J’étais las, mais j’avais vu de belles choses, respiré l’air le plus pur, et fait un exercice très-sain. […] Les dimensions pures et abstraites de la matière ne sont pas sans quelque expression.
Je ne parle plus du style : à part quelques passages, où le cœur rencontre par hasard, et comme de lui-même, la belle et pure langue d’autrefois, tout le reste est prétentieux ou hérissé d’incorrections ; on sent à chaque phrase un anneau qui manque à la chaîne des idées. […] Placée sous une zone tempérée, elle a assez de jours purs pour comprendre la littérature, aux contours arrêtés, de l’Espagne et de l’Italie ; assez de jours nuageux pour sentir la poésie flottante et vaporeuse de l’Allemagne et de l’Angleterre ; enfin, assez de force et de justice pour faire à Dante et à Alfieri, à Shakespeare et à Sheridan, à Goethe et à Schiller, à Lope de Vega et à Calderon, la part qui leur est due dans cette immense Babel que l’esprit humain bâtit depuis le treizième siècle, et que la main du Seigneur lui-même tenterait en vain de renverser, si près qu’elle soit du ciel.
Si cependant j’ay suivi quelquefois leur éxemple, c’est par pure déférence au goût établi qui fait regarder ces saillies puériles comme un entousiasme sublime, et comme une noble confiance inséparable du genie. […] Il faut donc que l’évidence de l’un ou de l’autre ne soit qu’une pure illusion. […] J’ai accusé Homere de n’avoir pas eu de la morale, des idées bien pures ni bien affermies. […] Le procédé brutal d’Agamemnon à l’égard de Chrysés, la querelle grossiere d’Agamemnon et d’Achille ; les pleurs puériles de ce héros, et ses plaintes d’enfant à sa bonne mere, ce Jupiter enchaîné par les dieux, et qui ne doit son salut qu’à un géant, la feinte absurde d’Agamemnon pour éprouver son armée, l’épisode comique et ridicule de Thersite, tout cela rend l’entrée de mon poëme rébutante pour le bon sens, et quoique je sente de l’art dans les adoucissemens fréquens que j’y ai mis, je vois bien qu’il y doit être presque en pure perte, parce que le fonds trop vicieux y domine toûjours, et que l’impression frapante du fonds des choses l’emporte sur les petites beautez du détail.
Nous ne nous amusons point en chose, ni si basse, ni si sotte, et qui ne montre qu’une pure ignorance de nos vieux Français. […] Il est le premier qui ait osé composer des pièces de pure invention et des comédies en prose5. […] Sans avoir encore une grande valeur littéraire et dramatique, sans briller surtout par un goût bien pur, les pièces données à la scène pendant ces quarante-deux années sont supérieures, en tout point, à ce qui avait été écrit jusqu’alors. […] Le style de ses œuvres est assez pur, mais hérissé de pointes et d’antithèses. […] Rotrou, comme les maîtres qui vinrent après lui, Corneille, Racine, Molière, puisa aux sources pures des Grecs et des Romains.
Quant à moi, je fais de mon mieux ; quand je quitte mon atelier pour me reposer, je le fais la conscience pure comme la plus belle fille du monde qui n’a pu donner que ce qu’elle avait.
L’orateur Calvus, chez les anciens, nous est représenté comme atteint de cette superstition qui le faisait ressembler à un malade imaginaire : pour trop craindre d’amasser du mauvais sang, on se tire des veines le plus pur et le meilleur. — Il compare encore ces écrivains uniquement élégants, qui prennent tant de peine aux mots, aux nombres, et si peu à la pensée, à ceux « qui s’amusent à cribler de la terre avec un grand soin pour n’y mettre ensuite que des tulipes et des anémones » ; belles fleurs, il est vrai, agréables à la vue, mais de peu de durée et de nul rapport.
Et, en ce qui est de Du Bellay en particulier, dans ce Recueil de l’Olive, on y sent parfois, on y entend à l’avance comme un son et un accent précurseur de cette haute et pure poésie qui ne s’est pleinement révélée que si tard dans les Méditations ; on y ressaisit un écho distinct et non douteux, qui va de Pétrarque à Lamartine.
Vacherot, esprit sévère, consciencieux, voué à la science pure et rien qu’à la science, est une des intelligences les plus honorables de ces temps-ci.
De là les lois sur la génération pure de l’espèce, sur l’autorité paternelle, sur la piété filiale ; instincts changés en devoirs de tous les côtés ; spiritualisme de cette trinité plus morale que charnelle ; sollicitude pour l’enfant, assistance dans l’âge mûr, tendresse et culte pour la vieillesse, le plus doux des devoirs, la justice en action, la reconnaissance, mille vertus en un seul devoir !
