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1612. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

… Vous pouviez être grands, vous ne serez que justes ! […] « Après la mort de ma première épouse, dit dans cet écrit l’empereur, je crus qu’il était juste et convenable d’élever Na-la-che, femme du second rang, qui m’avait été donnée par mon père lorsque je n’étais encore que simple particulier, au rang de première épouse et d’impératrice ; je ne voulus rien faire cependant sans consulter l’impératrice ma mère. […] s’écrie ici le savant traducteur, que les Montesquieu, les Burlamaqui, les Grotius baissent et se rapetissent quand on les compare à ce qui y est dit sur le prince du sang et les princes titrés, les hommes publics et les simples citoyens ; jusqu’où les grands doivent être soumis à l’empereur ; sur ces ministres et ces magistrats qui doivent s’exposer à tout pour ne pas tromper sa confiance ; sur le choix des dépositaires de l’autorité, la manière de les gouverner, de les veiller, de les élever ou abaisser, récompenser ou punir ; sur tout ce qui concerne les fortunes des particuliers, la division des terres, les impôts, les différentes récompenses des talents, des services, des vertus, et le juste châtiment de toute espèce de désordre, crime et délit ! 

1613. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

On conçoit l’étonnement et la juste colère qui saisirent les ministres et le roi à Cagliari quand les ministres et le roi apprirent avec stupeur cette incartade de zèle et cette folie de fidélité dans leur ministre à Pétersbourg. […] « J’ose croire que ces trois déclarations excluent jusqu’à l’apparence de l’inconsidération, et, quand même mon désir serait repoussé, j’ose croire encore que Sa Majesté l’Empereur des Français n’y verrait rien qui choque les convenances, rien qui ne s’accorde parfaitement avec la juste idée qu’il doit avoir de lui-même. » XXIV L’empereur Napoléon ne répondit même pas à une demande d’audience si extraordinaire et qui ne pouvait que l’embarrasser. […] Il est plus aisé d’être exigeant envers les autres que juste envers soi-même.

1614. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Alfieri, au milieu de ses récriminations irritées, est bien obligé de reconnaître que ces plaintes étaient justes. […] Si je ne me fusse pas trouvé auprès de mon amie en recevant ce coup si rapide et si inattendu, les effets de ma juste douleur auraient été bien plus terribles ; mais, quand on a quelqu’un pour pleurer avec soi, les pleurs sont moins amers. […] Ainsi munis de toutes ces patentes d’esclaves, nous avions fixé notre départ au lundi 20 août ; mais, tout étant prêt, un juste pressentiment nous en fit devancer le jour, et nous partîmes le 18, qui était un samedi, dans l’après-dînée.

1615. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Nous n’avons point de balance juste. […] juste dieux ! […] Estève, professeur de Littérature à l’Université de Nancy, je le mettrais de préférence à l’école du xviie et du xixe  siècle. » Voilà, ce me semble, qui satisfera Lucien Descaves, lequel nourrit pour les manuels scolaires une juste animadversion Alors, quoi ?

1616. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Il n’est pas juste de faire à Voltaire tout seul l’honneur d’avoir sauvé l’esprit français du péril que lui fit courir le retour au précieux. […] Et si cette compensation est juste, à qui sied-il mieux de l’appliquer qu’à l’écrivain qui depuis un siècle est le bon conseil des nations civilisées, à l’homme de bien dont l’histoire privée offre des traits à la Plutarque, au citoyen qui a pu dire de lui-même sans risquer d’être démenti : « J’ai toujours eu une joie secrète lorsqu’on a fait quelque règlement qui allait au bien commun ?  […] Les premières faveurs de la fortune l’avaient gâté ; les dernières l’améliorent, parce qu’elles sont le juste prix de son mérite.

1617. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

S’il était vrai, comme le pense Aristote 163 que, de même que l’âme est destinée à commander et le corps à obéir, de même il y a, dans la société, des hommes qui ont leur raison en eux-mêmes, et d’autres qui, ayant leur raison hors d’eux-mêmes, ne sont bons qu’à exécuter pour eux la volonté des autres, ceux-ci seraient naturellement esclaves ; il serait juste et utile d’obéir, leur révolte serait un malheur et un crime aussi grand que si le corps se révoltait contre l’âme. […] Car, le nombre n’étant pas un indice de vérité intrinsèque, la minorité pourrait dire : « Vous vous imposez à nous, non pas parce que vous avez raison, mais parce que vous êtes plus nombreux ; ce serait juste, si le nombre représentait la force ; car alors, au lieu de se battre, il serait plus raisonnable de se compter pour s’épargner un mal inutile. […] Les guerres des Albigeois, les persécutions contre les Vaudois, les cathares, les bogomiles, les pauvres de Lyon, ne me choquent pas plus que les croisades : c’étaient là réellement des errants, sortant de la grande forme de l’humanité, et quant aux hommes vraiment avancés du Moyen Âge, comme Scot Érigène, Arnauld de Bresce, Abélard, Frédéric II, ils subissaient la juste peine d’être en avant de leur siècle.

1618. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Jules Barbier dominait le tout, mais je ne puis l’admettre ; il n’a que sa part, comme de juste. […] (252) D’au juste châtiment votre âme est trop émue ; Mais, croyez-moi, sur l’heure envolez-vous, Abandonnez la déesse déchue, Si vous voulez éviter mon courroux. (266) Il y a pas, en le voit, le moindre effort à créer en français quelque chose d’analogue au style de l’original. […] Il n’est que juste de dire que cette peur a la double fonction de rimer avec « seigneur » et avec « vigueur ».

1619. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

24 février Il y a juste vingt ans, vers une heure, du balcon que nous avions, rue des Capucines, je vis le chaudronnier d’en face, grimper très vite sur une échelle, et abattre à coups de marteau pressés, les mots du Roi qui suivaient le mot Chaudronnier. […] * * * — En sortant d’une maison, où nous avions dîné gaiement ensemble, le fin et discret observateur qu’est Viollet-le-Duc, me disait, et sa remarque était parfaitement juste : « Il faut, pour qu’une soirée soit agréable, que la maîtresse de maison ait un amant et que cet amant ne soit pas là. » 15 avril Rue de Courcelles. […] C’est un grand document, malheureusement trop délayé, où le talent de Mme Sand, dans le vrai, l’observation juste des autres et d’elle-même, étonne et surprend.

1620. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

La suppression de la vanité vient d’une mesure exacte de soi, d’une coordination meilleure des phénomènes mentaux ; ayez pleine conscience de vous-même, réfléchissez sur vous-même, et vous vous ramènerez pour vos propres yeux à de justes proportions. […] Le vice porte atteinte au juste et au vrai, révolte l’intellect et la conscience ; mais, comme outrage à l’harmonie, comme dissonance, il blessera plus particulièrement certains esprits poétiques, et je ne crois pas qu’il soit scandalisant de considérer toute infraction à la morale, au beau moral, comme une espèce de faute contre le rythme et la prosodie universels. » — Alors pourquoi écrire soi-même les Fleurs du mal et chanter le vice ? […] Dans le domaine physique, la maladie est plus contagieuse que la santé ; de même, dans le domaine moral, la colère, par exemple, ou l’amour des sens sont plus contagieux que la tranquillité d’âme du juste.

1621. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

Les œuvres idéalistes classiques tendent à être belles, elle se plaisent à la description de lieux riches et heureux, elles donnent du corps humain une image pure de lignes et de couleurs, chaste, sobre et saine ; elles montrent des âmes nobles, fort bonnes, et calmes, animées d’émotion simples et liantes d’amour tendre, de courage, de générosité, de patriotisme, de fière ambition, de juste respect des dieux, de vertus sévères, religieuses mais sans outrance modérées, mais tempérées, contenue de raison et sans disgracieux excès. […] Mais ce sont là de purs semblants et en fait, pour un observateur qui serait l’écrivain ou le peintre parfaitement sain, normal et juste, l’écrivain ou le peintre réaliste avec ses cieux brouillés, ses sites vulgaires, les champs pelés, son humanité souffrante et ignoble s’éloigne presque autant du vrai que l’artiste idéaliste qui, en un paysage harmonieux, voit l’horizon bleu, de nobles formes humaines blanches, souples et fortes et douées d’âmes aussi pures que leurs corps. Tous deux altèrent et choisissent en ce qu’ils perçoivent, et cela est si juste que s’il va plusieurs sortes d’idéalismes, de Sophocle à Gœthe, il va tout autant de genres de réalisme, de peintres hollandais à nos impressionistes, de Restif à Stendhal, à Balzac, à Zola, à Dickens, à Dostoïwski et à Tolstoï.

1622. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

La plupart des remarques de La Mothe étoient justes ; ses principes étoient vrais : mais il s’égara dans l’application qu’il en fit. […] Tant de choses, qu’il dit & qu’il fait, ne nous paroissent si ridicules que parce que nous n’avons aucune idée juste. […] L’expression de l’auteur est toujours juste, correcte, simple, claire, énergique, brillante & naturelle.

1623. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

La découpure belle, rigoureuse et juste, seroit celle qui suivroit le trait délié dans tous ses points et qui le partageroit en deux. […] La draperie d’Aglaure est large, simple et juste. […] Quand vous aurez répondu à cette question, vous trouverez qu’avec quelque sévérité que je l’aie traité, j’ai été juste.

1624. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Ces cinq parlaient juste comme s’ils avaient été cinq cents, et pourtant il manquait des noms autorisés au bas de leur déclaration, et d’abord ceux de M. de Maupassant et de M.  […] Halévy, en littérature, il y a juste sept ans, fit l’effet d’un 9 Thermidor, — sans guillotine. […] Soyons justes. […] Nul ne sait au juste. […] Admettons que la nécessité, l’amour — qui est la plus efficace des nécessités — lui ait imposé ces justes noces ; le héros de M. 

1625. (1893) Alfred de Musset

« La critique juste, disait-il, donne de l’élan et de l’ardeur. […] Il est juste d’ajouter que Musset laissait percer un dessein arrêté de marcher à l’avenir sans lisières. […] Mais telle est la force d’une idée juste, que tout s’arrange, malgré tout, comme le vieux duc l’avait prévu. […] C’est une langue franche et transparente, où l’expression est juste, le tour de phrase net et naturel. […] Aux trop justes sujets de tristesse que nous avons indiqués s’ajoutaient des ennuis divers, parmi lesquels, au premier rang, son peu de succès.

1626. (1864) Le roman contemporain

Je ne parle point de Restif de la Bretonne et de Pigault-Lebrun, dont les œuvres sont tombées dans un juste oubli ; mais qui entreprendrait aujourd’hui d’aller jusqu’au bout de cette Mathilde de madame Cottin, qui fit verser sur les malheurs de l’héroïne et de Malek-Adel tant de larmes aux beaux yeux des jeunes femmes de cette époque, qui sont allées où vont les Neiges d’antan ? […] Plus tolérante et, selon nous, plus juste qu’elle ne l’avait été, elle loue M.  […] Le beau, le vrai, le juste, l’honnête, sont chassés comme des intrus du temple que les Grecs avaient élevé aux Muses et que l’école réaliste métamorphose en casino, ayant soin d’en exclure, et pour cause, les sergents de ville. […] Ce personnage et celui de M. de Bévallan, le type de ces bons garçons réalistes et épicuriens, qui traversent les années de leur jeunesse en prenant le plus de plaisir qu’ils peuvent, en ne faisant tout juste que le mal qui leur sert ou qui les amuse, représentent dans le roman la vie réelle.

1627. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Adversaires et amis dépassent la juste mesure. […] Singulière figure de pensée, immobilisée, comme la femme de Loth en statue de sel, dans le geste qui la tourne, ardente et nostalgique, vers une poésie qu’elle réalise juste assez pour nous en faire, à la direction de son regard, imaginer une éternelle ! […] Lorsque Boileau, dans l’Art Poétique, déroule la suite de la poésie française, ses indications précises ont pour objet d’instruire, de donner comme vêtement exact à la permanence d’une idée juste la durée d’un bon vers. […] Stello, avec son triple épisode de Chatterton, de Gilbert, d’André Chénier, ce compte âprement demandé à trois états politiques du mépris ou de la haine qu’ils gardent au poète, forme à plus juste titre que le roman italien un Mystère du Poète, de plan et de visée analogues aux Mystères du Peuple, le premier aussi de ces colériques romans corporatifs comme il en pullula depuis, un Jean Coste. […] Mais (le sonnet, il faut s’en souvenir, naît comme sa fleur exacte et logique de toute la Déclaration Foraine) cette courbe pressentie et cette chute de la chevelure vers un Occident amoureux, demeurent arrêtées, contenues, disciplinées, ramenées purement en tresse au foyer du front, disposées en la couronne juste de la beauté.

1628. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Il est juste de dire que malgré les défauts de toute nature dont ces sortes de pièces fourmillaient, on y trouvait cependant parfois des idées morales et des mots spirituels. […] Simon Bourgoin, valet de chambre de Louis XII, auteur d’une Moralité ayant pour titre : l’Homme juste et l’Homme mondain. […] Tous les sujets de ses tragédies sont choisis de façon à inspirer à son public une juste horreur des dissensions intestines. […] Il est juste de dire que dans les premiers temps de l’art dramatique et même pendant des siècles encore, il n’y avait ni changement de décors au théâtre, ni changement de costume pour les acteurs. […] Sa troisième, jouée en 1703, et intitulée Mort de Néron, coûta à son auteur juste autant d’années qu’il faut de mois à une femme pour mettre au monde un enfant.

1629. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Les titres en aucun temps n’ont donné une idée juste des choses ; s’il en était autrement, les œuvres seraient superflues. […] Les titres, en aucun temps, n’ont donné une idée juste des choses : s’il en était autrement, les œuvres seraient superflues. […] Courbet ; mais, quand on prend parti avec tant d’emportement, on s’inquiète de frapper fort avant de s’inquiéter de frapper juste. […] Le procédé réaliste, soutenu par l’idée du juste, c’est-à-dire le sentiment d’une grande fidélité envers la nature, accompagné d’une morale réelle, telle est la trame esthétique sur laquelle repose l’œuvre de M.  […] Mais le rapprochement de ces deux noms ne serait pas juste de tous points.

1630. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Elles montent plus haut… Je tâche d’y monter… » On aura remarqué la manière dont elle parle de Mme Tastu, avec quel sentiment pénétré, quel respect pour ses qualités régulières et pour ce mérite de femme qui a eu dans sa jeunesse quelques notes poétiques si justes et si pures. […] « Mon cher enfant, Que je voudrais que ta raison fût assez mûre pour peser à leur juste valeur les horribles événements dont nous venons d’être témoins et te servir de règle pour l’avenir !

1631. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

votre reproche est juste ; je voudrais pouvoir sécher vos larmes, mais il vous faut implorer le secours d’une main plus puissante que celle des hommes. […] En relisant l’Essai, j’ai désiré un milieu plus juste entre la louange première et la sentence trop rigoureuse qui durera.

1632. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Au nom de cette classe intermédiaire, de plus en plus nombreuse, qui flotte entre les admirateurs aveugles et les admirés déifiés, qui n’est plus le vulgaire idolâtre et qui ne prétendra jamais au rang des demi-dieux, qui devra pourtant accorder sa juste estime et son admiration à qui méritera de la ravir, on est tenté de redemander quelques-uns de ces beaux et purs grands hommes dont les actes ou les œuvres sont comme la fleur du sommet de l’arbre humain, comme l’ombre bienfaisante qui s’en épanche, comme le sue mûri qui en découle. […] Au milieu des inexactitudes et des lacunes inévitables d’un tel mode de reconstruction, surtout avec une édition si fautive et si incohérente que celle qu’avait donnée Manuel du manuscrit de Vincennes, il n’en résultait pas moins pour l’ensemble de la jeunesse et de la première vie de Mirabeau une impression assez juste, sentimentale plutôt qu’irrécusablement motivée ; on voyait un homme dont les malheurs étaient plus grands que les torts, et les torts plus méchants que le fond.

1633. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

Comme il se serait écrié à plus juste titre, en voyant cette relique, telle qu’il les aimait : « Elle me rappelle mon premier état, et l’orgueil s’arrête à l’entrée de mon cœur. […] Je pensai juste. » Là, je m’arrêtai et je demandai à mon religieux s’il savait combien il y avait d’ici chez moi : « Soixante lieues, mon père ; et s’il y en avait cent, croyez-vous que j’aurais trouvé mon père moins indulgent et moins tendre ? 

1634. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

Tout le rayon du siècle est tombé juste sur chaque page du livre, et le visage de l’homme qui le tenait ouvert à la main s’est dérobé. […] Il y a nombre de pensées droites, justes, proverbiales, mais trop aisément communes, dans Boileau, que La Bruyère n’écrirait jamais et n’admettrait pas dans son élite.

1635. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre III »

Enfermée d’abord dans le réservoir aristocratique, la doctrine a filtré par tous les interstices comme une eau glissante, et se répand insensiblement dans tout l’étage inférieur  Déjà en 1727, Barbier, qui est un bourgeois de l’ancienne roche et ne connaît guère que de nom la philosophie et les philosophes, écrit dans son journal : « On retranche à cent pauvres familles des rentes viagères qui les faisaient subsister, acquises avec des effets dont le roi était débiteur et dont le fonds est éteint ; on donne cinquante-six mille livres de pension à des gens qui ont été dans les grands postes où ils ont amassé des biens considérables, toujours aux dépens du peuple, et cela pour se reposer et ne rien faire578 »  Une à une, les idées de réforme pénètrent dans son cabinet d’avocat consultant ; il a suffi de la conversation pour les propager, et le gros sens commun n’a pas besoin de philosophie pour les admettre. « La taxe des impositions sur les biens, dit-il en 1750, doit être proportionnelle et répartie également sur tous les sujets du roi et membres de l’État, à proportion des biens que chacun possède réellement dans le royaume ; en Angleterre, les terres de la noblesse, du clergé et du Tiers-état payent également sans distinction ; rien n’est plus juste. » — Dans les dix années qui suivent, le flot grossit ; on parle en mal du gouvernement dans les cafés, aux promenades, et la police n’ose arrêter les frondeurs, « parce qu’il faudrait arrêter tout le monde ». […] Ce peuple libre, juste et sage, toujours d’accord avec lui-même, toujours éclairé dans le choix de ses ministres, modéré dans l’usage de sa force et de sa puissance, ne serait jamais égaré, jamais trompé, jamais dominé, asservi par les autorités qu’il leur aurait confiées.

1636. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

ces larmes que fit couler le désir impatient d’une dure contrainte, lorsque la juste douleur dont le cœur était pénétré éleva un nuage de pleurs sur des astres de l’amour ! […] Si l’emploi de tant de temps, de génie, d’artifices, avait eu un plus juste et plus digne objet, dans quel calme heureux et consolant tu verrais aujourd’hui s’écouler ta vie !

1637. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Catulle Mendès est un artiste merveilleux ; il possède la science du mot élevé et juste et sait toujours maintenir son inspiration à la hauteur où il la place ; il a trouvé, surtout dans les Poèmes épiques, des vers superbes et qui s’imposent à la mémoire, de ces vers qui semblent écrits dans le texte en caractères plus gros, tellement l’œil s’arrête sur eux, attiré par la forme des mots, leur arrangement, tout ce qui fait le dessin d’un beau vers avant que la musique en soit intelligible. […] Ou Peppa qui s’embobeline Dans une pâle manteline ; Que du jeune et cher Courteline Tu nous chantes le juste fos, Ou que tu piques jusqu’à l’os Brunetière et Monsieur Buloz ; Toujours ta grâce reste sûre ; Tu jongles sans une blessure À l’Art noble ; ton goût rassure ; Tu fais toujours, divin pervers, Loucher tous les poètes vers La perfection de ton vers ; Car il est le tissu qui : tulle (Mot vraiment ailé), s’intitule, Moins léger que ton vers, Catulle !

1638. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Ailleurs, quand Mayenne avoue qu’il a toujours songé à faire quelque chose de bon pour lui et les siens, n’a-t-il pas pu croire, dans la bonne foi de sa cupidité, que c’était un juste prix de ce qu’il avait fait pour la Ligue ? […] L’Académie française, dans le choix qu’elle fit de quelques écrivains pour servir de modèles de la langue, ne se montra que juste en y joignant saint François de Sales à Malherbe.

1639. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Si la pécheresse, au bord de la tombe, demande sa consolation et sa force au plus mystérieux sacrement de la religion catholique, la peinture de cette scène a juste autant de valeur dans l’ensemble du roman que la description d’une casquette ridicule sur la tête d’un collégien de province. […] Presque toujours, comme ici, le point de départ est juste, et l’arrangement, l’explication, l’amplification viennent tout détruire.

1640. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

Cependant il s’agit du mot latin lacertus, lequel veut dire lézard, et que les poètes ont maintes fois employé pour désigner le bras d’un héros ou d’un athlète.  » Mais s’il est surprenant déjà qu’une telle image ait été formée une fois, car elle est très étrange, quoi que très juste, et elle aurait pu, certes, ne jamais sortir du réservoir profond des sensations, quel étonnement de la voir périodiquement retrouvée, qu’il s’agisse de lézard ou de souris, au cours des siècles et des langues ! […] Le centre de l’œil a été comparé à la petite prune d’un noir bleu ou violacé qui mûrit parfois après les gelées ; par une métaphore analogue, mais bien moins jolie et bien moins juste, les Anglais appellent la prunelle de l’œil eye-apple et les Flamands, oogappel, la pomme de l’œil.

1641. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Il raconte les faits dans une juste étenduë. […] Vous saurez réduire à leur juste mesure les éloges excessifs que ces Panégyristes ont donnés à leur héros, sur-tout lorsque ce sont des Religieux qui ont écrit la vie de leur Fondateur.

1642. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

C’est en France qu’a été inventée cette maxime, qu’il valait mieux frapper fort que juste. Contre un pareil principe, il faut des règles fixes, qui empêchent les écrivains de frapper tellement fort qu’ils ne frappent plus juste du tout.

1643. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Sans doute, on peut être assuré par avance qu’elle n’est pas sans cause, mais il est mieux de savoir au juste quelle est cette cause. […] D’après le droit athénien, Socrate était un criminel et sa condamnation n’avait rien que de juste.

1644. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Je serai juste, pourtant. […] L’amour-propre de Sainte-Beuve, soit qu’il eût été blessé, soit qu’il eût été flatté, était la grande raison en permanence pour qu’il ne pût pas être juste.

1645. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Et nous serons juste jusqu’au bout. […] Monselet, qui consacre une plume faite pour mieux que cela à des biographies de médiocrités frelatées, nous disons que c’est moins dangereux, sans doute, mais non plus utile ou plus juste.

1646. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Un jour, quelqu’un l’appela spirituellement un cueilleur de muguet, et c’était un mot doux et juste… Mais aurait-on jamais pu croire que cet aimable cueilleur de muguet pour les jeunes personnes qu’il ne faut qu’honnêtement émouvoir, aurait l’incroyable ambition de protéger le catholicisme ? […] — et, en effet, il faut être juste, ils ont mal mené, en conduisant la France, les gentilshommes.

1647. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Il est juste d’ajouter que M. de Bouhélier lui nie la « notion du divin » ; et cette remarque est importante à noter car nous verrons qu’elle est apparentée à celle que nous formulerons nous-même plus loin.‌ […] La rage soulevée venait confirmer ce fait, que Zola avait touché juste en attaquant le vieux principe spiritualiste et dualiste, en s’affiliant au mouvement profond d’émancipation de la pensée moderne vis-à-vis de la philosophie traditionnelle directement issue du christianisme.

1648. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

En ce sens la solidarité qui naît de la différence des individus a pour condition une solidarité autre, qui naît précisément de leurs ressemblances « Pour que les unités sociales puissent se différencier, il faut d’abord qu’elles se soient attirées et groupées en vertu des ressemblances qu’elles présentent118. » Ajoutons que pour qu’elles veuillent rester groupées et cherchent un ordre social qui fasse à chacune sa juste part, il faut que certaines ressemblances aient continué de les unir et, comme le Dieu de Descartes recrée à chaque moment le monde, recréent à chaque moment l’association : le départ de ce qui revient à chaque individualité ne peut être effectué que par des individualités qui s’entendent, c’est-à-dire qui ont quelque chose de commun. […] Les échanges d’imitations, plus rapides et en quelque sorte plus souples que les croisements biologiques, doivent agir, mais encore plus vite, dans le même sens : ils seront les destructeurs désignés des types collectifs ; aux groupes étroits de gens qui se ressemblent sous tous les rapports ils sont faits pour substituer les groupes indéfiniment élargis de gens qui se ressemblent par quelque côté, et en ce sens, — si nos déductions précédentes sont justes, — pour hâter la venue des idées égalitaires.

1649. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Au lieu de ce sceptre équitable, de ce soin de cueillir la fleur des plus hautes vertus, de cette patience à supporter la plainte, de cet amour de la justice et des arts, dont Pindare félicitait Hiéron, au lieu de ces lois justes et de cette liberté paisible qu’il attendait du roi d’Etna, fils d’Hiéron, ce que Callimaque célèbre dans Ptolémée, c’est la rapidité de la puissance arbitraire, ce sont ces images, empruntées à l’Orient, d’une volonté suprême aussi promptement obéie que connue. […] Car lui-même, au sommet d’airain des cieux, est inébranlablement fondé sur un trône d’or ; et de ses pieds il marche sur la terre, et il étend sa main droite juste qu’aux bornes de l’Océan.

1650. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Le poëte continue : « Pour la gloire méritée de ton nom, pour la juste vengeance de ton peuple, pour les gémissements de tant de malheureux, tourne ton bras redoutable contre celui qui s’indigne d’être homme… et, trois et quatre fois, frappe d’un châtiment rigoureux ton ennemi : et que l’injure faite à ton nom soit l’erreur fatale de sa vie ! […] Plus l’âme se détache des sens pour contempler le juste et le beau, plus elle mériterait de n’entrevoir que l’image de l’idéal divin.

1651. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

Elle avait beau s’armer de philosophie : « Son caractère, écrivait l’ambassadeur français, M. de Breteuil, n’est pas formé à ce genre, quoiqu’elle m’ait fait souvent l’honneur de m’assurer du contraire. » Plus juste que M. de Breteuil, nous disons : la philosophie pour elle était un pis aller, il était toujours temps d’y recourir.

1652. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Mémoires du comte d’Alton-Shée »

Mais ce qui m’y frappe et ce que j’en aime, c’est le ton sincère, l’absence du convenu, la connaissance des hommes, la vérité des profils, les traits spirituels et justes qu’on en peut détacher.

1653. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »

On a beau savoir à fond la chose, et où elle se termine : on ne trouve pas l’idée et la phrase de la fin, celles qui doivent achever l’impression et conclure le discours ; on reprend son propos, on revient sur ses pas, on change un peu sa direction, sans pouvoir tomber juste au but.

1654. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre II. La tragédie »

Elève attentif du xviie  siècle, il a des vues justes, moyennes, peu personnelles, sur le mécanisme de l’âme humaine.

1655. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Je crois aussi qu’on est bon et juste (quand on l’est) naturellement, par un sentiment qui commande et rend le plus souvent facile le sacrifice à autre chose que soi et, comme on l’a dit, par une « duperie » profitable à l’ordre universel et qui dès lors n’est plus duperie : mais pour croire que ce n’en est pas une, il faut faire effort, et sans doute la morale doit commencer par un acte de foi, formulé ou non.

1656. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XX. Opposition contre Jésus. »

Mais il était juste aussi que ce grand maître en ironie payât de la vie son triomphe.

1657. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 326-344

On pourroit dire d'abord que c'est beaucoup pour une espece de Discours préliminaire ; mais on fait volontiers grace à cette exubérance de richesses, en faveur des jugemens, des analyses profondes, des justes critiques, des tableaux énergiques, de l'érudition choisie, & sur-tout du style moins maniéré & moins roide, qui regnent dans cette nouvelle Production.

1658. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre II. Le Bovarysme comme fait de conscience son moyen : la notion »

Les raisonnements que l’on poursuit à leur occasion peuvent être justes ou erronés, mais elles-mêmes ne sont ni vraies, ni fausses, elles existent.

1659. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

La Fontaine, qui vante si souvent Louis XIV sur ses guerres et sur ses conquêtes, avait ici une belle occasion de lui donner des éloges plus justes et mieux mérités.

1660. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VIII. Suite du chapitre précédent. De la parole traditionnelle. De la parole écrite. De la lettre. Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain » pp. 179-193

Les législateurs anciens étaient dirigés par de bien plus hautes raisons que celle qu’on leur suppose si gratuitement d’avoir voulu entretenir l’ignorance des peuples ; et, une fois pour toutes, ne devrait-on pas s’entendre sur la vraie et juste acception de ce terrible mot d’ignorance ?

1661. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

Blaze de Bury, qui se souvient trop des types officiels et classiques quand il faudrait analyser, creuser ou peindre, appelle tour à tour madame de Platen Phèdre, Médée ou Messaline, pour nous donner une juste idée des fureurs d’amour, de jalousie et de vengeance, qui luttèrent en elle.

1662. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Lui, en sa qualité de philosophe, croit au progrès indéfini et au développement toujours plus grand et plus juste de l’histoire.

1663. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

Mais, soyons juste, il en joue avec une telle supériorité qu’aux premiers sons qu’il en a tirés il s’est fait suivre, comme le plus charmant des pasteurs, par le troupeau enthousiasmé de Panurge, par tous les petits moutons de la libre pensée.

1664. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Antoine Campaux » pp. 301-314

dit-il, voilà juste la molécule qui a produit tel grand homme qu’il vous nomme sans peur.

1665. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

Il a cité le portrait anonyme dont tout le monde, dans le temps, reconnut le modèle ; ce portrait d’une touche si ferme, si sobre et si majestueusement sévère… Il a cité l’ironique compte rendu de la première représentation de L’Écossaise, dans lequel Fréron prit dans sa main, juste comme une balance, la fange qu’on lui jetait à la figure, et pesa ce paquet de fange qui pesait trop peu pour le blesser !

1666. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

À coup sûr, il n’est pas le stoïque, revêtu des grâces de Platon, de la contrefaçon Voltaire ; le juste d’Horace, que les ruines frappaient sans émouvoir, même celles de son corps.

1667. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

Il fallait y mettre un désintéressement fier, et y rencontrer l’expression juste d’un esprit qui n’étudie plus que l’intensité de la nature humaine dans les héros.

1668. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

puis à de Champagny, dans ses Douze Césars, lorsque, pour être juste, il fallait peut-être remonter au prince de Ligne, qui, dans son adorable dictionnaire de ses grands hommes, se servit des formes de la langue moderne pour exprimer des choses antiques, avec le laisser-aller, le caprice et les familiarités d’un prince.

1669. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

Il fallait y mettre un désintéressement fier et y rencontrer l’expression juste d’un esprit qui n’étudie plus que l’intensité de la nature humaine dans les héros.

1670. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

Ce rêveur de Ballanche, qui avait tout à la fois du Platon et du Jocrisse dans sa personne, s’imaginait (écrit-il encore dans la même Préface) qu’il y avait de son temps, dans la Belle France, dix mille fois les dix justes qu’il fallait pour sauver Sodome.

1671. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

À coup sûr, il n’est pas le stoïque, revêtu des grâces de Platon, de la contrefaçon Voltaire, le juste d’Horace que les ruines frappaient sans émouvoir, même celles de son corps.

1672. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

L’opinion a fait de l’Imitation un livre essentiel, et sans nier ses mérites raffinés en piété pratique, cela est-il juste, cela est-il sage à une époque comme la nôtre, où tant d’esprits inclinent, hélas !

1673. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

le conceptualiste Abélard, qui voulait unir, dans une unité équivoque, le réalisme et le nominalisme de son temps, a plus d’un rapport évident avec un esprit fin, éclectique et de juste milieu, comme celui de Charles de Rémusat ; et s’il y a des différences qui rabougrissent Charles de Rémusat, ce sont des différences de tempérament (non d’intelligence) et de siècle.

1674. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

Pour tout cœur pur et tout esprit juste, il est évident que la reproduction des Évangiles est la meilleure exposition des vérités de notre foi.

1675. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

On ne saurait trop le répéter : cette force immense de fondation sociale que l’Angleterre reconnaît aujourd’hui comme l’apanage de l’Église romaine, est ailleurs que dans la conception de quelques cerveaux qui ont vu un peu plus juste et un peu plus loin que les autres hommes, ou dans des règlements de ménage que le temps pouvait, à son aise, emporter.

1676. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gustave D’Alaux »

Quand on ne croit pas au hasard, aussi bête que les couleuvres africaines adorées par Soulouque et dont d’Alaux se moque avec juste raison, lorsqu’on a le bon sens d’admettre la variété providentielle des fonctions pour tous les peuples, les nègres, qui probablement ont leurs origines comme les autres races, semblent avoir été mis particulièrement dans le monde pour montrer combien est pesant aux créatures humaines le fardeau de la liberté.

1677. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

Il est même un de ceux qui nous donnent le mieux le ton juste de sa coterie.

1678. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

Forcément donc, pour faire acte de Critique (je ne dis pas intelligente, mais seulement juste), il faut prendre l’inspiration à part du détail et y mettre l’œil ; il faut dire ce que l’auteur eût dû penser, indépendamment de ce qu’il a pensé, et montrer ce qu’il eût dû faire, pour lui mieux reprocher ce qu’il a fait (si ce qu’il a fait est inférieur).

1679. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

Charles Baudelaire d’avoir pu évoquer, dans un esprit délicat et juste, un si grand souvenir !

1680. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Janin » pp. 159-171

Il est taillé juste à la grandeur de cet antre obscur, dont il égaie ou scandalise les pousse-bois, comme il les appelle, qui viennent y jouer leurs parties d’échecs : mais le même Neveu de Rameau, dans M. 

1681. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Mon père fit les frais de la publication, Rignoux m’imprima, et avec cet à-propos et ce flair des commotions politiques qui me caractérisent, je parus au passage des Panoramas, à la vitrine de Marie, éditeur, juste le 28 juillet 1850. […] L’idée était juste, et, imprudemment confiée, fit la fortune d’un autre. […] N’est-ce pas Alexandre Dumas qui disait de Shakspeare : « Shakspeare, l’homme qui a le plus créé après Dieu » ; le mot serait encore plus juste appliqué à Balzac ; jamais, en effet, tant de créatures vivantes ne sortirent d’un cerveau humain. […] Un détail lui suffisait, comme à Cuvier le moindre fragment d’os, pour supposer et reconstituer juste une personnalité entrevue en passant. […] Le jeune voyageur y parle de la Provence, qu’il vient de traverser « juste au moment des roses et des arbres de Judée », de la route de Marseille à Toulon, si aride et si sauvage, du joli vallon chargé d’oliviers en fleur qu’on parcourt avant d’entrer dans cette dernière ville.

1682. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

La pièce sur Westminster me paraît très supérieure à la pièce sur Shakespeare, non que la forme soit plus précise et plus pure ; mais l’idée choisie par le poète est mieux définie, plus facile à embrasser et plus juste en elle-même. […] Si l’idée mère de Westminster est juste et grande, le style de cette pièce n’a pas constamment toute la clarté désirable. […] Cet avis semblera sévère ; mais il n’est que juste, et si nous voulions résumer tous les griefs que nous avons contre ce livre, il semblerait indulgent. […] Il nous l’a donné pour un admirateur de Rousseau, de Montesquieu et de Voltaire ; mais ce renseignement, réduit à sa juste valeur, ne signifie absolument rien, car aucun de ces trois grands noms n’appartient à la philosophie proprement dite. […] Ce dernier reproche est plus grave que celui d’injustice et d’ignorance, et c’est pour le réduire à sa juste valeur que j’essaye aujourd’hui de raconter comment naissent, grandissent et meurent les amitiés littéraires.

1683. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

« C’est une société, écrivait-il, composée de Pharisiens, qui se disent justes, et de publicains, qui ne veulent pas le devenir. […] Les larmes d’argent du journalisme et de la librairie qu’il a enrichis ont tout juste la vertu communicative des larmes du drap mortuaire au-dessus duquel fut balancé pour lui le tiède encens de quelques rares suffrages. […] Il n’est pas possible d’éreinter plus complètement une petite idée à moitié juste. […] Mais il est un homme juste, et son patriotisme ne l’aveugle pas. […] Il faudrait inventer je ne sais quel mot pour donner l’idée juste de cette belle flamme blanche crénelée de pourpre et d’or, repliée, tordue, volubile et mugissante dans l’asphyxiante touffeur souterraine de sa catacombe d’incrédulité.

1684. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Personne n’a démontré avec plus de lucidité que lui, dans le morceau même auquel cette phrase est empruntée, pourquoi la noblesse française a perdu le pouvoir et les justes raisons de sa déchéance. […] Les bourgeois ont été lâches et les paysans stupides. » Il est juste d’ajouter que cette constatation si judicieuse se termine sur une défense, qui semble bien inattendue, du suffrage universel. […] Ils pensent métier au lieu de penser idées, autant dire qu’ils pensent précis et juste, au lieu de penser vague et faux. […] Ces mots d’inférieure et de supérieure sont-ils même justes, appliqués par exemple à un laboureur et à un avocat, à un ouvrier d’art et à un professeur ? […] Cette formule est passée en proverbe parce qu’elle était, qu’elle est infiniment juste.

1685. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

D’ailleurs Joseph n’était guère instruit ni capable d’idées justes. […] Jésus-Christ apparaîtra en grande pompe avec ses saints et ses anges, et rappellera à la vie tous les justes qui ont reçu l’Évangile depuis sa Passion. Ces justes, au lieu de monter au ciel, demeureront sur la terre dont les climats seront changés et qui deviendra un vaste jardin. […] Ils s’adressèrent à Van-Buren, président des États-Unis, qui leur répondit : « Votre cause est juste ; mais je ne puis rien faire pour vous. […] Il est architecte, négociateur, agriculteur, industriel, militaire, juste autant et aussi peu qu’il faut l’être pour la pratique.

1686. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Aucun ouvrage ne donne une idée plus juste et plus vive de la situation de la république. […] Il ne pouvait supporter aucune ombre de liberté ; et son esprit amer et juste était dégoûté de la servitude. […] Philostrate annonce cependant qu’il a travaillé sur des mémoires authentiques, et pour satisfaire la juste curiosité de l’impératrice Julie. […] Les égarements où fut entraîné Milton rendent ce regret plus juste et plus amer. […] « La tourbe de nos poètes modernes, dit-il, demande l’ostracisme de Pope, parce qu’ils sont, comme l’Athénien, fatigués de l’entendre nommer le juste.

1687. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Nous allons même jusqu’à trouver de la grandeur dans ce que la vengeance fait entreprendre, parce que, d’un côté, le préjugé attachant l’honneur à ne pas souffrir d’outrages, et de l’autre, la raison faisant préférer l’honneur à la vie, nous jugeons qu’il est d’une âme forte d’écouter, au péril de ses jours, un juste ressentiment. […] Dans un temps plus heureux, ma juste impatience Vous ferait repentir de votre défiance : Mais Néron vous menace. […] Non ; je ne puis : cédons au sang, à l’amitié, Et ne rougissons plus d’une juste pitié. […] La crainte même et la pitié qu’il en ressent, lui deviennent chères ; car au plaisir physique d’être ému, au plaisir moral et tacitement réfléchi d’éprouver qu’il est juste, sensible et bon, se joint celui de se comparer aux malheureux dont le sort le touche. […] Un avare voit deux chandelles allumées, il en souffle une ; cela est juste.

1688. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Il a raison, puisque, dans cette question du Romantisme, le parti pris est bien peut-être le juste point. […] La belle lumière épandue sur le golfe Saronique dicte à Maurice Barrès de justes préceptes : Que l’hellénisme des Parnassiens lui semble guindé ! […] Ces petites observations sont non seulement justes, mais aussi fort amusantes. […] Il a la science avec la passion du beau, la fougue avec la juste mesure. […] C’était une jolie peinture, et je la retrouverais volontiers dans ma mémoire, sans le Diable qui, juste à cette époque, commença à turlupiner mes nerfs.

1689. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Ceci n’a rien ni de rationnel, ni de juste, ni de conforme à aucune vérité. […] La partialité des protestants a une autre cause, et fort juste : c’est que les Jésuites ont préservé le monde latin du fléau de la Réforme. […] Il n’est pas juste de faire honneur aux Jésuites d’une initiative qui appartient au christianisme lui-même. […] Il est vrai que cette distinction, si elle est mauvaise verbalement, est juste moralement. […] (La théorie anarchiste emporte à peu près les mêmes conséquences : en l’absence de toutes lois, l’ascendant des hommes supérieurs serait la seule loi et leur juste despotisme incontesté).

