Mais ce n’est pas toutefois lui faire tort, de juger de la délicatesse de son sentiment moral par les mœurs qu’elle supporte au théâtre. […] Mais ces œuvres, à leur origine, n’attestent point tant la perversion des idées morales que la dépravation du goût. […] Quoi de plus moral qu’une conclusion semblable ? […] quelle est cette morale qui ne convertit point, qui a besoin d’être prouvée pour qu’on la sente ; qui, même prouvée, nous éloigne parce qu’elle blesse nos instincts moraux ? […] Dans les conditions morales que nous venons d’étudier, le spectacle de la richesse peut offrir un grave péril aux esprits d’élite qui le contemplent sans en jouir.
Des critiques qui continuent pour leur plus grand profit, sinon pour leur plus grand honneur, les traditions morales de Robert Macaire. […] Si sans ces avertissements vous ne reconnaissez pas le vice et ne le repoussez pas, de deux choses l’une : ou c’est que le vice est mal peint, ou c’est que vous n’avez pas de sens moral. […] « Dans les appréciations morales, on trouvera chez l’idéaliste une plus pure moralité quant au détail, mais beaucoup moins d’égalité morale dans l’ensemble ; car il ne s’appelle idéaliste qu’à la condition de prendre les motifs de sa décision dans sa raison pure ; mais la raison, dans chacune de ses manifestations, se montre absolue, ce qui fait que ses actes isolés, surtout dès qu’il ne sont que purement moraux, portent le caractère complet de l’indépendance et de la liberté morales. […] Sa volonté ne s’appliquant qu’au Tout, quant à la forme, il ne veut pas, quant à la matière, l’appliquer à des fragments ; et cependant ce n’est guère que par des actions restreintes qu’il peut témoigner de ses préoccupations morales. […] Sa liberté, il la met, non pas dans l’indépendance des contraintes physiques, mais dans l’absolution des contraintes morales.
Royer-Collard remarque excellemment que ce qui manque le plus aujourd’hui, c’est dans l’ordre moral le respect, et dans l’ordre intellectuel l’attention. […] L’homme moral est plus tôt formé qu’on ne croit. […] Il ne craint pas de poser le grand dilemme dans toute sa rigueur : « Si la Providence efface, sans doute c’est pour écrire… Je suis si persuadé des vérités que je défends, que lorsque je considère l’affaiblissement général des principes moraux, la divergence des opinions, l’ébranlement des souverainetés qui manquent de base, l’immensité de nos besoins et l’inanité de nos moyens, il me semble que tout vrai philosophe doit opter entre ces deux hypothèses, ou qu’il va se former une nouvelle religion, ou que le christianisme sera rajeuni de quelque manière extraordinaire. […] De ce qu’une chose, selon qu’il le croit, est nécessaire pour le salut moral du genre humain, M. de Maistre en conclut qu’elle est et qu’elle est vraie. […] Et ailleurs, dans une lettre de source encore plus intime, on lit ces détails qui conduisent de plus en plus près et jusqu’à la fin : « Nous osions cependant nous livrer quelquefois à l’espérance, parce que ses facultés morales n’avaient jamais été si vives ni si prodigieuses ; pendant cinquante jours qu’a duré sa maladie, il n’a cessé de s’occuper des affaires de sa charge, de ses affaires domestiques, de la littérature et de la politique ; il nous a dicté plus de cinquante lettres, et trouvait un grand plaisir dans les lectures continuelles que nous lui faisions.
C’est cet humble frère qu’il s’agissait à tout instant de relever, de réconforter, de secourir même par de rares envois d’argent ; mais, en lui servant sa minime obole, cette âme de sœur trouvait moyen de diversifier à l’infini le baume moral qu’elle répandait sur ses blessures. […] Je n’ai pas opposé un mot à celte résolution, la voyant très lasse et n’ayant à lui offrir qu’un espace assez étouffé, et moins que jamais de cette gaieté calme qui convient au bien-être moral et à la santé d’une jeune fille. […] Dans des lettres à une amie, Mme Derains, elle revient sur cette misère des logements à trouver, et elle exprime en paroles vivantes le trouble moral et le bouleversement de pensées qui résulte de ces déplacements continuels : « Ma bonne amie, vous me dites des paroles qui résument des volumes que j’ai en moi.
La Fronde présente donc la seconde période de la vie de M. de La Rochefoucauld ; la troisième comprend les dix ou douze années qui suivirent, et durant lesquelles il se refit, comme il put, de ses blessures au physique, et s’en vengea, s’en amusa, s’en releva au moral dans ses Maximes. […] Les Réflexions ou Sentences et Maximes morales parurent en 1665. […] Les réflexions morales de La Rochefoucauld semblent vraies, exagérées ou fausses, selon l’humeur et la situation de celui qui lit.
Et les traits moraux non plus ne manquent pas. […] Eustache Morel, dit Deschamps, mort après 1403, à plus de 90 ans, et qui fleurissait dans la seconde moitié du xive siècle, poète moral, didactique, gnomique, patriotique, est un de ceux qu’on a essayé de faire valoir dans ces derniers temps. […] Au milieu de vers graves, moraux, un peu ennuyeux, il y a, je le sais, de fort jolies choses dans Eustache Deschamps, notamment un Virelai bien gai et bien chantant : Eustache Deschamps n’a pas toujours eu 90 ans en poésie.