Enthousiaste passionné de mes vers, il se chargea, par pur dévouement pour moi, de la recherche d’un éditeur et de toutes les fastidieuses démarches qui précèdent l’apparition d’un livre de vers ; il s’adressa à M.
Autour du grand homme se formait un petit groupe d’amis discrets et dévoués : Fontanes, pur et froid poète, Joubert645, penseur original et fin, tous les deux utiles conseillers, sans envie et sans flatterie ; et puis ces femmes exquises, dont Chateaubriand humait le charme, l’esprit, l’admiration, faisant passer ces « fantômes d’amour » à travers son ennui, sans se douter assez que c’étaient là des êtres de chair et de sang qui le berçaient dans leur angoisse : Mme de Beaumont, Mme de Custine, Mme de Mouchy.
Je répugne à croire que tout ce que Rabelais a donné durant sa vie aux devoirs de sa profession religieuse ait été de pure comédie, et que le bon curé de Meudon, qui, dans sa vieillesse bienfaisante, dit-on, et honorée, apprenait le plain-chant aux enfants de sa paroisse et la lecture aux pauvres gens, n’ait été qu’un incrédule enseignant une superstition.
Il faut du courage pour aller chercher quelques tours heureux et neufs, qui manquaient à notre langue et y sont demeurés, dans cette multitude de lettres « toutes pures d’amour, pleines de feux, de flèches et de cœurs navrés », dont l’auteur, selon Mlle de Bourbon, une des plus agréables précieuses de la cour, « devrait être conservé dans du sucre. » Voiture, doué d’un esprit vif et ingénieux, très goûté des princes et des gens de la cour, agréable au grand Condé et au comte duc d’Olivarès, chargé de missions diplomatiques, ayant sur Balzac, qui rêvait, dans son orgueilleuse solitude, des cours et des princes imaginaires, l’avantage de voir de très près la cour et les princes de son époque, Voiture aurait pu employer sa finesse d’esprit à pénétrer le fond de tant d’intrigues politiques, et sa plume à en écrire gravement.
Le français-gaulois, si vif pour tout ce qui est détail familier, fine moquerie, trait d’humeur, idées nées du sol et qui ne nous seraient jamais venues du dehors, y tient sa place à côté de ce grand langage, fruit de l’esprit français, alors qu’il est devenu la plus pure image de l’esprit humain.
Mais, vainqueurs des sortilèges et des monstres, affermis dans la foi, fortifiés dans la bravoure, consacrés dans la chasteté, ils atteignaient les bois augustes où les arbres portent des fruits éclatants, où les lys très purs croissent en floraisons géantes, et voyaient luire, au-delà des troubles feuillages, les marbres et les ors de Montsalvat.
Après avoir indiqué Antigone d’un trait hâtif et superbe, il l’a léguée au poète qui devait en faire son plus pur chef-d’œuvre.
Le genre admis, il y a de la simplicité, et l’on s’est accordé à y louer un style pur et des sentiments doux, ce qui est assez singulier dans une tragédie et chez un auteur tel que Chamfort : il réservait toute sa douceur pour ses tragédies.
Il en sera ainsi jusqu’à ce que les cigognes aient compris que l’assiette plate et le brouet clair ne sont pas des idées pures, tirées selon la doctrine kantienne de quelque catégorie de la Raison.
Nous croyons que des cœurs chauds et purs (car pour nous tous les catholiques ne sont pas des hypocrites ou des inquisiteurs) se consacrent à cette œuvre de salut ; mais qu’importe, et quelle valeur peuvent avoir ces efforts purement individuels ?
Au contraire, le pur artiste, celui qui ne veut pas, qui ne songe pas à être un homme d’action, aura des tendances à la nonchalance, à la douceur de vivre ; il se laissera vivre avec une singulière complaisance.
… Dupe des cérémonies d’une précieuse qui n’en faisait pas toujours, il nous donne un portrait de la pure Mme de Hautefort, plus grand que nature, parce que ce portrait (comme celui de Mme de Chevreuse dans un genre différent) est privé du fonds historique qui le supporte et qui l’expliquerait.
Renan, qui l’appelle le meilleur des princes ayant jamais régné sur terre pour l’honneur et le bonheur du genre humain, et la quintessence rectifiée de la pure essence des Antonins, après laquelle il aurait fallu briser le flacon, car c’était le Commode incommode, le monstrueux Commode qui était au fond, n’a trouvé rien de mieux à faire que d’entourer des arabesques de son admiration et de son style les Pensées dans lesquelles Marc-Aurèle nous a révélé les supériorités de sa belle âme, une de ces âmes à la Boissier, qui pouvaient dispenser le monde de la morale chrétienne si elles avaient pondu et multiplié.