1690. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Cette dernière remarque est très juste. […] Que veut-il dire au juste ? […] Est-il juste de rétablir l’enfer, un enfer terrestre, même pour les assassins ? […] Si l’on ne s’estimait qu’à sa juste valeur, or ne s’estimerait pas assez. […] Idée dont il serait plus juste de faire honneur à Etienne Geoffroy Saint-Hilaire.

1691. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Il rend injuste envers les grands hommes de son propre siècle, et rapetisse Molière pour agrandir Shakespeare ; la vérité est la juste mesure. […] Cette observation est si juste, que Molière nous a montré, dans l’Ariste de l’École des maris, un personnage beaucoup plus âgé, et cependant aimé de Léonor, qui lui dit, dans une effusion de tendresse: Si vous voulez satisfaire mes vœux, Un saint nœud dès demain nous unira tous deux. […] Ceux qui ont dit que les vers de Molière étaient inférieurs à sa prose ne se sont pas montrés justes appréciateurs de son génie. […] Et, loin d’accuser Molière et Le Sage d’avoir rien exagéré, il faut les louer d’être restés dans de si justes bornes.

1692. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

La comparaison est assez juste. […] Vendredi 24 juillet La perfection de l’art, c’est le dosage dans une proportion juste du réel et de l’imaginé. […] Justement indigné, il déclare qu’il ne ménagera rien, qu’il ira jusqu’au bout, qu’il proclamera que Goblet est un sot… Jeudi 29 octobre Ce soir à dîner chez Daudet, qui a réuni Porel et Céard, pour assurer la représentation de Renée Mauperin à l’Odéon, Porel dit des choses très justes, et qui paraissent vraiment originales dans la bouche d’un directeur de théâtre. […] L’une d’elles lui avait dit : « Oui, les sentiments de Goncourt sont bien des aspirations de femmes, mais pas assez maintenues dans le vague des choses féminines… ce sont des aspirations de femmes masculinisées par l’auteur. » Voilà peut-être le blâme le plus délicatement juste du livre, et ce n’est point, comme on le voit, un critique qui l’a trouvé.

1693. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

A une « coda » qui tombe gracieusement, finit d’une façon claire, à un point d’orgue juste et harmonique, on bâille. […] Que cette interprétation soit juste ou non, le fait lui-même est établi par le « double sens contraire des racines primitives », trouvé par K. […] Les morceaux de gazon, les fleurs et les fruits, rendus avec une exactitude de botaniste ; les rochers, les terrains et les formations montagneuses géologiquement justes ; les dessins bien nets de tapis et de tapisseries que nous retrouvons dans les tableaux modernes, — c’est à Ruskin et aux préraphaélites qu’on les doit. […] Le graphomane Charles Morice, du style détraqué et biscornu duquel cette citation donne une juste idée, admet que Mallarmé créera peut-être pourtant encore son « œuvre d’art inouïe ». […] Si cette supposition est juste, alors les vers cités, naturellement, ne caractériseraient pas l’état mental de M. 

1694. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Chantez, ma muse, cette admirable France, héroïque, spirituelle, bonne et affectueuse, économe et libérale, un peu coquette et essentiellement aimante, un peu narquoise, mais toujours juste et impartiale, grande maîtresse du progrès indéfini qui entraîne dans son tourbillon jusqu’aux Cosaques et aux Hurons ; chantez cette mère, vous sa fille adoptive106, qui la comprenez si bien ; et permettez-moi de vous appeler ma muse, puisque mon prosaïque lot ne me donne aucun droit de vous appeler ma sœur ; et soyez sûre qu’en vous admirant, je vous aime. » Et maintenant on comprendra que quand Mme Valmore disparut, M.

1695. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la révolution française — I. La Convention après le 9 thermidor. »

Rien n’était plus juste : des victimes aussi illustres, quoiqu’elles eussent compromis leur pays, méritaient des hommages ; mais il suffisait de jeter des fleurs sur leur tombe ; il n’y fallait pas du sang.

1696. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

Racine lui-même fait à la rime, à l’hémistiche, au nombre des syllabes, des sacrifices de style ; et s’il est vrai que l’expression juste, celle qui rend jusqu’à la plus délicate nuance, jusqu’à la trace la plus fugitive de la liaison de nos idées ; s’il est vrai que cette expression soit unique dans la langue, qu’elle n’ait point d’équivalent, que jusqu’au choix des transitions grammaticales, des articles entre les mots, tout puisse servir à éclaircir une idée, à réveiller un souvenir, à écarter un rapprochement inutile, à transmettre un mouvement comme il est éprouvé, à perfectionner enfin ce talent sublime qui fait communiquer la vie avec la vie, et révèle à l’âme solitaire les secrets d’un autre cœur et les impressions intimes d’un autre être ; s’il est vrai qu’une grande délicatesse de style ne permettrait pas, dans les périodes éloquentes, le plus léger changement sans en être blessé, s’il n’est qu’une manière d’écrire le mieux possible, se peut-il qu’avec les règles des vers, cette manière unique puisse toujours se rencontrer ?

1697. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Richepin, Jean (1849-1926) »

Juste au moment où Maurice Bouchor fait sa prière à tous les dieux, voilà que l’homme aux yeux d’or et à la peau cuivrée, qui a si savamment rugi les Blasphèmes, s’attendrit à son tour, et qu’il se penche avec respect sur de bonnes âmes, aryennes jusqu’à la plus scrupuleuse vertu… Je vais maintenant guetter le Courrier français.

1698. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Aussi bien quel est le triomphe qui sait féliciter le vainqueur à l’endroit juste ?

1699. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Nous traverserons encore bien des alternatives d’anarchie et de despotisme avant de trouver le repos en ce juste milieu.

1700. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Je remarque ces circonstances pour que le lecteur ait une idée juste de l’état de la maison de Rambouillet depuis plusieurs années, Lorsque Molière mit ses Précieuses au théâtre de la capitale.

1701. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre II. Filles à soldats »

Au hasard, sans essayer d’établir une juste hiérarchie ou une classification naturelle, je parquerai dans telle ou telle partie du troupeau mes porcs, mes truies et mes ânes.

1702. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 272-292

Il est bien plus naturel & plus juste de regarder la mesure & la rime comme des ornemens de convention, agréables, il est vrai, mais point essentiels.

1703. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

Pour que le jugement, porté contre Rousseau, soit juste, ne suffit-il pas qu’accusateur de Saurin, il n’ait pu prouver son accusation.

1704. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 32, que malgré les critiques la réputation des poëtes que nous admirons ira toujours en s’augmentant » pp. 432-452

Je répons que les remarques les plus subtiles des plus grands métaphysiciens ne feront pas décheoir nos poëtes d’un dégré de leur réputation, parce que ces remarques, quand bien même elles seroient justes, ne dépoüilleront pas nos poësies des agrémens et des charmes dont elles tiennent le droit de plaire à tous les lecteurs.

1705. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VIII »

C’est juste ; nous aurions dû compléter nos extraits et faire bonne mesure.

1706. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

Seulement, nous l’avouons, nous, avec franchise, la femme de cette politique, de cette histoire et de toute cette littérature, quoiqu’elle soit protégée et même éclairée par la merveilleuse distinction de son être, par la formidable finesse de femme qui n’est jamais dupe des grosses choses du temps ; et quoiqu’elle sache très bien plonger toujours sa longue épingle au point juste où il faut la plonger, la femme nous plaît moins alors en ces sujets, et nous paraît beaucoup moins elle !

1707. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Mathilde de Toscane »

C’est d’être une histoire de Grégoire VII bien avant d’être une histoire de la comtesse Mathilde, qui, morte, disparaît ici dans la dévorante personnalité de Grégoire, comme elle y disparut vivante, heureuse d’ailleurs d’y disparaître, et comme c’était juste, car Grégoire, c’était l’Église, et Mathilde, ce n’était que l’Italie : l’Église éternelle et l’Italie d’un moment !

1708. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Chamfort »

C’est là que Chamfort a souvent visé sans toucher ; esprit forcené plutôt que juste.

1709. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Paix et la Trêve de Dieu »

Ce n’est pas uniquement parce qu’il aime et respecte l’Église qu’il la range toujours du côté des petits, mais c’est aussi, et peut-être bien plus, parce qu’il n’aime pas ces féodaux et ces nobles, envers lesquels pourtant la démocratie qui s’est élevée jusqu’à l’honneur d’écrire est tenue d’être juste aujourd’hui.

1710. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire de la Révolution »

Il raisonne donc faux, l’auteur des Soixante ans, mais il sent juste.

1711. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme au XVIIIe siècle » pp. 309-323

L’idée était juste et lumineuse ; elle avait passé sous les plumes de ces historiens comme un éclair perçant et pénétrant dans l’Histoire.

1712. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

Sainte-Beuve, je pourrais bien ajouter, pour être juste, aux deux anecdotes qu’il en extrait à si grand’peine, une troisième que j’aime, parce qu’elle peint bien cette fière aristocratie française, telle qu’elle était avant qu’elle se fût enversaillée, comme disait le vieux Mirabeau, et qu’on lui eût mis autour du cou le collier de chien de l’étiquette : « En 1674, à la bataille de Senef, dit le duc, tous les officiers des chevau-légers ayant été tués ou mis hors de combat, M. le Prince (le grand Condé) vint à eux et leur dit : “Vous êtes autant d’officiers et vous n’avez besoin d’aucun, mais je vais charger à votre tête” Il sortit un chevau-léger du rang, qui lui dit : “Monseigneur, vous pouvez n’être pas en peine de nous.

1713. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Charles d’Héricault » pp. 291-304

L’historien de La Révolution de Thermidor a taillé son livre dans la mesure juste qu’il devait avoir.

1714. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Ces quatre biographies, qui ne peuvent pas être justes, avec les opinions de l’auteur, ne manquent ni d’intérêt ni même de piquant, non dans le fond des choses et des jugements, qui sont, excepté sur l’un d’eux (Béranger), de la plus profonde pauvreté, mais dans la manière dont elles sont touchées.

1715. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexis de Tocqueville »

L’auteur de la Démocratie en Amérique et de l’Ancien Régime et la Révolution, quand on le prendra en dehors des admirations séniles ou juvéniles qu’il a inspirées et qu’on le réduira à ses proportions justes et vraies, est un écrivain de facultés moyennes et cultivées, dont il est très facile de coter la valeur.

1716. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hoffmann »

Quoique la personnalité de Champfleury pointe partout à travers ces documents, c’est surtout dans l’introduction aux œuvres d’Hoffmann qu’elle se dévoile par des opinions plus… gaies que justes.

1717. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Or, ceci est juste.

1718. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Mais elle méprise Reid et la philosophie du sens commun, avec juste raison, je le crois, et même j’en suis sûr, mais, c’est pour poser la nécessité d’une science supérieure à tout, et voilà qui tente singulièrement l’orgueil des petits Nabuchodonosors de la cuistrerie.

1719. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVIII. M. Flourens »

Sur la création, il est pour Moïse, et sur l’unité de la race dans le genre humain ; il croit aux causes finales, mais, comme il le dit, avec un sens délié et profond, il ne conclut pas « le dessein suivi, des causes finales, mais les causes finales du dessein suivi. » Il n’est guère possible de dire plus juste et de penser plus fin.

1720. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

Le juste, le vrai, le bon, voilà la santé du corps !

1721. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

Malheureusement, étreint dans cet étau d’un seul chapitre, nous ne pouvons donner comme il faudrait une juste idée de cette merveilleuse expression que Dieu ne cessa jamais de mettre sur les lèvres de son serviteur.

1722. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Avec un regard très fin et très juste de critique qu’on ne s’attendait pas à trouver embusqué dans le fourré d’une érudition si profonde, Floquet a très bien vu l’influence de la vie intime et cachée sur le génie de Bossuet et sur son âme.

1723. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

Y a-t-il, pour la tête humaine comme pour certains fruits, un coup de soleil après lequel elle a, comme les fruits, son point juste de saveur, de parfum et de maturité ?

1724. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

— que ces Quatre grands chrétiens français, recueillis sur des terrains différents, jouant, ou plutôt ne jouant pas aux quatre coins, mais les faisant dans le livre de Guizot, l’homme, comme Thiers, son ancien collègue, de la balançoire éternelle, du juste milieu, de l’équilibre ; n’ayant pas (tous les deux !)

1725. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gustave Rousselot  »

C’est un incorrect, — comme Alfred de Musset, qui avait aussi des rayures dans son marbre, et à qui la Critique, avec juste raison, l’a tant reproché.

1726. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Jules de Gères »

si on admire, avec juste raison, les esprits d’une puissance dramatique assez grande pour s’incarner dans une autre peau que la leur et devenir, à leur choix, Othello ou Macbeth, le père Goriot ou Vautrin, que ne doit-on pas penser de ceux qui, laissant là la personnalité humaine, s’incarnent dans des êtres étrangers à l’humanité, comme un hêtre ou comme un centaure ?

1727. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « José-Maria de Heredia »

Ici l’impression et la couleur sont si justes que l’écrivain n’a pas besoin de peser sur son récit.

1728. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme Desbordes-Valmore. Poésies inédites. »

Quand on relit le volume de 1820, inouï de niaiserie et de platitude, mais où ça et là, pourtant, on rencontre un accent juste dans l’ardeur ou la profondeur de l’amour, on se demande comment le bruit put venir à ce nom de Valmore, si ce nom qui pouvait faire rêver « comme les orangers de Grenade » n’avait pas encapricé cette faiseuse de musique, la Gloire !

1729. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Soulary. Sonnets humouristiques. »

Il l’a dit, du reste, en vers charmants : Je n’entrerai pas là, dit la folle en riant, Je vais faire éclater cette robe trop juste !

1730. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

Tel que l’on croit complet et maître en toute chose Ne dit pas les savoirs qu’à tort on lui suppose, Et qu’il est tel grand but qu’en vain il entreprit, — Tout homme a vu le mur qui borne son esprit » Enfin, — car il faut se borner, — dans une pièce intitulée : Jésus au mont des Oliviers, où l’âme du chrétien, rouverte un moment, se referme tout à coup, redevenue rigide, je trouve ces vers d’une stoïcité presque impie, qui vont assez avant dans l’inspiration du poète pour qu’on en comprenne la profondeur et pour que rien ne soit citable après : ……………………………………………… Le juste opposera le dédain à l’absence Et ne répondra plus que par un froid silence Au silence éternel de la Divinité.

1731. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

Qui pourrait exactement indiquer cette limite d’un doigt juste ?

1732. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

… On le voit, par cette analyse très-rapide, cette chaîne d’événements est presque vulgaire, et l’on peut dire que tout en est arrangé comme au théâtre, dans l’intérêt du dénoûment ; mais voici ce que la critique, pour être juste, est tenue d’ajouter : Tout cela n’est point taillé en grande et vraie nature, en plein drap de nature humaine.

1733. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

Qui pourrait exactement indiquer cette limite d’un doigt juste ?

1734. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Qu’on soit tenté par ce qui est la grande tentation des romanciers de ce temps, la nécessité de faire entrer l’élément physiologique dans le roman, et qu’on succombe parce qu’on l’y a mis à doses trop larges et mal gouvernées, c’est un malheur, sans doute, quant au résultat ; une autre fois, on trouvera peut-être le point juste qui fera le succès.

1735. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Par exemple : « L’étang était couvert de végétations épaisses qui jouaient le tapis de billard… Le jour n’était ni clair ni sombre, mais d’un gris déterminé rappelant la teinte générale de l’uniforme de soldats de garnison. » Et ainsi toujours, pendant les dix-neuf chants de ce poëme accablant d’idées communes, de sentiments communs, de situations communes, et qui prouverait, si Gogol peignait ressemblant et juste, que la Russie est toujours un colosse, — mais le colosse du Béotisme et de la Vulgarité !

1736. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Ernest Feydeau »

Madame Sand, qui faisait un livre, a traité ce sujet en se plaçant en plein centre d’âmes et de drame tète à tête, et, quoique sa main de femme ait un peu tremblé sur le scalpel et ne l’ait pas enfoncé aussi avant qu’il le fallait, elle en a mis pourtant la pointe à la place juste, tandis que Feydeau, venu après elle et faisant un feuilleton, a enroulé autour du Leone Leoni de madame Sand, dissous et délayé dans une boue plus liquide et plus infecte que la boue qui avait servi la première fois à la confection de ce type, un tas d’événements en arabesques qui sont des prétextes à feuilleton, mais qui ne font rien, absolument rien au sujet.

1737. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Ses idées ont rarement de la hauteur, mais elles sont toujours justes, et quelquefois ont cette finesse qui réveille l’esprit, et l’exerce sans le fatiguer.

1738. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

C’est la note juste ; et qu’on l’étudie dans les comédies de sa jeunesse : Mélite, La Veuve, La Galerie du Palais, ou dans les chefs-d’œuvre de sa maturité, la grande préoccupation de Corneille a été de gagner le suffrage des précieuses. […] Si ce vers de Scudéri n’était quelque peu ridicule, ce serait le moment et le lieu d’en faire une juste application. […] Nous étonnerons-nous qu’en de semblables conditions les « gens de lettres » l’aient admiré, comme les autres ; et, comme les autres aussi, qu’ils se soient rangés tous ensemble à l’obéissance, ou encore, si l’on préférait une expression plus noble, et plus juste peut-être, — qu’ils aient tous gravité, comme vers un centre naturel et inévitable d’attraction, vers ce soleil levant. […] — Boileau a été plus juste. — Les Lettres amoureuses de Voiture pèchent évidemment par trop d’esprit ; — mais, dans ses Lettres diverses, il y en a de très jolies [Cf. nos 123, 109, 101, 63, 90 de l’édition Ubicini] ; — et quelques-unes de vraiment émues. […] [Cf. les Sermons sur la Mort du pécheur et la Mort du juste ou sur l’Enfant prodigue.] — Comparaison à ce propos des procédés de Massillon et des moyens de Bourdaloue. — De l’importance des détails dans les sermons de Massillon. — Affectation de préciosité.

1739. (1922) Gustave Flaubert

« Je crois que je vais arriver au ton juste. […] L’idée qu’il donne de Carthage est juste. […] C’est un livre (le sien), très naïf et qui donne une idée juste des hommes de notre génération devenus de vrais fossiles pour les jeunes gens d’aujourd’hui. […] C’est juste, mais la génération littéraire ne se fait pas comme celle des enfants. […] Pour mieux trouver la note juste, il avait un perroquet empaillé sur sa table.

1740. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Veut-on un moment se faire une juste idée de la force des regles et de celle de l’usage ? […] Je concluds de tout cela qu’on ne loüe, qu’on ne critique juste la versification d’une piece, que par le mérite ou le défaut de convenance. […] Premierement, en ne répondant pas juste, à moins qu’il n’y eût une raison prise de la situation et du caractere, pour éluder le discours qu’on lui adresse, ce qui seroit alors une justesse véritable, et même plus délicate que la justesse prise dans un sens plus étroit. […] Le dialogue ne me paroît pas juste, en ce que Clitemnestre ne répond pas ce qu’elle doit répondre. […] Ainsi le dialogue n’est juste que superficiellement, et en ce qu’il roule sur la même matiere : mais il est faux au fonds et dans l’ordre des sentimens, parce que les discours d’un des personnages ne font pas sur l’autre l’impression qu’ils y doivent faire.

1741. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

On ne sait jamais au juste ce qu’elle veut dire, et les significations de son langage sont aussi multiples que les rêveries qu’il fait naître. […] Ils ne rencontrent jamais leurs semblables qu’en passant, et tout juste le temps nécessaire pour recevoir la volée de coups de bâton obligée à laquelle est condamné don Quichotte en punition de son amour déréglé pour la justice. […] Les arrêts de Dieu, avait-il dit, sont souverainement justes, souverainement bons, et la loi suprême de l’homme, c’est de les attendre en silence et de les accepter religieusement. […] Nous nous vantons beaucoup de notre culture morale raffinée ; raffinée n’est pas le mot juste, c’est quintessenciée qu’il faudrait dire. […] Pisan, un artiste hors ligne dans ce genre si ingrat et si difficile de la gravure sur bois, et qu’il n’est que juste d’associer au succès du dessinateur.

1742. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Ce n’est pas, en effet, la moindre raison de la juste popularité de Lamennais qu’au contraire de la plupart des hommes, son cœur, bien loin de s’endurcir et de se rétrécir, se soit élargi plutôt et comme attendri par le progrès de l’âge. […] Quiconque écrit prend un peu charge d’âmes ; et les idées qu’un romancier croit justes, il a, je pense, autant qu’un député, le droit de les répandre, et aussi de faire servir à leur diffusion les moyens de son art. […] C’est leur juste récompense de n’avoir exprimé que ce qu’ils ont cru pouvoir réaliser, selon le beau mot du philosophe, sous « l’aspect de l’éternité ». […] De tout ce qu’elle a de commun avec les autres femmes, le romancier n’a retenu, pour le faire entrer dans la composition de sa figure, que tout juste ce qu’il en fallait. […] Renan les réduire à leur juste valeur ?

1743. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Leurs talens leur furent d’une grande ressource auprès de l’empereur Camhi ; ce prince célèbre, un des plus grands princes, des plus justes, des plus humains & des plus philosophes dont l’histoire fasse mention. […] Ils écrivirent à leurs missionnaires de Pekin de sçavoir au juste dans quel esprit on y révéroit Confucius ; quelle idée on attachoit aux mots Chinois qui scandalisoient en Europe, & de les éclaircir sur ce point. […] La manière dont il en parle ne peut être plus juste ni plus impartiale. […] Les jésuites lui reprochoient de ne pas entendre le Latin, & de tomber même quelquefois dans des fautes grossières contre la langue, en quoi leur critique étoit assez juste. […] Porée : Il devoit naître sous Auguste, Dans l’âge heureux des beaux esprits, Si le ciel, par un choix plus juste, Ne l’eût fait naître sous Louis.

1744. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Comment, parmi ces notes, les unes sont-elles justes, les autres fausses ? […] Quant à moi, je ne sais pas au juste à quel degré d’exaltation, d’ivresse ou d’héroïsme, ne me porterait pas la musique, si je ne m’en sevrais par sobriété de sensation. […] — Ces deux instruments, répondit l’enfant, ne pourraient pas s’accorder ensemble ; le violon du serrurier est juste d’un demi-ton plus bas que le tien. » Le père, étonné du discernement exquis de l’oreille d’un enfant, voulut s’assurer si la différence d’un demi-ton entre son violon et celui du serrurier était réelle ; il descendit, l’archet à la main, chez son voisin, et, s’étant assuré par lui-même que la dissonance était précisément du demi-ton perçu par son fils, il embrassa l’enfant les larmes aux yeux, appela sa femme et sa fille, et bénit Dieu en famille en s’extasiant sur l’organisation précoce et miraculeuse du grand homme futur dont la Providence avait doté leur humble foyer.

1745. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Vous dites : la liberté ; il serait plus juste peut-être de dire : la délivrance, et non la délivrance des étrangers, mais d’un étranger. […] « Faust, dans ce cinquième acte, dit Goethe, doit selon mes idées avoir juste cent ans, et je ne sais pas s’il ne serait pas bon de le dire quelque part expressément. » Nous parlâmes de la conclusion, et Goethe attira mon attention sur ce passage : Il est sauvé, le noble membre Du monde des méchants esprits ; Celui qui a toujours lutté et travaillé, Celui-là, nous pouvons le sauver ; L’amour suprême, du haut du ciel, A pensé à lui ; Le chœur bienheureux va à sa rencontre Et lui fait un cordial accueil. […] Épicure dit quelque part : “Ceci est juste, car le peuple le trouve mauvais.” — Depuis la réforme, les mystères ont été livrés à la discussion populaire, on les a ainsi exposés à toutes les subtilités captieuses de l’étroitesse de jugement, et on ne peut pas encore dire quand finiront les tristes égarements d’esprit qui en sont résultés. » XIX Les résultats de la philosophie, de la politique, de la religion : voilà ce que l’on doit donner au peuple et ce qui lui sera utile ; mais il ne faut pas vouloir des hommes du peuple faire des philosophes, des prêtres ou des politiques.

1746. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Je cherchai donc, à mon tour, à l’aide des données communes, et sans inventer ce que je ne pouvais découvrir, à retracer en quelques pages cette existence dont une ambition constamment déçue fait l’unité, à exposer et à étudier ces œuvres dont l’épanchement d’un cœur blessé fait la principale grandeur, et je soumets maintenant cet essai, avec une juste défiance, à ce petit nombre de personnes qui me récompensent amplement de mon travail en voulant bien me juger. […] Et nous ne connaissons qu’une partie de ses épreuves ; nous comptons aisément ce que le neveu négligé de Godwin, ce que l’ami mal récompensé d’Oxford, ce que le courtisan trahi du prince de Galles, a enduré d’humiliations et nourri de ressentiments ; mais nous ne saurons jamais ce qu’a souffert par un juste retour le meurtrier de Vanessa, l’indigne époux de Stella, ni quels fantômes l’ont hanté pendant dix années de folie. […] Une vue complète de la nature, de ses lois, de son tranquille et immense empire, réduit à leur juste valeur les agitations du monde, sans les avilir, par le seul rapprochement de leur mobile petitesse et de l’ensemble des choses.

1747. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

Cronos, à son tour, après la victoire de Zeus, avait été déporté dans la vice-royauté lointaine des Iles bienheureuses, séjour indéterminé des âmes justes. […] Ce dieu même obscurément annoncé, qui devait le racheter par sa descente aux Enfers, figurait, sous une autre forme, Jésus descendant aux Limbes pour en tirer les Justes de l’ancienne Loi. […] Combien plus l’apaisement était nécessaire dans une tragédie d’une hardiesse si terrible, où le Dieu suprême semblait ébranlé par les imprécations d’un juste opprimé !

1748. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Ce voleur de l’auteur d’Othello, qui lui avait pris son magnifique Jaloux pour le mettre en Turc et en faire Orosmane, afin qu’on ne le reconnût pas, ne permettait guère qu’on vantât de son temps celui qu’il avait osé nommer Gilles ; et de la bande de philosophes qui obéissaient à son grelot et tenaient l’opinion de la France esclave, Diderot seul, le débraillé de naturel et de déclamation, avait eu le front d’écrire cette phrase superbe et cynique : « Moi, je ne comparerai Shakespeare ni à l’Apollon du Belvédère, ni au Gladiateur, ni à l’Antinoüs, ni à l’Hercule de Glycon, mais au saint Christophe de Notre-Dame, colosse informe, grossièrement sculpté, mais dans les jambes duquel nous passerions tous sans que notre front touchât à ses parties honteuses. » Mais, comme on le voit, cette phrase ambitieuse et fausse, quoiqu’elle voulût être plus juste que tout ce qu’on disait alors, prouvait que Diderot lui-même ne connaissait pas tout Shakespeare dont le colossal disparaît précisément quand on l’a tout entier sous le regard, dans la perfection de son harmonie. […] sur l’irrémédiable malheur pour la postérité, qui s’en tord, avec juste cause, de désespoir, de ne pas savoir ce qui s’est passé le jour de la première représentation du Roi Lear. […] François Hugo qui dans ses précédentes préfaces, a joué aux petits ronds dans le puits de Shakespeare, a fini ce jeu et met la main sur une idée juste.

1749. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre IV. De la pluralité des temps »

L’incurvation de la simultanéité en succession est d’ailleurs juste ce qu’il faut pour que les lois physiques, en particulier celles de l’électromagnétisme, soient les mêmes pour l’observateur intérieur au système, situé en quelque sorte dans l’absolu, et pour l’observateur du dehors, dont la relation au système peut varier indéfiniment. […] Si un observateur placé dans le train en M′ n’était pas entraîné avec cette vitesse, il resterait constamment en M, et les rayons lumineux issus des points A et B l’atteindraient simultanément, c’est-à-dire que ces rayons se croiseraient juste sur lui. […] Mon critique trouvera mes conclusions justes, quoique, de son point de vue qui est maintenant seul légitime, mes prémisses soient devenues fausses.

1750. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Le plus joli, c’est peut-être ceci : en réponse à mon article de 1901, d’où j’ai tiré les lignes qui précèdent, Ferdinand Martini écrivait, non sans mélancolie : « L’explication de ma seconde comédie est parfaitement juste ; mais personne n’a vu mon intention. […] Benedetto Croce, pourtant si bienveillant pour son ami, y a touché, en passant, d’une façon très juste (La Critica, vol.  […] Il serait plus juste de dire : le Beau est la splendeur du Bien.

1751. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

En effet elle représente juste, et sans un sou de trop : en premier lieu, l’intérêt du capital primitif qu’il a mis dans son exploitation, bestiaux, meubles, outils, instruments aratoires ; en second lieu, l’entretien annuel de ce même capital, qui dépérit par la durée et par l’usage ; en troisième lieu, les avances qu’il a faites dans l’année courante, semences, salaires des ouvriers, nourriture des animaux et des hommes ; en dernier lieu, la compensation qui lui est due pour ses risques et ses pertes. […] Sire, nous vous demandons que cela soit ainsi, parce que cela est juste… Si nous osions, nous entreprendrions de planter quelques vignes sur les coteaux ; mais nous sommes si tourmentés par les commis aux aides, que nous penserions plutôt à arracher celles qui sont plantées ; tout le vin que nous ferions serait pour eux, et il ne nous resterait que la peine.

1752. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

» Le cœur se serre à ces justes et tendres reproches du paysage et de la maison qu’on va quitter, à ses plus beaux jours d’été, et l’on se dit avec une certaine hésitation intérieure : Trouverai-je mieux ailleurs ? […] Decaisne était las de mesurer l’infranchissable distance qui sépare la main de l’artiste de la réalisation de sa pensée ; il était dégoûté d’un monde qui a pour les artistes des engouements ou des aversions, et point de jugement juste et impartial.

1753. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

Mes charmants calendriers ne s’y trompent pas, ils annoncent au juste les beaux jours, le soleil, la verdure. […] Je reçois un charmant billet de M. de Sainte-Beuve, cet homme exquis dont je reçois l’écriture vivante. » M. de Sainte-Beuve avait rendu à son frère Maurice une justice qui eût été bien plus juste si elle s’était adressée à la sœur !

1754. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

En effet, une chose qui, par sa nature, n’offense ni un individu ni une nation, n’est point une injure ; jamais une vague déclamation contre les vices d’un siècle ou d’un peuple n’a offensé réellement une nation ou une époque ; et jamais ces déclamations, quelque violentes, quelque injustes qu’on les suppose, n’ont été sérieusement reprochées à leurs auteurs ; l’opinion, juste en ce point, a senti que ce qui frappait dans le vague était innocent, par là même que cela ne nuisait à personne. […] Il laissait le poil du chevreau en dehors sur la peau, afin qu’elle gardât mieux le son et que la pluie glissât dessus, comme sur la petite bête, sans l’amollir, et de plus c’était lui qui en jouait le mieux et qui essayait l’instrument en le corrigeant jusqu’à ce que l’air sortît aussi juste que la voix sort des ténèbres.

1755. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Taine seraient donc justes, si elles restaient inanimées. […] L’histoire de la philosophie antique est menée comme un drame ; et quelle plus juste et plus expressive image que celle-ci (après la chanson des Epicuriens) : … Soudain, quand la joyeuse et misérable troupe Ne se soutenait plus pour se passer la coupe, Une perle y tomba, plus rouge que le vin… Ils levèrent les yeux : cette sanglante larme D’un flanc ouvert coulait, et, par un tendre charme, Allait rouvrir le cœur au sentiment divin.

1756. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Maintenant qu’est-ce au juste que le wagnérisme ? […] Cet article cite quelques wagnériens d’importance qu’il est juste de présenter.

1757. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Et maintenant, pour en venir au doute qui me tourmente sur la moralité de son châtiment, si juste d’ailleurs, je me demande si la main d’où il part avait le droit de l’appliquer. […] Non, mon cher Olivier, tout cela n’est pas juste, et ce n’est pas quand on a participé aux faiblesses des gens qu’on doit s’en faire une arme contre eux.

1758. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

Il dit à peu près cela : « Il était trop bon et il n’avait pas le sens critique de l’humanité, ce qui le rendait parfois un mauvais juge des hommes, avec lesquels il était en rapport, mais quelquefois aussi, il voyait parfaitement juste… » Spuller s’arrête quelque temps et reprend : « Voyez-vous, il avait des conceptions, des conceptions comme celle-ci : un jour, parlant du couronnement de l’Empereur de Russie, il m’a dit, qu’en cette occasion, il fallait que la France affirmât à la face de l’Europe, fièrement, la République, et qu’il voulait envoyer à ce couronnement, comme représentant du pays, devinez qui ? […] On vient de lui enlever un kyste dans le ventre, et il disait à Daudet, qui est allé le voir ces jours-ci : « Pendant l’opération, je pensais à nos dîners, et je cherchais les mots, avec lesquels je pourrais vous donner l’impression juste de l’acier, entamant ma peau et entrant dans ma chair… ainsi qu’un couteau qui couperait une banane. » Jeudi 26 avril À la suite d’un cas de folie érotique, raconté par Charcot, Alphonse Daudet de s’écrier : « Ah !

1759. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

C’est assez juste, mais il a négligé d’appuyer son opinion d’exemples solides ; il ne fait allusion ni à l’invasion grecque, ni à l’invasion étrangère ; la déformation, telle qu’il l’a sentie, est tout à fait bénigne et parfois bienfaisante. […] Il reconnaît cependant lui-même que les langues se modifient sans cesse ; mais il ajoute : « Ce n’est pas toujours en bien. » Rien de plus juste, mais comment reconnaîtrons-nous le bien et le mal ?

1760. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

La douleur, le désir de faire passer cette douleur chez les autres, la juste indignation contre les auteurs du désastre dont ils viennent d’être témoins, l’envie d’exciter à les en punir, et les divers sentiments qui peuvent naître des différentes raisons de leur attachement à ceux dont ils déplorent la perte : toutes ces raisons agissent en eux, en même temps, indistinctement, sans qu’ils le sachent eux-mêmes, et les mettent dans une situation à peu près pareille à celle où Longin nous fait remarquer qu’est Sapho, qui, racontant ce qui se passe dans son âme à la vue de l’infidélité de celui qu’elle aime, présente en elle, non une passion unique, mais un concours de passions. […] Les autres peuvent aussi blesser la nature de plusieurs manières : 1º En ne répondant pas juste, sans qu’il y ait une raison, prise de la situation et du caractère, pour éluder les discours qu’on leur adresse ; ce qui serait alors une justesse véritable, et même plus délicate que la justesse prise dans un sens plus étroit ; 2º En ne répondant pas tout ce qu’ils devraient répondre ; 3º En n’interrompant pas où ils devraient interrompre.

1761. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Retiré d’un monde que je dois connaître, je ne vis plus que dans mes souvenirs ; et comme je n’ai dû mes instants de bonheur et de chagrins qu’aux péripéties de la scène française, il n’est pas étonnant que dans mon intérêt, qui est celui de tous les auteurs et des comédiens, je vous adresse paternellement de justes reproches. […] Le reproche n’est pas juste, car il est impossible de faire autrement ; et la nouvelle école n’a pas fait un grand progrès en y substituant le viol, la prostitution, et des boulettes de poison ; d’autant plus qu’elle ne peut elle-même varier ce moyen, et que cette façon d’émouvoir le public peut être beaucoup plus nouvelle, mais à coup sûr est beaucoup plus immorale.

1762. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

C’est ainsi, par exemple  il faut vous rappeler tout au moins quelques-uns de ces contes  c’est ainsi, par exemple, que la Poule aux Œufs d’or, le Trésor et les deux Hommes, les Femmes et le Secret, l’Astrologue, l’Ours et les deux Compagnons, le Vieillard et les trois Jeunes Hommes, le Jardinier et son Seigneur, la Jeune Veuve, la Fille, sont de petites nouvelles presque toujours imitées d’anciens conteurs, mais relevées par une certaine manière de considérer l’humanité avec malice, avec indulgence et avec un certain souci de la rendre, je ne dis pas meilleure, encore une fois, le mot ne conviendrait pas, mais plus sage, plus sensée et même plus juste. […] Et pourtant, si l’on entrait dans le détail et si l’on voyait comme c’est conduit, si l’on examinait la crainte que La Fontaine a de cet enfant, inquiétant, sans qu’on sache pourquoi, et puis l’arc, la vision de l’arc juste placée au milieu de la fable, cet arc dont l’auteur se méfie et qui est placé là pourquoi ?

1763. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

C’est le ton juste de familiarité qu’on pouvait supporter au théâtre dans une tragédie ; je doute même un peu que le public du temps l’eût supporté tout à fait ; mais je n’en fais qu’un compliment, et un très grand compliment, à La Fontaine. […] La chose jusque-là n’avait rien que d’honnête ; Mais malheureusement ce maudit mousqueton Ayant entortillé mes jambes de son long, S’est trouvé sur la selle et juste entre mes fesses.

1764. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

C’est un commencement, cela… C’est un progrès et c’est une idée juste, et, avant de parler du talent de son exécution, nous en tiendrons compte, et grand compte à M.  […] Il n’y avait dans l’auteur de Fanny rien du tout… qu’un écrivain qui cherchait, n’importe où, le sujet d’un livre, et qui, ennuyé et dégoûté (avec juste raison) de cette éternelle tombola littéraire où l’adultère gagnait toujours, s’était dit : « Mais si je renversais la thèse pour faire du neuf… » et qui l’a renversée, qui a tout simplement retourné ce vieux gant sali… Daniel nous apprend aujourd’hui que dans l’auteur de Fanny il n’y avait pas davantage.

1765. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

Contient-elle tout juste ce que celui-ci contient ? […] Oui, vous avez deviné juste en croyant possible la coexistence d’images comme les vôtres, s’étendant chacune sur une « surface » infinie, alors qu’elle est impossible dans l’Espace tronqué où la totalité de votre univers vous paraît tenir à chaque instant.

1766. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

Le voyage en boulet Nous l’avons dit, mais nous ne saurions trop le répéter : le ralentissement des horloges par leur déplacement, dans la théorie de la Relativité, est tout juste aussi réel que le rapetissement des objets par la distance. […] Le Paul qui a des impressions est un Paul qui a vécu dans l’intervalle, et le Paul qui a vécu dans l’intervalle est un Paul qui était à chaque instant interchangeable avec Pierre, qui occupait un temps identique à celui de Pierre et qui a vieilli juste autant que Pierre.

1767. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Alfred de Musset » pp. 364-375

Il ne serait pas juste que le poète si charmant qui vient d’être enlevé disparût sans recevoir, même au milieu de ce qui a été dit et de ce qui se dira de vrai et de senti sur son talent, quelques mots particuliers d’adieu de la part d’un ancien ami, d’un témoin de ses premiers pas.

1768. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Il était d’une grande taille, portant la tête haute, surtout devant l’ennemi ; d’une tenue irréprochable ; doué d’un esprit fin et juste, d’un courage et d’une bravoure incontestables et incontestés ; il aurait figuré dans le nombre de ces nobles et vaillants chevaliers cités dans l’histoire et dans les poèmes épiques, qui ne comptaient leurs ennemis que quand ils avaient mordu la poussière.

1769. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

Les erreurs de cet esprit si juste sont des jugements intéressés, où il a pris sa commodité pour règle… Et comparant cette correspondance de Voltaire avec les lettres de Cicéron, cet autre esprit universel et le grand épistolaire de l’Antiquité, il dira : L’amour de la gloire est l’âme de ces deux recueils, et ce que Voltaire fait dire au Cicéron de sa Rome sauvée : Romains, j’aime la gloire et ne veux pas m’en taire, est aussi vrai du poète que de son héros.

1770. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

J’ai une grande confiance en vos jugements ; elle est, naturellement indulgente, et vous naturellement, un peu austère (comme il est beau, comme il est bon, comme il est nécessaire et même indispensable de l’être à votre âge, ne fût-ce que pour s’accoutumera ne pas se faire bon marché à soi-même de sa propre approbation) ; mais vous êtes tous deux justes, et vous n’allez jamais chercher dans votre humeur les règles qu’il faut prendre dans sa raison.

1771. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger, 1833. Chansons nouvelles et dernières »

Mais, jusqu’à nos jours, l’esprit national, en ce qu’il a de plus vif et de plus essentiellement poétique, n’avait pas fait irruption encore dans la littérature que j’appellerai d’étude et d’art, ou, si l’on veut, cette littérature, sur le point essentiel et le plus saillant, n’était pas descendue à lui ; elle n’avait pas atteint juste à l’endroit le plus sonore ; la disposition chantante, l’humeur chansonnière n’avait jamais été grandement ni délicatement mise en jeu ; on l’avait laissée fredonner au hasard, courir par les goguettes ou sous le balcon du Mazarin, et s’abandonner, satirique ou bachique, à une irrégularité et à une bassesse qui, littérairement, semblaient sans conséquence.