La Fontaine accommode le moral avec le physique. […] Il a vu les attitudes, le regard, le poil, l’habitation, la forme d’un renard ou d’une belette, et l’émotion produite par le concours de tous ces détails sensibles engendre en lui un personnage moral avec toutes les parties de ses facultés et de ses penchants. […] Il transpose, et ce mot est de tous le plus exact ; car il transporte dans un monde ce qu’il a vu dans un autre, dans le monde moral, ce qu’il a vu dans le monde physique.
Quelques observations morales qu’il démêle à l’aide de personnifications discrètes marquent la puissance de son esprit. […] L’esprit chevaleresque et l’esprit bourgeois, si opposés en leurs formes, se réconcilient dans l’obscénité, et dans la brutalité cynique du scepticisme moral. […] la fade sentimentalité qui encore aujourd’hui partage les applaudissements avec la grosse ordure dans nos cafés-concerts, d’innocentes mièvreries émanées de la haute littérature allégorique, et qui une fois sur vingt échappent à la puérilité, une fois sur cent atteignent l’exquise délicatesse : avec cette poésie de rêve, la réalité sans voiles, dans toute sa brutalité, dérision du mariage et de la famille, âpre désir des jouissances grossières, filles qui partent avec les gens d’armes, soudards avides de pillage, accourant comme des bêtes de proie aux provinces où il y a guerre : en somme, le plus complet nihilisme moral adouci par les tons chauds d’une verve robuste.
Que La Fontaine soit dans cette liste, cela peut vous étonner, car La Fontaine considéré comme un homme moral, et même comme un auteur moral, ce n’est pas mon avis et ce n’est probablement pas le vôtre. […] Ceci est très important, même au point de vue moral.
Voilà comme ils parlent des choses morales, ces négateurs de l’âme humaine ! […] C’était même pour moi d’une curiosité assez piquante, le contraste qu’il y avait entre le héros du livre et l’auteur, entre l’ardente et pieuse individualité d’un Saint à proportions grandioses, et qui paraissent fabuleuses en nos temps rapetissés et amaigris, et l’homme le plus froid de ces temps, le plus matérialiste de talent, le plus indifférent aux choses morales, qui a traité presque pathologiquement, dans le plus célèbre de ses livres, le cas honteux de Madame Bovary. […] Tout le monde moral de l’art y passait dans la simple représentation physique, et plus tard, dans Salammbô, ce fut bien pis… Mais si déjà Flaubert abusait alors de son unique procédé, la description, la plus minutieuse description, le calque à la vitre de toute réalité, qui, pour faire trop réel, supprime la vie, il l’appliquait du moins encore comme un être raisonnable ; il était encore maître de son procédé ; mais, à présent, c’est son procédé qui est son maître.
Persévérance et uniformité ardente, qui le tint toujours à l’abri de tout échec et de tout soupçon ; qui se sent et transpire dans tout ce qu’il profère et enseigne, et qui lui assurait, dans l’ordre moral et chrétien, une autorité que nul en son siècle n’a surpassée, pas même Bossuet ! […] Dans quatre lignes de saint Bernard ou de Bossuet, il y en a bien autrement, me disait l’un d’eux, et l’on m’en citait ; et ce seul désavantage amortissait le grand effet moral du saint orateur dans leur pensée.
Taine oppose à la fable philosophique, sera celle où le poète ne courra pas tout droit à son but moral, où il s’oubliera et se complaira à animer ses personnages, à les faire parler, à les rendre vraisemblables et vivants. […] Il en est de même pour les hommes et pour les esprits qui vivent dans le même siècle, c’est-à-dire sous un même climat moral : on peut bien, lorsqu’on les étudie un à un, montrer tous les rapports qu’ils ont avec ce temps où ils sont nés et où ils ont vécu ; mais jamais, si l’on ne connaissait que l’époque seule, et même la connût-on à fond dans ses principaux caractères, on n’en pourrait conclure à l’avance qu’elle a dû donner naissance à telle ou telle nature d’individus, à telles ou telles formes de talents.
La dernière année de son séjour à Tours (1839) fut marquée par un incident moral singulier. […] Un seul ami, à qui il s’ouvrit de son état moral, accourut, lui chercha, en toute hâte, une retraite qu’il trouva aux environs de Paris (à Fontenay-sous-Bois) ; et là, pendant des mois, Béranger seul, caché sous le nom de M.
Montaigne, retiré vers l’âge de trente-huit ans dans son château et dans sa tour seigneuriale, s’était amusé à tracer ou à faire tracer sur les poutres et chevrons supérieurs de la pièce qu’il appelait sa librairie ou bibliothèque quelques inscriptions morales et philosophiques, reproduisant les maximes ordinaires de sagesse qu’il tenait à avoir constamment devant les yeux. […] Nous avons là, d’après lui, un portrait physique et moral très exact de ce beau et doux vieillard, Grégoire XIII.
Un autre motif qui l’avait fait différer jusque-là, quoique cette idée de renonciation fût déjà très ancienne chez lui, c’était que, s’il avait abdiqué un peu plus tôt, et vers le temps de sa fuite d’Inspruck, il eût quitté la partie sur des revers, qu’il eût donné gain de cause aux ennemis de la foi catholique et eût paru céder au découragement moral, quand il ne se rendait qu’à la fatigue. […] et put-il rester fidèle au régime moral qu’il s’était d’abord proposé ?
