Mais, dès ce moment, on peut dire qu’il devint célèbre. […] On vit le moment où l’histoire des Couplets de Rousseau alloit se renouveller.
. — Comment en ce moment la littérature entre dans la politique […] Toute sa vie fut semblable à ce moment, comblée et ravagée de douleurs et de haines. […] En politique, il est presbytérien ; en religion, athée ; mais il trouve bon en ce moment d’avoir pour concubine une papiste. […] Et je me souviens que lui-même en faisait l’aveu à une dame, exceptant toutefois la promesse qu’il lui faisait en ce moment, qui était de lui procurer une pension. […] Par exemple, la mode en ce moment était aux nœuds d’épaule (shoulder-knots), et le testament de leur père leur défendait expressément d’ajouter, de changer, ou d’ôter rien à leurs habits. « Après beaucoup de réflexions, l’un des frères, qui se trouvait plus lettré que les deux autres, dit qu’il avait trouvé un expédient.
Son navire vient de sombrer avec une cargaison d’un prix énorme, et il se trouve réduit en un moment de l’opulence à la mendicité. […] Nous ne pouvons en ce moment nous rappeler un seul exemple où cette règle ait été transgressée avec un heureux effet, excepté l’exemple de la Boucle de cheveux. […] L’humour consiste à dire d’un ton solennel des choses extrêmement comiques, et à garder le style noble et la phrase ample, au moment même où l’on fait rire tous ses auditeurs. […] His vessel with an inestimable cargo has just gone down, and he is reduced in a moment from opulence to beggary. […] We cannot at this moment call to mind a single instance in which this rule has been transgressed with happy effect, except the instance of the Rape of the Lock.
Tels sont ces âges, que nous avons signalés comme les moments de grandeur de la poésie. […] Un moment on a cru pouvoir investir les plus stériles, les plus énervantes rêveries de la toute-puissance en matière poétique. […] Un front échevelé, un cerveau de fantasque humeur, une poitrine phtisique, furent un moment réputés pour le sanctuaire naturel des grandes pensées. […] Sous ce rapport comme sous tant d’autres nous sommes tout le contraire de l’Allemagne, qu’un moment nous avons cru imiter. […] Rapprochez de la figure d’Alexandre celle de César, qui apparaît à un moment de l’histoire romaine analogue à celui où Alexandre vient couronner l’histoire grecque.
c’est sans doute que j’ai en ce moment l’esprit engourdi et paresseux, mais je n’ai pas grand’chose à vous en dire. […] Elle a pris pour amant un ami de son mari, un beau gars, Laurent, employé dans un ministère et peintre amateur à ses moments perdus. […] Je suis si heureux en ce moment que je ne sais plus bien ce que je dis… Petit chat, va ! […] » A ce moment, un contrevent s’ouvre : la complice se dénonce. […] Il y a des moments où j’ai peur de devenir fou, oui, fou, et pire encore.
C’est à partir de ce moment qu’il faut le considérer dans ses traits généraux. […] La chose seulement eût été plus certaine dès le premier moment de l’affaire. […] Mais précisément, en ce moment, vous êtes les plus faibles. […] Jusqu’au dernier moment, Napoléon III tergiversa, recula. […] Il est possible que ce moment de renoncement arrive.
On accorde, en général, très peu d’intérêt aux choses que l’on vit sur le moment. […] C’est le moment de nous bien tenir ». […] A un certain moment, il se trouva debout devant moi, sa tasse de thé à la main. […] Depuis ce moment, j’ai senti que ma vie était finie. […] A partir de ce moment, j’allai régulièrement chez lui.
Il l’a remarqué lui-même, aucun ouvrage n’arriva mieux à son moment. […] Ce fut le seul moment de sa vie où Chateaubriand fut à la fois populaire et bien en cour. […] Mais, pour le moment, il voit une beauté merveilleuse dans le christianisme : il y court. […] Au temps où il parle, il voit ainsi son œuvre passée, tant à la fois il est sincère, et sensible à l’impression du moment. […] L’étude que je fais en ce moment a précisément pour but de montrer qu’il a été cela, et aussi autre chose.
Il y reconnaissait l’œil du peintre prenant des notes pour écrire à jamais, un aspect, une physionomie, à un moment qu’on ne veut pas oublier. […] Philothée O’Neddy eut son moment d’éclat vers 1838. […] Il répond mieux qu’un autre à l’idéal du moment. […] Bocage jeta encore un éclat étincelant dans le rôle du major Palmer ; mais, jusqu’à un certain point, il partageait, en ce moment de réaction, la disgrâce de l’école romantique. […] Chaque flot luit un moment sous le rayon et puis rentre dans l’ombre.
Cependant, devançant tous les autres cavaliers, Giabal était au moment d’atteindre Giafar, lorsqu’il lui crie : « Pince-lui l’oreille droite, et donne un coup d’étrier ! […] Aussi, dans ses écrits, aux moments mêmes où la passion l’emporte, il reste préoccupé de l’harmonie de la phrase, qu’il tourne, retourne de cent façons. […] Mais, que l’occasion les surprenne, ils cèdent aussitôt sans résistance, ou ne résistent un moment que pour succomber de propos délibéré. […] Si le génie a ses moments de fièvre, c’est en santé qu’il juge définitivement ce qu’il a produit dans ces moments-là. […] Combien je donnerais pour pouvoir, si j’étais en état de le faire, effacer de ma vie ma manière d’agir de ce moment-là !
La morale sera sociologique ou théologique, et l’on ne voit pas pour le moment un troisième terme. […] Il est en horreur à ses concitoyens au moment même où il commet l’injustice ou très peu de temps après. […] Et même y a-t-il tant de citoyens qui eussent voulu être l’un ou l’autre au moment même où ils triomphaient ? […] Mettre un peu d’éternité dans le moment c’est ôter au moment son aiguillon. […] Et maintenant ce que je me demande, c’est quels moments lui seront restés pour travailler.
Son admirable sœur lui vint en aide dans ce moment difficile. […] À ce moment les travaux de Guizot et d’Augustin Thierry avaient donné une impulsion extraordinaire aux études sur le moyen âge. L’ouvrage de Michelet parut au premier moment devoir exercer une influence semblable sur l’étude de l’antiquité. […] … « On le croit par moments. […] Jamais il ne lisait un livre, ne se préoccupait d’une chose, étrangers à son travail du moment.
Moment critique du développement de M. […] Bourget, mais en ce moment il est encore arrêté par deux obstacles qu’il nous faut expliquer. […] On trouva cela charmant, parce qu’en ce moment-là on était en veine de scepticisme. […] Cuvillier-Fleury.) — A un moment de sa carrière, M. […] Il était de mode, à ce moment-là, d’affecter le dédain de tout ce qui n’était pas « la page écrite ».
Nous assistons aux moments successifs qui sont la condition même de la vie. […] Les Corses ne se contentent pas d’invoquer Napoléon dans les moments décisifs. […] Tout dépend de ce moment-là. […] Est-ce le moment de mal parler des Français, quand les flammes de Moscou menacent Paris ? […] Il y a des moments où l’histoire est plus superbe que la légende.
La couleur des vêtements brûle à force d’être splendide ; mais toujours au moment d’éblouir, de scintiller en ruisselant, elle s’arrête et débouche dans la matité. […] À ce moment naît l’accord du tableau. […] Elle n’apparaissait dans les drames que par moments. […] La matière de chaque œuvre, c’est un monde invisible de sentiments, un moment de la conscience. […] Elle est à chaque moment plusieurs fois différente d’elle-même.
« Il faut en convenir », dit-il à un moment de son récit (chap. […] Comment ne pas supposer que c’est dans ces moments-là que l’homme voit le mieux ? […] Taine et Renan ne font que codifier la tendance générale du siècle à ce moment de son évolution. […] L’homme est d’autant plus lui qu’il accepte de n’être qu’un moment de sa patrie et de sa race. […] La Science n’a pas fait faillite, comme on disait à un moment, mais bien le Scientisme.
On est très bien à Paris en ce moment, ma chère cousine. […] À ce moment-là, vous aurez vingt-cinq ans. […] L’approche du moment où la pointe pénètre dans la chair ne m’était plus aussi pénible ; même, je me surprenais à désirer ce moment. […] Il me disait que, deux fois, dans Hamlet et dans Œdipe roi, il avait eu un moment sublime, un moment où il croyait être, où il était vraiment Œdipe ou Hamlet. […] À un moment, après avoir cité une lettre du comte de Provence, il ajoute : « Cette lettre est abominable.
