Rien d’ardent ni d’enflammé dans les paroles dernières de Jacques. […] Dans le dernier tableau de ce livre animé, chaque trait, chaque parole font vibrer l’âme. […] En achevant ces paroles, il se leva pour s’en aller. […] Leurs paroles, leurs sentiments leurs actes appartiennent à leur pays. […] Tour à tour, du lit de Madeleine mourante, se font entendre des paroles d’apaisement et des cris de révolte.
Sous la discrétion extrême de ses paroles en politique, sous l’aménité parfaite de ses manières, on aurait pu distinguer jusqu’à la fin en lui cette noble fibre persistante et la chaleur d’une conviction patriotique intime survivant même à toutes les étincelles. […] On y reconnaît constamment un goût attentif à ne point se servir de paroles plus grandes que les choses. » M. […] Il nous est possible aujourd’hui de dire ce que nous avions craint d’avouer dans le premier moment, de peur de déplaire à Manzoni et d’effaroucher sa délicatesse : c’est que toutes ces paroles sont extraites textuellement de lettres de lui qui ont passé sous nos yeux. […] Fauriel savait les paroles, mais Laënnec savait les airs, ces airs appris dans l’enfance et qu’on n’oublie pas. Il apportait sa flûte (et il faut avoir vu Laënnec pour se le figurer ainsi en Lycidas), et, à mesure que l’autre lui rappelait les paroles, il essayait de les noter : Numeros memini, si verba tenerem !
Pas une de ses paroles n’est perdue pour celui qui l’écoute. […] La politique ne lui avait encore inspiré que de nobles et conciliantes paroles ; la poésie chrétienne n’avait pas appris à s’en méfier. […] Au moment où elle expire, où la reine adultère disparaît derrière la chrétienne repentante, le légat s’incline sur son front pâli, et prononce les paroles suprêmes du pardon. […] Guizot déroulait devant nous, de sa parole austère et magistrale, les grandes lignes de l’Histoire, nous applaudissions parce que nous comprenions. […] Cousin, tel est l’enseignement suprême qu’il place au frontispice de ses leçons, et qu’il résume dans ces paroles sacrées : Sursum corda !
Ne prenons pas à la lettre toutes ses paroles. […] Frayssinous lui révéla la grandeur de la parole sacrée, et cette impression fut telle que toujours il garda pour la chaire une envie et un regret. […] Oui, dans l’acception large qui comprend tous les habiles à la parole. — Non, au sens populaire du mot, dans la langue des foules, qui veulent être remuées. […] D’autant qu’elle se rencontre plus rarement chez les hommes de parole journalière et improvisée. […] On subissait la supériorité de sa froide parole ; on l’applaudissait sans frénésie, discrètement, comme chose rare, sans se lier au ministre, ni au collègue, ni à l’homme.
En un sens, Pétrone et César lui paraissaient avec raison de vrais honnêtes gens, et ce Ménon le Thessalien, dont parle Xénophon dans sa Retraite, personnage qui avait tous les vices, surtout la fausseté, qui croyait exactement que la parole a été donnée pour déguiser sa pensée, même entre amis, et qui regardait tout net les gens vrais comme des êtres sans éducation 40 , ce Ménon si avancé en mœurs lui eût paru un faux honnête homme et un roué de ce temps-là. […] Son visage et sa taille, son air à marcher et sa mine enjouée avec un sourire flatteur me repassoient devant les yeux, et ses paroles m’avoient tant plu qu’il me sembloit que je l’entendois encore discourir, et j’en étois enchanté, de sorte que, le lendemain, je la cherchois partout ; et, comme je m’en informois, j’appris qu’il y avoit peu de temps qu’elle étoit mariée, et que, dès le matin, elle étoit partie pour retourner dans une maison de campagne, et que cette maison étoit dans un désert. […] Le meilleur moyen qui s’en présente dépend de bien lire ; il faut donc que je tâche de lui plaire en tirant la quintessence de tous les agréments qui la peuvent toucher par la meilleure manière de lire ; elle consiste à bien prononcer les mots, et d’un ton conforme au sujet du discours, que ma parole la flatte sans l’endormir, qu’elle l’éveille sans la choquer, que j’use d’inflexions pour ne la pas lasser, que je prononce tendrement et d’une voix mourante les choses tendres, mais d’une façon si tempérée, qu’elle n’y sente rien d’affecté46. […] La lettre est adressée à une duchesse dont on ne dit pas le nom : « Vous voulez que je vous écrive, madame, et vous me l’avez commandé de si bonne grâce et si galamment, que je n’ai pu vous le refuser… Et peut-être qu’il seroit encore de plus mauvais air de vous manquer de parole que de ne vous rien dire d’agréable.
accueillirent partout ses paroles. […] Napoléon, calme et ferme, imposant aux autres l’impassibilité qu’il s’imposait à lui-même, adressa quelques paroles de consolation à Augereau, puis il le renvoya sur les derrières, et prit ses mesures pour réparer le dommage. […] Lannes reçut avec une sorte de satisfaction convulsive les étreintes de son maître, et exprima sa douleur sans y mêler aucune parole amère. […] « À peine une telle pensée s’était-elle laissé entrevoir que Napoléon, prenant la parole avec l’autorité qui lui appartenait et avec la confiance, non pas feinte, mais sincère, que lui inspirait l’étendue de ses ressources, exposa ainsi la situation.
Il y a de lui trois paroles fameuses, d’un très beau sens, et qui, continuellement citées, entretiennent sa mémoire dans un éternel renouveau. […] Parole admirable, digne de Sainte-Beuve ou de Renan, et qui semble la propre devise du dilettantisme, ou même de la philosophie. […] Ce moine lointain dont la parole est dure et la voix tendre, fait songer à ces maigres figures des vitraux gothiques, dont les lignes sont sèches et la couleur suave, et qui baignent leurs contours rigides dans une belle lumière mystérieuse. […] Il remarque que l’homme n’habite que sa tête et son cœur ; que la langue est une corde et la parole une flèche ; que l’âme est une vapeur allumée dont le corps est le falot ; que certaines âmes n’ont pas d’ailes, ni même de pieds pour la consistance, ni de mains pour les œuvres ; que l’esprit est l’atmosphère de l’âme, qu’il est un feu, dont la pensée est la flamme ; que l’imagination est l’œil de l’âme.
Le front large et bossué, l’œil bleu et à fleur de front, le nez gros et arqué, les pommettes relevées, les joues lourdes, les lèvres épaisses, le menton à fossette, le visage rond plutôt qu’ovale ; le cou bref, mais relié par de beaux muscles à la naissance de la poitrine ; les épaules massives, la taille carrée, les jambes courtes ; la stature pesante en apparence, mais souple au fond, tant il y avait de ressort physique et moral pour l’alléger ; mais ce front était si pensif, ces yeux si transparents et si pénétrants à la fois, le nez si aspirant le souffle de l’enthousiasme par ses narines émues, les joues si modelées de creux et de saillies par la pensée ou par les sentiments qui y palpitaient sans cesse, la bouche si fine et si affectueuse, le sourire bon, l’ironie douce et la tendresse compatissante s’y confondaient tellement pour plaisanter et pour aimer sur les mêmes lèvres ; le menton si téméraire, si sarcastique, si défiant et si gracieux tout ensemble en se relevant contre la sottise ; de si belles ombres tombées de ses cheveux, et de si belles lumières écoulées de ses yeux flottaient sur cette physionomie pendant qu’elle s’animait de sa parole ; l’accent de cette parole elle-même, tantôt grave et vibrante comme le temps, tantôt sereine et impassible comme la postérité, tantôt mélancolique et cassée comme la vieillesse, tantôt badine et à double note comme le vent léger de la vie qui se joue le soir sur les cordes insouciantes de l’âme ! […] Tout est conçu lentement dans son esprit, porté longtemps dans sa méditation, aiguisé à loisir par sa sagacité, poli jusqu’au scrupule par son goût, combiné pour l’effet qu’il veut produire, adapté à l’air populaire le plus propre à faire danser les paroles, rire le refrain, vibrer les couplets ; puis tout est lancé par le poète à son adresse avec la sûreté du coup d’œil et du doigt de la brodeuse de dentelle qui lance le fil aminci sur les lèvres dans l’œil de l’aiguille. […] On entend malgré soi la mélodie banale, semblable à la voix du crieur public ; souvent même on répète soi-même, en dépit de soi, l’air dont on est obsédé et les paroles qui répugnent à vos opinions.
Son courage ou son manque de courage est visible dans la parole dont il se sert, dans les opinions qu’il s’est formées, non moins que dans les coups qu’il porte… Il est un et il exprime son même soi (the same self) dans toutes ses manifestations. » Eh bien, ce n’est pas l’emploi fier de cette théorie à outrance qui de deux mondes (le monde de la volonté libre et réfléchie et le monde de l’intelligence spontanée) n’en fait qu’un seul pour l’offrir à Shakespeare ; ce n’est pas cela tout à fait qu’on peut reprocher à François Hugo. […] que trente mille chevaliers français sont tombés massacrés sous les haches d’une poignée d’Anglais, Henri V dit ces grandes paroles, aussi peu anglaises que le génie de Shakespeare qui les lui met sur les lèvres : « Ô Dieu ! […] L’archevêque de Canterbury parlait en évêque, en disant les paroles que je citais plus haut, mais, croyez-le ! […] Et quand il lui dit ces modestes et délicieuses paroles : « Je suis bien aise que tu ne saches pas notre langue ; car, si tu la savais mieux, tu trouverais en moi un homme tellement simple que tu me soupçonnerais d’avoir vendu ma ferme pour acheter ma couronne », n’est-ce pas Hai encore ?
Le digne fondateur a sur ce sujet de belles et nobles paroles qui décèlent, sous cette monarchie de Louis XV, un cœur de citoyen ; j’en veux citer quelques-unes, ne fût-ce que pour moraliser ce sujet de Bernis, dont les débuts sont un peu amollissants : Ce que vous me dites, monsieur, écrit Duverney à Bernis, de l’opinion de l’étranger sur cet établissement n’est guère propre à modérer mon impatience ; j’en ai toujours beaucoup dans les choses qui contribuent à la gloire de notre maître et au bien de la nation… Les objections ne m’ont jamais rebuté. […] De telles paroles sont à noter dans la bouche de Bernis.
J’aime à croire que si Richelieu avait poursuivi ses Mémoires jusqu’à l’année de la mort de Sully, laquelle ne précéda que de peu la sienne, il aurait trouvé d’autres paroles pour rendre justice à un si méritant prédécesseur, et que la pensée morale et humaine exprimée par lui, et qui redouble de valeur sous sa plume, n’aurait pas étouffé les autres considérations d’équitable et haute louange que le nom de Sully rappelle. […] Mais ce dernier le rappelle par lettres ; il lui remet en mémoire les vrais principes d’un homme de cœur ; il lui dit en le revoyant et en l’embrassant : « Mon ami, souvenez-vous de la principale partie d’un grand courage et d’un homme de bien, c’est de se rendre inviolable en sa foi et en sa parole, et que je ne manquerai jamais à la mienne. » Et il l’engage à aller à la cour de France pour y observer prudemment toutes choses et y découvrir le dessein des adversaires, sous air de se rallier à eux et de s’en rapprocher ; car Rosny a des frères ou des neveux qui sont alors des plus avant dans la faveur de Henri III.
Respectées de tous, peu aimées de Louis XV qui les trouvait (cela est assez naturel) trop hautes et trop dignes, et de qui on a recueilli une parole défavorable qui n’est peut-être pas juste, elles disparaissent dans la continuité de leurs devoirs et dans l’uniformité de leur vie. […] Ces Dames pourtant firent une longue et placide résistance qui les maintint dans leur maison jusqu’en 1793 : elles accomplirent et vérifièrent à la lettre la parole de Mme de Maintenon : « Votre maison ne peut manquer tant qu’il y aura un roi en France » ; et elles n’achevèrent, en effet, de périr que le lendemain du jour où il n’y eut plus de roi.
Après les grandes guerres européennes de conquête et d’invasion, vinrent les guerres de plume et les luttes de parole pour les systèmes. […] Le Français est sociable, et il l’est surtout par la parole ; la forme qu’il préfère est celle encore qu’il donne à la pensée en causant, en raisonnant, en jugeant et en raillant : le chant, la peinture, la poésie, dans l’ordre de ses goûts, ne viennent qu’après, et les arts ont besoin en général, pour lui plaire et pour réussir tout à fait chez lui, de rencontrer cette disposition première de son esprit et de s’identifier au moins en passant avec elle.
Ces lèvres sont les tiennes ; — c’est bien ton doux sourire que je vois, le même qui me consola si souvent dans mon enfance : il ne leur manque que la parole ; à cela près, comme elles semblent dire clairement : « Ne te chagrine point, mon enfant, chasse loin toutes tes frayeurs ! […] Que je puisse seulement te retrouver sur ce pacifique rivage, et des paroles d’adieu ne sortiront plus de mes lèvres !
Ils avaient de quoi se former à leur tour auprès d’elle et au contact de son esprit si vrai, de sa parole si ferme et si aiguisée. […] Elle n’a rien qui rie dans son style ni dans sa parole.
C’était peut-être une injustice pour quelques-unes de ces versions qui pouvaient donner une certaine idée de l’auteur latin, en attendant mieux ; et, comme il le disait naïvement en une de ses préfaces : « Si je n’ai pas rendu en cela un grand service au public, je crois facilement aussi que je ne lui ai pas fait beaucoup de mal. » Il écrivait ces paroles d’innocence dans la préface de son Tibulle, en 1653, et s’y plaignait dès lors du peu de cas qu’on faisait de son travail, du malheur de n’avoir point pour amis « ceux qu’on tenait pour arbitres de la réputation des livres », et du silence barbare qu’affectaient de garder au sujet de ses productions quelques personnes sur l’amitié desquelles il avait cru pouvoir compter. […] Je ne m’en suis vengé que par le mépris, suivant votre conseil salutaire… Ces dernières paroles nous expliquent la vivacité qu’y mettait Chapelain : il y avait guerre entre eux.
Ses paroles suprêmes y répondent : elle défend à ses amis de famille tout regret, elle ne leur demande qu’un prompt oubli : « Leur affliction, dit-elle, déshonorerait ma mémoire. » M. […] Le parfait chartreux était celui qui, interrogé à l’article de la mort sur ce qu’il avait fait pendant quarante années de silence, répondait par cette parole du Psaume : « Cogitavi dies antiquos, id annos æternos in mente habui.
La distinction, l’élévation d’esprit et de sentiments de Mme de Boufflers nous sont suffisamment attestées et prouvées par tout ce que nous avons vu de ses actions et de ses paroles : c’est une personne qui a tout droit d’occuper l’historien littéraire ; nous ne l’inventons en rien, nous la retrouvons. […] Mais aucun écho ne nous arrive du dedans, et pas un sentiment ni une parole ne transpire.
Ayant vu pour la première fois Paris en 1813, y arrivant avec tout un monde de préventions dans la tête, il les secoue ; il goûte la société et s’y plaît ; comme Mme d’Albany nous en voulait un peu et pour cause, il lui écrit ces paroles qui pourraient si bien s’adresser de tout temps à la plupart de nos ennemis en Europe : « Je sais que jugeant les Parisiens à distance, vous conservez contre eux de la rancune pour les maux qu’ils ont faits et ceux qu’ils ont soufferts. […] Elle a consenti à se taire, à attendre, à souffrir pour retourner au milieu de tout ce qui lui est cher ; mais elle a refusé toute action, toute parole qui fût un hommage à la puissance… » Tous les personnages du groupe de Mme de Staël reviennent sans cesse dans ces lettres de Sismondi et y sont présentés avec beaucoup de naturel et de vérité.
Ce n’est pas qu’on ne puisse et qu’on ne doive même se sacrifier au besoin, une fois s’il le faut, à l’occasion et dans quelque grande circonstance ; mais habituellement, non : « Je ne veux pas qu’on refuse aux charges qu’on prend l’attention, les pas, les paroles et la sueur, et le sang au besoin… : mais c’est par emprunt et accidentellement ; l’esprit se tenant toujours en repos et en santé, non pas sans action, mais sans vexation, sans passion. » Cet équilibre intérieur, cette possession de soi est ce que Montaigne a à cœur plus que tout le reste. […] Vaillac surpris essaya de se justifier et de payer de paroles ; mais le maréchal, coupant court aux beaux semblants, lui dit que, s’il n’obéissait sur l’heure et n’ordonnait à ses officiers, et à sa femme qui était dedans, de lui ouvrir et rendre le château, il le ferait pendre haut et court à la vue du château même.
C’est le monde ; cela arrive à nous tous, plus tard ou plus tôt ; mais il faut donc se tenir dans une assiette telle que cela ne puisse arriver par notre faute. (30 novembre 1774.) » Parole sage et vraie pour tous ceux qui sont acteurs, à quelque degré, sur ce vaste théâtre où chacun joue son rôle, grand ou petit, et doit avoir à cœur de le jouer de son mieux ! […] De ces deux nobles femmes je ne voudrais certes point paraître sacrifier l’une à l’autre ; il serait cruel et presque impie de venir s’armer des paroles confidentielles d’une mère comme d’une déposition aggravante contre la fille.
Si l’on cherche la raison de cet oubli bizarre, de cette inadvertance ironique de la renommée, on la trouvera en partie dans le caractère des débuts de M. de Sénancour, dans cette pensée trop continue à celle du xviiie siècle, quand tout poussait à une brusque réaction, dans ce style trop franc, trop réel, d’un pittoresque simple et prématuré, à une époque encore académique de descriptions et de périphrases ; de sorte que, pour le fond comme pour la forme, la mode et lui ne se rencontrèrent jamais ; — on la trouvera dans la censure impériale qui étouffa dès lors sa parole indépendante et suspecte d’idéologie, dans l’absence d’un public jeune, viril, enthousiaste ; ce public était occupé sur les champs de bataille, et, en fait de jeunesse, il n’y avait que les valétudinaires réformés, ou les fils de famille à quatre remplaçants, qui vécussent de régime littéraire. […] C’est une sorte de vestibule hospitalier, un peu nu, fort vaste, où aboutissent les diverses entrées du temple, et dans lequel sont assis ou prosternés les antiques Orientaux, les anachorètes du Gange, Thamyris et Confucius, Pythagore et Salomon, Marc-Aurèle et Nathan le Sage, et même l’auteur voilé de l’Imitation ; leur parole rare se distingue lentement sous l’orgue lointain des sanctuaires.
C’était un professeur excellent, grave, sans gestes, un peu lent, fait pour la toge, et qui attachait autant par son sérieux même que par le don qu’il avait de voir et de peindre ; profondément respectueux de sa tâche, et qui n’ignorait point, — je cite ses expressions, — que « l’esprit de l’enfant est un livre où le maître écrit des paroles dont plusieurs ne s’effaceront pas. » Cependant on commençait à le connaître. […] Écoutez ces fermes paroles : « … Les plus grands en politique sont ceux qui répondent le mieux à la pensée inconsciente ou réfléchie de leurs concitoyens.
Des petites choses drôles du dialogue, des « mots » salés ou poivrés, le cœur me lève rien que d’en parler… Si j’ai paru m’intéresser à la pantomime, c’est exclusivement parce qu’elle me graciait des « paroles ». […] « Le théâtre est une représentation parlée et active… » Dans quel milieu dut être localisée la sensation de l’artiste, pour que son idéisation logique soit une imitation de vie, figurée par des mouvements et des paroles d’acteurs ?
Les “caractères” me glacent plus encore ; aussi bien savons-nous qu’il en existe si peu en deçà de la rampe… Des petites choses drôles du dialogue, des “mots” salés ou poivrés, le cœur me lève rien que d’en parler… Si j’ai paru m’intéresser à la pantomime, c’est exclusivement parce qu’elle me graciait des “paroles”. […] Les deux parties de sa définition, l’une après l’autre, resserreront ses limites. « Le théâtre est une représentation parlée et active… » Dans quel milieu dut être localisée la sensation de l’artiste, pour que son idéisation logique soit une imitation de vie, figurée par des mouvements et des paroles d’acteurs ?
Les questions qu’elle résout à sa manière, les règles qu’elle prescrit en vertu de son principe, les croyances qu’elle déconseille au nom de notre ignorance de tout absolu, je viens, aux pages qui précèdent, d’en faire un examen que je termine par la parole suprême du début : Pour la dernière fois. » J’ai toujours eu peine, je l’avoue, devant les cercueils illustres, à partager cette héroïque résignation. […] Nous entendrons toujours ces sages paroles qui semblaient, par leur calme gravité, venir du fond d’un tombeau, et nous dirons pour finir par une grande pensée de lui : « Le temps, qui est beaucoup pour les individus, n’est rien pour ces longues évolutions qui s’accomplissent, dans la destinée de l’humanité.
Si l’on peut me dire quel est ce signe, je n’ai plus besoin de croire sur parole messieurs les critiques ; je possède leur secret ; je puis juger sans leur aide. […] Sa devise est le mot connu : « Tous les genres sont bons, hors le genre ennuyeux. » A son esprit doivent toujours être présentes ces paroles que deux grands écrivains n’ont pas craint d’émettre, alors que l’autorité, même en matière littéraire, s’affirmait avec énergie.
Baron, son élève, formé tout entier par ses leçons, tint parole pour lui. […] Je trouve, dans des lettres inédites adressées par elle à un ami dont on ignore le nom, des paroles qui viennent confirmer de sa part ce sentiment habituel et sincère.
Quand il y avait quelque infraction au règlement et qu’il éclatait quelque imprudence de parole, c’était à lui qu’elle s’en prenait volontiers pour n’y avoir pas mis bon ordre. […] Quand on la complimentait et qu’on l’interrogeait sur ce voyage, qu’elle répondît ou qu’elle ne répondît pas, elle ne mettait d’affectation ni dans ses paroles ni même dans son silence.
C’est cet air de grandeur que Retz prisait le plus, qu’il ambitionna d’abord en tout, dans ses paroles, dans ses actions, et qu’il porta dans tous ses projets ; mais, s’il affectait la gloire, il avait en lui bien des qualités de premier ordre pour en former le fonds. […] Il avait le don de la parole, et ce qui se jouait et se peignait dans son esprit ne faisait qu’un bond sur le papier.
J’extrais ces paroles d’un factum ou Mémoire publié par Mme Le Brun en 1781, dans le procès qu’elle soutenait contre son mari depuis le mois de mars 1774. […] Mais on n’a pas même besoin d’en venir à cette conjecture infamante pour juger Le Brun bien sévèrement ; il ressort du factum et des dépositions des témoins que, quels qu’aient pu être les torts de la femme, ceux du mari furent tels qu’aucun honnête homme, aucun homme bien né ne s’en permettra jamais de semblables, soit en paroles, soit en actes.
Il faut voir dans ces paroles, non pas le mépris du fait, mais la subordination du fait à l’idée, ce qui est un caractère chez Montesquieu. […] On a dans ces paroles la mesure de la croyance de Montesquieu et de son noble désir : jusque dans l’expression de ce désir, il se glisse toujours cette supposition que, même quand la chose n’existerait pas, il serait mieux d’y croire.
À peine il l’a quittée, il lui écrit de Metz ces tendres et presque féminines paroles : « Qu’il me tarde d’apprendre de vos nouvelles ! […] Grimm a prononcé. » Ce caractère d’oracle est assez naturel à tous les maîtres critiques : Grimm, sous la forme polie et sous un air du monde, ne pouvait s’empêcher de le marquer dans ses paroles et dans son procédé ; il aimait à donner le ton ; il avait cette rigueur et cette exigence du bon sens qui va rarement sans quelque sécheresse.
Sur Montesquieu, Grimm s’exprime avec admiration et respect, mais en peu de paroles ; il le proclame un génie plein de vertu, et le salue à ses funérailles. […] Grimm, en jugeant les ouvrages les plus détestables du siècle et les plus pernicieux, se contente le plus souvent de les montrer défectueux au point de vue du goût ou de l’originalité ; il ne trouve d’ailleurs aucune parole sévère.
De même, Mazarin, à l’heure de sa mort, désigne-t-il Colbert à Louis XIV par ce mot si connu : « Sire, je vous dois tout, et je crois m’acquitter en partie en vous donnant Colbert » ; l’écrivain, gâtant la belle simplicité du mot, et dénaturant l’inspiration toute politique de Mazarin, dira : « Dans ce moment terrible où l’Éternité qui s’ouvre à nos yeux étouffe nos passions, et nous presse de dévouer un dernier instant à la justice et à la vérité, Mazarin adressa ces paroles à Louis XIV… » Les médisants prétendaient avoir trouvé de la ressemblance entre la manière du nouvel écrivain et celle de Thomas, avec qui on le savait très lié ; si toutes les phrases avaient été dans cette forme, la médisance aurait pu prendre crédit ; mais la plupart des défauts de M. […] Ce plié lent, les yeux baissés, la taille droite, et une manière de se relever en regardant alors modestement la personne, et en jetant avec grâce le corps en arrière ; tout cela est plus fin, plus délicat que la parole, mais très expressif comme marque de respect.
