rôle que dans l’antiquité les Platon et les Homère n’avaient garde de dénigrer, ne pourra-t-il point en quelques paroles simples et saines redonner le ton, remettre dans le vrai, dissiper la fantasmagorie et le rêve, beaucoup plus aisément et avec plus d’autorité que ne le pourraient de purs gens de lettres entre eux ?
Il tenait registre avec grand soin de toutes ses impressions ; c’est ainsi qu’il avait pris note des divers symptômes qu’il avait observés sur des lépreux de la province de Constantine. […] Nous ne savons quelle impression une pareille exhibition peut produire sur la masse des lecteurs, mais nous pouvons affirmer à M.
Impressions recueillies à vol d’oiseau, notes, études, enquêtes, réflexions philosophiques, poèmes descriptifs, récits d’ascensions, de chasse, d’excursions, romans de mœurs exotiques ou cosmopolites, fantaisies à la Jules Verne, itinéraires à la Chateaubriand, pérégrinations amoureuses à la Pierre Loti, — comptez, si vous pouvez, l’infinie variété d’œuvres qui démontrent cet élargissement du domaine littéraire, et vous comprendrez sans peine combien il importe de savoir en quels points précis chaque époque fixait les limites du monde connu. […] Combien de colonies sont nées d’un roman, d’un poème, d’un récit qui avait fait une profonde impression sur des âmes jeunes et naïves !
« Le principe le plus général que nous puissions établir par rapport à la concomitance de l’esprit et du corps, est la loi de diffusion qui s’énonce ainsi : « Quand une impression est accompagnée de sentiment ou d’une conscience quelconque, les courants excités se répandent librement dans le cerveau et conduisent à une agitation générale des organes moteurs, et affectent les viscères. » L’action réflexe, au contraire, qui n’est point sentie, est restreinte dans son influence à un circuit nerveux fort étroit. […] Ce, qui existe, ce sont simplement des impressions communes.
Mais transportez sur le théâtre cette physiologie crue et saignante, animez-la du mouvement de la scène, de la réalité des acteurs ; multipliez son impression par la diversité des mille spectateurs qui s’en remplissent l’esprit et les yeux ; servez, pêle-mêle, les fruits de l’Arbre du bien et du mal à cette foule souvent incapable de les discerner : qui peut affirmer la moralité d’un pareil spectacle ? […] L’impression, au fond, reste desséchante et amère.
Il n’assista qu’à deux ouvertures de corps : Jamais, dit-il, l’impression que fit sur moi la vue des deux cadavres ne s’effacera de mon esprit. […] Le tout revêtu de considérations et d’hypothèses, et augmenté des impressions de voyage, a fourni matière à un grand in-quarto.
Né à une époque de calamités et de corruption, Pline porte en effet ses impressions morales, et comme ses ressentiments de société, dans la considération de la nature. […] Tout ceci n’est et ne peut être de ma part qu’une impression littéraire et morale ; c’est la seule que j’aie le droit d’apporter en ces doctes sujets ; mais je la donne telle qu’elle résulterait pour moi, rien que de la lecture du livre sur l’Homme.
Il est arrivé au cardinal Mazarin, si heureux en toutes choses, un très grand malheur après sa mort : cet homme, sans amitiés et sans haines, n’a eu qu’un seul ennemi avec qui il ne se soit pas réconcilié et à qui il n’ait jamais pardonné, le cardinal de Retz ; et celui-ci, en écrivant ses immortels Mémoires, a laissé de son ennemi, de celui en qui il voyait un rival heureux, un portrait si gai, si vif, si amusant, si flétrissant, que les meilleures raisons historiques ont peine à tenir contre l’impression qui en résulte, et qu’elles ne parviendront jamais à en triompher. […] Telle est, après avoir lu M. de Laborde et la plupart des mémoires qu’il cite, mon impression finale et invincible.