Cela continua ainsi jusqu’au moment suprême où la Providence sépara le maître et l’élève et fit tomber, chargé d’années, le vieux tronc à côté du fruit vert. […] Aimé Martin sentit, à partir de ce moment, que sa vie devait changer comme ses devoirs, et qu’il fallait vivre, penser, travailler pour deux. […] Une manie amuse un moment, mais ne fournit pas un long drame. […] Elles lui prodiguèrent, à ce dernier moment de sa vie, tout le secours édifiant que l’on pouvait attendre de leur charité, et il leur fit paraître tous les sentiments d’un bon chrétien et toute la résignation qu’il devait à la volonté du Seigneur. […] La nuit se passa tout entière Sans qu’elle pût fermer un moment la paupière ; Des chaleurs l’empêchaient de pouvoir sommeiller, Et jusqu’au jour, près d’elle, il nous fallut veiller.
Les plus grands esprits, Cardan, Bodin, Agrippa, Postel, inclinent par moments au vertige et aux chimères. […] Mais s’il eut à un moment ces velléités d’enthousiasme, comme semble l’attester son admiration de jeune homme pour Campanella, elles furent courtes chez lui ; il retomba vite à l’état de lecteur contemplatif et critique, notant et tirant la moralité de chaque chose, repassant tout bas les paroles des sages, et, pour vérité favorite, se donnant surtout le divertissement et le mépris de chaque erreur. […] Il ne craint pas d’alléguer l’exemple de la république de Venise qui, pour empêcher qu’on enlevât de Padoue la fameuse bibliothèque de Pinelli, la fit saisir au moment du départ, sous prétexte qu’il y avait dans les manuscrits du défunt des copies de certains papiers d’État. […] Les conseils de modération qu’il y mêle ne font que mieux ressortir l’immoral du fond ; on croirait par moments qu’il se joue : c’est comme un chirurgien curieux qui assemble des exemples de tous les jolis cas, ou comme un chimiste amateur qui étiquette avec complaisance tous ses poisons, en inscrivant sur chacun la dose indispensable et suffisante. […] C’est à ce moment précis que se rapporte la lettre souvent citée de Guy Patin (27 août 1648)246 : « M.
J’ai écrit ces réflexions sur le Suicide, dans un moment où le malheur me faisait éprouver le besoin de me fortifier par le secours de la méditation. […] Quant au Suicide causé par un moment de délire, par un accès de désespoir, il se peut que le divin Législateur des hommes n’ait pas eu l’occasion d’en parler au milieu des Juifs qui n’offraient guère d’exemples de ce genre d’égarement. […] Qui sait ce qu’un seul moment d’attendrissement put faire goûter alors de délices à son âme ? […] Qu’est-ce donc que prodiguer dans un moment d’impatience et d’ennui le souffle avec lequel nous avons senti l’amour, reconnu le génie et adoré la divinité ? […] — Mon ami, lui dis-je, quand mes derniers moments seraient entourés de respect, ils ne m’inspireraient pas moins d’effroi ; la mort porte-t-elle un diadème sur son front livide ?
Il n’y a point de genre où il se montre plus manifestement que dans la poésie et il n’y a point de moment où il apparaisse plus nettement que sous la reine Anne. […] À ce moment, et après cent ans de culture, il n’y a aucun mouvement, aucun objet, aucune action qu’on ne sache décrire. […] En effet, la poésie devient à ce moment une prose plus étudiée que l’on soumet à la rime. […] À ce moment, l’instinct se réveille. […] Toujours, au moment d’écrire, se dresse un modèle auguste, une sorte de maître d’école qui pèse sur eux de tout son poids, de tout le poids que cent vingt ans de littérature peuvent donner à des préceptes.
Car sans parler du flot qui gronde à tout moment, Et de votre destin qu’assiège incessamment La Gloire aux mille voix, comme une mer montante, Et des concerts tombant de la nue éclatante Où déjà par le front vous plongez à demi ; Doux bruits, moins doux pourtant que la voix d’un ami : Vous, noble époux ; vous, femme, à la main votre aiguille, À vos pieds vos enfants ; chaque soir, en famille, Vous livrez aux doux riens vos deux cœurs reposés, Vous vivez l’un dans l’autre et vous vous suffisez. […] C’est à un souvenir de ce moment que se rapporte la pièce de vers suivante, dans laquelle on a tâché de rassembler quelques impressions déjà anciennes, et de reproduire, quoique bien faiblement, quelques mots échappés au poète, en les entourant de traits qui peuvent le peindre. — À lui, au sein des mers brillantes où ils ne lui parviendront pas, nous les lui envoyons, ces vers, comme un vœu d’ami dans le voyage. » Un jour, c’était au temps des oisives années, Aux dernières saisons, de poésie ornées Et d’art, avant l’orage où tout s’est dispersé, Et dont le vaste flot, quoique rapetissé, Avec les rois déchus, les trônes à la nage. […] Cette faute de mon Raphaël fut la faute de votre Volupté : l’homme est double, mais ce n’est pas dans le même moment ; la passion n’est vraie qu’à la condition d’être simple. […] « “En tout, le paysage du domaine de Virgile était doux, d’une douceur un peu pâle et stagnante, de peu de caractère, peu propre à exciter de sublimes émotions ou à suggérer de vives images ; mais le poète avait vécu de bonne heure au milieu des grandes scènes du Vésuve ; et, même alors, s’il étendait ses courses un peu au-delà des limites de son domaine, il pouvait visiter, d’un côté, le cours grandiose du rapide et majestueux Éridan, ce roi des fleuves, et, de l’autre côté, la Bénaque, qui présente par moments l’image de l’Océan agité. […] Par moments on pourrait se croire en Hollande.
Comme élégance et vivacité de récit, cela se détachait des autres nouvelles et historiettes du moment, et annonçait un esprit de justesse et de réforme. […] Il est vrai que j’y ai eu quelque part, mais seulement dans la disposition du roman, où les règles de l’art sont observées avec grande exactitude. » Il est vrai de plus qu’à un autre moment Segrais dit : « Après que ma Zayde fut imprimée, Mme de La Fayette en fit relier un exemplaire avec du papier blanc entre chaque page, afin de la revoir tout de nouveau et d’y faire des corrections, particulièrement sur le langage ; mais elle ne trouva rien à y corriger, même en plusieurs années, et je ne pense pas que l’on y puisse rien changer, même encore aujourd’hui. » Il est évident que Segrais, comme tant d’éditeurs de bonne foi, se laissait dire et rougissait un peu quand on lui parlait de sa Zayde. […] Il est question à tout moment de cette joie que donne la première jeunesse jointe à la beauté, de cette sorte de trouble et d’embarras dans toutes les actions que cause l’amour dans l’innocence de la première jeunesse, enfin de tout ce qui est le plus loin d’elle et de son ami, en leur liaison tardive. […] Voici quelques-unes des paroles sévères qu’adressait ce prêtre selon l’esprit, à la pénitente qui les lui avait demandées : « J’ai cru, madame, que vous deviez employer utilement les premiers moments de la journée, où vous ne cessez de dormir que pour commencer à rêver. […] Or, Mme de La Fayette était le conseil de Madame en toutes ces choses de l’esprit ; son influence littéraire, à ce moment décisif, dut être très-directe et des plus puissantes.
X Le moment était délicat et décisif pour la diplomatie de la France. […] Il revenait en ce moment du congrès de Troppau avec la jolie duchesse de Floridia, sa favorite, dont il avait fait sa femme, comme Louis XIV de madame de Maintenon. […] XXXII Ma renommée de poète à peine éclos, ma qualité de diplomate français, l’accueil dont j’étais l’objet à la cour du souverain, mon bonheur intérieur, la présence de mes meilleurs amis, le loisir réservé à la poésie de ma vie comme à celle de mes pensées, ma reconnaissance pour tous ces dons de la Providence et mon penchant à la contemplation pieuse qui s’est toujours accru en moi dans les moments heureux de mon existence, comme les parfums de la terre qui s’élèvent mieux sous les rayons du soleil que sous les frimas des mauvais climats, semblaient me promettre une félicité calme dont je remerciais ma destinée ; lorsqu’un événement étrange et inattendu vint changer du jour au lendemain cet agréable état de mon âme en une sorte de proscription sociale qui se déclara soudainement contre moi, et qui me fit craindre un moment de voir ma carrière diplomatique coupée et abrégée au moins en Italie, ce pays du monde dont j’aimais le plus à me faire une patrie d’adoption. […] Plus loin, sur les confins de cette antique Europe Dans cet Éden du monde où languit Parthénope, Comme un phare éternel sur les mers allumé, Son regard voit fumer le Vésuve enflammé : Semblable au feu lointain d’un mourant incendie, Sa flamme, dans le jour un moment assoupie, Lance, au retour des nuits, des gerbes de clartés ; La mer rougit des feux dans son sein reflétés ; Et les vents agitant ce panache sublime, Comme un pilier en feu d’un temple qui s’abîme, Font pencher sur Pæstum, jusqu’à l’aube des jours, La colonne de feu, qui s’écroule toujours. […] S’immoler sans espoir pour l’homme qu’on méprise, Sacrifier son or, ses voluptés, ses jours, À ce rêve trompeur… mais qui trompe toujours ; À cette liberté que l’homme qui l’adore Ne rachète un moment que pour la vendre encore ; Venger le nom chrétien du long oubli des rois ; Mourir en combattant pour l’ombre d’une croix, Et n’attendre pour prix, pour couronne et pour gloire Qu’un regard de ce Juge en qui l’on voudrait croire Est-ce assez de vertu pour mériter ce nom ?