Le futur Louis XVIII resta assez longtemps avant de le distinguer, de lui adresser la parole ; après un an ou deux seulement, lorsqu’il sut que ce jeune homme qui était de sa maison allait avoir une tragédie représentée au Théâtre-Français, Marius à Minturnes, le comte de Provence y prit intérêt, se fit donner la pièce à la dérobée, porta son pronostic, fut presque fier du succès que cependant il n’avait point prédit, et honora dès lors le jeune poète, à son lever, de quelques-unes de ces paroles perlées et de ces citations coquettes qu’il méditait toujours à l’avance et qu’il savait placer à propos.
Il est comme l’acteur de profession, chez qui tout geste et toute parole perd son caractère spontané pour devenir une mimique ; c’est Talma cherchant à tirer parti même du cri de douleur sincère qui lui est échappé à la mort de son fils, et s’écoutant sangloter. […] De Démosthène, de Cicéron, de Mirabeau il ne reste que des mouvements, des paroles spontanées, des cris de passion comme celui de Démosthène après Chéronée : « Non.
Le grand cœur qui seul est évident ici, le grand cœur à, qui la douleur de la vie mortelle a expliqué la vie d’après la mort, n’a pas plus voulu être poëte que la tête qui a déduit de telles espérances des faits et des paroles de l’Évangile ne veut être théologienne. […] C’est avec la parole de Dieu qui a promis une récompense à ses fidèles, la nécessité d’un paradis qui soit la divinisation des affections où notre cœur se résuma pendant la vie et dont la sensibilité doit être éternelle.
Voluptueux intellectuel, il se contenta de s’enivrer du plaisir qu’il donnait aux autres, et il le donnait sur place, à l’instant même, — avec l’idée, avec l’image, avec la parole, le geste, le regard, la voix, jouissant de son esprit comme les femmes jouissent de leur beauté ! […] Chateaubriand, après autant d’années, Chateaubriand, génie de rêverie, de mélancolie et de silence, n’avait pas pardonné à Rivarol cette supériorité de conversation écrasante qu’il avait eu à subir quand il le rencontra dans sa jeunesse, et le vaniteux des Mémoires d’outre-tombe, le jaloux de Napoléon et de lord Byron, associa Rivarol aux deux seules jalousies de son âme, et le grandit par ses ressentiments… Quant à nous, venus longtemps après Rivarol, le piano de Liszt ou le violon de Paganini ont pu seuls nous donner la sensation de cette conversation inspirée qu’il exécutait, a dit Sainte-Beuve, à la manière d’un virtuose ; mais les idées, ces idées qu’exprime la parole et que n’exprime pas la musique, elles ne sont plus, et rien ne saurait les rappeler !
Voici les paroles que nous trouvons dans l’introduction dont Saint-Chéron a fait précéder sa traduction de l’Histoire d’Innocent III : « Recevons le beau tableau historique de Hurter comme un témoignage du bien immense qu’un souverain pontife a pu accomplir dans un siècle reculé, mais encore du bien que l’institution, reconnue comme nécessaire aux intérêts les plus élevés du genre humain, pourra faire dans les siècles à venir où il se rencontrera un Grégoire, un Innocent, au milieu des hommes ramenés par une pénible et douloureuse expérience, aux vrais principes sociaux. » Comme on le voit, s’il n’est guère possible d’être plus lourd, il n’est guère possible d’être plus clair. […] L’épouvante qu’il dut ressentir en voyant l’unité menacée, la connaissance de ces hommes aux muscles épais et durs, aux passions tenaces, que la parole ne pénétrait pas aisément et redressait peu quand ils avaient dévié une fois, l’engagèrent dans la croisade.
Il ne s’est pas rappelé les paroles si étrangement sérieuses de Vico : « Les esprits vigoureux ne rient point, parce qu’ils considèrent fortement une chose et ne s’en laissent point détourner. […] Ce sera encore plus effroyable quand on devra dire que le monde est un grand Hôtel-Dieu sans Dieu. » Telles sont les paroles de Heine.
Après avoir écouté attentivement, il prit la parole et s’exprima à peu près en ces termes : « Tout ce que vous dites m’intéresse beaucoup, mais je vous demande de réfléchir avant de tirer une conclusion. […] Et ce fait, j’en garantis l’authenticité, car il m’a été raconté par une dame fort intelligente, dont la parole m’inspire une confiance absolue.
Cette honnêteté, qui se produit sans emphase, qui brille dans le caractère des personnages et dans toutes leurs paroles, semble couler naturellement de l’âme de l’auteur ; une versification nette, correcte, élégante, y sert d’ornement ; quelques personnages assez gais et plus actifs, jetés dans ce monde d’honnêtes gens, relèvent la douceur des tableaux.
La parole et l’accent sont là pour déterminer le sens quand on a affaire à l’orateur ; mais un écrivain, c’est autre chose, et je cours risque de me noyer dans ces grandes flaques d’eau douce qui ne me portent plus en aucun sens. — Après tout, c’est un bon et méritant ouvrage, qui dispense de beaucoup d’autres et qu’il faut conseiller aux gens du métier.
J’emprunte ces paroles à un fort bon écrit de M.
Loin que ces hommes-là soient fondus d’un seul et même jet comme dans la vie, ils se composent d’une suite de paroles qu’ils ont dites, d’actions qu’ils ont faites, auxquelles se joignent les intercalations trop peu graduées de l’auteur : ils ne sont guère, en un mot, que des pièces de marqueterie historique.
Piscatory, aura été consulté, et sa parole comptera pour beaucoup, sans nul doute, dans une détermination à ce point intéressante pour le pays qu’il possède si bien.
Il est curieux de la voir, dans cette correspondance, protester à tout propos contre l’idée qu’on pouvait avoir de son crédit : « Je ne suis qu’une particulière assez peu importante ; je ne sais pas les affaires, on ne veut point que je m’en mêle, et je ne veux point m’en mêler. » Tantôt elle se compare avec pruderie à une ingénue de quinze ans : « Je suis un peu comme Agnès, je crois ce qu’on me dit, et ne creuse pas davantage. » Tantôt elle se vieillit avec une complaisance qui fait sourire : « Si vous me voyiez, madame, vous conviendriez, que je fais bien de me cacher : je ne vois presque plus ; j’entends encore plus mal ; on ne m’entend plus, parce que ma prononciation s’en est allée avec mes dents, la mémoire commence à s’égarer ; je ne me souviens plus des noms propres, je confonds tous les temps, et nos malheurs joints à mon âge me font pleurer comme toutes les vieilles que vous avez vues. » Sans croire tout à fait à ce renoncement absolu au monde, on est pourtant forcé de reconnaître qu’il y a dans ce langage de madame de Maintenon plus de manie que d’hypocrisie, et qu’à force de se faire, en paroles, insignifiante et inactive, elle l’était sur la fin réellement devenue.
Lerminier porte dans son enseignement un don trop invincible et trop naturel pour qu’on en puisse faire abstraction quand on parle de lui : c’est une faculté de parole, une puissance d’enthousiasme et d’images, un génie d’improvisation, entraînant, éblouissant, exubérant, qui me fait croire, en certains endroits, à ce qu’on nous rapporte des merveilles un peu vagabondes de l’éloquence irlandaise ; de la gravité toutefois, un grand art, des illustrations de pensée empruntées à propos à d’augustes poètes ; et puis un geste assuré, rhythmique, un front brillant où le travail intérieur se reflète, et, comme on le disait excellemment sous Louis XIV, une physionomie solaire et une heureuse représentation.
Le Cid sent ce que Corneille décrit, et ses paroles insensées sont dans la circonstance l’expression propre du sentiment.
Le charitable interprète qui la veille avait sauvé la vie à six esclaves… lui adressa quelques paroles de consolation.
La parole du maître ayant prodigieusement dépassé le cercle de son auditoire naturel, il a été très imparfaitement entendu ; et on l’a admiré ou haï tout de travers, et l’on a affreusement simplifié sa philosophie.
Je me dis que les choses en sont au point qu’il n’est plus permis de prendre la parole ici sans remuer les plus hautes questions.
Parmi les pièces de cette « suite », qu’il nous agrée de voir placée en tête du livre, notons une Cléopâtre — de beauté étrangement nostalgique et dont les derniers vers ont la force pensive des paroles immuables.
Ces meilleures mélopées où l’alexandrin s’enroule en courbes molles et longuement modulées, ces graves poèmes où, par l’analogie des métaphores et l’harmonieuse combinaison des consonances, la parole parvient à des effets symphoniques, ce fut Léon Dierx qui en découvrit la musique.
Lisez (si vous souriez, je vous prierai de me croire sur parole) la déjà longue série des romans jeunes de Zola, Les Mystères de Marseille, Le Vœu d’une morte… puis lisez les Contes à Ninon, et enfin les Rougon-Macquart, soutiendrez-vous que l’artiste n’ait point évolué, n’ait point lentement et mûrement corrigé sa manière ?
La question s’agite, dans la presse aux ordres du gouvernement, d’y adapter tout au moins des paroles plus seyantes.
Discours prononcé à Quimper 17 août 1885 Que je suis touché, Messieurs, de vos bonnes paroles, et que je sais gré à nos jeunes amis qui, me rendant breton une fois par année, m’ont fait faire connaissance avec cette ville antique et charmante, que je désirais voir depuis si longtemps.
Quoique les paroles qui viennent de nous échapper sentent un peu l’irrévérence, qu’on ne s’imagine pas que nous voulions le troubler dans l’exercice de sa domination.
À savoir écrit d’avance le texte entier du drame, à savoir qu’aucun effort n’y peut rien changer, à savoir qu’ils ne sont rien de plus que des acteurs, les hommesse désintéresseraient de leur jeu, de leurs paroles et de leurs mimiques ; ils ressembleraient à ces cabotins, qui récitent pour la salle des tirades pathétiques, tandis qu’ils murmurent quelque gaudriole à l’oreille de l’actrice qui leur donne la réplique.
Une autre raison qu’il donnoit pour excuse des gallicismes dont ses harangues sont pleines, c’est la nécessité d’être clair & de plaire à bien des auditeurs François, pour qui, sans ce secours, des paroles Latines n’auroient été que des sons importuns.
que Pascal voulait défendre la religion ; que La Bruyère faisait son chapitre des Esprits forts, et Massillon son sermon de la Vérité d’un avenir ; que Bossuet, enfin, lançait ces paroles foudroyantes sur les athées ?
Si vous en exceptez le clair de lune de Vernet que beaucoup de gens ont admiré sur parole, il n’y en a peut-être pas un autre qui ait arrêté autant de monde et qu’on ait plus regardé que celui-ci.
Nous avons textuellement rapporté les paroles de Wallon, de cet ennemi dangereux… Dangereux, ma foi !
Il a privé Renan, pour tous les livres qu’il écrira désormais, de la foi qu’on doit à la parole du maître et de l’autorité de l’enseignement.
C’est-à-dire : Il y a une immense tourbe d’hommes qui sentent par sentiments tout faits, dans la même proportion qu’il y a une immense tourbe d’hommes qui pensent par idées toutes faites, et dans la même proportion il y a une immense tourbe d’hommes qui veulent par volontés toutes faites, dans la même proportion qu’il y a une immense tourbe de « chrétiens » qui répètent machinalement les paroles de la prière. […] Des milliers de créanciers répètent machinalement les effrayantes paroles : Et dimitte nobis debita nostra, sicut et nos dimittimus debitoribus nostris. Qu’un seul tout à coup, soudainement éclairé, les prenne au sérieux, ces paroles, les laisse comme lui entrer dedans, c’est instantanément la plus grande révolution qu’il puisse actuellement y avoir, car c’est une révolution dans le règne de l’argent, c’est une subversion du règne de l’argent.
Blauwaert (Frédéric de Telramund) se tire fort bien de son rôle : sa voix est mordante, excellemment timbrée, et les paroles arrivent toutes au spectateur, encore que la prononciation laisse un peu à désirer. […] Mme Duvivier interprète Ortrude avec beaucoup d’aisance et une connaissance parfaite du rôle, mais les paroles ne sont pas toujours intelligibles, et l’on souhaiterait des notes élevées plus sûres. […] Personne ne pourrait, plus savamment que lui, commenter Wagner et disputer des théories controversées ; cependant il préfère laisser la parole au maître lui-même, et se contente de répondre, en une courte préface, aux ignorants et aux perfides : « Voici ce que Wagner a écrit, ce qu’il a dit, ce « qu’il a pensé. » Il est pénible de constater à quel point le public est mal renseigné sur Wagner.
. — Sans doute, répondrons-nous, on ne peut pas dessiner la différence ou la ressemblance comme on dessine deux têtes ; mais on ne peut pas dessiner non plus les paroles qui sortent de leur bouche ou les parfums que leurs cheveux répandent ; cependant tessons et les odeurs sont bien des manières de sentir. […] Après avoir vu une feuille dont la moitié était rouge et l’autre bleue, supposez la partie bleue remplacée par une rouge, si bien que les deux moitiés redeviennent de teinte semblable ; le résidu mental de toutes ces transitions et impressions successives sera l’impression de ressemblance, d’uniformité, qu’ensuite la réflexion pourra abstraire, distinguer des autres impressions, reconnaître dans des circonstances diverses et enfin, quand l’animal est doué de la parole, marquer par un mot. […] En même temps les réactions motrices répondant à ces divers états, après s’être opposées, se superposent et se réconcilient : il y a harmonie, accord, action sans obstacle ; tout cela se sent et se fait, avant d’être jugé par la réflexion et exprimé par la parole.
Mais il a tenu tellement à l’être, qu’il a fait parler avec leurs propres paroles les acteurs de son histoire plutôt que de la raconter lui-même, afin qu’elle fût plus fidèlement racontée et d’une vérité plus intime. […] Lui qui méprise les esprits vulgaires et les démocraties, qui ne sont jamais que le gouvernement de la Vulgarité, il est tombé, par le fait plus que par des paroles expresses, il est vrai, dans ce plat sophisme des esprits vulgaires, qui retourne l’infamie du prêtre contre la sainteté de l’autel. […] Il l’a poursuivie jusque dans les armées aux commandements contradictoires, et où un homme comme Hoche, terrorisé par la Convention, manquait à sa parole de chef de guerre et se déshonorait par le massacre de Quiberon.
Elles différaient des Mystères qu’on introduisit plus tard au théâtre, en ce que les paroles étaient notées en plain-chant. […] Chose bizarre, cet homme si élevé, si sublime dans ses écrits, avait la parole difficile, embarrassée. […] mais les paroles de mademoiselle de Mancini sont empreintes d’un sentiment bien autrement énergique. […] Il fut tellement satisfait des paroles de l’opéra, qu’il envoya cent louis à Campistron, somme énorme pour l’époque. […] Péchantré avait laissé sur la table d’une auberge un papier sur lequel il y avait quelques chiffres, au-dessus desquels étaient ces paroles : Ici le roi sera tué.
Le public suivait avec un vif plaisir et un réel intérêt ces jeunes savants dont la parole était si sûre, si élégante et parfois si indépendante. […] Weiss eut aussi ses jours de parole ; c’est dans cette salle de l’Athénée qu’il fit ces conférences sur Molière, que nous publions aujourd’hui pour la première fois. […] Quoi qu’il en soit, dans l’un et l’autre cas, c’est ici, ou peu s’en faut, sa parole que l’on entend, c’est lui-même ; c’est sa libre parole, avec les inégalités, les négligences, les hasards, les parenthèses, les redites rapides, les soudaines et courtes digressions, que l’improvisation orale comporte et qu’elle excuse ; mais aussi, avec un caractère particulier de naturel, une facilité entraînante, une abondance, un abandon sans cesse traversés de traits expressifs, de mots qui se gravent, de vives saillies… Ce mélange même, au lieu de nuire au succès du présent volume, lui donne peut-être une chance de plus d’accueil curieux et bienveillant. […] Quand Dom Juan, le seigneur brillant, couvert d’or, et prodigue de belles paroles, arrive dans le village de Charlotte et de Mathurine, qu’il accable Charlotte de ses brillantes promesses et de ses projets de mariage, comment Molière exprimera-t-il d’un seul mot Charlotte fascinée et séduite d’avance par le beau langage de Dom Juan ? […] Les trois années (1857 à 1860) que Weiss y passa lui laissèrent un délicieux souvenir : le jeune professeur (il avait alors vingt-huit ans) prenait la parole devant une assemblée composée d’avocats, de magistrats, de rentiers éclairés, même de dames, qui savaient leurs classiques et s’intéressaient aux choses de l’esprit.
Ce mauvais procédé me touchant de dépit, je résolus de les faire monter sur le théâtre à Pézenas, et de leur donner mille écus de mon argent plutôt que de leur manquer de parole. […] Molière, revenu sur ses pas, lui adressa la parole, mais, ne soupçonnant pas la ruse, il se remit en route et sa valise fut perdue pour lui. […] Pour moi, j’y portai trente sous ; Mais, oyant leurs fines paroles, J’en ris pour plus de dix pistoles. […] Dans sa Préface de L’École des femmes, il avait menacé ses ennemis de faire rire à leurs dépens ; il tint parole dans La Critique. […] Le moine, qui convenait de tout obligeamment, donna aussitôt un signe d’approbation sans proférer une seule parole.
L’homme qui, parce qu’il était athénien, poète, artiste et orateur, était peu destiné à être moraliste, s’enivre de la parole de Socrate, strictement et uniquement moraliste et ramenant tout à la morale. […] Ils ne songent qu’à faire des hommes habiles par la parole, sans se soucier de l’objet auquel cette habileté de parole s’appliquera et du but qu’elle devra poursuivre, et il n’y a d’important que cet objet et que ce but. […] … Les paroles [dans cet opéra qui s’appelle la tragédie] s’adressent à la multitude assemblée. […] Mêmes choses à dire ; du reste, de tous les artistes, quoique ceux qui ne se servent point de la parole soient moins directement corrupteurs. […] Je voudrais, moi, être sans cesse en communication et communion avec l’âme même de ce peuple et sans cesse lui donner de braves et généreuses inspirations et sans cesse aussi, remarque bien cette parole, en recevoir de lui.
À certaines paroles, la pauvre Amy le comprend, et la mort dans l’âme, pour sauver son mari, finit par dire : « Eh bien ! […] L’infante, autant qu’il m’en souvienne, Était, sur ma parole, une adorable Hébé. […] Mais jamais, si l’on veut rester homme de goût, En parole on n’aura la plus faible licence. […] Hervieu a assisté aux représentations de les Paroles restent. […] Et enfin, quand éclate ce que tout le monde attendait, la grande discussion et querelle sur l’idée de patrie, il est clair que l’on est remué par les belles et fortes paroles que trouve Aubier pour expliquer pourquoi il aime son pays, et on l’applaudit vigoureusement, et c’est justice pour toutes sortes de raisons et même parce que le couplet est très beau ; mais on ne peut pas s’empêcher de se dire que tout cela est un peu faux, nonobstant, non pas en soi, mais en ce que personne n’y dit la parole juste, la vraie parole juste.
Mais il se libère selon cette parole de saint Paul : « Étant lié, je suis libre ! […] Ces esprits, « pourquoi s’en reviennent-ils les mains et les paroles vides ? […] S’ils la prouvaient, ils ne tiendraient pas parole : c’est en manquant de preuves qu’ils ne manquent pas de sens ! […] Elle recueillera toutes ses paroles, même les paroles d’amour ; elle étudiera ses tares physiques de même que les déviations de sa pensée ; elle interrogera aussi bien sa maîtresse que son médecin, son valet de chambre que son confesseur. […] J’avais, là-dessus, la parole de mon grand-père.
Il est souvent doué d’un visage doux et d’une grande facilité de parole. Or, c’est avec le visage et avec la parole que l’on capte d’abord les sympathies. […] Il le possédait mais en paroles et en chèques, quoique pourtant en réalité. […] Comme on entend mentalement les paroles à mesure que va la musique, on se demande ce que veut dire : « Le jour de gloire est arrivé », quand il s’agit de planter un flot de rubans sur l’échiné d’un œuf ? […] Qu’est-ce que la censure pourra bien trouver à reprendre dans ces histoires sans paroles et même sans intentions et qui dépassent en niaiserie nos films parisiens, ce qui n’est pas peu dire ?
Il est évident qu’à l’exemple de tous les grands réformateurs, semblable aux apôtres, à saint Augustin, à tous ceux qui ont eu la mission ou la prétention de régénérer par la parole ou d’édifier par leurs écrits les époques vieillies et dépravées, M. […] Saint Paul prononce un jugement pareil : il ne permet, sous aucun prétexte, sous aucune de ses mille formes, qu’il soit question devant les fidèles de ce vice si cher au genre humain, dont le nom chatouille délicieusement les oreilles les plus chastes, dont le venin se glisse, subtil et pénétrant, jusqu’au travers des plus austères paroles et des plus redoutables menaces. […] Mais un matin il lui prend fantaisie de faire une révolution parmi ses gens ; il appelle le beetcheti, lui ordonne de déposer son outre sur un des chariots et de l’accompagner dans un taillis voisin, avec un herbier sous le bras : « Non pas, dit l’Indien, ce n’est pas mon affaire » ; et il prononce ces paroles d’un ton très suffisant. […] Il la prédisait du fond de l’Indoustan, à quelques mille lieues du théâtre des événements, et plus de trois ans avant que lord Palmerston eût fait entendre, dans le parlement anglais, ces paroles mémorables : « Les relations qui unissent la France et l’Angleterre deviennent de jour en jour plus amicales. […] Mais, quoi qu’il en soit de ma prédiction, la Compagnie tiendra sa parole.
Les Grecs et les Romains, qui vivaient sous un gouvernement républicain, étaient continuellement occupés de grands intérêts publics : les orateurs appliquaient principalement à ces objets importants le talent de la parole ; et comme il s’agissait toujours, en ces occasions, de remuer le peuple en le convainquant, ils appelèrent éloquence le talent de persuader, en prenant pour le tout la partie la plus importante et la plus étendue. […] Disertus, chez les Latins, signifiait toujours, ou presque toujours, ce que nous entendons par éloquent, c’est-à-dire, celui qui possède dans un souverain degré le talent de la parole, et qui par ce talent sait frapper, émouvoir, attendrir, intéresser, persuader. […] Je crois donc qu’on ne traduirait pas exactement ce dernier passage, en faisant dire à Marc-Antoine qu’il avait vu bien des hommes diserts, et aucun d’éloquent ; mais qu’on doit traduire, du moins en cet endroit, qu’il avait vu beaucoup d’hommes doués du talent de la parole, et aucun de l’éloquence parfaite, omninò. […] L’éloquence, dit très bien Voltaire, a tant de pouvoir sur les hommes, qu’on admira Balzac de son temps, pour avoir trouvé cette petite partie de l’art ignorée et nécessaire, qui consiste dans le choix harmonieux des paroles, et même pour l’avoir souvent employée hors de sa place. […] On peut juger de là combien est opposée à l’éloquence véritable, cette loquacité si ordinaire au barreau, qui consiste à dire si peu de choses avec tant de paroles.
Belin, et pense que vous n’y en croyez guère plus que moi, quoi qu’en aient dit Fernel et d’autres de qui toutes les paroles ne sont point mot d’Évangile. […] Gui Patin est l’homme de ces colères ; il a des verves et des rages de parole tout à fait rabelaisiennes, mais sans rire ; il mord à belles dents et emporte la pièce.
Je me bornerai à en citer deux ou trois des plus marquants, en avertissant bien à l’avance que d’Argenson ne se fait aucune illusion sur l’homme éminent qu’il admire ; il qualifie nettement ses défauts de caractère et de conduite, et il a même à ce sujet des paroles parfois si crues qu’on n’aime pas à s’en faire l’écho à cette distance. […] C’est dans un endroit où lui-même il semble démentir la belle parole dite précédemment à son frère sur la valeur guerrière, qui était la seule vertu restée aux Français : L’on ne doit point aller à la guerre qu’on ne se sente une très grande résignation à perdre la vie en la postposant à l’ambition et à la gloire.