1772. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

» Ce sont en tout endroit des conseils d’union et d’association qui offrent le sens juste du Bonhomme Richard dans un ton élevé de pathétique et de poésie.

1773. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

Toutefois, pour être juste, il reste encore à la critique, après le triomphe incontesté, universel, du génie auquel elle s’est vouée de bonne heure, et dont elle voit s’échapper de ses mains le glorieux monopole, il lui reste une tâche estimable, un souci attentif et religieux : c’est d’embrasser toutes les parties de ce poétique développement, d’en marquer la liaison avec les phases qui précèdent, de remettre dans un vrai jour l’ensemble de l’œuvre progressive, dont les admirateurs plus récents voient trop en saillie les derniers jets.

1774. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

On est dédommagé par un bon nombre de justes et piquantes observations, présentées d’ordinaire sous forme d’ironie ; ainsi ce mot : « Lorsqu’on est heureux, il ne faut pas trop se demander pourquoi.

1775. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

L’Oraison funèbre de Turenne reste très-belle, un des chefs-d’œuvre du genre, mais on se lasse de la savoir par cœur ; on s’ennuie d’entendre dire que Fléchier est juste ; le voisinage de Bossuet, qui grandit chaque jour comme tout ce qui est vraiment grand, lui faisait tort d’ailleurs, et on était en train, si je ne me trompe, de devenir ingrat, ou, qui pis est, indifférent, lorsque, par bonheur, M.

1776. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Après de premières études, qu’il doit presque tout entières à lui-même, Victorin Fabre nous est présenté, vers la fin de 1799 (il avait quatorze ou quinze ans), comme un esprit dont le coup d’œil politique était dès lors aussi juste qu’étendu : « La manière dont s’était opérée la révolution du 18 brumaire, et surtout quelques dispositions captieuses placées dans la Constitution de l’an viii comme pierres d’attente, avaient excité son mécontentement, éveillé ses soupçons. » Voilà un Solon bien précoce qui nous arrive ; en conséquence de ses prévisions, Victorin Fabre, qui avait un moment songé, nous dit-on, à prendre la carrière des armes, s’en détourne et ne songe plus qu’aux lettres et à la philosophie ; nous concevons cette préférence ; qu’on nous permette seulement de croire, sans faire injure à tout ce puritanisme, que cela ne l’eût aucunement compromis de se trouver à Marengo.

1777. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Des soirées littéraires ou les poètes entre eux »

Pour être juste toutefois, n’oublions pas que cette époque fut le règne de ce qu’on appelait poésie légère, et que, depuis le quatrain du marquis de Sainte-Aulaire jusqu’à la Confession de Zulmé, il naquit une multitude de fadaises prodigieusement spirituelles, qui, avec les in-folio de l’Encyclopédie, faisaient l’ordinaire des toilettes et des soupers.

1778. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Appendice sur La Fontaine »

Irons-nous donc, à l’exemple de certains critiques, ranger La Fontaine parmi ces deux ou trois antiquaires de son temps, et mettre le bonhomme tout juste entre Ménage et La Monnoye, lesquels, comme on sait, tournaient si galamment les vers grecs et les offraient aux dames en guise de madrigaux ?

1779. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

Les Vêpres siciliennes, si on les donnait cette année pour la première fois, réussiraient peut-être tout juste autant que la Princesse Auréli.

1780. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Jugez, par l’application de cette règle, de toutes les parties de notre constitution, et voyez si elles sont dans une dépendance directe de la volonté du peuple… Que tout homme qui combat et qui paie exerce son droit de concourir à l’élection des membres de la législature par un égal et juste suffrage ; soumettez-les, à de courts intervalles, à la réélection ou à la réprobation de leurs commettants : que le magistrat exécutif soit choisi pour le même terme et de la même manière par ceux dont il doit être l’agent. » Or, c’est là que nous tendons évidemment : partout l’élection, partout le contrôle !

1781. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Le dernier mois s’était passé aux querelles politiques, à aiguiser ses épées, à négocier des cartels : n’était-il pas juste de varier un peu son humeur ?

1782. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Troplong : De la chute de la République romaine »

Son portrait de Lucain est sévère et juste : il caractérise l’ensemble de ce poëme de la Pharsale avec l’impatience que ces enflures et ces ambitions de pensée donnent à tout esprit net et sain.

1783. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Préface de la seconde édition » pp. 3-24

L’on m’a reproché de n’avoir pas rendu un juste hommage aux anciens.

1784. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Ces longueurs, en effet, lassent quelquefois l’intérêt, mais la lecture des romans anglais attache, par une suite constante d’observations justes et morales, sur les affections sensibles de la vie.

1785. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre premier. Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? » pp. 9-27

Une des choses qui s’opposent le plus à la naissance de ces moments d’illusion, c’est l’admiration, quelque juste qu’elle soit d’ailleurs, pour les beaux vers d’une tragédie.

1786. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre IV. L’écrivain (suite) »

Il exagère juste à point, il s’arrête à temps au bord des déclarations, il atténue l’adulation par un sourire.

1787. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

On y apprivoiserait sans peine nos intelligences, inaccoutumées à s’y diriger : d’autant qu’on aurait là pour les plus jeunes élèves de nos lycées une inépuisable et inestimable matière de lectures faciles, attrayantes, sollicitant de mille côtés l’attention des enfants, et tout juste à leur mesure.

1788. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Car ce sont leurs sentiments, leurs affections, leurs haines, leurs prospérités et plus souvent leurs malheurs, dont les poètes bourgeois font la matière de leurs vers : et ainsi leur œuvre est lyrique, par accident, peu ou prou, juste dans la mesure où leur tempérament est capable d’émotion lyrique.

1789. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Rompant tous ses liens, rejetant la gêne de la loi morale, l’oppression des préjugés et des respects traditionnels, l’individu tend à être le plus longtemps possible : il affirme que sa valeur est en lui, et de lui ; le mérite seul inégalise l’égalité naturelle des hommes ; l’idée de la gloire raffine l’égoïsme instinctif, et fournit un principe d’action suffisamment revêtu de beauté ; par elle, l’individu emploie sa vie à se créer une vie idéale après la mort, plus prochaine et plus humaine en quelque sorte que l’éternité promise au juste chrétien.

1790. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

Ensuite le poète dit la Vie des morts, leur âme éparse dans les arbres, dans les broussailles, dans les sources qui sont leurs yeux, dans les nuages qui sont leur pensée inquiète, dans les astres où flambent leurs anciennes passions, dans la mer, « temple obscur des métamorphoses », dans les parfums, dans le chant nocturne des voix terrestres… Et cependant ce n’est pas tout ce qui reste des morts. « Ce que m’a pris le rêve, mes aspirations vers le juste et le beau, ce que j’ai dit tout bas à la nuit, ce que j’ai vu en fermant les yeux, Ma chair ne saurait plus l’entraîner au tombeau.

1791. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens I) MM. Albert Wolff et Émile Blavet »

Wolff a notamment celui de n’en pas avoir trop : juste ce qu’il faut pour la clientèle du journal, qui est foncièrement bourgeoise et, je crois, plus provinciale que parisienne.

1792. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Il faut être juste.

1793. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

Le devoir de servir ma famille et mes amis contrarie mon devoir d’être juste envers tous.

1794. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « II »

Autant le principe des nations est juste et légitime, autant celui du droit primordial des races est étroit et plein de danger pour le véritable progrès.

1795. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

Observer et maintenir la loi, parce que la loi est juste, et que, bien observée, elle donne le bonheur, voilà tout le judaïsme.

1796. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXI » pp. 338-354

Il est bien juste que je passe ici pour sa mère, moi qui en ai toute la tendresse et qui partage avec vous tous ses maux. » À la même, Anvers, 20 avril 1674 : « Madame, le médecin visita hier le prince.

1797. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Les titres qui nous ont été transmis de ses pièces (les Pleuroniennes, Actéon, Alceste, Antée, les Égyptiens, les Justes, les Conseillers, les Danaïdes et la Prise de Milet) attestent, comme des bornes miliaires, l’étonnant agrandissement du jeune art.

1798. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1852 » pp. 13-28

Ça m’est parfaitement égal… Ce Roqueplan, un homme tout couvert de l’aes alienum, comme dit Salluste… Tenez, il y a un jeune homme, l’auteur d’une Sapho, qui a touché juste, le mâtin !

1799. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre III »

Il y a un oiseau que Buffon appelle courlis de terre ou grand pluvier ; Belon, pour le mieux caractériser, adopte le terme populaire, jambe enflée, lequel est fort juste, puisque ce pluvier est remarquable par un renflement particulier de la jambe au-dessus du genou.

1800. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé d’Aubignac, avec Ménage, Pierre Corneille, Mademoiselle de Scudéri et Richelet. » pp. 217-236

C’en fut assez pour lui faire croire qu’il n’avoit rien avancé que de juste.

1801. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IV. La folie et les lésions du cerveau »

Et en effet, il n’est pas un seul caractère du rêve qui ne se rencontre dans la folie, et réciproquement : même incohérence dans les idées, mêmes associations fausses, mêmes raisonnements justes sur des principes faux, rapidité extrême des sensations et des idées, exagération des sensations, transformations d’une sensation interne en objet externe, etc.

1802. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

Nisard, et ce grand bon sens qu’il admire à si juste titre ?

1803. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VIII. Des romans. » pp. 244-264

Mais la fiction, l’exposition, le nœud, le dénouement ne sont pas à l’abri d’une juste censure.

1804. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Il lui faut toujours deux cents lignes pour y attabler une idée. » La critique est juste.

1805. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Enfin il y a cette dernière génération, si nombreuse, si brillante, si cultivée par de fortes études, cette génération qui donne à la France actuelle de si justes espérances par un grand développement de facultés, en qui l’éducation religieuse a jeté de si heureux germes par l’effet de la force des mœurs contre les tendances exagérées de l’opinion : cette génération doit être l’objet de nos vives sollicitudes ; car, il faut le dire, en entrant dans le monde elle trouvera d’autres enseignements, elle sera soumise à d’autres directions, elle sentira la société assise sur d’autres bases que celles de l’éducation.

1806. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

Ici, il faut être juste, la patience échapperait s’il ne s’agissait pas de répondre à un homme qui fut si éclairé, et que la religion de l’amitié prend sous sa sauvegarde ; la patience échapperait, car c’est encore l’événement que j’ai retracé, mais mal saisi, mal raconté, mal caractérisé.

1807. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Elle le constate, soit en vertu de la libre déclaration de l’homme et de la femme, soit par l’acte de naissance de leur premier-né. » Ces paroles, malgré ce qu’elles ont d’incorrect, grammaticalement et métaphysiquement, montrent assez bien l’embarras douloureux d’un esprit primitivement assez juste, qui souffre de sa justesse, pour s’être fourvoyé dans les idées décadentes d’un temps qui a passé par le panthéisme de Hégel, et qui s’est retourné vers le naturalisme de Darwin.

1808. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

Elle a, juste, ce degré de médiocrité cultivée qui le constitue et qu’il faut qu’une femme ait pour être littéraire.

1809. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’ancien Régime et la Révolution »

Malheureusement pour la réputation, si vite poussée, de Tocqueville, nous ne sommes plus à cette époque de juste milieu jusque dans la pensée.

1810. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le colonel Ardant du Picq »

Elles sont ennemies nées ; l’une sans cesse menace la juste influence, sinon l’existence de l’autre.

1811. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Joubert » pp. 185-199

Elle n’en avait pris juste que ce qu’il lui en fallait pour s’abriter.

1812. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Il est redoutable, en effet, car il voit juste, et la justesse d’esprit mène à la terrible justice… mais il n’est pas cruel, comme la plupart des moralistes, et même comme ceux-là qui passent aux yeux des hommes pour les plus grands.

1813. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

il faut avouer que sur ce point, comme sur tant d’autres, l’Église avait vu plus juste et plus loin que les sciences écloses hors de son sein.

1814. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

qu’au lieu d’aimer extérieurement, elles concentrent leur affection dans elles-mêmes et se l’adjugent exclusivement, s’habituant, en femmes bien avisées et rigoureusement justes, à ne voir dans l’homme qu’un élément de rentes. » Nous ne savons pas si le portrait est ressemblant, mais élément de rentes est bien joli !

1815. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Il cache son nom comme la tortue, dont il a la lenteur, cache sa tête sous son écaille… Lorsque, pour ne parler que de ceux-là, François Hugo et Émile Montégut traduisirent Shakespeare, ils ne s’en cachèrent point, et ce fut avec une juste fierté qu’ils signèrent la traduction d’une œuvre qui faisait tomber sur leur nom un rayon de sa glorieuse beauté.

1816. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Sainte-Beuve appela Gœthe un Talleyrand littéraire, et il se repent maintenant de cette idée juste.

1817. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

Il y a plus ; dans cette biographie atroce, mais juste, le génie de Voltaire nous apparaît par des côtés imprévus et presque inconnus, et que l’honneur de ce livre impartial, malgré sa cruauté, sera d’avoir éclairés.

1818. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Pour un être surnaturel et de cette splendeur morale divine, il semble qu’il ne suffise plus d’être juste, et que la justice serait l’enthousiasme !

1819. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gobineau » pp. 67-82

Il y a, dans l’Histoire, de terribles personnalités troubles, que le devoir de l’Historien est de clarifier… — Or, — puisqu’il s’agit d’eux dans le cadre du livre de Gobineau, — Alexandre VI, César et Lucrèce Borgia, sont de ces personnalités troubles par elles-mêmes ou troublées, par les autres, et que l’auteur de La Renaissance a replacées dans l’accent juste de leur propre voix.

1820. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Émile de Girardin » pp. 45-61

Au contraire, cela est doux, apprivoisé, vulgaire, pris au chenil des idées communes qui trottent par le chemin et s’arrêtent aux bornes, et, pour continuer notre juste image, assez malpropre de moralité.

1821. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vacquerie » pp. 73-89

Nous sommes juste, et d’ailleurs nous aimons l’imprévu.

1822. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Moraliste mondain, observateur de société, il en savait les petites lois et les grands ridicules, — et, puisqu’il s’agit de ses Lettres écrites de France et sur la France, il porta sur les hommes et les choses de la société de ce pays des jugements presque toujours justes et que l’amabilité et l’engouement dont il fut l’objet à Paris ne firent jamais fléchir.

1823. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Par exemple : « L’étang était couvert de végétations épaisses qui jouaient le tapis de billard… Le jour n’était ni clair ni sombre, mais d’un gris déterminé rappelant la teinte générale de l’uniforme de soldats de garnison. » Et ainsi toujours, pendant les dix-neuf chants de ce poème accablant d’idées communes, de sentiments communs, de situations communes, et qui prouverait, si Gogol peignait ressemblant et juste, que la Russie est toujours un colosse, — mais le colosse du Béotisme et de la Vulgarité !

1824. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

… Sans doute, avec plus de talent, le coup serait mieux asséné ; mais, enfin, — il faut être juste ! 

1825. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Saint-Bonnet, est de placer continuellement la notion de l’être, la notion de la loi, du nécessaire, de l’unité, du juste, du bien en soi, en un mot, du Divin, sous les perceptions innombrables du phénomène, du variable, du relatif, du fini, que lui transmet sans cesse l’Intelligence recueillant le produit des sens, et d’empêcher que nous ne restions de simples animaux.

1826. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXI. Philosophie positive »

Ce sera mérité et plus juste.

1827. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

Il est juste de le reconnaître.

1828. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Il a cédé à un instinct juste.

1829. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Moins encore que Pascal, qui songeait peu à faire de la littérature, lorsque dans ses Pensées il essayait de se faire de la foi, Sainte Térèse, dont la littérature espagnole a le très juste orgueil, n’était pas littéraire, et c’est pourquoi peut-être ce qu’elle nous a laissé est si beau !

1830. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

Le poète est presque aussi rare que le juste.

1831. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Edgar Quinet. L’Enchanteur Merlin »

Je veux être juste.

1832. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

Ce dénouement — article Paris — m’avait tout gâté… Et ce n’est plus qu’à la réflexion que je suis juste.

1833. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules De La Madenène » pp. 173-187

III Le livre du Marquis des Saffras a donc sur Les Paysans de Balzac, auxquels nous ne nous permettrons pas de le comparer pour la manière, qui est essentiellement différente, la supériorité d’une peinture sans exagération et sans outrance, prise dans la mesure juste de son cadre et dans la réalité.

1834. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Arthur de Gravillon »

L’Église seule sait juste ce qu’il faut donner d’amour et d’horreur à la mort.

1835. (1868) Curiosités esthétiques « VIII. Quelques caricaturistes étrangers » pp. 421-436

Les tableaux de Bassan qui représentent le carnaval de Venise nous en donnent une juste idée.

1836. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

Je suis las d’entendre répéter le juste Aristide, disait un paysan d’Athènes ; et l’histoire de ce paysan est presque celle du genre humain.

1837. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Il a bien fait ; car son goût est fin et son sentiment juste. […] Il est robuste, il est ferme ; il frappe juste et fort. […] Elle est juste. […] Mais il faut reconnaître que Carrel n’eut jamais un sens juste des devoirs du soldat. […] La Pluralité des mondes lui inspire une réflexion juste.

1838. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Théodore. — D’une manière à la fois juste et ingénieuse. […] On ne dira jamais rien de plus juste que ce vieil adage (de Platon, je crois), que le beau est la splendeur du vrai. […] Dieu, qui est bon parce qu’il est juste, ne permet pas que l’âme s’en ressente au point d’être enchaînée et rabaissée au niveau de sa forme disgraciée, mais elle souffre du poids de la laideur. […] Son âme s’élance vers la Divinité, et il fait entendre ce cri de juste reproche : « Sublime esprit ! […] Mais pour nous qui en concevons un plus grand et plus juste, votre blasphème nous paraît l’élan le plus religieux de votre âme généreuse !

1839. (1927) André Gide pp. 8-126

L’excès est souvent marque de disette et la véritable abondance entraîne une sorte de pondération. » Que cela est juste et bien dit ! […] Il y a aussi toute une bande de collégiens qui échappent tout juste à une descente de police, et qui, en outre, écoulent de la fausse monnaie, sans compter que les pires de ces garnements amènent traîtreusement un de leurs petits camarades à se tuer en pleine classe; M.  […] Sous l’air de plaisanterie et de défi, quelle juste et lucide dérision des mystagogies à la mode, de l’inconscient et de ses profondeurs ? […] Léon Treich, et le volume assez juste et impartial, quoique un peu superficiel, que lui consacre un professeur de Genève, M. 

1840. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Dans toute cette immense période, en effet, le préjugé des races exista ; tout homme trouvait juste de relever de ses pères ; tous croyaient à la noblesse, à la supériorité du rang ; l’égalité des hommes sur la terre n’était pas même soupçonnée. […] Le juste et l’injuste étaient définis : quand un homme violait la loi, on ne se demandait pas avec anxiété si la société n’était pas cause ou complice de son crime ; on l’appelait méchant, et on le punissait. […] On put alors dire aux hommes : « Vous vous plaignez de souffrir ; et le juste par excellence, le Fils de l’Homme, le Fils de Dieu, n’a-t-il pas souffert aussi, n’a-t-il pas souffert plus que vous ? […] Elle ne peut en conclure qu’une chose, cette logique : c’est que tout dépend du hasard et de la fatalité ; qu’il n’y a par conséquent ni droit ni devoir ; que rien n’est vrai, que rien n’est juste ; que vérité, vertu, justice, sont des mots et ne sont que des mots.

1841. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Et l’on a parlé misère de peuple et promiscuité des faubourgs, et Sainte-Beuve s’est écrié avec un accent d’humanité de 1788, qu’il ne pouvait comprendre que, sur le trône, on ne fût pas un saint Vincent de Paul ou un Joseph II. « Assainir tout cela, ce serait quelque chose, ce serait le commencement », a-t-il répété deux ou trois fois… et de ces hauteurs humanitaires et philosophiques, il est vite descendu à causer des petites filles du peuple, qu’il a fort étudiées, nous dit-il, et qui — remarque très juste — ont, à la puberté, deux ou trois ans de folie, de fureur de danse, de vie de garçon, jetant ainsi leurs gourmes et leurs bonnets par-dessus les moulins : après quoi elles deviennent rassises, rangées, femmes d’intérieur et de ménage. […] Littré, au contraire, est pour eux, et son point de vue est très juste… « Ah ! […] … Comme on se lève pour s’en aller, Gautier va à Scherer, le personnage le plus muet de la société, et lui dit : « Ah ça, j’espère que la première fois vous vous compromettrez, car nous nous compromettons tous, il n’est pas juste que vous restiez froidement à nous observer. » 24 juillet Gretz, près Fontainebleau. […] Là-haut, les yeux se réjouissent au milieu des Prud’hon, des Chardin, des Fragonard ; en bas dans le jardin, juste assez grand pour être tout fleuri ; et par toute la riante et petite maison, le cœur s’égaie à la cordialité de l’hospitalité, à tout ce qui se lève de bon, de frais, d’honnêtement heureux, d’un intérieur réglé par le devoir, et, à tous moments, traversé par des vols d’enfants.

1842. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Cependant, il ne serait ni juste de dire, ni raisonnable de croire que ce triple mouvement ait été un effet sans cause, et que cette application excessive du libre examen à la religion, à la philosophie et à la politique, quelque téméraire qu’il ait été, n’ait produit ou ne soit appelée à produire aucun progrès. […] Il ne mourut point, et cet esprit délicat, qui joignait à la politesse d’un homme de bonne compagnie un savoir solide, un sens juste, un tour d’intelligence vif et prompt, et cette facilité de pensée et de style qui fait le journaliste, devint, en 1801, un des écrivains les plus utiles et les plus ingénieux du Journal des Débats. […] » l’historien de la philosophie peut, à plus juste titre encore, s’écrier, après avoir raconté les erreurs surprenantes des plus savants philosophes, que la science, comme la grandeur, n’appartient qu’à Dieu. […] Avant de dire ce que M. de Béranger fit pour la société, il est juste de dire ce que la société avait fait pour lui. […] Cousin dans la philosophie, devait bientôt présenter des réflexions justes et neuves sur la littérature anglaise.

1843. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

On m’admirait : je trouvais juste Qu’on m’obéît les yeux fermés. […] Si vous croyez, par exemple, que l’on connaît Renan, que l’on se fait une idée juste de sa personne et de son caractère ? […] Cela paraît plus juste, oui. […] De mon temps, nous avions un mois tout juste, le premier de l’an, la moitié de la semaine sainte, et c’était tout. […] Mais que la cousine d’Auguste M’invite en sa riche maison, J’accours, j’arrive à l’heure juste.

1844. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

On peut observer si un mot est simple ou s’il est composé ; juste, justice, sont des mors simples : injuste, injustice, sont composés. […] Ce qui est parfait par rapport à certaines personnes, ne l’est pas par rapport à d’autres, qui ont acquis des idées plus justes & plus étendues. […] Homme juste. […] Juste défense. […] transversa tuentibus hircis, où transversa est pour transversè, de travers ; il sent bon, il sent mauvais, il voit clair, il chante juste, parlez bas, parlez haut, frappez fort.

1845. (1925) Proses datées

Jacques Blanche, et il m’a semblé qu’il était juste de mentionner, parmi les milieux wagnériens d’il y a vingt-cinq ans, celui-là où non seulement l’œuvre de Wagner était admirée, mais où se manifestait, pour ainsi dire, la présence réelle du Maître. […] Ses Stances ne formulent guère en leur harmonie que des sentiments très simples et très généraux, soutenus d’images justes et naturelles, et leur perfection réside en leur brièveté si pleine et si exacte, en un accord toujours rigoureux entre la pensée et la forme. […] Certes, en témoignant quelque dédain aux désignations dont il niait l’importance autre qu’historique, Moréas voyait juste, mais il n’eût pas parlé de même s’il avait eu en vue, non plus la persistance d’un Romantisme et d’un Classicisme d’école, mais la permanence toujours vivante d’un esprit classique et d’un esprit romantique. […] N’en a-t-il pas l’inspiration haute et pure, l’image juste et forte, le sentiment harmonieux ? […] Bezout pour l’Artillerie ; 2° tout ce qu’il pourra des volumes suivants, puisqu’il y a concours, il est juste de donner les emplois aux plus instruits.

1846. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Les quelques-uns qui la connaissent blâmeront d’abord l’éclat de telles comparaisons, trouveront que je dis de cette femme qui se cache juste le contraire de ce qu’il en faut dire. […] Elle a peu de chose à dire de chaque rencontre, elle n’approfondit rien ; mais en passant elle regarde et son mot, parfois juste, est presque toujours pittoresque. […] Son esprit était d’ailleurs piquant plutôt que vaste ou juste, et, lorsqu’il voulait peindre les Ruines des Tuileries, il lui arrivait de nous faire surtout connaître une marchande d’oranges. […] C’est un bon professeur ou un parfait clergyman qu’il est juste de respecter et prudent d’éviter. […] Il n’est même que juste de rappeler qu’après la Commune, devant les tribunaux d’exception, elle montra plus de courage que la plupart des hommes de son parti.

1847. (1887) George Sand

De toutes ces inventions rustiques qu’elle recueillait avidement, de ces visions du soir qu’elle sollicitait dans la campagne, il y avait juste de quoi troubler un instant sa cervelle et lui ravir quelques heures de sommeil. […] Encore est-il juste de dire que, ces deux fois, elle avait eu deux précieux collaborateurs : pour la première pièce, Sedaine ; pour la seconde, Alexandre Dumas fils. […] Et malgré tout, en dépit des plus justes critiques, il est difficile de ne pas subir le charme. […] Ainsi, ces deux grands artistes se maintenaient justes et tolérants l’un pour l’autre. […] C’était le type de la merlette lettrée. » Bien des traits sont justes dans cette esquisse ; un seul détonne avec la physionomie de la romancière.

1848. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Rien ne pousse dans la vie littéraire, comme un mauvais livre qui arrive à temps ; le talent est de le faire mauvais, juste ce qu’il faut, et au moment où il parut, il fallait que le livre fût le plus mauvais possible. […] Enfin il a le mérite rare et curieux de penser par lui-même, de penser juste, de savoir beaucoup et d’écrire ce qu’il pense et ce qu’il sait en un style brillant, spirituel et élevé. […] C’est juste, du moment que Sarcey compte, M.  […] Roger Ballu se trouva fort gêné, car il a la conscience droite, et puis il voulait émettre une opinion juste, administrative et bureaucratiquement motivée. […] Il est donc juste qu’il ait, dans la littérature, la place importante qu’il occupe dans la vie.

1849. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Mais supposons qu’un voyageur, fatigué d’une longue course d’été, aperçoive aux halles un panier rempli de raisins ou de pèches savoureuses, capables, comme disait La Fontaine, de se faire par avance manger des yeux ; éprouvera-t-il, en avançant la main vers ces fruits, juste le contraire, juste « l’antithèse » du plaisir esthétique ? […] Spencer, qui a défendu un jour la poésie de la science contre celle des « odes grecques », fait à ce sujet de justes remarques. […] Pour comprendre ces variations et les apprécier à leur juste valeur, il faut de nouveau emprunter quelques données à la musique. […] Ainsi, pourquoi y a-t-il un rapport nécessaire entre le mot juste et le mot musical ? […] Chez une nature très impressionnable, c’est juste le contraire qui serait à craindre : Swallow-Fall pourrait produire l’impression du Niagara.

1850. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Juste à ce moment, le petit officier corse, passant par là, crut devoir rendre visite au député Salicetti qui, lui aussi, était Corse. […] « Elle » se fit attendre, juste assez pour aviver d’une pointe de désir l’impatience du jeune homme. […] La perspective d’épouser en justes noces une descendante authentique de Charles-Quint souriant, comme un invraisemblable rêve, à son imagination de poète. […] « J’ai commencé, disait-il, à les aimer de fort bonne heure, et je les ai bientôt mises à leur juste valeur. […] À Java, c’est pendant la moisson qu’on prépare les entrevues, les fiançailles et les justes noces.

1851. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Créature d’air et de flamme, la plus excitable qui fut jamais, composée d’atomes plus éthérés et plus vibrants que ceux des autres hommes, il n’y en a point dont la structure mentale soit plus fine ni dont l’équilibre soit à la fois plus instable et plus juste. […] Ce coup de sonde, Rousseau l’a donné juste et à fond, par rencontre et par génie.

1852. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

Que le lion soit roi, rien de plus juste. […] Les traits qui le marquent chez La Fontaine sont à peine visibles, et cependant ils sont si justes, que cette esquisse imperceptible le montre tout entier.

1853. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

Chapitre IV LXXIX L’aveugle, après avoir bu une goutte de mon rosoglio dans ma gourde, reprit le récit juste où la veuve l’avait interrompu …………………………………………………………………………………………………………………………………………… — Quand Hyeronimo remonta de Lucques le soir, bien avant dans la nuit, à la cabane, il nous raconta que les messieurs de Lucques avaient été pleins d’honnêteté et de caresses pour lui pendant tout le chemin, qu’ils s’étaient arrêtés dans toutes les osteries des gros villages qu’ils avaient rencontrés pour s’y rafraîchir d’un verre de vin, d’une grappe de raisin, d’un morceau de caccia-cavallo, sorte de fromage dur et brillant, comme un caillou du Cerchio, et que partout on l’avait forcé de se mettre à table avec eux et de boire comme un homme, jusqu’à ce que les yeux lui tournassent dans la tête et la langue dans la bouche, comme pour le faire babiller à plaisir sur Fior d’Aliza, sa cousine ; sur Léna, sa tante ; sur l’aveugle et sur sa famille. […] Vous savez bien, vous qui avez apporté le papier qui nous a dépouillés de tout ce qui faisait vivre ici les Zampognari depuis les siècles des siècles, vous savez bien qu’on ne nous a laissé que ces trois grosses branches qui s’étendent de notre côté sur la pelouse et sur la maison qui nous restent ; vous savez bien que ces branches sont à nous, c’est encore assez, car l’arbre est si grand que ces seules branches, le quart de l’arbre, nous rempliront encore au moins huit sacs de châtaignes ; c’est juste ce qu’il faut pour quatre bouches, en économisant.

1854. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 385-448

Cependant il faut être juste, les bûcherons semblaient attendris en voyant cette belle jeune fille, inondée de larmes jusqu’au bout des mèches de ses cheveux épars sur son sein d’enfant. […] Je fus tentée de remonter à la cabane ou bien de rester là sans faire un pas de plus, pour mourir de faim sous le lit desséché du torrent… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… Je ne sais pas au juste combien d’heures je restai dans cette angoisse ; mais quand je m’en réveillai, les rayons plus longs du soleil avaient pénétré à moitié sous l’arche, échauffaient le sable et, en me rendant la chaleur, me rendaient la pensée et le courage.

1855. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

XXVI Bonaparte avait calculé si juste avec les amis de Chateaubriand que le Génie du Christianisme parut le soir même du jour où les autels publics furent réinstallés par lui, au milieu d’une pompe militaire, à Notre-Dame. […] Qui ne se trouve quelquefois accablé du fardeau de sa propre corruption, et incapable de rien faire de grand, de noble, de juste ?

1856. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Mais s’il ne fouille pas, il dessine : son trait est sec, mince, mais juste. […] Dans un poème du xiiie  siècle, une mère, forcée de donner son fils, pour sauver son mari, prononce une plainte d’un accent juste et pénétrant29.

1857. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre I. Le quatorzième siècle (1328-1420) »

Il prend tout juste sa matière — et c’est la guerre de Cent Ans — comme Chrétien de Troyes a pris l’histoire de la Table ronde. […] La phrase s’étoffe, prend du poids, s’essaie à l’ampleur, aux allures soutenues, au juste équilibre des parties : une forme oratoire se crée.

1858. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

a fait beaucoup de fracas. « La propriété, c’est le vol. » Mais après ce début vient une analyse très forte des fondements et des conditions de la propriété, aboutissant à une conception que les collectivistes d’aujourd’hui estiment bien timide, conservatrice, et bourgeoise : Proudhon établit au lieu de la propriété la possession individuelle, transitoire, acquise par le travail, et répartie selon de plus justes proportions. […] Il avait inventé le nouveau spiritualisme, philosophie oratoire, libéralisme philosophique, juste et commode doctrine bien taillée sur l’intelligence et les intérêts du bourgeois français.

1859. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Car, non seulement l’Éducation sentimentale est l’histoire de deux jeunes gens, très particuliers comme individus et très généraux comme types, puisqu’ils représentent, l’un, le jeune homme romantique, et l’autre, le jeune homme positiviste, et cela juste à l’heure où la période du positivisme va succéder chez nous à celle du romantisme ; et non seulement cette histoire se combine avec une étude des idées et des mœurs dans les dernières années du règne de Louis-Philippe : l’Éducation sentimentale est quelque chose de plus : l’histoire pittoresque et morale, sociale et politique, de la Révolution de 1848 ; elle nous dit, et avec profondeur, les barricades et les clubs, la rue et les salons, et elle nous montre cette chose extraordinaire : la confrontation effarée des bourgeois avec la Révolution, cette Révolution que leurs pères ont faite soixante ans auparavant, mais qu’ils croient terminée, puisqu’elle les a enrichis, qu’ils s’indignent de voir recommencer ou plutôt qu’ils ne reconnaissent plus quand c’est eux à leur tour qu’elle menace, et qu’ils renient alors avec épouvante et colère. […] Il est à peu près impossible d’embrasser de pareils ensembles, de tenir à la fois présentes à sa mémoire toutes les parties qui devraient conspirer la beauté de l’œuvre et, par conséquent, de connaître au juste et d’apprécier cette beauté.

1860. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Après cela et pour être juste, il faudrait préciser. […] Quelques questions de ce genre, ingénieusement posées, ramèneraient vite le public à des idées plus justes sur la hiérarchie littéraire.

1861. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Elle est plus malaisée à saisir si le tissu sonore se complique, et pourtant elle me paraît demeurer parfaitement juste, car les suites d’accords les plus inextricables ne sont jamais formées que par la réunion et l’interpénétration de groupes harmoniques relativement simples. […] Vielé-Griffin ne lira point cela sans protester ; il ne comprend pas qu’il soit besoin de règles, non pas imposées : apprises dans le travail et créées par lui ; mais ses écrits manquent précisément un peu des qualités objectives des justes bornes et de l’harmonie ; ils sont de belles paroles prononcées par une voix ; ils ne sont pas toujours la voix vivante.

1862. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Elle m’a produit dans l’année plus de 10 000 francs de bénéfice, les frais de la première édition montant à 7 000 livres défalquées ; les frais de la deuxième étant à peu près les mêmes, il me reste un millier d’écus dont je ne peux faire un emploi plus juste que de payer mes dettes. […] Telles sont ces lettres que j’ai voulu laisser dans toute leur naïveté et avec tout leur caractère, pour montrer dans leur juste proportion les différentes parties, tant poétiques et morales que prosaïques et vulgaires, de l’âme et de l’habitude ordinaire de Bernardin.

1863. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Charles Baudelaire d’avoir pu évoquer, dans un esprit délicat et juste, un si grand souvenir ! […] II Le livre des Fleurs du mal contient tout juste cent pièces, parmi lesquelles un assez grand nombre de sonnets, et dont la plus longue excède à peine cent vers.

1864. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

Aucun esprit juste ne cherche aujourd’hui à aller plus loin. […] (6) Pour prévenir, autant que possible, toutes les fausses interprétations qu’il est légitime de craindre sur la nature d’un cours aussi nouveau que celui-ci, je dois ajouter sommairement aux explications précédentes quelques considérations directement relatives à cette universalité de connaissances spéciales, que des juges irréfléchis pourraient regarder comme la tendance de ce cours, et qui est envisagée à si juste raison comme tout à fait contraire au véritable esprit de la philosophie positive.

1865. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

C’est une remarque extrêmement ingénieuse, ou, plutôt, c’est une remarque d’un esprit juste… Puis il y eut le très beau livre de Taine sur La Fontaine. […] toutes les qualités de toutes les écoles les plus opposées, avec ce beau juste milieu qui est le sentiment de la vérité et de la mesure, et dans un goût exquis, voilà ce que La Fontaine a eu souverainement, et voilà, s’il est question d’étiquette, l’étiquette que l’on donnera définitivement à La Fontaine : c’est le grand classique le plus original que toute la littérature classique ait pu enregistrer dans ses illustres annales.

1866. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Le lecteur n’a pas besoin que je lui trace les justes bornes de cette analogie. […] Comment donner de vraies et justes définitions de chaque mot ?

1867. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

Quand le livre a paru, quelques optimistes, à la lecture des premières pages, qui sont réellement belles et qui paraissent justes, avaient vu là une si étonnante modification dans les idées présumables de M.  […] C’est la mort des autres histoires, que celle-ci… Jusqu’à ce moment, les histoires que nous avions de la Révolution, plus ou moins vraies, plus ou moins justes, plus ou moins des plaidoyers pour ou contre, rayonnaient du moins à un degré quelconque de deux choses qui paraissaient inextinguibles ; c’était l’opinion de l’auteur et son talent, quand il avait du talent.

1868. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Le traité de Balzac devait embrasser la vie élégante tout entière, avec ses faces multiples et ses développements, et il n’en a touché que la première partie, mais d’une main si sûre, si juste, si habile, si raffinée, et, qu’on me permette le mot ! […] Ils peuvent les inquiéter, puisqu’ils ont inquiété Balzac lui-même, et le meilleur moyen de les défendre contre une critique juste, mais élevée, n’était pas d’accuser du cant que lord Byron reprochait à l’Angleterre une société qui aurait mieux valu si elle eût été hypocrite… L’hommage à la vertu ne nous distinguait pas en 1834.

1869. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

C’est quand vous êtes dans ces tons justes que vous me semblez le plus vous-même, et qu’il me plaît surtout de vous reconnaître.

1870. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Chants du crépuscule (1835) »

Cette mythologie d’anges qui a succédé à celle des nymphes, les fleurs de la terre et les parfums des cieux, un excès même de charité aumônière et de petits orphelins évoqués, tout cela nous a paru, dans ces pièces, plus prodigué qu’un juste sentiment de poésie domestique n’eût songé à le faire.

1871. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

Mme Pierson, durant toute cette première situation attachante, est une personne à part, à la fois campagnarde et dame, qui a été rosière et qui sait le piano, un peu sœur de charité et dévote, un peu sensible et tendre autant que Mlle de Liron ou que Caliste : « Elle était allée l’hiver à Paris ; de temps en temps elle effleurait le monde ; ce qu’elle en voyait servait de thème, et le reste était deviné. » Ou encore : « Je ne sais quoi vous disait que la douce sérénité de son front n’était pas venue de ce monde, mais qu’elle l’avait reçue de Dieu et qu’elle la lui rapporterait fidèlement, malgré les hommes, sans en rien perdre ; et il y avait des moments où l’on se rappelait la ménagère qui, lorsque le vent souffle, met la main devant son flambeau76. » Pour bien apprécier et connaître cette charmante Mme Pierson, il faudrait, après avoir lu la veille les deux premières parties de la Confession, s’arrêter là exactement, et le lendemain matin, au réveil, commencer à la troisième partie, et s’y arrêter juste sans entamer la quatrième : on aurait ainsi une image bien nuancée et distincte dans sa fraîche légèreté.

1872. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

Seule elle donne, en quelque sorte, la distance convenable et l’ouverture de compas pour mesurer les justes hauteurs, pour se régler aux vraies étoiles.

1873. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

Cela est vrai de l’aveu de Rancé lui-même, et il nous l’exprime à sa manière, quand il dit (lettre du 3 octobre 1675) : « Puisque vous voulez savoir des nouvelles de notre affaire, je vous dirai, quelque juste qu’elle fût, qu’elle a été jugée entièrement contre nous ; et, pour vous parler franchement, ma pensée est que l’Ordre de Cîteaux est rejeté de Dieu ; qu’étant arrivé au comble de l’iniquité, il n’étoit pas digne du bien que nous prétendions y faire, et que nous-mêmes, qui voulions en procurer le rétablissement, ne méritions pas que Dieu protégeât nos desseins ni qu’il les fît réussir. » Il revient en plusieurs endroits sur cette idée désespérée ; son jugement sur son Ordre est décisif : les ruines mêmes , s’écrie-t-il, en sont irréparables .