Si, de plus, il sait bien voir, s’il ne croit pas, de parti pris, la société uniquement composée de femmes infidèles, de maris à plaindre, de fats, d’escrocs et d’égoïstes, je demande s’il n’aurait pas quelque chance de rencontrer des exemples de haute et pure vaillance, de dévouement sans espoir, de richesse très simple ou de pauvreté très fière, dans un monde où certaines vertus sont d’une trempe plus fine ?
Quelques initiés prétendent que les deux auteurs dont je viens de parler ne possèdent pas, absolument pures de tout alliage, les vraies traditions du vrai naturalisme.
Il y a longtemps qu’il n’y a plus de race pure, et l’impureté ethnique des nations augmente en même temps que leur civilisation même.
Son style, quoiqu’en général assez pur, n’a point cette couleur vive & fraîche qu’exigent les ouvrages d’imagination.
Déjà tous les serpens de l’envie sifflent contre lui, déjà il est attaqué, & il faut qu’il se justifie comme un coupable, quoiqu’il ait respecté la religion, le gouvernement, les mœurs ; mais on lui en veut, & c’est un mot, un seul mot auquel il n’attacha jamais l’idée qu’on lui prête, qui cause son malheur, qui l’engage à faire son apologie, à se transporter ici, se transporter là, de maniere que pour écrire avec sûreté, il faut tout prévoir, tout peser, deviner enfin jusqu’aux interprétations malignes qu’on donnera aux intentions les plus pures & les plus sages. […] La vertu la plus pure est en butte à ses traits. […] Outre que ces livres sont remplis d’une élégance mâle, la diction en est si pure, que chaque phrase s’y trouve parfaitement cadencée. […] Je tolere ce que je ne puis empêcher, pensant avec raison que c’est beaucoup plus sage que de crier à pure perte, & de répandre des inquiétudes & des alarmes. […] N’est-ce pas allumer son imagination à pure perte, que de s’enflammer à la vue des désordres qu’on ne peut empêcher.
Mercredi 29 juillet Aujourd’hui, je tirais de Lavoix quelques renseignements sur l’helléniste Hase, qui a laissé des Souvenirs polissons manuscrits écrits dans le grec le plus pur, et dont je voudrais faire, sous un pseudonyme, un des personnages d’une plaquette érotique, où je tenterais d’introduire les conversations les plus hautes sur l’amour physique. […] À Rome, le récit de la vie de Mme Gervaisais, de la vie de ma tante, en notre roman mystique, est de la pure et authentique histoire.
Kœlreuter l’a démontré au sujet de l’Épine-vinette, où tout semble disposé pour garantir la fécondation de la fleur par elle-même ; et cependant, lorsque plusieurs variétés ou même plusieurs espèces de ce même genre sont plantées les unes près des autres, il est presque impossible d’élever des plants de race pure, tant elles se croisent naturellement. […] Ainsi j’ai recueilli 233 plants de Choux provenant de quelques sujets de variétés diverses, qui croissaient les unes près des autres, et, sur ce nombre, il ne s’en est trouvé que 78 de race pure, encore quelques-uns d’entre eux étaient-ils légèrement altérés.
Ce vice essentiel, cette impuissance à faire œuvre émouvante, les contemporains ne les sentirent point aussi vivement que nous : c’est qu’il y avait dans les âmes de ce temps-là, il faut en convenir, tant de sécheresse, que la première pluie en fut bien accueillie, et que l’on ne s’inquiéta point si elle apportait une eau pure ou corrompue. […] Quant à son inspiration, il la définit en ces termes : On dirait que ce sont des cendres de pensée… La lumière est éteinte et les mots malgré moi Tendent un dessin vide à l’ombre nuancée Dont les égarements sont traduits par ma voix, Et je ne cherche pas ce que cela veut dire, Un vers chante un instant, disparaît et revient, Un mot sanglote, un mot semble vouloir sourire, Le secret de la nuit vient se mêler au mien… Puis le rêve s’esquisse et devient une phrase Où quelque sens humain pénètre obscurément, Et j’aperçois un peu sous une triple gaze Un visage penché vers moi, divinement… … Souffle mystérieux, ô vol noir qui m’emportes, Pour dire la chanson pure que tu voudrais, Il faut des yeux fermés, il faut des lèvres mortes, Et nul amour, nul souvenir et nul regret… On devine combien une telle esthétique aboutit presque nécessairement à une poésie un peu floue, mobile, fluide et comme évanescente. […] Les Catégories de l’Entendement, chevauchant les tomes poudreux de la Raison pure, partent en guerre contre les Données Immédiates. […] C’est mal connaître l’auteur de la Philosophie de Bergson, le prophète de l’Intelligence pure, que le croire capable d’exposer des idées avec ironie.