Un progrès moral reste à faire en notre xixe siècle qui se vante d’être un siècle de tolérance, et qui ne l’est encore qu’à demi. […] Taine nous entretenait l’autre jour27, — occupés, dis-je, à rechercher uniquement et scrupuleusement la vérité dans de vieux livres, dans des textes ingrats ou par des expériences difficiles ; des hommes qui voués à la culture de leur entendement, se sevrant de toute autre passion, attentifs aux lois générales du monde et de l’univers, et puisque dans cet univers la nature est vivante aussi bien que l’histoire, attentifs nécessairement dès lors à écouter et à étudier dans les parties par où elle se manifeste à eux la pensée et l’âme du monde ; des hommes qui sont stoïciens par le cœur, qui cherchent à pratiquer le bien, à faire et à penser le mieux et le plus exactement qu’ils peuvent, même sans l’attrait futur d’une récompense individuelle, mais qui se trouvent satisfaits et contents de se sentir en règle avec eux-mêmes, en accord et en harmonie avec l’ordre général, comme l’a si bien exprimé le divin Marc-Aurèle en son temps et comme le sentait Spinosa aussi ; — ces hommes-là, je vous le demande (et en dehors de tout symbole particulier, de toute profession de foi philosophique), convient-il donc de les flétrir au préalable d’une appellation odieuse, de les écarter à ce titre, ou du moins de ne les tolérer que comme on tolère et l’on amnistie par grâce des errants et des coupables reconnus ; n’ont-ils pas enfin gagné chez nous leur place et leur coin au soleil ; n’ont-ils pas droit, ô généreux Éclectiques que je me plais à comparer avec eux, vous dont tout le monde sait le parfait désintéressement moral habituel et la perpétuelle grandeur d’âme sous l’œil de Dieu, d’être traités au moins sur le même pied que vous et honorés à l’égal des vôtres pour la pureté de leur doctrine, pour la droiture de leurs intentions et l’innocence de leur vie ?
C’est la vie la plus favorable à la pratique de la vertu, au soutien de tous les penchants, de tous les goûts qui assurent le bonheur social et le bonheur individuel dans cet état de société ; je sens ce qu’elle vaut, je m’applaudis d’en jouir… » Voilà la vie de Mme Roland pendant des années et son intérieur moral, calme, contenu, sain et purifiant ; voilà les tableaux dignes de sa première vie, ceux qu’on ne saurait trop rappeler à son sujet et que je regretterais de voir ternir ; car ils donnent l’expression vraie et fidèle. […] Quelle singularité pourtant, dans l’ordre littéraire et moral, que ces sortes de pastiches si visiblement empruntés et si parfaitement sincères !
Au moment le plus beau et le moins endommagé encore de son règne, Louis XVI, pénétré de la lecture des Voyages de Cook et jaloux pour la France de cette gloire des conquêtes géographiques, voulut donner lui-même à Laperouse, en le chargeant d’une expédition lointaine, des instructions en quelque sorte morales, et, dans sa sollicitude de philanthrope, il les rédigeait ainsi : « Si des circonstances impérieuses, qu’il est de la prudence de prévoir, obligeaient jamais le sieur de La Peyrouse à faire usage de la supériorité de ses armes sur celles des peuples sauvages, pour se procurer, malgré leur opposition, les objets nécessaires à la vie, telles que des subsistances, du bois, de l’eau, il n’userait de la force qu’avec la plus grande modération et punirait avec une extrême rigueur ceux de ses gens qui auraient outrepassé ses ordres. […] Je ferai tout ce qu’il me dira, et on verra ce qui en résultera. » Vouloir et ne pas vouloir, s’abandonner et ne pas se confier, retirer au moral ce qu’on accorde en fait, triste rôle, rôle de perdition à certains moments critiques et aux heures où toute résolution est décisive !
Des deux frères qui étaient dans l’armée en même temps que lui, l’un mourut au siège de Lille en 1667 ; l’autre appelé Croisilles, avec qui il resta lié de tout temps d’une étroite tendresse, était capitaine au régiment des gardes ; retiré du métier des armes pour cause de santé et à la suite de blessures, il devint le tendre ami de Fénelon et paraît avoir été doué de toutes les délicatesses morales ; il refusa d’être sous-gouverneur du duc de Bourgogne. […] C’est le résumé moral et, comme on disait autrefois, la bonne ou la mauvaise odeur qui émane de toute une vie.
S’est-il assez préoccupé, même en ne s’en rapportant pas aux apparences, du phénomène moral, je veux dire de la voix publique et de l’indignation grossissante qui a donné lieu à la belle légende, — ici plus belle que la vérité ? […] Il consent à reconnaître que « les hommes des autres mondes diffèrent de nous tant dans leur organisation intime que dans leur type physique extérieur » ; mais ce n’est là qu’une manière de concession : il croit pouvoir, d’ailleurs, assigner à ces types humains, certaines règles, certaines lois intellectuelles et morales qui leur sont communes avec nous.