1874. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Il ne dit pas un mot qui n’atteste son mépris pour l’espèce humaine, et pense plus souvent encore à se tuer qu’à punir ; noble idée du poète d’avoir représenté l’homme vertueux ne pouvant supporter la vie, quand la scélératesse l’environne, et portant dans son sein le trouble d’un criminel, alors que la douleur lui commande une juste vengeance.

1875. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre III. Retour à l’art antique »

Ce sera ce goût antique qui ira se développant sous la Révolution, favorisé par les événements politiques et par le mouvement des idées : dégagé de plus en plus des éléments mondains, élégants, spirituels, auxquels il s’est allié d’abord, il créera des formes pures et froides ; il réalisera l’harmonie sans la vie, et la beauté par l’effacement du caractère ; il suscitera la correcte poésie des Fontanes, des Luce de Lancival et des Chênedollé ; il imposera même à l’imagination brûlante de Chateaubriand les idéales figures de Cymodocée et d’Atala, qui ressemblent à l’antique tout juste comme des marbres de Canova.

1876. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre I. Publicistes et orateurs »

About (1828-1885), Lorrain, au sortir de l’École Normale alla à l’École d’Athènes, d’où il a rapporté cette satire plus amusante que juste ou charitable, la Grèce contemporaine (1855).

1877. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Banville, Théodore de (1823-1891) »

Le mot serait juste en supposant que la rime fût une esclave maîtresse, battue et caressée de la même main vigoureuse.

1878. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Baudelaire, Charles (1821-1867) »

Une charogne ; le Chat (p. 79) ; le Beau Navire ; À une dame créole ; Spleen (p. 140), qui m’a navré, tant c’est juste de couleur !

1879. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Dans Il Giusto castigo (le Juste châtiment), Flavio, mari de Flaminia, jaloux d’Oratio, feint de partir pour la guerre de Hongrie.

1880. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Je ne voyais pas assez nettement à cette époque les arrachements que l’homme a laissés dans le règne animal ; je ne me faisais pas une idée suffisamment claire de l’inégalité des races ; mais j’avais un sentiment juste de ce que j’appelais les origines de la vie.

1881. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre V. Les esprits et les masses »

. — Ô romains, disait Tertullien, nous sommes des hommes justes, bienveillants, pensifs, lettrés, honnêtes.

1882. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Plus le poète comprendra profondément le travail de la conscience et de l’imagination créatrice, plus il verra augmenter ses moyens de prise sur la nature. » Rien ne nous semble plus juste.

1883. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre dixième. »

Autrement l’auteur, faute d’avoir des idées justes, risque d’en donner de fausses à son lecteur.

1884. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 35, de l’idée que ceux qui n’entendent point les écrits des anciens dans les originaux, s’en doivent former » pp. 512-533

Section 35, de l’idée que ceux qui n’entendent point les écrits des anciens dans les originaux, s’en doivent former Quant à ceux qui n’entendent point les langues dans lesquelles les poëtes, les orateurs et même les historiens de l’antiquité ont écrit, ils sont incapables de juger par eux-mêmes de leur excellence, et s’ils veulent avoir une juste idée du mérite de ces ouvrages, il faut qu’ils la prennent sur le rapport des personnes qui entendent ces langues et qui les ont entendues.

1885. (1912) L’art de lire « Chapitre V. Les poètes »

J’appelle nombre une phrase d’une certaine longueur qui est bien faite, dont les différentes parties sont en juste équilibre et satisfont l’oreille comme un corps aux membres proportionnés et bien attachés satisfait les yeux : une phrase nombreuse, c’est une femme qui marche bien.

1886. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

… Le Byron vertueux qu’on trouve ici, le Byron éthéré, le Byron même anachorète — comme saint Antoine, — ce Byron enfin de perfection idéale, angélique et archangélique, m’inquiète légèrement, je l’avoue ; et quoique je n’aie jamais cru aux bêtises et aux calomnies du bégueulisme sur Byron, je ne crois pas pourtant qu’il fût si ange et si archange que cela… Il devait faire, très bien, ses sept petits, péchés mortels par jour, — comme on dit que les font les Justes… L’auteur du Byron jugé, qui est une Italienne et une catholique, nous a enlevé un Byron de vitrail et de sainte chapelle, mais ce n’est pas plus le Byron vrai que le Henri de La Rochejacquelin de Hopwood — un ange aussi, — toujours les anges ! 

1887. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Quant à nous, qui avons cherché dans le livre de Huc une occasion d’être juste envers un pays pour lequel nous n’avons jamais éprouvé de respect ni de sympathie, ce que nous avons trouvé de plus remarquable dans ce peuple, qui a le mouvement sans la vie, c’est l’esprit, — c’est ce genre de pensées qui ne viennent pas du cœur, par opposition avec les grandes qui en viennent et qui constituent le Génie, — c’est l’esprit comme les vieilles civilisations le comprennent, volatil, brillant, chatoyant, agaçant comme un diamant aux lumières, affilé comme un dard, passant comme une flamme, ou qui reste comme un parfum.

1888. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

Moins encore que Pascal, qui songeait peu à faire de la littérature lorsque dans ses Pensées il essayait de se faire de la foi, sainte Térèse, dont la littérature espagnole a le très juste orgueil, n’était pas littéraire, et c’est pourquoi peut-être ce qu’elle nous a laissé est si beau !

1889. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

Malheureusement M. de Chalambert ne s’est pas chargé de cette juste exécution historique et nous l’attendons toujours.

1890. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Léon Gozlan » pp. 213-230

Pas de distribution plus juste.

1891. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

J’ai trop cité, et néanmoins pas assez pour donner une idée bien juste de cette grâce inouïe dans toutes les formes que peut prendre, vêtir et dévêtir l’amour.

1892. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’architecture nouvelle »

Leur seul caractère commun est la marque qu’elles portent toutes de la profonde originalité de leur auteur. « La maison-type n’existe pas pour lui »40 a-t-on avec juste raison.

1893. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre X. Des Romains ; de leurs éloges, du temps de la république ; de Cicéron. »

Le plus juste aujourd’hui, même en accordant son estime, veut conserver le droit de la refuser.

1894. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VII. »

Un autre, fendant la terre couverte d’arbres, est asservi pour l’année au maître des charrues recourbées ; un autre, avec l’art de Minerve et de l’inventif Vulcain, de ses deux mains durcies au travail, gagne sa vie ; un autre, instruit par les dons des muses olympiennes, sait la juste mesure de l’aimable sagesse.

1895. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Le malin prêtre avait frappé juste. […] tout juste, si juste qu’on avait entendu son frôlement contre le bois neuf. […] Ils arrivaient à huit heures bien juste, et se retiraient avant le coup de onze. […] Madame sa mère est là. — C’est juste… Et elle s’en allait. […] Ceux qui n’ont pas nativement la juste mesure dans l’esprit pour apprécier la valeur d’un artiste ont besoin de le comparer à un autre.

1896. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

L’histoire doit être plus sévère que les contemporains, mais il est juste qu’elle indique le bien à côté du mal. […] « Cette idolâtrie alambiquée de la femme est presque toujours opposée à l’estime convenable et droite qu’il est juste de faire d’elle. […] Vacquerie et les sévères reproches de l’auteur de l’Assommoir, il se trouve un juste milieu. […] Puisse-t-il les avoir bientôt revendiquées et conquises, pour écrire désormais, sous l’œil de Dieu, ce qu’il croit, ce que nous croyons, le vrai, le juste, le bien, le beau ! […] Cette évocation était-elle juste au fond autant qu’en apparence ?

1897. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Ils n’abdiquèrent donc pas, eux non plus, tout esprit de critique et de juste sévérité. […] Mais cette concession, ou plutôt cette juste part une fois faite à la vérité, cette hauteur et cette beauté morale de l’idéal du moyen âge une fois signalées, nous en revenons à ce que nous disions. […] On peut dire que, par un effet naturel de l’éloignement, et comme par une illusion de perspective, nous n’estimons pas à sa juste importance le rôle de Racine dans l’histoire de notre théâtre et de notre littérature. […] Quand ce grand homme, fatigué du poids de son propre génie, vit la faveur publique se détourner de lui vers son jeune rival, et que, depuis lors, il ne laissa plus échapper une occasion de manifester son dépit, ne pensez pas qu’un juste orgueil froissé lui dictât seul sa malveillance. […] On regrettera toujours, pour la dignité des lettres et l’honneur d’un grand nom, qu’il ait si cruellement maltraité Corneille, comme on regrettera toujours que, après avoir en quelque façon débuté sous les auspices de Molière, il se soit brouillé brusquement et sans juste cause avec lui.

1898. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Dans cette épigramme, il y a deux choses : Piron, homme du métier, sentait bien l’incomplet de Voltaire, l’inachevé de ses œuvres d’art et ses à peu près dans l’exécution ; il touchait juste là-dessus. […] Il touchait juste en appelant Marmontel vieil apprenti, et en voyant une Poétique de sa façon, il disait : Hé ! […] Parmi ces autres, il est juste de distinguer les notices de M. 

1899. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

En effet, si les plus grands hommes de la république se sont honorés par la mort de Flaccus, de Saturnius, des deux Gracques, je ne devrais pas craindre que la postérité me condamnât pour avoir fait mourir ce brigand, cent fois plus coupable, et meurtrier de ses concitoyens ; ou, s’il était possible qu’une action si juste excitât contre moi la haine, il est dans mes principes de regarder comme des titres de gloire les ennemis qu’on se fait par la vertu. […] En effet, quoique la mort de Crassus ait excité de justes regrets, qui ne la trouve pas heureuse, en se rappelant le sort de tous ceux qui, dans ce séjour de Tusculum, eurent avec lui leur dernier entretien ? […] « Ceux qui me blâment d’écrire sur la philosophie devraient être plus justes, ils devraient se rappeler que j’ai déjà beaucoup écrit sur d’autres sujets, et autant qu’aucun autre Romain ait jamais fait ; et qu’y a-t-il donc au-dessus de l’intérêt de ces grandes questions, et dont l’homme ait à retirer plus de véritable utilité ?

1900. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Son intelligence modifiée, son ambition exaltée, lui firent voir juste au milieu du manoir paternel, au sein de la famille. […] Il renonçait à être populaire pour rester juste et honorable. […] XV Balzac naquit, et, doué par la nature d’un talent immense et d’un esprit juste, il secoua ces haillons de la pensée dont on avait voulu faire un costume national, il rentra dans la voie droite de l’abbé Prévost, et n’aspira qu’à un seul titre, celui d’historiographe de la nature et de la société.

1901. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Que trois soient un ; que Dieu ait été homme ; que du pain et du vin soient Dieu ; que Dieu soit juste et qu’il nous fasse porter la peine d’une faute que nous n’avons pas commise ; que Dieu soit bon et que, prévoyant la damnation de la majorité des hommes, il ait créé l’humanité ; que Dieu soit bon et que l’enfer soit éternel, etc., on a vu des moines éloquents qui donnaient de ces choses des interprétations philosophiques : et cela est étrange, car un mystère que l’on comprendrait ne serait plus un mystère, et on ne rend pas raison de ce qui est au-dessus de la raison. […] et comme souvent il fouaille juste !) […] Mais rien ne l’avait amenée à réfléchir sur les préjudices que l’organisation présente de la société apporte aux privilèges de l’âme, et, par un autre instinct plus parfait dans son coeur et plus connu, elle se soumit humblement à ce qu’elle regardait comme la condition nécessaire de la femme, qui lui ôte le droit de choisir et ne lui laisse que tout juste celui de refuser.

1902. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

On ne donnait pas de nom à cette nouveauté ; Corneille, dans son dépit, la nomma tendresse : le mot était juste des tragédies de Quinault ; mais le vrai nom, celui qui est demeuré dans la langue de l’art, est né avec la chose, le jour où parut Andromaque : c’est le sentiment, lequel s’essaya sur la scène, dans les deux premières pièces de Racine, sous l’image populaire de la tendresse. […] Mais dans ces deux poètes divins les nuances sont si justes et l’œuvre entière si harmonieuse, que l’impression dernière est une certaine douceur dont je veux bien qu’on les loue, pourvu que ce ne soit pas aux dépens du reste. C’est la douceur, ou, pour parler plus juste, la plénitude que nous éprouvons à la vue d’un de ces grands paysages où la nature a réuni tous les contrastes, depuis les âpres rochers qui portent encore l’empreinte primitive de la création, jusqu’aux paisibles campagnes dont le travail de l’homme renouvelle incessamment l’aspect.

1903. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Qu’on nous permette une comparaison peu propre, mais juste : un fumier empeste un jardin, quand bien même le jardin est tout parsemé de fleurs. […] Ensuite, quand les faits seront connus, ceux qui le croiront juste jetteront la pierre à M.  […] En somme, il n’y a que des intentions de style ; le style manque, la façon personnelle de sentir, et le mot juste qui rend la sensation.

1904. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Cette sincérité de leur émotion doit se retrouver dans leurs œuvres, et, pour compenser ce qu’il y a d’insuffisant dans la représentation du réel, ils sont obligés, dans une juste mesure, d’augmenter l’intensité de cette représentation. […] Pour rester dans la juste mesure, celui qui a réagi contre autrui devrait ensuite prendre à tâche de réagir contre soi-même. […] II — Distinction du réalisme et du trivalisme Gœthe disait » : C’est par la réalité précisément que le poète se manifeste, s’il sait discerner dans un sujet vulgaire un côté intéressant. » Le réalisme bien entendu est juste le contraire de ce qu’on pourrait appeler le trivialisme ; il consiste à emprunter aux représentations de la vie habituelle toute la force qui tient à la netteté de leurs contours, mais en les dépouillant des associations vulgaires, fatigantes et parfois repoussantes.

1905. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

. — « Je pensais toujours au pays, et je ne croyais pas qu’il y eût de jolies filles sans bleues et sans jupes nattes tombant sur les épaules. » — Elle, c’est une effrontée, une coquette jusqu’à la brutalité ; « elle s’avançait eu se balançant sur ses hanches comme une pouliche du haras de Cordoue. » D’abord elle ne lui plaît pas ; il se sent trop loin avec elle de toutes les choses de son pays ; « mais elle, suivant l’usage des femmes et des chats qui ne viennent pas quand on les appelle et qui viennent quand on ne les appelle pas, s’arrêta devant moi et m’adressa la parole. » Ses premières paroles sont des railleries ; puis la rencontre de ces volontés dures et frustes toutes deux, hostiles au fond, se résume dans un geste qui vaut une action : « Prenant la fleur de cassie qu’elle avait à la bouche, elle me la lança, d’un mouvement du pouce, juste entre les deux yeux. […] Malheureusement, une conception juste de la portée sociale que le roman peut avoir est gâtée par le système matérialiste que nos roman ciers professent, sous prétexte de réalisme ou de naturalisme, si bien qu’au lieu d’hommes ils ne peignent trop souvent des que brutes : c’est le règne de la « littérature brutale ». […] Les sciences et la philosophie ont tellement pénétré notre société moderne, qu’il est juste de dire que nous ne voyons plus le monde et les hommes du même œil que nos grands-pères.

1906. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

Cet exemple me paraît donner une idée assez juste de l’esprit selon lequel nos classifications doivent quelquefois être conçues. […] Néanmoins l’arrangement naturel que représente la figure n’en serait pas moins juste ; et, en vertu du principe d’hérédité, toutes les formes descendues de A ou de I auraient quelques attributs communs. […] Des éleveurs me disaient qu’ils différaient juste autant que leurs parents ; et, en effet, il semblait qu’il en fût ainsi à en juger par le seul coup d’œil.

1907. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Nous le serions moins facilement si nous avions le coup d’œil plus juste. […] Des bienfaits d’un nouvel Auguste, Le cours fut par moi dirigé : Si j’en fus le mieux partagé, C’est qu’un tel partage était juste ; Moi-même ainsi l’avais jugé. […] L’inéxorable Atrée y porte un juste effroi. […] Massillon, qui avait gardé un juste milieu entre ces deux extrêmités ; Bourdaloue, qui fut plutôt Peintre que Philosophe ; Cheminais, qui chercha plutôt à émouvoir qu’à convaincre ; tous ces Orateurs blâmaient les nôtres d’avoir osé franchir certaines limites. […] Panard, plein d’esprit & de feu, juste & précis, imagine vivement, écrit avec force, & peint avec vérité.

1908. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Ajoutez que Dryden se tient trop dans le juste milieu des tempéraments ; les artistes originaux aiment uniquement et injustement une certaine idée et un certain monde ; le reste disparaît à leurs yeux ; enfermés dans une portion de l’art, ils nient ou raillent l’autre ; c’est parce qu’ils sont bornés qu’ils sont forts. […] On voit qu’il pense, et par lui-même, qu’il lie ses pensées, qu’il les vérifie, que, par-dessus tout cela, naturellement il voit juste, et qu’avec la méthode il a le bon sens. […] Il élève au premier rang « l’admirable Boileau, dont les expressions sont nobles, le rhythme excellent, les pensées justes, le langage pur, dont la satire est perçante et dont les idées sont serrées, qui, lorsqu’il emprunte aux anciens, les paye avec usure de son propre fonds, en monnaie aussi bonne et de cours presque universel748. » Il a la roideur des poëtes logiciens, trop réguliers et raisonnables, blâmant l’Arioste, « qui n’a su ni faire un plan proportionné, ni garder quelque unité d’action, ou quelque limite de temps, ou quelque mesure dans son énorme fable, dont le style est exubérant, sans majesté ni décence, et dont les aventures sortent des bornes du naturel et du possible749. » Il ne comprend pas mieux la finesse que la fantaisie. […] Il s’agit de frapper juste et fort, il ne s’agit point de frapper avec grâce.

1909. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

Telle est la question que nous devons maintenant aborder, et dont la solution nous apprendra quelle est au juste la nature et la raison d’être de l’association des signes et des idées. […] Dans bien des cas le signe intérieur naturel subsiste sans affaiblissement notable, et ce n’est pas lui que reproduit le langage audible ; celui-ci n’est donc pas vraiment adéquat à la pensée ; les images visuelles restant le signe intérieur le plus fréquent, bien qu’inexprimé, de la pensée individuelle, au langage audible, si facile à inventer, il est juste d’ajouter, quand on le peut, un autre langage, plus lent, plus difficile, mais plus vrai, le langage visible, l’écriture idéographique. […] IY, § 7] est un fait universel ; mais cette universalité n’est pas la preuve d’une absolue nécessité ; pour l’expliquer, il suffit de prouver, — ce que nous pensons avoir fait, — qu’il est à la fois naturel et commode à la pensée de partager la masse des images qui la composent en deux séries parallèles, les images les plus vives étant chargées de représenter les autres ; en se constituant ainsi, la pensée n’obéit pas à une inéluctable fatalité, de nature immanente ou transcendante, mais à un instinct juste, à une loi vaguement pressentie de bonne économie domestique : parcourant plus vite la masse toujours croissante des images qui constituent son expérience, elle ménage ses forces sans diminuer sa production ; elle produit avec le minimum de peine le maximum de travail ; c’est la même tendance qui, manifestée dans le langage extérieur, a été appelée par les linguistes modernes la loi du moindre effort. […] L’organisation d’un gouvernement libre représente mieux, selon nous, les rapports que soutiennent les signes avec les choses signifiées : le monde de nos pensées peut être comparé à un peuple qui se gouverne lui-même ; en théorie, en droit, en fait même à certain point de vue et dans certaines circonstances, tous les citoyens possèdent une part égale de souveraineté ; mais la raison qui leur est commune et le juste sentiment de l’intérêt bien entendu leur ont fait de bonne heure comprendre l’utilité d’une organisation hiérarchique ; ils ont donc détaché parmi eux un certain nombre d’hommes auxquels est exclusivement confiée l’administration des affaires publiques ; ces mandataires délégués dans l’intérêt de tous par l’autorité véritable sont seuls en évidence ; ils semblent incarner en eux la souveraineté populaire ; la louange et le blâme s’attachent exclusivement à leurs personnes ; ils n’ont pourtant, à parler rigoureusement, qu’un semblant de pouvoir ; leur démission collective ne saurait entraîner la mort du corps social, mais seulement une crise politique passagère, sans danger sérieux pour une société dont les forces vives sont restées intactes.

1910. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Cette idée, que je trouve juste, n’est pas de moi ; elle est d’un Piémontais, homme d’esprit dont j’ai fait la connaissance à La Haye, un chevalier de Revel, envoyé de Sardaigne. […] Voici ce qu’on lit dans les registres de l’état civil de Lausanne : « Benjamin Constant, fils de noble Juste Constant, citoyen de Lausanne et capitaine au service des États-Généraux, et de feu madame Henriette de Chandieu, sa défunte femme, né le dimanche 25 octobre, a été baptisé en Saint-François, le 11 novembre 1767, par le vénérable doyen Polier de Bottens, le lendemain de la mort de madame sa mère. » Ainsi, Benjamin Constant, orphelin de mère, pouvait dire avec Jean-Jacques Rousseau : « Ma naissance fut le premier de mes malheurs. » On sent trop, en effet, qu’à tous deux la tendresse d’une mère leur a manqué. […] Il paraît que Mme de Charrière avait le talent de critiquer les livres en prenant tout juste la peine d’y jeter les yeux : « J’en ai lu dix moitiés de pages au moins, disait-elle de je ne sais quel ouvrage : ainsi, vous ne m’accuserez pas, comme à propos des Opinions religieuses, de juger sur la couverture du livre. » 155. […] Mais peut-être ont-ils tort de le lui dire ; il est tel blâme (lui-même l’a remarqué avec finesse) qui ne devient juste que parce qu’il fut prématuré. […] Ils sont plus instruits, plus impartiaux, plus exacts, un peu trop diffus, mais presque toujours justes, vrais, courageux et modérés.

1911. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

Les foyers de théâtre deviendraient comme ces lugubres assemblées vénitiennes, où rodait toujours, sans qu’on pût le reconnaître au juste, un des membres du conseil des Dix. […] Je ne pourrais vous dire au juste à quoi se dissipe le temps à Paris, mon cher Monsieur, à peine suis-je habillé et frisé (un étranger doit se faire exactement friser à Paris), à peine ai-je déjeuné et écrit mes dépenses de la veille, qu’il est déjà si tard, qu’après une heure, passée je ne sais à quoi, sur les boulevards, il devient temps de songer au dîner. […] Je ne sais pas au juste lesquels de ces ouvrages ont été réimprimés chez nous ; mais ce que je sais, c’est que leur auteur jouit, en France, d’une haute réputation. […] Gustave Drouineau enfin, est dans une singulière position aujourd’hui devant le public ; on ne sait pas au juste s’il est mort ou s’il n’est pas mort. […] Je rejette ce reproche qui n’est pas juste.

1912. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Ils sont redevenus eux-mêmes, car dans cette brève détente de l’instinct, ils étaient tout au juste, et dans la rigueur grammaticale du terme, aliénés d’eux-mêmes. […] Et si ce n’était froisser les justes sentiments d’une fille pour un père auquel elle doit tant, je n’hésiterais pas à indiquer une préférence sur laquelle je me reprocherais d’insister davantage. Il est de justes louanges qui peuvent blesser, fussent-elles marquées au coin de la plus évidente sincérité. […] Pour une fois ils ne se trompaient pas d’adresse et leur trait portait justejuste, entendons-nous bien, par l’importance du point visé, car Mme Marcelle Tinayre est sans conteste, par la qualité et la formation du talent, la plus vigoureuse, la plus virile des plumes féminines qui se sont révélées dans ces dernières années.

1913. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Je cherche ce qu’il peut y avoir de juste dans cette théorie. En l’examinant, j’y vois l’exagération de quelques idées justes, et finalement une méprise. […] Seuls quelques écrivains, doués du génie de l’expression verbale, trouvent du premier coup le mot juste qui fait voir immédiatement les choses. […] Le mot juste est parfois si difficile à amener dans un vers ! […] Rien de plus juste.

1914. (1930) Le roman français pp. 1-197

Heureuse science : c’est à elle que nous devons ce chef-d’œuvre, Crainquebille, où l’agent de police, modeste représentant de la force publique, parle aussi juste, avec une philosophie aussi profonde, que, de ses misères, le pauvre bougre auquel il dresse contravention. […] Des mots justes, inoubliables, d’une bonhomie gaie, bien germanique et lourde de sens, tel que celui du brave oncle colporteur à Jean-Christophe, qui joue devant lui, au piano, ses premières compositions ; « Pourquoi as-tu fait ça, mon petit Christophe ? […] On croirait les sons affaiblis, mais si doucement purs, cristallins, d’une vieille boîte à musique aux accords demeurés parfaitement justes. […] C’est une remarque un peu confuse, mais juste, que fait M.  […] Berl, et, comme il arrive presque toujours aux révolutionnaires tant qu’ils n’ont pas vaincu, qu’ils n’ont pu imposer le credo d’une doctrine souvent plus étroite que celle qu’ils ont détruite, il mêle des exagérations, des erreurs littéraires de jugement, à de justes critiques énoncées avec férocité.

1915. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Toutefois, il n’est que juste de reconnaître, tout d’abord, que M.  […] Mais il n’est que juste d’ajouter que le Professeur Veitch ne pousse que très rarement l’extravagance et le grotesque jusqu’à ce point. […] Tout cela est fort bon, fort juste. […] Néanmoins il n’est que juste de dire que M.  […] Des vers de cette sorte méritent peut-être un juste éloge pour la force soutenue et la vigueur de leur arrangement métrique.

1916. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Ces pensées étaient justes en politique, mais les avouer était humiliant pour une reine et surtout pour une femme, encore plus pour une parente. […] Tous ceux de nostre maison ont tous esté persécutez par cette secte : témoin vostre bon père, avec lequel j’espère estre receue à mercy du juste Juge.

1917. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Cette liaison, qui devait se dénouer douloureusement après vingt ans, s’était transformée en froide amitié avant sa mort ; mais cette froideur, trop motivée par celle de Voltaire, ne fut dans madame du Châtelet que le juste ressentiment d’un cœur négligé. […] » XXII Cependant une erreur déplorable et inexplicable dans cette métaphysique du bon sens de l’esprit, d’ailleurs si juste et si logique, de Voltaire, obscurcissait cette religion de la Providence.

1918. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Ce jugement ne dépossède pas Montaigne ; il lui fait sa juste part. […] La raison devant être souveraine dans tous les ordres d’idées et dans tous les genres d’écrire, il n’est d’expression juste, même dans les sujets d’imagination, que celle que la raison approuve.

1919. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

Je fais des pièces pour le public ; et puisqu’il les paye, il est juste, pour lui plaire, de lui parler la langue des sots. » Lope du moins n’était pas dupe des défauts d’une telle fécondité. […] Avec plus de génie peut-être que Racine, il tira moins de secours de son époque ; et s’il est juste de laisser la plus grande partie de ses fautes à la charge de ses contemporains, il faut, pour admirer Racine sans superstition, laisser à l’époque plus saine où il lui fut donné de vivre37 une part dans cette perfection de son théâtre, au-delà de laquelle l’art ne pouvait que descendre.

1920. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Mais plus de mesure dans l’attaque, l’art de s’y faire des auxiliaires, plus de vérités de détail parmi les mêmes erreurs, des idées justes sur les arts écrites dans une prose aisée, l’honneur d’avoir travaillé sous Colbert aux merveilles de Versailles, des contes où le précieux même n’est pas sans grâce, tout cela, sans rendre la cause meilleure, diminue le ridicule de l’avocat. […] Desmarets avait tort sans doute de montrer au doigt Le Vayer comme un homme sans religion9; mais Desmarets devinait juste.

1921. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

Qu’est-ce qui a fait la si haute et si grande et si juste fortune de la philosophie cartésienne. […] On mesurait, (et on comptait), pied à pied, c’est-à-dire le derrière du talon du pied droit juste et modérément appuyé à la pointe de la semelle du pied gauche.

1922. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

La tristesse un peu sévère de son fond moral est relevée par la diversité des caractères qui s’y jouent, par des situations émouvantes, par un esprit net, vif, spontané, qui abonde en mots justes, en saillies faciles, en traits qui résonnent et qui frappent aux endroits qu’ils visent. […] Il est un peu du monde des féeries, ce jeune gentilhomme ; il était bien juste qu’il se mariât à la clarté des flammes de Bengale.

1923. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Les études de caractère y sont pénétrantes, les tableaux de mœurs impressionnants et justes. […] Leurs figures constitue la planche la plus creusée, la plus corrosive, la plus implacable et la plus juste qui ait été burinée d’après l’âme parlementaire.

1924. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

On n’a laissé à la Critique que son bout de petit texte, que son bout de tapis ou de paillasson sur lequel elle n’a encore bien juste que la place de s’agenouiller entre deux fastueuses citations du grand homme en grands caractères. […] Aujourd’hui, en ce moment encore, un journal, le Correspondant, qu’on pourrait appeler à plus juste titre « le Trembleur », et qui s’imagine que la vérité a, comme lui, peur de quelque chose, trouvait imprudent — et l’exprimait — de toucher à ce sujet fétide d’Alexandre VI, fût-ce pour l’assainir, fût-ce pour éponger la mémoire de ce pontife des souillures qu’on a fait ruisseler sur elle !

1925. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

Le roi sourit, salua, parut bienveillant ; Saint-Simon demeura à la cour, sans charge, au bon point de vue, ayant le loisir de tout écouter et de tout écrire, un peu disgracié, point trop disgracié, juste assez pour être historien. […] Le politique n’en voit qu’une qui est la vraie ; il a le tact juste, plutôt que l’imagination abondante ; d’instinct, il devine la bonne route, et la suit sans plus chercher.

1926. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

La science positive ne conteste pas plus l’une que l’autre ; elle se borne à renfermer dans ses justes limites l’application d’un principe dont il a été fait un si grand abus. […] Charles Renouvier, vient de porter, à propos des écoles de Saint-Simon, de Fourier et d’Auguste Comte, un jugement aussi juste que sévère sur ce prétendu esprit historique qui tend à fausser les sciences morales et à énerver les âmes humaines.

1927. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Il est juste aussi de remarquer que, peu intelligent de l’histoire et « dépourvu de tout sens politique proprement dit, Lamennais a une certaine intuition des grands mouvements de l’humanité », un pressentiment que bien des politiques réputés habiles et qui de près le méprisaient comme visionnaire n’avaient pas.

1928. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Si j’avais compris, dès le commencement, qu’aimer un mari qui n’était pas aimable, ni ne se donnait aucune peine pour l’être, était une chose difficile, sinon impossible, au moins lui avais-je, et à ses intérêts, voué l’attachement le plus sincère qu’un ami, et même un serviteur, peut vouer à son ami et son maître ; mes conseils avaient toujours été les meilleurs dont j’avais pu m’aviser pour son bien ; s’il ne les suivait pas, ce n’était pas ma faute, mais celle de son jugement qui n’était ni sain ni juste.

1929. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Je sais de nos jours un bien spirituel adversaire de Bossuet, qui n’a cessé depuis des années de trouver et de semer sur lui des mots piquants et justes.

1930. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

… Ne serait-il pas juste de s’occuper un peu de cette race, après tout intéressante et qui en vaut une autre ?

1931. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Tous les critiques distingués en leur temps, je parle des critiques praticiens qui, comme des médecins vraiment hippocratiques, ont combattu les maladies du jour et les contagions régnantes, La Harpe, le docteur Johnson, ont été doués de ce sens juste et vif que la nature sans doute accorde, mais qu’on développe aussi, et que plus d’un esprit bien fait peut, jusqu’à un certain point, perfectionner en soi.

1932. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

De justes et prudentes satis-factions données en détail empêchent les griefs de grossir et de s’irriter jusqu’à l’extrême.

1933. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre III »

. — Essoufflement rapide, une « toux nerveuse, déchirante, aride, commençant juste à telle heure, durant un nombre de minutes toujours égal, le réveilla, l’étrangla au lit ».

1934. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Hérodote, qui vivait presque à la même époque, raconte le juste et l’injuste, comme les présages et les oracles ; le crime lui paraît de mauvais augure, mais ce n’est jamais par sa conscience qu’il en décide.

1935. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

La raison de ce jugement inique ou juste, c’est que les hommes ne voient aucun genre d’utilité générale à encourager les succès des femmes dans cette carrière, et que tout éloge qui n’est pas fondé sur la base de l’utilité, n’est ni profond, ni durable, ni universel.

1936. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

On ne craindra pas les systématiques : ce sont les esprits puissants, qui ont eu la vision et comme l’hallucination d’une idée juste.

1937. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Il faut prendre garde aussi que certains traits de leur vie, qui nous laisseraient indifférents si nous les rencontrions dans une vie d’homme, ne nous disposent à la rigueur ou à trop d’indulgence et que nous ne soyons induits à trop bien traiter celles qui ont été vertueuses et trop mal celles qui ne l’ont pas été — à moins que ce ne soit tout juste le contraire.

1938. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Le trait caractéristique de don Juan, c’est l’émotion auprès de celles-ci, émotion profonde, naïve, sincère, égale et peut-être supérieure en intensité à l’émotion réglée des hommes qui mêlent l’idée du devoir aux choses de l’amour, encourant par là le juste anathème du poète !

1939. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

Qu’y a-t-il au juste dans son fait ?

1940. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

Je sais maintenant que Paul Verlaine avait tenu la plus grande et la plus juste place dans l’admiration et la sympathie des écrivains nouveaux.

1941. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Seconde partie. » pp. 35-56

Que peuvent-ils contre ton cœur dont le témoignage consolant te récompense d’avoir suivi ce qui étoit juste & grand ?

1942. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Il faut être juste : jamais on n’a vécu plus à l’aise que de 1830 à 1848, et nous attendrons longtemps peut-être un régime qui puisse permettre une aussi honnête part de liberté.

1943. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

La forteresse était juste à la limite des états de Hâreth et d’Antipas.

1944. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

La conscience morale de l’homme du peuple est vive et juste, mais instable et inconséquente.

1945. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

Le chien qui, le matin, dépense en courses folles sa surabondance d’activité, ne suit que son instinct ; mais c’est juste au moment où il est épuisé que le besoin de nourriture se fait sentir, et qu’il lui faudrait agir pour s’en procurer.

1946. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre IV : La Volonté »

Les actions réflexes, les actes habituels sont de cette nature, « Les actes volontaires se distinguent des actions réflexes par l’intervention d’une conscience, et le phénomène est très remarquable, en ce qu’il nous introduit, pour ainsi dire, dans un nouveau monde Nous sommes même libres, si cela nous plaît, de dire que l’esprit est une source de puissance ; mais nous devons alors entendre par esprit la conscience jointe à tout le corps, et nous devons aussi être prêts à admettre que l’énergie physique est la condition indispensable ; la conscience, la condition accidentelle187. » V « Tout ce qui a été exposé jusqu’ici188 relativement aux actions volontaires des êtres vivants, implique la prédominance d’une uniformité ou d’une loi dans cette classe de phénomènes, en supposant toutefois une complication de nombreux antécédents qui ne sont pas toujours parfaitement connus. » La pratique de la vie s’accorde en général avec cette théorie : nous prédisons la conduite future de chacun d’après son passé ; nous appelons Aristide un juste, Socrate un héros moral, Néron un monstre de cruauté.

1947. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XV, l’Orestie. — les Choéphores. »

Alors le juste deuil des ancêtres et des pères pousse de toutes parts les enfants à la vengeance. » II. — Caractère du choeur des Choéphores. — La prière d’Électre. — Le frère et la soeur.

1948. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Ajoutons encore à cette addition la ronde et brave figure du notaire Aristide Fressart, un type de bourgeois bourgeoisant, fin comme l’ambre, sous son écorce vulgaire, mêlant, à la plus juste dose, les habiletés professionnelles aux vertus domestiques.

1949. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

Quelques censeurs ont voulu dire que, dans les justes proportions de la beauté, on pouvait me trouver la lèvre du dessous un peu trop avancée.

1950. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Quand la santé résiste aux souffrances physiques, le courage apprend bientôt à les mépriser, surtout quand il est soutenu par l’idée de Dieu, par l’espérance d’une autre vie ; mais j’avoue que le courage m’abandonnait en voyant succomber sous mes yeux des amis, des compagnons d’armes, qu’on appelle, à si juste titre, la famille du colonel, et qu’il semblait ici n’avoir été appelé à commander que pour présider à leur destruction.

1951. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Ce motif a déjà transpire dans le public, et le public a deviné juste.

1952. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre IV. Critique »

Nous trouvons juste que quelqu’un parle quand tous souffrent.

1953. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Flourens ne peuvent pas aller jusque-là, car il est bien difficile de savoir au juste ce qui se passe dans une tête de poule ou de pigeon, et affirmer que les facultés disparaissent ou reparaissent toutes à la fois dépasse peut-être ce que notre science sait de la psychologie des poules.

1954. (1915) La philosophie française « I »

Il est juste de reconnaître que les Anglais y ont contribué pour une part plus large encore, et que la doctrine de Locke n’avait pas été sans influence sur l’idéologie française.

1955. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

Libanius, sous un gouvernement plus juste, put parler impunément des vertus et des crimes.

1956. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

Je désirerais que Waller, dans une cause plus juste, eût fait de même.

1957. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Pierre Loti, nommé tout juste trois fois ; Que M.  […] oui, c’est juste ! […] Maintenant, il faut être juste, tout n’était pas mauvais, sans rémission, dans la formule naturaliste. […] Mais qu’entendez-vous au juste par « médanisme » ? […] Tout cela, ce sont des mots pas souvent justes.

1958. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

» Tout cela est juste ; et pourtant il me semble que M.  […] pense-t-il, ce que je dis est juste, pourtant ! […] » je connais peu de répliques aussi belles et aussi justes que la réponse du bailli : « Quel intérêt y aurais je ?  […] le bailli : C’est juste. […] Monsieur te rend service en te débarrassant d’une femme qui t’ennuie. — C’est juste !

1959. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Le vicaire, avec son long nez et ses joues creuses, fut peut-être un saint : le chanoine était assurément un juste. Pourtant et ce saint et ce juste eurent leur sensualité. […] Henri Meilhac alliait, dans ses, œuvres faciles, la vérité à la fantaisie et le comique audacieux à l’observation juste ? […] On en trouvera une juste appréciation dans le rapport adressé en 1885 par M.  […] Ils lui firent pourtant, un jour, une réflexion assez juste.

1960. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Malgré toute son énergie, il lui fut impossible d’achever « la ligne commencée. » Le hasard, ou, pour dire plus juste, un concours particulier de circonstances, qui ne saurait en rien intéresser le lecteur, a voulu qu’il nous fût permis de recueillir la tradition la plus précise de ses projets. […] S’il mettait son chapeau, il semblait se couvrir devant le roi comme un grand d’Espagne, il avait une courtoisie hautaine qui le séparait des autres, mais sans les blesser, tant il s’arrêtait juste à la limite où elle serait devenue de la froideur ou de l’impertinence. […] On ne saurait dire mieux ni plus juste, et l’apparition des ballades du poète peut servir à l’appréciation des aquarelles du peintre. […] Ces brigands de la pensée, l’expression est de Philothée O’Neddy, ne ressemblaient pas à de parfaits notaires, il faut l’avouer, mais leur costume où régnaient la fantaisie du goût individuel et le juste sentiment de la couleur, prêtait davantage à la peinture. […] John Bell, l’exact, le positif, le juste selon la loi, avec ses raisonnements pratiques et à peu près irréfutables, excitait autrefois une répulsion violente ; on le haïssait comme un traître de mélodrame tout chargé de noirceurs et de crimes, et lorsque, Barbe-Bleue commercial, il demandait compte à sa femme des quelques livres non justifiées sur le registre, un frisson de terreur parcourait la salle.

1961. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Un déluge de maux couvre la terre, une arche flotte au-dessus des eaux, comme jadis celle qui portait la famille du Juste ; mais cette arche-ci est demeurée vide, nul n’a été digne d’y entrer. » Plus tard, Ballanche revint à une tristesse plus calme. […] De ces premières fautes est née peut-être, par une juste punition, la série ininterrompue des ennuis qui ont usé les ressorts de son âme. […] Ce genre de dépravation, ce vice honteux du cœur, l’affaiblit, l’épuise et conduit à une espèce particulière d’idiotisme qu’on appelle la mélancolie. » Rien de plus juste en même temps que de plus éloquent. […] « Le monde lui semble moins haïssable, et surtout moins occupé de lui nuire… Il redevient juste et même indulgent, et il en arrive à déserter ses raisonnements sévères sur bien des choses. » Cependant il nourrit encore quelques idées excentriques et son mépris pour les hommes n’est pas vaincu pour toujours. […] Elle a pensé que ce genre de vie avait les avantages sans les inconvénients de l’isolement ; et cette opinion est juste sans doute, appliquée à des personnes que la foi soutient dans leur épreuve ; mais Lélia qui, à ce moment de sa vie, déclare qu’elle croit en Dieu, et « qu’elle l’aime d’un amour insensé », n’a cependant pas de lui des notions constantes et sûres.