Ainsi que nos écrivains modernes les plus châtiés et les plus purs ont des expressions qui sont de leurs siècles, Sénèque en a qui sont du sien : mais si, à l’ouverture de la page, on présentait son ouvrage à nos aristarques, et qu’on les défiât d’y marquer une ligne, un mot de mauvaise latinité, je crois que le plus habile d’entre eux serait fort embarrassé. […] On est souvent pur et plat, sublime et barbare ; on met souvent le plus grand choix des mots à dire des riens, et l’on dit de grandes choses d’un style très-négligé, très-incorrect. […] Mais il est évident, par ce qui suit, que l’opinion de Sénèque est la pure doctrine de Zenon, qui regardait la grandeur d’âme comme incompatible avec la crainte et le chagrin, et la leçon d’une école dont le sage était sans pitié, parce que la pitié était un état pénible de l’âme. […] Surtout ne revenez plus sur Jean-Jacques : laissez-lui la honte bien pure de sa méchanceté et de son ingratitude ; si c’est un hypocrite à démasquer, que d’autres le fassent.
Fontanes, à son heure, en était le souverain et voluptueux représentant ; Daunou aussi, quoique infiniment plus travailleur, n’en sortit guère ; nous tons de race gallicane plus ou moins pure, nous en tenons plus ou moins : nous nous lassons vite, nous goûtons, nous effleurons, nous devinons ; il est rare que nous possédions à fond et en maîtres ce qui n’est pas nôtre. — Ô Taine !
Veuillez en effet vous souvenir, récapitulez en idée la vie passée de Talleyrand, depuis son début sous Calonne, ou, si vous aimez mieux, depuis sa messe à la Fédération, ou encore depuis certain traité fructueux entamé avec le Portugal sous le Directoire, premier point de départ de sa nouvelle et soudaine opulence, et voyez où tout cela aboutit, à quels honneurs, à quels profonds témoignages de respect, et de la part des hommes les plus purs et les plus autorisés, les maîtres jurés en matière de moralité sociale.
Mais, le corps étendu, n’oublions pas que l’âme, De même que l’oiseau monte sans agiter Son aile, ou qu’au torrent, sans fatiguer sa rame, Le poisson sait tout droit en flèche remonter, — L’âme (la foi l’aidant et les grâces propices) Peut monter son air pur, ces torrents, ses délices !
Il est vrai qu’elle s’émancipe un peu plus qu’on ne le ferait aujourd’hui ; son dix-huitième sonnet est tout aussi brûlant qu’on le peut imaginer, et semble du Jean Second tout pur ; c’était peut-être une gageure pour elle d’imiter le poëte latin ce jour-là.
Il y a vingt ans, les fils des ducs, des ministres, des gens attachés à la cour, les parents et protégés des maîtresses, devenaient colonels à seize ans ; M. de Choiseul fit jeter les hauts cris en rejetant cette époque à vingt-trois ; mais, pour dédommager la faveur et l’arbitraire, il a remis à la pure grâce du roi, ou plutôt des ministres, la nomination des lieutenances-colonelles et des majorités qui jusqu’alors allaient de droit à l’ancienneté du service, les gouvernements et les commandements des provinces et des villes.
« Ensuite, dit Tacite, on pensa aux Dieux ; on voulut bien convenir de réédifier le Capitole. » XXVII Ici, avec un art de composition qui fait contraster la plus pure vertu avec la plus infâme corruption du temps, et qui repose l’esprit lassé de tant de turpitudes, Tacite fait apparaître tout à coup dans le sénat un grand citoyen, un débris de l’antiquité dans l’infamie moderne, Helvidius Priscus ; il se complaît à retracer l’homme et le discours.
Cela était bien faux ; car le roi venait pour la seconde fois de me demander une entrevue secrète ; j’y avais consenti par pure déférence respectueuse pour nos anciennes relations.
La musique est la plus immaculée et la plus pure des sensations humaines.
— Oui, n’y manque pas, mon garçon, ajouta la bonne femme, nous aurons quelque chose à te dire, mon mari et moi, car ta face d’innocence me plaît, et ce serait dommage qu’une boule de neige comme ça s’en allât rouler dans la boue des ruisseaux et se fondre dans un égout, faute d’une main propre pour la ramasser encore pure.