Rendant hommage au mérite de M. de La Motte, qu’il ne craint pas d’appeler, « de l’aveu de tout le monde littéraire, un des premiers hommes de son siècle », l’abbé de Pons s’exprimait en paroles bien senties et moins contestables sur son caractère moral et ses vertus de société : Cette supériorité24, disait-il, est d’ordinaire compagne de l’orgueil immodéré ; mais le souverain éloge de M. de La Motte, c’est d’avoir su allier aux talents les plus éminents la plus modeste opinion de lui-même ; c’est de n’avoir jamais cherché dans les ouvrages de ses rivaux que le beau pour le protéger, et de s’être imposé un silence religieux sur les fautes dont il aurait pu triompher. […] Qu’on relise seulement à haute voix ce passage connu des Martyrs, dans la visite que Cymodocée et son père sont allés faire à la famille d’Eudore en Arcadie : Comme Lasthénès achevait de prononcer ces paroles, le soleil descendit sur les sommets du Pholoë, vers l’horizon éclatant d’Olympie ; l’astre agrandi parut un moment immobile, suspendu au-dessus de la montagne comme un large bouclier d’or… Les bois de l’Alphée et du Ladon, les neiges lointaines du Telphusse et du Lycée se couvrirent de roses ; les vents tombèrent, et les vallées de l’Arcadie demeurèrent dans un repos universel… D’où vient que l’enchantement produit par des sons amène une larme ?
S’il faut, outre cela, dire quelque chose de ses mœurs, le lieu d’où il est né, sa physionomie, ses paroles, ses gestes plus militaires qu’autrement, le font soupçonner d’être léger ; et néanmoins, soit par artifice qui a corrigé la nature, soit par vraie et naturelle inclination, il n’y a rien au monde si constant que lui, si attaché à une chose de laquelle il ne déprend jamais, quand il s’y est mis, qu’elle ne soit achevée, voire jusques au blâme véritable d’opiniâtreté. […] Jamais homme qui lui ait dit une parole vraie ne s’en repentit, quoiqu’elle fût hardie, principalement s’il reconnaît qu’elle parle d’amour et d’affection.
Si le poète, en outre, a eu particulièrement à souffrir de la vie et des hommes, que ce soit sa faute ou celle de son étoile, si plus qu’un autre il a été humilié par la destinée, je n’imagine rien de plus propre que ces novissima verba, que ces paroles suprêmes, à attirer enfin l’intérêt sur sa personne, et à touchez en sa faveur les plus distraits et les plus froids. Pour Villon, ç’a été une manière de distribuer bien des malices et des épigrammes à ses ennemis, de bonnes paroles à ses amis et quelques-uns des objets qui lui avaient appartenu, dont ils avaient la signification et le secret, et qui à eux seuls, si on saisissait bien son intention, raconteraient toute sa vie : mais là encore l’épigramme, la contrevérité et la farce, on l’entrevoit, se glissent à chaque ligne, et ce qu’il lègue repose bien souvent sur les brouillards de la Seine.
Cette parole de fâcheux augure m’a été reprochée par des amis bienveillants, et ils ont cru y voir de ma part un signe de faiblesse. […] Il s’adresse avec un regard de satisfaction à l’objet insensible de ses feux, mais dont il se voit vengé, car il a suffi d’une ou de deux saisons pour lui ôter sa grâce première : « Tu te souviens sans doute, tu te souviens que je t’ai dit cette parole sacrée : La jeunesse est la plus belle chose, et la jeunesse est aussi la plus fugitive ; le plus rapide des oiseaux dans l’air ne vole pas plus vite que la jeunesse.
Grupel se glisse dans la place le 22 septembre, à la faveur d’un travestissement qui le rendait méconnaissable ; il est porteur de belles paroles. […] Son Altesse royale a été trompée en tout… Il vous envoya dire qu’il différerait le bombardement de Pignerol jusqu’au 27 ; c’était non seulement son intention, mais fiez-vous à ma parole que le marquis de Leganez commença d’un jour plus tôt qu’il ne l’avait promis, et malgré Son Altesse qui ne commença le bombardement qu’il ne pouvait plus différer que le 26 ; encore fut-ce faiblement… Quant à la bataille qui s’est donnée, en voici l’histoire : nous n’avons jamais cru jusqu’au 2, — et la bataille s’est donnée le 4, — que M. de Catinat vînt par la plaine ; l’on n’a pas cru praticable que l’armée de secours vînt par la vallée de Suse, persuadé qu’on était que l’armée du roi entrerait en Piémont par la vallée de Barcelonnette.
Dans le temps où il était occupé à mener à fin son grand ouvrage, de fâcheuses et légères paroles tombées de la tribune française et prononcées par des généraux distingués, membres de l’opposition, tantôt par le général Sébastiani, tantôt par le général Foy, semblaient indiquer qu’il n’y avait plus, de la part des puissances, à compter ni sur la Suisse ni avec la Suisse. […] Le colonel fédéral Huber-Saladin, en quelques paroles émues et touchantes, lui envoya le suprême adieu de la patrie helvétique.
J’ignore s’il a gagné aux voies trop détournées, où il s’est tenu, beaucoup d’âmes de mystère ; mais il n’a en rien touché le grand nombre des âmes accessibles d’ailleurs aux belles et bonnes paroles, et dignes de consolation. […] Ton merveilleux laurier sur chacun de tes pas Étendait un rameau que tu n’espérais pas ; L’écho te renvoyait tes paroles aimées ; Les moindres des chansons anciennement semées Sur ta route en festons pendaient comme au hasard ; Les oiseaux par milliers, nés depuis ton départ, Chantaient ton nom, un nom de tendresse et de flamme, Et la vierge, en passant, le chantait dans son âme.
Tout ce que la parole invente de tendresse, Ce que disent les yeux et leur vive caresse, La voix, le sourire et les pleurs, De ce divin langage et des mots qu’il t’adresse N’égaleraient pas les douceurs. […] Il y épanchait en paroles brisées et sans suite ses tristesses, ses défaillances, ses mélanges perpétuels et ses amalgames de religion, d’amour et de poésie, ses citations et réminiscences de Hugo, de De Vigny et d’autres encore : la femme, la Dalila y reparaissait jusqu’à la fin.
Le Timon d’aujourd’hui, qui avait dès lors l’âge de la raison et même celui de la misanthropie, se serait bien gardé de se mettre du jeu ; s’il avait plus de motif, je l’ignore, je n’imagine que le motif littéraire très-suffisant : il attendait patiemment l’heure d’aborder les choses par le plus gros bout, de jeter à l’aise et crûment sa parole saccadée et cassante ; il se sentait le croc, non pas l’aiguillon. […] Laissons l’Hymette et son miel à ceux-là seuls qui en savent les sentiers, à ceux qui, même au sein des passions et des paroles acérées, ne perdent jamais une certaine légèreté de ton, et comme une certaine saveur du berceau : Musæo contingens cuncta lepore.
Mme de Pontivy remarquait par instants ce peu de rayonnement d’un cœur au fond si pénétré, et elle lui en faisait des plaintes tendres qu’apaisaient bientôt de parfaites paroles ou mieux des soupirs brûlants ; et puis, son propre soleil, à elle, couvrait tout. […] Mme de Pontivy, sans être exigeante, mais parce qu’elle était passionnée, trouvait nécessaire et simple que M. de Murçay se retranchât quelquefois certaines paroles, certains jugements, certaines relations même, qui pouvaient aliéner de lui l’esprit de sa tante, plus absolue en vieillissant, et rendre leur commerce moins facile.
Simple, candide, embarrassé et timide en paroles ; assez gauche, mais fort sincère et respectueux en amour, Corneille adore une femme auprès de laquelle il échoue, et qui, après lui avoir donné quelque espoir, en épouse un autre. […] Il les balance l’un par l’autre, les dessine vigoureusement par une parole mâle et brève, les contraste par des reparties tranchées, et présente à l’œil du spectateur des masses d’une savante structure.
Il est aussi conscient qu’on le peut être : il peindra donc surtout des inconscients, de ces êtres qui ne rentrent jamais en eux-mêmes, qui s’abandonnent sans défiance aux excès de parole et de mimique, qui sont le moins dans le secret de la comédie humaine, éternelles dupes et d’eux-mêmes et du monde extérieur. […] Un tel sans gêne les ravit, puis leur parut stupide. » D’abord ce n’est point ici l’écrivain qui prend la parole, mais M.
Elles ont la parole brève, hardie, directe et comme involontaire. […] Nous sommes forcés de vous croire sur parole, ne pouvant y aller voir, et cela nous dépite.
Au début, deux jeunes scélérats se risquèrent à adresser à madame Gros des paroles inconvenantes ; sa froideur absolue et sa fermeté leur imposèrent silence ; jamais depuis il n’est arrivé qu’on ait osé prononcer devant elle un mot déplacé. […] Les scènes déplorables, les traitements indignes, les paroles offensantes, les injustices les plus criantes sont les conséquences de l’ivrognerie du père.
Au moment de sa transformation démocratique, après les Paroles d’un croyant, il est allé à Béranger comme un auxiliaire, comme un enfant plein de ferveur, pour le voir et pour causer, et Béranger, par son charme, l’a séduit. […] Je suis trop poli pour dire ce que je pense de cette manière d’interpréter les écrits, d’user et d’abuser de quelques paroles plaintives, et après tout senties, de poète et d’artiste ; je croyais que M. de Pontmartin laissait ce procédé trop facile et trop simple à M.
Et ce même homme, vers ce même moment, après des mois de captivité, sentant la belle saison qui renaissait et qui le faisait, lui aussi, renaître en même temps que souffrir, jouissant enfin de quelque adoucissement qui consistait à se promener chaque jour depuis huit heures du matin jusqu’à neuf, écrivait à Sophie : « C’est bien court, mais je quitte sans regret le jardin, en pensant que je fais place à quelque malheureux compagnon de mon sort. » Ne sentez-vous pas dans cette parole simple l’homme humain et qui sait compatir, l’homme de Virgile et celui de Térence ? […] Cette intelligence vaste, féconde et puissante, revêtue d’une si admirable et si soudaine faculté de mise en œuvre par la parole, lui échappait, et il ne voulait voir que l’apparence, le jeu, le coup de théâtre, l’appareil sonore, sans rendre justice à l’âme réelle qui unissait, qui inspirait et passionnait tout cela.
Tout en sentant d’abord ce qui lui manquait à Paris, elle en jugeait pourtant très bien le séjour en ce qu’il a bientôt d’indispensable pour ceux qui en ont une fois goûté : « Il est certain, écrit-elle, qu’on peut et qu’on doit être plus heureux ailleurs, mais il faut pour cela ne pas connaître un enchantement qui, sans faire le bonheur, empoisonne à jamais tous les autres genres de vie. » En écrivant ces paroles, elle était encore à demi sous le charme (1773). […] Mais ces défauts se rachètent ici plus aisément qu’ailleurs : le sujet l’inspire ; c’est élevé, c’est ingénieux ; et quand elle en vient à la considération du mariage dans la vieillesse, à ce dernier but de consolation et quelquefois encore de bonheur dans cet âge déshérité, elle a de belles et fortes paroles : « Le bonheur ou le malheur de la vieillesse n’est souvent que l’extrait de notre vie passée. » Et montrant, d’après son expérience de cœur et son idéal, le dernier bonheur de deux époux Qui s’aiment jusqu’au bout malgré l’effort des ans, elle nous trace l’image et nous livre le secret de sa propre destinée ; il faut lire toute cette page vraiment charmante : Deux époux attachés l’un à l’autre marquent les époques de leur longue vie par des gages de vertus et d’affections mutuelles ; ils se fortifient du temps passé, et s’en font un rempart contre les attaques du temps présent.
Un jour, présidant une réunion des défenseurs des Accusés d’avril, l’un de ces défenseurs, avocat de province, demandait la parole et, ne l’obtenant pas, s’en plaignait assez impérieusement à Carrel, qui se tourna vers lui, et lui dit d’un ton froid et significatif : « Quand vous voudrez, monsieur ! […] Et restituant à la révolution de Juillet son sens général et unanime, la montrant indépendante des menées souterraines du carbonarisme, régulière, pour ainsi dire, et légale, et avouable en plein soleil, il ajoutait ces mémorables paroles, où un vrai patriotisme respire : Cette victoire est celle de la nation entière, et la nation qui n’a jamais conspiré, la nation qui croit ne s’être pas insurgée, mais avoir réprimé et puni l’insurrection du pouvoir, la nation, disons-nous, s’étonnerait et s’alarmerait de manifestations qui ne lui rappellent point des efforts et une gloire à elle, mais des dévouements particuliers à des affiliations politiques, et qui ne peuvent être appréciés à toute leur valeur que par ceux qui les ont vus de très près.
Dans toutes les facultés humaines, il se fait la révolution qui substitue la parole au chant, l’éloquence à l’imagination. […] Même ces souveraines de l’amour que nous avions tenté de faire revivre, ne m’apparaissaient pas assez pénétrées dans l’intimité et le vif de leur féminilité particulière, de leur manière d’être, de leurs gestes, de leurs habitudes de corps, de leur parole, du son de leur voix… pas assez peintes, en un mot, ainsi qu’elles auraient pu l’être par des contemporains.
Cette marche descendante, homologue à l’ascendante, a été constatée dans toutes les maladies mentales, celles de la parole, de la mémoire, de la volonté. […] Son ironie, son esprit et sa sensibilité, la variabilité organique de ses émotions, la clairvoyance de son analyse survécurent à sa parole et à la plupart de ses membres.
Après ces paroles de Pope, on ne comprend guère à quel propos Voltaire, ahuri de Shakespeare, écrit : « Shakespeare, que les anglais prennent pour un Sophocle, florissait à peu près dans le temps de Lopez (Lope, s’il vous plaît, Voltaire) de Vega. » Voltaire ajoute : « Vous n’ignorez pas que dans Hamlet des fossoyeurs creusent une fosse en buvant, en chantant des vaudevilles, et en faisant sur les têtes des morts des plaisanteries convenables à gens de leur métier. » Et, concluant, il qualifie ainsi toute la scène : « Ces sottises ». […] Ces deux innocences auxquelles l’amour a manqué de parole ne peuvent être consolées.
Un bel ouvrage tombe entre leurs mains, c’est un premier ouvrage, l’auteur ne s’est pas encore fait un grand nom, il n’a rien qui prévienne en sa faveur, il ne s’agit point de faire sa cour ou de flatter les grands en applaudissant à ses écrits ; on ne vous demande pas, Zélotes , de vous récrier, C’est un chef-d’œuvre de l’esprit ; l’humanité ne va pas plus loin : c’est jusqu’où la parole humaine peut s’élever : on ne jugera à l’avenir du goût de quelqu’un qu’à proportion qu’il en aura pour cette pièce ; phrases outrées, dégoûtantes, qui sentent la pension ou l’abbaye, nuisibles à cela même qui est louable et qu’on veut louer : que ne disiez-vous seulement, Voilà un bon livre ; vous le dites, il est vrai, avec toute la France, avec les étrangers comme avec vos compatriotes, quand il est imprimé par toute l’Europe et qu’il est traduit en plusieurs langues ; il n’est plus temps. […] Horace ou Despréaux l’a dit avant vous, je le crois sur votre parole ; mais je l’ai dit comme mien, ne puis-je pas penser après eux une chose vraie, et que d’autres encore penseront après moi ?
À Dieu ne plaise, répond ce grand homme, que je mêle la sagesse humaine à la sagesse du Fils de Dieu ; c’est la volonté de mon maître, que mes paroles ne soient pas moins rudes, que ma doctrine paraît incroyable224 : Non in persuasibilibus humanæ sapientiæ verbis… Saint Paul rejette tous les artifices de la rhétorique. […] Une puissance surnaturelle, qui se plaît de relever ce que les superbes méprisent, s’est répandue et mêlée dans l’auguste simplicité de ses paroles.
Cassagnac cite aussi les paroles de Target et de Cerutti. […] Quand la moitié du monde connu croit à la nécessité et à la justice de la Révolution française, avoir prouvé qu’elle n’est, comme l’arianisme, comme le manichéisme, et tant d’autres erreurs qui ont eu leur jour et leur règne, qu’une erreur, qui doit peut-être, comme le disait Mirabeau dans l’ivresse de son orgueilleuse parole, faire le tour du globe, mais pour passer et non pour s’établir ; avoir montré, de plus, après le vice radical du principe, les vices radicaux de ses apôtres : erreur partout, excès et crimes inutiles, — car les crimes et les excès sont toujours inutiles, et Machiavel n’est qu’un menteur ; — c’est avoir commencé à tracer la ligne que d’autres esprits creusent, à l’exemple de l’auteur de l’Histoire des Causes, et devant laquelle le génie révolutionnaire de l’avenir doit nécessairement reculer.
L’ironie de sa parole, la revanche de Dieu y vibre si fort que c’est plus terrible à entendre que l’enfer n’est hideux à voir ! […] Froissés de toute chose avec audace écrite, Et de toute parole un peu rondement dite, Ils m’appelleront fou. — « Quel est ce vertigo ?
La parole du vieux Frédéric-Guillaume aux députés silésiens, en 1850, devait être généralisée ; tous les conservateurs ont pu dire : « Il règne dans les villes un mauvais esprit. » Parce que l’accroissement de la quantité sociale a pris dans les sociétés modernes la forme de la concentration urbaine il les prédisposait, plus que toutes les autres, à l’égalitarisme. […] Que prouvent de telles paroles ?
Dieu n’eût-il pas été mieux adoré si, au risque de quelques paroles dissonantes, plus de grandes et belles choses s’y fussent produites ? […] C’est plutôt un composé de cinq ou six individualités diverses qui tiennent la parole les unes après les autres, sans ordre logique, au hasard de l’inspiration momentanée, sans que chacune d’elle prenne soin de ce qui a été dit précédemment. […] La parole de ses ancêtres des rives du Gange avait forcé à jaillir de son esprit l’inspiration latente ; il n’avait plus qu’à la laisser librement agir pour édifier ses poèmes. […] Le maître n’a jamais substitué son âme à l’âme de la création : il ne lui a pas prêté des sentiments ou des paroles complexes qui ne pouvaient appartenir qu’à lui seul. […] Mais où s’en vont la spontanéité originale, l’inspiration personnelle au milieu de ces procédés de facture industriels, auxquels doit se soumettre quiconque veut user de la parole rythmée ?
Il multiplie, au-delà même, peut-il sembler, du nécessaire, les paroles d’Andromaque par où Pyrrhus verra qu’elle n’aime qu’Hector et qu’elle n’a pour Pyrrhus que de la haine : « Comme cela, dit-il, ils ne la prendront pas, j’espère, pour une coquette ! […] Et c’est à cela même que Philinte répond : « Oui. » « Encore des paroles, me dira-t-on, et non pas des faits et des actes. […] Ariste, de l’Ecole des maris, est précisément le raisonneur que désirerait Rousseau, c’est à savoir un sage qui parle et qui aussi agit conformément à ses discours et qui prêche par l’exemple autant que par les paroles. […] Remarquez, ce qui me paraît très important, qu’il leur met dans la bouche des paroles de braves gens tendres et sensibles, qui sont pour les rendre sympathiques. […] Quand l’Angélique du Malade imaginaire croit qu’elle a perdu son père, elle a des paroles de douleur, de remords et d’obéissance aux dernières volontés du défunt qui sont les plus convenables et les plus touchantes du monde ; de paroles qui puissent faire supposer qu’elle a une religion, point du tout, pas une syllabe.
Le nom de M. de Tocqueville devait acquérir aussitôt, sous cette parole d’oraison funèbre, ce qui justement lui avait un peu manqué, le lustre et l’éclat.
. — Nobles paroles de Victor Hugo sur sa tombe. — Candidatures académiques. — Tibère, tragédie de Marie-Joseph Chénier, au Théâtre-Français. — Article scandaleux de Janin 158 XXXIX. — Préface d’Ève, par Léon Gozlan 164 XL. — Réponse au Journal du Léman166 166 XLI. — Année stérile. — Article de M.
Cependant des boutades de franchise échappent parfois qui purent bien scandaliser ; on écrivit un jour ces téméraires paroles : « De quoi se mêlent ceux qu’on appelle jansénistes et le parti contraire, d’empêcher qu’on envoie à Rome des personnes qui soient ou ne soient pas dans leurs opinions ?
Soumet, sur le ton solennel d’un prône ou d’un ordre du jour : « Les lettres sont aujourd’hui comme la politique et la religion ; elles ont leur profession de foi, et c’est en ne méconnaissant plus l’obligation qui leur est imposée que nos écrivains pourront se réunir, comme les prêtres d’un même culte, autour des autels de la vérité ; ils auront aussi leur sainte alliance ; ils n’useront pas à s’attaquer mutuellement des forces destinées à un plus noble usage ; ils voudront que leurs ouvrages soient jugés comme des actions, avant de l’être comme des écrits ; ils ne reculeront jamais devant les conséquences, devant les dangers d’une parole courageuse, et ils se rappelleront que le dieu qui rendait les oracles du temple de Delphes, avait été représenté sortant d’un combat. » Une fois qu’on en venait à un combat dans les formes avec les idées dominantes, on était certain de ne pas vaincre.
Cette manière de comprendre les diverses heures du jour, l’aube, le matin, le crépuscule, d’interpréter la couleur des nuages, le murmure des eaux, le bruissement des bois, nous était déjà obscurément familière avant que le poète nous la rendît vivante par le souffle harmonieux de sa parole.
Les femmes n’étant point, pour ainsi dire, responsables d’elles-mêmes, vont aussi loin dans leurs paroles que les sentiments de l’âme les conduisent.
L’influence des femmes est nécessairement très grande, lorsque tous les événements se passent dans les salons, et que tous les caractères se montrent par les paroles ; dans un tel état de choses, les femmes sont une puissance, et l’on cultive ce qui leur plaît.
Ce n’est pas impuissance ou grossièreté de nature, mais rudesse et manque de culture, qui fait que devant une œuvre d’art, un poème, un paysage, on reste morne et muet, sans émotion, que factice, sans idée, que convenue, sans parole, que banale, Par cet effort de conscience, on contraindra les sentiments à se préciser : le nuage confus des émotions se divisera, et de l’obscure vapeur qui bout dans l’âme surgiront des couleurs et des formes, de plus en plus nettes et délicates.
L’exercice populaire de la parole a poli plus tôt le langage de Calvin, en a retranché l’excès et la « débauche » : tout le siècle finit par y venir.
» Quel baume et quel calmant que ces saintes paroles !
Vous vous rappelez cette entrée en scène du Dépit amoureux, lorsque Mascarille vient trouver Albert et que celui-ci, à chaque parole, lui tourne le dos avec brusquerie.
Nous laissons donc, sans plus de commentaires, la parole au jeune chef des « naturistes » : La jeunesse contemporaine, à laquelle répugnent si évidemment les institutions de la République, ne se trouve pas mieux satisfaite par tant de chimériques romances, d’allégories et de drames languissants dont Richard Wagner, Tolstoï et Ibsen nous ont peu à peu inspiré le goût, et qui menaçaient de détruire, chez nous, les dernières apparences de l’esprit national.
Sa femme & ses amis recueillirent ses dernières paroles ; elles furent toutes d’un sage.
« Cet écrivain, jaloux de tout, disoit Bayle, n’a pu me le pardonner. » Ces paroles paroissent décider la question ; mais elles ne sont fondées que sur le rapport d’un anonyme, qui assure qu’on avoit souvent mis Bayle sur le chapitre des démêlés éclatans des deux plus célèbres refugiés François, qui s’étoient donnés auparavant des louanges réciproques dans leurs ouvrages.
Il tombe lui-même sous les objections qu’il fait à ses adversaires, et on sent qu’il est sous le joug d’une idée préconçue, ce qui affaiblit beaucoup l’autorité de ses paroles.
Daudé-Baucel (secrétaire de l’Union Coopérative), Angot des Rotours, Émile Magne — et bien d’autres, aidés d’aînés illustres, prennent la parole dans ses réunions périodiques.
Ciceron nous apprend dans un autre endroit de ses ouvrages, que Roscius tint parole lorsqu’il fut devenu vieux.
Et enfin on relit, dessein plus ou moins conscient, pour se comparer à soi-même. « Quel effet ferait sur moi tel livre dont j’ai été féru dans ma jeunesse » est une parole qu’on se dit assez souvent à un certain âge.
Il pousse, par exemple, la plaisanterie jusqu’à nous accabler avec le mot d’Ernest Hello : « Le grand écrivain donne son style, c’est-à-dire sa parole.
Quand les poésies de Hebel parurent, Goethe et Jean-Paul, qui tenaient le sceptre de la Critique en Allemagne, firent entendre de ces paroles qui étaient le jugement antidaté de la postérité, la question de toute supériorité intellectuelle n’étant jamais rien de plus qu’une avance de la Pensée sur le Temps : « Je viens de lire pour la sixième fois — s’écriait Jean-Paul — ce recueil de chants populaires qui pourrait trouver place dans celui de Herder, si on osait faire un bouquet au moyen d’un autre.