Elle méditait dès ce moment Corinne, son œuvre la plus lyrique, où elle voulait fondre ensemble l’émotion et l’enthousiasme pour éblouir à la fois l’imagination par le génie et pénétrer le cœur par l’amour. […] Cette lettre est un monument du dédain soldatesque du moment pour les suspects de génie et d’indépendance. […] Quel que soit le deuil de convenance qu’elle affectât un moment de porter sur les revers de l’empereur, sur la ruine de l’empire, sur l’invasion de la patrie, on ne peut croire à la sincérité bien poignante de cette douleur. […] Ce livre, retardé ainsi par la brutalité du despotisme, parut bien plus à son heure en ce moment qu’il n’aurait fait trois ans plus tôt au milieu des destructions de la guerre européenne et au bruit de l’écroulement de l’empire. […] La poésie lyrique ne raconte rien, ne s’astreint en rien à la succession des temps, ni aux limites des lieux ; elle plane sur les pays et sur les siècles ; elle donne de la durée à ce moment sublime pendant lequel l’homme s’élève au-dessus des peines et des plaisirs de la vie.
Dans la vie des individus, comme dans celle de l’humanité, il y a des Moyens Âges, des moments où la réflexion se voile, s’obscurcit, et où les instincts reprennent momentanément le dessus. […] Elle est là derrière l’humanité attendant ses moments de défaillance, pour la recevoir dans ses bras et prétendre ensuite que c’est l’humanité qui s’est donnée à elle. […] Est-ce trop de rationalisme qui a perdu cette malheureuse Italie, qui nous offre en ce moment le lamentable spectacle d’un membre de l’humanité atteint de paralysie ? […] Cela sera pourtant, du moment où elle aura créé dans le monde moral une conviction égale à celle que produisait jadis la foi religieuse. […] Il vient des moments de dégel, où tout se couvre d’humidité, devient flasque et sans tenue.
. — Il fallait continuer cette œuvre, Richard Wagner avait, d’ailleurs, une autre idée : déjà, lors des premières représentations de Tristan, en 1865, il avait demandé la création d’une Ecole de Style, pour l’interprétation des œuvres dramatiques ; en 1877, il pensa que le moment était venu d’accomplir ce projet. […] Le texte présente une histoire de l’art en trois moments. […] Hugo appartient au second moment, Wagner au troisième et annonce le nouvel art. […] Le premier moment que les anciens grecs ont connu est celui du mythe et de l’union des arts. […] Le second est celui de l’égoïsme, le moment où l’Art, un et indivisible, se trouve éclaté entre différentes formes.
Si nous passons la main sur la surface, et si nous jugeons que deux points, A et B, sont séparés par un espace, nous voulons dire simplement qu’il y a une série de sensations musculaires interposée entre le moment où nous sentons A et le moment où nous sentons B. […] Les sensations de ce genre ne sont pas des conclusions de raisonnement, des constructions de la pensée qui dirait : — l’étincelle jaillie du foyer était au premier moment à tel point, au second moment à tel autre point ; donc elle s’est mue. — Dans le temps nécessaire à l’aperception (et qui n’est, pas infiniment petit, mais mesurable), nous voyons le mouvement ; nous le voyons, dis-je, nous ne le concluons pas : nous avons un mode particulier de sentir, d’être affecté, (qui correspond en nous au mouvement extérieur et qui, si le mouvement est rapide, soudain, peut aller jusqu’à nous faire tressaillir par contre-coup. Comme le mouvement est analysable en positions occupées à divers moments par le mobile, une foule de philosophes, après Kant et Schopenhauer, ont nié à tort la possibilité de sentir ou percevoir le fait du mouvement actuel : ils ont attribué au chien qui voit fuir le lièvre, à l’enfant qui voit passer une bougie devant ses yeux, une analyse plus ou moins consciente des positions successives. […] Du moment que vous avez imaginé ou tracé la ligne, la relation est là devant vous, et devant votre interlocuteur. » Il faudra réfléchir sur cette impression pour en abstraire les caractères géométriques ; mais, encore un coup, avant d’être aperçue et réfléchie, la relation est sentie, grâce à un complexus de sensations simultanées ; et elle est sentie sous la forme déterminée de la ligne, qui seule la réalise et la constitue en fait.
L’antiquité est mieux étudiée de nos jours en France, au sein des écoles, qu’elle ne l’était et vers la fin du xviiie siècle et à aucun moment depuis ; le nombre fet grand des jeunes esprits qui à un talent suffisant d’écrire unissent beaucoup de savoir et d’érudition ; les thèses seules soutenues à la Faculté des lettres eraient foi de ce progrès continu, et attesteraient à les deugré le niveau monte. […] C’est dans un tel état de choses, anarchique tant qu’on le voudra, mais riche d’éléments, fécond de germes, et qui a peut-être encore son avenir, si, comme nous l’espérons, la France a le sien, — c’est dans un tel moment ou jamais que de telles œuvres peuvent avoir à la fois toute leur liberté d’exécution et leur part d’efficacité. […] Arroser le langage et le vivifier avec fraîcheur, cela demande des sources perpétuelles et pures ; ces sources, je le sais, on doit les chercher surtout en soi, dans son propre passé aux divers âges ; mais, du moment qu’on en demande au dehors, de quel côté se tourner de préférence à celui-là ? […] En soumettant ces idées à ceux qui en sont juges, en ne les jetant ici que comme de simples aperçus, et parce qu’il y a disette, en ce moment, de ce genre d’études au sein de la presse périodique et, comme on disait autrefois, de la littérature vulgaire, notre dessein est surtout de stimuler de jeunes et doctes esprits tels qu’il en est encore beaucoup, de les inviter à tenter une voie qui est demeurée antique et neuve, et à ne pas tant négliger les points par où une science ingénieuse se saurait greffer sur la littérature nationale : à ce prix seul est la circulation et la vie120. […] Et maintenant il dit que ces serments ont été emportés par l’onde : et toi, Lampe, tu le vois, lui le même, dans les bras des autres. » Nous prenons surtout Méléagre au moment où, renonçant décidément aux Muïscus, aux Dion, aux Théron, il célèbre d’une flamme avouable, et par moments délicate, les Zénophila, les Fanie, les Héliodora et tant d’autres beautés qui remplissent son cœur et n’en font que cendre.
En effet, à ce moment, sous la petite brise qui s’éveille, ils bruissent faiblement, et leurs feuilles luisent. […] Nous les changeons par d’autres, nous les remplaçons selon notre état intérieur, et pour les besoins du moment. […] Le misérable ne s’en sert Qu’à dépouiller sa bienfaitrice De ses principaux ornements, Elle gémit à tous moments : Son propre don fait son supplice. […] Encor quelques moments, c’en est fait de ma vie ; J’aime mieux expirer que de trembler pour toi. » Non seulement ces phrases sentent la rhétorique, mais elles font contre-sens dans un lapin. […] Le roussin d’Arcadie Craignit qu’en perdant un moment Il ne perdît un coup de dent.