Mais les langues ont leur jeunesse ; c’est la naïveté et la passion ; la passion pure d’un amour sans remords qui savoure ses larmes sans y trouver d’amertume et qui est fière de sa douleur parce qu’elle est sûre d’être consolée.
II Lorsque André Chénier composait ses divins pastiches d’Homère et de Théocrite, il faisait sans y songer ce que personne n’avait fait avant lui, non pas même les poètes de la Pléiade, qui ne comprenaient qu’à demi la pure antiquité et ne la saisissaient point d’une vue directe.
Nos sentiments étant plus ou moins vifs, d’après notre nature, et notre raison plus ou moins développée, selon notre éducation, il s’ensuit que chez les hommes le goût est plus ou moins juste, plus ou moins pur, plus ou moins éclairé ; il s’ensuit encore, d’après la grande loi de la nature humaine, qui veut que toutes nos qualités morales et physiques se perfectionnent par l’exercice, que notre goût, comme toutes nos autres facultés, est susceptible de culture et de progrès.
La fin de Zarathoustra, le « Chant de minuit », est certainement de la folie pure.
Enfin, le 29, le drame attendu de Gœtterdaemmerung, un drame dans la manière de Parsifal, c’est à dire un poème de pure musique disant l’éternel des passions humaines, sous le symbole de quelque vague conte que jouent des gens : — l’amour, Siegfried ; la séduction, Gutrune et Siegfried ; et la douleur, Brünnhilde, par lesquels ces deux premiers actes vivent l’essence de notre vie, jusqu’à la péroraison finale et héroïque, très charmante, du troisième acte.
Les proses comprennent, outre des morceaux de pur métier, une sorte de conte médiéval, La mort du page, d’une mélancolie charmante encore qu’un peu jeune.
Aussi je ne rirai pas trop de « la parenté qu’offre M. de Régnier avec le pur poète d’Éloa et de la Maison du Berger ».
On a supposé là un mode de détermination tout à fait particulier, consistant à être mû par des idées pures sans images et par des rapports tout abstraits.
Je l’aspirais comme des lèvres qui se collent à l’embouchure d’une fontaine d’eau pure ; je lui tendais mes deux mains ouvertes, mes doigts élargis, comme un mendiant qu’on a fait entrer au foyer d’hiver, et qui prend, comme on dit ici, un air de feu.
Je n’ai pas retrouvé Statira ; mais l’analyse qu’en donnent les frères Parfaict dans leur Histoire du Théâtre français n’y signale que du « romanesque » et de la « fade galanterie », n’indique comme y étant aucune bassesse et les soixante-huit vers qu’ils en citent sont mauvais, mais du plus pur pompeux.
Ferrari nous épingle aujourd’hui avec tant de soin, tout ce malheureux talent, en pure perte, même pour ceux qui l’eurent, n’aurait-il pas dû l’avertir sur la dépense qu’il fait du sien ?
On ne se soucie plus de savoir à quel point il imite Victor Hugo ou Flaubert, en donnant à leurs profils des airs de gargouille qu’ils n’ont pas et en faisant de même avec ce pur camée de langue française, qui restait toujours ferme et correcte autrefois, alors qu’elle était le plus passionnée !
. — Il n’y a rien à dire, à notre avis, de topique, qui ne soit pas de pur bon sens, sur l’apprentissage de l’art d’écrire l’histoire », si ce n’est que cet apprentissage devrait consister surtout dans l’étude, si généralement négligée jusqu’à présent, des principes de la méthode historique. […] Quoique Renan ait dirigé la publication du Corpus inscriptionum semiticarum, et quoi que Leibniz soit l’éditeur des Scriptores rerum Brunsvicensium, ni Leibniz, ni Renan, ni leurs pairs, n’ont eu, fort heureusement, l’héroïsme de sacrifier à l’érudition pure des facultés supérieures. […] L’imagination involontaire se mêle aux opérations intellectuelles pour les fausser : c’est elle qui comble, par des conjectures, les lacunes de la mémoire, grossit et atténue les faits réels, les confond avec ce qui est d’invention pure, etc. […] Puis, oubliant que toutes ces choses sont de pures abstractions, on a admis — sans le dire explicitement — une force inhérente au mot, au rite, à la règle, qui produirait son évolution. […] Le mépris de la rhétorique, des faux brillants et des fleurs en papier n’exclut pas le goût d’un style pur et ferme, savoureux et plein.