Nous avions entendu là-dessus le petit sifflet de Voltaire et la parole de cet autre grand génie qui se croyait positif et qui disait : « Cela pourrait être, mais cela n’est pas. » Et voilà qu’à ce moment même, au moment où le rationalisme prenait compendieusement ses conclusions souveraines, la pensée moderne retournait sous d’autres formes à des questions qui paraissaient épuisées, qui paraissaient n’en être plus !
Et il faudrait que tous les matins ce fût la première parole qu’on fît entendre aux princes, à leur réveil ; l’amour de la gloire veillerait autour d’eux pour en repousser les faiblesses et les vices ; car tel est le caractère de ce sentiment ; il est fier, délicat, sévère à lui-même.
En général, lorsque les Grecs et les Latins rapportaient quelqu’une de leurs paroles, de leurs actions à un principe supérieur, ils disaient un dieu l’a voulu ainsi.
Je ne vous en dirai rien, parce que je crois que vous le connaissez ; ici on le cite comme un homme aimable, et trop bavard pour ne pas rencontrer quelquefois l’esprit dans ses flots de paroles. […] Elle accepta avec quelque plaisir, et dussé-je faire passer cette contrebande en ballon, je tiendrai parole. […] Mais il jette par-ci par-là des paroles si savantes sur la race chevaline, que M. […] Il débuta lentement par des paroles effrayantes. […] Mais apparemment que le portier l’avait trahi, car on continua à cogner, et bien plus on lui parla du dehors ; au milieu de paroles confuses, il fut même facile d’entendre ces mots : au nom du Roi !
Il demande qu’elle soit « humaine et traitable », sans orgueil, sans fierté de paroles, sans fanfaronnade de vertu. […] Les paroles qu’ils ont prononcées, parce qu’ils étaient avec moi en ouverture de cœur, je les consigne scrupuleusement. […] La parole sinistre, dite jadis à Lavoisier : « La République n’a pas besoin de savants », n’est plus prononcée. […] C’est le cas de rappeler les admirables paroles que Pasteur prononçait, comme une sorte de testament, à l’inauguration de son Institut. […] Il exagérera la surveillance sur sa parole, pour ne jamais manquer, même de la façon la plus légère, au secret professionnel.
Mais le sens de ses paroles allait au-delà de sa pensée même, et portait plus loin, qu’il y visât ou non. […] Il a des paroles d’admiration même pour Tom Lévis, ce diable d’homme ; il a des mots de sympathie même pour Séphora Leemans, la cruelle fille. […] Mais je demande ce que serait un roman, et généralement une œuvre de la parole ou de la plume qui ne commencerait ni ne finirait ? […] tant les paroles qui les traduisent y sont adaptées avec une merveilleuse justesse ! […] Ce n’est pourtant pas une vaine parole que, pour savoir apprendre, il faut commencer par apprendre à apprendre.
C’était même d’autant plus remarquable que l’antisémitisme et la Libre Parole avaient fanatisé le petit clergé dans les derniers temps du régime concordataire : ni Léon Daudet, élève de Drumont, ni Maurras, avec ses appuis cardinalices, n’ont pu gagner dans la nouvelle génération cléricale la place que Drumont tenait pour l’ancienne. […] En frappant le journal et les journalistes qui succédaient à l’Univers et à la Libre Parole, Rome suivait la ligne et utilisait l’expérience d’une mémoire tenace. Pour s’être laissé conduire par la Libre Parole dans l’affaire Dreyfus, le clergé français a paru devant le pays un bloc noir d’action antirépublicaine. […] Le doyen de la Faculté des Lettres de Bordeaux, Paul Stapfer, qui appartenait à une famille protestante célèbre, ayant prononcé sur la tombe d’un révisionniste des paroles révisionnistes, fut suspendu de ses fonctions de doyen par le ministre. […] Le Sillon a été créé par la foi et la parole d’un orateur pur, c’est-à-dire qui avait des limites assez strictes, le petit-fils de Lachaud.
Ce petit pays, qui n’est pas un démembrement du nôtre, a tenu dès lors un rôle très-important par la parole ; il a eu son français un peu à part, original, soigneusement nourri, adapté à des habitudes et à des mœurs très-fortes ; il ne l’a pas appris de nous, et nous venons lui dire désagréablement, si quelque écho parfois nous en arrive : Votre français est mauvais ; et à chaque mot, à chaque accent qui diffère, nous haussons les épaules en grands seigneurs que nous nous croyons. […] Ce genre d’humour se traduit peu par des paroles ; la seule manière de le louer, c’est de le goûter et d’en rire. […] Un peu d’accent peut-être à la longue, à la fin, marquerait la parole, — un peu d’accent tout au plus, et que nul n’apercevrait.
Je pense donc que la musique d’un opéra n’est, comme sa poésie, qu’un nouvel art d’embellir la parole, dont il ne faut pas abuser. » Et plus loin : « Que sera-ce si le musicien orgueilleux, sans goût ou sans génie, veut dominer le poète, ou faire de sa musique une œuvre séparée ? […] Et l’Harmonie, violentée par la Parole, enfanta le Drame musical. » Tout le système de Richard Wagner et l’œuvre qui en est issue sont exprimés par cette allégorie. […] Enfin, dans la seconde partie, Fourcaud relève l’expression de l’orchestre, le jeu des thèmes, des leitmotive ; il commente l’action ou les paroles des personnages : « Ce qu’ils avouent, les instruments le confirment ; et ce qu’ils taisent, la symphonie le révèle ».
Quand les hommes forts de notre race ont paru dans la foule, quand Victor Hugo, Lamartine, Auguste Barbier, Alfred de Vigny, Balzac ont parlé, il s’est fait tout à coup un grand silence autour d’eux ; on a recueilli religieusement chacune de leurs paroles, on a battu des mains, et, d’un seul élan, on les a placés si haut que nul encore de nos jours n’a pu les atteindre. […] Basée sur la Genèse qui nous apprend que l’homme a été créé à l’image de Dieu, que la terre immobile voit tourner autour d’elle le soleil et la lime chargés de l’éclairer le jour et la nuit, qu’un seul déluge a couvert le monde en punition des péchés des hommes ; fortifiée par les paroles que le Seigneur dit à Moïse dans le Deutéronome2, en lui enseignant que les lièvres sont des animaux ruminants, la science religieuse officielle a dû combattre de toutes ses forces, de tous ses anathèmes, de toutes ses inquisitions contre ces hommes trois fois saints qui recherchaient les effets et les causes, et les trouvaient infailliblement en dehors des dogmes imposés. […] Il courait la nuit en vomissant des flammes, en poussant des cris, en entraînant à sa suite des légions de diablotins et de sorcières ; mais une locomotive remorquant son convoi lance plus de feux, jette plus de clameurs, emporte plus de monde que lui ; il bâtissait des palais en un jour, mais voyez donc ce qui se fait au Louvre maintenant ; il donnait des trésors à ceux qui lui vendaient leur âme ; l’industrie en procure d’aussi grands, de plus inépuisables, et n’exige que du travail en échange ; il disait certaines paroles qui cicatrisaient les blessures et endormaient la douleur, mais le chloroforme en sait plus long que lui sur ce sujet.
Nous nous félicitons d’abord d’y avoir au moins relevé une expression nouvelle : l’auteur nous dit que ce qui domine le phénomène est une sensation d’« inévitabilité », comme si aucune puissance au monde ne pouvait arrêter les paroles et les actes qui vont venir. […] Ou bien alors il faudra dire que la parole du magnétiseur, pour suggérer aux sujets endormis qu’ils ont dans la bouche du sucre ou du sel, doit déjà être elle-même un peu sucrée ou salée. […] Il ne nous est pas aussi facile de comprimer l’élan de notre vie psychologique tout entière que celui de notre parole ; mais, là où l’élan général faiblit, la situation traversée doit paraître aussi bizarre que le son d’un mot qui s’immobilise au cours du mouvement de la phrase.
Et ce Dieu qu’il invoque comme autorité appuyant sa parole et sa pensée, il y croit comme à l’inspirateur secret qui a dicté sa pensée et sa parole. […] Celui qui a dit : « Il faut qu’il y ait des hérésies », a dit une des paroles les plus profondes qui aient été dites dans ce monde. […] On ne sait ; car rien jamais ne fut plus lucide que la parole de M. […] Le gouvernement, sûr de la Chambre et encore plus, s’il était possible, du Sénat, allait droit de l’avant, ne gardant aucune mesure dans les actes, comme aucune forme, même hypocrite, dans les paroles. […] Combes inspirait une extraordinaire confiance à un parti peu intelligent, peu réfléchi et que la violence d’attitudes et de paroles séduit presque toujours.
Mais cette voix prononçait précisément les paroles dont cette foule avait le besoin. […] Elles se connaissent par avance, elles ont l’une sur l’autre un ensemble de notions acquises, en sorte que l’effet direct de chaque parole est modifié, pour l’une et pour l’autre, par la somme des impressions préalables. […] Il me faut marcher sur un terrain plus solide que celui-là… » Et Hamlet se trouve ainsi agir, tout en cédant à son goût passionné de l’analyse, par cela seul qu’il s’essaye à vérifier les paroles de l’indéfinissable fantôme. […] C’est alors, et pendant des heures, la révélation du monde de sentiments indéfinis et sans paroles où certains musiciens modernes se complaisent. […] Et si mon cerveau, trop sillonné par le mal, se refusait à comprendre, et, cette supposition est plus triste encore, si je méprisais la vérité par orgueil de malade, lui, sans méchantes paroles, modifierait son traitement.
Du reste, il les leurroit de paroles & de belles promesses. […] quel fatras de raisonnemens & de paroles ! […] Torquato mit ces paroles dans la bouche de son père. […] Charpentier prit la parole, & dit que son approbation ne s’étendoit qu’aux termes d’arts & de sciences, & point du tout à tous les mots de la langue : les deux académiciens s’animèrent. […] Quand la parole vient au second, il faut lui relire l’article, à cause de sa distraction dans la première lecture.
Le texte des paroles prononcées doit, pour avoir son plein sens, être situé dans les conditions où se trouvaient les interlocuteurs, vis-à-vis les uns des autres. […] C’est quand il fait tenir à Polonius quittant Laërte le discours célèbre : « Par-dessus tout, sois vrai avec toi-même. » Parole qui semble bien simple. […] Pascal arrive, et il vous dit simplement : « Priez comme les humbles. » Or quelle parole prononcent-ils, ces humbles ? […] Il ne les a composées que pour cela, pour qu’après sa mort la parole qu’il se prononçait de son vivant résonnât dans d’autres âmes. […] « Pour écrire », disait de lui cet observateur aigu qu’était Alphonse Daudet, « il n’a eu qu’à noter sa parole ».
C’est assez de mon parentage ; la vanité n’habite point aux lieux où je suis. » Au contraire, aux paroles que suppose Malherbe, on dirait qu’elle y habite. […] Lui, Malherbe, il s’appliquait à son œuvre isolée et toute personnelle, à la fois avec un sentiment très net de ce qu’il y avait de borné et de restreint dans le métier de la poésie (« On n’en doit espérer d’autre récompense, disait-il, que son plaisir, et un bon poète n’est pas plus utile à l’État qu’un bon joueur de quilles »), — et aussi avec la conscience de ce que valaient ses paroles et ses louanges : Ce que Malherbe écrit dure éternellement. […] Du temps de Malherbe, on sortait du xvie siècle : un peu de cruauté dans les paroles ne blessait pas, même chez les honnêtes gens. […] Il faut, pour avoir son jugement sérieux, corriger cet endroit badin par les meilleures et belles paroles, souvent citées, de sa lettre latine à Silhon.
. — Ami, ami, mais tes paroles aussi sont d’un fanatique ! […] Je veux me méfier de toutes les paroles. […] Il y a comme un nuage bleu qui indéfiniment se déroule dans le cerveau de tout Norvégien : il enveloppe sa pensée et c’est lui qui donne à ses paroles ces contours indécis et flottants. […] quel bien pourra jamais résulter de ces vaines paroles ? […] Mille souvenirs lui reviennent à l’esprit de paroles qu’il a dites et qu’il aurait dû ne pas dire ; mille projets surgissent devant lui, puis aussitôt se dissipent.
Il a mérité que le caractère d’individualisme, si fortement prononcé dans notre âge égoïste et littéraire, s’effaçât ici, en quelque sorte, sous la sanction sacerdotale, sous l’adoption solennelle qui fait de ces lettres, non pas un opuscule philosophique, non pas un legs posthume d’un jeune homme de belle espérance, mais une pierre désormais indestructible du temple qui s’élève, une parole mémorable de l’Évangile toujours vivant, un chapitre de plus destiné à illustrer la troisième période des saintes Écritures.
Il est temps de ne chercher les paroles que dans sa conscience… » La phrase que j’ai soulignée pourrait servir d’épigraphe à toutes les parties de son œuvre.
— Et quand bien même une morale pourrait issir de l’économie sociale, nous hésiterions à prendre pour paroles de l’Évangile utilitaire les aphorismes mi-paradoxes, mi-truismes, enroulés autour de Denise ou de Francillon.
Ne retiens de mes paroles que les notions simples, acceptées librement par ta conscience quand ta raison t’aura démontré qu’elles sont justes.
Horace l’a dit, & nous le répétons, parce que ces paroles décident la question en faveur de notre Poëte.
Voici autant de croyances et de pratiques absurdes, autant de paroles d’énergumènes, autant de clameurs fanatiques et qui humilient l’intelligence.
Un rieur, entendant dire que le portrait étoit si ressemblant, qu’il ne lui manquoit que la parole, répondit : Ce n’est point un défaut du peintre, c’est une des propriétés de son original.
Je n’y vois à critiquer que les deux mauvaises rimes de paroles et d’épaules.
Avide de généreuses sensations, il sollicitera la parole de ses professeurs ; il devancera même leur interprétation.
Voilà pourquoi ils s’entr’accusent si souvent les uns les autres de reciter sur des tons vitieux, et principalement de finir mal leur couplet, de maniere qu’ils mettent à la gêne, disent-ils, celui qui doit prendre la parole immediatement après eux.
Lui qui méprise les esprits vulgaires et les démocraties qui ne sont jamais que le gouvernement de la Vulgarité, il est tombé, par le fait plus que par des paroles expresses, il est vrai, dans ce plat sophisme des esprits vulgaires qui retourne l’infamie du prêtre contre la sainteté de l’autel.
Je suis bien bon de l’appeler Armide, cette méchante fée de la Chronique, qui prend les plus belles facultés et qui les broie dans son petit moulin à phrases et à paroles, lequel tourne, tourne sans jamais s’arrêter !
— Rétractez vos mauvaises paroles… — Et faites-vous enterrer au cimetière juif, n’est-ce pas ?
Son style est quelquefois mystérieux comme l’être à qui il parle ; son oreille même cherche dans les sons une harmonie inconnue ; et comme pour donner une habitation à la divinité, il a élevé des colonnes, exhaussé des voûtes, dessiné des portiques ; comme pour la représenter, il a agrandi les proportions et cherché à faire une figure imposante ; comme pour en approcher dans les jours de fêtes, il a substitué à la marche ordinaire des mouvements cadencés et des pas en mesure ; ainsi, pour la louer, il cherche, pour ainsi dire, à perfectionner la parole ; et joignant la poésie à la musique, il se crée un langage distingué en tout du langage commun.
On n’osait approcher ; on n’osait même adresser la parole à un prince toujours caché dans l’ombre, et fuyant les regards, et qui ne sortait de sa profonde solitude que pour faire de Rome un désert.
Je cherchai vainement le sens de ses paroles, Et crus que mes voisins allaient être indignés Des bulles de savon qu’il leur jetait au nez.
Mais il renoue, peut-être inconsciemment, la tradition des vrais maîtres en ajoutant : « … Que le rythme des phrases ne soit point extérieur et postiche par la succession seule des paroles sonores, mais qu’il ondule selon la courbe des pensées cadencées par une corrélation subtile. » La formule est très belle et d’une grande portée, profondément intellectualiste du reste. […] Nous n’avons, quant aux faits, aucun moyen ni aucune envie de contrôler ses dires, et nous ne pouvons que le croire sur parole. […] Pour lui, il ne s’agit pas de croire aux paroles du Christ parce que le Christ est Fils de Dieu, mais de comprendre qu’il est Fils de Dieu parce que sa parole est belle au-dessus de toute parole humaine, par conséquent divine… C’est le point de vue du Vicaire savoyard : « … La sainteté des Evangiles parle à mon cœur… Si la vie et la mort de Socrate sont d’un homme, celles de Jésus sont d’un Dieu. » Mais « un Dieu » n’est pas synonyme de Dieu ; c’est presque le contraire.
Je ne lui dirai plus une parole avant qu’il ne m’ait demandé pardon950. » Il traita l’art comme les hommes, écrivant d’un trait, dédaignant « la dégoûtante besogne de se relire », ne signant aucun de ses livres, laissant chaque écrit faire son chemin seul, sans le secours des autres, sans le patronage de son nom, sans la recommandation de personne. […] Quand Swift la revit, il lui dit pour première parole : « Dites-moi, madame, êtes-vous aussi fière et d’aussi mauvais caractère aujourd’hui que la dernière fois ? […] Cependant une autre jeune fille belle et riche, miss Vanhomrigh, s’attachait à lui, lui déclarait son amour, recevait plusieurs marques du sien, le suivait en Irlande, tantôt jalouse, tantôt soumise, mais si passionnée, si malheureuse, que ses lettres auraient brisé le cœur le plus dur. « Si vous continuez à me traiter comme vous le faites, je n’aurai pas à vous gêner longtemps… Je crois que j’aurais supporté plus volontiers la torture que ces mortelles, mortelles paroles que vous m’avez dites… Oh ! […] On dit qu’il passa une année sans prononcer une parole, ayant horreur de la figure humaine, marchant dix heures par jour, maniaque, puis idiot. […] Là-dessus, les frères, consultant le testament de leur père, trouvèrent à leur grand étonnement, ces paroles : Item, j’enjoins et ordonne à mesdits trois fils de ne porter aucune espèce de frange d’argent autour de leurs susdits habits. — Cependant, après une pause, le frère, si souvent mentionné pour son érudition et très-versé dans la critique, déclara avoir trouvé, dans un certain auteur qu’il ne nommerait pas, que le mot frange écrit dans ce testament signifie aussi manche à balai, et devait indubitablement avoir ce sens dans le paragraphe.
Les paroles s’envolent, les écrits restent, dit-on10. […] Ainsi la rapidité et la facilité des communications, le mouvement accéléré de la vie moderne n’ont pas annihilé le besoin qu’ont les hommes de correspondre entre eux par lettres, besoin aussi général que celui d’échanger des paroles. […] Ces paroles de l’écrivain, ramassées on ne sait comment, tronquées, interprétées, consignées, non sans passion, par les uns et les autres peuvent pendant un certain temps jeter le trouble sur la véritable figure de l’artiste qui vient de mourir. […] Quel dommage pouvons-nous éprouver de ce qu’on communique nos lettres ou nos paroles Mais elles peuvent être confidentielles, ou immorales, ou illégales. […] Écrites auxdits héritiers, elles leur appartiennent ; écrites à des tiers, elles ne regardent pas plus les héritiers que les paroles ou les conseils de leurs auteurs à ses amis.
Pitt, le plus intègre de ces hommes politiques, le chef de ceux qui s’appelaient patriotes, donne et retire sa parole, attaque ou défend Walpole, propose la guerre ou la paix, le tout pour devenir ou rester ministre. […] D’instinct et sans effort, ils ont rencontré le geste aisé, la parole facile, l’élégance soutenue, le trait piquant, la clarté parfaite. […] Car la race est, par nature, capable d’émotions profondes, disposée, par la véhémence de son imagination, à comprendre le grandiose et le tragique, et cette Bible, qui est à leurs yeux la propre parole du Dieu éternel, leur en fournit. […] Que d’autres fassent du texte un prétexte ; pour eux, ils s’y attachent ; c’est la parole même de Dieu, on ne peut trop s’y appesantir. […] Le voici qui prend la parole, pensez aux ménagements qu’il doit garder ; c’est un homme d’État, un premier ministre, qui parle en plein Parlement, qui parle des amis du roi, des lords de la chambre à coucher, des plus illustres familles du royaume, qui a devant lui leurs alliés et leurs proches, qui sent que chacune de ses paroles s’enfoncera comme une flèche ardente dans le cœur et dans l’honneur des cinq cents hommes assis pour l’écouter.
La musique prolongera la parole. […] Ici, on me retourne mes propres paroles en répondant que voilà bien de l’embarras. […] C’est ce qui fait dire à Jacques Copeau dans une formule saisissante que je ne me lasse pas de reproduire : « Il n’y aura de théâtre nouveau (entendez de théâtre en réaction contre le faux théâtre d’aujourd’hui et conforme à la tradition) que le jour où l’homme de la salle pourra murmurer les paroles de l’homme de la scène, en même temps que lui et du même cœur que lui. […] Afin de rendre l’enseignement de la Parole plus direct et la réalité secrète plus sensible, les clercs s’avisèrent un jour de personnifier devant l’autel les Vertus Théologales et Cardinales, d’y faire défiler en somptueuses dalmatiques Moïse, Isaïe et tous les prophètes qui annoncèrent la venue du Christ, puis de dramatiser les Paraboles : celle des Vierges Sages et des Vierges Folles, avec leurs lampes pleines et leurs lampes vides, devant la porte où va passer l’Époux. […] Leurs sentiments, non plus « explicités » par la parole comme dans la tragédie classique, non plus, « implicités » par l’action comme dans le drame de Shakespeare… et de Jarry, ressortissent à l’inconscient.
Retenez, chère amie, retenez donc bien ces paroles, elles expliquent tout et m’évitent l’ennui de raconter mes sentiments et de les expliquer. […] Je suis moi-même lasse de moisir ; vos paroles me révoltent contre moi, contre tous. […] Je voudrais vous prodiguer toutes ces paroles amies qui me viennent du cœur à la bouche, mais les consolations ne consolent pas. […] Je crois vraiment que l’on comprendrait et la signification de la pièce et dans quel pays cela se passe, et tout enfin, sans voir la scène et sans entendre les paroles. […] Je ne m’excuse pas, n’ayant pas à le faire, mais je désire beaucoup que mes paroles, mes lamentations et mes indignations, que je persiste à croire légitimes, ne soient pas dénaturées.
Je viens, au contraire, soldat dévoué de la philosophie, ami commun de toutes les écoles qu’elle a produites, offrir à toutes des paroles de paix. […] Mais, selon la forte parole de M. […] Sans doute les paroles déterminent l’expression musicale, mais le mérite alors est à la parole, non à la musique ; et quelquefois la parole imprime à la musique une précision qui la tue et lui ôte ses effets propres, le vague, l’obscurité, la monotonie, mais aussi l’ampleur et la profondeur, j’allais presque dire l’infinitude. […] Ils ne le peuvent, et par là ils reconnaissent la supériorité de la parole et de la poésie. […] Il prêche, et à sa parole sont suspendus les assistants de tout sexe, de tout âge, dans les attitudes les plus variées.
Les soirs même de dimanche, en cet Arsenal toujours gracieux et embelli, s’il s’oublie quelquefois, comme par mégarde, à causer et à rajeunir, si, debout à la cheminée, il s’engage en un attachant récit qui ne va plus cesser, à mesure que sa parole élégante et flexible se déroule, écoutez, assistez ! […] La parole est la voix de l’âme, Elle vit par le sentiment ; Elle est comme une pure flamme Que la nuit du néant réclame185 Quand elle manque d’aliment. […] Tout effort est contraire au bien, Et la parole en vain foisonne, Sitôt que le cœur ne dit rien.
« Votre demande, répondit Blake, lui est déjà parvenue… Nous n’avons pas besoin de paroles ; voici sa réponse un peu plus longue qu’il ne me l’a donnée ; vous ne comprendriez pas le langage des esprits. — Il dit que ce que vous appelez meurtre et carnage n’est rien ; que, en égorgeant quinze ou vingt mille hommes, on ne leur fait aucun mal, que la partie immortelle de leur être non seulement se conserve, mais passe dans un meilleur monde, que l’homme assassiné qui adresserait des reproches à son assassin se rendrait coupable d’ingratitude, puisque ce dernier n’a fait que lui procurer un logement plus commode et une existence plus parfaite. […] « Je suis porté à croire, écrivait un halluciné, qu’il y a toujours eu en moi une double pensée, dont l’une contrôlait les actions de l’autre. »« Il y a, dit un second malade, comme un autre moi-même qui inspecte toutes mes actions, toutes mes paroles, comme un écho qui redit tout. » Un troisième, convalescent après une fièvre, « se croyait formé de deux individus, dont l’un était au lit, tandis que l’autre se promenait ; quoiqu’il n’eût pas d’appétit, il mangeait beaucoup, ayant, disait-il, deux corps à nourrir74 ». — D’autres fois, la seconde série est rapportée à un autre, surtout lorsque les idées qu’elle contient sont hors de proportion avec celles qui composent la première série. […] Les paroles mentales ont provoqué dans les centres sensitifs de l’encéphale les sensations de l’ouïe correspondantes, et désormais, détachées du moi à un double titre, elles sont imputées à un interlocuteur.