Il racontait souvent avec énergie l’impression qu’il reçut de l’état de terreur qui pesait alors sur la grande cité : « Cet état de prostration et de stupeur était tel (c’est lui qui parle), que si l’on avait dit à un condamné : Tu iras dans ta maison et là tu attendras que la charrette passe demain matin pour y monter, il serait allé et il y serait monté. » Ce qui n’est pas moins remarquable chez quelqu’un qui avait senti à ce degré l’horreur des crimes, il ne fut point dégoûté de la liberté ; il n’entra point, au sortir de là, dans la crainte et l’aversion des progrès modérés et des lumières. […] Il eut de vives impressions au camp devant Mayence dans l’été de 1795, et il les a racontées depuis ; Sterne ne les aurait pas éprouvées ni exprimées différemment : Une partie des gardes avancées de l’attaque de gauche, nous dit-il, était placée dans un jardin anglais, près du village de Monback.
Au lieu d’une horreur sérieuse et profonde, il n’a produit par ses descriptions, comme dans un roman, qu’un genre d’impression presque nerveuse. […] II, p. 255), il a entremêlé les indications positives et moins favorables données par M. de Vaulabelle (telle que la réponse de Louis XVIII au prince-régent) avec les autres impressions toutes royalistes de M.
Or, l’impression que produit Rousseau en politique est toute contraire : il fait que chacun, après l’avoir lu, est plus mécontent de son état. […] Il y dressa aussitôt sa batterie de guerre, son Mercure britannique, publication destinée à combattre avec suite, et par des tableaux mêlés de discussions, la politique du Directoire : « L’expérience est perdue, disait Mallet, si on ne la grave pas au moment même par des écrits qui en fixent l’impression. » La passion déclarée et le parti pris de l’attaque n’empêchent point dans ce Mercure la sagacité et, jusqu’à un certain point, l’impartialité des jugements.
Les lettres que d’Ablancourt écrivait à Patru, et dont les premières sont à peu près de ce temps, nous le montrent toutefois sous un aspect plus relevé, et corrigent l’impression que pourrait faire le seul récit de Tallemant des Réaux. […] Nous sommes donc réduits à nous en rapporter à l’impression des contemporains.
Si j’osais traduire cette impression dans une langue toute littéraire et pour des littérateurs, je dirais : Zumalacárregui, c’est son André Chénier : Il est des temps, disait-il (28 juin 1835), où avec de médiocres facultés on peut devenir rapidement fameux ; nous sommes, au contraire, une de ces époques où tout conspire contre le développement des grands caractères, et où le travail des sociétés n’amène à la surface que des natures dégradées. […] J’ai été sensible surtout à l’impression qu’a faite sur vous ma défense en cour d’assises.
Tocqueville est le premier qui, regardant la démocratie comme bonne en elle-même et inévitable, ait su voir qu’elle pouvait conduire au despotisme aussi bien qu’à la liberté : observation vulgaire chez tous les publicistes de l’antiquité, et cent fois vérifiée dans les petites républiques de la Grèce, mais qui, appliquée à toute la surface du monde civilisé, inspire à l’entendement et à l’imagination une singulière impression de religieux effroi. […] Si mes impressions étaient aussi tristes que vous le pensez, vous auriez raison de croire qu’il y a une sorte de contradiction dans mes conclusions, qui tendent, en définitive, à l’organisation progressive de la démocratie, J’ai cherché, il est vrai, à établir quelles étaient les tendances naturelles que donnait à l’esprit et aux institutions de l’homme un état démocratique.
Il aura une tendance générale à faire beaucoup d’espèces, parce que, comme l’amateur de Pigeons ou d’autres volatiles dont j’ai déjà parlé, il sera sous l’impression de la différence des formes qu’il a constamment sous les yeux ; et il n’aura par contre, pour corriger cette première impression, qu’une connaissance superficielle et un sentiment moins vif des variations analogues des autres groupes en d’autres contrées.