Il est devenu nécessaire de rappeler au moins les griefs essentiels de Saint-Simon contre le duc de Noailles, de les examiner en les réduisant, de distinguer ce qui est positif et ce qui n’est que conjectural ou purement imaginaire, mais de maintenir aussi ce qui paraît incontestable, et de se former une idée aussi entière que possible d’un homme qui a été l’objet d’un des plus éclatants portraits, le sujet d’une des plus prodigieuses autopsies morales qui existent en littérature. […] Si elle vous détruit d’un côté au physique, de l’autre côté, au moral, comme elle vous répare un homme !
Le recueil, complété par deux publications postérieures, forme comme une revue de l’histoire de l’humanité, saisie en ses principales (ou soi-disant telles) époques ; c’est une suite de larges tableaux ou de drames pathétiques, où s’expriment les croyances morales du poète. […] Il a un esprit de généralisation, qu’il applique même aux faits de sa sensibilité ; il ne s’arrête qu’aux émotions où transparaît quelque servitude ou quelque aspiration de l’impersonnelle humanité ; mais ces généralités sentimentales ne sont pas des lieux communs, et ces poèmes exquis notent je ne sais combien de fines nuances d’impressions, l’ont apparaître je ne sais combien d’invisibles forces morales.
Puis les souvenirs des expériences morales consignées dans les livres lui reviennent sans cesse ; il y compare, malgré lui, ou cherche à y conformer sa propre aventure. […] Il aime sans aimer, il aime exprès : et c’est pourquoi il cesse d’aimer dès qu’arrive l’heure des résolutions suprêmes, du jour où son amour, en se prolongeant, risquerait de compliquer irrémédiablement sa vie, cesserait d’être un exercice agréable et ingénieux, une occasion d’expériences et de vérifications morales.
Et le fils du mort, imbécile scientifique, étranger à toutes les vraies fiertés et à toutes les délicatesses morales, s’attarde indéfiniment à instruire le procès de son père. […] Vous prêchez « l’antisémitisme moral ».
Les Mémoires que nous lisons, et qui ne sont guère qu’un examen moral et chrétien de conscience, nous le montrent au fond meilleur à bien des égards que ne le jugeait le monde et que les observateurs sévères ne le soupçonnaient. […] Tous les succès de d’Antin à la Cour et la félicité où il nage en ces années 1709-1710 ne l’empêchent pas de revenir de loin en loin à son Journal, pour y consigner ses regrets, ses moralités, ses scrupules même de conscience : il semble qu’il ait eu, de temps en temps, besoin de s’administrer de petites leçons morales, des admonestations dont il sait bien qu’il tient trop peu de compte dans sa conduite : mais il espère toujours que, la grâce aidant, le moment viendra finalement d’en profiter.
Dans ces rues, je suis effrayé de la quantité des pharmacies nouvelles qu’a fait éclore l’Assemblée, et devant l’exposition de tant de pains de gluten, je me demande si les diabétiques qui sont renfermés dans ces murs, auront le courage moral. […] Pierre Gavarni, qui dînait chez moi, a laissé éclater naïvement sa stupéfaction de la connaissance intime, que mon frère et moi avions du moral de son père.
Le diamètre du bien idéal et moral correspond toujours à l’ouverture des intelligences. […] Tout en étant équité dans l’ordre moral et équilibre dans l’ordre matériel, tout est équation dans l’ordre intellectuel.
C’est ainsi que ceux qui prétendent trouver chez leur future épouse des qualités peu communes (ce que symbolise peut-être l’idée de la personne sans balafres se voient punis de leur excessive prétention) par les défauts moraux, contre-partie de la perfection physique (Voir tous les contes relatifs aux marques cicatricielles). […] Le sounkala de Marama, —Orpheline de mère, —Hammat et Mandiaye, —Le canari merveilleux)133, mais moins au point de vue moral qu’au point de vue pratique.
Dans cet état moral et politique de notre société reconstituée, il est d’une conséquence nécessaire que la littérature réponde aux besoins des âmes et des esprits. […] Les classiques ne sont pas si peu instruits qu’on le suppose de la nature des facultés morales de l’homme, des besoins qu’elles éprouvent, et des moyens qu’on doit employer pour les satisfaire.
Il a failli comme homme dans son devoir moral, mais il a failli aussi dans sa fonction d’observateur comme intelligence. […] Ou c’est la plus complète fermeture aux choses du gouvernement, ou c’est du puritanisme raccourci, un sens moral épais qui bouche le cerveau et la vue, et dans les deux cas, c’est l’homme politique des Mémoires qui reste sur la place, mort du coup !
Tous ceux-là qui s’imaginaient être le plus en dehors du débat et qui se moquaient de nous et de nos querelles, tous les philosophes de ce temps qui croient encore aux lois morales (et tous veulent avoir l’air d’y croire, ces ennemis de Tartuffe !) […] Il ne l’a pas trouvé même en France, sa belle patrie ; car le livre que voici, qu’on a republié avec une obstination courageuse, y existait depuis plus de trente ans comme un diamant dans une caverne, et les têtes philosophiques de la Revue des Deux-Mondes, qui revoit, mais qui ne voit pas, n’en ont jamais dit le moindre petit mot, et les lunetiers de l’Académie des sciences morales n’ont pas aperçu le diamant.