CIX À ce moment, continua-t-il, Hyeronimo, qui descendait des hauteurs des Camaldules avec un énorme fagot de genêts sur le cou, entendit les aboiements de Zampogna, les coups de hache des bûcherons, les voix larmoyantes de sa mère, de Fior d’Aliza et de moi ; à travers une clairière, il vit Calamayo et ses hommes qui nous arrachaient avec violence du tronc de l’arbre, et qui nous rejetaient sans pitié sur les pierres et sur les racines arrosées du sang du visage de sa cousine. […] À ces mots, il s’approcha, avec un geste désespéré et pitoyable, les bras en l’air, de l’entaille déjà profonde de l’arbre, et, tout pâle de douleur, il pleura un moment en silence comme on pleure sur la blessure d’un homme mourant d’un coup de feu. […] mon père et ma tante, le moment où les sbires l’enchaînèrent, le lendemain, là, sur le plancher, et l’entraînèrent à la prison de Lucques en l’accablant d’outrages et de menaces de mort, m’en apprit bien vite plus que je n’en aurais su en trois ans. […] En un moment, je fus revêtue de tout cet habillement, tantôt un peu trop court, tantôt un peu trop large pour ma taille ; mes mains, adroites et promptes comme la fièvre qui me battait dans les tempes, les ajustèrent si vite et si bien sur mes épaules, à ma ceinture, à mes jambes, à ma tête, à mes pieds, qu’on aurait dit que je n’en avais jamais revêtu d’autres, et qu’ils avaient été taillés pour moi. […] C’était l’heure de midi : personne ne passait en ce moment sur la route, à cause du grand soleil et de la grande poussière.
Et jamais la force de l’honneur et du serinent féodal n’a plus fortement apparu qu’en ce Bernier : quand, sa mère morte, blessé lui-même, il a renoncé l’hommage, si, dans le premier moment de colère, il refuse la réparation que Raoul offre une fois revenu à lui, jamais cependant il n’aura le cœur en paix : il combattra Raoul de tout son courage, il le tuera, mais toujours l’idée de son serment violé le tourmentera : toujours il rappellera ses griefs, sa mère « arse », sa tête cassée ; il maintiendra « son droit », mais il sera inquiet. […] Je n’en veux pour preuve que le morceau, si souvent cité et avec raison, de la mort de Raoul : cet Ernaut de Douai qui fuit devant Raoul, la main coupée, demandant grâce à son impitoyable ennemi, secours à tous les amis qu’il rencontre, reprenant haleine, chaque fois qu’un baron de son parti arrête Raoul, piquant son cheval avec désespoir, dès qu il voit son défenseur abattu, cette poursuite sans cesse interrompue et reprise, acharnée, haletante, puis Bernier enfin s’interposant, le combat de Bernier contre Raoul, et la mort de Raoul, combat et mort décomposés en chacun de leurs moments avec une vigoureuse précision, la tristesse du vainqueur, et la rage féroce d’Ernaut qui, se voyant sauvé, se venge de ses terreurs récentes sur son ennemi abattu, voilà, à coup sûr, une scène neuve, rare, émouvante. […] Mais la mort de Bègue est un récit d’un grand effet dans sa couleur grise, avec cette accumulation rapide de petits détails pressés d’une si exacte et précise notation : la vie paisible de Bègue dans son château de Belin, entre sa femme et ses enfants, l’ennui qui prend à la fin ce grand batailleur, sourde inquiétude, désir de voir son frère Garin qu’il n’a pas vu depuis longtemps, et son neveu Girbert qu’il n’a jamais vu, désir aussi de chasser un fort sanglier, fameux dans la contrée du Nord ; la tristesse et la soumission douce de la femme ; le départ, le voyage, la chasse si réelle avec toutes ses circonstances, l’aboi des chiens, le son des cors, la fuite de la bête, l’éparpillement des chasseurs, qui renoncent ; Bègue seul âpre à la poursuite, dévorant les lieues, traversant plaines et forêts et marais, prenant ses chiens par moments sur ses bras pour les reposer, jusqu’à ce qu’il se trouve seul, à côté de la bête morte, ses chiens éventrés, en une forêt inconnue, sous la pluie froide de la nuit tombante : il s’abrite sous un tremble, allume un grand feu, prend son cor et en sonne trois fois, pour appeler les siens. […] Aussi n’y a-t-il pas de poème qui se soit maintenu à travers le moyen âge dans une forme fixe, et le moment où l’écriture leur assura une prolongation indéfinie d’existence lut non le terme, mais le commencement des pires aventures pour la plupart. […] On revient un moment, par un goût archaïque, aux décasyllabes primitifs.
Jusqu’à ce moment fécond, tous les germes semblaient sécher et les efforts échouer. […] Il erra en Poitou, fut un moment aux gages de Charles d’Orléans, et prit part aux concours que le prince poète instituait : trop connu du duc, et estimé comme il convenait, il passa chez Jean de Bourbon. […] A deux ou trois moments décisifs, il ne nomme pas l’auteur du conseil qui a tout sauvé : et ce conseiller anonyme, on a tout lieu de croire que c’est lui. […] Il évalue la pression des réalités brutes, des faits, sur les hommes, la réaction des volontés et des intérêts humains, et le poids qu’ils jettent dans la balance à un moment donné. […] Il a bien vu, avant Bossuet, au moment même où le monde féodal s’écroule et où naît la royauté absolue, il a eu le grand mérite de voir que l’unique frein et contrepoids de cet absolu pouvoir, l’unique garantie contre les accidents de l’individualité dans la personne royale, était le sentiment religieux, amour de Dieu, ou peur de l’enfer137.
Chose inattendue, ce poète, que ses disciples regardent comme un artiste si consommé, écrit par moments (osons dire notre pensée) comme un élève des écoles professionnelles, un officier de santé ou un pharmacien de deuxième classe qui aurait des heures de lyrisme. […] Allez, rien n’est meilleur à l’âme Que de faire une âme moins triste… Je ne me souviens plus que du mal que j’ai fait… Dans tous les mouvements bizarres de ma vie, De mes malheurs, selon le moment, et le lieu, Des autres et de moi, de la route suivie, Je n’ai rien retenu que la bonté de Dieu. […] C’est à ces moments-là qu’on se sent devenir fou. […] A certains moments, sous un choc extérieur, ces impressions ignorées de nous se réveillent à demi : nous en prenons subitement conscience, avec plus ou moins de netteté, mais toujours sans être informés d’où elles nous sont venues, sans pouvoir les éclaircir ni les ramener à leur cause. […] Il n’exprime presque jamais des moments de conscience pleine ni de raison entière.
Le droit de tester apparaît à une phase déterminée de l’histoire et, d’après les restrictions plus ou moins importantes qui le limitent, on peut dire à quel moment de l’évolution sociale on se trouve. […] D’autre part, comme toutes les sociétés sont nées d’autres sociétés sans solution de continuité, on peut être assuré que, dans tout le cours de l’évolution sociale, il n’y a pas eu un moment où les individus aient eu vraiment à délibérer pour savoir s’ils entreraient ou non dans la vie collective, et dans celle-ci plutôt que dans celle-là. […] Il est évident, au contraire, que l’état où il se trouve à chaque moment de l’histoire dépend lui-même de causes sociales, dont les unes sont inhérentes à la société elle-même, tandis que les autres tiennent aux actions et aux réactions qui s’échangent entre cette société et ses voisines. […] Mais il est impossible de concevoir comment l’état où la civilisation se trouve parvenue à un moment donné pourrait être la cause déterminante de l’état qui suit. […] Si, au contraire, les principales causes des événements sociaux étaient toutes dans le passé, chaque peuple ne serait plus que le prolongement de celui qui l’a précédé et les différentes sociétés perdraient leur individualité pour ne plus devenir que des moments divers d’un seul et même développement.
Taine, — du normalien, — du rédacteur du Journal des débats, — du libre penseur, — du matérialiste, — de l’athée, — de tout ce qui, dans cet heureux moment, fait la gloire et la haute position d’un homme, — ce livre sans précédent et sans analogue, ce livre terrible, et qui tombe tout à coup sur la Révolution, quand la Révolution triomphe… J’ose même dire qu’en aucun temps pareil livre ne s’était vu. […] Elle se croit la divinité même, la seule divinité qui puisse exister pour les hommes de ce moment sublime ! […] … Grand courage, du reste, a fait cette preuve, en ce moment du siècle ! […] C’est la mort des autres histoires, que celle-ci… Jusqu’à ce moment, les histoires que nous avions de la Révolution, plus ou moins vraies, plus ou moins justes, plus ou moins des plaidoyers pour ou contre, rayonnaient du moins à un degré quelconque de deux choses qui paraissaient inextinguibles ; c’était l’opinion de l’auteur et son talent, quand il avait du talent. […] Il l’a étudié et décrit comme il eût étudié et décrit le système organique de quelque monstrueux cétacé, dans une histoire générale des poissons… Il l’a étudié et décrit, sur ses propres témoignages à lui-même, dans un livre construit avec des milliers de citations et où presque chaque phrase en est une, ce qui fait la plus puissante des nomenclatures, et il a montré, dans le principe de sa vie et dans toutes les manifestations de son action, ce genre de monstre qui a constitué le jacobin dans la bête humaine, à un certain moment de l’histoire de France et de l’humanité, Ce livre incompatible, plus haut que les partis, et qui n’a été écrit pour être agréable à personne, mais pour la vérité, est un peu lourd, on doit le reconnaître, et pour le lire il faut quelque chose de la volonté ferme qu’il a fallu pour l’écrire ; mais cette lourdeur tient à sa force même.