1962. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

Enfin, « ayant été ballotté et roulé trois ans, dit Burns avec sa verve amère, dans le tourbillon de la procédure, il fut sauvé tout juste des horreurs de la prison par une maladie de poitrine qui, après deux ans de promesses, eut l’obligeance d’intervenir1139. » Afin d’arracher quelque chose aux griffes des gens de loi, les deux fils et les deux filles aînés furent obligés de se porter comme créanciers de la succession pour l’arriéré de leurs gages. […] Il a l’accent âpre, souvent même les phrases de Rousseau, et voudrait « être un vigoureux sauvage », sortir de la vie civilisée, de la dépendance et des humiliations qu’elle impose au misérable. « Il est dur de voir un monsieur que sa capacité aurait élevé tout juste à la dignité de tailleur à huit pence par jour, et dont le cœur ne vaut pas trois liards, recevoir les attentions et les égards qu’on refuse à l’homme de génie pauvre1149. » Il est dur de voir « un pauvre homme, usé de fatigue, tout abject, ravalé et bas, demander à un de ses frères de la terre la permission de travailler. » Il est dur « de voir ce seigneurial ver de terre repousser la pauvre supplique, sans songer qu’une femme qui pleure et des enfants sans pain se lamentent là tout à côté1150. » Quand le vent d’hiver souffle et barre la porte de ses rafales de neige, le paysan collé contre son petit feu de tourbe, pense aux grands foyers largement chauffés des nobles et des riches, « et parfois il a bien de la peine à s’empêcher de devenir aigre en voyant comment les choses sont partagées, comment les plus braves gens sont dans le besoin, pendant que des imbéciles se démènent sur leurs tas de guinées sans pouvoir en venir à bout1151. » Mais surtout le cœur « frémit et se gangrène de voir leur maudit orgueil. » — « Un homme est un homme après tout1152 », et le paysan vaut bien le seigneur. […] Ses autres personnages sont du même goût, un paillasse, une luronne coupeuse de bourses, un pauvre nain racleur de boyau, un chaudronnier ambulant, tous déguenillés, braillards et bohèmes, qui s’empoignent, se rossent, s’embrassent et font trembler les vitres des éclats de leur belle humeur. « Ils vident leurs havre-sacs, ils engagent leurs guenilles. —  Ils gardent tout juste de quoi couvrir leur derrière », et leur chœur monte comme un tonnerre ébranlant les solives et les murs : Au diable ceux que la loi protége ! […] Suis-je juste ou non, et, par-delà les démarches visibles de ma conduite, les mouvements secrets de mon cœur sont-ils conformes à la loi suprême ? 

1963. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

L’univers de Dieu est un patrimoine de saint Pierre un peu plus grand que l’autre, duquel il serait agréable et bon de chasser le pape… La haute louange d’avoir poursuivi un but juste ou noble ne peut lui être accordée sans beaucoup de réserves, et peut même, avec assez d’apparence, lui être refusée. […] Il y a là un grand sentiment. —  Suis-je un homme juste ? […] Ils cherchaient le vrai, le juste, et leurs longues prières, leurs prédications nasales, leurs citations bibliques, leurs larmes, leurs angoisses, ne font que marquer la sincérité et l’ardeur avec lesquelles ils s’y portaient. […] Notre enfer n’est plus, comme sous Cromwell, « la terreur d’être trouvés coupables devant le juste juge », mais la crainte de faire de mauvaises affaires ou de manquer aux convenances.

1964. (1925) Dissociations

C’est donc le vieux proverbe qui aurait raison, s’il n’est pas plus juste de dire que le bonheur est un état de hasard, qu’on le gagne comme on gagne le gros lot à la loterie, qu’on n’en connaît pas les conditions, ni la recette, et que d’ailleurs c’est peut-être un état inconscient, donc qui échappe à notre jugement. […] Et cette vue semble assez juste. […] Rien, en apparence, ne semble plus juste, mais ce n’est peut-être qu’une apparence. […] Ce n’est pas toujours juste.

1965. (1897) Aspects pp. -215

Vous avez si gentiment profité qu’aujourd’hui, par un juste retour, c’est le diable qui vend son âme à l’homme. […] Cela était bien, cela était juste ; la morale publique se manifestait solennelle. […] On y trouve des impressions justes parmi un fatras déplorable. […] Son œuvre, d’ailleurs fort louangée des feuilles publiques et, par conséquent, moins que médiocre, mérite, tout juste, la vente au poids du papier. […] Je choisis à dessein ce poème, parce qu’il est considéré, avec juste raison, comme classique et parce qu’il est un des plus évocatoires que Hugo ait écrit.

1966. (1802) Études sur Molière pp. -355

Mais soyons justes, le dénouement italien n’est-il pas meilleur ? […] Le titre. — Pas juste, en ce qu’il détourne tout à fait de la véritable moralité de la pièce, à moins que Molière n’ait pensé que ses stances sur les devoirs de la femme mariée méritaient les honneurs du titre. […] La comparaison est-elle bien juste ? […] Je ne veux pas trahir son secret en vous disant au juste son âge, mais il n’est pas de la dernière édition, et l’amant de Lucile a tout au plus trente ans ; pourquoi gâter un rôle dont les meilleurs acteurs ont senti toutes les difficultés, même à la fleur de leur âge ? […] Ce n’est pas pour rien que Molière, toujours profond, toujours juste, disait à ses amis les plus intimes : « Si Les Femmes savantes ne me conduisent pas à l’immortalité, je n’y parviendrai jamais. » Lisez la pièce de Molière.

1967. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

Nous n’offensons pas sa chère mémoire en l’avouant ici, car lui-même, quand il eut généreusement déposé les armes après la victoire, reconnaissait devant nous que la sainte colère de la liberté l’avait emporté quelquefois, dans sa jeunesse, au-delà du juste. […] La nécessité d’abréger le rend précis : il a peu de notes, mais il frappe toujours sur la note juste, et la brièveté ajoute à la force du sentiment. […] Je n’avais pas moins déploré la construction illogique et inopinée d’un trône de rechange qui ne portait sur aucun principe, mais qui portait sur de justes mécontentements.

1968. (1900) La culture des idées

Émotion contenue n’est pas plus ridicule qu’émotion dissimulée ; quant à front fuyant, c’est une expression scientifique et très juste qu’il suffit d’employer à propos. […] Si le secret d’ennuyer est le secret de tout dire, le secret de plaire est le secret de dire tout juste ce qu’il faut pour être, non pas même compris, mais deviné. […] Racine offre l’exemple singulier d’un silence de vingt ans coupé juste au milieu par deux œuvres qui n’ont qu’une ressemblance formelle avec celles de sa phase première. […] L’homme n’est pas libre, ni la nature, pas plus que ne sont justes ni l’homme ni la nature. […] C’est un état d’esprit que l’on est convenu d’appeler inférieur ; et c’est juste, quoique la notion d’une loi rigide soit aussi fausse et aussi dangereuse que sa négation même.

1969. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Voilà ce qu’il faut dire pour rester juste envers Parny ; mais les circonstances n’en furent pas moins pour lui un malheur irréparable. […] Le discours de Parny, très-convenable, indique le pli définitif de son esprit, une fois la première fleur envolée : quelque chose de juste, de bien dit, mais d’un peu sec.

1970. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Comme on y sent contre la fortune ce juste et muet mépris qui est la vengeance éternelle des hommes écrasés par l’iniquité de leurs contemporains ! […] Cependant soyons juste : dès le chapitre suivant, où il traite de ceux qui acquièrent la souveraineté par des scélératesses, Machiavel dit nettement sa vraie pensée dans les termes suivants : « En vérité, on ne peut pas dire qu’il y ait de la valeur à massacrer ses concitoyens, à trahir ses amis, à être sans foi, sans pitié, sans religion.

1971. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Comment enfin, à côté des vues les plus pures, les plus justes, les plus vraiment évangéliques, ces taches où l’on aime à voir des interpolations d’un ardent sectaire ? […] La lecture des évangiles suffirait pour prouver que leurs rédacteurs, quoique ayant dans l’esprit un plan très juste de la vie de Jésus, n’ont pas été guidés par des données chronologiques bien rigoureuses ; Papias, d’ailleurs, nous l’apprend expressément 82.

1972. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

À droite, nous apercevons l’échoppe du cordonnier Hans Sachs, surmontée de son enseigne, ombragée de guirlandes de lilas et de sureau en fleur ; l’imposante maison de Pogner s’élève juste en face, exhaussée sur un perron. […] Pour Mendès, cette métaphore du couple et de l’enfantement est le cœur même de la pensée de Wagner ce qui est très juste.

1973. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Je lui ai fait observer que votre talent, votre situation littéraire et la juste renommée acquise par vos longs efforts ne vous permettent pas de vouloir être refusés à un théâtre. […] Et vraiment Zola se rend-il bien compte de cette boîte à convention, de cette machine de carton qu’est le théâtre, de ce tréteau enfin, sur lequel l’avarice bouffe de l’Avare de Molière arrive au point juste d’optique, tandis que l’humaine avarice d’un père Grandet, cette avarice si bellement étudiée, je ne suis pas bien sûr qu’elle fasse là l’effet de l’autre.

1974. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

* * * — Nous faisons aujourd’hui aux jeunes le reproche, et le juste reproche de voir la nature non directement, mais à travers les livres de leurs devanciers. […] Une des choses qui, dans mon enfance, m’ont impressionné le plus, c’était de voir mon père donner le nombre de sous juste, pour la chaise sur laquelle il s’asseyait, pour le journal qu’il achetait, etc., etc.

1975. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Ces trois hommes, attentifs au récit du juste résigné, essuyant leurs yeux des larmes de l’admiration et de l’enthousiasme, me faisaient penser à trois sages d’Athènes, conversant sur la nature et sur Dieu, assis sous les oliviers de l’Hymète. […] D’ailleurs, une réflexion juste m’a toujours paru condamner ces morts d’ostentation ou d’impatience.

1976. (1914) Boulevard et coulisses

Car vous ne faites que des articles humoristiques, et l’humour ne sera pas à la mode cet hiver. » Et c’est là que je commençai à voir combien les prédictions de réminent directeur du Gaulois étaient justes dans leur forme concise et pittoresque. […] Lorsqu’on décréta l’abolition de la censure, on n’eut pas l’intention, il faut être juste, d’encourager la pornographie, la diffamation, la grossièreté.

1977. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Il suffit d’ailleurs, pour montrer combien de telles impressions sont peu durables, de rappeler que la plus grande découverte qui ait jamais été faite par l’homme a été attaquée par Leibniz lui-même « comme subversive de la religion naturelle, et par conséquent de la religion révélée. » Un théologien célèbre m’écrivait un jour « qu’il avait appris par degrés à reconnaître que c’est avoir une conception aussi juste et aussi grande de la Divinité, de croire qu’elle a créé seulement quelques formes originales, capables de se développer d’elles-mêmes en d’autres formes utiles, que de supposer qu’il faille un nouvel acte de création pour combler les vides causés par l’action de ses lois. » On peut se demander pourquoi presque tous les plus éminents naturalistes et géologues ont rejeté cette idée de la mutabilité des espèces. […] Comme les espèces se forment et s’éteignent par des causes toujours actuelles, mais lentement agissantes, et non par des actes miraculeux de création et par des catastrophes ; que les relations d’organisme à organisme, les plus importantes de toutes les causes de changement pour les êtres vivants, sont presque indépendantes de l’altération, même soudaine, des conditions physiques, le progrès d’un seul être décidant du progrès ou de la destruction des autres ; il s’ensuit que la somme des changements organiques dans les fossiles de formations consécutives peut probablement servir de juste mesure du laps de temps écoulé entre elles.

1978. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

J’ai assez fait ressortir ce qui lui manquait pour atteindre au grand et à l’excellent ; il serait encore à souhaiter, malgré tout, qu’il y eût beaucoup de gens d’esprit aussi sensés, de caractères hardis aussi prudents et aussi positifs dans l’application, de facilités rapides aussi fermes et précises, aussi aptes à quantité d’emplois justes et sûrs.

1979. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Cette noble idée de gloire se confondait chez Villehardouin, et chez les plus généreux des croisés, avec celle de gagner le bonheur dans l’autre vie par le juste et pieux emploi de leur force ici-bas.

1980. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Le grand service que le président rendit à Mayenne, et dont celui-ci aurait dû mieux profiter, ce fut de l’éclairer au juste sur les intentions de l’Espagne et de Philippe II : les ministres et agents espagnols en France en avaient toujours fait mystère au duc, afin de se mieux servir de lui et de l’abuser.

1981. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Fidèle à ces principes, suivez votre goût pour les lettres, et vous obtiendrez des gens de bien une sanction sans laquelle les plus grands talents n’ont rien qui soit digne d’être envié. » Certes, celui qui fait ainsi parler les grands esprits, et qui met dans leur bouche un sens si juste avec des paroles si complètes, est lui-même de leur postérité à bien des égards, et, si on ne le cite qu’au second rang, il ne fait pas d’injure au premier.

1982. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

À un certain endroit un pont, d’une seule arche se présente, jeté sur le gave, à quatre-vingt-dix pieds environ au-dessus du torrent : « Ce pont lui-même, antique et dégradé, revêtu de lierre qui pend de sa voûte en rustiques festons, a pris en quelque sorte l’uniforme de la nature, et a cessé d’être dans ce sauvage tableau un objet étranger. » L’uniforme de la nature est un de ces traits maniérés ou affectés qui se rencontrent quelquefois chez Ramond, mais qui ne sauraient compromettre le juste effet des ensembles.

1983. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

Montluc n’était pas l’homme de ces justes milieux.

1984. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Ce sont là de rares moments dans sa vie de roi trop asiatique et trop idolâtré : il n’est que plus juste d’en tenir compte.

1985. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Voici un livre dont j’aurais dû parler depuis longtemps, d’abord parce qu’il est consacré à la mémoire d’une femme qui est restée charmante et unique dans la pensée de tous ceux qui l’ont connue et qu’elle a honorés de sa bienveillance, ensuite parce que c’est le livre qui, le mieux fait pour la rappeler fidèlement aux amis qui l’ont regrettée et qui la regrettent encore, est le plus propre à donner d’elle une juste idée, une idée approchante du moins, aux générations curieuses qui n’avaient su jusqu’ici que son nom.

1986. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

N’est-ce pas là un récit charmant, qui donne juste le ton et qui en dit plus que toutes les réflexions ne pourraient faire ?

1987. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Entendez tout cela comme il convient, c’est-à-dire sobrement, et dans la juste application à notre sujet.

1988. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

. — Quand on a dit de Napoléon que c’était un homme de granit, le mot était juste, surtout de son corps.

1989. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Par les traductions et les analyses dont se compose ce volume, on peut se faire une idée juste de cette face du talent de Cervantes.

1990. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Il avait des connaissances et de l’aptitude au travail ; mais il manquait quelquefois de ce calme d’une tète froide qui ne se laisse point accabler sous le poids des affaires, et son âme n’était pas de la trempe qu’il aurait fallu pour soutenir toujours les mouvements nobles et justes de son cœur contre les volontés absolues de son maître.

1991. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Plus tard, je l’ai lu, j’ai été plus juste ; j’apprécie surtout son livre des Quatre Concordats.

1992. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Quelques-uns vont plus loin : en présence du spectacle qui se déroule depuis une quarantaine d’années environ, ils sont saisis d’un redoublement d’ardeur, d’une espérance, d’une audace toutes nouvelles : il leur semble qu’une direction plus juste, des plus salutaires en même temps que des plus grandioses, soit imprimée a l’humanité, et qu’elle ait désormais une mission à accomplir plus nette, mieux définie, et digne à la fois de la passionner, de l’enflammer, si elle sait la comprendre.

1993. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

J’y existe, comme je l’ai toujours été, étranger à toutes les discussions et à tous les intérêts de parti, et n’ayant pas plus à redouter devant les hommes justes la publicité d’une seule de mes opinions politiques que la connaissance d’une seule de mes actions… » Sa réclamation étant restée vaine, il s’embarqua en ce temps pour les États-Unis.

1994. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

Dira-t-on même : « Dans ceci il ne faisait que préparer… les malheurs l’ont empêché… » Excepté quelques amis, qui se souciera d’être juste ?

1995. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Il est encore une observation importante contre les systèmes nouveaux dont on veut faire une secte ; l’esprit humain marche trop lentement, pour qu’une suite quelconque d’idées justes puisse être trouvée à la fois.

1996. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Arlequin, comme de juste, donne la préférence au macaroni.

1997. (1890) L’avenir de la science « XII »

Car, en abordant un ordre de recherches, on ne peut deviner par avance ce qui en sortira, pas plus qu’on ne sait au juste, en creusant une mine, les richesses qu’on y trouvera.

1998. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

Jésus refusa avec une juste fierté d’entrer dans de longues explications.

1999. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Non seulement le burlesque est renvoyé à la province, mais on essaie de mettre partout noblesse et solennité  ; on ne pardonne pas le sac de Scapin à l’auteur du Misanthrope ; et si Boileau s’amuse, comme Scarron, à écrire une parodie d’épopée, il compose un poème héroï-comique, où, par un procédé qui est juste l’inverse de celui de son devancier, il pare et drape d’un style pompeux une mesquine querelle de chanoines.

2000. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

Tout cela est juste, sauf pourtant ces mornes suants de chaleur qui sont une invention pittoresque, et qui jurent désagréablement avec l’idée calme et reposée de Paul et Virginie, de même que tout à l’heure la traduction trop amollie de M. de Lamartine jurait avec l’idée pure d’une figure de Raphaël.

2001. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

De nos jours, en restituant le vrai texte de Pascal, en donnant ses phrases dans toute leur simplicité, dans leur beauté ferme et précise, et aussi dans leur hardiesse de défi et leur familiarité parfois singulière, on est revenu à un point de vue plus juste et nullement hostile.

2002. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

Ces chefs-d’œuvre qui firent les délices de la nation, le réconcilièrent avec elle & avec Despréaux : car cet excellent maître, en matière de goût ; fut toujours le premier à revenir de ses idées quand il s’apperçut qu’elles n’étoient pas justes.

2003. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre douzième. »

La note de Coste indique une application assez juste de cet Apologue.

2004. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Quelquefois enfin j’ai pris la liberté d’altérer un peu le sens, quand il m’a paru présenter une image ou une idée puérile ; car ma juste admiration pour Tacite ne m’aveugle pas jusqu’au point de me fermer les yeux sur un petit nombre d’endroits où il me paraît au-dessous de lui-même.

2005. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Seconde partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère de la littérature et des arts » pp. 326-349

Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère de la littérature et des arts Toute théorie de l’avenir ne peut reposer que sur la juste appréciation du passé ; mais aujourd’hui cette première donnée nous manque presque entièrement.

2006. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Mais, pour cette fois, la Gloire a touché juste.

2007. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Une juste réaction se manifeste à ce sujet chez les anthropologistes eux-mêmes : ils abandonnent les ambitions dangereuses de l’ancienne anthropologie, Ils s’aperçoivent enfin que la prétention est abusive qui veut trouver, dans une préformation anatomique, la cause d’actes sociologiquement définis, comme le vol ou le meurtre37, a fortiori d’idées nées dans et pour la société, comme l’idée de l’égalité des hommes.

2008. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

Qu’on plonge dans le bain musical, pour la faire passer à la vérité et à la vie, cette notation juste de M. 

2009. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Un conquérant qui aimait la gloire, mais plus avide de renommée que juste, s’étonnait de ce qu’un homme vertueux, et que tout le peuple respectait, ne parlait jamais de lui : il le manda. « Pourquoi, dit-il, les hommes les plus sages se taisent-ils sur mes conquêtes ? 

2010. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Dans ces termes, l’objection n’est peut-être pas juste, car, dans le kantisme, ce que nous appelons la nature est déjà l’œuvre de l’esprit, non sans doute de la pensée individuelle, mais de la pensée humaine universelle présente en chaque conscience individuelle ; et l’esprit individuel ne fait que retrouver ce que la raison construit et unifie a priori. […] On distingue le juste et le faux emploi de la méthode des limites. […] Malgré de nombreux exemples de conciliation entre l’atomisme et les croyances religieuses, il paraît juste de dire que l’atomisme, d’une manière générale, reste défavorable aux idées de providence et de liberté. […] Est-il juste de dire que la diversité des fonctions est toujours un principe de tolérance mutuelle ? […] Mais une juste notion des lois naturelles lui rend la possession de lui-même, en même temps qu’elle lui montre que sa liberté peut être efficace et diriger les phénomènes.

2011. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

On n’a jamais vu en Angleterre une plus copieuse et une plus véhémente analyse, une si pénétrante et si infatigable décomposition d’une idée en toutes ses parties, une logique plus puissante, qui enserre plus rigoureusement dans un réseau unique tous les fils d’un même sujet : Quoiqu’il ne puisse arriver à Dieu ni bien ni avantage qui augmente sa félicité naturelle et inaltérable, ni mal ou dommage qui la diminue (car il ne peut être réellement plus ou moins riche, ou glorieux, ou heureux qu’il ne l’est, et nos désirs ou nos craintes, nos plaisirs ou nos peines, nos projets ou nos efforts n’y peuvent rien et n’y contribuent en rien), cependant il a déclaré qu’il y a certains objets et intérêts que par pure bonté et condescendance il affectionne et poursuit comme les siens propres, et comme si effectivement il recevait un avantage de leur bon succès ou souffrait un tort de leur mauvaise issue ; qu’il désire sérieusement certaines choses et s’en réjouit grandement, qu’il désapprouve certaines autres choses et en est grièvement offensé, par exemple qu’il porte une affection paternelle à ses créatures et souhaite sérieusement leur bien-être, et se plaît à les voir jouir des biens qu’il leur a préparés ; que pareillement il est fâché du contraire, qu’il a pitié de leur misère, qu’il s’en afflige, que par conséquent il est très-satisfait lorsque la piété, la paix, l’ordre, la justice, qui sont les principaux moyens de notre bien-être, sont florissants ; qu’il est fâché lorsque l’impiété, l’injustice, la dissension, le désordre, qui sont pour nous des sources certaines de malheur, règnent et dominent ; qu’il est content lorsque nous lui rendons l’obéissance, l’honneur et le respect qui lui sont dus ; qu’il est hautement offensé lorsque notre conduite à son égard est injurieuse et irrévérencieuse par les péchés que nous commettons et par la violation que nous faisons de ses plus justes et plus saints commandements, de sorte que nous ne manquons point de matière suffisante pour témoigner à la fois par nos sentiments et nos actions notre bon vouloir envers lui, et nous nous trouvons capables non-seulement de lui souhaiter du bien, mais encore en quelque façon de lui en faire en concourant avec lui à l’accomplissement des choses qu’il approuve et dont il se réjouit831. […] La chaire avait le sans-façon et la rudesse du théâtre, et, dans cette peinture des braves gens énergiques que le monde taxe de mauvais caractères, on retrouvait la familiarité âcre du Plain-Dealer. « Certainement il y a des gens qui ont une mauvaise roideur naturelle de langue, en sorte qu’ils ne peuvent point se mettre au pas et applaudir ce vaniteux ou ce hâbleur qui fait la roue, se loue lui-même et conte d’insipides histoires à son propre éloge pendant trois ou quatre heures d’horloge, pendant qu’en même temps il vilipende le reste du genre humain et lui jette de la boue. —  Il y a aussi certains hommes singuliers et d’un mauvais caractère qu’on ne peut engager, par crainte ni espérance, par froncement de sourcils ni sourires, à se laisser mettre sur les bras quelque parente de rebut, quelque nièce délaissée, mendiante, d’un lord ou d’un grand spirituel ou temporel. —  Enfin il y a des gens d’un si mauvais caractère, qu’ils jugent très-légitime et très-permis d’être sensibles quand on leur fait tort et qu’on les opprime, quand on diffame leur bonne renommée et quand on nuit à leurs justes intérêts, et qui par surcroît osent déclarer ce qu’ils pensent et sentent, et ne sont point des bêtes de somme pour porter humblement ce qu’on leur jette sur le dos, ni des épagneuls pour lécher le pied qui les frappe et pour remercier le bon seigneur qui leur confère toutes ces faveurs d’arrière-train835. » Dans ce style saugrenu, tous les coups portent : on dirait un assaut de boxe où les ricanements accueillent les meurtrissures. […] Les formes ne les ont point polis ; ils sortent intacts des mains de la nature, âpres dans leur hardiesse native de cœur, fidèles à ce qu’ils croient le juste, supérieurs à la contrainte. […] Celle-ci n’est point vile cependant, car elle se croit au service du juste.

2012. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Le juste accord se trouverait plutôt selon moi dans Gluck et dans Mozart, dans Debussy et dans Monteverde. […] Ce monde d’exaltés met encore le mal et le bien à leur juste place et il les reconnaît pour tels. […] En vérité, grâce à sa formation classique et à sa sympathie naturelle pour la nouveauté, il se tient au point juste où les deux traditions se croisent. […] Il perd le sens de la synthèse ; il ne maintient plus le juste équilibre entre ce qui est trop rare et ce qui est trop commun, il omet une part de l’homme ; il retourne au jeu subjectif.

2013. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Dans le Comte d’Erfeuil, l’auteur a voulu donner, d’une manière un peu lourde, mais souvent juste, un portrait de la frivole et charmante noblesse française. […] Le pouvoir vrai et juste est délégué par Dieu qui est lui-même roi et père, au roi dans la société et au père dans la famille. […] Geoffroy le premier ramena à sa juste valeur le mérite de Zaïre et de Tancrède. […] Il eût été plus juste de l’appeler Dix-Neuvième Siècle, Romantisme. […] C’est cette difficulté de digestion que Lamartine, dans le discours sur le Retour des Cendres, indiquait en prophète au Français moyen du Juste Milieu.

2014. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Elle commence avec d’Urfé, en 1607 ou 1610 — on ne sait pas au juste, — et elle finit avec Le Sage, qui est en tout un homme du xviie  siècle. […] D’un côté la loi du Christ, de l’autre la loi de nature ; d’un côté, les justes, de l’autre, les libertins, les indifférents, les athées ; jansénisme ou cartésianisme — nous dirions aujourd’hui : rationalisme, — la religion ou le monde. […] Mais on semble toucher plus juste quand on fait observer que ce mot de nature, vague, ondoyant et mal défini, souffre peut-être plusieurs acceptions ; que, s’il en a une dont on puisse aujourd’hui convenir, elle doit différer de celle qu’il avait pour les gens du xviie  siècle ; et, qu’avant de savoir combien elle en diffère, ce serait de l’imprudence que d’inscrire Molière au nombre des philosophes de la nature. […] Et qui ne sait également que ce que Calvin a essayé de fonder à Genève, c’est une république de justes, où la loi civile et politique, expression de la morale chrétienne, fût fondée comme elle sur le dogme du péché originel et de la prédestination ? […] « Je ne pourrai me faire entendre que quand on aura lu les quatre chapitres suivants. » Il y a un mot plus juste que celui de Mme du Deffand pour caractériser ce genre d’esprit, avec la nuance propre de gravité qui persiste sous l’affectation, et ce mot est de Voltaire : « C’est faire le goguenard, disait-il, dans un livre de jurisprudence universelle ».

2015. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

M. de Maupassant y doit réussir autant et mieux que personne, car il a l’œil juste et l’intuition sûre. […] Enfin, il était assez habile pour se montrer juste et humain quand il le fallait. […] Quel poète aurait trouvé ce ton si juste, ces accents si vrais de colère et de bonne haine ? […] Il commence l’office par la fin et continue tout à rebours pour terminer juste à minuit. […] C’est là, sans doute, une impression vague, formée du dehors et du lointain, qui n’est ni tout à fait juste, ni tout à fait fausse.

2016. (1903) La pensée et le mouvant

Qu’est-ce au juste que le présent ? […] Le « présent » occupe juste autant de place que cet effort. […] Cet espace immobile et vide, simplement conçu, jamais perçu, a tout juste la valeur d’un symbole. […] Elle se donne donc juste ce qu’il faut d’éléments ou de principes pour recomposer avec eux la série indéfinie des objets et des événements. […] Tandis que notre devise à nous est Juste ce qu’il faut, celle de la nature est Plus qu’il ne faut, — trop de ceci, trop de cela, trop de tout.

2017. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Baudelaire n’y voyait-il pas plus juste en regardant une certaine sorte de mélancolie comme l’inévitable produit d’un désaccord entre nos besoins de civilisés et la réalité des causes extérieures ? […] Le livre consacré à Marc-Aurèle a clos cette série d’études religieuses ouverte sur la sublime figure du Juste crucifié. […] Elles sont toutes ingénieuses et souvent bien justes. […] Notre siècle a déjà vu trop souvent les plus nobles doctrines servir d’occasion au déchaînement des pires appétits pour que nous soyons aussi convaincus de la bienfaisance immédiate de la raison — ou, pour dire le mot juste, de ce qui nous semble tel. […] En revanche, les vues générales abondent, toutes ingénieuses, le plus souvent justes, et elles traduisent un constant effort pour dégager quelque loi naturelle des phénomènes moraux.

2018. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

S’il est, en ce moment, l’homme le plus compréhensif de l’Europe, il est juste d’avouer que son absence de sensibilité est remarquable. […] Dans ses justes revendications, comme dans ses erreurs, il fut exalté et sincère, passionné jusqu’à la souffrance. […] Et cela importe, mais il est juste d’avouer qu’il a célébré la Vie, plus qu’il ne l’a créée.

2019. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Je ne dis pas que cela fût juste, mais je dis que cela était. […] Le général Saint-Arnaud arrive en congé à Paris, tout juste à temps pour assister à la révolution de Février (1848), Il y court quelques dangers du côté des quais, et est retenu quelque temps prisonnier à l’Hôtel de ville.

2020. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Un déluge de maux couvre la terre ; une arche flotte au-dessus des eaux, comme jadis celle qui portait la famille du Juste ; mais cette arche-ci est demeurée vide, nul n’a été jugé digne d’y entrer !  […] Je ne voudrais pourtant pas que cette Étude sur Ballanche finît sur un incident tout personnel, et pour laisser de l’éminent écrivain une idée plus précise encore et plus réelle que je ne pouvais la donner de son vivant, je crois ne pouvoir mieux faire que de traduire de l’anglais une ou deux pages qui le concernent dans un Essai intitulé Madame Récamier, dû à la plume spirituelle et juste de Mme Mohl.

2021. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Le cours de ces eaux est si entrelacé qu’on ne sait au juste si elles vont ou si elles viennent. […] Je lis ou j’écris jour et nuit ; l’un me délasse de l’autre… Mes yeux sont affaiblis par les veilles, ma main est lasse de tenir la plume, mon cœur est rongé par les soucis… J’ai à combattre mes passions ; pour tout ce qui tient à la fortune, je suis dans un juste milieu, également éloigné des deux extrêmes.

2022. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

XI Le jeune Horace, son compagnon d’armes, son poète et son ami, après avoir bien combattu, raisonna plus juste ; il ne s’obstina pas à vouloir pour lui seul une liberté chimérique et une féroce vertu. […] Je m’en suis enorgueilli, et avec juste raison, puisque j’avais su plaire à celui qui sait apprécier l’homme par l’intégrité de sa vie et la pureté de son cœur, et non par l’éclat de sa naissance. » De ce jour Mécène et Horace devinrent inséparables.

2023. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Ces réflexions nous sont suggérées par la lecture de deux intéressants volumes écrits, recueillis et publiés hier par la fille adoptive de madame Récamier (madame Lenormant), et publiés juste à l’heure où ce nom de madame Récamier, naguère célèbre, allait s’enfoncer sans trace sous l’horizon si court des célébrités évanouies. […] Mais soyons justes et compatissants ; si elle ne descendit jamais de ce socle virginal dans les bras d’un Pygmalion, ce ne fut pas, dit-on, la faute de son cœur, ce fut la faute de la nature.

2024. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

car tout désir ne vient pas de l’Esprit-Saint, quelque bon et juste qu’il paraisse à l’homme. […] Cependant je suis juste et très digne de louanges, lorsque j’agis ainsi avec vous.

2025. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

Enfin le général Vaillant est envoyé, et les indications de M. de Munster font gagner la Tchernaia et attaquer Malakoff dans le point juste où il fallait l’attaquer. […] Et chose étrange, l’horreur du dessous est si bien dissimulée sous les draps blancs, la propreté, l’ordre, la tenue, qu’il nous reste de cette visite — c’est très difficile à donner la note juste — quelque chose de presque voluptueux et de mystérieusement irritant ; il nous reste de ces femmes entrevues sur ces oreillers bleuâtres, et transfigurées par la souffrance et l’immobilité, une image qui chatouille sensuellement l’âme et qui vous attire par ce voilé qui fait peur.

2026. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Ce livre raconte en versets, dont chacun est un vers qui trouve son écho dans un autre vers, les pensées de Dieu, la création du monde en six grandes journées de l’ouvrier divin, qui sont peut-être des semaines de siècles ; la naissance du premier homme, son ennui solitaire dans l’isolement de son être, qui n’est qu’un morne ennui sans l’amour ; l’éclosion nocturne de la femme, qui sort, comme le plus beau des rêves, du cœur de l’homme ; les amours de ces deux créatures complétées l’une par l’autre dans ce premier couple dont le fils et les filles seront le genre humain ; leurs délices dans un jardin à demi céleste ; leur pastorale enchantée sous les bocages de l’Éden ; leur fraternité avec tous les animaux aimants qui parlaient alors ; leur liberté encore exempte de chute ; leur tentation allégorique de trop savoir le secret de la science divine, secret réservé seul au Créateur, inhérent à sa divinité ; leur faute, de curiosité légère chez la femme, de complaisance amoureuse chez l’époux ; leur tristesse après le péché, premier réveil de la conscience, cette révélation par sentiment du bien et du mal ; leur citation au tribunal divin ; les excuses de l’homme pour rejeter lâchement le crime sur sa complice, le silence de la femme, qui s’avoue coupable par les premières larmes versées dans le monde ; leur expulsion ; leur pèlerinage sur la terre devenue rebelle ; la naissance de leurs enfants dans la douleur ; le travail sous toutes les formes, premier supplice de l’humanité ; le premier meurtre faisant boire à la terre le sang de l’homme par la main d’un frère ; puis la multiplication de la race pervertie dans sa source ; puis le déluge couvrant les sommets des montagnes ; une arche sauvant un juste, sa famille, tous les animaux innocents ; puis la vie patriarcale, en familiarité avec des esprits intermédiaires appelés des anges, esprits tellement familiers qu’ils se confondent à chaque instant sur la terre avec les hommes, auxquels ils apportent les messages de Dieu ; puis un peuple choisi de la semence d’Abraham ; des épisodes naïfs et pathétiques, comme ceux de Joseph, de Tobie, de Ruth ; une captivité amère chez les Égyptiens ; un libérateur, un législateur, un révélateur, un prophète, un poète, un historien inspiré dans Moïse ; puis des annales pleines de guerres, de conquêtes, de politique, de liberté, de servitude, de larmes et de sang ; puis des prophètes moitié tribuns, moitié lyriques, gouvernant, agitant, subjuguant le peuple par l’autorité des inspirations, la majesté des images, la foudre de la langue, la divinité de la parole ; puis des grandeurs et des décadences qui montent et descendent de Salomon à Hérode ; puis l’assujettissement aux Romains ; puis un Calvaire, où un prophète plus surnaturel monte sur un autre arbre de science pour proclamer l’abolition de l’ancienne loi, et promulguer pour l’homme, sans acception de tribus, Juifs et païens, une loi plus douce scellée de son sang ; Puis une autre terre et un autre ciel pour l’univers romain devenu l’Europe. […] Énumérez seulement quelques-unes des conditions innombrables de ce qu’on nomme style, et jugez s’il est au pouvoir de la rhétorique de créer dans un homme ou dans une femme une telle réunion de qualités diverses : Il faut qu’il soit vrai, et que le mot se modèle sur l’impression, sans quoi il ment à l’esprit, et l’on sent le comédien de parade au lieu de l’homme qui dit ce qu’il éprouve ; Il faut qu’il soit clair, sans quoi la parole passe dans la forme des mots, et laisse l’esprit en suspens dans les ténèbres ; Il faut qu’il jaillisse, sans quoi l’effort de l’écrivain se fait sentir à l’esprit du lecteur, et la fatigue de l’un se communique à l’autre ; Il faut qu’il soit transparent, sans quoi on ne lit pas jusqu’au fond de l’âme ; Il faut qu’il soit simple, sans quoi l’esprit a trop d’étonnement et trop de peine à suivre les raffinements de l’expression, et, pendant qu’il admire la phrase, l’impression s’évapore ; Il faut qu’il soit coloré, sans quoi il reste terne, quoique juste, et l’objet n’a que des lignes et point de reliefs ; Il faut qu’il soit imagé, sans quoi l’objet, seulement décrit, ne se représente dans aucun miroir et ne devient palpable à aucun sens ; Il faut qu’il soit sobre, car l’abondance rassasie ; Il faut qu’il soit abondant, car l’indigence de l’expression atteste la pauvreté de l’intelligence ; Il faut qu’il soit modeste, car l’éclat éblouit ; Il faut qu’il soit riche, car le dénûment attriste ; Il faut qu’il soit naturel, car l’artifice défigure par ses contorsions la pensée ; Il faut qu’il coure, car le mouvement seul entraîne ; Il faut qu’il soit chaud, car une douce chaleur est la température de l’âme ; Il faut qu’il soit facile, car tout ce qui est peiné est pénible ; Il faut qu’il s’élève et qu’il s’abaisse, car tout ce qui est uniforme est fastidieux ; Il faut qu’il raisonne, car l’homme est raison ; Il faut qu’il se passionne, car le cœur est passion ; Il faut qu’il converse, car la lecture est un entretien avec les absents ou avec les morts ; Il faut qu’il soit personnel et qu’il ait l’empreinte de l’esprit, car un homme ne ressemble pas à un autre ; Il faut qu’il soit lyrique, car l’âme a des cris comme la voix ; Il faut qu’il pleure, car la nature humaine a des gémissements et des larmes ; Il faut… Mais des pages ne suffiraient pas à énumérer tous ces éléments dont se compose le style.

2027. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

« Il est juste », écrivait-il à cette époque, « que l’auteur laborieux tire de son travail une rémunération légitime. » Le roi ajouta à cette aisance des gratifications annuelles s’élevant de 500 jusqu’à 1 000  louis pendant huit ans et plus, une charge de gentilhomme ordinaire de sa chambre avec une nouvelle pension de 4 000 livres, et enfin la charge à la fois politique et littéraire d’historiographe de son règne et de ses campagnes, avec Boileau, son collègue et son ami. […] Ils allaient commencer leur lecture, lorsque Mme de Montespan, qui n’était point attendue, entra, et après quelques compliments au roi, en fit de si longs à Mme de Maintenon, que, pour les interrompre, le roi lui dit de s’asseoir, “n’étant pas juste, ajouta-t-il, qu’on lise sans vous un ouvrage que vous avez vous-même commandé”.

2028. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

La logique est l’art de penser juste, ou de faire un usage légitime de ses sens et de sa raison, de s’assurer de la vérité des connaissances qu’on a reçues, de bien conduire son esprit dans la recherche de la vérité, et de démêler les erreurs de l’ignorance ou les sophismes de l’intérêt et des passions : art sans lequel toutes les connaissances sont peut-être plus nuisibles qu’utiles à l’homme, qui en devient ridicule, sot ou méchant. […] « La géométrie ne redresse que les esprits droits », répondait l’abbé Terrasson à un qui l’avait faux et apprenait la géométrie pour apprendre à raisonner juste. » (Le même, Supplément à l’ouvrage de Pénélope.)

2029. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Le méchant fuit la solitude ; l’homme juste la cherche. […] Voilà une description fort simple, une composition qui ne l’est pas moins et dont il est toutefois très-difficile de se faire une juste idée, sans l’avoir vue.