Ce principe, ce ne fut ni la volonté créatrice, ni la dictature d’un homme : ce fut la rencontre heureuse de l’état moral des Romains avec l’intérêt de leur chef, cette trêve de Dieu sur le monde qui permit à la nation conquérante, toute pleine encore de jeunesse et de génie, et aux nations assujetties qu’elle éleva bientôt jusqu’à elle, de se reposer dans une paix active de quarante années, embellie par la richesse et les arts. […] Quelle sanction sublime auraient reçue les fragments de vérité, les éclairs de sentiment moral, les premiers cris de justice et d’humanité mêlés souvent aux erreurs de sa philosophie et aux pernicieux exemples de son siècle corrompu !
Cette étude faite évidemment sur nature, et dont chaque trait a dû être observé, produit dans l’âme du lecteur un profond malaise moral, au sortir duquel toute fraîcheur et toute vie est pour longtemps fanée ; on se sent comme vieilli avant l’âge.
Dès qu’on cherche l’homme dans l’écrivain, le lien du moral au talent, on ne saurait étudier de trop près, de trop bonne heure, tandis et à mesure que l’objet vit.
On dit qu’il faut contraindre, humilier, punir, et l’on sait néanmoins que de pareils moyens ne produiraient dans notre âme qu’une exaspération irréparable ; on voit ses ennemis comme une chose physique qu’on peut abattre, et soi-même, comme un être moral que sa propre volonté seule doit diriger.
Ils ont trois ou quatre mots précieux qui résument toutes leurs émotions esthétiques, et qui peuvent encore traduire toutes leurs impressions sur tout le monde physique et moral.
En voici de littéraires : « Paul de Kock éclabousse la modestie et la pudeur pour faire rire. » « Tacite est merveilleux dans l’antithèse, lorsqu’il n’y est pas ridicule. » En voici de morales : « Peu aiment beaucoup ; beaucoup aiment peu. » « Un despote n’a pas d’amis. » « L’époux qui frappe sa compagne mérite-t-il le nom d’époux ?
il l’ignore et cela l’effraie d’autant plus), il se sent réellement responsable du sort matériel et moral des millions d’hommes que Dieu lui a confiés ; il sent qu’il est leur maître pour leur bien, pour le bien de tous, et particulièrement des plus humbles.
Non seulement la plupart des princes vivent comme nous (et s’ils gardent autour d’eux quelque reste de cérémonial, c’est par nécessité ou par devoir, et les pompes mystérieuses de la cour de Louis XIV leur seraient à tous insupportables), mais ils sentent comme nous, ils ont toutes nos maladies morales.
Son évolution l’y entraîne ; et cet homme, qui a commencé par être un parfait artiste de légendes, finira par renoncer aux drames et aux œuvres imaginatives pour se consacrer exclusivement aux sciences morales.
J’eus tort peut-être ; il en est résulté que, sur mes vieux jours, au lieu d’être, selon l’usage, un conservateur rigide, un moraliste austère, je n’ai pas su me défendre de certaines indulgences que les puritains ont qualifiées de relâchement moral.
Cet événement fut au nombre de ceux qui concoururent, dans la période de 1670 à 1680, à opérer de grands changements dans la situation, dans l’esprit et le caractère du roi, et a confirmer l’ascendant qu’avaient pris sur les mœurs de la cour les exemples des personnes en qui s’étaient conservées les traditions morales de l’hôtel de Rambouillet.
C’est par une heureuse combinaison des connaissances physiques et morales, et surtout par le concours des idées religieuses, qu’on parviendra à redonner à notre jeunesse cette éducation qui jadis a formé tant de grands hommes.
Sans le voltairianisme et la libre pensée, peut-être même les plus badauds parmi les admirateurs à fond de train du Roi Voltaire ne s’abuseraient pas complètement sur le compte de ce caméléon moral, âme desséchée, jalouse de gloire, qui cracha sur la figure de quiconque le suivit ou le précéda, et qui se serait pris en exécration s’il se fût rencontré sur son propre chemin lui-même ; lâche pour tout braver, brave au milieu des lâches, grand dans les petites questions, petit dans les grandes ; qui réduisit tout à rien pour être quelque chose, et qui grimpa, comme un écureuil, jusqu’à la gloire, en passant par tous les degrés du mépris !
Mais le moyen-âge, dans sa foi solide et naïve, ignorait cette loi du monde moral : que toute compression engendre une dilatation, la Nature refoulée pendant des siècles, fit un jour irruption, en dépit des barrières.
Pour voir en ces dernières années que l’état moral de la France était gravement atteint, il fallait quelque pénétration d’esprit, une certaine habitude des raisonnements politiques et historiques. […] Une telle chambre pourra mal représenter la propriété, les intérêts, ce qu’on peut appeler les collèges moraux de la nation. […] Les grandes villes, enfin, sont des personnes morales, ayant un esprit propre. […] Le gouvernement parlementaire est excellent pour les époques de prospérité ; il sert à faire éviter les fautes très graves et les excès, ce qui certes est capital : mais il n’excite pas les grands efforts moraux. […] Le catholicisme est trop hiératique pour donner un aliment intellectuel et moral à une population ; il fait fleurir le mysticisme transcendant à côté de l’ignorance ; il n’a pas d’efficacité morale ; il exerce des effets funestes sur le développement du cerveau.