L’idée n’en a pas ; elle est l’immatériel pur ; ni le temps ni la mort ne peuvent rien sur elle. […] Choisi, le grand mot est là ; choisir est un moyen d’art ; comment choisir, si l’on ne veut absolument pas employer les moyens d’art ; choisir, c’est faire un raccourci ; et le raccourci est un des moyens d’art les plus difficiles ; comment choisir, donc, si l’on refuse absolument d’employer les moyens d’art ; comment choisir, enfin, dans l’indéfinité, dans l’infinité du détail, dans l’immensité du réel, sans quelque intuition, sans quelque aperception directe, sans quelque saisie intérieure ; aussi longtemps qu’un moderne, un historien poursuit toutes les indéfinités, toutes les infinités du détail, et la totalisation du savoir, il est fidèle à lui-même, il travaille servilement, il ne produit pas ; aussitôt qu’il produit, fût-ce un article de revue, un filet de journal, une note au bas d’une page, une table des matières, c’est qu’il est infidèle aux pures méthodes modernes, c’est qu’il choisit, c’est qu’il élimine, qu’il arrête la poursuite indéfinie du détail, qu’il fait œuvre d’artiste, et par les moyens de l’art.
. — M. l’aîné s’appelait Jean-Baptiste-Jacques ; il se vantait d’avoir vu les jésuites, mais là, de vrais, de purs, de sincères jésuites, des jésuites comme on n’en voyait plus. […] cette plante un peu frêle, qui avait besoin de vivre à l’air pur et dans la libre campagne, à peine à Paris pour la seconde fois, on la vit bientôt languir à l’ombre funeste de ces hautes maisons semblables à des tours qui ne réparent pas leurs brèches. […] Eh bien, il n’y a jamais eu, le 27, ni le 28, ni le 29 juillet, d’homme en redingote vert-émeraude ; c’est une pure invention du peintre ; mais le peintre avait besoin de ce vert-émeraude et de ce velours, et il a bien fait de l’inventer. […] — que cette belle personne, si naïve et si pure, était sur le point de se tuer. […] le plus grand poète de cette affreuse époque, le plus grand poète des temps modernes, André Chénier, l’a tenté vainement ; vainement il a voulu élever sa voix chaste et pure au milieu de ces orgies sanglantes ; le bourreau a brisé de ses mains cette lyre antique ; André Chénier est mort, comme Roucher est mort, comme ils sont morts les uns et les autres, égorgés par la même main parricide, tous ceux qui avaient dans la tête une idée et de la probité dans le cœur.
Une humeur très pure compose le cristal limpide : l’iris et le diamant sortent d’une humeur plus brune. […] Je l’ai découvert Dans ce panier rempli de vert : C’est un Melon, où la nature, Par une admirable structure, A voulu graver à l’entour Mille plaisants chiffres d’amour, Pour claire marque à tout le monde Que d’une amitié sans seconde Elle chérit ce doux manger Et que, d’un souci ménager, Travaillant aux biens de la terre, Dans ce beau fruit seul elle enserre Toutes les aimables vertus Dont les autres sont revêtus… Non, le coco, fruit délectable, Qui lui tout seul fournit la table De tous les mets que le désir Puisse imaginer et choisir, Ni le cher abricot que j’aime, Ni la fraise avecque la crème, Ni la manne qui vient du ciel, Ni le pur aliment du miel, Ni la poire de Tours sacrée, Ni la verte figue sucrée, Ni la prune au jus délicat, Ni même le raisin muscat (Parole pour moi bien étrange), Ne sont qu’amertume et que fange Au prix de ce Melon divin, Honneur du climat angevin, Que dis-je, d’Anjou ? […] Et cette nouveauté avait pour les contemporains un charme qui ne s’est pas évaporé tout entier, à en juger par les vers suivants : Aussi calmes qu’un bois vers le déclin du jour… Ils marchent plus nombreux que les sables mouvants Ou les roseaux d’automne agités par les vents… Obscur comme un ruisseau qui dans l’ombre s’écoule… Ils s’élèvent pareils à deux brouillards errants… Sa jeunesse brillait comme l’astre serein Qui sème d’un or pur la rive orientale… L’haleine du zéphir qui dans l’air se balance… … Une clarté légère Tremble encor dans les cieux et luit sur la fougère… Les pâles clartés de la nuit, pleines du mystère de la Mort, sont souvent rendues par Lormian d’un pinceau vaporeux : À la pâle clarté des astres incertains… Des étoiles du soir les clartés vacillantes… Aux rives du couchant, pâle, silencieuse, La lune ne versait qu’une clarté douteuse, Et le vent de minuit soufflait dans le vallon… Tenez voici des noms presque aussi terribles que ceux qui hérissent les beaux vers de Leconte de Lisle : Que n’ai-je pu rester aux murs de Davranna !