2030. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Baudelaire en convient implicitement lui-même par cette appréciation juste et profonde du talent de son auteur : « Aucun homme n’a raconté avec plus de magie les exceptions de la vie humaine et de la nature ; — les ardeurs de curiosité de la convalescence ; — les fins de saisons chargées de splendeurs énervantes, les temps chauds, humides et brumeux, où le vent du sud amollit et détend les nerfs comme les cordes d’un instrument, où les yeux se remplissent de larmes qui ne viennent pas du cœur ; — l’hallucination… l’absurde s’installant dans l’intelligence et la gouvernant avec une épouvantable logique ; — l’hystérie usurpant la place de la volonté, la contradiction établie entre les nerfs et l’esprit, et l’homme désaccordé au point d’exprimer la douleur par le rire. » Si on fait le compte de ces puissances, on se demande où, dans tout cela, se trouve la place de l’âme humaine. […] Mais à dater du livre d’Émile Hennequin, Edgar Poe, qui fut moins le bourreau de ses vices que la victime des vices de son pays, apparaît dans une lumière plus juste.

2031. (1739) Vie de Molière

Louis XIV, qui avait un goût naturel et l’esprit très juste, sans l’avoir cultivé, ramena souvent, par son approbation, la cour et la ville aux pièces de Molière. […] Ce peu d’empressement qu’on a d’un côté pour Le Misanthrope, et de l’autre la juste admiration qu’on a pour lui, prouve peut-être plus qu’on ne pense, que le public n’est point injuste.

2032. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Chantez donc encore une fois. » Tiècelin, qui veut avoir le prix du chant, s’y met tout entier ; il s’écrie à haute haleine, mais il ne sut si bien faire, quelque peine qu’il se donnât, que son pied droit ne s’en desserrât et que le fromage ne tombât à terre, tout juste devant les pieds de Renart. — Vous croyez la fable finie ; pas le moins du monde.

2033. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

C’est là un noble et juste emploi de la statuaire.

2034. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

D’autres historiens réputés plus sages, des critiques judicieux et fins, n’ont pas fait la juste part à cette veine puissante.

2035. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

Et tout d’abord il évince Duclos et le raye de la liste des grands moralistes ; il le réduit à n’être qu’un observateur de société, et le portrait qu’il donne de lui serait encore le plus piquant et le plus juste qu’on pourrait aujourd’hui tracer.

2036. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Le président Jeannin, dès son arrivée à La Haye, vit juste et exerça une action, qui est très sensible quand on lit la suite des dépêches, sur les principaux personnages de qui la solution dépendait, sur Henri IV tout le premier, sur Barneveld, sur le prince Maurice lui-même.

2037. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Avoir vu, ne fût-ce qu’un jour, Richelieu tout-puissant dans la pourpre, et bientôt après voir la Fronde, la guerre civile déchaînée et l’anarchie, ce fut pour Bossuet un cours abrégé de politique dont il tira la juste leçon : mieux vaut certes un maître que mille maîtres, et mieux vaut encore que le maître puisse être le roi lui-même que le ministre.

2038. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

La raison m’en paraît simple, et je veux chercher à vous l’expliquer ; je ne sais si elle vous paraîtra juste.

2039. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Cette réflexion est la première qui s’offre quand il s’agit de l’écrivain dont je voudrais aujourd’hui donner une juste idée ; Ramond, mort le 14 mai 1827, membre de l’Académie des sciences, objet d’un éloge historique de Cuvier, apprécié de tous les savants comme historien et géographe des montagnes, mais non assez estimé et prisé des littérateurs comme peintre et comme ayant heureusement marié les couleurs de Buffon et de Rousseau aux descriptions précises des De Luc et des Saussure.

2040. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La Divine Comédie de Dante. traduite par M. Mesnard, premier vice-président du Sénat et président à la Cour de cassation. » pp. 198-214

Il ne serait pas juste de ne point compter parmi les puissants stimulants que reçut l’opinion française sur liante, et dans un temps où Fauriel ne travaillait encore que dans l’ombre, les leçons éloquentes de M. 

2041. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Gandar ne pouvait choisir un plus juste et plus manifeste exemple de l’helléniste français par excellence.

2042. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Je ne sais si Bonstetten avait deviné juste et si le secret de la mélancolie de Gray était dans ce manque d’amour ; je le chercherais plutôt dans la stérilité d’un talent poétique si distingué, si rare, mais si avare.

2043. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Toute cette théorie me paraît juste, et elle est la mienne aussi.

2044. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

Ses outrances d’expression, quand elles frappent dans une pensée juste, l’enfoncent et la fixent comme avec des clous d’or ou d’airain.

2045. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

J’ai aimé et j’aime surtout la politique juste et la liberté sous la loi… On m’a quelquefois reproché de ne pas m’associer assez vivement aux impressions publiques.

2046. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Elle est souvent le résultat de mesures justes et précises, non aperçues par le vulgaire, qui ont précédé l’événement.

2047. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

Ville heureuse où l’on est dispensé d’avoir du bonheur, où il suffit d’être et de se sentir habiter ; qui fait plaisir, comme on le disait autrefois d’Athènes, rien qu’à regarder ; où l’on voit juste plus naturellement qu’ailleurs, où l’on ne s’exagère rien, où l’on ne se fait des monstres de rien ; où l’on respire, pour ainsi dire, avec l’air, même ce qu’on ne sait pas, où l’on n’est pas étranger même à ce qu’on ignore ; centre unique de ressources et de liberté, où la solitude est possible, où la société est commode et toujours voisine, où l’on est à cent lieues ou à deux pas ; où une seule matinée embrasse et satisfait toutes les curiosités, toutes les variétés de désirs ; où le plus sauvage, s’il est repris du besoin des hommes, n’a qu’à traverser les ponts, à parcourir cette zone brillante qui s’étend de la Madeleine au Gymnase ; et là, en quelques instants, il a tout retrouvé, il a tout vu, il s’est retrempé en plein courant, il a ressenti les plus vifs stimulants de la vie, il a compris la vraie philosophie parisienne, cette facilité, cette grâce à vivre, même au milieu du travail, cette sagesse rapide qui consiste à savoir profiter d’une heure de soleil !

2048. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Il s’aperçut tout à la fois de combien on était en arrière dans la maison de ses parents sur la marche qu’avaient suivie les arts depuis dix ans, et pressentit tout ce qu’il fallait qu’il connût et qu’il étudiât pour rattraper le gros de l’armée dans laquelle il se trouvait enrégimenté tout à coup. » La remarque est juste, et l’expression aussi : voilà Étienne enrégimenté et enrôlé dans l’armée de David ; c’est là son premier groupe et son premier milieu ; c’est ce qu’il va entendre, embrasser, admirer et puis commenter à merveille : mais que les années s’écoulent, que de nouveaux courants s’élèvent dans l’air, que l’École de David, en se prolongeant, se fige comme toutes les écoles, qu’elle ait besoin d’être secouée, refondue, renouvelée, traversée d’influences rafraîchissantes et de rayons plus lumineux, lui, il ne voudra jamais en convenir ; il y est, il y a été élevé, nourri ; il y a pris son pli, le premier pli et le dernier ; il n’en sortira pas.

2049. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

Il est visible qu’ils n’étudiaient pas ces parties importantes de l’architecture en géométral, mais qu’ils se rendaient un compte très exact et très fin de l’effet perspectif ; c’était véritablement en artistes qu’ils combinaient ces effets… Ces calculs de l’homme doué d’un sentiment juste et délicat de la forme n’entrent pas dans le cerveau du Romain… » Ce n’est certes pas déprécier ces grandes et belles architectures anciennes en vue de celle du Moyen-Âge, que de les différencier ainsi.

2050. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

. — Mais qu’il est donc difficile de garder la juste mesure dans l’admiration comme dans la critique, et quel ingrat métier que celui qui consiste à venir sans cesse dire gare à tout excès, à vouloir toujours remettre le cavalier d’aplomb sur sa monture !

2051. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Édouard Lefebvre, en croyant devoir tenter une démarche de conciliation, avait donc agi dans le sens des désirs de l’Empereur et avait deviné juste.

2052. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

J’ai, sans paraître téméraire, Juste la taille militaire ; Mais en largeur, c’est différent.

2053. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Le désordre des assonances dans l’ode de Malherbe convient au trouble réel de la poésie lyrique ; mais le vers épique doit avoir une tout autre constitution ; il doit pouvoir atteindre à tous les effets du dithyrambe sans se permettre aucun trouble apparent ; il faut qu’il ressemble à ces héros qui ne portent jamais sur leurs visages la marque des combats intérieurs. » La distinction est bien ingénieusement exprimée ; mais il m’est impossible de voir dans l’ode de Malherbe autre chose qu’un ordre majestueux et harmonieux, un concours d’avance réglé de justes consonnances.

2054. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LE COMTE MOLÉ (Réception à l’Académie.) » pp. 190-210

Il est juste de reconnaître que le discours de réception qui est, à proprement parler, le menuet du bal, n’a pas été inventé par Richelieu.

2055. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

La postérité n’est pas du tout ainsi ; il lui est parfaitement indifférent, à elle, qu’on ait cultivé d’une manière estimable, et dans de justes dimensions, les genres en honneur.

2056. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

Heureux si nous trouvions, comme à l’époque de l’invasion des peuples du Nord, un système philosophique, un enthousiasme vertueux, une législation forte et juste, qui fût, comme la religion chrétienne l’a été, l’opinion dans laquelle les vainqueurs et les vaincus pourraient se réunir !

2057. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

Il ne serait pas juste de vanter autant la puissance intérieure de l’homme, si ce n’était pas, par la nature et le degré même de cette force qu’on doit juger de l’intensité des peines de la vie.

2058. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Quand la démolition sera commencée, bien mieux, quand elle sera faite, ils ne jugeront pas plus juste.

2059. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Le moraliste ne regarde pas si elle est utile ou nuisible, bien ou mal conduite, liée à cet événement ou à cet autre, produite en ce lieu, à ce moment, à cette occasion, par cette personne, mais si elle est juste ou injuste ; il écarte ce cortège obscur de caractères accessoires et découvre dans la foule le droit, qui s’y cachait confondu.

2060. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

On ne peut détacher le regard du portrait ; on croit entendre sa voix douce et prévenante qui vous parle ; il n’a rien à cacher ; son timbre, juste et franc, sonne la sincérité avec le mot.

2061. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Ils forceront l’estime du parti philosophique : d’autant qu’ils sont trop justes, trop modérés, trop scrupuleux pour être dangereux.

2062. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Lemaître, il n’est plus juste de dire que le théâtre d’aujourd’hui n’a pas d’œuvres : et il a, de plus, des promesses certaines, précises, prochaines977.

2063. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Vous voyez comment sous cette plume une impression juste et neuve s’enfle, s’exagère, se tourne en fantaisie.

2064. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

Ô locataire du moulin de Gaspard Mitifio, conteur des contes du lundi, ami du petit Jack et de la petite Désirée, compatriote infidèle de Tartarin, de Numa et de Bompard, historiographe du Nabab et de la reine Frédérique, ô magicien qui savez unir dans une si juste mesure et par un secret si rare la vérité, la fantaisie et la tendresse, ah !

2065. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Maurice Maeterlinck n’est pas un simple fantastique, et cet art n’est chez lui qu’une méthode, plus au juste une expression naturelle de son tempérament.

2066. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Le mot juste ne lui venait pas toujours qu’il remplaçait soit par le terme anglais, soit par un équivalent français, hasardé au petit bonheur, et dont le choix n’était pas toujours heureux.

2067. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Aussi James Mill n’est-il que juste, quand il dit « qu’il n’y a aucun élément de la conscience qui demande plus d’attention que celui-là ; quoique jusqu’à ces derniers temps il ait été déplorablement complètement oublié. » C’est une particularité de notre constitution que quand nos sensations cessent par l’absence de leurs objets, quelque chose reste.

2068. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

On trouve dans sa correspondance de cette époque, dans une lettre au duc de Richelieu, qui est juste de cette date, une vive recommandation pour Mme de Graffigny, qui avait été fort liée avec Mlle de Guise, devenue duchesse de Richelieu.

2069. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

et déjà blanchie avant l’âge ; quand on l’entend, dans la plus longue et la plus remarquable de ses lettres à Élisabeth (8 novembre 1582), lui redire pour la vingtième fois : « Votre prison, sans aucun droit et juste fondement, a jà détruit mon corps, duquel vous aurez bientôt la fin s’il y continue guère davantage, et n’auront mes ennemis beaucoup de temps pour assouvir leur cruauté sur moi : il ne me reste que l’âme, laquelle il n’est en votre puissance de captiver » ; quand on a entendu ce mélange de fierté et de plainte, la pitié pour elle l’emporte, le cœur a parlé ; ce doux charme dont elle était douée, et qui agissait sur tous ceux qui l’approchaient, reprend le dessus et opère sur nous à distance.

2070. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

(Et ici commence le portrait en forme, dans le goût du temps :) Madame avait l’esprit solide et délicat, du bon sens, connaissant les choses fines, l’âme grande et juste, éclairée sur tout ce qu’il faudrait faire, mais quelquefois ne le faisant pas, ou par une paresse naturelle, ou par une certaine hauteur d’âme qui se ressentait de son origine, et qui lui faisait envisager un devoir comme une bassesse.

2071. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Ducis était de cette race de philosophes, d’amis de la retraite et de la Muse, qui n’entendent rien à la politique ni à la pratique des affaires, et qui ont droit de résumer toute leur charte en ces mots : « Quand un homme libre pourrait démêler dans les querelles des rois (rois ou chefs politiques de tout genre) le parti le plus juste, croyez-vous que ce serait à le suivre que consiste la plus grande gloire ? 

2072. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Geoffroy, en de sévères et justes articles qu’il a insérés dans L’Année littéraire (1789), a noté, et point du tout en homme de collège, ces graves défauts et ces lacunes de l’ouvrage.

2073. (1903) Zola pp. 3-31

Le maître est descendu au fond de l’immondice. » Soustraction faite de la véhémence inséparable d’une rupture que, du reste, on voulait rendre éclatante, le jugement est presque juste et la condamnation n’est pas imméritée.

2074. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Doué d’une neuve simplicité d’esprit, s’approchant de ses semblables avec une âme à la fois tendre et barbare, et par son ignorance même de toutes les causes, prêt à ressentir des hommes ce qu’ils sont, Dostoïewski est avec eux en d’immédiates et justes communions.

2075. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Ce n’est pas assez que tu aies voulu que celui-ci fît telle chose, celui-là telle autre ; il faut encore que ton idée ait été juste et conséquente, et que tu l’aies rendue si nettement que je ne m’y méprenne pas, ni moi, ni les autres, ni ceux qui sont à présent, ni ceux qui viendront après.

2076. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 24, des actions allegoriques et des personnages allegoriques par rapport à la peinture » pp. 183-212

Il faut avoir une imagination plus féconde, et plus juste, pour imaginer et pour rencontrer les traits dont la nature se sert dans l’expression des passions, que pour inventer des figures emblêmatiques.

2077. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Lorsque Bonaparte se saisit du gouvernement consulaire, tous les écrivains travaillèrent à la restauration de l’édifice social avec une ardeur au-dessus de tout éloge, avec une sorte d’unanimité qui donnait les plus justes espérances.

2078. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

Un ancien a dit que le juste aux prises avec l’adversité était un beau spectacle pour les dieux.

2079. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Poinsot et Normandy sur les tendances de la poésie nouvelle, j’insisterai à mon tour sur des innovations nécessaires qui tendent à élargir le domaine poétique, qui sont acceptées par des poètes de grand talent et dont l’emploi est fort justifiable, pourvu qu’il se fasse avec méthode, tact et goût, afin de garder à la pensée sa pleine valeur et sa juste expression, ce respect du bien dire.

2080. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Même le poème grandiose et sombre de l’Amérique, cette histoire du mal envahissant, avec la science, le nouveau monde après l’ancien et ne laissant plus aucun refuge au juste, finit par une parole confiante. […] On les sent si incomplètes et, même quand elles sont à peu près justes, si impuissantes à traduire le je ne sais quoi par où l’on est surtout séduit ! […] Mais, il faut être juste, ne croyez pas davantage que tous méritent d’être lus. […] Mais il n’est que juste d’ajouter que M.  […] Qu’est-ce que cela signifie au juste ?

2081. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Il est à lui-même son Prométhée, suivant le mot étincelant et juste de Michelet. […] C’est très juste. […] Je le tiens, avec celui sur « Le Tragique quotidien » dans Le Trésor des Humbles, pour l’expression la plus juste et la plus vive de la philosophie de Maeterlinck. […] Une pensée riche et pénétrante, un esprit juste non sans ingéniosité, le souci incessant de ne point voir mesquin, de rechercher les causes, de supputer les effets, en un mot la solidité perspicace de sa méthode élève Nautet à la hauteur d’un historien littéraire. […] Quant à nous, comment le blâmerions-nous d’une attitude qui constitue un si juste titre à notre reconnaissance ?

2082. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Il est donc juste de dire que si la Restauration coïncide avec la victoire de l’étranger, elle s’accomplit contre lui. […] Cette vue si juste lui a fait écrire dans Sibylle un émouvant essai de psychologie catholique auquel je ne connais pas d’analogue. […] Il était juste que la statue de ce vainqueur de la Marne fût dressée dans la ville où repose le cœur de Condé. […] Le problème était, voulant ce résultat, de discerner ceux de ces écrivains capables de ce retour, de les enrôler sans rien leur demander que de bien prendre conscience de leurs qualités et de leurs défauts, puis de développer leur génie dans ses justes limites. […] Combien il a vu juste en groupant ces écrivains et bien d’autres dont nous avons les œuvres et les noms dans la mémoire.

2083. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Je le ferai du moins avec la plus grande réserve ; et ce que la nature de ma cause m’obligera de dire, il est juste de l’imputer à celui qui a rendu ma justification nécessaire. […] Considéré en lui-même, le style classique court toujours risque de prendre pour matériaux des lieux communs minces et sans substance61. » Le reproche semble sévère, mais il est juste, bien qu’il n’ôte rien à la valeur de nos chefs-d’œuvre classiques. […] Les obstacles qui nous sont opposés fortifient notre volonté, et, dans cette lutte que nous soutenons contre l’adversité, nous pouvons devenir par nous-mêmes un exemple et comme un enseignement salutaire, de façon à en tirer des idées plus justes sur le devoir. » « Assurément tout cela est fort raisonnable, et rien n’est plus digne d’être pratiqué ; mais je me demande si cela vaut la peine d’être redit sous cette forme languissante qui effleure à peine l’esprit. […] Leur règle n’est pas de parler juste, mais de faire des figures justes. » Blair est du même avis : « Les antithèses fréquentes, particulièrement lorsque l’opposition des mots est fixe et recherchée, rendent le style désagréable. » Charles Nodier est, à cet égard, plus sévère encore98. […] Ainsi, il est non seulement juste, mais utile pour nous, que Dieu soit caché en partie, et découvert en partie, puisqu’il est également dangereux à l’homme de connaître Dieu sans connaître sa misère, et de connaître sa misère sans connaître Dieu.

2084. (1940) Quatre études pp. -154

La mort n’a rien d’affreux : le juste s’endort en paix dans les bras du Seigneur. […] Il était d’accord avec lui contre le progrès, « cette grande hérésie de la décrépitude » ; contre l’envahissement du matérialisme, toute certitude étant dans les rêves ; sur la valeur de l’imagination, « faculté quasi divine qui perçoit tout d’abord, en dehors des méthodes philosophiques, les rapports intimes et secrets des choses, les correspondances et les analogies. » Rien ne lui semblait plus juste et plus beau que ses définitions de la poésie, « un enlèvement de l’âme », « un accent d’immortalité ». […] Dans cette immense échelle de valeurs où tout est mobile, où le coupable descend vers le végétal, vers le minéral, tandis que le juste monte vers les anges, chacun conserve son caractère, et Néron reste Néron ; sa personnalité ne s’abolit pas ; elle s’enrichit, au contraire, d’une donnée nouvelle : la possibilité de se corriger, de s’améliorer par le repentir. […] Cela veut dire que quand on se met à lire un poème, il faut se dire qu’il est l’ouvrage d’un menteur, qui nous veut entretenir de chimères, ou au moins de vérités si gâtées qu’on a bien de la peine à distinguer le vrai du faux 33… » On trouverait aisément chez Fontenelle, sous une forme plus aimable et plus fine, bien des déclarations qui valent celle de Jean Le Clerc, puisqu’ayant commencé par donner de l’églogue la plus étrange idée, il ne s’est pas arrêté en chemin, et a donné de la poésie en général une idée non moins étrange ; du moins elle nous paraît telle, avec le recul du temps, et quoiqu’en vérité elle semblât toute juste aux Cartésiens, ses amis et ses admirateurs. […] Ami de Condillac, au point qu’on ne sait pas au juste lequel des deux a imaginé la statue qui se développait dans la mesure où chaque sens successif apparaissait en elle, il a pu lire dans ses pages comment Locke n’avait pas suffisamment marqué l’importance de l’inquiétude dans notre vie psychologique.

2085. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

C’est l’utilité sociale qui détermine pour lui non seulement la nature ou la valeur des lois, mais le bien ou le mal moral, mais la vérité même ; et ne lui est-il pas échappé d’écrire que, du mauvais principe de la négation de l’immortalité de l’âme, « les stoïciens avaient tiré des conséquences, non pas justes, mais admirables pour la société » ? […] Autant donc l’esprit classique avait en général témoigné de juste défiance de l’instinct et des passions, autant au contraire l’esprit encyclopédique a mis en eux de confiance insolente et cynique. […] Voltaire en a tressailli d’allégresse ; et d’Alembert y voit le juste châtiment de la malveillance que les Jésuites se sont permis de témoigner à l’Encyclopédie. […] Mais une génération nouvelle s’était déjà montrée plus juste. […] 2º Le Poète ; — et que, bien que son œuvre n’ait paru qu’après sa mort, — c’est pourtant le lieu d’en parler ; — si beaucoup de ses contemporains l’ont en partie connue ; — ou imitée même, comme Millevoye ; — et si les traits essentiels en sont caractéristiques d’une renaissance du classicisme, — dont l’Histoire de l’art, de Caylus ; — la peinture de David ; — et le Voyage du jeune Anacharsis de l’abbé Barthélémy subsistent comme autant de témoins. — Rien de plus faux en conséquence que de voir dans André Chénier un « précurseur du romantisme » ; — et au contraire la juste idée que nous devons nous former de lui, — ce n’est pas seulement celle d’un Boileau ou d’un Malherbe inspirés ; — mais d’un Ronsard, — qui aurait lu Voltaire, Montesquieu, Buffon ; — Buffon surtout peut-être ; — et plus moderne enfin de deux cent cinquante ans que l’ancien.

2086. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Il tombe en cadence, non pas juste dans les mêmes traces, mais tout à côté, de manière à faire la plus gracieuse alternance. […] Une de ses victoires lui en rappelle aussitôt une autre : « Oui, certes, Simétha, dit-il, tu m’as prévenu juste autant qu’il m’est arrivé l’autre jour de devancer à la course le gracieux Philinus. » Par là pourtant il veut dire (car il est galant) qu’elle ne l’a devancé que de très-peu.

2087. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

3º Quel est le plus juste des gouvernements ? […] L’humanité et la justice ne sont point arbitraires ; elles sont ce qu’elles sont, indépendamment de notre volonté ; Dieu les a faites, non l’homme ; mais, pour pouvoir les mettre en pratique et pour en faire une juste application, il faut qu’il y ait des lois établies, des usages consacrés, des cérémonies déterminées.

2088. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Madame Récamier avait été toute sa vie une grande enchanteresse des yeux et des cœurs ; à cette époque elle fut un grand diplomate, le Talleyrand des femmes, dominant au fond toutes les opinions par une supériorité d’esprit qui ne donnait à chacune de ces opinions que sa valeur, les respectant toutes, n’en partageant aucune que dans la juste mesure de raison qu’elle contenait, et marchant libre, fière et souriante, entre tous les partis, comme une déesse de la Paix qui fait de son salon une terre neutre où l’on ne se rencontre que désarmé. […] Madame Récamier ne laissa jamais fléchir sa justice de femme sous ces théories de convention ; elle n’était point femme de parti ; elle n’aimait ni le napoléonisme, ni l’orléanisme : la Restauration, légitime par son antiquité et moderne par ses institutions, était le régime de son esprit tempéré et juste ; c’est à cause de cette conformité d’opinion qu’elle avait pour moi quelque préférence.

2089. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Mais peut-il y avoir excès dans la passion que l’on éprouve pour le juste et pour le vrai, surtout quand il s’agit de la faire partager aux autres ? […] Mais à l’approche de l’hiver, qui, à Sienne, n’est nullement agréable, comme d’ailleurs je n’étais pas encore bien guéri de ce besoin de changer de lieux, qui est une maladie de la jeunesse, au mois d’octobre, je me décidai à aller à Florence, sans savoir au juste si j’y passerais l’hiver, ou si je m’en retournerais à Turin.

2090. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

La colère emporta la majorité à jeter un voile sur les scrupules d’humanité et à laisser condamner sans merci ceux que la victoire aurait livrés à notre juste vengeance. […] Il avait eu, au milieu de beaucoup de chimères, un rare bon sens, celui de réduire son ambition politique à sa juste valeur et de renoncer de bonne heure à cet axiome faux : « J’ajouterai peut-être le titre de grand citoyen au titre d’homme littéraire. » Il avait espéré un moment que l’estime de ses compatriotes le porterait à la députation : il n’en fut rien ; on reconnut promptement que son éloquence, toute de cœur, ne convenait pas au régime parlementaire, qui vit de parti et non de vérité.

2091. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (2e partie) » pp. 161-239

Au bout de quelques minutes, l’oiseau reparut, et, prenant son vol vers un champ voisin où du vieux chaume avait été abandonné, il s’empara d’une seconde paille qu’il apporta juste à la même place où la première avait été déposée. […] À sa manière de connaître le bois, je fus bientôt convaincu que j’avais affaire à un véritable Indien ; car il se dirigeait aussi juste en droite ligne qu’aucun Peau-rouge avec lequel j’eusse jamais fait route.

2092. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

Il nous dira juste auquel de ces deux hommes nous devons l’étonnement, la direction, la gloire. […] Je cours pour écouter les publications, et j’arrive juste au moment où cela commençait.

2093. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Wagner a donc mis deux ans juste, d’été 1857 a été 1859, à écrire Tristan. […] Là donc où la création artistique « de consciente devient inconsciente » (Wagner, IX, 82), à ce point juste, je m’arrête.

2094. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

* * * — La vérité, l’homme, par nature, ne l’aime pas, et il est juste qu’il ne l’aime pas. […] » — On s’étonne, en lisant l’Histoire auguste, que les notions du bien, du mal, du juste et de l’injuste aient pu survivre aux Césars, et que les Empereurs romains n’aient pas tué la conscience humaine.

2095. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

Si l’artiste ou le penseur réalistes, exposés à percevoir tout le réel, ne peuvent mettre leur esprit et leur œuvre en correspondance avec cet immuable non moi, ni s’astreindre à reconnaître la juste nécessité des choses et qu’un péril de l’actuel conditionné par tout le passé, conditionne tout le futur, ils sont, entre leur science et leurs désirs, eu un trouble douloureux. […] Que l’on grandisse ces facultés au point où leur manifestation devient impérieuse, que l’on y accole les qualités d’élocution et d’arrangement juste nécessaires pour composer des œuvres littéraires de forme médiocre, que l’on fasse prédominer la connaissance, le rappel, l’imagination des personnes, sur celles des actes purs, des drames, des histoires, l’on aura énuméré les causes générales dernières des œuvres de Tolstoï, de leur contenu réaliste, de leur étendue, de leur valeur plus psychologique que dramatique, et la force de ces dons sera mesurée à la grandeur de leur manifestation, à la puissance d’illusion de l’œuvre à la sympathie, au saisissement, à l’attraction qui s’en dégagent.

2096. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Il me semble que je me juge bien en convenant, avec une juste modestie, que je ne fus pas un grand poète, mais en croyant, peut-être avec trop d’orgueil, que dans d’autres circonstances et dans d’autres temps j’aurais pu l’être. […] Réunissez donc en ce moment, par la pensée, les plus beaux accidents de la nature ; supposez que vous voyez à la fois toutes les heures du jour et toutes les saisons, un matin de printemps et un matin d’automne, une nuit semée d’étoiles et une nuit couverte de nuages, des prairies émaillées de fleurs, des forêts dépouillées par les frimas, des champs dorés par les moissons : vous aurez alors une idée juste du spectacle de l’univers.

2097. (1926) L’esprit contre la raison

De leurs poissons rouges ils feront des baleines mais, juste revanche, ils se noieront dans le ruisseau. […] Juste après sa réponse venait celle de Valéry sous le nom de « M. 

2098. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Telle fut, ombragée d’humilité et fleurie d’affections d’élite, l’existence tranquille de ce juste dont Dieu seul a vu les mérites, car la vie des justes ne se raconte pas plus que celle des peuples heureux.

2099. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

En fait, le moi normal ne se fixe jamais à l’une de ces positions extrêmes ; il se meut entre elles, adopte tour à tour les positions représentées par les sections intermédiaires, ou, en d’autres termes, donne à ses représentations juste assez de l’image et juste assez de l’idée pour qu’elles puissent concourir utilement à l’action présente.

2100. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

Aussi, un siècle juste après Massillon, un orateur que je n’irai point jusqu’à lui comparer pour le talent, mais qui a soutenu bien honorablement l’héritage de la parole sacrée, l’abbé Frayssinous, dans ses conférences ouvertes sous l’Empire et depuis, avait à discuter devant d’honnêtes gens, la plupart jeunes, non plus désireux de douter, mais plutôt désireux de croire, les points controversés de la doctrine et de la tradition historique, et il le faisait avec une mesure de science et de raison appropriée à cette situation nouvelle.

2101. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Mme Sand a remarqué cela d’un des personnages de ses romans, et j’en crois l’application juste par rapport à M. de Lassay.

2102. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Louis XIV, à cette époque, et dût sa santé ensuite se rétablir, est donc entré décidément dans cette seconde et dernière moitié de la vie, et il ne serait pas juste de prétendre juger uniquement par là de ce qu’il a pu être dans la première.

2103. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Montluc, comme parlant à un roi soldat, se met donc tout d’abord à énumérer les forces de l’armée de Piémont et à nombrer les corps qui la composent ; il commence, comme de juste, par les Gascons : Sire, nous sommes de cinq à six mille Gascons… Car vous savez que jamais les compagnies ne sont du tout complètes, aussi tout ne se peut jamais trouver à la bataille ; mais j’estime que nous serons cinq mille cinq cents ou six cents Gascons comptés, et de ceux-là je vous en réponds sur mon honneur ; tous, capitaines et soldats, vous baillerons nos noms et les lieux d’où nous sommes, et vous obligerons nos têtes que tous combattrons le jour de la bataille, s’il vous plaît de l’accorder, et nous donner congé de combattre.

2104. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Au sortir des disputes et des guerres religieuses, Charron avait mille choses justes à dire, et dont la convenance était sentie par tous les hommes de bonne foi qu’un zèle extrême ne passionnait pas pour le parti contraire.

2105. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

À cet endroit, Charron reconnaît qu’il a puisé abondamment dans le traité de politique de Juste Lipse, comme précédemment il l’avait reconnu pour du Vair.

2106. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

C’est à cette destination particulière, et peut-être aussi au tour d’esprit de l’auteur, qu’il faut attribuer certaines formes, certaines divisions plus méthodiques et, pour tout dire, plus scolastiques qu’on ne voudrait en telle matière ; mais il y a une véritable étude, une étude approfondie du sujet, beaucoup de vues justes, fines, pénétrantes, des remarques ingénieuses et solides.

2107. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

Il disait la même chose des mémoires de Gourville, sous prétexte que « le style de ce livre était trivial et n’avait rien du tout de cette politesse que Gourville s’était acquise par un grand usage du monde. » S’il s’était borné à dire que le premier éditeur (1724) avait pu les retoucher à tort çà et là, il aurait dit juste ; mais il allait bien plus loin, et il les déclarait hardiment un livre apocryphe.

2108. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Il prévoit juste.

2109. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

L’adversité a cela de particulier, qu’elle donne à Frédéric le sentiment du droit, qu’il n’a pas toujours eu très présent et très vif en toutes les circonstances de sa vie : en cette crise d’alors, il se considère comme iniquement assailli et traqué, lui le champion d’une grande et juste cause, le soutien de la liberté de l’Allemagne et de l’indépendance protestante : « L’Allemagne est à présent dans une terrible crise : je suis obligé de défendre seul ses libertés, ses privilèges et sa religion ; si je succombe, pour le coup, c’en sera fait. » Il ajoute ces remarquables paroles, qui ont dans sa bouche une singulière autorité et dont il paraît s’être mal souvenu dans d’autres temps : A-t-on jamais vu que trois grands princes complotent ensemble pour en détruire un quatrième qui ne leur a rien fait ?

2110. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

À propos de cet aveuglement si remarquable alors chez ceux qui auraient dû voir de plus haut, Rivarol disait une belle parole de royaliste irrité : « Autrefois les rois avaient leur couronne sur le front, ils l’ont aujourd’hui sur les yeux. » Bonstetten n’a jamais de ces mots qui gravent ; mais il a le crayon fin, juste et léger.

2111. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

L’illustration historique ne leur est venue que par le troisième de la race (depuis qu'elle eut commencé de compter), c’est-à-dire par celui dont on publie aujourd’hui le Journal, et qui fut simplement maître des requêtes ; mais un jour, il eut le périlleux honneur d’être rapporteur dans le procès de Fouquet, et, malgré le poids de l’ascendant royal, sous la pression inique et la menace de Colbert, il eut le mérite d’être juste indulgent : il ne conclut point pour la mort, et sa conclusion triompha.

2112. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Le duc d’Orléans, il faut être juste, l’aida à faire évader M. de Champcenetz, de qui il croyait avoir personnellement à se plaindre.

2113. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Le Roi sait toutes les historiettes de Louis XV, ce qu’il en faut croire et ce qu’il en faut rabattre ; il nous montre le Parc-aux-Cerfs réduit à ses justes et presque modestes proportions ; il nous dit l’emploi que Mme de Pompadour faisait de sa fortune en amie des arts ; il nous livre les comptes de dépenses de Mme Du Barry au luxe effréné.

2114. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

L’article lu, je me disais : C’est égal, après tous les grands efforts et tous les grands systèmes en France, il n’est, pour voir clair et juste et remettre tout à sa place, que de se dérider et de se déroidir un peu ; donnez-moi de temps en temps des gens qui sachent rire à propos et égayer le bon sens.

2115. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Soyons juste : l’ambition était par trop grande à lui de prétendre régner aussi dans les sciences ; cette monarchie universelle n’est donnée à personne, même dans le monde des esprits.

2116. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Paulin Paris s’y prend pour annoncer sa dissidence avec son frère Louis Paris sur cette grosse question de savoir quel était au juste notre Jean-Michel : « L’argumentation de mon frère est vigoureuse », dit-il en faisant mine d’admirer et en rendant chevaleresquement justice à l’adversaire… « Certes, en l’absence des manuscrits, il « était impossible de raisonner d’une façon plus irréprochable et plus persuasive.

2117. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

. — Poésie modérée, bien que depuis lors nous en connaissions une autre, grande, magnifique, souveraine, et que nous nous inclinions devant, et que nous l’admirions en ses sublimes endroits ; — poésie d’entre-deux, moins vive, moins imaginative, restée plus purement gauloise ou française, plus conforme à ce que nous étions et avant Malherbe et après ; — poésie qui n’es pas pour cela la poésie académique ni le lieu commun, et qui as en toi ton inspiration bien présente ; qui, à défaut d’images continues, possèdes et as pour ressources, à ton usage, le juste et ferme emploi des mots, la vigueur du tour, la fierté du mouvement ou la naïveté du jet ; poésie qui te composes de raison et de sensibilité unies, combinées, exprimées avec émotion, rendues avec harmonie ; puisses-tu, à ton degré et à ton heure, à côté de la poésie éclatante et suprême, te maintenir toujours, ne cesser jamais d’exister parmi nous, et d’être honorée chez ceux qui t’ont cultivée avec amour et candeur !

2118. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

Dix fois dans ce récit, on est tenté d’interrompre et de se dire : « Si les choses justes ou que le résultat justifie et consacre se font ainsi, comment donc se font les choses injustes ? 

2119. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Sa pensée générale, qui est fort juste, est qu’un tel roman ne pouvait éclore et fleurir qu’au xviie  siècle, au sein de cette société choisie, la seule capable de goûter toutes les noblesses, les finesses et les pudeurs des sentiments et du style, et que rien de tel ne saurait plus se refaire désormais.

2120. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

Je ne prétends pas dénigrer Louis XV, ni ajouter au mal qu’on a dit de lui ; j’ai lu bien des Portraits de ce roi : je n’en connais point de plus juste que celui qu’a tracé un homme qui l’aimait assez et qui le voyait tous les jours, Le Roy, lieutenant des chasses de Versailles ; on peut s’y fier : c’est un philosophe qui parle et qui, pendant de longues années de service, n’a cessé devoir de près son objet.

2121. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Il se souvient, après tout, qu’il est de li race des justes.

2122. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

Le Play n’a rien négligé pour se faire une idée étendue et juste.

2123. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

En histoire, nous avons eu un travail analogue à faire pour en venir à une large et juste idée de Napoléon.

2124. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

… Que les hommes ne jugent pas avec trop de confiance, comme celui qui compte sur les blés aux champs avant qu’ils soient mûrs ; car j’ai vu le buisson, à demi mort et tout glacé pendant l’hiver, se couronner de roses au printemps ; et j’ai vu le vaisseau, qui avait traversé rapidement la mer durant tout le voyage, périr à la fin, juste à l’entrée du port… Celui-là peut se relever, celui-ci peut tomber. » À regarder d’un coup d’œil général le talent et l’œuvre de M. de Lamartine, il semble que le plus haut point de son développement lyrique se trouve dans ses Harmonies.

2125. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Mais, après tout, le ciel est toujours le ciel, et rien n’en peut abaisser la hauteur. » Ajoutez, pour être juste, que le ciel qu’on voit du milieu du paysage d’André Chénier, ou qui s’y réfléchit, est un ciel pur, serein, étoilé, mais physique, et que la terre aperçue par le poète sacré, de dessus son char de feu, toute confuse qu’elle paraît, est déjà une terre plus que terrestre pour ainsi dire, harmonieuse, ondoyante, baignée de vapeurs, et idéalisée par la distance.

2126. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

Ça partait toutes les trois ou quatre secondes, roulait un instant ; puis ça s’arrêtait et ça reprenait, juste le petit frisson qui secoue les chiens perdus, quand ils ont froid l’hiver, sous une porte » (p. 555).

2127. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

De psychologie, tout juste ce qu’il en faut à un poète lyrique : même dans Monsieur Destrémaux, encore qu’il intitule bravement cette Nouvelle « roman psychologique » ; même dans Madame André, le meilleur de ses romans pourtant, où il a le mérite de nous faire accepter une situation hardie et où la femme (sauf le sacrifice monstrueux et inutile de son enfant) a de la grâce, de la dignité, presque de la grandeur, et aime bien comme une aînée, comme une maîtresse qui est un peu une mère ; mais Lucien Ferdolle se détache trop vite, avec une soudaineté trop odieuse, et le drame douloureux du déliement progressif est esquivé.

2128. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

On ne serait pas juste pourtant de n’y voir qu’une précaution contre les censures de la Sorbonne.

2129. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

En ce sens il est juste de dire que c’est la Cité qui a fait l’âme.

2130. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

L’esquisse merveilleuse s’éparpillait en croquis légers ; la haute théorie s’enguirlandait d’anecdotes charmantes qui, exquises dans leur grâce ou plaisantes en leur malice, valaient un rire juste et sobre. » « On entrait chez Mallarmé, écrit encore un poète de la génération suivante, M. 

2131. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre III : Les Émotions »

Dans les entretiens de Socrate, dans les dialogues de Platon, cette recherche a sa place à côté d’autres recherches conduites dans un même esprit, relativement au bon, au juste, au convenable.

2132. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Heureusement, il nous permet de tenir notre place en société et de dire notre mot, « un mot juste, sensé, pratique », sur des choses que nous n’avons point lues.

2133. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

À cette époque si rude de la saison, dans une salle de spectacle non chauffée comme celle du Conservatoire, il serait difficile de prendre une juste idée de ce que sont les réunions en temps ordinaire ; l’auditoire se trouve nécessairement très réduit.

2134. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres inédites de l’abbé de Chaulieu, précédées d’une notice par M. le marquis de Bérenger. (1850.) » pp. 453-472

C’est une juste rétribution de Dieu, qui le punit de toutes les méchantes plaisanteries qu’il a faites sur la maladie de M. de Chaulieu (le frère de l’abbé)… Et on nous donne le détail de ces plaisanteries, qui sont des plus crues.