Au centre des puissances morales qui mènent les événements sensibles, il trouvera un instinct dominateur et destructeur, comme un abcès énorme qui a tiré à lui tout le sang vital. […] Quand on dit qu’un individu, animal ou homme, reçoit tous ses caractères physiques et moraux par héritage, on ne veut point dire qu’il n’hérite que de son père ou de sa mère, ou de tous les deux réunis. […] On peut le prouver rigoureusement pour les caractères physiques, et grâce à la correspondance établie entre le physique et le moral, on peut conclure de même pour les caractères moraux ; l’hérédité physiologique nous garantit l’hérédité psychologique. […] La ténacité du caractère héréditaire et transmis explique les obstacles qui empêchent telle civilisation, telle religion, tel groupe d’habitudes mentales et morales de se greffer sur une souche différente ou sauvage. […] Il faut un thème général, une sorte de lien commun moral qui serve de matière au récit.
Pour moi, je doute que Mérimée ait jamais eu un sentiment moral de cette nature. […] En effet, c’est en se promenant qu’on fait les belles découvertes intellectuelles et morales. […] Ce livre a été couronné par l’Académie des sciences morales. […] C’est pourquoi je la tiens pour un écrivain des plus moraux. […] Le romantisme de 1820 fut moral et religieux ; celui de 1830 fut pittoresque.
Dans le monde moral comme dans l’ordre physique, nous n’avons besoin de Dieu qu’autant que la nature ne saurait se suffire à elle-même. […] Renouvier, dans son deuxième Essai de critique générale, a données sous ce titre : Pascal et la Théorie du vertige moral. […] Reconnaître les individualités morales, tel est l’objet de Marivaux, et les reconnaître à travers leur visage, telle est sa prétention. […] Je la pousserai donc à bout, pour bien montrer ce qu’il y a sinon d’absolument immoral, tout au moins de peu moral dans le roman de Marivaux. […] Rien n’est plus simple : c’est de faire envisager du côté moral tous les événements dont il se propose le récit.
Constant accueillait plus indulgemment le livre de Cabanis (Traité du Physique et du Moral), qui paraissait à cette fin de 1802, et qu’il recevait de Paris en même temps que Fauriel y recevait Delphine. […] « Dévoiler par la plus savante critique les secrets de l’histoire, de la chronologie, de la culture, de l’état politique, moral, religieux, des peuples et des lieux où s’est passée la scène des événements de l’Ancien Testament, voilà, lui disait Villers, la tâche qu’ils ont remplie, et qui est un peu plus intéressante que vous ne semblez le croire. […] Cabanis l’était pourtant, si je m’en forme une exacte idée, autant qu’aucun de son temps et du nôtre ; il l’était dans le sens le plus élevé, le plus honorable et le plus moral, — un amateur éclairé et passionné de la sagesse. […] Il était de ceux en qui allait se vérifier un mot que lui avait dit Fauriel au début : « L’imagination, quand elle s’applique aux idées morales, se fortifie et redouble d’énergie avec l’âge, au lieu de se refroidir. » Manzoni s’occupait donc, sinon à produire de la poésie en ces années, du moins à jouir de tout ce qui en fait le sujet même et la meilleure part. […] Si discrète, si contenue que soit l’expression de sa sympathie, tout son cœur, on le sent, est pour ce beau et malheureux pays, où tant de fois de barbares vainqueurs fondent à l’improviste, coupant (ce qui est vrai au moral aussi) les oliviers par le pied et les arrachant jusqu’à la racine.
On peut dire sans exagération mythologique que M. de Balzac a été, sa vie durant, le Tantale du succès de théâtre ; et ce trait suffirait, au besoin, pour fixer le niveau intellectuel et moral que suppose cette préoccupation constante de la question d’argent. […] Goriot aime ses filles par une sorte de besoin ou d’instinct animal, où vous chercheriez en vain une lueur de sens moral ou seulement d’intelligence et de raison. […] Triboulet est un bouffon, chez qui le sentiment moral se réveille dès que le sentiment paternel est menacé. […] Ne nous lassons pas de le répéter : ce n’est pas impunément que l’on abaisse le niveau moral de la littérature. […] À y regarder de près, et à tous les points de vue, religieux, politique, moral, qui fut plus coupable et plus funeste que Marie Stuart ?
Il arrivait, d’aventure, que de jeunes romanciers, nouveaux venus dans la carrière, imbus de préjugés artistiques et moraux que rendait excusables leur ignorance du métier, tentaient d’apporter au public quelque conception plus relevée et d’appliquer aux fantaisies de leur imagination les éléments au moins d’une méthode esthétique. […] Il faudrait enfin que, dans le plus grand nombre des romans, le vice ne s’étalât point avec une obsessive complaisance, de façon qu’on n’en fût pas réduit à composer une spéciale et niaise littérature pour jeunes filles ; et que, dans les sujets où de graves questions de mœurs doivent nécessairement être traitées, l’auteur entrât dans son sujet avec le respect dû à sa propre dignité, à la délicatesse du lecteur même viril, et aux misères morales de l’humanité, qui en souffre et qui a tant de peine à s’en délivrer. […] Les œuvres d’art ne se font pas sur commande : elles naissent, comme les vivants, du milieu moral qui les rend possibles. […] Nous paraissons, cependant, ignorer qu’il y a des poisons moraux faisant plus de mal à la conscience publique que jamais l’arsenic ne saurait en faire au corps.