C’était le temps où César préludait à la conquête de la souveraineté romaine par la conquête des Gaules ; c’était le temps où Cicéron s’efforçait de soutenir par sa parole l’ancienne constitution républicaine que Pompée n’avait pu soutenir par son épée. […] Cassius et Brutus se tinrent parole ; ils se percèrent de leur épée. […] Je parus devant vous ; je bégayai timidement quelques paroles, car le respect ne me permit pas d’en dire davantage.
Elle commençait à chercher pour répondre des paroles entrecoupées à travers ses sanglots, mais elle ne put achever… Le monstre s’avançait à grand bruit des flots sur la mer, etc., etc. […] « Ils étaient ensemble sur les remparts à regarder, en soupirant, le ciel de leurs yeux chargés de sommeil ; Médor, dans toutes les paroles qui lui échappaient, ne pouvait s’empêcher de se rappeler sans cesse son maître et son seigneur Dardinel d’Almonte, et de pleurer en pensant que ses restes allaient rester sans sépulture sur la terre. […] « Une main glacée lui serre le cœur, son désespoir muet ne peut s’échapper ni en paroles, ni en cris : comme un vase à large circonférence et au cou étroit, quand on le renverse de sa base à son orifice, ne peut laisser écouler son contenu, car la liqueur pressée de sortir se hâte vers l’ouverture, et, se faisant obstacle à elle-même, ne peut s’écouler que goutte à goutte sous son propre poids. » Enfin il arrive, espérant encore, jusqu’à la cabane du berger.
« Aussi ne croirait-on pas, à moins que d’y prendre bien garde, tout ce qu’il en a coûté à la nature pour nous donner la parole. […] Jamais, je vous en atteste, le souvenir de l’excellent ami, de l’invincible héros qui a illustré le nom des Scipions, ne quitte un instant mon esprit… « Je m’informai ensuite de son royaume, il me parla de notre république, et la journée entière s’écoula dans un entretien sans cesse renaissant… « Après un repas d’une magnificence royale, nous conversâmes encore jusque fort avant dans la nuit ; le vieux roi ne parlait que de Scipion l’Africain, dont il rappelait toutes les actions et même les paroles. […] Grâce à mes travaux, ceux qui sont étrangers aux lettres grecques, même ceux à qui elles étaient familières, pensent avoir fait beaucoup de profit et dans l’art de la parole et dans la sagesse.
Sa parole, son vêtement, ses gestes, le clignement de ses yeux, faisaient loi dans le pays, où chacun, après l’avoir étudié comme un naturaliste étudie les effets de l’instinct chez les animaux, avait pu reconnaître la profonde et muette sagesse de ses plus légers mouvements. […] Ce bredouillement, l’incohérence de ses paroles, le flux de mots où il noyait sa pensée, son manque apparent de logique, attribués à un défaut d’éducation, étaient affectés, et seront suffisamment expliqués par quelques événements de cette histoire. […] « Abasourdi par la logique de sa fille, Grandet pâlit, trépigna, jura ; puis trouvant enfin des paroles, il cria : “Maudit serpent de fille !
On le prit au mot de ses prétentions, non seulement en Italie, mais en France, où on le jugea sur parole. […] Moi aussi je fus, pendant mes premières années poétiques, infatué sur parole du mérite de ce grand homme d’intention. […] Mais depuis quand un auteur serait-il solidaire des paroles de son héros ?
Des auditions plus variées, plus fréquentes, de fragments Wagnériens, quelques correspondances « transrhénanes » (des échos de Représentations Solennelles dans la ville de Bayreuth, de Cycles Wagnériens à Munich, à Vienne, à Berlin) découvrirent, ensuite, un génie musical, acceptable… Des insultes de Wagner à la France, on sut ce qu’il fallait penser : et, quant à cette fameuse haine contre la France, nul n’en trouva la marque, ni dans les livres, ni dans les lettres, ni dans les paroles de Richard Wagner ; Richard Wagner avait combattu, dans ses écrits, l’influence de l’esprit français ; mais c’était là tout une autre affaire ; et quiconque avait lu ses lettres et ses livres, quiconque l’avait entendu causer, rapportait aux Parisiens ébahis, que Wagner aimait la France, et Paris, et ses vieux souvenirs de 1842, et ceux, aussi, de 1860, ses amis Français, les compagnies qu’il avait traversées, les rues, les maisons même, où s’était traînée sa misère ; et l’on connut, dans le cœur du rude Ennemi, de délicieuses tendresses, pour le pays qui l’avait bafoué. […] À ces incohérentes paroles, le trop sensible Industriel qui avait écouté jusque là, bouche béante, se leva, silencieusement, les yeux pleins de larmes. […] « Soyez avec moi, aujourd’hui, dans le Paradis » ; qui n’a pas cru entendre, à lui criées, ces paroles de rédemption, lorsque devant lui était jouée la Symphonie Pastorale !
Je ne me rappelle pas littéralement les paroles, mais voici le sens : « Charmant ruisseau dont le gazouillement m’assoupit pendant la chaleur du jour et où je fais rafraîchir le vin de Chiraz, tu ne murmureras plus ainsi, quand l’hiver sera venu et qu’il aura congelé et solidifié tes ondes babillardes. — Oui, me répondait la petite onde fugitive, mais Allah m’étendra et me polira dans mon bassin en miroir de cristal, et j’y refléterai son soleil et les étoiles du ciel ! […] Ils étaient jeunes, ils étaient libres, ils étaient beaux, ils étaient poètes au moins autant l’un que l’autre, ils pouvaient s’attacher saintement dans la vie l’un à l’autre aussi indissolublement que la musique s’attache aux paroles dans une mélodie de Cimarosa ! […] Et comment bien espérer encore de ce réveil de ton âme, ô Jeunesse dorée de Musset, Jeunesse à qui tes poètes eux-mêmes, tes poètes épicuriens, chantres jadis des nobles passions, baladins de paroles aujourd’hui, prêchent l’indifférence, le boudoir et la coupe pour toute vérité ?
Les paroles de Bonaparte, prises ainsi sur le vif, se rencontrent à tout instant dans les notes et papiers de Roederer, et leur donnent un incomparable intérêt. […] Il portait les paroles d’un pavillon du Luxembourg à l’autre.
Au cinquième acte, Hippolyte exilé par son père veut engager Aricie à fuir avec lui, et à venir recevoir sa foi dans un temple fameux, voisin de Trézène : Aux portes de Trézène, et parmi ces tombeaux, Des princes de ma race antiques sépultures, Est un temple sacré, formidable aux parjures ; C’est là que les mortels n’osent jurer en vain ; Le perfide y reçoit un châtiment soudain… Pourquoi, observait M. de Lassay, puisque ce temple était connu par son caractère redoutable et sacré, pourquoi Hippolyte, accusé par son père et le trouvant incrédule à sa parole, n’a-t-il pas eu aussi bien la pensée de lui offrir le serment devant l’autel même où la vérité se déclarait et, pour ainsi dire, éclatait à l’instant ? […] Lassay était de ces esprits tempérés, bien faits et polis, que l’usage du monde a perfectionnés en les usant, qui ont peu d’imagination, qui n’ajoutent rien aux choses, et qui prisent avant tout une observation juste, une pensée nette dans un tour vif et concis : « Un grand sens, disait-il, et quelque chose de bien vrai renfermé en peu de paroles qui l’expriment parfaitement, est ce qui touche le plus mon goût dans les ouvrages d’esprit, soit en vers, soit en prose. » Il n’allait pas pourtant jusqu’à la sécheresse, et il tenait à rester dans le naturel ; il croyait que les choses qu’on dit ont quasi toujours chance de plaire quand elles sont plutôt senties que pensées : « Il y a des gens qui ne pensent qu’à proportion de ce qu’ils sentent, observait-il ; et il semble que leur esprit ne sert qu’à démêler ce qui se passe dans leur cœur : ces gens-là, qui sont toujours vrais, ont quelque chose de naturel qui plaît à tout le monde. » Chamfort, qui prête quelquefois de son âcreté aux autres et qui est homme à la glisser sous leur nom, a écrit dans ses notes : « M. de Lassay, homme très doux, mais qui avait une grande connaissance de la société, disait qu’il faudrait avaler un crapaud tous les matins pour ne trouver plus rien de dégoûtant le reste de la journée quand on devait la passer dans le monde. » On ne voit rien ou presque rien dans ce que dit et dans ce qu’écrit Lassay qui soit en rapport avec une si amère parole54.
Vous savez quel goût j’ai pour les grands événements, et combien je suis las de notre petit pot-au-feu démocratique et bourgeois. » Lorsque ensuite, après s’être avancé, on recule, et que la nation se croit, à tort ou à raison, profondément humiliée et déchue du rang qu’elle tenait en Europe ; lorsqu’elle commence à en vouloir au Gouvernement de son choix et au prince qu’elle accuse personnellement de lui avoir créé cette situation indigne d’elle, Tocqueville est des premiers à sentir que le péril de l’avenir est là, non ailleurs, et tout le talent de parole dont fait œuvre le ministère de M. […] Montesquieu, qui savait l’histoire et qui a si fortement parlé de la République romaine, n’avait pas cette horreur des Trajan ; il a sur eux, à la rencontre, d’humaines et de magnifiques paroles, et il s’est montré en cela un parfait philosophe.
En présence de ce sort nouveau et aventureux qui attendait les poèmes homériques, ainsi lancés derechef à travers tous les périls de la critique sur le vaste océan des conjectures, un admirateur attristé du vieil Homère, se voyant arraché tout à coup à ses habitudes, aurait pu, par contraste, adresser aux amis de Virgile ces paroles de félicitation empruntées au poète lui-même : Vivite felices, quibus est fortuna peracta Iam sua ; nos alia ex aliis in fata vocamur. […] Au chant XX de l’Iliade, chant terrible et sublime où Jupiter déchaîne les dieux, leur donne toute licence de se mêler aux guerriers et de les protéger selon leurs prédilections et leurs caprices, sauf à lui de rester assis en spectateur au sommet de l’Olympe, dans ce chant XX où bouillonne toute l’âme de l’Iliade, Achille à la colère duquel Neptune vient de soustraire Énée, Achille exaspéré exhale sa fureur en menaces ; il parle de tout massacrer, et de son côté Hector essaye de rassurer les Troyens, et d’une voix puissante il les exhorte à marcher contre Achille : « Achille, s’écrie-t-il, ne mettra pas à effet toutes ses paroles.
Ainsi, en 1657, au moment où Pascal achevait de lancer les Provinciales, il ne tient qu’à nous de compter dans la haute société française les hommes distingués par la parole ou par la plume et qui étaient en possession de plaire : Saint-Évremond, Bussy, La Rochefoucauld, Retz, les prochains auteurs de Mémoires, mais qui causaient dès lors comme ils écriront. […] Giraud, rassemblant les raisons à l’appui, soutient son opinion en des fermes dont certes l’adversaire n’avait pas à se plaindre : « Il est probable, dit-il, qu’en 1647 Saint-Évremond a écrit ces paroles : Il est certain que l’amitié est un commerce, le trafic en doit être honnête ; mais enfin c’est un trafic.
Quel mélange singulier et contradictoire dans le romancier que nous voudrions juger ici, sans faire notre parole plus sévère que notre pensée, — quel mélange d’observation souvent maligne, de réalité prise sur le fait comme par un clin d’œil de malin Tourangeau, de gaieté de bon aloi et digne de Chinon, — quel mélange de tout cela, et encore de situations domestiques si fréquemment attendrissantes, avec tant d’écarts divagants et d’incroyables fantaisies ! […] Je ne vous reverrai de ma vie si vous ne consentez. ” — Vaincu à la fin par ces paroles et par bien d’autres, j’acceptai, continue Latouche.
A partir de ce moment, chacune de ses paroles compte, et elles ont pourtant si peu retenti chez nous, qu’on nous pardonnera d’y insister selon leur mérite. […] Que si, dans tout ceci, nous avons trop souvent arraché à un talent, le plus humble de cœur, les voiles dont il aime à s’envelopper, qu’il veuille songer, pour notre excuse, que l’effet de ces paroles, que nous aurions voulu rendre plus dignes, sera peut-être de convier quelques lecteurs de plus aux fruits des travaux que l’idée de l’utilité et du bien lui inspira ; et puisse-t-il ainsi nous pardonner !
Nisard, juste en résultat général, a ainsi beaucoup d’arbitraire et de parole vaine dans le détail. […] Nisard, dans une lettre adressée à la Revue des Deux Mondes 15 novembre 1836), a pris le soin de relever quelques-unes de nos assertions : nous nous sommes d’autant plus aisément abstenu d’y répondre alors, qu’il nous a été impossible d’y voir, de sa part, autre chose qu’une démonstration développée de nos paroles.
Si pourtant l’objet de notre étude ce jour-là, et en quelque sorte de notre dévotion, est un de ces morts fameux et si rares dont la parole remplit les temps, l’effet ne saurait être ce que nous disons ; l’autel alors nous apparaît trop lumineux ; il s’en échappe incessamment un puissant éclat qui chasse bien loin la langueur des regrets et ne rappelle que des idées de durée et de vie. […] Si dans notre jeunesse nous nous sommes trouvés à portée de quelque ancienne bibliothèque de famille, nous avons pu lire Cléveland, le Doyen de Killerine, les Mémoires d’un Homme de qualité, que nous recommandaient nos oncles ou nos pères ; mais, à part une occasion de ce genre, on les estime sur parole, on ne les lit pas.
Il se nommait Girolamo Olgiato et mourut en Romain sur l’échafaud ; dépouillé et nu devant le bourreau, il prononça ces paroles latines qui retentirent dans beaucoup de cœurs : Mors acerba, fama perpetua, stabit vetus memoria facti. — Mort amère, éternelle mémoire ! […] Après ces paroles, les bourreaux l’écartelèrent avec ses complices.
Il vit le prince Eugène à Vienne, à Venise le fameux Law et le non moins fameux comte de Bonneval ; en Angleterre, les philosophes et les hommes d’État, à une époque de grande liberté de pensée et de parole. […] D’Alembert, cette fois bon juge plutôt que panégyriste prévenu, ne met pas en doute la déclaration de Montesquieu, par respect pour sa parole.
Mais rien n’égale, pour la grâce et la pureté de la peinture, cet amour qui naît comme à l’abri de l’amitié fraternelle ; cet éveil des sens chez le jeune homme qui se trahit le premier, parce qu’il se défie le moins de ce qu’il sent : les troubles de la pudeur qui agitent la jeune fille avant que sa conscience soit avertie, et qui lui parlent sans paroles ; le malaise secret dans ce qui ressemble le plus au bonheur, le premier amour ; les joies permises qui ne laissent guère plus de paix à l’âme humaine que les joies défendues. […] Chaque fois que je l’ai lu, aux mêmes pages, aux mêmes paroles, mes yeux se sont mouillés de larmes.
J’ai, d’un grain vil, semé le champ de tes paroles. […] Ils ont, d’ailleurs, pour se consoler, le certificat de génie qu’il leur décerne, à son insu, quand après avoir rappelé ces paroles de Nietzsche : « Le meilleur auteur est celui qui a honte d’être un homme de lettres.
J’en parlerai à Néron. » Certes, si les esclaves, prenant à la lettre et comme immédiatement applicable la parole de saint Paul, avaient établi leur domination sur les ruines fumantes de Rome et de l’Italie et privé le monde des bienfaits qu’il devait retirer de la domination romaine, Sénèque aurait eu quelque raison. Mais si un esclave chrétien eût dit au philosophe : « Ô Annœus, je connais l’homme qui a écrit ces paroles ; il ne prêche que soumission et patience.
Et je ne m’en repens pas, mon ami, et je répète sans cesse avec bonheur ces douces et suaves paroles : Dominus pars… et je crois être tout aussi agréable à Dieu, tout aussi fidèle à ma promesse, que celui qui croit pouvoir les prononcer avec un cœur vain et un esprit frivole. […] Pour être platonicien, fallait-il adorer Platon et croire toutes ses paroles ?
Après six ans de jeunes inouïs, de macérations affreuses, de méditations à faire éclater le crâne, après s’être assis, les jambes croisées, contre un arbre, en s’écriant : « Qu’ici mon corps se dessèche, que ma peau, ma chair et mes os se dissolvent, si, avant d’avoir obtenu l’intelligence suprême, je soulève mon corps de cette herbe où je l’assieds », Sidhârta se redresse un matin, en frappant d’une main la terre que sa parole va conquérir. […] A ces paroles, l’honneur des jeunes fous se dégrise et se réveille ; leurs fronts se découvrent, leurs têtes s’inclinent.
C’est le grief qu’avait contre lui précisément Louis XIV, quand il disait : « M. de Bussy a fait des plaisanteries de quelques personnes que j’aime. » C’est ce que M. de Turenne lui reprocha également, un jour que Bussy se plaignait de n’être pas traité par lui avec plus d’amitié dans les diverses rencontres : « Il (M. de Turenne) me répondit qu’on l’avait assuré que je n’étais point de ses amis, et que même, contre la parole que je lui donnerais d’en être, s’il lui arrivait un malheur à la guerre, j’étais un homme à en plaisanter. » Il était fâcheux à Bussy d’avoir donné une pareille idée de lui à tout le monde, et à M. de Turenne en particulier, et d’être jugé incapable de résister au plaisir de faire une chanson. […] Pour ce qui est de l’écrit qui nous les suggère, cette délicatesse, encore une fois, n’est que dans la façon du narrateur et dans un certain tour de parole ; car la grossièreté fait le fond de presque tous les personnages qu’il décrit.
En un mot, nous fûmes très raisonnables à la fin d’une journée où nous avions joué à colin-maillard. » Pour tranquilliser le lecteur sur la source d’où je tire ces paroles de Sophie, je dirai que c’est du cahier manuscrit des Dialogues, dans lesquels Mirabeau, enfermé deux ans après à Vincennes, se plaisait à revenir sur les origines de leur liaison et à se repaître des moindres souvenirs de ces premiers temps heureux. […] Je me souviens que vous m’avez promis de nouvelles preuves de votre indifférence pour Belinde, et j’ai quelque envie de vous sommer de votre parole.
Par un sentiment délicat, il voudrait faire arriver une parole de consolation à son cœur : Puisse-t-il lire avec quelque plaisir, écrit-il, ces expressions d’une respectueuse estime de la part d’un homme sans intérêts comme sans désirs, qui n’a jamais écrit que sous la dictée de sa conscience ; à qui le langage des courtisans sera toujours inconnu ; aussi passionné que personne pour la véritable égalité, mais qui rougirait de lui-même s’il refusait un éclatant hommage à des actions vertueuses par lesquelles un roi s’efforce d’expier les maux que tant d’autres rois ont faits aux hommes ! […] Le poète, en face de ces bêtes brutes et de ces sans-culottes ignares, n’avait personne à qui il pût adresser les paroles touchantes qu’adresse Phémius à Ulysse dans le meurtre des prétendants : « J’embrasse tes genoux, ô Ulysse ; respecte-moi et aie pitié de moi !
Voici le fait : Quatre hommes du monde, quatre hommes comme il faut, de ces hommes qu’on a pu rencontrer dans un salon, et avec qui peut-être on a échangé quelques paroles polies ; quatre de ces hommes, dis-je, avaient tenté, dans les hautes régions politiques, un de ces coups hardis que Bâcon appelle crimes, et que Machiavel appelle entreprises. […] Il s’est bien prononcé çà et là quelques belles et dignes paroles.
qui voudra le faire taire doit lui remplir la bouche 7 » ; lorsque Richelieu, ennemi des grands, mais né parmi eux, écrivait de son côté : « Si les peuples étaient trop à leur aise, il serait impossible de les contenir dans les règles de leur devoir… il faut les comparer aux mulets, qui, étant accoutumés à la charge, se gâtent par un long repos plus que par le travail », lorsque ces écrivains laissaient échapper ces outrageantes paroles, ne trahissaient-ils pas par là les sentiments secrets de leur caste ? On n’écrit de pareilles paroles que lorsque les mœurs peuvent les autoriser.
. — Sa dernière parole.
Mais voilà, par malheur, que vous n’avez du poëte que l’admirable talent de poésie, du reste exact, calculant vos termes et vous tenant parole à vous-même.
Belle parole de M.
Ce fut lui qui, grâce à cette intime charge de grand-maître de la garde-robe, pénétrant de nuit jusqu’à Louis XVI, le faisant réveiller pour lui apprendre la prise de la Bastille, et lui entendant dire comme première parole : C’est une révolte !
Le Directoire, par le 18 fructidor, prévint donc la guerre civile et lui substitua un coup d’État exécuté avec force, mais avec le calme et la modération possibles dans les temps de révolution. »Le 18 fructidor tua en France le parti royaliste en tant que conspirateur, et il ne reparut plus désormais qu’en 1814, la Charte en main, avec des paroles d’amnistie et de liberté.
Mais, dans l’ordre de l’esprit, chacun en France est chez soi ; des choses et des oracles d’en deçà et d’au-delà du Rhin, on peut parler haut, à son aise ; qu’on parle bien, avec verve et mordant, avec vivacité toujours, avec équité s’il se peut, on est écouté ; sans être cru sur parole, on est pris en considération.
Alors pourtant le Globe eut son unité, et cette unité pleine d’accidents, de saillies, de sentiments probes, de pensées utiles, fut, non plus une idée générale un peu vague et confuse dans sa réalité lointaine, mais un homme ; un homme de premier mouvement et d’action, d’une intelligence ouverte, d’une parole incisive, écrivain loyal, âpre et intrépide, tous les jours sur la brèche, à l’aise et en plein sur le terrain mouvant de la liberté ; répandant sur l’ensemble parfois discordant du journal l’unité passionnée, et sans cesse renaissante, de sa physionomie ; liant, non par des liens, mais par des étincelles électriques, en quelque sorte, les portions les plus excentriques du cercle ; nature impressive et rapide, embrassant par son impartialité la nuance doctrinaire, et par sa verdeur la nuance républicaine : c’est assez désigner M.
» Est-il donc impossible de concevoir un genre de comédie où le poète, loin de disparaître derrière ses personnages, se tiendrait cache sous leur masque, prompt à intervenir à tout moment dans leurs paroles et dans leurs gestes par un feu roulant d’allusions malignes, d’épigrammes lancées contre ses adversaires, de conseils sagement fous donnés à un public ami ?
Ainsi Descartes n’invente rien que sa méthode, c’est-à-dire une certaine manière d’ordonner ses pensées ; par elle, il établit entre des vérités anciennement connues une liaison inconnue, il féconde une parole stérile dans saint Augustin, et il en fait sortir Dieu, l’homme et le monde.
Gagnée par l’entretien de Jésus, la femme reconnut en lui un prophète, et, s’attendant à des reproches sur son culte, elle prit les devants : « Seigneur, dit-elle, nos pères ont adoré sur cette montagne, tandis que vous autres, vous dites que c’est à Jérusalem qu’il faut adorer Femme, crois-moi, lui répondit Jésus, l’heure est venue où l’on n’adorera plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem, mais où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité 674. » Le jour où il prononça cette parole, il fut vraiment fils de Dieu.
Quelque mauvais que soit le goût de gens liés par une conversation habituelle, il faut qu’ils se forment un langage raisonnable, toute conversation est une épreuve par laquelle chacun essaie son langage à l’intelligence, au goût, aux affections des auditeurs ; là, ce n’est pas la critique qui éclairé, c’est l’impression que fait la parole sur ceux à qui elle s’adresse.
Racine prit alors la parole, & dit qu’il avoit vu, la veille, un spectacle touchant chez Corneille, qu’il avoit trouvé mourant & n’ayant pas de bouillon.
Le vol des oiseaux, les entrailles des victimes, le tonnerre à droite ou à gauche, une parole fortuite, toutes ces choses furent de la théologie.
Sorti de ce procès triomphant, ce qu’il avait été avec sa parole devant ses juges il le fut, avec sa plume, devant la France entière, jusqu’à ce matin du 10 août 1792 où, allant défendre le Roi, beau comme toujours, intrépide comme toujours, il fut assassiné par Théroigne de Méricourt et par des hommes plus lâches qu’elle ; car ils se mirent à deux cents pour frapper Suleau, qui avait son sabre et qui se défendit.
Mais, sous la Restauration comme sous la monarchie de Juillet, Cormenin, qui s’intitule Timon, ne se montre pas une seule fois pamphlétaire, lui qu’on a cru sur parole le plus grand pamphlétaire de son temps.
