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631. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Foulon de Vaulx, André (1873-1951) »

Gabriel Vicaire, qui a écrit, pour le jeune poète, une préface des plus courtoises et des plus amicales. […] [L’Année des poètes (1895).] Gaston Deschamps Le poète des Jeunes Tendresses souffre de cette barbarie de la coutume et de la loi qui condamne le jeune homme à opter entre l’observance d’un vœu quasi monastique et la pente qui mène aux dangereuses flâneries, aux irréparables concessions. […] Heureux les poètes !

632. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Ghil, René (1862-1925) »

Ces poètes hiéroglyphiques paraissent remplis de bons procédés les uns pour les autres. […] René Ghil est un poète philosophique. […] René Ghil n’avait pas faussé comme à plaisir son talent et son instrument, il aurait pu être ce poète, celui qui dit au vaste peuple sa propre pensée, qui clarifie ses obscurs désirs. […] Paul Léautaud Son livre de débuts, Légendes d’âmes et de sang, qui révélait un poète ne procédant d’aucun maître, et dont la préface, où il donnait les grandes lignes de l’œuvre qu’il méditait, laissait pressentir les théories de musique verbale que le Traité du verbe devait répandre avec éclat, d’un coup attira sur lui l’attention. […] [Poètes d’aujourd’hui (1900)]

633. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rimbaud, Arthur (1854-1891) »

[Les Poètes maudits (1884).] […] Charles Morice Un poète eut la prose et le vers : M.  […] Paterne Berrichon Dans Charleville, un ou deux mois après son retour, il concevra et rimera ce Bateau ivre, visionnaire déjà et prophétique totalement ; chef-d’œuvre orageux, terrible aussi et doux et tout, qui forme comme le symbole de la vie même du poète. […] Georges Rodenbach Rimbaud, à qui Victor Hugo avait imposé les mains en proclamant : « Shakespeare enfant », possédait en réalité un prodigieux instinct de poète, qu’il dédaigna et perdit en des exodes et des trafics lointains. […] [Poètes d’aujourd’hui (1900).]

634. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Benoist a mis en tête de son édition une Notice développée sur le poète, dans laquelle il concilie heureusement les qualités françaises avec les connaissances allemandes. […] Virgile aura peut-être voulu se moquer de quelque poète de sa connaissance, qui péchait par une pareille veine de prétention et de mauvais goût. […] La répétition, la reprise de domus alta à la fin d’un vers et au commencement du vers suivant a paru avec raison un de ces accents particuliers au génie du poète, et que même l’œil ne retrouverait pas dans Racine. […] On a même, par la bouche d’Achille, une indication géographique des fleuves qui serait assurément plus à sa place venant du poète. […] Le poète supprime les superfluités : il ne fait pas dire à Turnus ce que Turnus ne peut savoir et ce qu’il n’aurait guère le temps de rappeler au fort de la mêlée.

635. (1767) Sur l’harmonie des langues, et en particulier sur celle qu’on croit sentir dans les langues mortes

Qu’on ne m’accuse point pour cela de vouloir rabaisser le mérite de ce poète. […] Despréaux, quoique lié avec beaucoup de poètes latins de son temps, sentait bien le ridicule de vouloir écrire dans une langue morte. […] Que faut-il pour faire un bon poète ? […] Croit-on que si Virgile, Horace, Ovide eussent été nos compatriotes, ils n’eussent pas été d’excellents poètes français ? […] Il en est de la latinité moderne, comme de la versification française entre les mains d’un poète médiocre.

636. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Il est poète à sa manière, poète sans délicatesse et sans grâce, mais non sans audace et sans énergie. […] On y contemplera le portrait idéal du poète ou plutôt le portrait du poète idéal. […] Elle suffirait à prouver que l’auteur des Poèmes barbares est plus poète que philosophe, qu’il est poète d’instinct, de nature, poète avec plénitude, et que tout son être est poète. […] C’est un savant et c’est un poète. […] C’est un poète vrai.

637. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gérardy, Paul (1870-1933) »

J’ai dit toute l’admiration que je sentais pour ce jeune poète dont la pensée française se teinte si légèrement de germanisme. […] Paul Gérardy est un des jeunes poètes belges le plus excellemment simple et chantant. […] Il serait, semble-t-il, facile de retrouver, dans les premières divisions du volume, des influences assez marquées de ceux qui sont des plus grands parmi les poètes actuels, et l’influence aussi, d’un bout à l’autre, d’une culture et d’une habitude de pensée germaniques. […] Paul Gérardy est un vrai poète.

638. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

On sait qu’à l’une des premières représentations d’Œdipe, le poète parut sur le théâtre portant la queue du grand-prêtre. […] Pendant ces années 1718-1724, le château de Villars était devenu comme la maison du poète. […] Voilà, mon grand poète, tout ce que je puis vous dire en mauvaise prose pour vous remercier de vos vers. […] Comme ce grand feu d’esprit n’est pas toujours, dans la jeunesse, accompagné de prudence, celui-ci était un grand poète et fort étourdi. […] L’ordre en fut donné, exécuté, et le malheureux poète, après avoir été battu, fut encore emprisonné.

639. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Poëte lyrique, mais non pontife inspiré, Prudence décrit d’abord la vie chrétienne dans ses devoirs de chaque jour et dans ses plus glorieux souvenirs. […] « Mais celui qui souilla son cœur de la contagion des vices, jouet de frayeurs sans nombre, voit de menaçantes images. » D’autres incidents de la vie étaient consacrés par les chants du poëte. […] » S’agit-il des meilleurs sentiments de l’homme, de la fidélité des souvenirs, le poëte n’attend pour l’ami qu’il a perdu qu’un perpétuel sommeil219. […] Par une affinité de plus avec le poëte Prudence, Paulin, jeune encore, avait reçu la foi dans cette province d’Espagne si passionnée pour elle. […] Est-ce le chrétien, le poëte, l’époux séparé mais tendre, qui se montre le plus dans ces vers de Paulin à Thérésia : « Viens, compagne inséparable de mon sort !

640. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Nos poètes dramatiques, à force de se tourmenter pour être neufs, retombent dans l’enfance de l’art. […] Pourquoi les intrigues du sérail ont-elles tant de charmes pour les romanciers et les poètes ? […] Le poète ne paraît jamais, on ne voit que le personnage. […] Il n’y a point d’exemple d’une plus grande gloire pour un poète. […] Mathieu est pour son temps un écrivain détestable, un poète horriblement barbare.

641. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Il s’est cru homme d’État, mais quoique poète. […] Le poète demanda satisfaction. […] On voulait un élégiaque poète. […] Très peu de poètes nous ont donné ces impressions. […] Le poète sur la grève.

642. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Fut-il avant tout un poète, un adorateur du Beau, en dehors de toutes considérations étrangères ? […] Edmond de Goncourt paraît avoir été moins un artiste et un poète qu’un analyste et un psychologue. […] Parlant du poète, M.  […] Quand le poète fut reçu à l’Académie française, M.  […] Faut-il chercher à établir un rapport quelconque entre ces poètes déjà anciens qui présidaient à l’éclosion d’une forme artistique nouvelle, le drame anglais, et cet autre poète moderne qui devançait la création d’une autre forme de l’art également inédite, le roman contemporain ?

643. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Mais le poète n’aura pas osé en tant faire. […] Mais cependant le poète se met à l’œuvre. […] Entre Molière et Lulli, pour n’oublier personne, il faut placer le vrai héraut de ces amours, le jeune poète Quinault, le poète de Renaud et d’Armide. […] Avouez que vous avez rencontré, rarement, un poète de cette force ! […] Le poète était trop jeune pour la circonstance !

644. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Ce sont les derniers papiers de famille provenant des deux poètes du nom de Racine, que l’abbé de La Roque, homme instruit et capable de les bien encadrer, publie aujourd’hui. […] Ce rat faisait beaucoup souffrir le délicat et harmonieux poète ; il ne ressemblait pas à son grand-père, qui avait intenté un procès à un peintre lequel, en peignant les vitres de la maison, s’était avisé d’y mettre, au lieu du rat, un sanglier. […] Si la voix de ce poète n’est pas éclatante, elle est douce au moins et toujours juste. […] Ami du poète novateur Le Brun, célébré et magnifiquement pleuré par lui, par ce futur ami d’André Chénier, le jeune Racine, de qui son père jugeait un peu sévèrement tant qu’il vécut, disant de lui, comme d’un jeune présomptueux, « qu’il voudrait tout savoir et ne rien étudier », était-il d’étoffe à être un poète novateur aussi, à oser dans le sens moderne, à désoler, puis à enorgueillir ce père redevenu et resté tant soit peu bourgeois, à l’étonner par un classicisme repris de plus haut ou par un romantisme anticipé, à être un peu plus tôt, et à la face de Voltaire vieillissant, quelque chose de ce qu’André Chénier, a été plus tard ? […] De même, au point de vue de l’esprit humain, le digne successeur de Racine, c’est Voltaire qui adorait Racine et le proclamait poète naturel et divin, une merveille de goût, en ayant, lui, bien autre chose encore que du goût.

645. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

On n’est pas impunément poète en ce temps-ci : à peine a-t-on prouvé qu’on l’était bien et dûment, avec éclat ou distinction, que chacun à Fenvi vous sollicite de cesser de l’être. […] Je n’en sais, parmi les poètes de ce temps-ci, qu’un seul, Brizeux, qui fasse exception et qui ait tenu bon jusqu’au bout pour la vertu poétique immaculée. […] Les poètes, lorsqu’on fait d’eux des critiques (car, on ne saurait se le dissimuler, la poésie de nos jours, c’est le luxe et l’ornement ; la critique, c’est le gagne-pain), les poètes ont une difficulté particulière à vaincre : ils ont un goût personnel très-prononcé. […] La critique des artistes et poètes est sans doute en certains cas la plus vive, la plus pénétrante, celle qui va le plus au fond ; mais elle est, de sa nature, tranchante et exclusive. […] Vous qui parlez de cet élégant feuilletoniste si à votre aise et à la légère, on voit bien que vous ne savez pas ce que c’est qu’un poète condamné à la corvée à perpétuité.

646. (1892) Boileau « Chapitre V. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » (Fin) » pp. 121-155

Au théâtre, le rapport est renversé ; les spectateurs se sentent forts contre le poète ; ils sont deux mille contre un. […] Le poète tragique n’est pas soumis à d’autres conditions que le poète comique : il faut qu’il compose sa Médée ou son Horace, que l’histoire lui donne, comme celui-ci son Alceste ou son Harpagon, qui n’ont jamais existé. […] Le poète fait son œuvre avec des mots : la technique, pour lui, c’est donc d’abord le maniement de la langue. […] Puis le poète se sert du vers. […] Mais il n’était pas poète : il n’a pas su choisir dans la nature ce qu’un artiste devait rendre, ni le rendre artistement.

647. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Reboul, Jean (1796-1864) »

Alphonse de Lamartine Ces poètes du soleil ne pleurent même pas comme nous ; leurs larmes brillent comme des ondées pleines de lumière, pleines d’espérance, parce qu’elles sont pleines de religion. […] Chateaubriand Je me défiais de ces ouvriers-poètes qui ne sont ordinairement ni poètes ni ouvriers : réparation à M.  […] le guide les montrait à Dumas tandis qu’il se rendait chez le poète : « Merci, je ne les vois pas !  […] [Les Poètes français, recueil publié par Eug. 

648. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Les poètes qui ne peuvent pas comprendre ces sortes de discussions, fort difficiles, M.  […] C’est une bonne fortune pour nos jeunes poètes. […] Virgile, le Tasse, Térence, sont peut-être les seuls grands poètes classiques. […] Le volume de ce grand poète qui, grâce à M.  […] Lorsque la mesure du vers n’admet pas le mot précis dont se servirait l’homme passionné, que font nos poètes d’Académie ?

649. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

De quoi parle le personnage du poète ? […] Tel est le genre de service historique que nous rendent les poètes. […] Dante n’est pas le seul poète qui ait connu l’amour mystique. […] Mais que la différence est grande entre les effets de cet amour sur les deux poètes ! […] Il en est ainsi du monde poétique et merveilleux ; il existait nécessairement avant qu’aucun poète eût apparu dans le monde ; il existerait encore alors même que la race des poètes s’éteindrait.

650. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

Ce qu’on appelle l’originalité, c’est-à-dire ce sens du terroir qui donne une sève étrangère aux esprits d’une race peu mêlée aux autres races, est le cachet des écrivains, des publicistes, des poètes francs-comtois, beaucoup de bon sens mêlé à beaucoup de rêves. […] Le poète, ce chercheur du beau dans l’histoire comme dans la nature et dans l’art, devenait donc républicain par naissance comme par nécessité. […] Il y a de ces trois natures dans la sienne : une femme, un poète, un orateur à la langue d’or, au cœur de citoyen. […] Le poète et l’antiquaire contractent sur leur physionomie cette impression d’éternité qui méprise la terre fugitive, parce qu’elle vit dans tous les âges. […] Je n’en sais rien ; mais, histoire ou légende, il n’y aurait rien, dans un tel servage, qui ne fût de nature à dignifier la personne qui sut l’inspirer et le poète qui sut le subir comme une suzeraineté féodale du prestige sur l’imagination.

651. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemoyne, André (1822-1907) »

Lemoyne s’est fait une originalité, parmi les poètes descriptifs, par l’exactitude piquante des moindres détails de ses paysages. […] Philippe Gille Ce n’est qu’avec une extrême réserve que nous accueillons les poètes ; la raison en est, hélas ! […] Heureusement, cette fois, il s’agit d’un bel et bon ouvrage, de l’œuvre d’un véritable poète, des Légendes des bois et Chansons marines, de M.  […] Nous citerons ces strophes : ……………………………………………… Les chiens déconcertés renoncent à la piste : Voici l’heure paisible où finissent les jours ; Libre vers son refuge, il monte grave et triste… À l’horizon lointain expirent les abois, Sur les chênes dormants la nuit remet son voile… Lui qui ne verra plus l’aurore dans les bois, Donne un dernier regard à la première étoile… C’est un sentiment profond de la nature qui donne de tels accents et qui fait que le lecteur croit voir le tableau que le poète a tracé.

652. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Q — Quinet, Edgar (1803-1875) »

Si ce n’est pas un poète épique, ni même un poète du tout par le résultat, c’est un travailleur en épopée, infortuné, mais acharné, du moins. […] [Les Œuvres et les Hommes : les Poètes (1862).] […] Le poète, en lui, s’ajoutait à l’historien… [Discours prononcé aux obsèques d’Edgar Quinet (29 mars 1875).]

653. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tiercelin, Louis (1849-1915) »

Tiercelin publia son premier volume de vers : Les Asphodèles, œuvre qui, dit un critique, « est éclose dans l’atmosphère très catholique de l’ancienne famille bretonne à laquelle appartenait le poète, et qui est comme le pur reflet de ses impressions premières ». […] [Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887-1888).] […] Le poète est convaincu — et il le prouve du reste — qu’il n’est point de nuance, si subtile soit-elle, qu’on ne puisse rendre et pour ainsi dire faire toucher au moyen des mètres consacrés que le vrai poète sait toujours modeler sur la pensée.

654. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Au moment de la renaissance des lettres, et au commencement de la littérature anglaise, un assez grand nombre de poètes anglais s’écarta du caractère national, pour imiter les Italiens. […] On s’aperçoit souvent que le poète est contraint ou dirigé par sa soumission à l’orthodoxie : mais ce qui fait de Milton l’un des premiers poètes du monde, c’est l’imposante grandeur des caractères qu’il a tracés. Son ouvrage est surtout remarquable par la pensée ; la poésie qu’on y admire a été inspirée par le besoin d’égaler les images aux conceptions de l’esprit : c’est pour faire comprendre ses idées intellectuelles, que le poète a eu recours aux plus terribles tableaux qui puissent frapper l’imagination. […] Si l’on peut trouver de la monotonie dans l’Ossian, parce que ses images peu variées en elles-mêmes ne sont point mêlées à des réflexions qui puissent intéresser l’esprit, il n’en est pas ainsi des poètes anglais ; ils ne fatiguent point en s’abandonnant à leur tristesse philosophique : elle est d’accord avec la nature même de notre être, avec sa destinée. […] Les poètes anglais abusent souvent néanmoins de toutes les facilités que leur accordent, et leur langue et le génie de leur nation.

655. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Laurent Tailhade à l’hôpital » pp. 168-177

Je l’ai vu tout à l’heure écouter de la bouche d’un poète roman l’éloge, de Moréas. […] Il n’a pas attendu, pour signaler les vers du noble poète Henri de Régnier, qu’il fût devenu académicien. […] Les amoureux savent trouver les jolies femmes même lorsqu’elles se cachent ; les fervents d’art savent découvrir les bons poètes, si verrouillés et si triplement cadenassés soient-ils, au fond des boîtes des quais, par l’indifférence ou l’hostilité de leurs contemporains. […] Elle évoque tout cela avec une telle précision que le poète, soulevé en avant, demande grâce du geste, mais avec un sourire. […] Ô bienheureux poètes qui, comme Henri Heine, de leurs grands désespoirs font, à l’adresse de la Postérité, de petites chansons.

656. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’état de la société parisienne à l’époque du symbolisme » pp. 117-124

Paul Bourget, le nom des prédicateurs et des demoiselles en vogue, des modistes et des poètes chez qui il est élégant de se fournir. […] Connaître des poètes symbolistes. » Nos vieux châteaux s’ouvraient jadis aux trouvères vagabonds. Par un reste de tradition, la noblesse continue à recevoir les poètes dans ses salons, mais à l’heure du thé. […] Les poètes eussent dû se montrer reconnaissants vis-à-vis de ces deux bienfaitrices et les tenir en particulière estime, mais on se piquait alors de « rosserie » et la « goujaterie » était assez bien portée. Dans le petit Bottin des Lettres et des Arts (1886), la princesse Ratazzi est classée parmi « les vieilles lunes » et Léonide Leblanc se voyait décerner cet entrefilet au vinaigre : « Étoile pâlissante de l’Odéon, reçoit dans son hôtel, outre la famille d’Orléans, quelques jeunes poètes dont elle emploie la verve à autographier, avec dédicaces, des tambourins, choisis par elle, dans les grands magasins du Louvre. » Il est vrai que les poètes se dénigraient même entre eux.

657. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 10, du temps où les hommes de génie parviennent au mérite dont ils sont capables » pp. 110-121

Mais il ne suffisoit pas à Moliere d’être grand poëte pour être capable de les composer : il falloit encore qu’il eût acquis une connoissance des hommes et du monde, qu’on n’a pas de si bonne heure, et sans laquelle le meilleur poëte ne sçauroit faire que des comedies médiocres. Le poëte tragique doit atteindre le dégré de perfection où il est capable de monter, de meilleure heure que le poëte comique, le génie et une connoissance generale du coeur humain, telle que la donnent les premieres études, suffisent pour faire une tragédie excellente. […] Horace devoit être un homme fait, quand il se fit connoître pour poëte. […] Despreaux, quand il fit joüer Andromaque, qu’on peut regarder comme la premiere tragédie de ce grand poëte.

658. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 30, objection tirée des bons ouvrages que le public a paru désapprouver, comme des mauvais qu’il a loüez, et réponse à cette objection » pp. 409-421

Elle fit aller un peu plus de monde à la tragédie de Pradon qu’il n’y en auroit été, par le motif seul de voir comment le concurrent de Racine avoit traité le même sujet que ce poëte ingénieux. […] Si l’on peut leur appliquer le vers de Juvenal : ne portons pas d’envie à un poëte qui vit du théatre. […] Des auteurs citez par Aulugelle avoient écrit que des cens comédies composées par Menandre, il n’y en avoit eu que huit assez heureuses pour remporter le prix que les anciens donnoient au poëte qui avoit fait la meilleure piece de celles qui se représentoient à l’occasion de certaines solemnitez. […] Apulée parle de ce même Philemon dans le second livre des florida, comme d’un poëte qui avoit de très-grands talens, et qui sur tout étoit recommandable par la morale excellente de ses comédies. […] Ils peuvent en faire valoir les beaux endroits, en excuser les mauvais, comme ils peuvent aussi extenuer le mérite des plus beaux, soit en disant qu’ils sont pillez, soit en les mettant en paralelle avec les vers d’un autre poëte qui aura traité un sujet semblable.

659. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rodenbach, Georges (1855-1898) »

[Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887-1888).] […] C’est quand il parle des eaux calmes, des eaux presque mortes, et qu’il assimile les silencieux aquariums aux cerveaux humains, où les idées glissent ou rampent, où les actinies s’entr’ouvrent un instant, c’est par le détail heureux qu’il est poète. […] François Coppée, toujours favorable aux jeunes poètes, il était devenu le familier du grand écrivain Edmond de Goncourt. […] Et de même qu’un comité de littérateurs s’occupe d’élever à Bruges un monument au poète de qui le nom est pour jamais lié à celui de cette ville, il faut souhaiter que soient rassemblés tous ces éléments complémentaires de l’œuvre de Georges Rodenbach. [Poètes d’aujourd’hui (1900).]

660. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Marie Tudor » (1833) »

Le but du poète dramatique, quel que soit d’ailleurs l’ensemble de ses idées sur l’art, doit donc toujours être, avant tout, de chercher le grand, comme Corneille, ou le vrai, comme Molière ; ou, mieux encore, et c’est ici le plus haut sommet où puisse monter le génie, d’atteindre tout à la fois le grand et le vrai, le grand dans le vrai, le vrai dans le grand, comme Shakspeare. […] Admirable toute-puissance du poète ! […] Dégager perpétuellement le grand à travers le vrai, le vrai à travers le grand, tel est donc, selon l’auteur de ce drame, et en maintenant, du reste, toutes les autres idées qu’il a pu développer ailleurs sur ces matières, tel est le but du poète au théâtre. […] Aujourd’hui, un immense public, de plus en plus intelligent, sympathise avec toutes les tentatives sérieuses de l’art ; aujourd’hui, tout ce qu’il y a d’élevé dans la critique aide et encourage le poète. Que le poète vienne donc !

661. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

À y regarder de près, Baudelaire n’est pas le poète du vice ; il est le poète du péché, ce qui est bien différent. […] Et le pis est qu’alors il est poète et grand poète. […] Le poète a beaucoup de goûts pour ses payses. […] Gabriel Vicaire, poète de la Bresse. […] C’est le meilleur poète de cette rare famille.

662. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Christine de Pisan est toute Italienne de sang : une Italienne vient épouser Louis d’Orléans, et nous donne un poète. […] J’incline à croire à l’absolue sincérité du poète. […] Plus faible encore est une âme de poète que nos âmes à nous. […] Nous touchons ici à ce qui fait de Villon un grand poète : il est le poète de la mort. […] Leyde, 1882 ; Un Poète inconnu de la société de Fr.

663. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Mais en permettant aux poètes d’y mêler l’aventure de Plexippe et de Toxée, on a tout perdu. […] Quand laissera-t-on les poètes faire à leur guise ? […] Ce poëte en effet, par moments, comme Job, officie. […] Et quel poëte jouait-on de préférence sur ces théâtres ? […] Eschyle était pour la Grèce le poëte autochtone.

664. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

C’est un poète et un peintre de terroir comme tous les peintres et les poètes pénétrants, la loi étant de ne bien peindre que les choses qu’on a vues, qui se sont enfoncées en nous dès l’enfance, et dans lesquelles nous avons fait boire nos premiers regards. […] Les faits valent mieux, et je les trouve dans les œuvres de notre poète et de notre conteur. […] Peintre et poète, il l’était déjà, on le savait, on en convenait. […] Mais est-ce moi ou lui, dans sa conscience de poète, qu’il a entendu ? […] C’est un poète que Daudet, et le poète, en lui, domine le romancier comme il domine toujours tout dans ceux qui sont poètes.

665. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Boschot, Adolphe (1871-1955) »

Émile Faguet C’est un très bon poète que M.  […] Boschot s’y révèle poète philosophe, et l’on voit bien, d’abord, qu’il a beaucoup lu Sully Prudhomme et Alfred de Vigny, ensuite et surtout qu’il est capable par lui-même d’une pensée forte, pénétrante et triste… Mais ce n’en est pas moins un poète cher au cœur et d’une singulière puissance d’émotion. […] Boschot est un poète plein d’idée et d’idées poétiques.

666. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gille, Philippe (1831-1901) »

[Nos poètes (1888).] […] Philippe Gille demeure surtout un poète parisien, dans son Herbier, où il ne conserve pas que des fleurs desséchées : loin de là, les fleurs poétiques de ce charmant recueil ont l’éclat et les vives couleurs d’une moisson toute fraîche. […] Publiciste et critique littéraire, la tournure légère et gauloise de son esprit ne semblait pas révéler en lui le véritable poète qu’il est. [Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887).]

667. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Margueritte, Victor (1866-1942) »

[Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887-1888).] […] Dans La Belle au bois dormant, le poète récrit en fort jolis vers le vieux conte féerique allégorisant sous ces personnages de fiction naïve l’amour et la vie dans leur beauté simple. Et l’on sent à travers tout le volume, malgré, certaines fois, de la monotonie et trop peu de liberté, une imagination délicate, un goût très sûr, un talent souple, qui vous font aimer le poète discret et tendre qu’est M.  […] Henri de Régnier ; et si les allées rectilignes en leur sévère majesté en imposent d’abord par leur charme un peu triste, la lumière des aubes et des crépuscules s’y joue à souhait et dans le même décor fait alterner de changeantes images qui sont toute la vie et l’âme du poète, projetée hors de lui et lui apparaissant par un mirage dont il n’est pas dupe sous les formes multiples de son rêve.

668. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Renaud, Armand (1836-1895) »

Jules Claretie Armand Renaud fut souvent un poète délicat et souvent puissant qui eut souvent son heure de célébrité. Sa part d’influence dans le mouvement littéraire d’où sortit, voilà quelques années, une renaissance de la poésie… Il écrivit un volume de vers qui mérite de rester, Les Drames du peuple, et le poète de la Justice , M.  […] Gaston Deschamps Parmi les poètes célèbres en 1865, l’auteur des Poésies de Joseph Delorme citait premièrement M.  […] Sainte-Beuve, subtilement, discernait dans l’œuvre de ce poète, trois « manières » très différentes.

669. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

« Il faut avouer que Molière est un grand poète comique. […] » Cette indulgence de Fénelon pour le plus grand poète et le poète le plus vivant de la cour de Louis XIV n’était pas, non certes, dans l’âme et dans l’esprit de Bossuet. […] Ne croyez pas cependant que le poète ait tenu le propos indécent qu’on lui prête […] Ce fut une grande originalité à notre poète, de mettre des Français sur la scène. […] Molière ne riait guère ; il était un contemplateur comme le sera toujours le vrai poète comique.

670. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Il est vrai que ce n’est pas comme poète, mais seulement par la conduite et l’art. […] Horace n’est que la moitié d’un poète satirique. […] Ovide s’y entend bien mieux que Térence ; aussi est-il le poète favori de Perrault. […] Lui aussi était poète, et un peu moins encore que les trois autres qui ne le sont guère. […] Traité pour juger des poètes grecs et latins.

671. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

C’est ce Bertram de Born, ce poëte batailleur. […] Ce poëte, c’est Sordello, né dans l’Italie du Nord, mais poëte de la langue provençale. […] Il y avait le poëte favori du roi, le poëte lauréat ; il se nommait Helinant, et avait une pension. […] Le poëte est auteur de profession ; cela est visible. […] C’était le passeport de la hardiesse du poëte.

672. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

À quoi voulez-vous qu’elles servent aux poètes, qui, pour la plupart, écrivent par inspiration, ou qui, s’ils sont assez grands pour composer avec réflexion, sont assez grands aussi pour puiser leurs réflexions en eux-mêmes ? […] Les grands esthéticiens sont donc, comme les grands poètes, d’admirables créateurs inutiles. Ils créent des idées grandioses, comme les poètes de grandioses images, et il est rare que la faculté créatrice d’images et la faculté créatrice d’idées se trouvent réunies dans le même homme, rare surtout qu’elles fonctionnent ensemble. Goethe, le poète de la réflexion, Goethe, le moins fou des hommes, a dit : — « Vous venez me demander quelle idée j’ai cherché à incarner dans mon Faust ! […] Elle a si peur de n’être pas tout intelligence, de conserver la moindre apparence d’âme, de partialité, d’enthousiasme ; elle s’applique avec un dépouillement si entier, si farouche, à se faire toute à tous, à être anglaise avec les Anglais, allemande avec les Allemands, française avec les Français, qu’elle méconnaît une chose : c’est que les Anglais, les Allemands, les Français sont des hommes, et que dans Molière, dans Shakespeare, dans tous les grands poètes il y a, sous les différences de temps et de lieux, un pathétique capable de faire battre toute poitrine humaine, sans distinction de nationalités.

673. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

Ce ne sera bien évidemment ni l’homme politique ni le poète. Le poète, selon nous, ne fut pas, et l’homme politique fut encore trop, sans être grand-chose. […] Mais nous, nous n’avons jamais travaillé à la statue de ce pauvre poète dont le doux nom a servi à tant de tapages ! […] Il ne fut pas même un grand poète, — un poète, cette chose de troisième rang dans l’humanité. Malgré les flatteries de sigisbé que Lord Byron et Stendhal, en politesse de visite (et de carbonarisme aussi), ont prodiguées à l’Italie, cette Italie des derniers temps a été stérile en grands poètes.

674. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

Elle s’attend à quelque livre de feu, poétique comme le poète qui l’inspire. […] Le critique rompu à la Critique l’a emporté ici sur le poète, dans un écrivain qui est, je le sais, poète à ses heures. […] Mais cet Illuminé intérieur, ce Visionnaire du Paradis perdu, avait voyagé dans sa jeunesse, et il avait remporté dans ses souvenirs le ciel et le soleil de l’Italie pour en éclairer sa cécité et ses vers… Corneille n’avait besoin d’aucun soleil pour être le poète qu’il a été. […] dans ses amours.) — Corneille, le bonhomme de grand homme, qui avait aimé cette Marie Millet dont il avait fait sa Mélite, qui avait aimé Marie Courant et probablement mademoiselle de Lamperière, — qu’il épousa comme Byron épousa miss Milbanck, tous deux, ces téméraires poètes, donnant, comme dit Bacon, cet otage à la fortune, que la fortune, cette affreuse Communarde, égorge presque toujours ! […] Il nous a parlé longtemps du poète comique dans Corneille : de la comédie de la Suivante, jolie comme son sujet ; du Menteur, dont il n’était pas besoin de nous parler (car il tient toujours la scène comme Molière, avec des touches que n’a pas Molière, et cependant Molière a écrit le rôle de don Louis — dans Don Juan — qui est un rôle cornélien !) 

675. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brizeux, Auguste (1803-1858) »

Le poète se considère comme un Breton venu du Midi et qui y retourne… Sa poésie est toute pleine de bons sentiments qu’il propose, d’idées et de visées qui ennoblissent, d’images qui observent l’austère beauté. […] [Les Poètes français, recueil publié par Eugène Crépet (1861-1863).] […] Brizeux et les poètes qu’il relisait sans cesse. […] Depuis, combien de poètes ont essayé de dire leur pays ; mais la plupart n’ont fait que de la poésie rustique monotone, et nul n’égale l’art de Brizeux, qui en inventa le genre.

676. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Manuel, Eugène (1823-1901) »

Manuel, En voyage, nous montre le talent du poète sous ses trois aspects : sentimental, populaire, patriotique, avec sa triple puissance d’élégie, de narration et de lyrisme. […] [Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887-1888).] […] Bien que l’une de ces inspirations domine, elles se rencontrent, à plusieurs reprises, sans se confondre, dans l’émotion du poète : chacune a son contrecoup distinct dans l’âme du lecteur. [Poètes et romanciers (1888).]

677. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Méry, Joseph (1797-1866) »

Auguste Desplaces Pas plus que l’auteur de la Némésis , on ne doit omettre le spirituel poète Méry. […] [Galerie des poètes vivants (1847).] […] En vain, un témoignage qui a force d’oracle lui confère la dignité d’une généalogie plus mémorable encore en vain, Hugo lui-même consacre                    … Méry, le poète charmant Que Marseille la Grecque, heureuse et noble ville, Blonde fille d’ […] [Crépet, Les Poètes français (1863).]

678. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Monselet, Charles (1825-1888) »

Jules Barbey d’Aurevilly Je connaissais le Monselet de tout le monde, le Monselet du journal, du théâtre, du café, du restaurant, le Monselet du boulevard et de Paris, le Monselet légendaire, celui qu’on a représenté les ailes au dos, comme Cupidon, parce qu’il a écrit Monsieur de Cupidon… Je connaissais le Monselet de la gaîté, de la bonne humeur, de la grâce nonchalante, la pierre à feu qu’on peut battre éternellement du briquet pour en tirer d’infatigables étincelles…, mais je ne connaissais pas le Monselet intime, — le Monselet du Monselet, — la quintessence de l’essence, et c’est ce livre, intitulé tout uniment et tout simplement : Poésies complètes de Charles Monselet, qui me l’a fait connaître, qui m’a appris l’autre Monselet dont je ne connaissais que la moitié… Un poète, un poète de plus parmi les vrais poètes, voilà ce qu’apprend ce recueil des Poésies complètes de Monselet, réunissant tous les rayons éparpillés de son talent et nous faisant choisir entre tous celui qui plaît davantage, le plus pénétrant et le plus pur… Certes, on savait bien, bien longtemps avant ce recueil, que Monselet était un chanteur plein de verve et de fantaisie… Il était plus que cela, et ce dernier recueil le met à sa place, parmi les touchants. [Les Œuvres et les Hommes : les Poètes (1863).]

679. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

Ils interrompent le poète et lui ôtent la parole. […] Le poëte a le sentiment obscur de ce but. […] Le poëte met d’abord en deux mots le résumé de sa fable. […] Le poëte ferme peu à peu toutes les issues par où le tyran pourrait s’échapper. […] Et là-dessus l’imagination travaille ; le poëte entend déjà cette voix qui va gronder.)

680. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Le 15 mai 1840, la Revue des deux mondes publiait un article de George Sand sur un jeune poète dont le nom était parfaitement ignoré jusque-là, Georges-Maurice de Guérin, mort l’année précédente, le 19 juillet 1839, à l’âge de vingt-neuf ans. […] Guérin avait déjà eu le temps d’être imité par d’autres poètes, qui semblaient tout originaux de cette imitation, et lui-même il n’était pas publié et mis en lumière. […] Rien n’était exagéré dans la première impression reçue en 1840 ; tout aujourd’hui se justifie et se confirme ; l’école moderne compte bien en effet un poète, un paysagiste de plus. […] Le nom de Brizeux, le poète breton, se rapproche naturellement de celui de Guérin, le paysagiste breton. […] Celui qui était encore l’abbé de Lamennais célébrait dans la chapelle la messe pascale, — sa dernière messe2 —, et y donnait de sa main la communion à de jeunes disciples restés fidèles, et qui le croyaient fidèle aussi : c’étaient Guérin, Élie de Kertangui, François du Breil de Marzan, jeune poète fervent, tout heureux de ramener à la sainte table une recrue nouvelle, un ami plus âgé de dix ans, Hippolyte de La Morvonnais, poète lui-même.

681. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Où trouver maintenant dans le style le portrait du poëte ? […] On peindra donc ses contemporains et ses compatriotes ; on marquera les détails les plus délicats et les plus fugitifs du ton, du langage, des manières, et le poëte, sans y songer, deviendra historien. — Cette recomposition des personnages recomposera l’action. […] L’ambition est dans chaque homme comme dans Macbeth, et le poëte a pu l’observer dans toutes les âmes ; mais elle y a été mutilée ou étouffée par les circonstances, par l’éducation, par la froideur du tempérament, par la mobilité du caractère. […] Mais les sentiments ainsi imprimés dans les spectateurs s’imprimeront dans le premier spectateur de l’oeuvre, qui est le poëte. […] Le fabuliste poëte est donc involontairement un systématique.

682. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Ossian est le seul poète chez qui on ne trouve aucune notion semblable. […] Les poètes qui naquirent dans les pays où dominaient Luther et Calvin, durent, plus souvent que les poètes catholiques, chercher des sujets dans les livres hébreux. […] que le poète chrétien est bien plus favorisé dans la solitude où Dieu se promène avec lui ! […] Il y vante trop seulement les poètes anglais ; mais c’était à cette époque la manie universelle. En revanche, il apprécie avec justesse les poètes français.

683. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bornier, Henri de (1825-1901) »

Au nom de ses camarades, il a su répondre au grand poète Mistral. Il a fait entendre à Caen, au rendez-vous de la Pomme, la chanson paternelle des Cigaliers… Enfin il a payé sa dette avec un gracieux apologue aux fêtes données en l’honneur de Florian, tout près de ce parc de Sceaux où la duchesse du Maine avait tenu sa cour de petits poètes et présidé l’ordre de la Mouche à miel. — À la suite de ces poésies lyriques, parmi lesquelles se détache encore l’hymne éclatant à la mémoire de Paul de Saint-Victor, se placent des poèmes philosophiques qui ont aussi leur grande valeur, d’un symbolisme profond et d’une émotion communicative ; quelques-uns m’ont rappelé, avec une langue plus moderne, certaines inspirations très heureuses d’Émile Deschamps, qui présente quelques analogies avec notre poète, ne serait-ce que par un caractère commun dans leur talent, caractère de conciliation et de transaction. […] C’est toute une guirlande de beaux vers tressés pour le front meurtri de la France par le poète patriotique qui devait faire mieux encore dans sa Fille de Roland et dans son Attila. […] Or, il est évident que par tout le reste de son œuvre, Attila, Saint Paul, Mahomet et les poèmes couronnés par l’Académie, M. de Bornier est « un monsieur bien sage », je veux dire un excellent littérateur de plus de noblesse morale que de puissance expressive, poète par le désir et l’aspiration, mais un peu inégal à ses rêves.

684. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 40-47

Toutes ces Pieces ne sont pas égales, à la vérité ; mais on trouve dans ses défauts mêmes, selon l’expression d’Horace, la touche du grand Poëte qui rend respecpectables jusqu’à ses écarts : Invenias etiam disjecti menbra Poëta. […] On pourroit seulement lui reprocher d’avoir trop dirigé les essors de sa Muse vers l’admiration ; mais s’il subjugue trop despotiquement l’esprit, il a tant de ressort dans l’action, une marche si aisée, si imposante, si ferme, si rapide ; ses intrigues sont si habilement ménagées, conduites avec tant de dextérité, terminées par une explosion (qu’on nous passe ce terme) si lumineuse, si frappante, que la terreur & la pitié qui naissent au gré du Poëte & saisissent le Spectateur, ne sont jamais affoiblies par le sentiment de l’admiration. […] Ce n’est pas par des Remarques plus subtiles que justes, par des Réflexions plus fausses que conformes au goût, par des Analyses infidelles & insidieusement présentées, par des Critiques minutieuses & souvent puériles, par des Notes grammaticales auxquelles on attache une importance d’autant plus ridicule, que les fautes de langue qu’on y releve appartiennent moins au Poëte qu’au temps où il vivoit, qu’on pourroit se former une idée sûre du Héros de la Tragédie. Quels motifs ont pu porter un Ecrivain dont la réputation n’a rien de commun avec ce grand Poëte Tragique, à s’acharner contre les hommages rendus de tout temps à sa supériorité ? […] Si ce Poëte a été le maître de Corneille, ce n’a donc pu être que par ses conseils.

685. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Leconte de Lisle un grand poète. […] Mais peut-on dire : Voilà un poète ? […] non, répondit le poète. […] Mais Viète était riche, et la plupart des poètes sont pauvres. […] Le poète, rien qu’un cerveau ?

686. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Tel n’est pas le poète. […] Voilà pourquoi Goethe ne m’apparaît pas comme l’idéal d’un poète, car c’est un poète sans idéal. […] Poète, il lui fallait un dieu. […] Ô grand poète ! […] Suis-je poète pour la foule ?

687. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

Le premier poëte qui arrive, arrive au sommet. […] Un savant fait oublier un savant ; un poëte ne fait pas oublier un poëte. […] Les poètes ne s’entr’escaladent pas. […] De là vient la certitude des poètes. […] Tout recommence avec le nouveau poëte, et en même temps rien n’est interrompu.

688. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Goudeau, Émile (1849-1906) »

[Anthologie des poètes français du xixe  siècle (1887-1888).] […] Je viens de vous lire et j’en suis tout ragaillardi, car — rare exception chez nos contemporains — vous êtes un poète gai. […] Jean de Mitty Goudeau avait fondé les Hydropathes, cette réunion de poètes qui marque une date amusante dans les annales de l’art contemporain, et fait partie du premier Chat-Noir, ce milieu fécond qui fut, pour beaucoup, le tremplin de la célébrité. Mais il y a mieux : il y a l’effort personnel d’Émile Goudeau, son labeur d’écrivain, sa pensée de poète.

689. (1891) [Textes sur l’école romane] (Le Figaro)

Jean Moréas, le poète des Cantilènes, l’inventeur du symbolisme et de tant de choses surprenantes, est le fondateur de cette École nouvelle. […] Raymond de La Tailhède, ce merveilleux poète auquel Jules Tellier adressait l’exquis rondel : Raymond, dis-nous des vers divins… Maurice du Plessys et Charles Maurras. […] Aux quatorzième et quinzième siècles, ainsi qu’au dix-huitième siècle, le principe gréco-latin cesse d’être une source vive d’inspiration et ne se manifeste que par la voix de quelques excellents poètes tels que Guillaume de Machaut, Villon et André Chénier. […] C’est dans ce noble but que les poètes Maurice du Plessys, Raymond de La Tailhède, Ernest Raynaud, et le savant critique Charles Maurras sont venus à moi, non en « escorte », mais pour avoir trouvé dans mon Pèlerin passionné les aspirations de leur race et notre commun idéal de Romanité.

690. (1856) Cours familier de littérature. I « Épisode » pp. 475-479

Il ne sied pas à un poète de juger l’œuvre d’un poète, son contemporain et son ancien ami. […] Mais, hier, une circonstance heureuse et imprévue nous a, pour ainsi dire, contraint à nous souvenir que nous avions été poète aussi, et de répondre par un bien faible écho à la voix qui nous vient de l’Océan. Les poètes, les écrivains, les amis particuliers de madame Victor Hugo, ont eu l’idée de faire magnifiquement relier, pour elle, le volume de poésies de son mari, d’insérer dans ce volume quelques pages blanches, de couvrir ces pages blanches de leurs noms, et de quelques lignes de prose ou de vers attestant leur souvenir et leur affection pour cette illustre et vertueuse femme.

691. (1933) De mon temps…

Il n’y relevait plus de Saint-Simon et s’y déclarait « l’écolier des grands poètes anglais du temps d’Elisabeth ». […] A côté des musicographes y collaboraient des écrivains et des poètes. […] Brand Witlock, ambassadeur des Etats-Unis, la mémoire du grand poète fut éloquemment glorifiée. […] Il venait apporter au poète des Trophées un exemplaire de Saint-Cendre, récemment paru. […] L’illustre poète prit fort mal ce procédé.

692. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

Prenons-en donc une autre dont on ne puisse contester la beauté, la première du cantique d’Ézéchias traduite par le même poète, et rapprochons-la de l’original. […] Quelque admirables que soient ces vers, on y reconnaît encore le poète. […] Un poète médiocre, un grand poète même qui aurait eu moins de goût, aurait décrit dans une phrase poétique le lever et le coucher du soleil ; Ovide n’y eût pas manqué ; mais écoutons Virgile. […] Quoi qu’il en soit, comme ce sont les poètes qui ont formé les langues, c’est aussi l’harmonie de la poésie qui a fait naître celle de la prose. […] Aussi nos poètes ont-ils pour l’ordinaire assez mal réussi dans la prose.

693. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

S’il était vrai que l’on entend seulement le mot à la rime, on pourrait ne lire des poètes que les derniers mots de chaque vers. […] Mais pourquoi le poète ne ferait-il s’accorder que des mots et des rimes ? […] » qui ramène enfin, — et pour quatre vers seulement, — la légèreté de vol habituelle au poète. […] Notre langue contemporaine n’a pris son éclat qu’en passant par la « flamme des poètes ». […] Chez le poète, la pensée est obligée d’adopter une fois pour toutes le vers et ses diverses formes, pour s’y imprimer.

694. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Il fut soldat, peintre, sculpteur, philosophe, orateur, poëte, grammairien, sçavant, homme sur tout à bons mots, à grandes maximes. […] Le poëte n’eut qu’à recueillir la plupart de ces traits : il en fit le sujet d’une comédie, qu’il intitula les Nuées. […] D’ailleurs, Platon lui-même, le grand Platon, disciple de Socrate & son apologiste, donne des louanges au poëte comique, dit que les graces habitent dans son sein. […] Son opéra de Jephté annonce le poëte. […] On plaisanta jusques sur la mort de ce poëte famélique, causée par une indigestion.

695. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Les Poètes. […] Un poète anglais, M.  […] Les poètes. […] Poètes divers. […] Les Poètes Suicides.

696. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Et d’ailleurs, de quoy un poëte s’enorgüeilliroit-il ? […] Ils donnent, par exemple, un médiocre poëte, pour un mauvais critique, et un bon poëte pour un raisonneur exact, comme si l’un suivoit toûjours de l’autre. […] Ne sçauriez-vous croire le poëte sur sa parole ? […] Il les place au cinquieme livre de son poëme, lorsque le lecteur est encore en état de s’amuser, et c’est ainsi que le poëte latin corrige presque toûjours le poëte grec, en l’imitant. […] Car il ne faut jamais séparer dans le poëte, son imitation de son dessein.

697. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Je ne parle pas ici par ressentiment d’auteur, car je suis le seul poète du temps et le seul homme politique de son époque qui soit, comme poète, placé par lui dans la compagnie immortelle d’Homère, de Virgile, de Racine, et, comme homme de tribune et de hautes affaires, au rang des hommes de bon sens. […] Mais il m’a rendu bien plus qu’honneur comme poète, et plus que justice comme homme politique. […] Quand les chants populaires ne sont pas composés à froid par des poètes politiques, ils ne sont jamais sublimes ; le peuple ne l’est pas, mais il est peuple, c’est-à-dire nature. […] Comme je tournais le fond du petit golfe de Thérapia, je rencontrai Athanase Christopoulos, le poète si célèbre déjà par ses chants anacréontiques. […] — Je vous comprends, me répondit en souriant le poète, et je vous obéirai.

698. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Je me garderais bien de comprimer cette œuvre immense dans le casier d’un système ; mais enfin Rabelais est surtout un poète, et chez ce poète le lyrisme abonde et surabonde. […] Celui-là est poète souverain. […] Non ; d’abord il est poète ; il est surtout le penseur toujours vivant de l’angoisse humaine. […] Son inspiration, en ce qu’elle a d’essentiel, est d’un poète, et ce poète est un volcan, ardent et fumeux. […] Les poètes lyriques de cette période sont encore dans toutes les mémoires et dans bien des cœurs.

699. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre premier. Que la Mythologie rapetissait la nature ; que les Anciens n’avaient point de Poésie proprement dite descriptive. »

Une preuve incontestable de ce fait, c’est que la poésie que nous appelons descriptive a été inconnue de l’antiquité56 ; les poètes mêmes qui ont chanté la nature, comme Hésiode, Théocrite et Virgile, n’en ont point fait de description, dans le sens que nous attachons à ce mot. […] L’Olympe, auquel on ne croyait plus, se réfugia chez les poètes, qui protégèrent à leur tour les dieux qui les avaient protégés. […] Enfin les naturalistes furent aussi sobres que les poètes, et suivirent à peu près la même progression. […] Si le poète s’égarait dans les vallées du Taygète, au bord du Sperchius, sur le Ménale aimé d’Orphée, ou dans les campagnes d’Élore, malgré la douceur de ces dénominations, il ne rencontrait que des faunes, il n’entendait que des dryades : Priape était là sur un tronc d’olivier, et Vertumme avec les Zéphyrs menait des danses éternelles. […] que le poète chrétien est plus favorisé dans la solitude où Dieu se promène avec lui !

700. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

Il semble lui reconnaître une valeur absolue ; il identifie le poète et le traducteur. » Remettons les choses au point. […] Il est vrai qu’il les récuse toutes : « Homère, dit-il, est un poète. […] Ce reproche pouvant s’appliquer à tous les poètes antiques, il est clair, en effet, que nous sommes également réduits à épeler Virgile, Horace, Ovide, Sophocle, Théocrite, Eschyle et tous les auteurs étrangers dont nous lisons les traductions. […] Homère résume tout et suffit à tout, Il n’est ni un auteur classique ni un auteur ancien, il est le poète de tous les temps ; c’est un moderne.‌ […] Tous les jours et de toutes pièces, même en dehors du roman-feuilleton, romanciers et poètes inventent des sujets, des descriptions, des scènes, des aventures, de faux déraillements, de faux naufrages.

701. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Il les précède comme s’il les annonçait, et qu’il n’y eût plus, après lui, qu’à faire une théorie absolue et élever à la hauteur d’une loi le désespoir impie de l’odieux poète de l’Athéisme et de la Mort. […] Caro pour le poète Leopardi. […] sachez-le bien, les poètes, avant tout, sont des âmes ! […] Leopardi, ce n’est pas un poète ! […] ce n’est pas un poète.

702. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

et voilà son poète qui l’abandonne ! […] Voilà où cela vous mène, d’être un poète de trop bonne heure. […] Mais, comme un grand poète qu’il est, le poète nous raconte avant tout ce qui se passe dans l’âme d’Ulysse. […] Alors le moyen d’être un poète, je vous prie ? […] mais ne plaignez pas les poètes !

703. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Mais rien ne le prouve, et j’accuserais plutôt non Homère, mais le temps où ce poète a vécu, d’avoir été grossier et barbare. […] Parce qu’elle est ivre, elle croit que tous les poètes le sont, l’ont été et doivent l’être. […] Plaute oubliait alors qu’il était poète comique. […] On croirait vraiment que le poète échappe à la loi de l’association des idées ; à coup sûr, il n’a pas fait de plan. […] D’où vient ce luxe du poète anglais, et cette économie de Molière ?

704. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

La campagne est un poëte qui fait et défait en même temps les illusions dont il nous nourrit. […] Le poëte a détesté la grossière gloutonnerie et l’ignorance brutale de la bête sauvage. […] Mais il a eu pitié de l’oiseau délicat, musicien, poëte comme lui-même. […] Mais combien les hardiesses du poète sont plus expressives ! […] Qu’est-ce donc que la vie, et comment le poëte parvient-il à la rendre ?

705. (1927) Des romantiques à nous

Ses grands philosophes n’ont-ils pas été aussi fous, plus peut-être, que ses grands poètes ? […] Pour bien louer un vrai poète, il faut être un peu poète soi-même. […] C’est alors qu’au lieu de dire les poètes, certains s’accoutumèrent à dire : le poète, dans le sens où ils eussent dit : le pape. […] Le poète n’est troublé ici que parce qu’il ne dépend pas de lui de surmonter une telle fatalité. […] Il a été un des plus grands poètes européens.

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