Il y a là une prévision, un pressentiment élevé des dangers moraux de l’avenir, dont il faut tenir compte au prince Henri. […] J’ai terminé ce chapitre, qui aurait pu s’intituler Frédéric le Grand et le prince Henri : il m’en reste un dernier à écrire, à extraire d’une autre portion, également intéressante, de cette correspondance de famille ; il aura pour titre : Frédéric le Grand et sa sœur la margrave de Baireuth, et pour ce qui est des sentiments moraux, il sera plus consolant.
Ces lettres de la jeunesse de Mme Swetchine nous révèlent une âme ardente, impétueuse, que la difficulté, l’âpreté même de l’effort moral tente et convie, et qui ne s’est jetée vers Dieu avec tant de passion que de peur de se laisser prendre trop vivement aux choses de la terre. […] Elle partit seule, alla plaider auprès du czar la cause deson vieux mari, traversa le Nord par la saison la plusrigoureuse, et dans un état de santé déplorable, sans un murmure, sans une plainte : une lettre d’elle, admirable de sentiment (tome I, page 377), témoigne de ses dispositions morales, de sa résignation au devoir, de sa soumission prête à se laisser conduire jusqu’aux dernières conséquences : elle eût tout quitté, Paris et son monde, s’il l’avait fallu et si le czar avait maintenu son arrêt, pour aller habiter dans quelque ville obscure de la Russie, à côté du triste et taciturne exilé.
Je me figure, d’après les analyses qu’on nous en a données, quelque chose entre les Contes moraux de Marmontel et les Incas. […] On voit cela d’ici : c’était pathétique, déchirant, attendrissant et moral !
Ajoutons que si, au point de vue militaire et immédiat, la victoire de La Marsaille ne parut guère rien changer à l’état général des affaires, l’effet moral fut produit. […] Vers l’automne de 1695, le roi voyant que le duc de Savoie le lanternait toujours et qu’or, ne concluait pas, voulut décidément être en mesure d’agir la campagne suivante ; et Tessé, qu’il fit interroger sur cet article et sur le point précis où gisait la difficulté, répondait avec sa finesse habituelle, et à la fois avec tout le respect qu’il devait et qu’il portait en effet à Catinat ; — c’est un dernier jour ouvert, et selon moi définitif, sur l’esprit et le moral du très brave, mais très prudent maréchal : « Je vais parler franchement, écrivait donc Tessé (16 septembre 1695), puisque le roi l’ordonne.
La seule nouvelle de la convocation des États généraux l’avait comblé de joie, et il avait désiré d’en être ; mais envoyé à Paris par ses compatriotes de Riom, dès le mois de novembre 1783, un peu avant les élections, pour demander que la ville fût le chef-lieu du bailliage, il avait trouvé un régime moral peu rassurant, et avait pu reconnaître un Paris tout autre que celui qu’il avait laissé : « Lorsque je vis l’état de la capitale, où je n’étais pas entré depuis près de trois ans, la chaleur des discussions politiques, celle des pamphlets circulant, l’ouvrage de M. d’Entraigues, celui de l’abbé Sieyès, les troubles de Bretagne et ceux du Dauphiné, mes illusions disparurent. » Il avait emporté de M. […] Si l’incompréhensibilité des mystères révélés épouvantait ma raison, les merveilles de la nature me démontraient évidemment son auteur et l’existence d’un ordre moral à côté de l’ordre physique.
Mais tout en s’y refusant par respect pour son caractère moral, on ne sait quelle autre explication trouver. […] Voilà l’explication la plus plausible, dans les termes mêmes où je la reçois ; et, malgré tout, le sentiment moral persiste à souffrir d’une dénégation si formelle de la part de Barnave.
Sous ce titre un peu solennel, l’auteur ne fait autre chose que donner des esquisses morales, satiriques, ingénieuses, très fines et assez justes, le résultat de ses observations quand il se promène en flâneur dans Paris. […] Quelquefois, bien rarement, sa pensée se fait jour par des réflexions morales qui accusent la haute misanthropie dont il est plein.
Quand il en vient à l’astronomie en particulier, à la question de savoir si c’est la terre qui est le centre autour duquel tourne l’univers, ou si c’est elle au contraire qui décrit une révolution dans l’espace, il a de ces comparaisons toutes morales et sensibles qui vous remettent d’avance au point de vue : Il faut que vous remarquiez, s’il vous plaît, que nous sommes tous faits naturellement comme un certain fou athénien, dont vous avez entendu parler, qui s’était mis dans la fantaisie que tous les vaisseaux qui abordaient au port de Pirée lui appartenaient. […] Tout cela est vrai, et pourtant il est un point par lequel Fontenelle va reprendre aussitôt sa revanche sur Pascal lui-même ; car, dans cette vue admirablement sentie et embrassée tant au physique qu’au moral, Pascal, à un endroit, a corrigé lui-même sa phrase, l’a rétractée et altérée pour faire tourner le soleil autour de la terre et non la terre autour du soleil.
Suivent les plus jolies descriptions, les plus chantantes, les plus embaumées : mais le moral s’y joint toujours. […] » — C’est après avoir entendu ce poème et tant de pièces inspirées par un même sentiment moral élevé, qu’on a pu dire avec raison : « Si la France possédait dix poètes comme Jasmin, dix poètes de cette influence, elle n’aurait pas à craindre de révolutions. » J’allais oublier de dire que ce troisième volume de Jasmin est dédié à M.