Il doit rester un esprit en soi, ayant sa force et ses principes, et toute une armature qui le constitue et qui le défende, et qui lui conserve, au milieu de toutes les impressions qu’il reçoit, une incommutable originalité ! […] L’Angleterre politique, évoquée dans ce volume et considérée dans quelques-uns de ses écrivains politiques et littéraires, a ravivé l’Anglais qui était entré dans Chasles avec la profondeur des premières impressions de sa jeunesse, passée à Londres, et qu’on retrouvait parfois dans les réfléchissements et les scintillements d’une nature essentiellement réverbérante, mais qui n’y était qu’à l’état de rayon, intersecté par tant d’autres rayons.
Fermez le volume, réfléchissez, vous avez l’impression qu’il manque à cette prose je ne sais quelle résistance, l’épaisseur, la solidité de couches seules capables de braver le temps. […] Il faut à tout prix qu’ils nous disent les impressions qu’ils ont ressenties quand ils ont reçu leur première fessée et quand, pour la première fois, ils ont mangé de la crème au chocolat. […] L’art est la peinture des choses éternelles. » Flaubert voulait donner aux lecteurs une impression de stupeur, et qu’on se demandât en fermant le livre comment cela s’était fait. […] Les amies s’appellent Daisy… On affecte l’esprit, le laconisme : « Étrange, cette impression qu’elle m’a donnée… Inouïe, la figure qu’elle a prise… Très curieux, ce paysage… Oh ! […] Gibbon notait au jour le jour les impressions de lectures qu’il se proposait d’utiliser pour son grand ouvrage sur la décadence de l’empire romain.
Cette impression prime tout, même la valeur de l’ouvrage. […] J’avais l’impression lancinante qu’on me volait un peu de son cœur en ces moments où elle était loin de moi, et aussi l’effroi de ne plus la voir revenir. […] Les visions, ou plutôt la sensibilité d’impressions, augmentent chaque jour et animent tout à ses yeux. […] Des vers ne se discutent pas, et la prose est mal venue à vouloir en reproduire l’impression ; mieux vaut en donner un échantillon. […] Rarement j’ai trouvé dans la plume d’une femme, d’une étrangère, une telle énergie, une telle puissance d’impression.
Son impression me suit toujours, et il ira rejoindre ma collection d’excerptæ celebres. […] Anatole France nous rapporte ses propres impressions d’enfance, en ayant l’air de nous conter les aventures de Pierre Nozière. […] Selon Ruskin, l’Italie est faite pour procurer aux Anglais des émotions esthétiques et des impressions morales. […] Et, si je me trompe pour quelques détails matériels, je suis assuré que l’impression d’ensemble est conforme à la réalité. […] Jamais je n’ai eu, à ce point, l’impression du talent.
C’était l’esprit le plus ouvert à toutes les notions et à toutes les impressions, le jouisseur le plus éclectique et le plus impartial. […] Sombre, délicieuse pourtant, lumineuse, mais tranquille, cette impression, qui prend pour toujours sa place dans votre mémoire, prouve le vrai, le parfait coloriste. […] Remontons, s’il se peut, par un effort rétrospectif de l’imagination, vers nos plus jeunes, nos plus matinales impressions, et nous reconnaîtrons qu’elles avaient une singulière parenté avec les impressions, si vivement colorées, que nous reçûmes plus tard à la suite d’une maladie physique, pourvu que cette maladie ait laissé pures et intactes nos facultés spirituelles. […] Pierre Lebrun imagina de faire souscrire beaucoup de personnes à l’impression du livre ; les bénéfices furent consacrés à payer un remplaçant. […] De cette triple impression résulte la morale des choses.
Il avait pour maxime de ne juger des ouvrages d’esprit, surtout au théâtre, que par ses impressions.
Il est inépuisable à rendre ces impressions vagues et profondes.
Léopold, pour jouer son rôle d’héritier opulent et faire impression sur la belle et jeune voyageuse, ne parle que de dépenses folles, de plaisirs ruineux, et s’attire de la part de la dame, qui d’abord n’avait pas l’air d’écouter, la plus juste et la plus piquante leçon de morale sur l’emploi des richesses.
Quelles doivent être la pensée maîtresse, la couleur fondamentale, l’impression dominante du développement à faire, voilà ce que tout élève doit savoir distinguer d’abord dans la matière qu’on lui propose, et cela consiste précisément à en extraire l’idée générale.