2135. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Ce sont là de belles et justes pensées, admirablement exprimées.

2136. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « De la retraite de MM. Villemain et Cousin. » pp. 146-164

Guizot, qu’on juge de l’effet, de l’intérêt du spectacle mêlé à la satisfaction de l’esprit ; qu’on y répande cette émotion générale et communicative qui régnait aisément pendant toute cette fin de la Restauration, et qui faisait croire à l’unité d’une opinion publique à la fois juste et puissante, et l’on comprendra ce qu’ont été ces fêtes de l’intelligence, dont les livres mêmes qui en sont sortis ne donnent qu’une idée froide et décolorée.

2137. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Il était de ceux qui, à cette date, pouvaient se dire des plus éclairés dans le sens moderne ; il avait causé à Dantzig avec l’illustre astronome Hévélius et avait recueilli de sa bouche les notions les plus exactes de l’univers physique ; il avait acquis, chemin faisant, sur les différentes familles de langues et sur leur génération relative, des idées très justes aussi et qui n’étaient pas communes en ce temps.

2138. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Il est juste de reconnaître que le savant champion de la thèse paradoxale que nous venons de discuter a su la défendre avec beaucoup de verve et de talent.

2139. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Cette poétique possède sa valeur et la conserve en tant que cas particulier de la nouvelle comme celle-ci est destinée à n’être plus tard qu’un cas particulier d’une poétique plus générale ; l’ancienne poésie différait de la prose par une certaine ordonnance ; la nouvelle voudrait s’en différencier par la musique, il se peut très bien qu’en une poésie libre on trouve des alexandrins et des strophes en alexandrins, mais alors ils sont en leur place sans exclusion de rythmes plus complexes… » Nous avons bien en français un accent tonique ; mais il est faible et cela tient à l’amalgame que fit Paris des prononciations excessives et différentes des provinces, les usant pour en constituer une langue modérée, calme, juste milieu, quant au retentissement des consonnes et au chant des voyelles, neutre de préférence à bariolée.

2140. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre II : Variations des espèces à l’état de nature »

Mais quelle distance doit être regardée comme suffisante, s’est-on demandé avec juste raison ?

2141. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Un reproche plus juste, c’est trop de poudre de riz en ces romans, comme sur les épaules de l’Empire ; mais la poudre de riz de Μ. 

2142. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Indécent : La lecture seule du livre entier peut donner une idée juste de l’ouvrage.

2143. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Puisqu’on imitait Walter Scott, il fallait, comme lui, être juste, et se rappeler le Cromwell de Woodstock et le prince Charles-Édouard de Redgauntlet.

2144. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Il y a donc trois choses dans cette première formule : 1° une humiliation devant Dieu considéré comme le juste auteur des vengeances provoquées par l’oubli du culte qu’il exige ; 2°la demande de libération du Saint-Siège ; 3° la demande de bonheur pour la France par son retour à la loi médiévale.

2145. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Il est juste de pardonner aux imperfections d’une publication posthume. […] J’ai déjà parlé du nom de Roncevaux, inconnu à toutes les sources historiques, et de l’idée assez juste qui paraît subsister, dans les poèmes, de la configuration et de l’aspect du lieu. […] Toutes ces observations doivent être justes, comme celles que l’on peut encore vérifier ; mais elles ne concordent plus avec l’état actuel des lieux. […] Cet antagonisme donne au récit son caractère original et tragique, car on ne sait au juste si le héros est finalement pardonné ou s’il sera, par la faute du pape, damné irrémissiblement. […] Malheureusement, étant privés du texte même de la pièce provençale, nous ne savons pas au juste ce qui se passait entre Botadieu et le Seigneur116.

2146. (1925) Comment on devient écrivain

C’est tout juste s’ils ont quelques poils au menton, et déjà ils veulent rédiger leurs mémoires. […] Les dialogues de Maupassant représentent assez bien la note juste.‌ […] En général, Sainte-Beuve voit juste, en profondeur et en nuances. […] Gœthe devinait juste. […] Après avoir fait dans sa préface une juste critique des mauvaises traductions de Virgile, bon français élégant, embellissements ou travestissements du texte, M. 

2147. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Rien de plus juste que cette expression. […] Son théâtre fut l’objet de quantité de diagnostics justes, parmi lesquels je place en première ligne celui du jeune et regretté Charles de Sprimont, paru dans la revue belge Durendal, en juin 1903. […] Les caractères se développent dans le sens de l’activité intérieure et font juste les gestes nécessaires que commandent les diverses attitudes de l’âme. […] Cette vue ne semble juste que si l’on remplace le mot romantique par celui de parnassien. […] En croyant imiter les Grecs et les Romains, « il ne faisait que transporter dans les lettres cette pratique hardie, juste et rigoureuse de construire, qui était française avant lui ».

2148. (1898) La cité antique

Le mariage n’ayant été contracté que pour perpétuer la famille, il semblait juste qu’il pût être rompu, si la femme était stérile. […] Platon exprimait la pensée des anciens quand il disait : « L’homme que le sort a désigné, nous disons qu’il est cher à la divinité et nous trouvons juste qu’il commande. […] Mais cela même va nous montrer ce que la cité souhaitait trouver dans son magistrat ; elle ne cherchait pas l’homme le plus courageux à la guerre, le plus habile ou le plus juste dans la paix, mais le plus aimé des dieux. […] L’homme n’a pas eu à étudier sa conscience et à dire : Ceci est juste ; ceci ne l’est pas. […] Car ce qui obligeait l’homme dans ce droit antique, ce n’était pas la conscience ni le sentiment du juste, c’était la formule sacrée.

2149. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

Shakspeare nous peint tels que nous sommes ; ses héros saluent, demandent aux gens de leurs nouvelles, parlent de la pluie et du beau temps, aussi souvent et aussi vulgairement que nous-mêmes, juste au moment de tomber dans les dernières misères ou de se lancer dans les résolutions extrêmes. […] transpercé à travers l’oreille par une chanson d’amour, le cœur crevé juste au centre par la flèche du petit archer aveugle241 !  […] À un certain degré finit la conscience ; la nature prend sa place, et l’homme court sur ce qu’il désire sans plus penser au juste ni à l’injuste qu’un animal de la forêt voisine. […] Elle s’est prise de compassion pour Cassio, et veut sa grâce passionnément, quoi qu’il advienne, que la chose soit juste ou non, qu’elle soit dangereuse ou non.

2150. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

C’est assez juste ; mais cela me serait davantage si tous lès livres méritaient l’une ou l’autre de ces qualifications extrêmes. […] On a dit médailles usées ; c’est presque juste. […] « Seulement, ajoute Flourens, il n’écrivait pas ses descriptions en termes techniques, et c’est ce qui a trompé beaucoup de naturalistes qui ne se reconnaissent guère en ce genre d’écrits qu’autant qu’ils y trouvent un langage particulier, convenu, et, si je puis ainsi parler, le langage officiel de la nomenclature. » Réflexion très juste et qui se peut étendre à bien des objets, à toutes les branches de la philosophie, par exemple, où l’on ne conquiert que par le jargon l’estime des spécialistes enlisés dans la scolastique verbale. […] Et cela est juste : nous sommes aussi loin de M. de Banville, à cette heure, que la poésie de mil huit cent trente l’était de M. de Parny ou de M. l’abbé Delille . […] Le « soyez plutôt maçon » est très juste.

2151. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Ce que Saint-Simon dit en débordant, La Fare le dit d’un mot et en courant ; mais on a la note la plus juste.

2152. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Il s’appliquait ainsi en toute rencontre à trouver des mesures administratives neuves et justes, et toujours en vue du bien : c’est un trait de son caractère.

2153. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Quand toute une haute société s’amuse de la sorte, il est juste, tôt ou tard, que revanche et pâtiment s’ensuivent.

2154. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Je sais que les points de vue changent et se déplacent ; qu’en avançant dans la marche, et d’étape en étape, de nouvelles perspectives s’ouvrent vers le passé et y jettent des lumières parfois imprévues ; que si, dans les œuvres déjà anciennes, de certains aspects s’obscurcissent et disparaissent, d’autres se détachent mieux et s’éclairent ; que des rapports plus généraux s’établissent, et que, dans la série des monuments de l’art, il y a un juste lointain qui non seulement n’est pas défavorable, mais qui sert à mieux donner les proportions et la mesure.

2155. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

— Pour connaître avec une entière précision les faits de la vie de Casaubon et voir au juste la place qu’il tient entre les réformés, on doit lire aussi l’article qui le concerne, au tome ii de la France protestante de MM. 

2156. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Mais c’est sur les antiquités de Rome particulièrement qu’il a des vues justes, tout à fait grandes et dignes de leur objet.

2157. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Voir, à ce sujet, au tome III des Quatre Concordats, une vingtaine de pages des plus spirituelles et des plus justes (p. 197-215).

2158. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Il serait juste, pour apprécier tout le degré de mérite de ces premiers dessins d’Horace Vernet, de songer à ce qu’était alors l’art lithographique et à l’inexpérience de reproduction dont le talent avait à triompher.

2159. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

donnez-moi votre parole d’homme : vous ne chercherez jamais à me connaître… » Michel, le poète artiste, donna sa parole, et il la tiendra : il ne saura jamais au juste ce qu’était la dame.

2160. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Ce sont là, à leur manière, de justes noces, comme diraient les anciens.

2161. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Il insiste sur ce qu’il y a de juste, et de nécessaire en même temps, à se ranger à la discipline, à la règle commune et à ce qui prévaut, à ne pas faire bande à part en telle matière contre le sentiment universel.

2162. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Il appliquait en toute occasion ce mot qui lui était échappé, parlant à son ancien gouverneur, « que dorénavant il voudrait, s’il lui était possible, négocier et traiter d’affaires sous terre. » On ne savait jamais au juste, en effet, quand on traitait avec lui, où l’on en était ni où l’atteindre.

2163. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

De tous les morceaux de l’ancienne critique, le plus vrai et le plus juste sur les mérites de Don Quichotte est peut-être encore certain article de M. de Feletz. — Aujourd’hui tout cela est dépassé, sinon surpassé.

2164. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

ne ménagez pas vos conseils à vos malheureux enfants. » Jamais deux souverains jeunes, honnêtes et bons, ne furent animés d’un plus ardent désir de suffire à leurs immenses devoirs, et il fallait qu’il y eût dans la force inhérente des choses et dans les difficultés accumulées dont ils héritaient une bien grande résistance pour qu’avec cette bonne volonté si sincère, un esprit juste, chacun, et des idées qui n’étaient pas tant en désaccord avec celles de l’époque, ils n’y aient pas réussi.

2165. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Il est permis de penser qu’en plaidant cette mauvaise cause Catinat sentait le côté juste des raisons qu’on lui opposait ; il a des expressions d’estime, et presque des éloges pour la partie adverse : « J’ai trouvé, disait-il dans sa lettre à Louvois (15 octobre 1681), ces gens-ci tout autrement que je n’avais pensé ; j’espérais beaucoup de la permission d’offrir de l’argent ; à quoi ils m’ont paru fort insensibles, et toutes les offres qui ont tendu à cela ont été très-mal reçues.

2166. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Une qualité générale frappe au premier coup d’œil, en parcourant l’ensemble de cette vie bien courte et pourtant si remplie : quand je dis que cette qualité frappe, j’ai tort, il serait plus juste de dire qu’elle repose et satisfait : sa destinée a tout à fait l’harmonie ; et je n’en veux pour preuve que le sentiment universel qu’elle inspire, cette sorte d’admiration affectueuse et douce dont il est l’objet.

2167. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Cette orthodoxie, il est vrai, pouvait bien sembler un peu étroite et se ressentir de ces excès de rigueur qui sont ordinaires aux grands convertis ; mais il y avait lieu aussi de penser qu’une fois hors du cercle des thèses universitaires et en possession des gloires du doctorat, rentré dès lors dans le champ libre de la littérature, l’auteur trouverait un juste tempérament, et que l’ami, et un peu le disciple de Stendhal, saurait échapper aux formules du dogme.

2168. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Le jugement est le quatrième, parce qu’il nous enseigne seul dans quel ordre, dans quelle proportion, dans quels rapports, dans quelle juste harmonie nous devons combiner et coordonner entre eux ces souvenirs, ces fantômes, ces drames, ces sentiments imaginaires ou historiques, pour les rendre le plus conformes possible à la réalité, à la nature, à la vraisemblance, afin qu’ils produisent sur nous-mêmes et sur les autres une impression aussi entière que si l’art était vérité.

2169. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Imaginez-vous une sorte de revue où défilent sous leur nom, avec leur caractère, en propre personne ou par directe désignation, dix ou vingt bourgeois connus de la ville, où le poète, à côté de son père et de ses voisins, s’introduit, contant son mariage, comment il s’est défroqué pour épouser la belle qui l’a si délicieusement ravi et si vite lassé, comment il veut se démarier, et s’en aller à Paris étudier : écoutez ces propos salés et mordants de compères en belle humeur, qui en disent de dures sur les femmes, et voyez dans un brouhaha de « kermesse », selon le mot si juste de M. 

2170. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Il a été un charpenteur plutôt qu’un écrivain de drames ; mais il a eu le très juste instinct de ce que le théâtre français devait être : des situations faisant saillir des caractères.

2171. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Il est vrai que, justement à cause de cette indécision et de cette variété, il reste toujours au descripteur des mœurs mondaines quelque chance d’être tombé juste.

2172. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Les natures simples des gens du peuple, dans les moments de passion, le prouvent assez ; ils ont le mot juste et souvent le mot unique.

2173. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

C’est Bourdaloue pourtant qui, par les justes proportions, par la beauté de l’ordonnance et l’exactitude des développements, représente la perfection moyenne et complète de ce genre grave à son plus beau moment.

2174. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Tout cela dit, est juste de reconnaître que dans le second volume surtout de l’Histoire de la révolution d’Angleterre, il y a des parties irréprochables d’un récit continu.

2175. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

On mesure plus au juste ce que c’est que la gloire, et à quoi se réduit ce grand mot.

2176. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

On ne serait pas juste envers cette pièce du Champi, si l’on ne signalait, au moins en passant, l’excellent rôle de Jean Bonnin, l’idéal du paysan berrichon.

2177. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Mme du Châtelet met au premier rang des conditions du bonheur, de se bien porter ; c’est juste, mais elle le dit en physicienne et sans charme.

2178. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Mais si vous n’aviez pas eu affaire à un fou amoureux de votre beau génie, vous ne vous en seriez pas tiré aussi bien chez tout autre… » Cependant, après ces paroles sévères et trop fermes pour ne pas être justes, après ces paroles de roi, comme le fou, amoureux du brillant esprit, se laisse voir encore aisément, quand il ajoute : Vous faut-il des douceurs ?

2179. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

J’aime les femmes modestes, sobres, gaies, capables de sérieux et de badinage, polies, railleuses d’une raillerie qui enferme une louange, dont le cœur soit bon et la conversation éveillée, et assez simples pour m’avouer qu’elles se sont reconnues à ce portrait que j’ai fait sans dessein, mais que je trouve très juste.

2180. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Il était de ceux que les maîtres qui se succèdent tiennent à s’attacher, car ce sont de ces acteurs rares et soumis qui remplissent parfaitement les rôles secondaires, et dont les aptitudes et les capacités, dans leur juste mesure, se dirigent à tout.

2181. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

. — Achevé pour mes juges, à Paris, ce 6 mars 1793, l’an second de la République. » Tout rempli de son unique objet, il ne se représente pas au juste ce que c’est que la Convention nationale ; ce qui étonne, c’est qu’il y ait sauvé sa tête.

2182. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Retiré à Essonne, il y perdit bientôt sa première femme, qui lui laissa deux enfants nommés comme de juste Paul et Virginie, et qui lui légua aussi de fâcheux démêlés avec sa famille.

2183. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Boileau était un des rares et justes divertissements de Colbert.

2184. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

On vit avec un plaisir mêlé de surprise combien notre abbé le rendait intéressant aux femmes et aux gens du monde qui l’écoutaient, par les grâces de son style, par la finesse de sa critique, et par ses principes justes et lumineux. — Les femmes mêmes, lit-on dans les Mémoires de Bachaumont, ont été enchantées de cette lecture.

2185. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Chez saint François de Sales, il y a plus que le juste, il y a plus que l’utile, il y a plus que l’humain, il y a le saint : chose réelle, et qui, dès qu’elle apparaîtra sincèrement, sera toujours adorée parmi les hommes.

2186. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Aussi est-il juste de comparer, avec William James, le mécanisme de la pensée au phénomène électrique qu’on appelle l’aurore boréale, où l’équilibre entre l’électricité terrestre et celle des particules glacées de l’atmosphère est sans cesse rompu et rétabli, où les inductions électriques sont perpétuelles, de manière à produire des irradiations sur des points continuellement changeants : les rayons lumineux qui jaillissent successivement, l’un ici, l’autre là, sont associés entre eux comme le sont nos idées, c’est-à-dire qu’en réalité ils ne se produisent pas l’un l’autre, mais sont produits l’un après l’autre par une cause commune, la tension générale, et par les conditions particulières qui la font se décharger successivement ici et là ; chaque idée est comme une irradiation sur un point particulier, révélant à la fois la tension générale et la décharge particulière du magnétisme intérieur.

2187. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

. — Les justes ayant seuls l’autorité de jurer, c’est par équité qu’on donne à Jupiter le nom de Jureur. — Le phénix d’Arabie et les tignes vivent dans le feu. — La terre est portée par l’air comme par un char. — Le soleil boit dans l’océan et la lune boit dans les rivières. — Etc. — C’est pourquoi les athéniens lui élevèrent une statue sur la place Céramique, avec cette inscription : À Chrysippe, qui savait tout.

2188. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Qu’il se fâche ou qu’il sourie, qu’il fouaille ou caresse, il cherchera et trouvera le mot juste qui traduit avec le plus de relief, mais aussi avec le plus d’exactitude, le sentiment qu’il veut exprimer.

2189. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Mais comment voulez-vous que le talent résiste et que l’art se conserve, si vous joignez à cette épidémie vermineuse la multitude de sujets perdus pour les lettres et pour les arts, par la juste répugnance des parents à abandonner leurs enfants à un état qui les menace d’indigence ?

2190. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Depuis quatre-vingt ans que les esprits ont commencé à devenir si justes et si pénetrans, on n’a fait aucune découverte de l’importance de celle dont nous parlons.

2191. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Puis, il est juste de reconnaître que, si Murger n’est pas dans les secrets de la forme, de temps en temps il les devine — comme par instinct.

2192. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

N’y aurait-il pas lieu de croire, enfin, que la querelle du romantisme est une simple dispute de mots, un pur malentendu, qui cesserait du moment que les esprits justes et sincères, de part et d’autre, après être tombés d’accord sur les principes qui semblent les diviser, seraient forcés de reconnaître la vanité des paroles qui les abusent ?

2193. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Ils ont même fait synonymes ces deux appellations dont l’une exprime tout juste le contraire de l’autre.

2194. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Son Infini, quand il parle de l’Infini, n’est pas le leur ; car eux, plus ou moins panthéistes, si on leur appuie sur la gorge on ne peut pas dire qu’il en sorte la notion juste de l’Infini.

2195. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

C’est l’honneur de Charles Baudelaire d’avoir pu évoquer, dans un esprit délicat et juste, un si grand souvenir !

2196. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Jean Richepin »

Quant à moi, je me tiendrai à quatre pour être juste en parlant de ce livre, qui, par le bruit qu’il fait, force à parler ceux qui voudraient se taire.

2197. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Nous sommes sévères, mais nous croyons n’être que justes. […] S’il y a quelque part un Dieu, il doit être juste. […] Nous n’espérons pas que notre avis, si juste qu’il puisse être, suscite un poète selon notre volonté, irréprochable aux yeux de notre conscience, et pour lequel nous n’ayons plus à chanter qu’un éternel hosannah. […] le poète ne le dit pas ; mais, par un juste châtiment, Tisbe est dédaignée de celui qu’elle aime. […] Si cette transition n’est pas juste, elle possède au moins le mérite de la nouveauté.

2198. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

» Ainsi isolé entre ces deux grands vides, entre ces deux néants de la responsabilité et de la conscience, le César romain perd toute vue lucide, tout aperçu de rapports, tout sentiment de juste et d’injuste. […] Était-ce juste impatience de sortir de la vie, ou servilité machinale, ou habitude de la mort ? […] Marc-Aurèle montant au trône, c’est le Juste d’Horace s’asseyant sur les ruines de l’Univers qui s’écroule. […] Tout est grand et tout est juste, tout est beau et tout est réglé. […] C’est la Raison émanée de l’intelligence suprême qui régit le monde, particule de Dieu disséminée dans chaque être, qui lui révèle le Devoir, et l’associe à l’œuvre magnifiquement belle, souverainement juste de la création.

2199. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

Et quand j’apprends que, historiquement, c’est par une explication des symptômes névrotiques qu’il a commencé, je me demande si toute sa théorie des rêves et des lapsus n’est pas une extension un peu arbitraire, ou du moins trop systématique, d’une idée juste à un domaine qui ne pouvait pas la recevoir, tout au moins sous sa forme textuelle. […] N’insistons pas trop sur cette différence qui a besoin d’être notée, mais qui, comme nous verrons, n’est juste qu’en gros. […] Son analyse et les citations sur lesquelles il l’appuie sont trop justes pour que je puisse faire autre chose que vous y renvoyer. […] Ce qu’il y a de juste et de profond dans les vues de Proust sur ce point, c’est que ce quelque chose n’a pas besoin du tout, pour déterminer l’amour, d’être une promesse de bonheur, ni même de constituer une ressemblance positive avec nous-mêmes. […] En apparence rien qu’une description admirablement amusante ; mais ne sentez-vous pas la pénétration qu’implique ce petit tableau, et le profond effort de l’esprit qui a été cherché ce trait si juste, à la fois si particulier et si général : « Ivre de camaraderie, de médisance et d’assentiment. » Vraiment, c’est bien de la même pression que l’esprit de Proust exerçait sur les clochers de Martinville, qu’il est né.

2200. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

» Le palais, avec ses pauvres statues de femmes qui ont servi de cible, ses pauvres femmes blessées aux seins par les balles prussiennes, n’est plus que la façade meurtrie d’une ruine : une ruine à conserver, comme l’Allemagne a conservé Heidelberg, une ruine à entourer de lierre et de plantes grimpantes, montant le long de ses pilastres, de ses bas-reliefs, de ses marbres recuits et éclatés, — une ruine dont la vue et la légende entretiendront, comme la ruine du Palatinat, la juste haine et le désir enragé de la vengeance. […] J’entends, aujourd’hui, ce juste adoptant la criminelle formule de Bismarck : La force prime le droit ; je l’entends déclarer que les nations et les individus qui ne peuvent pas défendre leurs propriétés, ne sont pas dignes de les conserver. […] Il est vrai que ces messieurs rassurants, ces messieurs du nouveau pouvoir, ne gardent le pouvoir que juste le temps nécessaire pour livrer la société, désarmée par leurs bonnes mines, leurs douces paroles et leurs blanches cravates, à la bêtise et à la férocité des gens groupés derrière eux. […] Toute la causerie est sur la cherté de la vie, et l’orateur du groupe conte qu’il a eu un père qui tournait la meule : « Il ne gagnait que cinquante sous par jour, dit-il, et cependant il a pu nourrir trois enfants, tandis que moi qui gagnais cinq francs sous l’Empire, j’ai eu toutes les peines à en nourrir deux. » La hausse des salaires ne correspondant pas au surenchérissement de la vie ; voilà au fond le grand et le juste grief de l’ouvrier contre la société actuelle… Ici je me rappelle que mon frère et moi, avons écrit quelque part que la disproportion entre le salaire et la cherté de la vie tuerait l’Empire… Et l’ouvrier ajoute : « Qu’est-ce que ça me fait à moi, qu’il y ait des monuments, des opéras, des cafés-concerts, où je n’ai jamais mis le pied, parce que je n’avais pas d’argent. » Et il se réjouit de ce qu’il n’y aura plus, dorénavant, de gens riches à Paris, persuadé qu’il est, que la réunion des gens riches, en un endroit, y fait monter la vie. […] Je lui montre le journal, en lui disant que mon exclamation vient de ce que j’ai une maison à Auteuil, placée juste en face de la batterie. « Moi aussi, dit-il, j’en ai une ! 

2201. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Et ceci est le fruit de ce jus politicum et regale sous lequel nous vivons… Tout habitant de ce royaume jouit des fruits que lui produit sa terre, ou que lui rapportent ses bêtes, et aussi de tous les profits qu’il peut faire par son industrie propre ou par celle d’autrui, sur terre et sur mer ; il en use à son gré, et personne ne l’en empêche, par rapine ou injustice, sans lui faire une juste compensation157… Il n’est point appelé en justice, sinon devant les juges ordinaires et selon la loi du pays, ni saisi dans ses possessions ou dans ses biens-meubles, ni arrêté pour un crime, si grand ou si énorme qu’il soit, sinon selon la loi du pays et devant les juges susdits… C’est pourquoi les gens de ce pays sont bien fournis d’or et d’argent et de toutes les choses nécessaires à la vie. […] Par ce mouvement intérieur, le modèle idéal est déplacé, et l’on voit jaillir une nouvelle source d’action, l’idée du juste. […] » Avec les mêmes inquiétudes, Piers Plowman part pour chercher Bien-Faire, et demande à chacun de lui enseigner où il le trouvera. « Chez nous », lui disent deux moines. « Non, dit-il, puisque l’homme juste pèche sept fois par jour, vous péchez, et ainsi la vraie justice n’est pas chez vous. » C’est à « l’étude et à l’écriture », comme Luther, qu’il a recours ; les clercs parlent bien de Dieu à table et aussi de la Trinité, « en citant saint Bernard, avec force beaux arguments pompeux, quand les ménestrels ont fini leur musique ; mais pendant ce temps les pauvres peuvent pleurer à la porte et trembler de froid sans que nul les soulage. » Au contraire, on crie contre eux comme après des chiens, et on les chasse. « Tous ces grands maîtres ont Dieu à la bouche, ce sont les pauvres gens qui l’ont dans le cœur168 », et c’est le cœur, c’est la foi intérieure, c’est la vertu vivante qui font la religion vraie.

2202. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Cette impression me paraît très juste. […] Or, dans le deuxième « discours » de cette édition furtive et fautive : Contre les mœurs de la ville de Paris, je trouve ce vigoureux morceau à la Juvénal ou à la d’Aubigné : … Et pour dernière horreur, pour comble de misère, Qui pourrait aujourd’hui sans un juste mépris Voir Italie en France et Rome dans Paris ? […] Je choisis trois petits morceaux de ton différent : quelques vers d’amour d’Hémon et d’Antigone ; quelques vers de psychologie juste et aisée où le politique Créon explique pourquoi il veut que les deux frères se rencontrent pour un accommodement ; et quelques vers d’Étéocle au moment où il attend Polynice et sent redoubler sa haine à l’approche de son frère. […] Je ne vous analyserai point l’action d’Andromaque, mais je vous en rappellerai l’essentiel, juste ce qu’il faut pour vous en remettre en mémoire la composition si simple et si liée. […] Il se souvient aussi — encore un peu — des leçons de Sénèque, des déclamations d’école sur le juste et l’honnête.

2203. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Sacaze traduit : « Au dieu Ilixon, Fabia Festa : juste accomplissement d’un vœu spontané. » Plus loin, sur un cippe, autre inscription encore plus rébarbative : ISCITTO DE HVNNV VLOHOXIS FIL… V. […] Et il dit, ma foi, des choses fort justes : Y pensez-vous bien, voyons ? […] Quand, par hasard, leur admiration tombe juste, elle gâte aussitôt les œuvres où elle s’abat. […] Sigebert, attentif à se bien parer, avait différé l’instant de descendre de chez lui, juste assez pour ne se faire attendre que très peu. […] Seulement, constatons quelques faits et soyons justes.

2204. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

« Laissez-la fichée, me dit Goethe, elle y restera pendant quelques jours et sera un souvenir de notre partie. » XI Un second jugement de lui sur Byron est d’une justesse qui diminue l’enthousiasme, le voici : Il n’est pas juste que la haine et l’immoralité reçoivent la récompense de la charité et de l’amour. […] Il était content d’avoir noué d’aussi heureuses relations avec Ampère, et il s’en promettait les plus heureuses suites pour la diffusion et la juste appréciation de la littérature allemande en France.

2205. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Wilder définit, exactement et clairement, l’idée artistique wagnérienne ; c’est une explication juste, aisée et utile. […] Weber, sérieux, juste et avisé critique, a-t-il traduit ces essais de plaisanteries, bons mots délaissés par le Tam-Tam ; pas une observation : louanges et blâmes de collégien ; nulle intelligence de l’œuvre, ni des sujets, ni de la musique, ni des vers, ni de la représentation… L’auteur est, surtout en les derniers chapitres, favorable à Richard Wagner ; les articles sur Parsifal et la mort de Wagner laissent voir une admiration que l’auteur tâche à dissimuler par un ton badin ; il faut donc mettre son livre au rang des ouvrages pour Richard Wagner : cela importe peu.

2206. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Gabriel Monod, directeur de la Revue Historique, ayant écrit à Richard Wagner pour lui dire son admiration à la Tétralogie et ses regrets de ce qu’Une Capitulation rendit difficile aux Français la juste appréciation d’elle, Richard Wagner lui répondit par une assez longue lettre datée de Sorrente, du 25 octobre 1876, dont la traduction a été publiée après la mort du Maître, par la Revue Politique et Littéraire, en février et reproduite par un grand nombre de journaux français et allemands, puis dans le volume de souvenirs de Richard Wagner publié par M.  […] Cet argument ne saurait convaincre les antiwagnériens, tout juste ceux qui étaient déjà acquis à sa cause.

2207. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

William James suppose que, semblablement, le Créateur fasse naître tout d’un coup un homme avec un cerveau contenant des processus analogues à ces processus d’images évanouissantes qui existent dans un cerveau ordinaire après une certaine expérience de la vie ; le premier stimulus réel qui agirait après la création sur le cerveau d’Adam serait donc accompagné d’un processus évanouissant additionnel : ces deux processus s’envelopperaient l’un l’autre, « et l’homme nouvellement créé aurait sans aucun doute, juste au premier instant de sa vie, le sentiment d’avoir existé déjà depuis un certain espace de temps ». — L’hypothèse est ingénieuse, la solution nous semble inexacte. […] En effet, la simultanéité et la succession ne tomberaient pas elles-mêmes sous notre perception si la représentation du temps ne leur servait a priori de fondement. » Selon nous, comme selon Guyau, c’est juste l’opposé de l’ordre réel.

2208. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Incontestablement cette vie de Jésus en plus de cent tableaux, cette représentation où se mêle à une habile retrouvaille de la réalité des milieux, des localités, des races, des costumes, le mysticisme du peintre, produit à la longue, par le nombre et la lente succession de ces études, un grand apitoiement, et même fait monter en vous une tristesse, au souvenir de ce juste, une tristesse attendrie qu’aucun livre ne vous apporte. […] Je suis parvenu, en guidant l’ébauchoir du sculpteur, à affiner la grosse et large matérialité qu’il avait donnée à sa figure, à resserrer le bas du visage, où il y avait une si jolie et si petite touche, ce bas du visage que tous les dessinateurs ont allongé au détriment du haut de la tête ; je suis parvenu à lui refaire la ligne du nez tout à fait juste.

2209. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Elle répéta avec platitude que les anglais trouvaient que Féval ne savait ni la grammaire de leur langue ni la grammaire de leurs mœurs, comme si, dans leur insularisme susceptible et hautain, et tout aussi intellectuel que politique, les anglais, enragés de nationalité blessée et justes comme des bœufs qui saignent, ne dénigreront pas toujours l’étranger qui voudra les peindre ou s’avisera de les juger. Je serai plus juste, moi !

2210. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Jusque-là il était abbé comme on l’était volontiers alors, ayant le titre et quelques bénéfices ; mais il n’était point lié à son état, il n’était prêtre à aucun degré ; et en 1755, à l’âge de quarante ans, on le voit hésiter beaucoup avant de franchir ce pas dont il sent le péril, et d’où sa délicatesse d’honnête homme l’avait tenu éloigné jusque-là : « Je me suis lié à mon état, écrit-il à Pâris-Duverney (le 19 avril 1755), et j’ai mis moi-même dans cette démarche tant de réflexions que j’espère ne m’en repentir jamais1. » Quant aux petits vers galants, ils sont de sa première jeunesse ; il cessa d’en faire à l’âge de trente-cinq ans : J’ai abandonné totalement la poésie depuis onze ans, écrit-il à Voltaire en décembre 1761 ; je savais que mon petit talent me nuisait dans mon état et à la Cour ; je cessai de l’exercer sans peine, parce que je n’en faisais pas un certain cas, et que je n’ai jamais aimé ce qui était médiocre ; je ne fais donc plus de vers et je n’en lis guère, à moins que, comme les vôtres, ils ne soient pleins d’âme, de force et d’harmonie ; j’aime l’histoire… Il y a donc, avant tout, quand on parle de Bernis, à bien marquer les époques, si l’on veut être juste envers un des esprits les plus gracieux et les plus polis du dernier siècle, envers un homme d’une capacité réelle, plus étendue qu’on ne pense, et qui sut corriger ses faiblesses littéraires ou ses complaisances politiques par une maturité décente et utile, et par une fin honorable.

2211. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Mais sans Malherbe, sans sa juste et ferme direction, on peut croire que Racan n’eût point été ce qu’on l’a vu, et lui-même, s’adressant à son maître, a dit : « Je sais bien que votre jugement est si généralement approuvé, que c’est renoncer au sens commun que d’avoir des opinions contraires aux vôtres. » Né en 1589 au château de La Roche-Racan, en Touraine, aux confins du Maine et de l’Anjou, Racan, de trente-quatre ans plus jeune que son maître, connut Malherbe étant page de la chambre de Henri IV.

2212. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Respectées de tous, peu aimées de Louis XV qui les trouvait (cela est assez naturel) trop hautes et trop dignes, et de qui on a recueilli une parole défavorable qui n’est peut-être pas juste, elles disparaissent dans la continuité de leurs devoirs et dans l’uniformité de leur vie.

2213. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Car, de même que saint Louis, malgré sa piété, résiste quelquefois à l’Église quand il s’y croit fondé en justice et sur le bien de ses sujets, de même Joinville, malgré son dévouement à son maître, lui résiste quand il se croit dans le juste et dans le vrai.

2214. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

En fille pieuse, elle obéit, mais elle ne put s’empêcher de dire : « Je suis donc l’agneau politique qui vais être sacrifié pour le pays. » L’agneau, quand on la connaît, peut paraître un terme singulièrement choisi pour une si forte victime ; mais la comparaison reste juste, tant le cœur chez elle était tendre et était bon.

2215. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Cependant il trouvait du temps pour des applications plus graves ; son esprit juste cherchait à simplifier tout ce qu’il étudiait, et se dirigeait avec utilité vers l’histoire.

2216. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Le plus souvent il n’avait qu’à se montrer pour donner courage à ses alliés du dedans, aux bons habitants qui entraînaient les autres : les consuls et échevins, plus circonspects d’ordinaire et gens déjà de juste milieu, ont besoin pour se rendre que la rue s’en mêle et qu’on leur force la main.

2217. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Mémoires ou journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guetté. Tomes iii et iv· » pp. 285-303

Je cherche dans cette paperasserie quelques pages du moins qui instruisent, qui consolent de tant de petitesses ; je cherche des passages où les défauts mêmes de l’abbé Le Dieu aient jusqu’à un certain point leur juste emploi.

2218. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

J’ai dit qu’on pouvait étudier à nu le type du métaphysicien en sa personne ; il est juste d’ajouter que ce type, entier et accompli de tout point dans une nature telle que celle de Kant, est fragile et fuit par bien des côtés chez Maine de Biran.

2219. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Il y a un côté par où M. de Mirabeau tomba dans la secte et fut un dévot au docteur Quesnay ; mais, en laissant ce côté particulier et ce coin de paradoxe économique, que d’idées fines et justes dans ses écrits, que de vues justifiées par l’expérience et que ne désavouerait pas le bon sens politique, soit qu’on le prenne dans son mémoire de début sur L’Utilité des États provinciaux (1750), soit dans maint chapitre de L’Ami des hommes (1756), soit dans la Théorie de l’impôt (1760) qui le fit mettre cinq jours au donjon de Vincennes, par un simulacre de châtiment et une concession faite aux puissances financières du temps !

2220. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Les contemporains appelaient le marquis d’Argenson (pour le distinguer de son frère plus fin et plus poli) d’Argenson la bête : on conçoit, quand on a lu et vu le marquis en déshabillé avec toutes ses rudesses et ses grossièretés de nature, que des gens du monde, surtout sensibles à la forme, lui aient donné ce surnom-là ; mais il faut convenir que la bête avait de terribles instincts, et qu’elle devinait plus juste bien souvent que les soi-disant spirituels.

2221. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

 » Voilà la vraie morale humaine, ramenant les choses au juste point, sans exagération, sans haine, sans frayeur et sans terreur.

2222. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

appris l’italien auquel elle excella vite, qu’au commencement de sa liaison avec Alfieri et pour lui complaire ; jusque-là, on ne parlait que français dans son salon ; — elle disait donc de l’Angleterre, en termes justes et excellents : « J’ai passé environ quatre mois en Angleterre et trois à Londres.

2223. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

L’image du plomb incrusté dans la réalité, de l’effigie d’airain emportée d’un coup de ciseau, cette image si juste quand elle s’applique au père de Mateo Falcone, de Tamango et de Catalina, jure énormément avec la nature tout ailée du génie à qui l’on doit Psyché, le Lis du Carmel, et ces Actes sans nombre d’où les chants séraphiques s’exhalent comme des bouffées de chauds aromes ou les nuées d’encens dans les sanctuaires73.

2224. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

Si l’on n’emporte que juste le nécessaire, on se trouve bientôt aux expédients.

2225. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Mlle de Liron est une jeune fille de vingt-trois ans qui habite à Chamalières, près Clermont-Ferrand en Auvergne, avec son père, M. de Liron, dont elle égaie la vieillesse et dirige la maison, suffisant aux moindres détails, surveillant, dans sa prudence, les biens, la récolte des prairies, et aussi l’éducation de son petit cousin Ernest, de quatre ans moins âgé qu’elle, et qui, depuis quatre ans juste, est venu du séminaire de Clermont s’établir chez son grand-oncle et tuteur.

2226. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Et, mettant en nos mains, par un juste retour Les armes dont se sert sa vengeance sévère     Il ne vous fasse en sa colère     Nos esclaves à votre tour.

2227. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

votre reproche est juste : je voudrais pouvoir sécher vos larmes, mais il vous faut implorer le secours d’une main plus puissante que celle des hommes.

2228. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

L’esprit, la pénétration brillaient en lui de toutes parts jusque dans ses violences ; ses reparties étonnaient, ses réponses tendaient toujours au juste et au profond ; il se jouait des connaissances les plus abstraites ; l’étendue et la vivacité de son esprit étaient prodigieuses et l’empêchaient de se fixer sur une seule chose à la fois.

2229. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Boileau lui a donné ce juste éloge, d’avoir été avant Molière l’écrivain qui a le mieux connu les mœurs des hommes.

2230. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Par là, et par l’ampleur, l’harmonie, la beauté rationnelle et la souplesse du plan conçu ; par l’activité ardente et méthodique déployée dans l’exécution ; par l’importance des résultats acquis et des fondations demeurées ; enfin par le bonheur qu’il eut d’imprimer à tout l’enseignement national une direction si juste, si bien prise dans le droit fil des plus légitimes besoins et des meilleurs désirs de notre temps, que ses successeurs, depuis vingt-cinq ans, n’ont eu qu’à la maintenir, j’ose dire que le ministère de M. 

2231. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Je pourrais ajouter étourdiment : comme la déesse Vénus suscitant l’idée de Beauté par ses seules formes merveilleuses ; mais on objecterait avec raison à ce dernier exemple que toute œuvre d’art est donc symbolique, puisque, étant belle, elle doit susciter l’idée de beauté…, cela est vrai, tout juste comme la tour Eiffel est le symbole de la hauteur.

2232. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Ce défaut tient encore à une autre vanité des savants, qui tient elle-même de très près à l’esprit superficiel, contre lequel ils ont une si juste horreur : c’est de faire des livres non pour être lus, mais pour prouver leur érudition.