À quelque moment que ce fût la Critique compterait avec Alphonse Daudet ; mais, cette fois, elle a une autre raison pour s’occuper de son Nabab que le mérite prouvé de l’auteur de tant de choses charmantes, et le mérite à prouver du roman qu’il publie. […] les idées des Jeunes, à ce triste moment de la littérature et des arts, et contre lesquelles protestait la distinction de sa nature. […] Voyez cette page, par exemple, sur une danseuse (un des personnages du roman), une espèce de danseuse composite, faite de deux réverbérations de ces deux êtres évaporés, Fanny Elssler et Taglioni, et qui, vieillie, brisée, anéantie, le spectre charmant d’elle-même, se remet un soir à danser sous l’influence d’une impression heureuse, et demandez-vous si ce poète, qui a chancelé un moment du côté du Réalisme, a eu jamais davantage ce que le Réalisme, cette brosse qui se croit un pinceau, a le moins : la nuance opalisée, la transparence, la grâce, l’immatérialité ! […] Et dans quel moment ! […] le moment est bien choisi !
Ces années de son décanat furent le moment le plus glorieux de la vie de Gui Patin. […] Il y a des moments où, quand il cause en tête à tête avec ses amis Gassendi et Gabriel Naudé, il a l’air d’aller bien avant et de toucher de bien près, comme il dit, au sanctuaire. […] À mesure qu’on s’éloigne, le moment arrive où, par suite de l’encombrement historique croissant, la postérité est heureuse de rencontrer de ces représentants abrégés qui lui donnent jour sur toute une époque et qui lui font miroir pour tout ce qui a disparu. […] Diafoirus dit en parlant de son fils : « Mais sur toute chose, ce qui me plaît en lui, et en quoi il suit mon exemple, c’est qu’il s’attache aveuglément aux opinions de nos anciens, et que jamais il n’a voulu comprendre ni écouter les raisons et les expériences des prétendues découvertes de notre siècle touchant la circulation du sang, et autres opinions de même farine. » Les créations comiques de Molière sont immortelles en ce qu’elles ont pied à tout moment dans la réalité.
C’eût été le moment sans doute pour un gouvernement d’une autre nature de songer à tirer parti de ses propres ressources et de redemander à un sol fertile ses richesses trop oubliées. […] Ce sera un bonheur pour moi de pouvoir vous consoler quelques moments, si je puis être assez heureux pour vous être quelque chose. […] Il y a plus : le français est, selon moi, la langue la plus ingrate, la plus sourde, la plus pauvre, la moins souple, mais de toutes la plus soignée ; semblable aux femmes françaises qui, moins belles comme race qu’aucune autre race européenne, sont de toutes les femmes les plus habiles à se faire valoir par les grâces, l’esprit et le tact si rare de toutes les convenances du lieu et du moment. […] ses souvenirs étaient là ; il leur ouvrait la porte et repassait avec eux son bonheur d’autrefois, de manière à chasser le chagrin du moment.
Philippe Le Bas voulut entreprendre ce recueil ; un moment M. Boissonade parut ébranlé, mais ce moment fut court : « Non, dit-il après un second temps de réflexion, si j’ai fait quelque chose, il ne faut pas le mettre en comparaison avec des articles, la plupart improvisés. » Et il ferma péremptoirement la bouche à M. […] Du moment que la réflexion devenait nécessaire, qu’il fallait que la vrille, pour percer la veine du bois, appuyât un peu fort ; du moment qu’il rencontrait un nœud, une difficulté, ce n’était plus son fait ; il se détournait.
Une certaine conscience intérieure, au milieu de tous leurs succès de société, semble avoir averti les poëtes et beaux-esprits de ce bord, qu’ils n’étaient pas à leur vraie place dans le siècle, que leur moment était passé ou n’était pas venu, que d’autres, véritablement grands, régnaient, qu’ils étaient évincés, en un mot. […] Il mourut âgé de soixante-treize ans, écrit l’honnête Niceron, ayant conservé jusqu’à son dernier moment son bon sens, sa réputation et ses amis : rien que cela ! […] Dans ses meilleurs et ses plus poétiques moments, Mme Des Houlières a fait de jolis airs : c’est ainsi qu’elle appelle un simple couplet, une idée tendre, fugitive, un sentiment rapide qui nous arrive comme à travers un son de vieux luth ou de clavecin. […] Au commencement de ce siècle on se retourna encore pour regarder un moment ces petites gloires près de disparaître : Mlle de Meulan, qui n’était pas sans quelque rapport de bel-esprit moraliste avec Mme Des Houlières, a parlé d’elle plus d’une fois et assez bien.
La génération qui nous suivra examinera peut-être aussi la cause et l’influence de ces deux années ; mais nous, les contemporains, les compatriotes des victimes immolées dans ces jours de sang, avons-nous pu conserver alors le don de généraliser les idées, de méditer des abstractions, de nous séparer un moment de nos impressions pour les analyser ? […] Dans les deux parties de cet ouvrage, j’ai également cherché à ne me servir que de ma pensée, à la dégager de toutes les impressions du moment, on verra si j’ai réussi. […] En effet, le moment le plus prospère dans tous ces gouvernements est celui où cette balance, subsistant d’une manière parfaite, donne le repos qui naît de deux efforts contenus l’un par l’autre, mais cet état ne peut être durable. À l’instant, où pour suivre la comparaison, l’un des deux lutteurs perd un moment l’avantage, il terrasse l’autre qui se venge en le renversant à son tour.
« Là il s’occupait du soin d’améliorer ses terres, dont il tirait un revenu considérable ; mais ses plus heureux moments étaient ceux qu’il consacrait à l’étude des lettres et de la philosophie, ou au commerce et à la conversation des savants. […] Ces inquiétudes étaient justifiées, à quelques égards, par les infirmités qui affligèrent Pierre pendant le petit nombre d’années qu’il fut à la tête du gouvernement de la république ; mais les talents de Laurent dissipèrent bientôt ces nuages d’un moment, et élevèrent sa famille à un degré d’illustration et d’éclat dont il est probable que Côme lui-même avait eu peine à se former l’idée. » VIII Bien qu’il fût âgé de soixante et quinze ans, sa taille élevée, la majesté de ses traits, la grâce de son visage, si conforme au titre de Père de la patrie que les Florentins avaient d’eux-mêmes ajouté à son nom, la bienveillance de son accueil, la cordialité de son amitié le rendaient aussi agréable que dans sa belle jeunesse. […] Je cherchai donc pendant quelque temps, sans avoir la satisfaction de rencontrer une personne qui méritât, du moins autant que j’en pouvais juger, un attachement constant et sincère ; mais, comme j’étais près de renoncer à tout espoir de succès, le hasard me fit rencontrer ce qui jusque-là s’était refusé à mes recherches les plus obstinées, comme si le dieu d’amour eût voulu choisir ce moment pour me donner une preuve irrésistible de sa puissance. […] Politien, génie vraiment antique et digne d’Horace ne s’enivra pas de cette faveur ; il était né d’une bonne famille à Montepulciano, petite ville de la Toscane, comme Flaccus, en Calabre ; c’est de là qu’il prit son nom. « Je ne me sens pas plus enorgueilli des flatteries de mes amis, ou humilié des satires de mes ennemis, disait-il, que je ne le suis par l’ombre de mon corps ; car, quoique mon ombre soit plus grande le matin ou le soir qu’elle ne l’est au milieu du jour, je ne me persuaderai point que je sois plus grand moi-même dans l’un ou l’autre de ces moments que je ne le suis à midi. » XI Le pape étant mort en ce temps-là, Laurent de Médicis fit un voyage à Rome, pour recommander Julien, son jeune frère, à Sa Sainteté, dans le but de le faire élire au cardinalat.