Pour lui, Villemain est un colosse ; Castille une haute autorité ; et il s’abrite, en se courbant presque jusqu’à terre, sous cette grande parole d’About, — sans inconvénient pour cette fois : — « Les beaux ouvrages sont soumis à la Critique. » Enfin, ce lauréat de l’Académie d’Arras (c’est de M.
Enfin, il publia cette loi célèbre, par laquelle il défend aux juges de punir les paroles qui n’attaquent que lui.
Tête respirant la franchise, œil brillant d’intelligence, regard profond et bienveillant révélant un cœur d’or, voilà l’homme que la moitié de la France acclame, quand il lance aux foules sa parole toujours généreuse et élevée. […] Ton amour, il me le faut, je le veux à tout prix. — Tu me disais : Tes paroles me rendent toute tremblante… mais tu es si beau qu’à ton côté, je voudrais pour longtemps t’écouter ; et ton regard, ne l’as-tu pas remarqué ? […] Victor Hugo est l’inspirateur des Libres Paroles, où les notes patriotiques et politiques résonnent seules. […] Je goûte donc peu, très peu, ces Libres Paroles qui, cependant, au point de vue de la facture, marquent un grand pas en avant. […] La librairie dite catholique travaille à tuer le Catholicisme, qui ne peut survivre à de tels pavés d’ours que par la divinité de son origine et les souveraines garanties d’éternité que lui donne la parole du Maître.
Je n’en retiendrai qu’un ; et encore je suis incapable de vous rapporter avec quelque exactitude les paroles dont il s’est servi. […] Parole d’honneur, cela sonne presque comme du Lamartine. […] Francisque Sarcey fera des conférences à l’Odéon, je m’attacherai aux pas de cet homme sagace et jovial, et je recueillerai la manne abondante de sa parole. […] ma parole la plus sacrée, ça me fait peur. » Hélas ! […] Alors Jésus, lui adressant directement la parole pour la première fois, lui dit : — « Marie !
Que Plautus, que tout autre devienne le maître, manquerai-je d’ennemis qui m’accusent, non de paroles échappées, dans la colère d’une mère, au délire de sa tendresse, mais de crimes dont on n’obtient le pardon que d’un fils ? […] Néron lui coupe la parole, et lui réplique que Claude ne fit jamais accuser personne. […] Le tribun répond185 qu’il ne lui a remarqué aucun signe d’effroi, rien de triste sur le visage, rien d’altéré dans les paroles. […] Cette disparate vient de ce qu’on ne songe qu’au présent : car, si l’on songeait aux conséquences pour l’avenir, jamais un prince no contribuerait un sou ni une parole en faveur des rébellions. […] J’ai cité les propres paroles de Tacite, dans une note sur le Traité de la Clémence, lib.
Les Russes, avec leurs trois ou quatre poils à la mâchoire, ressemblaient à des phoques ; de chaque hamac venaient des soupirs interrompus par d’indistinctes paroles, et un nom, toujours le même : celui de la femme du patron. […] Et il aura beau protester par la suite, il aura beau nier ses propres idées, démentir ses propres paroles, démentis, dénégations, protestations, ne nous toucheront point et nous n’y verrons que le regret tardif ou le dépit irrité de s’être montré si véridiquement lui-même. […] … Ma parole ! […] Vielé-Griffin, encore cette fois, ne rapporte pas les paroles d’Yeldis. […] Il me semble que cela m’irait assez bien… Il suivait sur mon visage l’expression que pouvaient y mettre ses paroles… Puis : — Ton avis, à toi ?
Ces questions, et bien d’autres qui s’y rattachent, nous eussions souhaité qu’au lieu de les trancher sur la parole de Brunet et de Charles Nodier, M. […] Le Petit se souvînt toutefois des propres paroles de M. […] Ou encore, ce sont des actes autant que des paroles ; et s’ils sont éloquents, c’est bien ; mais ils peuvent se passer de l’être, et communément ils s’en passent. […] Il n’a point borné son rôle à celui d’un amuseur ou d’un mandarin de lettres, et il s’est enfin servi de la parole pour la pensée. […] Aussi bien, sous ce rapport, les titres qu’on préfère dans l’école décadente sont-ils assez caractéristiques : Romances sans paroles, de M.
Ces paroles l’introduisent dans un univers de sentiments jusqu’alors aperçu à peine. […] Qu’importe si des paroles diverses traduisent la même impression d’absolu, d’irrémissible découragement ? […] La période, un peu lente, mais souple, est adaptée au rythme de la parole intérieure qui sort du fond d’une conscience ramenée sur elle-même et se racontant son rêve. […] Ces chercheurs se disaient dans la solitude de leur conscience une parole de sincérité où se résumait leur sens profond de la destinée. Cette parole une fois entendue, vous aurez le secret de leur énergie ou de leur faiblesse.
Une telle influence ne se mesure pas, mais il n’est pas niable qu’elle naisse et dure — et nous osons même affirmer que l’influence de la Littérature, de tout ce qui est parole de vérité ou représentation de la vérité, est la seule qui engendre le progrès humain. […] La parole encyclopédique n’avait touché que la surface de l’être. […] Nos paroles ne valent pas plus dans l’espace que le bruit des feuilles agitées par le vent. […] Et on en vit, non des moindres, prendre la parole dans les réunions publiques — on sait ce que sont les réunions publiques — et contribuer à l’effervescence, à l’extension du socialisme. […] Les personnages se parleront entre eux, mais c’est nous qui comprendrons leurs paroles, et y trouverons un sens suggestif.
Quels spectateurs que des épicuriens grossiers incapables même de décence feinte, amateurs de volupté brutale, barbares dans leurs jeux, orduriers dans leurs paroles, dépourvus d’honneur, d’humanité, de politesse, et qui faisaient de la cour un mauvais lieu ! […] Contre cette défiance, il faut employer le style le plus naturel, l’imitation circonstanciée et crue des mœurs de corps de garde et de cabaret ; je ne croirai à la sédition de Jack Cade qu’en entendant des paroles fangeuses de luxure bestiale et de stupidité populacière ; il faut me montrer les quolibets, le gros rire, l’ivrognerie, les habitudes de boucher et de corroyeur, pour que je me figure un attroupement et une élection. Pareillement, dans les meurtres, faites-moi sentir la flamme des passions grondantes, l’accumulation de désespoir ou de haine qui ont lancé la volonté et roidi la main ; quand les paroles effrénées, les soubresauts du délire, les cris convulsifs du désir exaspéré, m’auront fait toucher tous les liens de la nécessité intérieure qui a ployé l’homme et conduit le crime, je ne songerai plus à regarder si le couteau saigne, parce que je sentirai en moi, toute frémissante, la passion qui l’a manié. […] Le singulier rire dont elle éclate quand on apporte le panier d’aspics, le brusque roidissement nerveux, le flux de paroles fiévreuses, la gaieté saccadée, les gros mots, le torrent d’idées dont elle déborde, m’ont déjà fait mesurer tout l’abîme du suicide724, et je l’ai prévu dès l’entrée. […] Une sorte de vision possédait l’artiste ; les paysages et les événements se déroulaient dans son esprit comme dans la nature ; il concentrait dans un éclair tous les détails et toutes les forces qui composent un être, et cette image agissait et se développait en lui comme l’objet hors de lui ; il imitait ses personnages, il entendait leurs paroles ; il trouvait plus aisé de les répéter toutes palpitantes que de raconter ou d’expliquer leurs sentiments ; il ne jugeait pas, il voyait ; il était involontairement acteur et mime ; le drame était son œuvre naturelle, parce que les personnages y parlent et que l’auteur n’y parle pas.
L’abattement profond d’un souverain pleurant sur les débris de sa ville, ou d’un amant trahi par sa maîtresse, ou bien d’un père qui embrasse sa fille morte, ce sont là des situations qui n’ont guère de rapports entre elles, et pourtant lorsque les paroles deviennent dépositaires de ces grandes douleurs, elles se refusent à tenir compte de la distance qui les sépare, et elles ne peuvent leur présenter que l’usage des mêmes mots. […] Tous ces chants n’avaient rien de nouveau pour le poète ; il en connaît les paroles, il en connaît l’air, il connaît même messieurs les rédacteurs ; il croit savoir qu’ils boivent du vin en secret, et prêchent l’eau en public. […] Balthasar et Melchior, pareils aux souverains allemands de 1813, étaient peut-être deux drôles qui, en un jour d’embarras, avaient promis des constitutions à leurs gens, et qui, une fois sortis de peine, n’ont pas tenu parole. […] Soudain il s’aperçoit qu’il est suivi par un fantôme gigantesque, armé d’une hache, qui, attentif à ses paroles, prompt à suivre ses regards, ne le quitte pas d’une minute. […] Nous ne pouvons, en conscience, suivre le poète dans le détail des charmes trop proéminents de la mystérieuse inconnue qui, prenant la parole, félicite le nouvel arrivé de son retour dans sa patrie, et lui parle d’un ton tout à fait inspiré.
Il proteste donc d’avance contre toute interprétation de ses idées, toute application de ses paroles, disant avec le fabuliste espagnol : Quien haga aplicaciones Con su pan se lo coma. […] En présence des merveilles qui l’éblouissent et qui l’enivrent, sa première parole n’est qu’un hymne. […] » Ici Scudéry s’indigne de tant d’orgueil et rappelle à « ce trois fois grand avthevr du Cid… les modestes paroles par où le Tasse, le plus grand homme de son siècle, a commencé l’apologie du plus beau de ses ouurages, contre la plus aigre et la plus iniuste Censure, qu’on fera peut-être iamais. […] Paroles remarquables qui peignent à merveille cette poésie fardée, mouchetée, poudrée, du dix-huitième siècle, cette littérature à paniers, à pompons et à falbalas.
Mais aussi, la Revue de Paris avait eu tort de se fier à la parole de M. de Balzac, sans conventions écrites ; de prendre au sérieux un romancier aux abois , et d’attendre une œuvre complète du grand écrivain qui n’a jamais rien terminé . […] Vous avez retrouvé comme par enchantement toutes les souplesses, toutes les naïvetés dont notre langue semblait déshabituée depuis deux siècles ; vous avez rendu à la période française l’ampleur flottante et majestueuse qu’elle avait perdue depuis la Renaissance ; vous avez sculpté notre idiome, vous l’avez découpé en trèfles et en dentelles ; vous avez gravé dans la parole les merveilleux dessins qui nous ravissent dans les tours moresques, dans les palais vénitiens, dans les vieilles cathédrales chrétiennes. […] « George Sand, ce talent ni vigoureux, si franc, qui s’est révélé tout entier si vite, et si vite emparé des honneurs d’une position suprême et incontestée ; George Sand, cette parole retentissante et presque souveraine, cette âme enthousiaste et dévouée, mais inconstante, est un auxiliaire que les camps les plus hostiles se disputent, une force dont chacun voudrait faire croire qu’il dispose à son tour… Âme douée d’une sensibilité qu’on peut appeler terrible ; d’une puissance de désir, d’un besoin d’émotions et d’enthousiasme qu’on peut appeler plus terrible encore. […] Buloz ait pris au sérieux une lettre qui se clôt par ces paroles : « Daignez agréer, monsieur, avec toute ma reconnaissance pour vos bons procédés, l’expression de ma considération la plus distinguée. » En effet, on a des compliments affectueux pour ses inférieurs, des compliments empressés pour ses égaux, de la considération distinguée pour le commun des martyrs ; mais il n’y a que les princes et les jolies femmes que l’on prie de daigner agréer les sentiments que l’on a ou que l’on n’a pas pour eux ; vous voyez donc bien, mon cher ami, que M.
Ce n’est point de hauteur et d’autorité comme d’autres grands orateurs, ses rivaux, ce n’est point sur des majorités organisées et compactes qu’il agissait d’ordinaire, d’une parole tranchante et d’un geste décisif : lui, il persuadait, il s’insinuait, il avait faveur ; par la clarté spécieuse de ses exposés, par l’abondance et le flot accumulé et limpide de ses déductions, il amenait ceux mêmes qui ne se croyaient point de son groupe et de son armée à conclure comme lui, à agir et voter comme lui, et dans un sens où la plupart n’auraient point pensé être conduits d’abord.
Or, voici que depuis trois ans environ, depuis que, d’une part, le bon ton rangé et le vernis moral de la Restauration ont disparu, et que, d’autre part, le Saint-Simonisme a fait entendre ses cris d’émancipation et ses appels multipliés, voici que l’esprit d’indépendance a remué les femmes comme le reste, et qu’une multitude d’entre elles prenant la parole, dans des journaux, dans des livres de contes, dans de longs romans, sont en train de confesser leurs peines, de réclamer une part de destinée plus égale, et de plaider contre la société.
Le rapprochement philosophique et littéraire de l’auteur des Paroles d’un Croyant et du peintre magnifique de Lélia n’a rien eu de plus inattendu, de plus caractéristique par rapport à l’époque, que le soudain et profond reflet que vient de jeter la manière de M. de Balzac sur toute une partie souterraine de la Chute d’un Ange par M. de Lamartine.
« Sortis des malheurs attachés à la caducité des rois par des événements que nous n’avons pas provoqués, on nous a offert les malheurs d’une minorité que l’instinct du peuple ne comprendrait pas ; et c’est sérieusement que des hommes d’honneur, de bon sens, qui se sont montrés capables de combinaisons politiques, trouvent des paroles qu’ils appellent des principes, et des phrases qui ressemblent à du sentiment, pour nous dire que ce terme moyen entre le passé et l’avenir pouvait suffire à toutes les exigences !
I L’éclectisme, silencieux depuis longtemps, a repris la parole avant-hier.
Mais quand Dorante a pris la parole ou la plume, nous avons cru que Dorante, c’était vous ; nous l’avons cru jusqu’à la fin de son Étude ; et voilà que Lysidas dans sa Réponse (quels personnages !
Le premier point est d’avoir une idée du caractère comment imaginer autrement les actes et les paroles du personnage avec un peu de justesse et de précision ?
Il parle en pasteur qui songe aux fruits lointains et durables de sa parole.
De vos doucereuses paroles.
Les nouveaux venus, qu’elle intimidait, la considéraient de loin comme une fée redoutable, mais quels feux d’artifice d’esprit et quelle verve endiablée, lorsqu’elle croisait le fer en paroles avec Villiers de l’Isle-Adam aux paradoxes étincelants ou avec Laurent Tailhade, aux réparties féroces.
Aime-t-il à opposer ses interlocuteurs comme deux combattants qui engagent un duel de paroles ?
Les Esprits qui ne jugent que par des impulsions étrangeres, qui n’estiment que sur parole, qui se laissent entraîner par la multitude, les ont regardés jusqu’à présent comme des Lumieres, des Génies, des Bienfaiteurs ; nous, qui les avons lus, connus & approfondis, nous les mettons à leur place, & faisons disparoître les trophées que l’inconsidération & la surprise avoient érigés en leur honneur.
Bien plus, le pain étoit, sous son régne, d’un prix excessif dans toute l’isle ; & l’on ne sçavoit ce qu’il étoit devenu, si ce n’est qu’on accusoit de certains magiciens qu’elle avoit à ses gages, de le faire périr avec des paroles. » *.
Ces paroles étoient moins l’effet de la présomption, que celui de la candeur & d’un certain oubli de soi-même, qui faisoit le caractère de cet écrivain.
Aussitôt qu’il se sentit en cet état, il tourna toutes ses pensées du côté du Ciel ; un moment après il perdit la parole, et fut suffoqué en demie heure par l’abondance du sang qu’il perdit par la bouche.
Racine disoit que Despreaux lui avoit tenu parole.
Aussi, comme le dit Horace, c’est aux grecs que les muses ont fait present de l’esprit et du talent de la parole, pour les recompenser de s’être attachez à leur faire la cour et d’avoir été désinteressez sur tout, hors sur les loüanges.
III Le livre de l’abbé Huc, qui ne parle que du passé du Christianisme à la Chine, n’avait point à indiquer ces choses ; mais il les soulève fatalement dans l’esprit du lecteur, selon cette parole, vraie pour le coup, d’un esprit célèbre, qui fut trop souvent dans le faux : « Le passé est gros de l’avenir. » Nous le répétons, ce qui nous a frappé et comme accablé dans la lecture de ces deux volumes, c’est la grandeur de la vie et de la mort des missionnaires, ces héros de l’Église romaine ; c’est aussi la grandeur des moyens employés par eux pour fonder quelque chose de vaste et de solide, et cependant la petitesse des résultats qu’ils ont obtenus !
Pour ceux-là qui resteront fermes, appuyés à des opinions inflexibles, sous la parole imposante d’un talent incontestable et qui touche par bien des côtés à la vérité, il sera curieux et fructueux tout ensemble de lire, en face des hommes et des choses de la révolution présente, — car la République n’est pas même une étape et la Révolution marche toujours, — le récit d’un autre temps révolutionnaire, et d’en tirer de grands enseignements et d’instructives comparaisons.
Hatin nous pardonne la sévérité de ces dernières paroles.
… Un homme qui a trouvé que Sismondi était une âme, — une violette des bois pour le parfum poétique, — peut bien trouver que les simples paroles de Monsieur Jourdain : « Nicole, apportez-moi mes pantoufles !
À la place de ces caricatures historiques, il y a la figure du grand homme, doux et inspiré, qui apprit aux Arabes la miséricorde et l’aumône, et dont le cimeterre, qu’il a fini par tirer dans les intérêts de sa foi, n’a pas aveuglé de son éclat Barthélemy Saint-Hilaire, puisqu’il a écrit fermement cette parole vraie : c’est que le livre du Coran a fait plus que le sabre pour la domination du monde.
Quand on verra ces fausses grandeurs et toutes ces faiblesses, qu’on prit pour des forces à la lueur des paroles de Heine, ce sera un effet de renverse, et l’on jugera mieux combien ces gens-là sont petits.
Ces lois doivent être observées, en suivant certaines formules inaltérables de paroles consacrées et de cérémonies solennelles. — Cette observation sévère des lois est l’essence de l’aristocratie.
Il est vrai que ce sont paroles d’éditeurs. […] Est-ce qu’il y a deux opinions sur l’Exposition de la doctrine catholique, ou sur la Politique tirée des propres paroles de l’Écriture sainte ? […] Mais Molière arrive trop tard ; la place est déjà prise par un certain Cormier, et, n’était l’insistance de Cosnac, qui veut dégager sa parole, on n’admettrait même pas la troupe à l’honneur de jouer devant le prince. […] Ce sont toujours à ce propos les dures, les impitoyables paroles de Bossuet, qui nous reviennent en mémoire, comme si Bossuet les eût proférées au lendemain même de la mort de Molière. […] C’est beaucoup ; et, quoiqu’il parlât ainsi dans un temps où sa parole ne pouvait être encore soupçonnée ni d’allusion politique ni de flatterie rétrospective, c’était trop.
) A moins de prendre ces paroles pour un insipide pléonasme qu’il n’est pas facile d’imputer à un écrivain élégant et soigné comme Sulpice Sévère, il faut y voir, conclut M. […] Tel d’entre eux qui, avec ses égaux, ne fait usage que du patois du pays, est très-mortifié et se montre parfois très-piqué, si quelqu’un d’une classe plus élevée vient à lui adresser la parole en ce même patois ; c’est en effet lui dire tacitement : Je juge à votre air et à vos manières que vous ne devez pas comprendre le langage des gens bien élevés. […] De Brosses s’est occupé de la formation mécanique des langues ; s’il s’était plus occupé de leur formation historique, de celle de la nôtre en particulier, il n’aurait pas écrit ces étranges paroles : « Assurément le français de Molière est plus éloigné de celui de Villehardouin qu’il ne l’est de l’italien de Goldoni. » 23.
Nous avons vu les mêmes fureurs des ministres congédiés ou déçus par leur roi, les mêmes séditions de plume ou de paroles, les mêmes coalitions personnelles, et non patriotiques, entre des adversaires ambitieux désunis pour servir, réunis pour nuire, les mêmes chutes dans la rue, et les mêmes récriminations après la chute. Telle est la loi des gouvernements de parole ; les gouvernements de silence ont aussi leur danger. […] — « Je pense, répondit-elle, qu’à l’exception de quelques couleurs trop chaudes dans certaines parties descriptives de ce vaste tableau d’histoire, c’est le livre le plus utile qui ait encore paru pour préparer le jugement dernier des choses et des hommes de la Révolution ; car c’est le livre où il y a le plus de justice pour les oppresseurs et le plus de pitié pour les victimes. » Et comme le groupe des hommes d’État debout auprès de la cheminée s’étonnait en affectant de s’indigner contre ce jugement de faveur sur ce livre, madame Récamier reprit la parole, seule contre ses amis, et me défendit avec une chaleur de discussion et une intrépidité d’amitié qui attestaient en elle autant d’impartialité que d’énergie dans le jugement.
Ces paroles sont une faible traduction de la vérité, bien qu’elles nous permettent de l’entrevoir ; la comtesse d’Albany, en nous ouvrant son cœur, nous y eût montré certainement autre chose. […] Il tint parole ; et voilà comment j’échappai à un ennui pour moi plus pénible et plus triste que tout autre supplice que l’on eût voulu me faire subir. […] Furieux de l’affront que je recevais, je manquai à ma parole pour rimer quatorze vers sur ce sujet, et je les envoyai à mon ami ; mais je n’en gardai point copie, et ni ceux-ci, ni d’autres que l’indignation ou toute autre passion arracha de ma plume, ne figureront plus désormais parmi mes poésies déjà trop nombreuses.
Marquer ces progrès et cette marche insensible de l’attrait qu’on ne s’avoue pas à la passion qu’on déclare ; mettre sans inconvenance une fille de condition en face d’un valet qui lui fait une déclaration d’amour ; nous faire consentir qu’elle écoute ce valet et qu’elle réponde de façon à ne pas le désespérer et à ne pas l’encourager ; la retenir dans le naturel et la vérité, entre la raison qui lui montre le péril, et le penchant secret qui le lui dérobe, fuyant et s’avançant à demi, retirant les paroles échappées, fermant son cœur presque en même temps qu’elle l’entr’ouvre, c’est un vrai tour de force de l’art, ou tout simplement une vérité de cœur humain vue avec simplicité, en un jour de veine heureuse, non par le Marivaux bel esprit, entêté du fin 54 et ne voyant dans Voltaire que « la perfection des idées communes », mais par le Marivaux homme de bien et doux, naturel à force de candeur, et peut-être à son insu. […] La nature que le dix-septième siècle applaudit dans la comédie, c’est donc le caractère en action et en paroles. […] C’est que Mme Evrard est un caractère ; ses paroles disent ce qu’elle a été, ce qu’elle est, ce qu’elle sera.
. — Artabane terminait par ces graves paroles, que Némésis aurait pu mettre dans la bouche d’un de ses prophètes : « Vois comme la Divinité foudroie les êtres qui dominent les autres, et ne souffre pas qu’ils s’en fassent accroire, tant que les petits ne l’irritent point. […] Sparte promit et se parjura : confiante dans la parole des Athéniens, elle viola la sienne. […] On peut convaincre par le raisonnement ou par l’enthousiasme l’âme d’une multitude intelligente et mobile ; aucune parole ne saurait percer la surdité d’une idole royale, invisible et inaccessible, dont l’arbitraire est l’unique loi.
Il se jura qu’on ne rirait plus de lui, et il se tint parole, en se séchant à fond. […] Sur cette déclaration il y a une mêlée générale, où tout le monde parle et crie, et l’on entend, sur cet orage de paroles, se détacher le chantonnement de la voix de Gautier, répétant dans son indifférence de la discussion : « Moi je suis fort, j’amène 357 sur la tête de Turc et je fais des métaphores qui se suivent. […] Sainte-Beuve reproche à Taine d’avoir soumis son Histoire de la littérature anglaise à l’examen d’ennemis, d’inférieurs, enchantés de le faire passer sous leur férule et de l’admonester… Et la parole des uns et des autres de monter… et Taine de déclarer que les quatre grands grands hommes, sont : Shakespeare, Dante, Michel-Ange, Beethoven, qu’il dénomme « les quatre cariatides de l’humanité ». — Mais tout cela c’est de la force, et la grâce ?
On dirait que tout s’est réuni, pour enfermer entre ces quatre murs, cette bienheureuse sérénité bourgeoise des bourgeois, et cependant transperce, par moments, sous la gaîté et la gentille griserie des paroles, un peu de la mélancolie qui habite tout atelier de la pensée. […] Puis sa parole meurt, et sa figure s’assombrit dans une moue mélancolique, dont il est très difficile au partant de n’être pas touché. […] » Et les mépris bruyants des penseurs du dîner pour la pure littérature, empêchent d’entendre la légère parole moqueuse d’Ernest Picard racontant à ses voisins, qu’il était au moment de demander le vote des lois constitutionnelles, quand Dufaure, qui se trouvait derrière lui, lui a jeté dans l’oreille : « Ne parlez pas de cela, la Chambre va se mettre à rire !