Brunetière, après avoir cité une description d’un romancier contemporain, je puis voir effectivement toutes ces choses… Ce sont des tableaux… dont nous n’avons pas besoin d’avoir vu les modèles, pour louer la ressemblance, puisqu’ils ne sont, après tout, que des associations nouvelles d’éléments anciens, de formes familières et de couleurs accoutumées… Nous sommes rentrés ici dans la vérité de l’art, qui consiste à décrire les choses les plus particulières par les termes les plus généraux, et d’autant plus généraux, qu’il s’agit de nous communiquer l’impression de choses plus particulières. » Il semble que nous soyons ramenés au fameux précepte de Buffon, qui recommande d’avoir attention à ne nommer les choses que par les termes les plus généraux.
Quand on embrasse, de quelque courbe de sa rive, la Loire étalée et bleue comme un lac, avec ses prairies, ses peupliers, ses îlots blonds, son ciel léger, la douceur épandue dans l’air, et, non loin, quelque château ciselé comme un bijou, qui nous rappelle la vieille France, ce qu’elle a été et ce qu’elle a fait dans le monde, l’impression est si charmante, si enveloppante, qu’on se sent tout envahi de tendresse pour cette terre maternelle, si belle sous la lumière et si imprégnée de souvenirs.
Sully Prudhomme : Impressions de la guerre.
Peu de personnes ont produit sur moi une plus vive impression.
Platon donne de l’esprit, par la fécondité du sien ; & Aristote donne du jugement & de la raison, par l’impression du bon-sens qui paroît dans tout ce qu’il dit.
Ils se laissent aller aux impressions que fait sur eux l’endroit du poëme qui est sous leurs yeux.
Ainsi le sujet de l’imitation, c’est-à-dire, les évenemens de la tragédie et les expressions du tableau, font une impression legere sur les peintres et sur les poëtes sans génie, qui sont ceux dont je parle.
L’orateur enfin ne peut être animé, ne peut être entraîné hors de lui-même, et ramener ainsi son auditoire à un centre commun, que par la conscience de l’impression qu’il produit, de l’ascendant qu’il exerce.
Je ne discuterai pas les principaux faits de la vie de La Fayette depuis 89 jusqu’à sa sortie de France en août 92 ; de telles discussions, rebattues pour les contemporains, redeviendraient plus fastidieuses à la distance où nous sommes placés ; c’est à chaque lecteur, dans une réflexion impartiale, à se former son impression particulière. […] Mais son impression sur ces attentats et quelques autres pareils qui, ainsi qu’il le dit, ont trompé son zèle et profondément affligé son cœur, son impression d’honnête homme n’atteignit pas alors sa vue politique, et ne détruisit pas du coup le charme qui ne cessa que plus tard, lorsque le 10 août déchira le rideau. […] George fut effrayé d’une impression qu’il trouvait plus forte que le danger. […] C’est celle, à coup sûr, qui a le plus nui dans la vague impression publique, et en double sens contraire, à la mémoire de l’illustre citoyen, et qui a contribué à jeter sur l’ensemble de sa carrière une teinte générale où l’ancien attrait a pâli. […] La bonne critique n’est souvent qu’une bordure. — Et puis, en me livrant tout à l’heure à mon extrême analyse, je comptais bien en corriger à temps l’impression, en recouvrir la minutie un peu sévère, par l’effet de ce large morceau, devenu en tout nécessaire au complément de ma pensée et à la proportion de mon jugement.