Le célèbre Sadolet, croyant le moment favorable pour ramener cette ville à l’orthodoxie, l’y avait exhortée par une lettre pleine d’onction chrétienne et d’imitations de l’antiquité classique. […] De Strasbourg et de Ratisbonne, où sa réputation l’avait fait appeler par la diète, il épiait le moment de rentrer à Genève. […] À défaut de cette présence continuelle et sans sommeil de la conscience, avertissant chacun et à chaque moment de la moralité de ses actions, et prévenant ainsi la chute, il institua une sorte de conscience extérieure et publique dans la personne de censeurs des mœurs, lesquels s’introduisaient dans les maisons à tous les instants du jour et principalement aux heures des repas, alors que les plus rigides se relâchent, et que la sainteté des élus courait quelque risque. […] Mais je m’étonne encore moins qu’après plus de soixante années d’agitations, favorisées par de mauvais gouvernements, malgré l’avantage du talent du côté des calvinistes, malgré la popularité même des persécutions et la sainteté d’une sorte de martyre, dans l’effroyable extermination de la Saint-Barthélémy, malgré de grands caractères, Coligny, Sully et un grand homme dans la guerre et dans la politique, un moment chef de leur parti, Henri IV, la France ne soit pas devenue calviniste, que les qualités de Calvin n’aient pas fait accepter ses défauts, et que le philosophe chrétien n’ait pu rendre populaire le tyran de Genève.
Qui n’a senti, à certains moments de calme, que les doutes qu’on élève sur la moralité humaine ne sont que façons de s’agacer soi-même, de chercher au-delà de la raison ce qui est en deçà et de se placer dans une fausse hypo-thèse, pour le plaisir de se torturer ? […] On aime mieux passer pour leste et dégagé que pour un honnête nigaud, et, du moment que l’on associe à la morale quelque idée de pesanteur d’esprit, c’est assez pour qu’on la tienne en suspicion. […] Une des plus nobles âmes des temps modernes, Fichte, nous assure qu’il était arrivé au bonheur parfait et que par moments il goûtait de telles jouissances qu’il en avait presque peur 199. […] Ce sont là les vrais fondateurs de l’unité allemande ; du moment où toutes les parties de ce beau pays se sont retrouvées dans la langue, la gloire et le génie de ces grands hommes, elles ont senti le lien qui les unissait et elles ont dû tendre à le réaliser politiquement.
Et par moment, dans sa demi-nuit et ses ténèbres transparentes, le peuple bariolé qu’on entrevoit là, apparaît comme un carnaval dans les Limbes. […] On ne peut nier que par la volonté, le travail, la curiosité de la couleur empruntée à toutes les couleurs de l’Orient, il n’arrive, par moments, à un transport de votre cerveau, de vos yeux, dans le monde de son invention ; mais il en donne plutôt l’étourdissement que la vision, par le manque de gradation des plans, l’éclat permanent des teintes, la longueur interminable des descriptions. […] Je la maudis par moment et je la hais. […] Et comme ses yeux tombent en ce moment sur une gouache de L’Île d’amour en 1793, il s’écrie : « Tiens, ça me rappelle la connaissance de Salvandy et de Béranger. » Un Anglais installé en France et demeurant à Belleville après la Restauration, donnait beaucoup à dîner.
Comme l’invention purement personnelle et sans but, comme l’invention vraiment impersonnelle qui tend à la vérité, l’invention reproductrice, si l’on peut ainsi l’appeler, a son processus et son progrès, à chaque moment duquel elle s’accompagne spontanément d’une expression toujours adéquate. […] Quand je cherche l’expression d’une pensée ou le sens d’une phrase, j’appelle mes pensées d’autrefois au secours de ma pensée du moment ; si jadis elles ont été formées au hasard, sans attention, sans discrimination, je ne gagne rien à ce réveil d’un passé sans valeur, et, si je les reçois passivement, je risque d’accroître par une confusion nouvelle les défauts déjà invétérés de mon esprit. […] Inversement, il arrive parfois qu’un nom propre dit devant nous ne nous rappelle rien au premier moment ; puis nous reconnaissons de qui l’on a parlé ; nous reconnaissons, c’est-à-dire nous comprenons. […] Tous les hommes d’esprit ne sont pas des improvisateurs ; il y en a, et ce ne sont pas les moins naturels en apparence, dont tout l’esprit du moment consiste à se rappeler à propos259.
» Il n’est si sage qui n’ait son moment de folie, qui ne foloie (foloier, quel joli mot !) […] À un certain moment de la guerre, Renart, désespérant de tenir dans sa forteresse de Malpertuis, construit un grand vaisseau allégorique, une arche de malice, destinée à embarquer tout son monde. […] » À un certain moment et après ce premier assaut, tous, d’un commun accord, s’entendent pour aller chercher à boire, car chacun a dans sa bouteille du bon vin d’Anjou, et ils reviennent au combat sans retard.
C’est l’heure des vacances, c’est le moment de faire son tour de Suisse, sa visite aux Alpes ; pour ceux qui sont libres comme pour ceux qui sont retenus, il n’est pas de moyen plus agréable ou d’éclairer sa route si l’on part, ou de se figurer le voyage si l’on reste, que de prendre les livres de Töpffer. […] Töpffer se rappelle en ces moments et rassemble dans son impression grandiose le sentiment de l’antique Sinaï, les ressouvenirs des Prophètes, tout ce qu’il y a de plus présent et de plus parlant à l’homme dans la tradition ; et c’est ainsi qu’il anime encore ces apparitions gigantesques de l’éblouissante et froide nature, tandis que ceux qui, comme Senancour, autre grand paysagiste aussi, n’y voient que le couronnement et le témoignage subsistant des forces aveugles, n’en retirent jusque dans leur admiration rien que de morne, de consternant et de désolé. […] Ce n’est pas le moment de discuter quelques-uns des noms qu’il met en cause : il apprécie les talents célèbres et en vogue, moins encore en eux-mêmes, ce semble, que d’après leurs disciples et leurs influences ; il a de ces condamnations décisives, anticipées, qu’entre contemporains et artistes qui courent plus ou moins la même carrière, il faut laisser au temps seul le soin de tirer entièrement.
L’organisation des services étant moins précise et moins rigoureuse qu’elle ne l’a été depuis, il put être considéré à un moment comme détaché de l’École et fut nommé secrétaire de l’Observatoire, où il se trouva le collaborateur de M. […] De là, délivré de nouveau, et au moment encore une fois de rentrer à Marseille, il est rejeté par un coup de vent en Afrique, à Bougie ; il revoit Alger et y séjourne plus longtemps qu’il n’avait fait d’abord. […] Par cette lettre d’avances et de bienvenue qui allait prendre le nouvel arrivé au port, le premier il semblait convier Arago à cette renommée scientifique universelle dont lui-même il n’a pas cessé d’être la personnification la plus illustre et par moments le maître des cérémonies un peu empressé, dont ils parurent quelquefois ensemble les deux consuls perpétuels, et qui a bien ses douceurs, mais aussi ses écueils.
On est en 1777, un an avant les Poésies érotiques de Parny, dont c’est le moment et qui vont avoir leur vogue élégante et sensuelle. […] C’était le moment où de toutes parts on découvrait la Suisse intérieure et pittoresque. […] Il voulut aussi connaître les hommes distingués ou illustres que possédait la Suisse à ce moment.
En ce moment j’ai surtout à parler de sa sœur. […] Le talent caché, inoccupé, cette part de génie qu’elle a reçue de naissance, remue par moments en elle et s’ennuie. […] Il y a des moments où, n’était son père, elle penserait à se faire sœur de charité : « Au moins ma vie serait utile.
Dans son ravissement, dans l’admiration qui le pénètre jusqu’au fond de l’âme et qui déborde, le philosophe, à ce moment, se prosterne la face contre terre et adresse à l’Être divin un hommage, un hymne ardent et pur, qui ne diffère en rien d’une prière. […] Il cherche par moments à mesurer le progrès de ce mal bizarre, qui entamait si avant sa raison sans altérer sensiblement son talent. […] » Et cependant Rousseau eut jusqu’à la fin des moments de bonheur et d’intime jouissance ; il aimait, il sentait trop vivement la nature pour haïr la vie ; et s’il était besoin d’un témoignage pour prouver que la vie, somme toute, est bonne, si après le bûcheron de La Fontaine, après l’heureux Mécénas, après l’ombre d’Achille qu’Homère nous a montrée dans la prairie d’Asphodèle redésirant à tout prix la lumière du jour, il fallait quelqu’un qui renouvelât ce même aveuaa, ce n’est pas à un autre qu’à Rousseau, à cet aîné de Werther, à cet oncle de René, que nous l’irions demander.