Il ne m’adressait pas deux paroles pendant les demi-journées que devaient durer nos promenades. […] XIII Le père Varlet, tout absorbé dans ses méditations sur les psaumes et dans ses prières, balbutiées à demi-voix, ne m’adressait pas quatre paroles pendant les quatre ou cinq heures que durait notre promenade. […] M. de Chateaubriand nous révélait le style du dix-neuvième siècle : style composite, comme le genre d’architecture auquel on applique ce nom ; style qui mêle tous les genres, qui associe le raisonnement, l’éloquence, l’élégie, le lyrisme, la peinture, la poésie, et qui recouvre le tout d’un vernis magique de paroles musicales pour faire illusion souvent sur le peu de solidité du fond.
. — Romans de femmes Le vieux pêcheur des Noces Corinthiennes n’a pas tout à fait tort de s’écrier : « La femme est avide et fertile en paroles ! […] Lorsque Bourget fait parler ses héros, il nous explique selon la méthode psychologique, par des déductions les paroles prononcées. […] On peut te dire des paroles touchantes, car tu as l’air de les sentir.
Ici nous voudrions que l’on pesât bien nos paroles… Le catholicisme, — et non l’Église catholique, — a déterminé la Saint-Barthélemy. […] Il ne voit pas même ce qu’il y a de vrai et de révélateur sur l’état exaspéré des partis en 1572 dans les lettres de Charles IX à ses gouverneurs et aux Ligues : « C’est un accident advenu ces jours passés dans la ville de Paris à la suite d’une querelle particulière arrivée à telle rage, etc. » Et cependant il cite ces paroles à la fin de son volume, mais il les cite comme des justifications après l’évènement. […] Audin, le plus sensible et le plus aimable des hommes, a voué une espèce de culte passionné à ce pontife, magnifique et doux, qui avait pris pour armes un joug d’or avec ces paroles : « Mon joug est léger. » Ravi par les arts et les lettres humaines, qu’il a toujours adorées, mais, selon nous, surfaisant beaucoup trop leur prix, Audin a cru que la civilisation du monde (un grand mot bête de ces derniers temps) gisait dans quelques palimpsestes ou quelques marbres retrouvés, et que Léon représentait cette civilisation parce qu’il avait richement payé ces palimpsestes ou fêté ces marbres comme il aurait fêté des saints !
Tous les béotiens doués d’une imagination vive s’inclinent devant ces hommes qui murmurent des paroles incompréhensibles. mais solennelles, avec une gravité profonde et en remuant des grelots. […] La recette une fois comprise, pour peu qu’on ait lu un ou deux bons modèles, on est sûr d’écrire proprement un roman ; il n’est pas même absolument nécessaire de savoir l’orthographe. » Je réfléchis longuement à ces paroles de mon jeune ami, et mes propres observations me confirmèrent leur vérité. […] … La religion, la philosophie, le passé, le présent, la pratique, l’abstraction, tout cela s’embrouille, fait gâchis ; les idées les plus contraires s’entrechoquent dans son esprit ; trop faible pour faire sortir une opinion de ce chaos, il s’en rapporte à la parole du maître. […] Cette réflexion me vient à propos des paroles de M. […] Ils ne souffrent pas assez, ils ne jouissent pas assez, il leur faut trop de paroles ; ils n’ont pas vécu assez simplement, assez silencieusement.
Comme le geste suit la parole, ce que nous avons dit de l’une peut s’appliquer à l’autre : la violence de la passion exige beaucoup de gestes, & comporte même les plus expressifs. […] Nous avons dit plus haut que la déclamation muette avoit ses avantages sur la parole : en effet la nature a des situations & des mouvemens que toute l’énergie des langues ne feroit qu’affoiblir, dans lesquels la parole retarde l’action, & rend l’expression traînante & lâche. […] Racine s’est bien gardé d’occuper par des paroles le premier moment de cette situation. […] La parole est souvent une expression foible & lente ; mais il faut bien se résoudre à faire passer par les oreilles ce qu’on ne peut offrir aux yeux. […] C’est lorsque le personnage qui prend la parole, ne dit que ce qu’il a dû naturellement penser & dire.
La prodigieuse variété des guerres impériales fournit des réponses à tous les problèmes ; et les paroles de l’Empereur répandent de la lumière. […] Un des personnages qu’il a inventés est un vannier qui met sa coquetterie à écrire des chansons, les paroles et la musique. […] Le médecin Duhem prononça ces remarquables paroles : « Ces gens de lettres, tous aristocrates et contre-révolutionnaires ! […] quand on a compté sur les sortilèges de la parole, quand on a connu ses délices ! […] » Ces augustes paroles, la situation les commandait.
Mais il ajoute, ce Veuillot, qu’il ne croit pas que « le héros des libres penseurs, Molière, recevant du Roi la même parole, eût répondu avec le même courage ». […] « Dire qu’il est un des plus grands génies dont la parole ait agité le monde, dire, etc… dire enfin qu’il est un grand écrivain et un grand homme, eh ! […] Le jeune homme songe, et ses paroles sont des actes qui se préparent : « La totale puissance des hommes, il me la faut. […] Toute parole tombait lourdement sur mon cœur. […] Pierre Hamp : « Se tuer pour cela ne vaut point mourir pour la patrie ; cependant, c’est toujours mourir pour ce qu’on aime. » Et ces paroles sont charmantes.
Il est libéral en paroles et du bout des lèvres, et la liberté est un mot avec lequel on peut, à certains jours, le mener très loin. […] Chez l’enfant, justement, la grâce est quelque chose d’indécis ; ce sont des sentiments à peine ébauchés ; c’est une parole encore incertaine. […] Le soleil te parle en paroles sublimes ; Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin ; Et retourne à pas lents vers les cités infimes, Le cœur trompé sept fois dans le néant divin. […] Comme vous pourriez ne pas me croire sur parole, je vais feuilleter avec vous l’un des recueils de Sully Prudhomme, intitulé Les Solitudes et, après que je vous en aurai lu deux ou trois pièces, je suis bien sûr que nous serons du même avis. […] Parfois, il griffonnait hâtivement quelques lignes, en marmottant des paroles inintelligibles.
« Vous voyez bien, mon cher Horace, lui dit le roi en se remettant à marcher, je suis plus fort que tous les rois d’Europe ; je tiens lord Palmerston dans ma main, je l’écraserais au besoin ; aucun roi en Europe ne peut bouger sans ma permission. » Ces paroles, ou leur équivalent, se retrouvent dans l’Histoire de M. […] 29 » Toutes ces paroles, en effet, ont dû être dites dans le décousu et le déshabillé de la conversation.
Les Regrets, dans l’œuvre de Du Bellay, si on les compare surtout à ses précédentes poésies à demi allégoriques et fictives de l’Olive, justifient tout à fait ces paroles de Goethe à Eckermann, qui sont un article essentiel de la poétique moderne : « Tous les petits sujets qui se présentent, rendez-les chaque jour dans leur fraîcheur ; ainsi vous ferez de toute manière quelque chose de bon, et chaque jour vous apportera une joie… Toutes mes poésies sont des poésies de circonstance : elles sont sorties de la réalité, et elles y trouvent leur fonds et leur appui. […] Il ne disconvient pas avoir pu laisser échapper quelques regrets, quelques paroles dont on a pu abuser.
A de tels personnages, chefs et gardiens des États, il est aussi beau d’aimer, de favoriser les arts et la poésie, que périlleux de s’y essayer directement ; et, plus ils sont capables de grandeur, plus il y a raison de répéter pour eux la magnifique parole que le poète adressait au peuple romain lui-même : Tu regere imperio populos, Romane, memento. […] Toujours c’est aux meilleurs et aux plus généreux sentiments de son frère qu’elle s’adresse ; c’est le culte de l’honneur qu’elle échauffe et qu’elle entretient en lui : Mais toy, qui as toujours foy conservée Et envers tous ta constance observée, Rendant content Dieu et ta conscience Par ta vertu, doulceur, foy, pacience, Tenant à tous parole et vérité, Honneur tu as, non ennuy mérité.
La parole gigantesque et vague s’interpose entre l’esprit et les objets ; tous les contours sont brouillés et le vertige commence. […] Paroles de Fontanes, qui l’avait connue et l’admirait (Sainte-Beuve,
Quand je pense à la vieille pendule qui est dans l’autre chambre, quand, au moyen de paroles mentales, je suis dans ma tête un long raisonnement, quand je me développe ce qui pourrait bien arriver si je faisais telle démarche, non seulement j’ai dans l’esprit l’image de la pendule, l’image des sons et des mouvements vocaux que comporterait mon raisonnement prononcé à haute voix, l’image des gestes, émotions, événements que provoquerait en moi et hors de moi ma démarche, mais encore je sais que toutes ces images sont de simples images actuelles. […] J’ai vu cent fois cette pendule que je me figure ; j’ai entendu ou lu mille fois, dix mille fois, ces paroles mentales qui roulent dans mon esprit ; j’ai remarqué trente ou quarante fois le geste d’étonnement, le sourire de plaisir, l’accent de colère que j’imagine ; la preuve en est qu’ils me reviennent ; si je sais, c’est que je me souviens.
Rien n’est affreux comme de troubler l’innocence… » Ces paroles d’Eudore font sourire : c’est plutôt douceur que douleur qu’il veut dire ; il n’en est pas de comparable, pour ces grandes âmes de héros ou d’archange déchu, au plaisir de troubler un jeune cœur, et, mieux qu’une Ève encore, une Marguerite innocente. […] Un nouveau prophète revint en Europe, apportant ces prodiges de parole.
Mais trouver les paroles dignes du sujet ! […] Enfin, voici le passage décisif, et qui ne laisse subsister aucun doute : Les grands mots, selon les habiles connoisseurs, font en effet si peu l’essence entière du sublime, qu’il y a même dans les bons écrivains des endroits sublimes dont la grandeur vient de la petitesse énergique des paroles, comme on le peut voir dans ce passage d’Hérodote, qui est cité par Longin : « Cléomène étant devenu furieux, il prit un couteau dont il se hacha la chair en petits morceaux, et s’étant ainsi déchiqueté lui-même, il mourut. » Car on ne peut guère assembler des mots plus bas et plus petits que ceux-ci : se hacher la chair en morceaux, et se déchiqueter soi-même.
Où que nous regardions, la même parole pèse sur nous. […] Son ironie perce parfois le voile des paroles de politesse et des compliments sincèrement affectueux.
N'est-ce pas insulter à la crédulité publique, & ont-ils pu espérer qu'on les en croiroit sur leur parole ? […] L’amour de l’indépendance qu’il prêche dans ses Ecrits, amour qui flatte naturellement tous les Hommes ; l’apologie qu’il fait souvent des foiblesses humaines ; la tolérance & l’humanité, qu’il ne cesse de recommander, & dont tout le monde a besoin, n’ont pas peu contribué à décider en sa faveur les Hommes de tous les états, de tous les âges, assez foibles pour croire sur parole, & trop peu réfléchis pour rien approfondir.
On avait peine à quitter sa conversation caressante, trop caressante, voluptueuse, bien que le perfide se plût toujours à vous lancer à la fin quelque parole amère qui corrompait le miel de ses cajoleries. […] Ils tiennent leur parole, et s’écrivent des lettres pleines d’âme, de vérité, d’effusion de cœur, sans sarcasmes, sans mauvaises plaisanteries.
À huit heures sonnantes, Gambetta apparaît, une rose-thé à la boutonnière… ……………………………………………………………………………………………………… Au fond, je perçois chez cet homme, sous une apparence de bonne enfance et de rondeur endormie, l’éveil d’une attention toujours à l’aguet, et qui note les paroles, et qui prend la mesure des gens, et qui se rend compte très bien, au bout de trois phrases, de ceux qui sont encore à écouter, et de ceux qui ne le sont plus. […] Il se promenait, quelques instants, devant les murs de bois, au travers desquels passaient des bruits de paroles qu’il n’entendait pas, mais qui mordaient sa curiosité.
La conviction rend vibrante la parole du poète et nous ne tardons pas à vibrer avec elle, ce qui est la plus haute et la plus complète manière d’admirer78. […] Non, des flacons brisés, quelques vaines paroles Qu’on prononce au hasard et qu’on croit échanger, Entre deux froids baisers quelques rires frivoles, Et d’un être inconnu le contact passager, Non, ce n’est pas l’amour, ce n’est pas même un rêve… RODOLPHE Quand la réalité ne serait qu’une image, Et le contour léger des choses d’ici-bas, Me préserve le ciel d’en savoir davantage !
Ce qui fait notre infériorité, apparente sans doute, vis-à-vis des animaux, c’est que nous avons la parole, et dès lors toutes les sottises que nous pensons, nous les disons de tout notre cœur et elles paraissent. […] Mais on ne réfléchit pas que les animaux n’ayant pas la parole, c’est pour eux un avantage, une supériorité énorme dans le débat.
Renan avale et rend des dictionnaires… Le mot le grise comme l’opium grise le Chinois, et perpétuellement, dans ses Dialogues, — où il n’a plus la ressource des petits paysages, comme dans ses Histoires, — il se plonge en des margouillis de paroles (cela ne vaut pas un nom plus noble) dans le genre de celui-ci, par exemple : « L’idéal apparaît comme le principe de l’évolution déifique et comme le créateur par excellence. » Et cela pour ne pas dire : Dieu ! […] Ni les miracles des martyrs que l’esprit moderne cherche à expliquer, mais avec prudence, ni l’état exalté et violent des esprits au moment où des hérésies comme celles de Montanus et de Marcion enflammaient l’atmosphère autour de tout ce qui était chrétien, ne balancent ce fait inouï, qui réalise, dès le commencement du Christianisme, la parole de Jésus-Christ à son Église, sous la plume même de l’auteur de la Vie de Jésus, du négateur avoué du surnaturalisme dans l’Histoire !
Évidemment, sur cet écho malheureux des paroles de Jéhovah et de ses prophètes, le scrupule a pris plus tard aux compilateurs poétiques d’Alexandrie. […] Par ce mélange de croyances diverses qui étaient alors le trésor commun de l’esprit poétique, ils se sont souvenus de la belle prière du stoïcien Cléanthe, disant à son Jupiter : « Nulle œuvre ne se fait sur la a terre en dehors de toi, ô Dieu, ni dans les vastes conte tours du céleste éther, ni sur la mer, hormis ce que les méchants peuvent enfanter dans leur âme. » Évidemment, sous l’impression de ces nobles élans de l’antique spiritualisme païen, le nouveau réviseur de l’hymne orphique dit précisément ici le contraire des premières paroles, qu’il transcrit et qu’il développe.
bien que la parole soit impuissante contre les mortelles blessures que je vois si pressées sur ton beau corps, je veux exhaler des soupirs tels que les attend le Tibre, l’Arno et le Pô, dont j’habite les rives, douloureux et pensif. […] » Mais ce langage du poëte n’avait déjà sur les hommes d’un siècle nouveau rien de la puissance qu’exerçaient jadis la rude parole de Pierre l’Ermite, ou l’éloquence passionnée de saint Bernard.
Il a défini la calomnie « le crime de la parole », et il l’a poursuivie dans ses applications historiques les plus célèbres.
Comme conseil de style, on n’a qu’à renvoyer à l’auteur ses propres paroles : « Un écrivain qui a quelque souci de la postérité, dit-il dans sa remarquable préface, cherchera sans cesse à purifier sa diction, sans effacer toutefois le caractère particulier par lequel son expression révèle l’originalité de son esprit ; le néologisme n’est d’ailleurs qu’une triste ressource pour l’impuissance.
Si le conte est fait d’une manière trop prolixe, si le conteur emploie trop de paroles, et s’arrête à peindre trop de détails, l’esprit de l’auditeur devine la chute vers laquelle on le conduit trop lentement ; il n’y a plus de rire, parce qu’il n’y a plus d’imprévu.
. — Les Paroles sincères (1890). — Toute une jeunesse (1890). — Le Petit Marquis (1891). — La Guerre de Cent Ans (1892). — Mon franc-parler (trois séries de 1893 à 1896). — Contes tout simples (1894). — Pour la Couronne (1895). — Le Coupable, roman (1897). — Les Vrais Riches (1898)
» — « Heureux plutôt, répondit-il 145, celui qui écoute la parole de Dieu et qui la met en pratique !
Une douce parole suffit souvent dans ce cas pour chasser le démon.
Dans son beau livre des « Paroles d’un croyant », la colère la plus effrénée et les retours les plus suaves alternent comme en un mirage.
La terre, selon la parole biblique, « tremblait et se taisait devant lui ».
C’est l’oreille lorsqu’il est question de juger si les accens d’un récit sont touchans ou s’ils conviennent aux paroles, et si le chant en est mélodieux.
Elle a, je crois, et sauf erreur, débuté dans la Revue des Deux-Mondes, cette portière qui n’ouvre pas sa porte, mais toutes les portes de la publicité, et même celle de l’Académie et de la Revue des Deux-Mondes, Mme Gréville est allée… où elle a voulu, et elle s’est mise à écrire comme une femme qui s’est tue longtemps, se met à parler, sous l’impulsion d’une effroyable indigestion de paroles accumulées.
ces frères siamois de la littérature — comme on les appelle déjà — sont aussi les neveux siamois de l’auteur du Solitaire (ils tiennent par le mauvais côté à d’Arlincourt comme parle bon à Jules Janin) ; supposez donc qu’ils se résolvent à parler simplement et virilement cette belle langue française que nous devrions tous respecter comme la parole de notre mère, et qui semble, sous leur plume, contracter quelquefois l’accent des Incroyables du temps de Garat (serait-ce pour se faire mieux accepter comme les Alcibiades de l’histoire ?)
Taine, que le critique ajoute à son âme naturelle et nationale cinq à six âmes artificielles ou acquises, et que sa sympathie flexible… (rappelez-vous le fameux vers d’Auguste Barbier, qui ne le disait pas de la Critique) : Ouvrant à tout venant et sa jambe et son cœur, l’introduise en des sentiments éteints ou étrangers… « Le meilleur fruit de la Critique — dit encore l’auteur du Carlyle — est de nous déprendre de nous-mêmes, de nous contraindre à faire la part du milieu où nous sommes plongés, de nous enseigner à démêler les objets eux-mêmes à travers les apparences passagères dont notre caractère et notre siècle ne manquent jamais de les revêtir… » Telles sont les propres paroles de M.
Félix Rocquain, qu’il n’a pas une opinion à lui franchement exprimée, pour son compte, à ses risques et périls, pendant toute la durée de son histoire, et que tout, même les moindres paroles qui ont un relief quelconque, il les restitue, entre guillemets, à qui les a dites, de peur d’en être soupçonné.
Il dit la toute-puissance magique de ces rhéteurs sur l’opinion, fanatisée jusqu’à la bêtise la plus incompréhensible, le pullulement innombrable de ces rhéteurs, la frénésie d’admiration qu’ils inspiraient, les sommes effroyables qu’ils gagnaient à débiter leurs discours, le vide immense ou la honteuse puérilité de ces discours artificiels, les mises en scène de toute espèce de ces trafiquants de paroles, qui péroraient à la minute et au commandement et qu’écoutaient respectueusement les empereurs, drapés dans leur pourpre, quand ils n’en étaient pas jaloux !
— et que les paroles d’Héloïse sont une vertu sortie des bords divins de sa robe ?
et que les paroles d’Héloïse sont une vertu sortie des bords divins de sa robe ?
Et qu’on n’infère pas de ces paroles que M. le docteur Tessier est impropre à ce qu’on appelle les choses de la Philosophie et qu’il a pour elle ce dédain qui est l’hypocrisie de l’impuissance.
Il manque même de haine philosophique, quoique de Rémusat doive avoir, tapies quelque part, les haines de sa philosophie, et quoique le scepticisme du temps et la glace de son tempérament aient bien diminué cette rage contre l’Église qu’ont tous, au fond du cœur, les philosophes, et que Cousin, lâche, mais indiscret, révélait en la couvrant de ce mot, dit justement à propos d’Abélard : « Il avait déposé dans les esprits de son temps le doute salutaire et provisoire, qui préparait l’esprit à des solutions meilleures que celles de la foi. » Charles de Rémusat n’a jamais eu de ces imprudentes et impudentes paroles d’un homme dont l’espérance trahit l’hypocrisie, mais à quelque coin, dans cet esprit moyen, dans cette âme de sagesse bourgeoise, il y a toujours, prête à se glisser au dehors, l’hostilité contre toutes les grandes choses que nous croyons… Comme Abélard, le héros de toute sa vie, comme Bacon, qu’il a aussi commenté, de Rémusat s’est toujours plus ou moins vanté d’être un écrivain de libre examen et de libre pensée, un philosophe contre la théologie, un adversaire de l’autorité sur tous les terrains, en religion comme en politique, — et comme l’Église est l’autorité constituée de Dieu sur la terre et qu’elle a le privilège divin « que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre Elle », de Rémusat, qui est une de ces portes-là, — non pas une porte cochère, aux cuivres insolemment luisants et aux gonds tournant à grand bruit, mais une petite porte, discrète et presque cachée à l’angle et sous les lierres prudents de son mur, — de Rémusat entend bien prévaloir contre l’Église et lui prouver que son privilège divin n’est qu’une prétention !
Diogène, avec le manteau d’Antisthène qu’il avait ramassé à la borne et à travers les trous duquel passait l’orgueil qui crevait les yeux de Platon, Diogène ne buvait dans sa main et ne roulait devant lui son tonneau que pour se passer des hommes et être, tout à son aise, outrageusement insolent avec eux ; mais Benoît Labre, qui s’était fait le pauvre errant dont la main n’avait pas honte de se tendre à l’aumône, ressuscitait, par le spectacle de sa misère, la pitié et la charité dans les cœurs… Ce pauvre volontaire de Jésus-Christ, comme il s’appelait lui-même, fut, à ses risques et périls, tout le temps qu’il vécut, une prédication silencieuse, autrement éloquente que la parole des plus éloquents… C’était, continuée, vivante et incessante, la prédication du sublime sermon sur la montagne, — qu’admirait Rousseau, messieurs les philosophes !
… II Quand l’historien est le contemporain de son histoire et qu’il est, de plus, éloigné du théâtre sur lequel elle s’est produite, il n’y a plus que sa parole et ses renseignements particuliers.
Pour toucher à la Bible et traduire en images dignes du texte cette parole surnaturellement inspirée, il faut être soi-même surnaturellement inspiré.
Il est mort, dit-on, en libre penseur, et ses dernières paroles ont été pour se vanter de cette superbe manière de mourir.
ni les uns ni les autres n’ont trouvé la parole magique, le vrai nom de la cause d’où pend à l’infini l’enchaînement des effets. […] La névrose n’annulait pas la liberté de ses paroles ou de ses actes. […] Et parce que quelqu’un aura dit que « la vraie éloquence se moque de l’éloquence », l’en croirons-nous sur sa parole ? […] Nous aurions le droit de dédaigner, pour notre parole comme pour notre personne « tout ce que les hommes admirent ». […] Nous ne vivons pas seulement de pain, d’algèbre et d’exégèse, mais de toute parole qui vient du cœur de nos semblables et qui pénètre jusqu’au nôtre.
« Les conceptos, dit-il, sont la vie du discours, l’esprit de la parole ; ils ont d’autant plus de perfection qu’ils ont plus de subtilité. […] Ce jeune homme osa blâmer les bienfaits du roi, et indirectement Colbert, qui en avait confié la distribution à Chapelain ; il prit la défense du public sensé, qui se taisait, contre le public de la mode, qui parlait par toutes les voix ; il plaida, selon ses paroles, la cause de la raison contre la rime, c’est-à-dire de l’esprit français contre une mauvaise école de poésie, et il la gagna. […] Pénétrons au fond de ces paroles. […] On regrette qu’un esprit si viril, qui a enseigné l’art de travailler lentement, s’épuise à peindre un lutrin, à allumer poétiquement une chandelle, à parodier les plaintes de Didon dans le discours d’une perruquière délaissée, et les paroles d’or de Nestor dans la harangue de la Discorde aux amis du trésorier ; à décrire un combat à coup d’in-folio arrachés de la boutique de Barbin ; et l’on revient aux Satires, à l’Art poétique et aux Épîtres, « ces chefs-d’œuvre, dit Voltaire, de poésie autant que de raison175. » Dans une nation civilisée, où la poésie n’est point la forme naturelle et directe du discours, mais un art de convention difficile et savant, l’écrivain qui fait choix, pour s’exprimer, de la langue des vers, ne doit l’appliquer qu’à des pensées qui mettent l’esprit dans un haut état, et qui le disposent à entendre quelque chose d’exquis dans une langue inusitée. […] Il s’agit de ces paroles prononcées par l’acteur, qu’on suppose n’être pas entendues des autres personnages, quoiqu’elles le soient du public.