Fielding et Richardson, ces romanciers dans la plus complète acception du mot, en Angleterre, quand, en France, nous n’avions encore que des larves de romanciers, — les têtards du genre, — Fielding et Richardson, ces observateurs et ces peintres de l’âme humaine et de la vie sociale, ne se préoccupaient que de leurs œuvres et de la force d’impression qu’elles pouvaient avoir, non pas seulement sur les âmes de leur temps, mais sur les âmes de tous les temps. […] Au théâtre, l’impression se double et se multiplie de l’impression de chacun, et l’ennui, qui est une impression, et la plus insupportable, l’ennui y est rendu plus accablant par l’ennui de tous. […] Il se contentait de dire sa petite impression, puis se retirait sous ses petites phrases, petit serpent de ces petites fleurs… Diderot, lui, avait cette puissance de dire à un homme qui avait échoué : Tenez ! […] Et ne croyez pas que ce spiritualisme, si étrange sous la plume de Diderot, soit l’affaire d’une impression momentanée, comme il devait tant y en avoir dans cette nature de bouffées, de saccades, d’entraînements.
On n’y trouverait point de vers libres, mais beaucoup de bonnes choses, connues depuis par l’impression en volume, pas mal de gaieté et de sarcasme. […] Elle s’abstenait — cela à son insu, on le sentait bien — de ce qui eût pu prêter à une remarque même la plus favorable. — Un costume laissant une impression avenante, sans éclat gai. […] Nous ne ressentons une impression mentale ou affective, qu’en vertu de l’existence antérieure d’une autre impression ; ces phénomènes sont variés par l’heure de la vie, la disposition initiale, l’atavisme, la santé générale de l’individu, sa santé momentanée, ses conditions de force, de normalité, le nombre des expériences acquises, l’essence de l’individu, plus toutes les mêmes conditions de variations chez l’être ou les êtres avec lequel il est en contraste. […] Il s’y trouve une courte étude sur Charles Baudelaire, et curieuse comme impression produite par le grand poète sur un des cerveaux les plus cultivés de la génération qui nous précéda. […] « La littérature proprement dite, n’existant pas plus que l’espace pur, ce que l’on se rappelle d’un grand poète, c’est l’impression dite de sublimité qu’il nous a laissée, par et à travers son œuvre, plutôt que l’œuvre elle-même, et cette impression, sous le voile des langages humains, pénètre les traductions les plus vulgaires, (La Machine à gloire.)
On n’en sent point l’immensité solitaire ; toujours on voit la côte ou quelque île ; elle ne laisse pas d’impression sinistre, elle n’apparaît pas comme un être féroce et destructeur ; elle n’a pas de teinte blafarde, cadavéreuse ou plombée ; elle ne ravage pas ses bords et n’a point de marées qui la bordent de cailloux roulés et de boue. […] On n’est pas obligé de deviner l’ensemble d’après un morceau ; son emplacement le proportionne aux sens de l’homme. — Pour qu’il ne manque rien à la netteté de l’impression, ils lui donnent des dimensions moyennes ou petites. […] Nous n’en gardons qu’une impression totale, et cette impression, conforme au génie de la race, est justement celle d’une fête heureuse et fortifiante. […] Il n’a pas de peine à comprendre la conduite qu’il faut tenir avec Mégare ou Corinthe ; il lui suffît pour cela de son expérience personnelle et de ses impressions journalières ; il n’a pas besoin d’être un politique de profession, versé dans la géographie, l’histoire, la statistique et le reste. […] Aux siècles de décadence, dans des statues comme celles du Tibre et du Nil, les sculpteurs anciens se souvenaient encore de l’impression primitive, et le large torse, l’attitude reposée, le vague regard de la statue montrent que, par la forme humaine, ils songeaient toujours à exprimer l’épanchement magnifique, uniforme, indifférent de la grande eau.
La peinture de Fromentin ne donne pas cependant une impression d’insincérité, et sa méthode de travail lui a été tout de même moins néfaste qu’on ne pourrait le croire. […] L’impression picturale, le tableau virtuel (qui passera ou non à la réalité de la toile) est une réalité physique, bien que l’art y enferme le plus de sens et d’âme possible. […] Elle figure une impression picturale plutôt qu’elle n’indique une impression littéraire. […] On sent dans cette page, comme dans presque toute l’œuvre de Fromentin voyageur, que cette tête lucide et pratique a devant son impression et son souvenir le souci de les représenter justement, dans leur extérieur et leur intérieur. […] On y a souvent l’impression d’une suite musicale, et ce tableau de la chambre de travail de Dominique paraît une brève mais véritable ouverture.