Rentré en France sous le Directoire, il fut de ceux qui, sous le Consulat, travaillèrent à relever les ruines morales de la société, et il publia en 1802 son traité Du divorce et sa Législation primitive. […] Dans ses deux volumes de Recherches sur les premiers objets des connaissances morales, il a défendu la philosophie spiritualiste par les armes les plus aiguisées et les plus habiles qu’elle ait maniées de nos jours.
Et d’ailleurs, si Mme de Motteville, se tenant à son rôle de femme, ne disant que ce qu’elle a appris par elle-même ou de bonne source, n’essaye pas de pénétrer les secrets du cabinet (dont elle devine pourtant très bien quelques-uns), elle nous peint au naturel l’esprit général des situations et le caractère moral des personnages : c’est ce côté durable que le temps a dégagé en elle, et qui la place désormais à un rang si distingué et si bien établi. […] Quelque temps après, on connut que les vertus de cette reine gothique étaient médiocres : elle n’avait alors guère de respect pour les chrétiennes ; et, si elle pratiquait les morales, c’était plutôt par fantaisie que par sentiment.
Il y a des causes générales, soit morales, soit physiques, qui agissent dans chaque monarchie, l’élèvent, la maintiennent, ou la précipitent ; tous les accidents sont soumis à ces causes ; et, si le hasard d’une bataille, c’est-à-dire une cause particulière, a ruiné un État, il y avait une cause générale qui faisait que cet État devait périr par une seule bataille : en un mot, l’allure principale entraîne avec elle tous les accidents particuliers. […] Le fameux Dialogue de Sylla et d’Eucrate, qui parut quelques années après les Considérations sur les Romains (1745), ne s’en sépare guère : il fut composé pour l’espèce d’Académie des sciences morales et politiques en germe, qui s’assemblait dans un entresol de la place Vendôme, chez l’abbé Alary.
Les uns, très complexes, comme tous ceux que nous venons de citer, sont intellectuels en même temps que moraux : ils résument et systématisent la situation philosophique de toute une époque en face de la vie et de la destinée. Les autres, plus étroits et purement moraux, personnifient des vertus ou des vices, comme l’Othello ou l’Iago de Shakespeare, la Phèdre de Racine, la Cléopâtre de Corneille, Harpagon ou Tartufe, Grandet ou le père Goriot.
Les lois morales anciennes veulent être constatées, les lois morales nouvelles veulent être révélées ; ces deux séries ne coïncident pas sans quelque effort.
On ne cherchera pas dans son livre les analyses biographiques et psychologiques d’un Sainte-Beuve, ni la critique précise et pratique d’un La Harpe ou d’un Voltaire, ni les grandes vues de littérature comparée d’un Villemain, ni les applications morales d’un Saint-Marc-Girardin, ni les méditations individuelles d’un Sacy. […] Nisard ne craint pas de taire entre Bossuet et Voltaire, supérieurs l’un et l’autre par le bon sens, l’un dans les vérités familières, l’autre dans les plus hautes vérités morales ; mais enfin le bon sens suffit-il à constituer le génie ?
Rien de plus simple que la déduction des vérités morales. […] Une série analogue d’opérations semblables va produire l’ordre mathématique des sentiments moraux.
Il faut y voir un des phénomènes littéraires et moraux les plus curieux de notre temps.
Les glorieuses bassesses du christianisme, tel est son sujet ; il est, en parlant ainsi, dans le plus vrai sens et dans le plus vif du christianisme ; il nous en dit le secret, il nous en fait toucher du doigt la clef de voûte au moral, au sens divin.
L’ordre s’organisant avec l’Empire, la liberté revenant avec la Restauration, un jugement philosophique et moral sur la poésie d’Horace, un touchant et cordial éloge du feu duc Matthieu de Montmorency, ont tour à tour fourni aux développements de l’orateur et aux applaudissements de l’auditoire.
Ce que les Anglais ont de gaieté, conduit presque toujours à un résultat philosophique ou moral ; la gaieté des Français n’a souvent pour but que le plaisir même.
Je l’ai dit, celui qui veut mettre le suicide au nombre de ses résolutions, peut entrer dans la carrière des passions ; il peut y abandonner sa vie, s’il se sent capable de la terminer, alors que la foudre aura renversé l’objet de tous ses efforts et de tous ses vœux ; mais comme je ne sais quel instinct, qui appartient plus, je crois, à la nature physique qu’au sentiment moral, force souvent à conserver des jours dont tous les instants sont une nouvelle douleur, peut-on courir les hasards, presque certains, d’un malheur qui fera détester l’existence, et d’une disposition de l’âme qui inspirera la crainte de l’anéantir ?
Sa philosophie toute négative s’est tournée en dandysme moral.
Sans eux, Emma n’aurait pas la candeur de vouloir fuir avec Rodolphe, et elle accepterait l’argent du notaire Tuvache… Nos névrosées trouveraient un grand profit moral dans la lecture de Jacques et de Lélia.
Le plaisir, étant essentiellement personnel et intéressé, n’a rien de sacré, rien de moral.