Notre ami s’empresse de le ramasser et le remet galamment à la jeune personne, qui lui répond, en s’inclinant et en rougissant : — Monsieur, votre démarche m’honore, et dès l’instant que vos intentions sont pures, je vous autorise à demander ma main à ma mère. […] Les comètes mêmes, particulièrement soupçonnées d’avoir de méchants desseins et de vouloir s’approcher souvent un peu trop près de la terre, ont prouvé jusqu’à la dernière évidence que le ciel n’est pas plus pur que le fond de leur cœur. […] Quand on lèvera le rideau, vous ne verrez que des payants dans la salle, — des purs, des sincères, et toute la gloire que vous recueillerez désormais sera en bonne monnaie. […] Philippe Huguet, malgré toutes ses concessions aux lâchetés sociales, a cependant gardé, pur de tout contact corrupteur, l’amour qu’il a pour sa cousine.
Il est dit dans l’un d’eux : « Ô Agni, tu es la vie, tu es le protecteur de l’homme… Pour prix de nos louanges, donne au père de famille qui t’implore, la gloire et la richesse… Agni, tu es un défenseur prudent et un père ; à toi nous devons la vie, nous sommes ta famille. » Ainsi le feu du foyer est, comme en Grèce, une puissance tutélaire L’homme lui demande l’abondance : « Fais que la terre soit toujours libérale pournous. » Il lui demande la santé : « Que je jouisse longtemps de la lumière, et que j’arrive à la vieillesse comme le soleil à son couchant. » Il lui demande même la sagesse : « Ô Agni, tu places dans la bonne voie l’homme qui s’égarait dans la mauvaise… Si nous avons commis une faute, si nous avons marché loin de toi, pardonne-nous. » Ce feu du foyer était, comme en Grèce, essentiellement pur ; il était sévèrement interdit au brahmane d’y rien jeter de sale, et même de s’y chauffer les pieds68. […] C’est un feu pur, qui ne peut être produit qu’à l’aide de certains rites et n’est entretenu qu’avec certaines espèces de bois. […] Droit de répudier la femme, soit en cas de stérilité, parce qu’il ne faut pas que la famille s’éteigne, soit en cas d’adultère, parce que la famille et la descendance doivent être pures de toute altération. […] L’explication de ce rite est que, pour l’acte qui va s’accomplir, il faut que le peuple soit pur : or les anciens croyaient se purifier de toute tache physique ou morale en sautant à travers la flamme sacrée. […] Or, voici les premières lois qu’il écrit : « Que l’on n’approche des dieux qu’avec les mains pures ; — que l’on entretienne des temples des pères et la demeure des Lares domestiques ; — que les prêtres n’emploient dans les repas sacrés que les mets prescrits ; — que l’on rende aux dieux Mânes le culte qui leur est dû. » Assurément le philosophe romain se préoccupait peu de cette vieille religion des Lares et des Mânes ; mais il traçait un code à l’image des codes anciens, et il se croyait tenu d’y insérer les règles du culte.
Que le lecteur considère quelques-unes de ces grandes créations de l’esprit dans l’Inde, en Scandinavie, en Perse, à Rome, en Grèce, et il verra que partout l’art est une sorte de philosophie devenue sensible, la religion une sorte de poëme tenu pour vrai, la philosophie une sorte d’art et de religion, desséchée et réduite aux idées pures.
Cette faveur de la princesse pour le poète était trop pure pour qu’elle cherchât à la dérober aux regards des courtisans.
Mais si Dieu permet, pour votre salut éternel, ce que les hommes réprouveraient sans souci de votre âme ; si le Christ dit oui par l’organe de ses ministres, qui sont mes oracles, soyez certain que je ne dirai pas non, et que j’affronterai le blâme des hommes pour porter deux âmes pures à Dieu !
La Chanson de Roland exalte les deux plus purs sentiments qui fussent dans les cœurs en leur proposant les plus hauts objets où ils pouvaient s’adresser : Charlemagne à servir, l’infidèle à combattre.
Ils avaient pour représenter leurs idées deux orateurs de hante valeur, le comte de Montalembert701, un pur catholique, beau caractère, esprit véhément et brillant, sans originalité ni profondeur, et Berryer702, un avocat à la parole chaude, amplement déclamateur, et sincèrement éloquent.
Je laisse les maladifs Goncourt, chez qui la sensation littéraire semble déjà, elle-même, une souffrance, et qui, ne fussent-ils pas torturés comme hommes, le seraient déjà comme artistes ; je n’alléguerai pas le calvaire de leur Germinie, à la fois héroïque et infâme, qui, parmi les hontes et la folie de son corps, garde un si grand coeur et, dans ses « ténèbres », pour parler comme Tolstoï, la pure flamme d’un absolu dévouement.