Quoi qu’il en soit, il est difficile de supposer qu’un autre que Saint-Just ait exercé cette autorité durant le voyage et ait usurpé son nom au dernier moment. […] Au moment même où la science rendait les éminents services qu’il vient vivement de nous décrire, elle voyait la mort planer sur elle et frapper les plus nobles têtes : Lavoisier, Bailly, Condorcet. […] Biot trouve de nobles paroles pour caractériser ce nouvel effort héroïque d’où sortirent l’École polytechnique dans sa première forme plus ouverte et plus libre que depuis, et surtout l’École normale d’alors qui dura peu, mais qui donna, dans cette résurrection des esprits, une impulsion puissante et décisive, — assez pour que sa destinée fût remplie : « On voulut qu’une vaste colonne de lumière sortit tout à coup du milieu de ce pays désolé, et s’élevât si haut, que son éclat immense pût couvrir la France entière et éclairer l’avenir… Ce peuple, qui avait vu et ressenti en peu d’années toutes les secousses de l’histoire, était devenu insensible aux impressions lentes et modérées ; il ne pouvait être reporté aux travaux des sciences que par une main de géant. » Ces géants civilisateurs et pacifiques qui remirent alors en peu de mois l’édifice entier sur ses bases, se nommaient Lagrange, Laplace, Monge, Berthollet… moment immortel !
N’allez pas lui parler des choses qu’il aimait le mieux il n’y a qu’un moment : par la raison qu’il les a aimées, il ne les saurait plus souffrir. […] Il s’imagine souvent que tous ceux qui lui parlent sont emportés, et que c’est lui qui se modère ; comme un homme qui a la jaunisse croit que tous ceux qu’il voit sont jaunes, quoique le jaune ne soit que dans ses yeux… » Je ne puis tout citer ; la fin encore est à lire, et ceci ne peut s’omettre : « Mais attendez un moment, voici une autre scène. […] Par elles on assiste (et M. de Bausset l’a très bien montré) aux divers incidents de cette éducation littéraire si distinguée, et où le précepteur avait affaire à un sujet si inégal, mais qui excellait et se surpassait par moments.
Ce ne fut même qu’en faisant un grand effort sur lui qu’il parvint à se rendre maître de l’agitation intérieure qu’il éprouva en ce moment. » Bravo ! […] Lacretelle l’académicien entrant à l’improviste à ce moment de la lecture ; il venait en visite et n’était pas des invités ; j’ai, encore présent à l’esprit son visage étonné, car il ne savait absolument de quoi il s’agissait, et il avait peine évidemment à concevoir ce que faisait tout ce beau monde attentif à écouter une description si peu engageante. […] Après l’état des lieux, on a le dénombrement et le signalement, des élèves dont aucun, à ce moment-là, si, l’on excepte Granet, n’était destiné à devenir un grand peintre ; le temps des Gérard, Gros, Girodet, était passé : celui d’Ingres ne devait venir qu’un peu après.
Il savait que l’histoire humaine, en ces moments d’ébranlement et de commotion générale et profonde, a, pour ainsi dire, plusieurs dessous, et que le génie d’un seul a suffi bien souvent pour dégager et faire saillir un de ces plans cachés, inaperçus, lesquels, sans un homme, sans le téméraire au coup de main imprévu et vigoureux, auraient toujours paru à la foule (y compris le peuple des gens d’esprit) impraticables, chimériques, et auraient été universellement déclarés impossibles. […] » s’écriait Napoléon. « J’ai eu de nombreux flatteurs, et le moment présent appartient aux détracteurs acharnés. […] Thiers, en prétendant établir comment on se passe d’un style proprement dit, donne au même moment l’exemple d’un style vif, pressé, excellent.
Je sais bien qu’on a plus d’une fois discuté et contesté l’originalité entière de cette morale chrétienne, telle qu’elle apparaît à la réflexion et que je l’exprime en ce moment ; on a prétendu qu’il n’y avait pas une si grande distance entre elle et les maximes des plus sages de l’Antiquité, et, pour ne parler que des plus en vue dans notre Occident, de Socrate, de Platon, de Cicéron, de Sénèque, et plus tard de Marc-Aurèle. […] Le principe d’inspiration est différent, si même il n’est contraire ; les chemins peuvent se rencontrer un moment, mais ils se coupent. […] Le moment paraît venu, toutefois, où la séparation du mort et du vif ne tardera pas à se faire, et si ce n’est l’homme (assez de craquements nous l’indiquent), les seuls vents du ciel le feront.
On est au printemps, dès les premiers moments de l’idylle : toute fleur fleurit, toute créature s’égaie ; Daphnis et Chloé de même : « Toutes choses adonc faisant bien leur devoir de s’égayer à la saison nouvelle, eux aussi tendres, jeunes d’âge, se mirent à imiter ce qu’ils entendaient, et voyaient. […] Daphnis est, à un moment, enlevé par des pirates et délivré par l’effet presque miraculeux d’un air de flûte que Chloé joue du rivage : toutes les vaches du berger prises et embarquées avec lui, reconnaissant l’air du rappel, se jettent d’un bond à la mer, comme les moutons de Panurge, et font chavirer le bateau : les pirates chargés de leurs armes, se noient ; Daphnis, qui est court vêtu, se sauve à la nage. […] Chassang, qui paraît être d’avis que c’est bien une méprise et qu’il n’y a pas de Longus. — Je dois dire pourtant que cette conjecture, dès longtemps émise par Schoell, et qui s’appuie d’une citation légèrement inexacte, a paru invraisemblable à l’excellent critique Frédéric Jacobs, et qu’elle le paraît également à un savant grec, philologues des plus précis et des plus sagaces, qui s’occuper en ce moment à donner à son tour une édition critique de la jolie pastorale, le docteur Piccolo.
Retour à l’italianisme Autour de Ronsard pullulent les poètes : tout s’incline, même Mellin de Saint-Gelais, qui un moment voulut lutter. […] La dernière édition de Ronsard est de 1630 : c’est vers ce moment, entre 1630 et 1640, qu’il s’enfonce décidément dans l’oubli, où il se perdra, quand seront morts les derniers représentants des générations qui avaient assisté à sa gloire. […] A ce moment précis, le monde n’existait pas encore, et c’est le monde qui pendant longtemps complétera l’enseignement des collèges, indiquera les Français dont il faut se souvenir, qu’il faut lire.
qu’à ce moment le premier Tartuffe, le bedeau, le truand d’église, est loin de nos yeux et de notre souvenir ! […] Les « soupirs » et les « grands élancements » à faire retourner les fidèles, la terre « baisée à tous moments », et la puce tuée « avec trop de colère », et « Laurent, serrez ma haire avec ma discipline », ce sont donc là des traits tout à fait propres à frapper l’imagination de cet idiot. […] Quant au petit cours de casuistique que Tartuffe fait à Elmire, dans leur second tête-à-tête, pour lever les scrupules qu’elle lui laisse voir, il n’est point si étrange, ni si propre à estomaquer cette jeune femme, qu’il semblerait au premier moment.
Les esprits ne s’échauffèrent qu’au dessert, au moment des vers. […] Brouillé avec les genres et la syntaxe, il terminait, un jour, ainsi, l’exposé d’un conte : « À ce moment, la reine, il est mouru ! […] » Puis, Mendès, passant en revue les jeunes poètes du moment, s’employa à leur dénier toute originalité.
Jésus n’énonce pas un moment l’idée sacrilège qu’il soit Dieu. […] L’esprit du temps était aux petites églises ; c’était le moment des Esséniens ou Thérapeutes. […] Il n’y avait pas encore de chrétiens ; le vrai christianisme cependant était fondé, et jamais sans doute il ne fut plus parfait qu’à ce premier moment.
Je dirai tout à l’heure un mot de l’esprit dans lequel a été composée cette petite brochure, quand j’aurai moi-même causé un moment avec le maître, et essayé de m’en rafraîchir l’idée. […] Quand on veut lire tout haut du Rabelais, même devant des hommes (car devant les femmes cela ne se peut), on est toujours comme quelqu’un qui veut traverser une vaste place pleine de boues et d’ordures : il s’agit d’enjamber à chaque moment et de traverser sans trop se crotter ; c’est difficile. Une dame faisait un jour reproche à Sterne des nudités qui se trouvent dans son Tristram Shandy ; au même moment, un enfant de trois ans jouait à terre et se montrait en toute innocence : « Voyez !