Vuillart qui raconte ses impressions au jour le jour : « Ce mercredi 8 avril 1699. — J’ai ouï aujourd’hui le père Massillon pour la première fois de ma vie.
Les passions qui dégradent l’homme, en resserrant son égoïsme dans ses sensations, ne produisent pas, sans doute, ces bouleversements de l’âme où l’homme éprouve toutes les douleurs que ses facultés lui permettent de ressentir ; mais il ne reste aux peines, causées par des penchants méprisables, aucun genre de consolation ; le dégoût qu’elles inspirent aux autres, passe jusqu’à celui qui les éprouve ; il n’y a rien de plus amer dans l’adversité que de ne pas pouvoir s’intéresser à soi : l’on est malheureux sans trouver même de l’attendrissement dans son âme ; il y a quelque chose de desséché dans tout votre être, un sentiment d’isolement si profond, qu’aucune idée ne peut se joindre à l’impression de la douleur ; il n’y a rien dans le passé, il n’y a rien dans l’avenir, il n’y a rien autour de soi, on souffre à sa place, mais sans pouvoir s’aider de sa pensée, sans oser méditer sur les différentes causes de son infortune, sans se relever par de grands souvenirs où la douleur puisse s’attacher.
Elles ont des impressions fortes, des émotions vives, et elles ne trouvent rien à dire, rien à écrire.
Et ainsi, toutes les impressions particulières que nous donnent les objets du monde physique, il les approfondit et les agrandit aussitôt par l’idée toujours présente que tout s’enchaîne et se tient dans le rêve ininterrompu de Maïa… Les frontières deviennent indistinctes entre les différentes formes de la vie — vie végétale, animale et humaine.
Cette lecture m’a laissé une impression singulière.
On essaye de s’imaginer les préoccupations habituelles, l’état d’esprit, les impressions, les angoisses et les plaisirs de cet homme qui taille cette chair, qui répare ces organes, qui refait de la vie d’une manière plus visible, plus immédiate et plus sûre que le médecin, et qui a l’orgueil de créer presque après le Créateur.
C’étaient des impressions de flâneur mélancolique à travers les rues, le soleil, les sourires, le bariolage des affiches et les toilettes.
Voici quelques exemples de doublets que je n’emprunte pas à l’opuscule de Brachet, quoiqu’ils s’y trouvent certainement : Latin Vieux Français Français moderne Latin Monasterium Moutier Monastère Ministerium Métier Ministère Paradisus Parvis Paradis Hospitale Hôtel Hôpital Augurium Heur Augure Unionem Oignon Union3 Crypta Grotte Crypte Decima Dîme Décime Articulum Orteil Article Navigare Nager Naviguer Souvent, le sens s’étant perdu de la fécondité naturelle du français, un savant en quête d’un qualificatif, d’un dérivé est remonté au mot latin au lieu d’interroger le mot français : Natalis Noël Natalité Ostrea Huître Ostréiculture Ranuncula Grenouille Renonculacées4 Oxalia Oseille Oxalique Medulla Moëlle Médullaire5 Auricula Oreille Auriculaire Gracile Grêle Gracilité Dies dominica Dimanche Dominical Pediculum Pou Pédiculaire Pneuma Neume Pneumatique On doit avoir l’impression rien qu’à parcourir ces deux listes très écourtées, que si les mots de la seconde colonne sont français, ceux de la troisième ne le sont pas, ou très peu ; ils ne sont pas davantage latins, puisque jamais en aucun pays ils n’ont été prononcés tels que le dictionnaire nous les offre aujourd’hui.
Il continue à comprendre sous le titre d’Odes toute inspiration purement religieuse, toute étude purement antique, toute traduction d’un événement contemporain ou d’une impression personnelle.
Mais pour ne point laisser de doute sur cette succession naturelle, nous examinerons comment chaque état se combine avec le gouvernement de l’état précédent ; mélange fondé sur l’axiome : lorsque les hommes changent, ils conservent quelque temps l’impression de leurs premières habitudes.