Il est indubitable que les plus beaux produits de ce théâtre-ci — et ce sont parfois des merveilles — ne prennent leur pure valeur, pour l’homme de goût, que hors la scène.
Ainsi, Crébillon concevait ou empruntait à la Fable un caractère et une action atroces ; et pour les faire passer au théâtre, il altérait le caractère ou adoucissait l’horreur de l’action par des atténuations de pure fantaisie.
» Les plus sévères, les purs, n’admettent même pas Thespis, et rappellent que, pour le seul fait d’avoir détaché et isolé dans une pièce un épisode de la vie de Bacchus, l’histoire de Penthée, Solon avait levé son bâton sur Thespis en l’appelant « menteur ».
Que l’on se souvienne de ce que nous avons dit plus haut sur la difficulté d’inventer le langage sans l’écriture, et l’on sentira tous les inconvénients du système de l’invention du langage pur l’homme : mais ce système une fois rejeté, les cordonnets des anciens Égyptiens, si semblables aux quipos des Péruviens, peuvent, avec raison, être regardés comme le premier pas de l’invention de l’écriture.
Beaucoup d’yeux purs l’y ont vue, beaucoup d’esprits droits l’y ont saluée ; mais parmi les hommes qui ont une plume à leur service et qui sont les soldats ou les officiers de la publicité, combien y en a-t-il eu qui aient parlé sérieusement de ce livre, soit pour en admettre les conclusions, soit même pour les rejeter ?
Les hommes sentent d’abord, sans remarquer les choses senties ; ils les remarquent ensuite, mais avec la confusion d’une âme agitée et passionnée ; enfin, éclairés par une pure intelligence, ils commencent à réfléchir.
L’innocence se fournit des interprétations qui sont toujours pures comme elle, et il est des expressions avec lesquelles il est bon qu’elle se familiarise avant de chercher à les comprendre. […] Être obligé à dix-sept ans de se faire maître d’études dans un collège de petite ville, gravir, un à un, tous les degrés du professorat, sans se reposer un seul jour, sacrifier sans murmurer son goût pour les lettres aux devoirs ingrats de l’enseignement, ne jamais se laisser détourner de sa voie par les séductions de l’ambition ou de l’amour-propre, parce qu’il faut, avant tout, assurer le pain de chaque jour à une mère d’abord,, puis plus tard à une femme et à un enfant, et à travers cette vie de travail et de dévouement conserver jusqu’au bout, jusqu’à l’âge où les hommes les mieux doués sentent tarir en eux l’enthousiasme, conserver, dis-je, intacte et pur au fond du cœur l’amour de la sainte poésie, n’est-ce pas un miracle ? […] Qui ne sait que le premier meurtre, — un fratricide, — fut commis sous un régime de théocratie pure, au sortir du Paradis terrestre ? […] Toute recherche d’archaïsme eût été une afféterie en pure perte. […] si pures, si belles, si distantes !
Le sort plein d’injustice M’ayant, enfin, rendu Ce reste un pur supplice, Je serais plus heureux si j’avais tout perdu. […] De quelque insupportable injure Que ton renom soit attaqué, Il ne saurait être offusqué ; La lumiere en est toujours pure. […] Une aveugle routine, le pur instinct les dirige dans leurs productions musicales ; mais, enfin, c’est du chant & quelquefois un chant très-agréable.
Mettez dans ces œuvres d’une forme si pure, d’une fantaisie si vraie, d’une fraîcheur si ravissante, d’autres hommes plus vivants et plus généreux, et de suite vous verrez comme tout y prendra du charme. […] Telle qu’elle est, c’est bien une Muse et véritable et du pur sang des filles du Parnasse.
Une beauté tout à fait gozzolienne, cette Mme de la Gandara, avec ses beaux yeux songeurs au grand blanc, l’ovale long de sa figure, les lignes pures de son nez, de sa bouche, la délicatesse extatique de sa physionomie, ses blonds cheveux lui tombant le long de la figure, en ondes dépeignées, comme les cheveux d’une Geneviève de Brabant, enfin avec ce caractère d’une tête, où la nature s’associe au coquet effort de se rapprocher des primitifs, et qui lui donne dans de la jeune vie, le charme archaïque d’une tête idéale d’un vieux musée. […] Dimanche 2 décembre Ce soir, Loti tombe chez Daudet, il parle de son voyage de quarante-huit jours dans le désert, disant sa joie des levers et des couchers de soleil, dans la pure lumière, sans aucune atténuation par les vapeurs, et cela, dans le plein d’une santé, — c’est son expression, — qu’il doit à « un tempérament de bédouin ».