S’il n’en croyait point, il n’a point tué son fils pour cause de religion ; s’il en croyait un, au dernier moment il n’a pu attester ce dieu qu’il croyait de son innocence, et lui offrir sa vie en expiation des autres fautes qu’il avait commises. […] Mais ces chants terribles ou voluptueux qui au moment même qu’ils étonnent ou charment mon oreille portent au fond de mon cœur l’amour ou la terreur, dissolvent mes sens ou secouent mes entrailles, les savez-vous trouver ? […] C’est la chose même, c’est la scène du moment.
Si, au-dessus des divinités locales ou familiales, elle en imagine d’autres dont elle croit dépendre, c’est que les groupes locaux et familiaux dont elle est composée tendent à se concentrer et à s’unifier, et le degré d’unité que présente un panthéon religieux correspond au degré d’unité atteint au même moment par la société. […] Car tout ce qu’elle implique, c’est que les manières collectives d’agir ou de penser ont une réalité en dehors des individus qui, à chaque moment du temps, s’y conforment. […] En vain des expériences répétées lui ont appris que cette toute-puissance, dans l’illusion de laquelle il s’entretient avec complaisance, a toujours été pour lui une cause de faiblesse ; que son empire sur les choses n’a réellement commencé qu’à partir du moment où il reconnut qu’elles ont une nature propre, et où il se résigna à apprendre d’elles ce qu’elles sont.
Mais, à quel moment Phèdre elle-même se lèvera-t-elle ? […] De même on l’a accusé de louer, d’autoriser et de recommander « la plus infâme complaisance chez les maris », parce que c’est le personnage raisonnable de l’École des Femmes qui, à un certain moment, vante à Arnolphe les délices de l’état de mari trompé. […] Et sans doute, il y a là, de la part de Molière, une légère faute au point de vue de la thèse à plaider puisqu’il la compromet ; mais l’erreur est plus grande encore de la part de ceux qui n’ont pas entendu qu’un homme de raison peut devenir à un moment donné un homme d’esprit et qui s’amuse.
Dans ses discours, avec tous les mots heureux qu’on lui a vus et les saillies qui lui échappaient, il n’avait pas la netteté, et, à un certain moment, il s’embarrassait dans les digressions, ce qui a fait dire à Fénelon « qu’il n’avait que des lueurs d’esprit ». […] » À l’Académie française, où il allait quelquefois, et le plus souvent qu’il le pouvait, il a laissé d’assez bons souvenirs : « Il paraissait, a dit d’Alembert, s’intéresser à nos exercices, opinait avec autant de goût que de dignité sur les questions qui s’agitaient en sa présence, et finissait toujours par témoigner à la compagnie les regrets les plus obligeants de ce que la multitude de ses autres devoirs ne lui permettait pas de s’acquitter, comme il l’aurait voulu, de celui d’académicien. » Un jour, dans un de ces moments d’effusion comme il en avait volontiers, il demanda à ses chers confrères la permission, ne pouvant être aussi souvent qu’il l’aurait voulu parmi eux, de leur être présent au moins en peinture et de leur envoyer son portrait.
Cet ordre de considérations générales, sur lequel la critique a peu de prise, parce qu’à cette hauteur, du moment qu’elle n’accepte pas l’élément mystérieux qui dirige, elle n’a plus qu’à tenir terre et à se déclarer incompétente ; cette réduction du problème politique de la société au problème religieux et moral, cet effort et ce retour vers un même but par un côté réputé supérieur, sont devenus assez familiers dans ces derniers temps à beaucoup d’esprits ardents, élevés ; et, pourvu que l’indifférence politique et une sorte de quiétisme transcendant n’en résultent pas dans la pratique et les luttes du citoyen, il n’y a rien à redire à cette manière de coordonner et d’étager les questions. Si les solutions générales du problème religieux faisaient naître, comme corollaires, des solutions politiques opposées à celles qui ressortent du fait social réel et de l’observation immédiate et sensée, il faudrait s’élever contre, en montrer le faux et les ruiner ; mais, du moment qu’il y a concordance sur les résultats pratiques, le champ des motifs est libre et indéfini.
Comme il résulte des tables de mortalité d’alors, que la majorité des adultes qui existent à un moment donné, doit avoir quitté la vie au bout de dix-neuf ans environ, de telle sorte qu’à la fin de cette période une majorité nouvelle remplace la première, Jefferson conclut que toute dette publique dont le remboursement ne se fait pas avant la dix-neuvième année, à partir du jour de l’emprunt, tombe sur des générations qui ne l’ont pas contractée, et qui réellement ont le droit de ne pas se croire obligées en bonne morale. […] Avec un chef héréditaire, mais renfermé dans d’étroites limites ; avec un Corps législatif investi du droit de déclarer la guerre, une rigide économie des contributions publiques, l’interdiction absolue de toutes dépenses inutiles, on peut réaliser à un très haut degré les conditions d’un gouvernement honnête et éloigné de toute oppression ; mais la seule garantie de tout cela est une presse libre. » Si Jefferson vivait en ce moment ; si, âgé de 90 ans, et de son poignet de plus en plus perclus, il écrivait à son même ami, après une expérience nouvelle, ne lui manderait-il point, par hasard, que cet autre accommodement qu’il se figurait possible ne l’était guère plus en réalité que celui qu’il conseillait en 89 ?
Bonaparte donna pour premier mot au grand juge Régnier, le jour de l’arrestation de Moreau : « Voyez avant tout interrogatoire si Moreau veut me parler ; s’il le veut, mettez-le dans votre voiture et amenez-le moi : que tout se termine entre nous deux. » Moreau hésita un moment et refusa. […] Il conçut en ce moment l’idée de faire constater exactement l’état de la croyance religieuse et superstitieuse en France.
Ils ne savent pas raisonner ; ils prouvent leur dire d’étrange façon, et l’on n’a pas idée des raisonnements biscornus qui peuvent sortir d’une tête saine pourtant. « La preuve que c’est vrai, c’est que c’était un vendredi, et que j’ai rencontré un moment après Mme…, qui était en noir, avec un chapeau neuf. » Comme si, pour mentir, on ne pouvait inventer ces coïncidences aussi bien que le gros du fait. […] Parmi les exemples auxquels on peut recourir, il est une catégorie où il faut s’arrêter un moment : ce sont ceux qu’on tire des actions de l’homme même qu’on veut persuader.
Comme au reste il est honnête homme, il serait patriote, ami du bien public, pitoyable au menu peuple : du moment que les petites gens se connaîtraient et ne « prétendraient » rien contre la hiérarchie, Saint-Simon gouvernerait en bon propriétaire et bon père de famille. […] Rien ne s’embrouille pourtant et ne se confond ; à de certains moments, toutes les particularités reculent et s’effacent ; on ne voit plus que les ensembles, les mouvements généraux, les caractères saillants.
Mais Raphaël voit un moment le pere éternel peint par Michel-Ange : frappé par la noblesse de l’idée de ce puissant génie, que nous pouvons appeller le Corneille de la peinture ; il la saisit, et il se rend capable en un jour de mettre dans les figures qu’il fait pour représenter le pere éternel le caractere de grandeur, de fierté et de divinité qu’il venoit d’admirer dans l’ouvrage de son concurrent. […] Il conçut en un moment, que l’art pouvoit tirer des couleurs qu’il emploïe, bien d’autres beautez que celles que lui-même il en avoit tirées jusques-la.
Assurément, c’est là, en soi, une chose précieuse, et c’était, jusqu’à ce moment, une chose ignorée, et, cependant, la découverte que nous annonçons n’était pas bien difficile à faire. […] Seulement, Harpagon est fou dans le moment de la pièce, et lui, Louis XVI, dans son Journal, a le calme, la raison, la méthode, la clarté, la mémoire, la ponctualité d’un homme d’ordre, qui, chaque soir, fait sa caisse et épluche son budget ; — et je doute même que le fameux compte rendu de Necker fût aussi exact, aussi pointilleux que le sien.
Un moment peut-être, au commencement de son enseignement, il inclina vers le côté qui est devenu la pente moderne et même la chute ; il alla du connu à l’inconnu, de l’homme à l’ange et à Dieu, mais bientôt il redressa ce faux pli de méthode. […] voilà le théologien dans l’œuvre duquel l’Académie des sciences morales et politiques, qui bat, en ce moment, le ban et l’arrière-ban de la Philosophie en détresse, a donné l’ordre d’aller chercher un philosophe, et M.