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848. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Il l’a mise en valeur et magnifiquement lancée. […] Coppée a mis ou laissé le plus de son cœur. […] Je mets tout au pire. […] Je mets encore ici tout au pire. […] Moi-même je l’y mettrais si je voulais !

849. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Le cultivateur qui est allé à l’école court à la ville se mettre derrière un guichet. […] Ohnet d’avoir mis son idéal dans la vente. […] Madame de Duras mit moins de façon encore à immoler sa fidélité conjugale. […] Le péril, qui était moindre quand on n’y mettait que de l’amour, s’est aggravé depuis qu’on n’y met que de la passion. […] Il existe une catégorie de personnes que le nom seul de Flaubert met en fureur.

850. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

On l’a mis dans un train. Plus tard, on l’a mis dans un lit, dans du linge blanc et dans du silence. […] … Oui, par les mêmes qui mettent la Belgique à feu et à sang ! […] Non ; et on le met au collège. […] » Il s’exaltait : « Au lieu qu’on m’a mis au pilori ! 

851. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Mettons une demi-page, et presque toujours cela suffira. […] Le jeune homme met de l’eau dans son vin. […] On y met l’éloge du roi. […] cet écervelé qui mit l’Asie en cendre ! […] Ils gâtent les meilleures choses par le ton qu’ils y mettent.

852. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Marcelle les met d’accord en les tuant tous deux de sa propre main. […] Il m’est réellement impossible de me mettre à sa place. […] Or, à peine l’a-t-il retrouvée qu’il se met à lui parler d’amour. […] On se met à table. […] On se met à table.

853. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Et alors la critique lance ses réquisitoires, les réformateurs se mettent à l’œuvre. […] Il se mit en route. […] Du jour où Victor Jacquemont a mis le pied sur le sol du Punjaub, il tombe une pluie d’or dans sa cassette. Runjet-Sing, quand il veut témoigner sa considération aux gens, n’y met pas tant de façons. […] Après quoi, la princesse le fit mettre à la porte par les deux épaules.

854. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VI. De l’emploi des figures et de la condition qui les rend légitimes : la nécessité »

Soyez sûrs qu’en vous proposant de n’en jamais mettre dans votre discours, il s’y en rencontrera toujours assez. […] En effet, si l’on sent vivement, la conception peut être en retard sur l’émotion ; l’intelligence n’arrive pas à se mettre au même pas que la sensibilité et l’imagination : alors la figure qui traduira le désir ou la passion sera vague et n’offrira point une idée claire à l’esprit. […] Tout au plus a-t-on lié en eux le nom de chaque écrivain à une certaine impression vague et confuse : mais on ne leur a mis dans l’esprit aucune véritable connaissance. […] Mais il menace toujours de détrôner Jupiter ou d’enflammer le monde aux éclairs de son épée, et, par ces hyperboles que son imagination enfante, il conserve son amour-propre dans la douce persuasion de son invincible vaillance : il ne peut être mis à l’épreuve sur de tels desseins ; s’il parlait terre à terre, il perdrait l’illusion de son héroïsme au premier choc de la réalité.

855. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XII. Ambassade de Jean prisonnier vers Jésus  Mort de Jean  Rapports de son école avec celle de Jésus. »

» On ignore si cette réponse trouva Jean-Baptiste vivant, ou dans quelle disposition elle mit l’austère ascète. […] Les disciples du baptiste obtinrent son corps et le mirent dans un tombeau. […] Josèphe se mit (l’an 53) à l’école d’un ascète nommé Banou 578, qui offre avec Jean-Baptiste la plus grande ressemblance, et qui était peut-être de son école. […] Plateaux portatifs sur lesquels, en Orient, on sert les liqueurs et les mets.

856. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

. — Molière met au théâtre L’École des femmes. — Observations sur cette pièce.   En 1663, Molière mit au théâtre L’École des femmes. […] Molière, soutenu de ces autorités, donna bientôt La Critique de l’École des femmes, c’est-à-dire mit en scène et livra au ridicule les censures qui avaient été faites de sa pièce, dont il aggrava les indécences, se targuant de l’approbation de la cour. […] Dire que la chasteté du langage ne doit pas aller au-delà de celle des mœurs, quelque corrompues qu’elles soient, c’est prétendre que la société de mœurs honnêtes est condamnée à entendre et à parler un langage qui respire le mépris de l’honnêteté et de la morale ; c’est avancer que le langage peut mettre à découvert des mœurs que la morale oblige à cacher ; c’est aussi établir en principe que des esprits délicats et polis n’ont pas le droit d’exclure de leur langage des expressions grossières et brutales, et j’observe ici que si la décence est une loi de la morale, c’est aussi une loi du goût.

857. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

C’est à l’intention du peintre ou du poëte : c’est à l’invention des idées et des images propres à nous émouvoir, et qu’il met en oeuvre pour executer son intention, qu’on distingue le grand artisan du simple manoeuvre, qui souvent est plus habile ouvrier que lui dans l’execution. […] On n’examine pas long-temps les ouvrages des grands maîtres sans s’appercevoir qu’ils n’ont pas regardé la régularité et les beautez de l’execution comme le dernier but de leur art, mais bien comme les moïens de mettre en oeuvre des beautez d’un ordre superieur. […] Ils ont mis en oeuvre les beautez d’execution, afin de nous prévenir en faveur de leurs personnages, par l’élegance de leur extérieur, ou par l’agrément de leur langage. […] Il semble même que la providence n’ait voulu rendre certains talens et certaines inclinations plus communes parmi un certain peuple que parmi d’autres peuples, qu’afin de mettre entre les nations la dépendance réciproque qu’elle a pris tant de soin d’établir entre les particuliers.

858. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 30, objection tirée des bons ouvrages que le public a paru désapprouver, comme des mauvais qu’il a loüez, et réponse à cette objection » pp. 409-421

Il vous dira dans le lieu même, qu’il met une difference immense entre ces pieces et le Misantrope, et qu’il n’y vient que pour voir un acteur qui réussit dans quelque personnage bizarre, ou bien une scéne qui aura du rapport avec une avanture récente et dont il est parlé dans le monde. […] Ainsi le public accoutumé depuis long-temps à un comique grossier ou gigantesque, qui l’entretenoit d’avantures basses ou romanesques, et qui ne faisoit paroître sur la scéne que des plaisans barboüillez et grotesques, fut surpris d’y voir une muse, qui sans mettre de masque à grimace sur le visage de ses acteurs, ne laissoit pas d’en faire des personnages de comédie excellens. […] Il le loüe d’avoir été second en bonnes maximes, d’avoir mis dans ses pieces peu de séductions, et d’y traiter l’amour comme un égarement. […] On a donc tort de mettre Euripide et Menandre à la tête des poëtes dédaignez par les spectateurs, afin de consoler par l’égalité des destinées ceux de nos auteurs dramatiques, sur les ouvrages desquels le public s’explique quelquefois hautement et désagréablement.

859. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « III »

La Bruyère donne l’exemple trop souvent imité des théories imaginées par les écrivains pour se mettre en paix sur leurs défauts. […] Bourgoin10 : « On peut hasarder dans tout genre d’ouvrages d’y mettre le bon et le mauvais : le bon plaît aux uns et le mauvais aux autres. On ne risque guère davantage d’y mettre le pire : il a ses partisans. » Evidemment, c’est une boutade et La Bruyère savait à quoi s’en tenir, autant que Pascal, qui, « réglant sa montre » et se « moquant de ceux qui demandent l’heure », parle à chaque instant de « ceux qui s’y connaissent et qui ont le bon goût ».‌ […] Mais certaines gens se délectent à tout embrouiller, Personne, par exemple, ne nous blâmera de vouloir mettre un peu de méthode dans les lectures qu’entreprennent les débutants.

860. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XV »

Quand Boileau conseillait de mettre vingt fois son ouvrage sur le métier, de le polir et de le repolir sans cesse, il ne distinguait pas, il s’adressait à tout le monde, et il n’avait pas tort. […] « Il s’agit tout le temps, dit-il, d’orages, de ruines qui croulent, de parvis, de feuilles sèches, que disperse le vent de la mort ; de la colombe qui construit son nid solitaire (pour dire le célibat) ; de volcans à peine fermés (pour dire les passions apaisées) ; du forum, pour dire, comme les avocats, la vie publique ; de l’ange de la destinée, de la lampe de la foi, de la coupe de miel offerte aux lèvres pures (pour dire une vie heureuse, bien qu’on ne mette guère maintenant du miel dans les coupes) ; des anneaux rattachés de la chaîne brisée ; du fait de la richesse, du règne de la vérité qui s’annonce à l’horizon ; du volcan, de l’éternel volcan qui vomit par ses mille cratères de la fange et de la lave, et enfin du bouclier, pour dire : le sentiment qui défend son cœur ! […] Depuis longtemps, il avait prévu qu’un instant viendrait le mettre aux prises avec cet amour de femme ; qu’il faudrait défendre sa liberté contre les exigences d’une passion romanesque, et il s’encourageait d’avance à combattre de telles prétentions. […] Faguet ne l’a pas mise à la fin, mais au commencement de son article.

861. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

J’ai avalé son étiquette, et j’ai voulu savoir ce que l’auteur mettait dessous. […] même dans ce siècle de chemin de fer et de vélocipèdes, où l’on prend le mouvement pour la pensée, et où toute notion paraît suspecte si elle n’est pas timbrée de l’idée de progrès, du progrès que l’on met partout ! […] Déclaration solennelle, dont nous aimons à prendre acte et qui équivaut à celle-ci : c’est qu’après la religion catholique, de l’aveu même de la philosophie, il n’y a plus de religion possible pour les hommes, et que toutes les têtes des philosophes se mettraient-elles, bout à bout, les unes sur les autres, et feraient-elles toute une pyramide de cerveaux, elles ne parviendraient pas à en construire péniblement la queue d’une seule, en dehors de cette circonférence du catholicisme qui étreint l’Univers et la Pensée ! Preuve frappante de la Vérité immuable pour laquelle le monde est fait, et qui met à pied les postillons !

862. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

On veut y voir, pour l’ordinaire, un drame de la conscience, une de ces tragédies intérieures qui mirent, certain soir, le pauvre Jouffroy dans un état si propre à la composition littéraire. […] Berthelot l’ait mis sur la voie d’une conception scientifique de l’univers ; — comme un rationaliste sans aucune trace d’esprit catholique réel.‌ […] Quand donc nos modernes néo-chrétiens qui affadissent tout, même le sens des mots, se mettront-ils dans la tête qu’il n’y a pas d’autre catholicisme que l’orthodoxie ! […] Renan, dans les premières années de sa majorité, a traversé une crise psychique ; il eut une de ces fortes congestions du cerveau qu’on remarque chez les enfants un peu notables, mis en présence des immenses ressources de la vie.‌

863. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

L’Assemblée a mis bien le comble à toutes ses sottises et ses irréligions en donnant aux juifs la possibilité d’être admis à tous les emplois. […] Il est faux qu’il se soit mis sous le patronage de personne, et encore moins sous celui de tels ou tels élèves. […] La calomnie, on le voit, avait mis du temps à cheminer et à suivre son détour. […] Vous ne sauriez vous figurer, messieurs, l’inexprimable attente et la faveur équitable que ce réveil et ces symptômes d’intolérance qui éclatent de toutes parts ont values dans l’école à ces mêmes savants professeurs mis en cause devant vous. […] Cette école essaye aujourd’hui, un peu tard et après coup, par quelques-uns de ses disciples les plus distingués, de réparer le temps perdu et de se mettre tant bien que mal au courant.

864. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

… J’ai remarqué que d’excellents esprits, qui s’étaient mis trop tard à cette étude, se sont pris à la glu et n’ont pu s’en détacher. […] Quand je relis ce que j’ai écrit, je m’aperçois que le morceau est très faible, que j’y ai mis une foule de choses dont je ne suis pas sûr. Par désespoir, je ferme la lettre, avec le sentiment de mettre à la poste quelque chose de pitoyable. […] Au fond, celui qui me sauva fut celui qui m’avait mis à cette cruelle épreuve. […] Dès que le chargé de cours le prenait et se mettait à le lire je n’étais plus capable de prendre une note ; une sorte d’harmonie me saisissait, m’enivrait.

865. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

Un sang bleu coulait dans ses veines ; l’orgueil de sa race mettait dans ses yeux un éclair ; ses privilèges l’investissaient d’une sorte de divinité terrestre. […] Augier et Sandeau, afin de mieux les féliciter du tact et de la bonne grâce qu’ils ont mis à les éluder. […] Ce n’est pas tout : Poirier met en location l’appartement de son gendre, il vend ses chevaux, il vend ses voitures ; il le mettrait à la ration congrue, s’il pouvait. […] Je dirai tout à l’heure comment j’aurais compris la mise en scène de cette maladie aussi réelle qu’elle est bizarre, la nostalgie du vice ; mais, telle qu’elle est représentée dans la pièce de M.  […] Ce ne sera pas, je le crois du moins, un succès de faveur et de sympathie, mais un de ces succès de curiosité et de controverse qui valent bien les autres, lorsqu’ils s’y mettent.

866. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Hugo esthétise ainsi sur Michel-Ange, Rembrandt, Rubens, Jordaens qu’il met, par parenthèse, fort à tort, au-dessus de Rubens. […] Nous nous mîmes à causer, puis à nous promener. […] On voit par là que dans le laque, les laqueurs veulent mettre une chaleur de coloriste, et qu’en leur travail, ils se soutiennent par une véritable esquisse de peintre. […] C’était là sa vie, mais de temps en temps, Halphen éprouvant le besoin de s’en débarrasser, et ayant la pitié de le mettre sur le pavé, l’expédiait avec une pacotille au Congo ou chez le roi de Siam. […] Ils auraient mis en commun leur colonne vertébrale, et chercheraient, toute leur vie, un tour impossible, qui serait pour eux, la trouvaille d’un problème de la science.

867. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

… Naturellement, il laisse ces grandes questions dans l’ombre, — dans l’ombre du mépris de son temps, — mais il ne les met jamais dans la clarté de son esprit. […] Jamais histoire plus que la sienne n’a été pointillée de citations ; mais, sans coquetterie d’aucune espèce, il se met très bien derrière une citation et il y reste, se souciant peu de l’effacement de sa personnalité. […] Il est, dans l’ordre des historiens, comme certains hommes dans l’ordre de la politique, qui n’en voient que le jeu sans y mettre jamais leur personne. […] Lui aussi a mis les pieds dans le torrent de sang répandu. Lui aussi y a mis la main et il en a compté les gouttes.

868. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

En revanche, l’ouvrage de lui que j’aime le moins est son Panthéon révolutionnaire démoli, un titre à fracas ; je n’en aime ni l’affiche, ni le but, par la raison qu’il faut prendre garde, quand on se met à démolir un édifice, de renverser dans son entrain bien des bustes et des statues dignes de rester debout : le Musée de l’histoire est bien voisin de son Panthéon. […] Dans son Épître à M. de Lamoignon sur les plaisirs de la campagne, Boileau commence par dire qu’il habite en ce moment un petit village ou plutôt un hameau, et il met en note : « Hautile, petite seigneurie près de La Roche-Guyon, appartenante à mon neveu l’illustre M.  […] Marais, lié de correspondance avec Bayle et porté vers lui par tous les sentiments d’estime et d’admiration, n’eut rien de plus à cœur que de le mettre en de bons rapports à distance avec Despréaux et d’obtenir du grand Aristarque quelque jugement favorable. […] Basnage met la politesse dans l’arrangement et dans la recherche des mots ; mais il ne songe pas à l’ennui dont il couvre son Journal et dont il accable ses lecteurs, qui aimeraient mieux dix lignes de M.  […] Bayle n’est pas dogmatique ; il n’affirme ni ne nie absolument ; il ne serre pas trop le bouton à vos croyances ; il ne vous met pas le couteau de la raison sur la gorge.

869. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Benoist a mis en tête de son édition une Notice développée sur le poète, dans laquelle il concilie heureusement les qualités françaises avec les connaissances allemandes. […] Situé entre la colline et le fleuve, il était enveloppé d’un côté par des roches que les pluies avaient mises à nu et qu’aucune végétation ne recouvrait, de l’autre par le marécage que formaient les inondations du Mincio, et où le jonc tenait la place de l’herbe. […] Mais il y a une autre manière de commentateurs, et ceux-ci fort utiles et particulièrement agréables ; ils ont l’abondance des vues ; un développement naturel, et judicieux ou fin, ne les effraye pas : j’y mettrais en tête le bon Eustathe, le commentateur d’Homère. […] Dübner n’a pas hésité à mettre : Et vitula tu dignus, et hic. […] Les Lettres d’un Drapier, — un chef-d’œuvre, soit dit en passant, — mirent l’Irlande en feu, et le Gouvernement fut forcé de retirer le privilège donné à Wood.

870. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Il en est de la vie comme de la personne la plus aimée : il n’y a pas tellement loin de la haine passionnée à l’amour ; c’est précisément parce qu’on l’a trop aimée, trop rêvée idéale, cette vie passagère, trop embrassée dans de rares et uniques instants, qu’on se met ensuite, quand on a l’âme grande, à s’en dégoûter opiniâtrement et à s’en déprendre. […] Chardon de La Rochette, dans ses Mélanges de Critique et de Philologie, en cite une qui est piquante en effet, mise en regard de l’avenir : « Qu’est-ce que tu peux souhaiter, ô chantre Anacréon ? […] Retiré presque tout le temps dans sa terre de Veretz, il travaillait à rompre ses divers liens, à vendre son patrimoine au profit des pauvres, à se soustraire aux ambitions ecclésiastiques de son oncle, l’archevêque de Tours, à se décharger en bonnes mains de ses bénéfices, ne gardant pour lui que la pauvre abbaye de la Trappe ; en un mot, il mit six années à s’acheminer vers le cloître. […] S’il était permis, sans rien profaner, de saisir l’ensemble et de tout mettre en compte dans le tableau, nous dirions que cette heure de 1672 fut sans doute la plus complète d’un règne si merveilleux. […] René, il y a plus de quarante ans, invoquait l’aquilon et les orages qui le devaient enlever comme la feuille du dernier automne ; et ici, toujours le même, voilà qu’il s’est mis à regretter l’aubépine des printemps : « Heureux celui dont la vie est tombée en fleurs ! 

871. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Ce sont ces vues qu’il poursuit et met en action dans Latréaumont et dans Jean Cavalier. […] Lord Byron était un idéal ; on l’a traduit en prose ; on a fait du don Juan positif ; on l’a mis en petite monnaie ; on l’a pris jour par jour à petites doses. […] Au temps de d’Urfé, une société allemande se mit à vivre à la manière des bergers du Lignon. […] Ils y sont du moins plus de mise que dans l’histoire, qui en a tant abusé de nos jours. […] Sue a droit de répéter le mot ; il le pourrait mettre pour épigraphe à la première partie de ses Mystères.

872. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

Faire d’après nature, c’est-à-dire se subordonner à la nature, n’avoir d’esprit et d’art que ce qu’elle en demande pour revivre dans une image fidèle, la prendre, elle, et non soi ni sa gloire, pour unique raison d’être de l’ouvrage, et si l’on s’y met soi-même, s’y mettre sans y songer, naïvement, par accident et par surcroît, voilà, pour un poète, ce que c’est que tendre au bon sens. […] Il avait mis la sincérité absolue dans sa pensée, la simplicité absolue dans son style. […] C’était bien par là le seul écrivain raisonnable de notre langue, et voilà pourquoi Boileau mettait ce moderne-là au-dessus de tous les anciens. […] Jusque dans le jeu des acteurs, il bannit l’outrance, et met la vérité. […] Peut-être n’a-t-il quitté si souvent la voie où l’engageait son vrai génie, pour se faire moraliste et manieur d’idées, que par le désir de mettre dans ses vers des vérités d’un ordre plus universellement intelligible.

873. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre II. Le théâtre du quinzième siècle (1450-1550) »

La Passion sert de centre : rédigée par Arnoul Gréban avant 1452, elle s’est complétée par les Actes des Apôtres, que le même Gréban, avec l’aide de son frère Simon, a mis en drame. […] Le Mystère des Actes des Apôtres, à Bourges, en 1536, se poursuivit pendant quarante jours : il mit en action cinq cents personnages. […] Nulle époque ne met mieux en lumière l’absolue différence qui sépare le théâtre de la littérature. […] Ils mirent près d’un demi-siècle encore à mourir, mais ils moururent. […] Grâce sans doute aux membres communs qu’elles comptaient, les deux sociétés firent de bonne heure un accord pour mettre en commun leur répertoire.

874. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Il a usé insouciamment de son gascon : comme est ce mot de revirade qu’il met quelque part ; mais le gascon est pour lui ce qu’est le wallon ou le vendomois pour Ronsard, un dialecte apte à suppléer aux défaillances du français. […] Il veut mettre dans le monde tout juste assez de doute pour que le monde vive en paix, pour que Montaigne ne soit tracassé, tourmenté ni par ses passions, ni par les passions de ses voisins : prêcher la tolérance, c’est fort bien ; insinuer le Que sais-je ? […] Il ne s’embarrasse pas de faire un système, ni de savoir si les fondements de ses idées sont solides en bonne logique : il lui suffit que nature les ait mises en lui. […] Charron mettra à la doctrine de son ami un couronnement orthodoxe : d’autres feront les mêmes additions, les mêmes corrections avec une sévérité hostile. […] En 1588, étant à Paris, il est mis un jour à la Bastille par la Ligue.

875. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Il met les Romains au-dessus de leurs dieux, et il fait de la fortune de leur ville le juste prix dont il a plu à Dieu de récompenser leurs vertus. […] Et pourquoi l’y chercherais-je au prix que d’Alembert y met, à force de lectures « répétées et opiniâtres ?  […] Il fut heureux pour lui que la proposition de mettre ses restes au Panthéon avortât comme les précédentes ; il échappa à un honneur qu’on avait rendu à Marat. […] A laquelle n’a-t-il pas mis la main ? […] Il manque encore à l’Esprit des lois ce que l’antiquité chrétienne pratiquée, non pour sa théologie, mais pour sa science de l’homme, y eût mis sans doute ; il y manque une morale.

876. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Je mettrais le trouble dans votre maison. […] Tu le mettras sur mon lit. […] Seulement, il y met plus de finesse. […] Le naufrage serait mis sous nos yeux. […] Ils se mettent à s’aimer sans trop le savoir.

877. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

J’y ai mis la plus grande attention. […] Ils y ont mis peu d’enthousiasme. […] Mettons, si l’on veut, qu’il a de la chance. […] Mais ils s’y mettent lentement. […] Il faudra mettre cette phrase sur mon tombeau.

878. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

C’est même comme son caractère essentiel de mettre la passion où il faudrait le savoir, et de mettre exclusivement la passion là où la passion devrait être exclue. […] Mettre un peu d’éternité dans le moment c’est ôter au moment son aiguillon. […] L’amant est un gourmand qui ne l’est que d’un seul mets qu’il ne veut partager avec personne. […] Il la sait en effet ; mais il faut le mettre sur le chemin de la retrouver. […] De plus, la chasse leur fournissait des mets délicats et en quantité.

879. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Mais parce que vous aurez mis votre Dieu dans le monde au lieu de le mettre par-dessus, le voilà justifié d’avoir fait un univers plein de défauts ? […] Jules Guesde, toujours exagération mise à part, est presque excellent. […] Gambetta, je crois bien que je le mettrai aux Étrangères. […] Mais je n’ai voulu que mettre en goût. […] C’est inouï l’énergie que met un esthète anglais à être nonchalant et « veule ».

880. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Cette nouvelle me mit l’esprit à l’envers. […] Je me suis mis à apprendre l’arabe. Je me mettrai peut-être ensuite à l’anglo-saxon !  […] Il a su mettre dans sa vie la pure et hautaine beauté qu’il mettait dans son œuvre. […] Le Révérend Griswold n’y mettait pas tant de satanisme.

881. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « L’abbé Prevost et les bénédictins. »

Réfugié en Hollande, il s’y mit à vivre des faciles productions d’une plume qui était déjà toute taillée. […] On sait faire ici quelque distinction entre ceux qui se mettent au large par esprit de débauche et ceux qui ne cherchent qu’à vivre dans une honnête et paisible liberté. […] On mettrait ainsi des physionomies distinctes à des figures qui de loin nous semblent toutes les mêmes, et d’une ennuyeuse monotonie sous le froc. […] Chaque canton du monde tour à tour met la gloire dans ce qui l’intéresse et ce qui le sert. […] L’anecdote de l’abbé Prevost, parricide sans le vouloir, peut se lire dans les Mémoires d’un Voyageur qui se repose, de Dutens (tome II, page 282) ; elle est mise dans la bouche de l’abbé Barthélémy causant à Chanteloup.

882. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

Mettons les vrais noms aux choses. […] A le prendre ainsi, et vu l’urgence, vu la prorogation du Corps législatif, qui a pu être nécessaire, mais qui est survenue irrégulièrement et qui a choqué et interloqué ce Corps, vu bien d’autres circonstances que chacun sent assez sans qu’on les dise, il me semblait que le Sénat aurait pu procéder plus vite, motiver son empressement même par la condition fâcheuse qui était faite au Corps législatif, resté en l’air et en suspens, se mettre dès le premier jour avec ce Corps dans des relations d’égards et de bons procédés et, en vérité, quand je vois les modifications apportées au sénatus-consulte après une discussion si laborieuse, je trouve qu’il eût été mieux de l’accepter et de l’acclamer sous sa première forme. […] si vous tenez tant à mettre des contradictions en présence, je suis homme à vous proposer, moi aussi, mon amendement, et cet amendement, je le formule en ces termes : « Les ministres ne dépendent que de l’empereur, mais ils gardent en présence de l’empereur leur entière indépendance de jugement, de caractère et de langage. » Que si, encore une fois, on tient tant à faire antithèse et à mettre des contradictions aux prises, je propose celle-là. […] Sainte-Beuve, puis laissées de côté, nous ont mis sur la voie encore de nouveaux travaux dont il se déclare l’auteur. […] « La Profession de foi saint-simonienne de Pierre Leroux, qui parut dans le Globe au moment de la cession du journal aux Saint-Simoniens, est de moi : Leroux n’a fait qu’y changer deux ou trois mots et y mettre un ou deux pâtés d’encre72.

883. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre II. Diderot »

Avec la même indifférence, il semait de ses pages dans les livres de ses amis : un traité de clavecin de Bemetzrieder, une histoire de l’abbé Raynal, une gazette de Grimm, tout lui était bon ; l’essentiel, pour lui, c’était d’écrire ; y mettre son nom n’aurait rien ajouté à son plaisir ! […] Il a besoin qu’un choc du dehors mette en mouvement les tourbillons de sa pensée, il ne peut donner lui-même la chiquenaude. […] Il y a mis beaucoup du sien, sans doute, et il a prêté de ses idées au personnage ; je ne pense pas que le vrai Rameau fut un bohème aussi profond. […] Avec ce vif sentiment de la réalité que nous avons déjà vu en lui, il voit le tableau, et le fait voir : Avant de déclamer, et tout en déclamant, il nous met sous les yeux la peinture ou il accroche ses réflexions ou ses effusions : en cinq lignes, en une demi-page, il nous en donne la sensation. […] Cependant il avait été mis à Vincennes en 1749 pour sa Lettres sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient.

884. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « III. Quelques mots sur l’explication de textes »

Je crois que ceux même qui mettent le plus en question la valeur de l’explication de textes ne le nient pas2. […] Mais après qu’on a vu ce que les Essais signifiaient pour Montaigne, et les Pensées pour Pascal, il est parfaitement légitime de se demander ce que ces ouvrages signifient pour nous, de les mettre en contact avec l’idéal, la mentalité et les préoccupations de notre temps. […] Par l’explication, on s’habitue à se mettre dans une certaine attitude d’esprit, dans un certain état d’activité en face des textes ; on acquiert l’art de les interroger rapidement, de les presser, d’en voir et résoudre les difficultés, d’en saisir et d’en suivre les suggestions, de leur faire rendre tout ce qu’il nous est possible de leur arracher de leur contenu. […] Lorsque, au cours du XVIIIe siècle, s’introduisit l’habitude de mettre au programme des classes des ouvrages en français, auxquels le XIXe siècle fit la part de plus en plus large, on finit bien par s’apercevoir qu’on n’y comprenait pas tout, et qu’il y avait des ouvrages qui devenaient de plus en plus difficiles à comprendre. […] Un jour vint où l’on mit au progamme l’histoire de la littérature française.

885. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Pour parler dignement de l’outil qui sert si bien cette passion du Beau, je veux dire de son style, il ne faudrait jouir de ressources pareilles, de cette connaissance de la langue qui n’est jamais en défaut, de ce magnifique dictionnaire dont les feuillets, remués par un souffle divin, s’ouvrent toujours juste pour laisser jaillir le mot propre, le mot unique, enfin de ce sentiment de l’ordre qui met chaque trait et chaque touche à sa place naturelle et n’omet aucune nuance. […] …………………………………………………………… Comme un vase d’albâtre où l’on cache un flambeau, Mettez l’idée au fond de la forme sculptée, Et d’une lampe ardente éclairez le tombeau. […] Pourtant, il fallait nier quelque chose À l’œuvre parfaite où tu mis ton sceau. […] C’en est fait de l’art qui consiste à mettre Une émotion sincère en vers faux. […] Swinburne Pour mettre une couronne au front d’une chanson, Il semblait qu’en passant son pied semât des roses, Et que sa main cueillît comme des fleurs écloses Les étoiles au fond du ciel en floraison.

886. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Pour ma part (puisque je me suis mis en cause), j’aime les livres, je vis entre eux, c’est mon métier, parce que c’est mon agrément. […] Brunetière se met à écrire avant que de sentir, et malgré la force de son intelligence, il est un critique pour l’histoire seulement, pour Bossuet, pour Massillon, non pour la littérature qui se vit, qui se fait, qui se sent dans son siècle. […] Oui, des préventions demeureront : la signature nous attire ou nous met en défiance ; on peut s’entraîner assez pour que ces causes d’erreur disparaissent après une page de lecture. […] Mais c’est tout bénéfice pour les bons qu’on met seuls en valeur. […] Lefranc, que son indépendance désignait aussi à la vindicte des confrères, enviait la condition des journalistes politiques : ceux-là n’ont pas besoin de se mettre l’esprit à la torture pour faire accepter une critique, la bienveillance n’est pas un devoir pour eux.

887. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

Josèphe, qui le toucha presque par son maître Banou, le laisse entendre à mots couverts 308, et la catastrophe qui mit fin à ses jours semble le supposer. […] Le baptême avait été mis par Jean en très grande faveur ; il se crut obligé de faire comme lui : il baptisa, et ses disciples baptisèrent aussi 313. […] Quand il recommença à prêcher après l’arrestation de Jean, les premiers mots qu’on lui met à la bouche ne sont que la répétition d’une des phrases familières au baptiste 315. […] Plus timide que cruel, Antipas ne désirait pas le mettre à mort. […] Il faut se rappeler, du reste, que les premières pages du quatrième évangile sont des notes mises bout à bout, sans ordre chronologique rigoureux.

888. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Pour avoir une idée juste de madame de Maintenon, j’ai commencé par mettre en oubli tout ce que j’avais lu ou entendu sur son compte, les histoires de La Beaumelle, de Laus de Boissy, de madame de Genlis, de madame Suard, d’Auger, de Voltaire même, et jusqu’à la biographie écrite par le biographe le plus exact que je connaisse, M.  […] Toutefois, le secret de madame de Maintenon ne réside pas uniquement dans son mérite et dans ses charmes ; il faut aussi reconnaître en elle deux autres principes de conduite qui mirent en valeur tous ses avantages : ce furent deux passions que madame de Maintenon ressentit au plus haut point ; savoir : Un amour vif pour Louis XIV, et un grand respect pour elle-même. […] Le mal est venu de ce que ces éditeurs sont en même temps auteurs d’une vie de madame de Maintenon ; qu’ils ont composé leur biographie avant d’avoir assez étudié les lettres pour les mettre à leur véritable place, et qu’ensuite ils ont arrangé les lettres dans l’ordre qui s’accordait avec leur composition, au lieu de composer d’après l’ordre des lettres bien vérifié. […] J’ai mis la mienne à une grande épreuve en conférant les unes avec les autres toutes les lettres des deux éditions, les dates et le texte de chacune, et surtout en conférant toutes les dates exprimées avec les faits certains, et en tirant ensuite des faits certains la connaissance des dates omises. Par ce moyen, j’ai pu mettre toutes choses à leur place, en voir la génération et l’enchaînement.

889. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Jacques Vignot peut intéresser par la décision énergique qu’il met à franchir les obstacles, très surmontables d’ailleurs, de sa destinée, il ne saurait nous émouvoir, ni nous attendrir un instant. […] La leçon donnée, elle le fait asseoir à son côté, bien bas, très bas, au niveau de sa table, où il aura désormais son couvert mis tous les jours. […] Rien de charmant comme cette volte-face subite : on ne saurait mettre plus de bonne grâce dans la déception et le renoncement. […] Que, pour le mettre à l’épreuve, il lui parle d’un projet de voyage, et il verra l’enthousiasme que mettra André à lui conseiller cette absence. […] Il sort légèrement dégradé de la terrible scène où son père lui parle de si haut et le met si bas.

890. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

Voyons si lui-même, dans son ingénuité d’aveux, il ne nous mettra pas sur la voie pour la reconnaître. […] Mais ce jeune esprit ouvert à tout, amoureux de tout, repousse un seul livre parmi ceux qu’on lui met entre les mains ; il a d’instinct une aversion. […] M. de Lamartine, en prenant soin de mettre la date de 1829 à la suite de cet épisode, a voulu nous avertir qu’il l’avait écrit dès cette époque, et que les vers qu’il consacrait à la jeune Napolitaine en 1830 ne sont venus qu’après, comme un couronnement. […] Parmi les auteurs qui ont eu le plus d’influence sur M. de Lamartine, et qui ont le plus agi de bonne heure sur sa forme d’imagination, il faut mettre au premier rang Bernardin de Saint-Pierre. […] Un des plus heureux passages de l’épisode de Graziella, c’est quand le poète, après la tempête qui l’a jeté dans l’île de Procida, réfugié au sein de cette famille de pêcheurs, se met à lire et à traduire à ces pauvres gens, durant la veillée, quelques-uns des livres qu’il a sauvés du naufrage.

891. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Ils l’accusent de jetter du ridicule sur la vertu, de mettre en maximes les réflexions les plus détestables, de traiter le plus souvent des sujets licencieux, d’attaquer les réputations les mieux établies, d’être un cloaque dont l’infection se répand partout. […] Ces embellissemens, cette magie, cette ame qu’elle met dans tout, leur paroît une chose superflue, nuisible & criminelle. […] Mais Santeuil, le plus enthousiaste & le plus foible des hommes, faisant toujours le contraire de ce qu’il projettoit, changea d’idée : il crut avoir blasphêmé contre le ciel que d’avoir mis, dans une de ses pièces, le seul mot de Pomone. […] Il mit dans la préface des Jardins l’apologie des fables. […] On supputa le temps qu’il avoit pu mettre à la composition, & l’on observa qu’il n’avoit eu que celui du memento.

892. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

Que l’Église se mette en hostilité ouverte avec ses principes, c’est foi contre foi, et l’on sait ce qui résulte d’une guerre de croyances : le fanatisme s’y met de part et d’autre, et des maux incalculables peuvent être la conséquence d’une lutte si imprudemment engagée. […] Pour le positivisme, toute croyance religieuse et toute doctrine spiritualiste sont mises à l’écart comme hypothèses arbitraires et transitoires, qui ont pu servir au développement de l’humanité, mais que la raison humaine doit maintenant rejeter, comme on repousse du pied l’échelle à l’aide de laquelle on a atteint le sommet. […] Comment l’expliquer sans mettre en péril la bonté et la justice de Dieu ? […] Les textes théologiques mis à part, voici les raisons de M.  […] Depuis longtemps, le protestantisme s’est mis d’accord avec les principes de la société moderne, et d’ailleurs l’Église catholique elle-même, si elle est bien inspirée et si elle suit les conseils de ses vrais amis, de ses plus généreux adhérents, se hâtera de faire disparaître les causes de cette fâcheuse défiance en s’alliant hardiment et librement avec l’esprit nouveau.

893. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Des paysans, témoins de ce sacrifice, se mirent à danser autour de la victime, en chantant les louanges du dieu. […] L’on me dira peut-être qu’il n’est pas croyable que toutes ces réflexions aient passé par l’esprit d’Homère et d’Eschyle quand ils se sont mis à composer, l’un son Iliade et l’autre ses tragédies ; que ces idées paraissent postiches et venues après coup ; qu’Aristote, charmé d’avoir démêlé dans leurs ouvrages de quoi fonder le but et l’art de l’épopée et de la tragédie, a mis sur le compte de ces auteurs des choses auxquelles, selon les apparences, ils n’ont pas songé ; qu’enfin je m’efforce vainement moi-même de leur prêter des vues qu’ils n’avaient pas. […] S’il est vrai qu’en effet l’art de la tragédie résulte de leurs ouvrages, leur refusera-t-on le mérite de l’y avoir mis ? […] Mais il n’en est pas de même d’une action mise en spectacle : c’est une autre sorte d’édifice, qui non seulement doit avoir une étendue beaucoup moindre que le premier, mais encore qui ne peut souffrir qu’une mesure déterminée, pour ne pas rebuter le spectateur, obligé de le parcourir sans repos et sans interruption. […] Après cet effort, il lui était bien moins difficile de transporter de l’épopée à la tragédie, ce qui s’appelle intrigue ou nœud ; car il est plus aisé de faire oublier le poète et le narrateur, quand on vient à brouiller différents intérêts et à nouer le jeu de divers personnages, que quand on veut mettre les spectateurs au fait d’une action, sans qu’ils s’aperçoivent qu’on ait eu dessein de le faire.

894. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

Et quitte, quand on sera de retour, à repasser, lécher et pointiller tout cela, à y mettre le chaud, et le vert, et le sec, et à faire enfin, avec des mots, de petites aquarelles ou de petites gouaches, on obtient à peu près un livre, — un livre qui n’a ouvert ni le cœur ni la tête à son auteur ! […] Même pour ceux qui inclinent avec le plus de curiosité vers ces lectures, toujours un peu badaudes, même pour ceux qui n’ont pas le mépris littéraire qui convient pour des livres écrits en courant et comme sous la dictée des choses matérielles, le voyage, en soi, est si peu de chose, qu’il ne vaut guères que par le voyageur qui le raconte et qui sait y imprimer cette personnalité que rien ne remplace lorsque l’auteur ne l’y met pas. […] Excepté les hommes qui ont besoin de consulter des catalogues de musée, qui achèvera ce livre vide et prétentieux, où l’auteur, du moins, n’a pas perdu de talent, car il n’en a pas mis, et où, comme dans le livre de Fromentin, qui, si lâché qu’il soit, a de l’accent, on ne retrouve pas ce timbre personnel qu’on ne peut confondre avec la manière de dire de personne ? […] Il y a toujours assez de place pour y mettre les deux genoux… VI Aujourd’hui, c’est Maxime du Camp ! […] Seulement, ce n’est pas ici Sophie Arnould qui met à genoux la vieille ducaille, c’est la vieille ducaille qui met à genoux Sophie Arnould !

895. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

Julien, irrité contre les magistrats d’Antioche, avait fait mettre en prison le sénat tout entier. […] Comme il mettait dans son discours cet accent fier et vigoureux de la liberté et du courage, un homme pour qui apparemment cet accent-là était nouveau, lui dit : « Orateur, tu es bien près du fleuve Oronte, pour parler si hardiment. » Libanius le regarda, et lui dit : « Courtisan, la menace que tu me fais ne peut que déshonorer le maître que tu veux me faire craindre » ; et il continua. […] Avides de terres, de jardins, de chevaux, d’esclaves, ils volaient, pillaient, forçaient de vendre ; les uns ne daignaient pas mettre un prix à l’objet de leurs rapines, d’autres le mettaient au-dessous de la valeur ; ceux-ci différaient de payer de jour en jour ; ceux-là après avoir dépouillé l’orphelin, comptaient pour paiement tout le mal qu’ils ne lui faisaient pas… C’est par ces voies qu’ils rendaient pauvres les citoyens riches, et qu’eux-mêmes devenaient riches, de pauvres qu’ils étaient. […] reçois ce dernier hommage d’une éloquence faible, mais à laquelle, pendant que tu vécus, tu daignas mettre quelque prix. » Libanius n’est pas le seul orateur de son siècle qui ait fait l’éloge de Julien ; Celsus, qui avait été son ami, son condisciple et son rival, lorsqu’ils étudiaient ensemble dans Athènes, prononça un panégyrique en son honneur, quand son ami fut sur le trône. […] Mis à la tête de l’empire, il y soutint son caractère ; on le vit à la cour dédaigner le faste, fuir la mollesse, combattre ses sens, dompter en tout la nature, se contenter de la nourriture la plus grossière ; souvent il la prenait debout, souvent se la refusait, dormait peu, n’avait d’autre lit qu’une peau étendue sur la terre, et passait une partie des nuits ou dans son cabinet, ou sous sa tente, occupé au travail et à l’étude.

896. (1730) Des Tropes ou des Diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue. Traité des tropes pp. 1-286

Ils doivent surtout être clairs, faciles, se présenter naturèlement et n’être mis en oeuvre qu’en tems et lieu. […] On dit de même aler à cheval sur un bâton, c’est-à-dire, se mettre sur un bâton de la même manière qu’on se place à cheval. (…). […] C’est lorsqu’on met un singulier pour un plurier, ou un plurier pour un singulier. […] Dans les éditions suivantes on a mis troublent au lieu de rompent ; je ne sai si cette correction répare la première faute. […] On dit mettre la lumière sous le boisseau, pour dire cacher ses talens, les rendre inutiles, l’auteur du poème de la Madeleine ne devoit donc pas dire mettre le flambeau sous le mui.

897. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

… Voilà la seule réserve que nous mettons à notre contentement. […] Je me mis à haïr cet homme. […] … Si j’avais été poète, j’aurais mis cela en vers, ce qui m’eût soulagé. […] Pourtant, par un reste de scrupule, j’ai mis un sou au pied du cerisier. […] Là-dessus, je me suis mis à me réciter des vers.

898. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

Shakspeare met sur son théâtre toutes les actions atroces des guerres civiles. […] (Il met le doigt sur l’œil de Glocester.) […] elle m’a maltraité de façon à mettre à bout la patience d’une souche. […] Ainsi le lierre, comme un fiancé, —  met son anneau aux doigts d’écorce des ormes. —  Oh ! […] —  I met a fool i’ the forest, A motley fool !

899. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Il s’inquiète peu si sa matière mettra son esprit dans le plus beau jour. […] Les autres, pour la plupart, n’avaient pas même été mis sur le papier. […] Est-ce que Bossuet se met à la place des victimes, et s’associa aux paroles de menace qu’il leur prête contre leurs bourreaux ? […] Quatre lettres de Fénelon, pleines de vivacité et d’esprit, mirent d’abord le public de son côté. […] Bossuet mettait le Discours de la méthode au-dessus de tous les ouvrages de son siècle.

900. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VIII. Des Églises gothiques. »

Chaque chose doit être mise en son lieu, vérité triviale à force d’être répétée, mais sans laquelle, après tout, il ne peut y avoir rien de parfait. […] On aura beau bâtir des temples grecs bien élégants, bien éclairés, pour rassembler le bon peuple de saint Louis, et lui faire adorer un Dieu métaphysique, il regrettera toujours ces Notre-Dame de Reims et de Paris, ces basiliques, toutes moussues, toutes remplies des générations des décédés et des âmes de ses pères ; il regrettera toujours la tombe de quelques messieurs de Montmorency, sur laquelle il souloit se mettre à genoux durant la messe, sans oublier les sacrées fontaines où il fut porté à sa naissance. […] On peut seulement s’étonner qu’on n’ait pas, d’après la variété des arbres, mis plus de variété dans la colonne.

901. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une conspiration sous Abdul-Théo. Vaudeville turc en trois journées, mêlé d’orientales — Troisième journée. Tout s’explique » pp. 234-240

Mets-y de la modération. […] (Silence. — L’incomparable derviche tourneur de Péra, Baudelaire-Azem — les yeux extasiés et les bras pendants — se met à valser avec une volubilité effrayante.) […] Oui, Baudelaire-Azem était à méditer dans le désert, en compagnie de son chameau favori, lorsqu’il le voit tout à coup s’arrêter près d’un palmier : Le chameau est friand de l’écorce de cet arbre, et celui de Baudelaire-Azem se mit à brouter… Au troisième coup de dent, des papiers s’échappaient de l’écorce… c’était ta correspondance !

902. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

Les rois mirent la croix sur leurs bannières, et maintenant encore ils placent sur leurs couronnes un globe surmonté d’une croix. — Chez les anciens, le héraut qui déclarait la guerre, invitait les dieux à quitter la cité ennemie (evocabat deos). […] Aussi les peuples mettaient-ils leurs soins à les cacher, à les enfouir sous terre ; on voit dans toutes les églises que le lieu où on les conserve est le plus reculé, le plus secret. […] Partout avaient recommencé les violences, les rapines, les meurtres, et comme la religion est le seul moyen de contenir des hommes affranchis du joug des lois humaines (axiome 31), les hommes moins barbares qui craignaient l’oppression se réfugiaient chez les évêques, chez les abbés, et se mettaient sous leur protection, eux, leur famille et leurs biens ; c’est le besoin de cette protection qui motive la plupart des constitutions de fiefs.

903. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Les héros firent mettre sur des bêtes de somme armes et vêtements. […] Il alla près du roi, qui se mit à le remercier. […] quels bons mets on trouva jetés dans les cendres ! […] quels mets de chevalier on servit à ces braves chasseurs. […] Le roi Etzel se mit en marche vers le Hiunen-lant.

904. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Elle ne s’enquiert pas de la valeur individuelle d’un candidat : elle a mis Viennet au-dessus de Benjamin Constant ; elle met Scribe au-dessus de Ballanche. […] Ainsi, on le voit, à moins de vouloir se mettre à la suite de M.  […] C’est l’orgueil qui a mis le poison sur ses lèvres. […] Elle a dû, avant tout, baptiser les trois idées qu’elle voulait mettre aux prises. […] Hugo a voulu mettre l’histoire au théâtre, il semble s’être imposé la tâche de mettre le théâtre hors de l’histoire.

905. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

En 1841 il vint à Paris et fut mis à Sainte-Barbe, d’où il suivait le collège Louis-le-Grand : il y recommença sa rhétorique sous M.  […] Mais même dans ses plus libres échappées vers l’avenir, il ramenait tout à la carrière principale où il mettait son honneur, à l’office sévère auquel il s’était voué. […] Il se mêlait de plus de choses, il se mettait plus en avant ; un rayon du soleil d’Athènes l’animait. […] Naturellement et sans calcul, la manière de penser et même de croire se met d’accord avec ce don, cette puissance de dire, quand elle existe à ce degré souverain. […] Il n’avait pas mis moins de six ans de sa vie à ce travail d’exacte et minutieuse critique.

906. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Addison l’y mit, et elle y resta. […] Pour la première fois, Addison réconcilia le vertu avec l’élégance, enseigna le devoir en style accompli, et mit l’agrément au service de la raison. […] Il peut accumuler dans sa description toutes les beautés du printemps et de l’automne, et, pour être plus agréable, mettre tous les mois à contribution. […] Rien de plus varié, de plus riche, chez Addison, que les tours et la mise en scène. […] Comme je le regardais, il porta l’instrument à ses lèvres et se mit à en jouer.

907. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Quels horribles rubans noirs on lui a mis !  […] Notez que Célimène est chez elle, et qu’elle ne les met pas à la porte. […] Diane veut absolument un mari pauvre ; elle s’est mis cela dans la tête. […] Un jour, Beppo, mis à la porte par la marquise Fideline, tombe sur son ami Troppa. […] Gondinet le leur mettrait sous les yeux.

908. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Joseph de Maistre »

Vous diriez qu’une confiance illimitée a mis entre vos mains l’ouvrage d’un auteur que vous ne connaissez pas, ce qui est vrai. […] On sait la phrase finale du Pape, dans laquelle il est fait allusion au mot de Michel-Ange parlant du Panthéon : Je le mettrai en l’air. « Quinze siècles, écrit M. de Maistre, avaient passé sur la Ville sainte lorsque le génie chrétien, jusqu’à la fin vainqueur du paganisme, osa porter le Panthéon dans les airs, pour n’en faire que la couronne de son temple fameux, le centre de l’unité catholique, le chef-d’œuvre de l’art humain, etc., etc. » Cette phrase pompeuse et spécieuse, symbolique, comme nous les aimons tant, n’avait pas échappé au coup d’œil sérieux de M.  […] Il en faut (j’entends de l’impertinence) dans certains ouvrages, comme du poivre dans les ragoûts. » Ceci rentre tout à fait dans la manière originale et propre, dans l’entrain de ce grand jouteur, qui disait encore qu’un peu d’exagération est le mensonge des honnêtes gens. — A un certain endroit, dans le portrait de quelque hérétique, il avait lâché le mot polisson  ; prenant lui-même les devants et courant après : « C’est un mot que j’ai mis là uniquement pour tenter votre goût, écrivait-il. […] On peut trouver qu’il a mis du temps à cette réfutation : « Quand le livre de M. Joseph de Maistre parut, j’étais, dit-il, occupé d’un grand travail que je ne pouvais interrompre : je me bornai à recueillir quelques notes, et ce sont ces notes que, devenu plus libre, je me sujs décidé à présenter à mon lecteur en leur donnant plus d’étendue. » Les Soirées de Saint-Pétersbourg ont paru en 1821 ; vingt ans et plus d’intervalle entre l’ouvrage et sa réfutation, c’est un peu moins de temps que n’en mit le Père Daniel à réfuter les Provinciales.

909. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 10, continuation des preuves qui montrent que les anciens écrivoient en notes la déclamation » pp. 154-173

Ciceron dans plusieurs endroits de ses ouvrages parle des pieces de théatre de Livius Andronicus, d’Ennius et de Noevius, trois poëtes qui vivoient environ deux cens ans avant lui, comme d’une déclamation composée quand ils avoient mis leurs pieces au théatre, et qu’on suivoit encore cependant dans le temps qu’il écrivoit. […] La nouvelle maniere de réciter aura donc paru fort extraordinaire aux romains dans ses commencemens, mais ils s’y seront habituez dans la suite, parce qu’on s’accoutume facilement aux nouveautez, qui mettent plus d’action et qui jettent plus d’ame dans les représentations théatrales. […] Une déclamation où l’on veut mettre trop d’expression, doit tomber dans les deux vices opposez. […] Ceux qui sçavent le mieux la musique et l’histoire de notre musique, que j’ai toujours consultez avant que de rien mettre sur le papier, m’ont assuré que l’état de notre musique étoit, il y a six vingt ans, tel que je le décris. […] Cette émulation a donné lieu de mettre dans les ballets et dans les airs de violon une varieté et une élegance qu’on n’y voïoit pas autrefois.

910. (1757) Réflexions sur le goût

Dans les sciences, il a mis des bornes sévères à la manie de tout expliquer, que l’amour des systèmes avait introduite ; dans les belles-lettres, il a entrepris d’analyser nos plaisirs et de soumettre à l’examen tout ce qui est l’objet du goût. […] C’est en se permettant les écarts que le génie enfante les choses sublimes ; permettons de même à la raison de porter au hasard, et quelquefois sans succès, son flambeau sur tous les objets de nos plaisirs, si nous voulons la mettre à portée de découvrir au génie quelque route inconnue. […] C’est à la philosophie à nous délivrer de ces liens ; mais elle ne saurait mettre trop de choix dans les armes dont elle se sert pour les briser. […] Le vrai philosophe se conduit à peu près de la même manière pour juger que pour composer : il s’abandonne d’abord au plaisir vif et rapide de l’impression ; mais persuadé que les vraies beautés gagnent toujours à l’examen, il revient bientôt sur ses pas, il remonte aux causes de son plaisir, il les démêle, il distingue ce qui lui a fait illusion d’avec ce qui l’a profondément frappé, et se met en état par cette analyse de porter un jugement sain de tout l’ouvrage. […] Observons en finissant, que quand ces reproches seraient fondés, ils ne seraient peut-être convenables, et ne devraient avoir de poids que dans la bouche des véritables philosophes ; ce serait à eux seuls qu’il appartiendrait de fixer l’usage et les bornes de l’esprit philosophique, comme il n’appartient qu’aux écrivains qui ont mis beaucoup d’esprit dans leurs ouvrages, de parler contre l’abus qu’on en peut faire.

911. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre X. Mme A. Craven »

C’est l’histoire d’une famille de chrétiens, charmants et sublimes tour à tour, comme le sont les âmes saintes, racontée par eux-mêmes encore plus que par Mme Craven, leur sœur et leur fille, qui n’a guère fait, elle, que de mettre en ordre leur correspondance et leurs mémoires. […] Elle met les points de suture entre leurs lettres, et c’est tout ; mais le fil qui passe à travers les perles n’est pas le collier ! […] Son succès, — ce succès inouï, quoique explicable, puisqu’il tenait aux sentiments les plus généraux et les plus habituels à la moyenne des hommes, — son succès lui avait mis le cœur au ventre, — et elle a beaucoup de cœur, Craven, — et le ventre, — je ne dis pas la tête, — s’est mis à pondre et à couver, avec une déplorable fécondité ! […] Il n’y avait que l’Académie qui pouvait les mettre sous la même couronne que le Récit d’une sœur.

912. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

… Ne faudrait-il pas mettre la main sur le collet de son génie, et qui l’oserait ? […] Mais elle a mis au service de sa gloire sa langue, qu’on entend et qu’on parle partout. […] Assurément, il travailla trop pour qu’on puisse l’appeler le lazzarone de la célébrité ; mais l’opinion, dont il fut imperturbablement l’enfant gâté, mit ses rayons sur lui comme le soleil met les siens sur les gueux, et elle ne les lui retira jamais. […] Toujours est-il que nous devînmes Allemands de pied en cap, et que nous mîmes à nous faire lourds cette souplesse d’Alcibiade qui nous distingue.

913. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Charles d’Héricault » pp. 291-304

Ceux-là tous qui, pour une raison ou pour une autre, ont mis le bout de leur plume dans ce périlleux sujet d’histoire, en ont reçu à la tête un tel coup qu’ils en ont perdu l’équilibre, qu’ils en ont été plus ou moins terrassés. […] L’enfant né de ces horribles accointances, ce fut la Terreur, — la Terreur, plus laide que sa mère, et qui lui répercuta si violemment sa hideur agrandie, que la Révolution, affolée de ce qu’elle avait fait, mit les poings dans ses yeux pour ne pas la voir et lui cria… « Tu n’es pas ma fille !  […] Elle y a mis d’autres mains que les siennes. […] Mais M. d’Héricault l’a mis en saillie dans la sienne, parce qu’il était réellement en saillie dans l’histoire de l’an II ; M. d’Héricault a bien compris que la Terreur n’était plus qu’une chose sans visage, quand elle ne portait pas celui de Robespierre… On peut dire de l’historien de Thermidor qu’il ôte des mains de Michelet la tête de Robespierre, coupée, par cet innocent bourreau, en l’honneur et au profit de la canaille, qui n’en a pas, et qu’il l’a restituée à celui qui, devant Dieu et devant les hommes, a individualisé la Terreur. […] Mais, grâce à M. d’Héricault, on ne le mettra plus sur aucune colonne.

914. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Mais, en dévorant le littérateur, il a fait de ce qui en restait quelque chose de bien plus compté par les sots que l’écrivain, dont la fonction noble et désintéressée est de mettre de la beauté dans ce qu’il dit et de la vérité dans ce qu’il pense. […] Ce livre, qui joue la pensée et qui met des idées générales sous des noms propres, est divisé en quatre parties : le Pape, l’Antipape, l’Empereur et le Citoyen, correspondant à quatre hommes célèbres qui les expriment : de Maistre, Lamennais, Béranger et Lamartine. […] Il s’est permis une mise en scène, romanesque et plaisante, qui ricane et persifle, et tend à ridiculiser la grande physionomie d’un homme qui résiste à tous les petits calculs d’ironie et d’impertinence qu’on ose contre lui. L’auteur des Uns et des Autres n’ayant pas dans l’esprit les muscles samsoniens qu’il faudrait pour mettre en pièces le lion, s’est fait taon contre ce lion de marbre. […] Le lyrique et l’enthousiaste qui sont encore en lui ont eu horreur de cet antipathique petit bourgeois, de ce Tartufe de libéralisme qui savait jouer sa partie avec l’opinion et gagner, en trichant, la popularité, de ce constructeur de couplets qui mettait de l’habileté jusque dans sa poésie charmante et dont l’imagination froide, madrée et libertine, n’eut jamais une grande et vraie inspiration.

915. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

malgré les qualités les plus fortes mises à la place des plus fines, Guy Livingstone ou À outrance est un roman de high life, ni plus ni moins que Pelham. […] Georges-Alfred Lawrence a été certainement un des scholars les plus distingués de l’Université d’Oxford, — et j’en suis bien aise pour sa famille, qu’un tel succès a dû ravir, — mais il est resté incommutablement scholar depuis qu’il est sorti d’Oxford, et j’en suis fâché pour son talent que j’aime et dans lequel personne ne met plus d’espérances que moi. […] À côté de Livingstone, le Titan des Titans, il y a des géants de sa race qui ont comme lui des douleurs grandioses, des indolences superbes, des mépris pour ce qui les dévore, et qui mettent en action, et quelle action ! […] Heureuse mise en scène du roman ! […] Eh bien, voilà un sublime nouveau introduit dans la littérature anglaise, et l’honneur de Georges-Alfred Lawrence sera de l’y avoir mis.

916. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

— que nous tenons surtout à faire connaître dans cet article bien plus que les travaux de Hegel, qui sont connus8 et mis, par certaines gens, dans la gloire. […] Mettons pour Hegel, qui est le plus fort de tous ces Allemands, mettons quelque chose comme quatre-vingts à cent ans d’influence malsaine sur le monde, quelque chose comme la beauté de Ninon qui, vieille, fit des conquêtes, jusqu’à l’épée dans le ventre, car on se tua pour ses beaux vieux yeux chargés de tant d’iniquités. Oui, mettons cela, si vous l’exigez ! […] Par lui, le dieu pour les uns, le monstre pour les autres, sera mis debout, les pieds sur la terre, à portée de main.

917. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIII. Pascal »

Comme mathématicien, en effet, il fut pour les méthodes anciennes contre les méthodes nouvelles, dont il méconnut la portée, ce qui lui mérita peut-être que Voltaire le mît, comme géomètre, très au-dessous de Condorcet. […] avec la tête de mort que les solitaires mettent auprès de leur crucifix, et qui, s’il se rejette, comme l’autre Hamlet, en arrière devant le trou de la tombe, c’est qu’au fond il voit l’enfer, que l’autre Hamlet n’y voyait, pas ! […] peut-être n’y a-t-il pas d’autre manière de mettre les pieds sur ces deux révoltés tenaces, le cœur de l’homme et son esprit ! […] Sainte-Beuve, qui, impatienté, l’ai mise à la fin en pièces, l’autre jour ! […] Dans ces remarques dont j’ai parlé et dans lesquelles il fait tour à tour le joli cœur et le Tartufe : « Ne mettons point, dit-il d’un ton protecteur, de capuchon à Archimède. »« Êtes-vous fou, mon grand homme ? 

918. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gustave Rousselot  »

Dans l’un ou l’autre de ces deux cas, Gustave Rousselot aurait fait comme les femmes : il aurait mis un pouf, et, comme beaucoup de femmes, il l’aurait mis trop gros… Kepler, en redescendant des étoiles, disait familièrement à Dieu : « Tu t’es passé six mille ans d’un contemplateur tel que moi !   […] A cette époque d’anémie poétique où l’on s’épuise le tempérament à faire des sonnets et où, pour pouvoir dire quelque chose, on se met à décrire jusqu’aux brins d’herbe qu’on a sous les pieds, on est content de rencontrer une poitrine assez bien organisée pour souffler, d’une seule haleine, fût-ce une bulle de savon de cinq mille vers, sans s’y reprendre à deux fois avec son fuseau ! […] Les deux seuls ouvrages, en résumé, qui, dans l’ordre poétique, méritent de tirer la Critique de son abîme d’indifférence réfléchie, et d’être mis par elle l’un à côté de l’autre, comme on y mettrait deux cariatides de marbre ou d’airain différents.

919. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

— qu’ils n’ouvrent que dans leurs strophes menteuses, ils se mettent très bien au ventre de la même boue que tout le monde. […] Mais, sans s’arrêter à cette ligne extrême du dandysme, de Vigny avait pourtant le sentiment de la forme, — de la beauté voulue dans tous les détails de la vie, qui répugne à tout ce qui est inférieur, et qui faisait admirer au vieux Mirabeau le rouge que se mettait Mazarin mourant ! […] Il y a dans ces Poèmes d’Alfred de Vigny, réunis sous ce nom général de : Destinées, des morceaux qui n’ont pas ce double caractère que je tiens surtout à signaler, et qui se rapprochent de la première manière de l’auteur, mais concentrée, mûrie, calmée ; d’une couleur moins vive, mais certainement d’un dessin plus fort : La Jeune Sauvage, La Maison du Berger, et surtout L’Esprit pur, poésie cornélienne, l’exegi monumentum du poète, dans laquelle, se mesurant à ses ancêtres, gens d’épée dont il raconte admirablement la vie de cour et d’armes : Dès qu’ils n’agissaient plus, se hâtant d’oublier : il se trouve plus grand de cela seul qu’il a mis sur son casque de gentilhomme : Une plume de fer qui n’est pas sans beauté ! […] Le nombre borné de ces poésies qui résument en quelques pièces les inspirations de trente années, et que je ne mettrai certainement pas, moi, sur le compte de ce dessèchement de la veine si commun chez les poètes communs qui n’ont pas en eux la source intarissable du génie, ce très petit nombre m’explique davantage et m’éclaire plus intensément Alfred de Vigny et cette transformation de tout son être qui lui avait fait mettre le doigt d’Harpocrate sur la bouche fermée de sa Muse.

920. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

En effet, impossible de s’y méprendre : malgré les qualités les plus fortes mises à la place des plus fines, Guy Livingstone ou A Outrance est un roman de high life, ni plus ni moins que Pelham. […] Georges-Alfred Lawrence a été certainement un des scholars les plus distingués de l’Université d’Oxford, — et j’en suis bien aise pour sa famille qu’un tel succès a dû ravir, — mais il est resté incommutablement scholar depuis qu’il est sorti d’Oxford, et j’en suis fâché pour son talent que j’aime et dans lequel personne ne met plus d’espérances que moi. […] A côté de Livingstone, le Titan des Titans, il y a des géants de sa race, qui ont comme lui des douleurs grandioses, des indolences superbes, des mépris pour ce qui les dévore, et qui mettent en action, et quelle action ! […] Heureuse mise en scène du roman ! […] Georges-Alfred Lawrence sera de l’y avoir mis.

921. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

« Je n’ai rien mis ici hier ; mieux vaut du blanc que des nullités. […] Ce n’est qu’après le péché que la frayeur s’est mise entre les créatures. […] « Ce repas au coin du feu, parmi chiens et chats, ce couvert mis sur les bûches, est chose charmante. […] J’y mets aussi ce qui se passe dans l’âme et dans la maison, et de la sorte nous retrouverons jour par jour tout le passé. […] alors je saurais sur quoi mettre le baume, tandis que je le pose au hasard.

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