2233. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Par suite, une juste proportion entre l’histoire et la réalité qu’elle veut retracer exige qu’on mette en pleine lumière la tragicomédie dont l’apparition est devenue une date du théâtre français en laissant dans la pénombre ses deux sœurs mal nées.

2234. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

Rien n’étant vrai que dans certaines limites, le danger pour une idée juste, c’est d’être poussée à bout.

2235. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

. — Et tout en haut, des groupes de dieux, de plus en plus vrais, de plus en plus justes, montant et se succédant dans l’éther.

2236. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Alors la jeune femme pleure et s’indigne ; il y a de l’amertume dans ses larmes ; sa plainte exhale la juste colère d’un noble cœur frappé, pour la première fois, par la trahison.

2237. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

En vérité, madame, il n’est pas juste qu’il soit malheureux en tant de façons.

2238. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

C’est en 1843, c’est-à-dire cinquante années juste après la mort de Barnave, qu’ont paru ses Œuvres très authentiques recueillies par la piété d’une de ses sœurs, Mme de Saint-Germain, aidée des soins de M. 

2239. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

« Il ne prétend à rien moins, disait La Harpe, qu’à remplacer Turenne, Corneille et Bossuet. » Il serait trop aisé après coup et peu juste de venir faire une caricature de M. de Guibert, de cet homme que tout le monde, à commencer par Voltaire, considéra d’emblée comme voué à la grandeur et à la gloire, et qui a tenu si médiocrement la gageure.

2240. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Il paraît, d’après des témoignages plus justes, que M. 

2241. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Dans un grand nombre de cas, pourtant, Diderot a de ces remarques justes et frappantes de vérité, et qu’il exprime encore moins en critique qu’en peintre.

2242. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Flourens a présenté en toute lucidité ce second et dernier Fontenelle ; il l’a dépouillé non pas de ses particularités, mais de ses petitesses, et nous l’a fait voir au seuil du sanctuaire, investi de la dignité des sciences, leur juste interprète aux yeux de tous, sans solennité aucune, et ne les rabaissant pourtant jamais que moyennant une familiarité noble et décente.

2243. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Soyons juste pour tous : en s’emparant de son idée même, il fallait, pour la dresser et la faire tenir à la scène et sur les planches, y ajouter quelque chose, et ce quelque chose était aussi une part d’invention.

2244. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Le héros de roman s’était heurté contre la réalité et s’y était brisé : il va essayer, dans la seconde partie de sa vie, d’être un héros d’histoire, mais la fortune lui en refusera l’occasion, et, en la lui refusant, elle ne sera que juste.

2245. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

« Buffon vit absolument en philosophe, a dit un judicieux observateur47 ; il est juste sans être généreux, et toute sa conduite est calquée sur la raison.

2246. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

C’est l’abbé de Pradt qui a dit cela en tête d’un de ses écrits (Les Quatre Concordats) ; et, sans regarder toutes les paroles que jetait cet homme d’esprit comme autant d’oracles, il est juste de tenir compte de ses jugements, surtout quand il s’agit du style de pamphlets, de brochures politiques, de ce style qui prend et mord sur le public, même en matière sérieuse : l’abbé de Pradt s’y connaissait.

2247. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

[NdA] Il y a une autre épigramme de Le Brun contre Andrieux, et qui, également innocente, paraîtra plus juste, car les Contes de cet homme d’esprit n’ont jamais endormi personne ; la voici : Dans ces Contes pleins de bons mots Qu’Andrieux lestement compose, La rime vient mal à propos Gâter le charme de la prose.

2248. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Il avait peu, on le voit, le sentiment du bien et du mal, du juste et de l’injuste.

2249. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Et si quelqu’un s’avisait que je n’ai pas donné à Courier assez d’éloges, je m’autoriserais de ce que lui-même, parlant de Béranger, n’a trouvé à dire que ceci : « J’ai encore dîné hier avec le chansonnier, écrivait-il de Sainte-Pélagie (octobre 1821) : il imprime le Recueil de ses chansons qui paraît aujourd’hui… Il y a de ces chansons qui sont vraiment bien faites : il me les donne. » C’est ainsi, j’imagine, qu’en Grèce, avant l’âge des éloges et des panégyriques, et quand on était de l’école de Xénophon, on louait ses amis par un mot juste et léger, dit en passant.

2250. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Cette réserve faite, on trouvera juste cette définition du beau donnée par M. 

2251. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

La Fortune des Rougon, la Faute, Une page, Germinal, sont souillés du sang des justes.

2252. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Il avait ce jour-là juste cinquante-deux ans, étant né le 23 avril 1564.

2253. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre I. La demi-relativité »

Le Temps, dis-tu encore, s’est dilaté, et tu comptes plus d’une seconde là où mes horloges en marquent tout juste une ?

2254. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

Là s’applique le mot si juste de Racine : « Ce qui se passe à deux mille lieues de nous semble presque se passer à deux mille ans. » Tel dut être pour l’imagination de la Grèce ce lendemain de sa victoire, contemplé dans le deuil même de ses ennemis, au-delà des mers, au milieu de leurs villes dépeuplées et de leurs palais tremblants.

2255. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

La poésie du Dante alla plus loin : tel homme pervers, qu’elle avait désigné, n’osa se tuer, par effroi même des peintures du poëte, mais traîna la vie sous la damnation de ses remords, dans la solitude que lui faisait la juste horreur de ses concitoyens.

2256. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Il savait être ferme pour défendre ce qu’il croyait juste ; il avait fait assez de sacrifices à ses convictions pour avoir le droit de ne pas se fatiguer dans des discussions inutiles. […] D’un autre côté, il répandait partout la curiosité des questions religieuses, et si les croyants ont pu l’accuser de profaner la religion, on peut à plus juste titre lui accorder le mérite d’avoir fait comprendre à tous l’importance de la science des religions pour l’intelligence de l’histoire et d’avoir éveillé dans beaucoup d’âmes le goût des choses religieuses. […] L’œuvre de Taine, au contraire, plus limitée, mais d’une solide unité, d’une logique inflexible, est en étroite relation avec le temps où il a vécu ; elle a fortement agi sur ce temps et en a été la plus complète et la plus juste expression. […] Il voit avec une puissance extraordinaire, mais il ne voit pas tout et il ne voit pas toujours juste. […] L’avenir seul pourra discerner dans son œuvre les intuitions justes et les rêveries éphémères.

2257. (1929) Amiel ou la part du rêve

C’était la nature la plus opposée à celle de son mari, un homme juste, loyal, mais qui s’irritait de toute déception, marquait à la vie des échéances fixes, exigeait qu’elle fût fidèle à ces échéances comme lui-même, commerçant, faisait honneur aux siennes, prenait toute contrariété pour un mauvais procédé, n’avait jamais pu admettre qu’on fût longtemps malade autour de lui, ce qui était malheureusement le cas de sa femme. […] Quand le Vaudois Juste Olivier vint à Paris à vingt ans, il alla voir Sainte-Beuve à peine plus âgé, et il nous a gardé bien vivante dans son journal leur précieuse conversation. […] La remarque n’est juste qu’à condition d’être tempérée par : Quelquefois, ou il arrive que. […] Au-dessus de ces pécheurs, il y a les justes, il y a M. 

2258. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Les nouveaux jeunes gens sont impétueux, si mes renseignements sont justes : le scepticisme leur serait une souffrance. […] Vous défendrez la Ville, les tombeaux, les palais, et tant de causes justes. […] Ernest Dupuy a publié de très remarquables études, très attentives, méthodiques et justes. […] Voilà un sentiment très juste. […] Certes, il n’était ni impartial ni exactement juste, dans sa polémique.

2259. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Qu’ils veillent sur la pureté de leur cœur, qu’ils propagent dans la race des vertus nouvelles, qu’ils soient des sages et des justes, et qu’étant sages, ils soient utiles à leur patrie. […] Je me bornerai à citer ici l’Hymne à la Vie, qui est parmi les plus purs et les plus radieux de ce livre : Salut, Père des bois, des eaux et des charrues, Vers qui va la chanson des justes et des purs. […] Il sait combiner selon de justes proportions les apports merveilleux que lui charrient ses sens, il orchestre ses sentiments, donne à leur déroulement des inflexions musicales ; il en obtient des effets symphoniques.

2260. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Quand on relit aujourd’hui ce petit écrit, on y trouve des idées justes, des vérités et des prévisions en partie justifiées.

2261. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

c’est beaucoup qu’il fallait dire, et si l’on ne voulait pas, comme l’abbé Le Grand, les énumérer dans leur richesse, il fallait du moins y insister davantage, pour prouver l’extrême détresse et pénurie, pour donner une juste idée de la disproportion qu’il y avait entre les magnifiques objets mis en gage et l’argent prêté dessus.

2262. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Pour être juste, il faudrait rassembler les nombreux articles de d’Argenson où il est question de Voltaire, car ils se complètent et se corrigent les uns les autres.

2263. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Quelle dépense, quelle tension des forces intellectuelles ne faut-il pas seulement pour ordonner en soi-même et pour organiser un grand ensemble, et quelles forces, quelle vie tranquille et sans troubles ne faut-il pas pour procéder à l’exécution, pour fondre tout, d’un seul jet d’expressions justes et vraies !

2264. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

La Jeunesse du Cid, de Guillem de Castro, pièce en trois journées, était sa matière première : quel fut au juste le profit qu’il en tira ?

2265. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Toutes ces bonnes et justes méthodes d’éducation que je vois appliquées et adressées au sexe et dont des femmes agréablement sérieuses, les Pauline de Meulan, les Tastu ont dès longtemps donné les préceptes et la pratique, se rapportent à la méthode vivante et personnelle de Mme Roland.

2266. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

— Mais quand d’Argenson a trouvé un mot juste, il le fait payer cher.

2267. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

Par le courrier arrivé de Strasbourg à Paris le 30 janvier, on sait déjà fort au juste à quoi s’en tenir ; et le duc de Luynes, qui représente le coin de la reine et qui n’a nul intérêt à surfaire la dauphine, insère dans son Journal un signalement sans flatterie : « Elle y arriva (à Strasbourg) vêtue à la polonaise.

2268. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

73 Ses premiers goûts, sa première vocation, le portaient vers la sculpture : il y réussissait et promettait un artiste distingué ; il avait remporté, je ne sais en quelle année au juste, le premier prix dans un des concours pour Rome.

2269. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

La misanthropie et l’orgueil qui venaient à la traverse, les perpétuelles discussions qui entrecoupent ses rêveries, le recours aux hypothèses hasardées, et, pour parler juste, un génie politique et logique, qui ne se pouvait contraindre, firent de lui autre chose qu’un poëte qui charme, inonde et apaise.

2270. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

L’ironie est tout juste assez pour montrer combien ce converti, ce cœur dévot et tendre, sait le monde, combien il était remuable à ses moindres souffles ; et, s’il y a vengeance ou coquetterie à lui à faire connaître qu’il le sait si bien et que, s’il pardonne les malices, ce n’est pas qu’il les ignore, cette coquetterie, cette vengeance est bien fine et bien vite passée, et fait à la lecture un délicieux contraste avec l’onction qui d’ailleurs déborde.

2271. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Procédant d’Amyot en style bien plus que Seyssel, le délicieux écrivain François de Sales, né au château de son nom, résidait à Annecy ; avec son ami le président Antoine Favre, jurisconsulte célèbre et père de l’académicien Vaugelas, il fondait, trente ans juste avant l’Académie française, une académie dite Florimontane, où la théologie, les sciences et aussi les lettres étaient représentées : leur voisin Honoré d’Urfé en faisait partie28.

2272. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Il s’est ressouvenu vivement de l’idée monarchique et a estimé qu’elle n’avait pas obtenu sa part historique suffisante, son juste rôle, dans les récents travaux des plus illustres maîtres sur nos vieilles races.

2273. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

C’est un beau moment pour le critique comme pour le poëte que celui où l’un et l’autre peuvent, chacun dans un juste sens, s’écrier avec cet ancien : Je l’ai trouvé !

2274. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Pour être juste, il faut tenir compte de la différence des temps, et ne pas chicaner un écrivain sur les moyens d’expression qu’il a choisis, quand on n’en connaissait pas d’autres de son temps.

2275. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

L’indignation est la seule passion où il aille de lui-même chercher une source de poésie : c’est le sentiment le plus accessible à la mollesse épicurienne et à la sécheresse intellectuelle ; l’Enfer s’explique par la révolte d’une chair délicate, et d’un esprit juste, devant la souffrance physique injustement infligée.

2276. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Surtout ils ne se sont jamais doutés combien cette féroce application à tout convertir en notes pour des livres pouvait fausser les justes proportions, altérer la vraie couleur de la vie.

2277. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Anatole France me donnent ce plaisir ; et c’est en relisant le Crime de Sylvestre Bonnard et le Livre de mon ami que me sont venues ces réflexions — que je donne pour ce qu’elles valent, car elles sont justes sans l’être et je sens très bien tout ce que j’y néglige.

2278. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Ce sont des êtres mystérieux tout pleins d’inconnu, dont on peut tout attendre et dont on ne sait jamais au juste ce qui va sortir.

2279. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

La définition la plus générale du goût, sans considérer s’il est bon ou mauvais, juste ou non, est ce qui nous attache à une chose par le sentiment ; ce qui n’empêche pas qu’il ne puisse s’appliquer aux choses intellectuelles, dont la connoissance fait tant de plaisir à l’ame, qu’elle étoit la seule félicité que de certains philosophes pussent comprendre.

2280. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre X. La Science est-elle artificielle ? »

La règle du tric-trac est bien une règle d’action comme la science, mais croit-on que la comparaison soit juste et ne voit-on pas la différence ?

2281. (1890) L’avenir de la science « II »

Voltaire n’a pas prétendu dire autre chose dans ses nombreuses attaques contre l’optimisme : ce sont de justes satires des absurdités de son siècle.

2282. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Dans la Nouvelle Héloïse, c’est la femme qui périt par accident, juste à temps pour ne pas tomber dans les bras de son ami ou dans une profonde désespérance.

2283. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Molière y cède, lorsque dans la plupart de ses pièces il introduit un représentant du bon sens, un raisonneur, qui porte des noms variés, mais qui toujours est chargé de rappeler au sentiment de la juste mesure ceux qui s’en écartent dans un sens ou dans l’autre.

2284. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

Saumaise s’offusquait de le trouver « pétri d’hébraïsmes », et le savant voyait juste, si le pédant avait tort.

2285. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Le poète avait, comme à plaisir, accumulé les obstacles sur son champ de combat : situations scabreuses, scandales à tourner, justes scrupules à vaincre, objections toutes prêtes à surprendre.

2286. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

» Portant donc la parole pour cette lanterne le lendemain de la nuit du 4 août, au milieu de beaucoup d’éloges décernés aux membres de l’Assemblée et aux Parisiens, il lui fera dire : Il est temps que je mêle à ces éloges de justes plaintes.

2287. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Les poètes surtout, ceux qui se groupaient dans le recueil de La Muse française, Guiraud, Vigny, Hugo, Deschamps, aimaient alors à prédire à Delphine, comme on l’appelait tout fraternellement, la couronne de l’élégie lyrique : Son talent tout jeune, me dit un de ces fidèles témoins que j’ai voulu interroger pour être juste, nous paraissait devoir être un mélange de vigueur masculine avec une sensibilité de femme du monde, plus affectée des choses de la société que des spectacles de la nature ; plus nerveuse que tendre, plus douloureuse que mélancolique : le tout marchant de concert avec beaucoup d’esprit réel, sans prétentions, et se manifeste tant sous une forme de versification pure, correcte, savante même et assez neuve alors.

2288. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Si Mme Angebert tient plus à la vérité qu’à la fausse exaltation, elle peut aisément s’informer à son tour auprès des personnes de Provins qui nous ont le mieux initié à la connaissance de ce touchant mais trop faible caractère ; elle peut, par exemple, demander à Mme Guérard communication des lettres de Moreau écrites en janvier 1834, et elle verra qu’il faut se résoudre, quand on a le sens juste et bienveillant, à ne voir dans le chantre de la Voulzie qu’un poète.

2289. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

À peine, en ces cinquante notes, en est-il une dont on ne puisse citer des passages, non pas seulement éloquents, mais vrais, mais justes, et d’une prophétie trop justifiée par l’expérience.

2290. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Il est bien juste que je tire quelque avantage d’une gloire que vous acquérez à un prix si cher pour mon âme et pour toute ma tranquillité.

2291. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

N’ayant en tout ceci d’autre désir que d’être vrai et d’autre rôle que d’exposer fidèlement un caractère auquel le mot de traître ne convient pas, un de ceux auxquels il s’applique le moins, je demande à bien définir la question politique d’alors, telle que nos souvenirs calmés nous la laissent voir à cette distance, et je veux d’abord l’élever à sa juste hauteur.

2292. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Mémoires de Daniel de Cosnac, archevêque d’Aix. (2 vol. in 8º. — 1852.) » pp. 283-304

Lorsque je voulus représenter à M. le prince de Conti que je m’étais engagé à Molière sur ses ordres, il me répondit qu’il s’était depuis lui-même engagé à la troupe de Cormier, et qu’il était plus juste que je manquasse à ma parole que lui à la sienne.

2293. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Dans son voyage aux États-Unis, étudiant les sauvages, il leur compare à tout instant les Grecs, ceux d’Homère, passe encore, mais aussi ceux de Sophocle et d’Euripide : « Les tragédies de Sophocle et d’Euripide me peignent presque littéralement, dit-il, les opinions des hommes rouges sur la nécessité, sur la fatalité, sur la misère de la condition humaine, et sur la dureté du Destin aveugle. » Volney, même quand il atteint la ligne juste, exagère toujours en la creusant trop ou en la dépouillant de ce qui l’accompagne.

2294. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

Mais, d’abord, l’ordre suivi par les partisans exclusifs de la sensation est juste l’opposé de l’ordre véritable.

2295. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Soyons justes, non.

2296. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Faire l’utile en même temps que le juste, cela finira certes par tenter l’Angleterre.

2297. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie Quelque justes et lumineux que soient les principes exposés par M. 

2298. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

— Dieu est juste !

2299. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

De même que son père n’est pas là pour la défendre lorsqu’elle est attaquée ou insultée sans raison, de même aussi, lorsque l’on a de justes reproches à lui adresser, son père n’est pas là pour rougir.

2300. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Nisard » pp. 81-110

On croyait avoir été juste.

2301. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Ils ont des jours où ils rencontrent juste, par le fait d’un organisme heureux : Chasles, sensible comme il l’était à la beauté littéraire, a eu de ces jours où il l’a bien vue et bien analysée, et où il nous l’a montrée resplendissante… Mais, devenu utilitaire sur son déclin, philanthrope, prédicateur, charitable, larmoyant et quaker, — car il est tout cela, et, chose plaisante !

2302. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

, y avait écrit cette petite-ci : « On a cru possible de jeter à la suite du Joseph Delorme quelques pièces qui en rappellent le ton, et qui ne pouvaient trouver place que là. » Seulement le nombre des pièces en question, qui ne sont qu’une vingtaine dans l’édition de 1886, dépassent de beaucoup la soixantaine dans l’édition d’aujourd’hui, et la Critique, pour être juste, doit tenir compte de ce nombre de pièces où l’accent diminué, gâté, affadi, mais l’accent autrefois profond et fiévreux du Joseph Delorme, est cependant sensible encore.

2303. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

Il faut donc revenir à l’impression faite par cette poésie sur l’âme individuelle du critique, mais, je dois le dire, je veux être d’autant plus juste que je suis charmé et que le critique est comme le juge.

2304. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

La belle ode de Napoléon à Sainte-Hélène, ce mélange d’apothéose et d’anathème, cette juste sentence portée par la poésie contre l’abus de la force et du génie, revit presque entière dans la traduction en strophes de forme inégale qu’en avait faite à vingt-deux ans la jeune Gomez ; et un des beaux chants de Victor Hugo, traduit de plus près encore et dans un mètre plus sévère, le chant intitulé le Poëte, rend à la langue espagnole avec naturel et passion ce que notre illustre compatriote lui avait pris de pompe et de splendeur.

2305. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Et que voulait-il au juste ? […] Ici, une chose extraordinaire et jolie (d’ailleurs conforme au dogme) : « Seule de tous les justes, Marie a conservé un corps. » Elle a seule un corps parmi les saints, dont les corps attendent dans la terre le jugement dernier, tandis que son corps, à elle, a été enlevé au ciel aussitôt après sa mort. […] Et Marie, — qui seule des justes a un corps, ne l’oublions pas, — approche du Calvaire immatériel. […] 1° Video meliora… et 2° les trois quarts des écrivains sont beaucoup plus sincères en écrivant qu’en vivant. » Cela me semble parfaitement juste. […] Cymodocée, en y mettant beaucoup de bonne volonté, y comprend juste ce qu’il faut pour dire : « Que ta religion soit la mienne, puisqu’elle enseigne à mieux aimer ! 

2306. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Cousin, vous auriez singulièrement modifié l’idée qu’on doit se former, pour être juste, d’un critique aussi éloquent, qui a su et entrevu tant de choses, qui nous a ouvert ou entrouvert tant d’horizons. […] Laissez-moi maintenant vous féliciter de tant d’observations fines et justes que je rencontre dans vos pages et vous remercier du flatteur témoignage de confiance que vous sollicitez de moi. […] Il serait plus juste de dire que ce livre n’exprime qu’une de ses croyances, qu’une des phases de son développement philosophique. […] Si nous voulons être justes dans le jugement que, nous portons sur quelqu’une des périodes de l’histoire de l’intelligence, il faut nous placer au point de vue du temps et renoncer pour un instant à nos préoccupations actuelles. […] Sans parler de Béranger, esprit juste mais exclusivement français, qui, dans un sentier étroit, côtoya les romantiques sans partager leurs enthousiasmes, leurs divagations et même leurs innovations de forme, et qui s’écriait : Redoutons l’anglomanie, Elle a gâté tout.

2307. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

C’est juste ce qu’il nous fallait pour nous émouvoir sans nous choquer. […] Son appréciation est, en général, égale pour tous, et à cause de cela il a vu souvent moins juste. […] Soyons justes pourtant. […] Il avait un sentiment juste des anciens, bien qu’il ait été dérouté par la transposition moderne de leurs procédés. […] Cherchez le mot juste, creusez l’idée, non pas à la surface, mais pour voir ce qui est dessous, ce qu’on n’a pas encore vu, ce qu’on n’a pas encore dit.

2308. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

La toile se lève sur la scène, où le peintre Puvis de Chavannes a peint d’assez cocasses décors — une scène où il y a juste la place pour un soufflet et un coup de pied dans le derrière. […] Nous montons, par un petit escalier compliqué, à la chambre de Sainte-Beuve, juste au-dessus du salon, chambre où l’on voit en entrant un lit avec un édredon, en face deux fenêtres sans grands rideaux, à gauche deux bibliothèques d’acajou pleines de reliures, genre Restauration, et montrant sur le dos des fers dans le goût du gothique de Clotilde de Surville ; au milieu de la pièce est une table chargée de volumes, et dans les coins, contre les bibliothèques, des amas de journaux et de brochures, un empilement, un fouillis, un désordre de déménagement : l’aspect d’une chambre d’hôtel garni, habitée par un bénédictin.

2309. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Et cette présupposition est illusion pure, car l’idée de néant absolu a tout juste autant de signification que celle d’un carré rond. […] Que signifie au juste la « toute-puissance » ?

2310. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Celui, disait-il un peu plus tard, qui connaît la vraie nature de la poésie, « découvre bientôt quelles méprisables créatures sont les rimeurs vulgaires, et quel religieux, quel glorieux, quel magnifique usage on peut faire de la poésie dans les choses divines et humaines »… « Elle est un don inspiré de Dieu, rarement accordé, et cependant accordé à quelques-uns dans chaque nation, pouvoir placé à côté de la chaire, pour planter et nourrir dans un grand peuple les semences de la vertu et de l’honnêteté publique, pour apaiser les troubles de l’âme et remettre l’équilibre dans les émotions, pour célébrer en hautes et glorieuses hymnes le trône et le cortége de la toute-puissance de Dieu : pour chanter les victorieuses agonies des martyrs et des saints, les actions et les triomphes des justes et pieuses nations qui combattent vaillamment pour la foi contre les ennemis du Christ496. » En effet, dès l’abord, à l’école de Saint-Paul et à Cambridge, il avait paraphrasé des psaumes, puis composé des odes pour la Nativité, la Circoncision et la Passion. […] puisque celui — qui maintenant est souverain peut faire et ordonner à son gré — ce qui sera juste. […] Debout auprès du berceau nuptial d’Ève et d’Adam, il salue « l’amour conjugal, loi mystérieuse, vraie source de la race humaine, par qui la débauche adultère fut chassée loin des hommes pour s’abattre sur les troupeaux des brutes, qui fonde en raison loyale, juste et pure, les chères parentés et toutes les tendresses du père, du fils, du frère. » Il le justifie par l’exemple des saints et des patriarches.

2311. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

Il est vrai qu’entre ces deux cas extrêmes, où l’organisme est tout à fait individualisé, on en trouverait une multitude d’autres où l’individualité est moins marquée et dans lesquels, bien qu’il y ait sans doute vieillissement quelque part, on ne saurait dire un juste ce qui vieillit. […] Le temps a juste autant de réalité pour un être vivant que pour un sablier, où le réservoir d’en haut se vide tandis que le réservoir d’en bas se remplit, et où l’on peut remettre les choses en place en retournant l’appareil. […] On pourrait donc dire que, si le plasma germinatif n’est pas continu, il y a du moins continuité d’énergie génétique, cette énergie ne se dépensant que quelques instants, juste le temps de donner l’impulsion à la vie embryonnaire, et se ressaisissant le plus tôt possible dans de nouveaux éléments sexuels où, encore une fois, elle attendra son heure.

2312. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

on ne doit pas présenter, écrit-il, comme dépouillé de tout sens un discours où sont entassés des mots aussi évocateurs que « ténébreux », « prince d’Aquitaine », « étoile », « luth constellé », « soleil noir », « mélancolie… » l’action exercée sur l’attitude mentale est seulement indirecte, tout comme dans tel vers de Mallarmé, par « angoisse », « minuit », « lampadophore… »… etc : c’est très juste. […] Après ces justes phrases que je viens de lire sous sa signature : le contrôle humain me paraît nécessaire pour goûter ce que l’œuvre d’art peut offrir de divin… le mystère pur, « et recherché systématiquement à l’exclusion de tout détail terrestre », nous oriente vers des régions défendues…, il tombe dans cette singulière interprétation extra picturale : j’aime que Picasso se dépeigne lui-même le mètre à la main, mesurant les objets les plus vulgaires : moulure, verre ou pied de table. […] Synthèse consciente : il faudrait une formule plus juste.

2313. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Rien, et c’est une idée qui, bien comprise, serait juste, n’est plus facile à souiller que la nourriture. […] On trouvait très juste qu’un travailleur d’usine restât seize heures de suite penché sur son métier ou rivé à son marteau. […] Je crois fort juste de considérer dans beaucoup de cas le jeu comme un simple mode d’excitation, analogue au tabac et à l’alcool, avec lesquels il est d’ailleurs fréquemment associé. […] Si l’on voulait donc garder au mot nostalgie son sens le plus ancien, regret de la maison natale, regret du pays, on désignerait la nostalgie de l’inconnu par cette expression un peu vulgaire, mais juste et claire, « le désir d’être ailleurs ». […] S’il est donc très vrai que rien ne recommence, il est très juste de dire aussi : tout continue.

2314. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Voici, deux confidents qui discutent entre eux s’ils exécuteront un meurtre que leur prince vient de leur commander : SYLLAR En dédisant son Roi, quelque juste apparence Que puisse prendre un peuple, il commet une offense. […] Et aussi, pour être justes envers Corneille et envers Hugo, ne devons-nous les chicaner ni sur le choix de leurs moyens, ni sur le détail de leur intrigue, mais il nous faut nous demander uniquement si le dénouement de Ruy Blas et la catastrophe de Rodogune contiennent en soi l’un et l’autre assez d’émotion dramatique et de « vérité humaine », pour justifier l’artifice des moyens qui les ont procurés30. […] Mais ce que je veux dire, et ce sera ma conclusion, c’est que les beautés mêmes de Rodogune n’empêchent pas qu’il fût dès lors orienté dans une direction fausse, et que, parti d’une idée juste, mais portée ou poussée tout de suite à l’extrême, il n’eût dès lors détourné la tragédie de son véritable objet, tel qu’il le lui avait, comme vous l’avez vu, si nettement assigné dans le Cid. […] Mais les sentiments sont si justes, l’accent en est si pénétrant, le contour ou le dessin psychologique en est si naturel, l’âme humaine enfin y est si bien aperçue et rendue en son fonds qu’un barbare seul pourrait songer au reste, et qu’aussi longtemps qu’il y aura des veuves séparées d’un mari par une brusque surprise de la mort, elles rediront dans leurs lamentations les vers immortels d’Andromaque. […] comme dans un théâtre où il n’y aurait qu’une « étoile », — et si je me sers de cette comparaison, c’est d’abord que je la crois juste ; et c’est ensuite que je n’en vois pas qui nous explique mieux l’illusion dont on est dupe lorsque l’on continue de placer Phèdre au premier rang de l’œuvre de Racine.

2315. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

À celui qui voulut, à cause de notre affliction, venir au monde, et nous tira d’encombres, et reçut mort pour notre salut, comme à un maître doux et juste, crions merci, afin qu’au jeune roi anglais il pardonne s’il lui plaît, et le fasse habiter avec nobles compagnons, là où jamais ne sera ni deuil ni tristesse. […] Cependant, messieurs, soyons justes envers la poésie. […] En effet, ce Richard n’était pas seulement un batailleur, comme Bertram de Born ; placez-le dans un autre siècle, ce ne sera pas un prince juste et doux, mais un grand homme ; c’est un homme qui réunit à l’audace que montra Charles XII, plus de génie politique et de prudence. […] Ces explications posthumes n’affaiblissent en rien la juste horreur qui, dans la pensée des contemporains, dut s’attacher aux barbaries de cette invasion.

2316. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

L’esprit ainsi délassé, je retourne à ma maison, où, après quelque entretien avec mes livres, ou quelque consultation passée, je vais chercher le sommeil… La juste mesure des opinions et de la charte de Gui Patin est toute dans ces paroles : Ni réformation ni sédition, mais autant de franc-parler que possible !

2317. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

C’est ce que je voudrais faire sentir et démontrer à tous par une analyse un peu complète et par une juste application de la critique littéraire.

2318. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Il ne serait point prudent de comparer, d’ailleurs aucune des pages de Bonstetten avec celles de Chateaubriand sur ces mêmes campagnes : un dessin à la mine de plomb, même très fin et très juste, ne se compare point à une peinture du Lorrain ou du Poussin.

2319. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Hors de là, c’était un esprit juste, net, exquis, mais limité.

2320. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

À toutes les attaques, en partie justes et fondées, dirigées contre votre tour d’esprit et votre manière, écrivains de tous les temps, à quelque genre que vous apparteniez, vous n’avez qu’une réponse à faire : renouvelez de mérite, fortifiez-vous dans la partie déjà forte de votre talent.

2321. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Pour être juste avec Wagner qui, plus modeste et plus sobre que d’autres, n’a pas cru devoir accuser sa méthode d’une manière aussi tranchée, il faut avoir sous les yeux son Virgile dans la troisième édition, essentiellement améliorée (superioribus multo praestabilior), qui a paru eu 1861.

2322. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Si pourtant, je pense à toi (il écrit à l’abbé Jean), et bien souvent, et bien tendrement. » Il est juste dans tout cela de faire la part de la boutade, quand on écrit librement et à bride abattue. — Il ne prédisait pas si mal en un sens : la première Restauration avait accumulé en peu d’espace trop de sottises pour durer.

2323. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Au tome XVIII, p. 278 ; et Juste Olivier, Études d’histoire nationale (Lausanne, 1842), p. 269, 296.

2324. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

. — Et à propos de Ninon, je rappellerai qu’on a, depuis peu seulement, déterminé au juste son âge, car c’était une question : on la faisait aller jusqu’à quatre-vingt-dix ans.

2325. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

. — « Si cela est, repartit l’évêque, vous ne pouvez mieux faire que de vous adresser à moi ; je connois ces montagnes, j’y ai passé souvent en faisant mes visites : j’y sais des endroits si affreux et si éloignés de tout commerce, que, quelque difficile que vous puissiez être, vous aurez lieu d’en être content. » Rancé, avec sa vivacité naturelle, prenant cette parole à la lettre, pressait déjà M. de Comminges de les lui montrer : « Je m’en garderai bien, lui répondit le prélat en souriant, ces endroits sont si tentants, que, si vous y étiez une fois, il n’y auroit plus moyen de vous en arracher. »  C’était en vain que cet évêque aimable et d’autres amis conseillaient à Rancé, jusque dans son repentir, « cette juste médiocrité qui fut toujours le caractère de la véritable vertu. » Cette médiocrité était précisément ce qu’il y avait de plus contraire à son humeur et de plus insupportable à ses pensées.

2326. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

C’étaient des ris, des sifflets, juste outrage Aux faux dévots, rentrés pour convertir, Aux libertins, prêchant le Roi-martyr ; C’était la plainte, au milieu du naufrage, Des gais amours, si longtemps caressés… L’immense voix, au déclin de l’orage, En rassemblait tous les sons dispersés.

2327. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Elle l’abolit dans le sein même de l’intelligence qui se glace en s’éclaircissant, qui s’efface, s’étale au delà des justes bornes, et n’a plus ainsi de centre lumineux, de  puissance fixe et rayonnante.

2328. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

Mme Des Houlières en a juste dans ce goût, dans cette même coupe déjà ancienne alors, et qui rappelait la jeunesse de Mme de Motteville.

2329. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

D’ailleurs, je trouvais, au dedans de moi, assez juste que le roi, qui n’avait jamais dans sa vie goûté plus délicieusement aucun plaisir que celui d’inquiéter tous les gens qui l’entouraient sur leur santé, de leur annoncer la mort future ou prochaine, savourât d’avance, à son tour, la sienne, et se minât d’inquiétude.

2330. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Le type de ce qui est bon et juste ne s’anéantira plus ; l’homme que la nature destine à la vertu ne manquera plus de guide ; enfin (et ce bien est infini) la douleur pourra toujours éprouver un attendrissement salutaire.

2331. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

XXI Maintenant, pour nous faire une idée juste de ce qu’est la poésie lyrique, écoutons chanter dans un même homme d’abord ce pauvre petit berger des montagnes de Bethléem ; puis cet adolescent armé de sa fronde, libérateur de son pays ; puis ce musicien favori de Saül assoupissant avec sa harpe les convulsions d’esprit de son roi ; puis ce proscrit cherchant asile dans les cavernes de Moab ; puis ce chef de bande et de parti courant les aventures sur les frontières de la Judée ; puis ce roi choisi par les prêtres et acclamé par le peuple pour éteindre la race de Saül et pour fonder sa propre dynastie ; puis ce souverain exalté par sa haute fortune, ne refusant rien à ses intérêts ni à ses amours, et ternissant ainsi sa vieillesse après avoir couvert d’innocence et de gloire ses jeunes années ; puis le vieillard puni, repentant, rappelé à Dieu par l’extrémité de ses châtiments, et convertissant encore ses sanglots en cantiques pour fléchir et pour attendrir son juge là-haut.

2332. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

. — Ses idées étaient toujours justes et frappantes, et m’ont fourni le sujet de quelques-uns de mes sonnets ; elle parlait toujours à propos, toujours avec tant de convenance, qu’il n’y avait rien à ajouter, rien à retrancher à ce qu’elle avait dit.

2333. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Lorenzino se sauva jusqu’à Constantinople, revint ensuite à Venise, y vécut onze ans et mourut assassiné par deux soldats florentins, laissant une renommée équivoque entre l’héroïsme et la folie, juste punition d’un forfait plus semblable à un caprice qu’à une pensée.

2334. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Il a le sens des réalités prochaines et visibles : il note d’un trait juste tout ce qui est dans son expérience ou conforme à son expérience.

2335. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Elle appliqua aux filles le grand principe pédagogique que Port-Royal avait posé : elle voulut faire des caractères droits et des esprits justes.

2336. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre II. La jeunesse de Voltaire, (1694-1755) »

. — Ce n’est point simplement les annales de son règne, c’est plutôt l’histoire de l’esprit humain puisée dans le siècle le plus glorieux à l’esprit humain519. » Faire l’histoire de l’esprit humain au temps de Louis XIV, exposer le progrès de la civilisation générale, depuis les poèmes et les tableaux, jusqu’aux canaux et aux manufactures, il n’y avait pas de conception de l’histoire qui fût plus juste, plus large et philosophique.

2337. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Là l’étude est minutieuse et fouillée : ici l’esquisse est sobre et simplifiée, le trait franc et juste.

2338. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Car ici les rancunes personnelles, les préjugés révolutionnaires, même les dédains de dilettante empêcheraient d’être clairvoyant et juste.

2339. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

Je m’incline devant l’intention que je reconnais juste.

2340. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre troisième »

N’étaient-ils pas condamnés d’avance par la juste réprobation de Dieu ?

2341. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre douzième »

Ses Salons, parmi beaucoup de critiques justes et piquantes, ont le défaut de confondre les limites des arts, et de demander à la palette et au ciseau ce qu’il faut laisser à la plume.

2342. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

Du reste, il est juste d’ajouter que, parmi les princesses et les bourgeoises d’alors, on rencontre à côté des viragos de vraies héroïnes ; que les Ninon de Lenclos et les Marion Delorme ont pour pendant les sœurs de Saint-Vincent-de-Paul ; qu’en matière de diplomatie, de courage, de dévouement, d’esprit, il ne manque pas en ce temps-là, comme dit quelque part, Fontenelle, « de femmes qui valent des hommes ».

2343. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

Enfin, la vraie doctrine de la causalité des actions humaines maintient, contrairement aux deux précédentes, que non-seulement notre conduite, mais aussi notre caractère dépend en partie de notre volonté ; que nous pouvons l’améliorer en employant des moyens appropriés, et que s’il est tel que par sa nature il nous contraint à mal faire, il sera juste d’employer des motifs qui nous contraignent à faire effort pour améliorer ce mauvais caractère.

2344. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

Agamemnon y paraît dans la majesté du roi et dans la maturité du héros ; magnanime et juste, compatissant au malheur, noblement modeste envers la victoire.

2345. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

S’il est une figure à laquelle le drame ne doive toucher qu’avec respect et tremblement, c’est, à coup sûr, celle de ce juste, de ce saint, de ce héros, qui porta son diadème comme le bandeau d’un sacrifice, et, des privilèges de la royauté, ne réclama jamais que celui de marcher en tête de son armée, les jours de bataille.

2346. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Et voyez-vous d’ici l’Europe trop étroite pour contenir le petit commerce d’une marchande d’œillades menteuses et de faux sourires, procureuse de mariages, au plus juste prix !

2347. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Un jour, un soir d’hiver, Mirabeau devait pénétrer chez la marquise et y arriver juste pendant le souper des gens.

2348. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VI. Le Bovarysme essentiel de l’humanité »

Sitôt qu’un de ces gouvernements de fait est fondé, l’illusion de la personne est à son profit un instrument de règne ; il devient le moi, et le moi, c’est au regard des instincts du corps humain ce qu’est, au regard des hommes, la divinité, une force intellectuelle à laquelle il est juste et raisonnable de se soumettre.

2349. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

» blague même outrageusement le sentiment filial, et cependant il a envoyé à sa mère la moitié du peu qu’il a gagné cette année ; et à la malédiction qu’elle vient de lui adresser pour n’être pas allé la voir à Saint-Germain, juste le premier jour de l’an, il a répondu par ce mot : « Je n’ai pas pu parce que… et je t’affranchis ma lettre, ce qui me prive toute la journée de fumer. » 27 janvier Ce matin, Scholl me disait un joli mot sur Barrière : « Oui, oui, il a du talent, mais il ne sait pas se le faire pardonner ! 

2350. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

C’est que le classique, parce qu’il aime la vérité, a un sentiment juste de la mesure, et il la donne.

2351. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

J’ai confiance que notre cause est juste et bonne, et que nous avons le droit pour nous.

2352. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

D’une part, nous voyons une matière soumise à la nécessité, dépourvue de mémoire ou n’en ayant que juste ce qu’il faut pour faire le pont entre deux de ses instants, chaque instant pouvant se déduire du précédent et n’ajoutant rien alors à ce qu’il y avait déjà dans le monde.

2353. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

Mais qu’est-elle au juste de ces objets ?

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