. — Par exemple, lorsqu’une pensée arrive en notre esprit au premier plan, comme elle est une parole mentale, nous sommes tentés de l’énoncer tout haut ; le mot nous vient, aux lèvres ; même nous sommes obligés de nous retenir pour éviter de le prononcer ; parfois, si l’idée est très vive et très nette, nous prononçons le mot malgré nous. […] La règle est générale, qu’il s’agisse des muscles qui jouent pour proférer la parole, ou des muscles qui travaillent pour remuer les membres, pour exprimer les émotions, pour opérer ou aider les perceptions. […] Pour l’articulation, il est situé dans la partie postérieure de la troisième circonvolution frontale gauche142 ; de là part l’impulsion qui fait jouer les organes vocaux ; quand cette partie de l’écorce est désorganisée, la parole mentale peut demeurer intacte et parfaite ; mais la parole effective est incohérente ou nulle.
Vivre là, sur ton cœur, et boire tes paroles ! […] Wagner dit vrai quand il observe que la musique commence où finit la parole ; mais il n’a pas vu que la musique des poètes peut commencer où finit le chant des musiciens. […] Les pays d’Orient qui possèdent, malgré la « civilisation », une âme intoxiquée d’autoritarisme servile que les Européens d’Occident, ont gardé le pouvoir de pleurer et le respect des paroles justes. […] Comme pour les poètes lyriques, les prosateurs d’aujourd’hui éprouvent le besoin de prendre part à la montée politique et de prononcer la parole sacrée apte à réunir les peuples et à les délivrer du joug des siècles passés.
Oui, il y eut et il dut y avoir de ces commencements de querelle — et chez les Grecs au moment de leur maturité déjà déclinante et la plus fleurie, au lendemain d’Alexandre, lorsque, regardant en arrière, ils se jugeaient à la fois riches par héritage et pouvant encore ajouter à la gloire des ancêtres — ; et chez les Romains surtout, à cette époque dominante de l’empire, au sein de cette unité puissante qui avait engendré des esprits universels comme elle-même, au temps des Sénèque, des Pline, et je dirais des Tacite si ce dernier n’était si pessimiste et morose : mais les plus belles paroles qui aient été prononcées sur cette question des anciens et des modernes, c’est peut-être encore ce grand et si ingénieux écrivain Sénèque qui les a dites, et on ne peut rien faire de mieux aujourd’hui que de les répéter : J’honore donc, disait-il à son jeune ami Lucilius, j’honore les découvertes de la sagesse et leurs auteurs ; j’aime à y entrer comme dans un héritage laissé à tous.
Vois-tu, les profondes paroles Qui sortent d’un vrai désespoir N’entrent pas aux âmes frivoles, Si cruelles sans le savoir !
. — Il entra à la Chambre, et fut d’abord à peu près seul du parti social, s’exerçant à manier la parole. — Il devint conservateur en défendant le ministère Molé contre la coalition. — Peu après il eut l’idée un peu brusque d’être président de la Chambre, et, n’y ayant pas réussi, il reprit son vol et passa à gauche, et par delà la gauche.
Pourquoi, découragé par vos divins tableaux, Ai-je, enfant paresseux, jeté là mes pinceaux Et pris pour vous fixer le crayon du poëte, Beaux rêves, obsesseurs de mon âme inquiète, Doux fantômes bercés dans les bras du désir, Formes que la parole en vain cherche à saisir !
Sophocle met souvent des maximes philosophiques dans les paroles des chœurs.
M. de Buffon s’est complu dans l’art d’écrire, et l’a porté très loin ; mais quoiqu’il fût du dix-huitième siècle, il n’a point dépassé le cercle des succès littéraires : il ne veut faire, avec de beaux mots, qu’un bel ouvrage ; il ne demande aux hommes que leur approbation : il ne cherche point à les influencer, à les remuer jusqu’au fond de leur âme ; la parole est son but autant que son instrument ; il n’atteint donc pas au plus haut point de l’éloquence.
(Paroles de Burke.)
Et pareillement, c’est raison qu’on élimine de sa parole tout ce qui nuit ou ne sert pas à l’intelligence des choses ; l’expression parfaite est celle qui met la pensée en pleine lumière.
Il avança qu’il en feroit d’aussi mordans, sans être aussi grand poëte que Rousseau, & tint parole.
Horace reprend la parole.
Albalat sur parole.
S’étonnera-t-on de ces paroles ?
Ils ont pris au pied de la lettre brute cette cordiale plaisanterie de l’Espagne, qui fait de tout illégitime un gentilhomme ; et par cela même ils ont prouvé qu’ils n’entendaient rien à cette grande parole qui n’a de sens qu’avec la foi chrétienne et que peuvent dire seuls les bâtards pieux et fidèles qui se réclament de la légitimité divine : « Je suis enfant de Dieu et de noble maison. » Ils se sont enfin haussés jusqu’aux plus insolentes apologies, et de ces apologies jusqu’aux blasphèmes, et de tels blasphèmes que nous ne voulons ni ne pouvons les répéter.
Voici les paroles que l’on trouve presque en tête du livre qu’il publie sous le titre un peu gascon de l’Esprit dans l’histoire : « Je me donne là, — dit-il avec un joli mouvement de faon dans les bois, — je me donne là, je le sais, un labeur rude et téméraire ; et cependant, tant est vif mon désir de démolir le faux et d’arriver au vrai, tant est grande ma haine pour les banalités rebattues, pour les raisons non prouvées, pour le scandale et pour les crimes sans authenticité, je voulais étendre mon travail au-delà des limites que je me suis assignées ; mais j’ai reculé devant cet effort après l’avoir mesuré.
Sans cesse et partout, à côté de la force militaire des grands féodaux, il aurait vu l’autorité des faibles coalisés dans la prière et prêtant le refrain unanime de leurs clochers à la parole désarmée de la houlette épiscopale.
Henri IV, qui a laissé dans l’histoire deux paroles à travers lesquelles on l’a vu jusqu’ici, — et pas très beau : — « Je vais faire, ma mie, le saut périlleux !
C’est sans nul doute à ces reines de l’opinion, à ces belles affligées, veuves de sa parole, qu’il a dédié l’ouvrage intitulé : Les Femmes de la Révolution 9.
Peut-être même ces têtes légères en riront-elles quelquefois, malgré les adroites paroles croquemitaines claquant si dru dans la préface, vous vous en souvenez : « Un pareil livre ne sera lu avec fruit que par des femmes honnêtes et des hommes d’honneur !
Et si nous disons, nous, chrétiens, qu’un jour nous aurons à répondre devant Dieu de nos actions et paroles oiseuses, nous demandons ce que ceux-là qui étaient nés et faits pour gouverner les hommes et qui passèrent ainsi toute leur vie dans des méditations ou des souvenirs de maîtres à danser, répondront, en attendant le jugement de Dieu, devant l’histoire… ?
Je trouve, à la page 382 de la Correspondance, ces paroles d’une superbe si superbement justifiée : « En somme, voici le jeu que je joue !
Traité de grand homme, en pleine Académie, par la voix d’un orateur qui a toujours aimé à faire porte-voix à son époque, c’est ainsi qu’il aura été embaumé Montesquieu par Guizot dans la grande parole invoquée de Royer-Collard.
Toutes mes paroles sont des ess ais pour obtenir un mot qui, certes !
Il écrit ces horribles et grotesques paroles, qu’il faut citer, quoi qu’il en coûte, pour donner une idée du livre de M.
L’abbé Monnin n’a jamais entendu, ni personne que ceux auxquels le Curé d’Ars s’adressait dans ce tête-à-tête sublime de la confession entre le prêtre et son pénitent, les paroles irrésistibles qui ont dû lui tomber des lèvres, à cet Inspiré de la conscience, mais il l’a entendu souvent dans ses instructions et ses catéchismes, et ce qu’il s’en rappelle et en cite est d’une beauté de langage qui défie les plus beaux langages de la terre.
Ni les controverses du temps de Bossuet, mortes maintenant, ni les conversions dues à sa parole et qu’on a oubliées parce que tout le monde n’est pas Turenne, ni les commissions apostoliques dont il fut chargé pour la réformation des monastères, ni les fondations auxquelles il prit part, ces travaux immenses ne pouvaient être rejetés sur le second plan quand il s’agissait de Bossuet.
à laquelle on peut appliquer les mystérieuses paroles du Prophète : « Dites-moi d’où il était venu et je vous dirai où il est allé !
Le Bismarck évoqué par le poète a, sur ce cheval rossé par la guerre, la taille historique d’Attila, et on pense à la fière parole que le Hun dévastateur disait du sien : « L’herbe est courte où mon cheval a passé !
Et nous ne pouvons retenir ces graves et tristes paroles en présence de livres que, chaque jour, le hasard de la publicité nous apporte… Tous romans, ou à peu près, qui font trembler de l’inanité de leur fond et de l’imitation facile de leur forme !
Il dit positivement, dans sa confession d’auteur : « Les Russes ne se parlent qu’à l’étranger : en Russie, ils ne s’adresseraient pas une parole. » Est-ce la vérité ?
sans compter que les paroles, les gestes et les plaisanteries que vous attribuez à tous ces messieurs sont purement de votre invention. […] Jamais une parole d’enthousiasme n’avait trouvé place sur sa langue ; au contraire un dénigrement perpétuel le tenait en hostilité vis-à-vis de tous ceux qu’il fréquentait. […] « Il bégayait de façon à rendre son langage incompréhensible ; ce vice de parole, manifesté seulement en matière de contrats, avait fini par être traité de feinte. […] On s’accorde à dire que son œil était une flamme, que sa parole était une persuasion. […] Suis-je un naïf qui se laisse prendre à de belles paroles ?
Mais nous avons résolu, le lecteur et moi, de ne juger jamais sur parole. […] Dans l’une et l’autre pièce, Delmire et Elvire menacent également don Rodrigue et dom Garcie de les bannir à jamais de leurs cœurs, s’ils ne méritent pas le pardon de leurs transports jaloux, en les croyant innocentes sur leur parole. […] Qu’on se représente surtout le malheureux époux obligé de quitter la scène sans pouvoir, sans oser proférer une parole ; et qu’on dise ensuite, si un dénouement pareil, outre qu’il est plaisant, ne prémunit pas bien contre les démarches précipitées de la plupart des hommes en se choisissant une compagne. […] vous vous êtes trompés. » Après avoir dit ces paroles avec une fausse douceur, il s’alla jeter, avec un zèle encore plus faux, aux pieds de son ennemi, et les lui baisant, il lui demanda pardon. […] Boileau et madame Dacier préféraient, dit-on, la pièce latine ; mais persistons à ne pas juger sur parole.
» Ces paroles sont sincères : Euripide s’intéresse plus à l’humanité que ne le feront les Alexandrins. […] C’est lui qui, sous le nom de l’Acteur, prend de temps en temps la parole pour énoncer les sentences des Pères et des philosophes et pour lancer des anathèmes pédantesques contre l’amour : « Hé amours très fausses, mauvaises et traîtres, semblerez-vous toujours enfer, qui d’engloutir âmes jamais ne fut saoul45 ? […] Écoutez Sébastien Mercier : « Le poète tragique devrait toujours avoir en tête, lorsqu’il compose, ces paroles de David : Et nunc reges intelligite : erudimini qui judicatis terram » ; et il adresse aux fidèles cette exhortation morale : « Répétons avec M. […] On y prend l’habitude de gestes, de paroles, d’attitudes qui donnent une forme caractéristique à l’expression des sentiments les plus généraux. […] J’ai pris de bonne heure pour règle ces grandes paroles. » L’« instituteur des hommes » n’a pas eu un respect sans défaillances pour le mariage, l’amitié, l’amour, le sentiment, paternel.
Taciturne, dans le monde, Geoffroy retrouvait la parole à l’aspect d’un bon dîner ; une table bien servie devenait pour lui une espèce de tribune ; là, dans les épanchements d’une gaîté gastronomique, il ne cachait plus les trésors de son érudition, et les saillies de son esprit tempéraient les graves citations que lui fournissait sa mémoire étonnante. […] Pour le comte de Gormas, c’est à la vérité un fanfaron dont les rodomontades paraissent plus qu’espagnoles, parce que le spectateur n’a aucune idée de ses exploits, et se trouve obligé de l’en croire sur sa parole. […] Ceux-là du moins soutiennent noblement la pièce, indépendamment des idées religieuses ; mais dans Zaïre, l’intérêt de la religion une fois ôté, il n’y a plus rien qu’une petite sotte ridiculement crédule et superstitieuse, qui, prête à monter sur le trône du sein de l’esclavage, écoute les fables de deux étrangers, qu’elle prend, sur leur parole, pour son père et pour son frère, et qui lui font perdre son amant, sa fortune et la vie. […] Le vieillard observe aussi très bien que l’honneur français réside surtout dans la foi, qu’un homme de cœur n’a rien de plus sacré que sa parole, qu’un démenti est le dernier des outrages, et ne peut être lavé que dans le sang ; quand son fils essaie de s’excuser, le père ne veut plus rien croire. […] M. de La Harpe n’établit ce dogme que pour favoriser les lamentations, les complaintes, les éternelles tirades, soi-disant pathétiques, d’auteurs verbeux et stériles, abondants en paroles et dénués d’invention, qui feront deux cents vers médiocres plutôt qu’ils n’auront imaginé un incident et une situation.
Il tint parole. […] Enfin, s’il a pris la parole, c’est pour placer les cathédrales à leur rang. […] La prose est bien autrement difficile. » Wilde avoue que cette parole le surprit d’abord. […] Et les promesses, les paroles qu’on donne, n’engagent à rien, si l’on n’a pas eu l’intention de les tenir. […] Au point de vue dramatique, il est gluckiste, et l’on sait que Gluck subordonnait étroitement la musique aux paroles.
Même le poème grandiose et sombre de l’Amérique, cette histoire du mal envahissant, avec la science, le nouveau monde après l’ancien et ne laissant plus aucun refuge au juste, finit par une parole confiante. […] Sa foi est un élément toujours présent et comme une partie intégrante de la beauté de sa parole. […] Et tout, l’appareil éclatant des funérailles et les louanges convenues, tout contribue à rendre plus ironique cette majestueuse comédie de la mort où les paroles sonores, préparées d’avance, sur la vanité de toutes choses, ne sont qu’une suprême vanité. […] Renan sous prétexte de reproduire exactement sa parole vivante. […] L’autorité de la roide parole de M.
D’abord, il faut louer le savant professeur de n’avoir point voulu être cru sur parole et de nous apporter ses preuves. […] Brunetière est un virtuose de la parole. […] Il est si merveilleusement doué pour la parole publique, si maître de lui, si sûr de son art, qu’il commence à en abuser et qu’il m’a semblé, dimanche dernier, le surprendre deux ou trois fois en flagrant délit de coquetterie, de virtuosité et d’isocratisme. […] Il devient même si pressant que Riquette, qui a promis de le renvoyer intact, se demande si elle pourra tenir sa parole. […] Voilà le roi contraint d’opter entre la parole de celle-ci et le serment du vieux trésorier et, par suite, entre le déshonneur de Semblançay et le déshonneur de sa propre mère.
Amaury-Duval et bien d’autres portraits de femmes ingristes ou ingrisées, j’ai senti passer dans mon esprit, amenées par je ne sais quelle association d’idées, ces sages paroles du chien Berganza, qui fuyait les bas-bleus aussi ardemment que ces messieurs les recherchent : « Corinne ne t’a-t-elle jamais paru insupportable ? […] Ceux qui sont plus près de la parole et du verbe magistral gardent la pureté de la doctrine, et font, par obéissance et par tradition, ce que le maître fait par la fatalité de son organisation. […] Un ministre, harcelé par la curiosité impertinente de l’opposition, a-t-il, avec cette hautaine et souveraine éloquence qui lui est propre, témoigné, — une fois pour toutes, — de son mépris et de son dégoût pour toutes les oppositions ignorantes et tracassières, — vous entendez le soir, sur le boulevard des Italiens, circuler autour de vous ces paroles : « Etais-tu à la Chambre aujourd’hui ? […] Toutes ces paroles, qui échappent à votre langue, témoignent que vous croyez à une beauté nouvelle et particulière, qui n’est celle ni d’Achille, ni d’Agamemnon. […] La véritable mémoire, considérée sous un point de vue philosophique, ne consiste, je pense, que dans une imagination très-vive, facile à émouvoir, et par conséquent susceptible d’évoquer à l’appui de chaque sensation les scènes du passé, en les douant, comme par enchantement, de la vie et du caractère propres à chacune d’elles ; du moins j’ai entendu soutenir cette thèse par l’un de mes anciens maîtres, qui avait une mémoire prodigieuse, quoiqu’il ne pût retenir une date, ni un nom propre. — Le maître avait raison, et il en est sans doute autrement des paroles et des discours qui ont pénétré profondément dans l’âme et dont on a pu saisir le sens intime et mystérieux, que de mots appris par cœur. — Hoffmann.
Et ensuite on a beau raisonner dans chaque cas particulier, formuler la maxime, énoncer le principe, déduire les conséquences : si le désir et la passion prennent la parole, si la tentation est forte, si l’on va tomber, si tout à coup ou se redresse, où donc était le ressort ? […] A vrai dire, cette personnalité se dessine du jour où l’on a adopté un modèle : le désir de ressembler, qui est idéalement générateur d’une forme à prendre, est déjà ressemblance ; la parole qu’on fera sienne est celle dont on a entendu en soi un écho. […] C’étaient presque les mêmes paroles ; mais elles ne trouvèrent pas le même écho, parce qu’elles n’avaient pas été dites avec le même accent. […] Ou bien les considérations morales sont là : l’idée que le dépôt a été « confié » et qu’une confiance « ne doit pas » être trahie ; l’idée que le dépositaire « s’est engagé », qu’il a « donné sa parole » ; l’idée que, même s’il n’a rien dit, il est lié par un « contrat » tacite ; l’idée qu’il existe un « droit » de propriété, etc. […] Si la parole d’un grand mystique, ou de quelqu’un de ses imitateurs, trouve un écho chez tel ou tel d’entre nous, n’est-ce pas qu’il peut y avoir en nous un mystique qui sommeille et qui attend seulement une occasion de se réveiller ?
Mais s’il eut à un moment ces velléités d’enthousiasme, comme semble l’attester son admiration de jeune homme pour Campanella, elles furent courtes chez lui ; il retomba vite à l’état de lecteur contemplatif et critique, notant et tirant la moralité de chaque chose, repassant tout bas les paroles des sages, et, pour vérité favorite, se donnant surtout le divertissement et le mépris de chaque erreur. […] Ainsi, à propos de l’Alcoran, dont les paroles, dit Mascurat (page 345), sont très-belles et bonnes, quoique la doctrine en soit fort mauvaise, Saint-Ange se récrie, et Mascurat répond entre autres choses : « … Joint aussi qu’il est hors le pouvoir d’un homme, tant habile qu’il soit, de connoître quelle est la religion des Turcs, soit pour la foi ou les cérémonies, par la seule lecture de l’Alcoran ; tout de même, sans comparaison toutefois, qu’un homme qui n’auroit lu que le Nouveau Testament, ne pourroit jamais connoître le détail de la religion catholique, vu qu’elle consiste en diverses règles, cérémonies, établissements, institutions, traditions et autres choses semblables que les papes et les conciles ont établies de temps en temps, et pièces après autres, conformément à la doctrine contenue implicité ou explicité dans ledit livre. » On a le venin. […] Il paraît que ce dernier, après sa sortie de Rome et son arrivée en France, s’était licencié sur le compte de Naudé en je ne sais quelles paroles et imputations qui pouvaient avoir de la gravité.
— Sa grandeur mondaine, ses espérances célestes, tout était rassemblé dans ces simples paroles. […] C’était un sentiment généreux : et c’est à ce seul titre que les hommes doivent admirer les paroles ou les actions d’un homme. […] J’ai loué l’acte du Suicide dans mon ouvrage sur l’Influence des passions, et je me suis toujours repentie depuis de cette parole inconsidérée.
Je cherchais quelqu’un ; le hasard, cette providence des hommes qui cherchent, me le fit rencontrer au milieu des flots turbulents d’une révolution populaire, à la tête de laquelle j’avais été jeté ; voici comment : II En 1848, pendant que j’étais submergé par des masses de citoyens agités, tantôt à l’hôtel de ville de Paris, tantôt dans les rues ou sur les places publiques, tantôt à la tribune de la chambre des députés ou de l’Assemblée constituante : 24 février, 27 février, 28 février, journée du drapeau rouge ; 16 avril, journée des grands assauts des factions combinées contre les hommes d’ordre ; 15 mai, journée où la chambre nouvelle violée est dissoute un moment par les Polonais, ferment éternel de l’Europe ; journées décisives de juin où nous combattîmes contre les insensés frénétiques de la démagogie, et où nous donnâmes du sang au lieu de paroles à notre pays : je fus frappé par la physionomie belle, grande, honnête et intrépide d’un homme de bien et de vertu, que je ne connaissais pas, mais que j’avais eu le temps de remarquer autour de moi aux éclairs de son regard. […] Mais le soleil de Perse, la jeunesse facilement irritable, l’ivresse d’une constante fortune, les femmes et le vin, emportèrent dans les derniers temps Alexandre jusqu’à des excès d’actes et de paroles qui excitaient de grands murmures parmi les Grecs et parmi les Macédoniens. […] On voit ici, d’après les paroles mêmes d’Alexandre plaidant sa propre cause devant l’assemblée des Macédoniens de son camp, que le gouvernement représentatif de Macédoine subsistait encore en Asie dans l’armée, et que les procès même d’État étaient jugés avec publicité et liberté par le tribunal populaire ou militaire.
« Zelter est un bon et digne homme, dit-il, mais il lui arrive parfois de ne pas me comprendre et de donner à mes paroles une fausse interprétation. […] Écoutez Goethe : « Si Byron avait eu l’occasion de se décharger au parlement, par des paroles fréquentes et amères, de toute l’opposition qui était en lui, il aurait été comme poète bien plus pur. […] Sous ce berceau, à cette table de pierre, assis sur ces bancs maintenant presque brisés, nous avons souvent pris nos repas, en échangeant de grandes et bonnes paroles.
Mais sous le chant du poète, l’orchestre dira le fond, intraduisible en paroles, des émotions, au moyen des motifs définis, constituant un langage spécial, et cet orchestre ne devra pas être entendu, pour ainsi dire, mais disposer seulement le spectateur à vivre le drame. […] C’est d’abord la peinture qui a rendu possible la vision de ces miracles intraduisibles en paroles ; puis la poésie qui, dans le lyrisme, emporte l’âme déjà au-delà des symboles. […] C’est pourquoi il a su réunir, dans une étroite et magnifique union, la parole et la note, le verbe et l’harmonie.
Elle nous fait voir les textes premiers, leur sens véritable, comment les paroles de Jésus furent, après lui, déformées. […] Les paroles de Jésus, rarement citées, montrées, plutôt, de vagues symboles, n’ont plus une autorité décisive. […] Ainsi, Wagner et Tolstoï, forcés à des règles détaillées du renoncement, les donnent différentes, suivant la différence de leur race et de leur esprit, et la différence des désirs égarant leurs paroles, dans le vain rêve cruel de la vie égoïste.
Il dit ; aussitôt la nourrice Euryclée se prend à pleurer, et à travers ses larmes elle fait entendre ces paroles… » « Euryclée lui dit (vous l’entendez !) […] « Voyez, nous dit notre mère, comment il faut recevoir et retenir par de bonnes paroles et par une douce violence les hôtes malheureux et timides que la Providence envoie à notre foyer ? […] Les livres ne sont que des miroirs de paroles au lieu d’être des miroirs de verre : si le miroir est limpide, il réfléchit avec un charme égal une chaumière ou un palais, une montagne ou un brin d’herbe, le cœur d’une reine ou le cœur d’une laveuse ; car le charme est dans la vérité. — Et la vie aussi, dit notre oncle.
À moi seul, pauvre homme, je paye deux gouvernements : l’un ancien, local, qui aujourd’hui est absent, inutile, incommode, humiliant, et n’agit plus que par ses gênes, ses passe-droits et ses taxes ; l’autre, récent, central, partout présent, qui, se chargeant seul de tous les services, a des besoins immenses et retombe sur mes maigres épaules de tout son énorme poids. » — Telles sont, en paroles précises, les idées vagues qui commencent à fermenter dans les têtes populaires, et on les retrouve à chaque page dans les cahiers des États généraux. […] … Nous sommes accablés d’impôts de toute sorte ; nous vous avons donné jusqu’à présent une partie de notre pain, et il va bientôt nous manquer si cela continue… Si vous voyiez les pauvres chaumières que nous habitons, la pauvre nourriture que nous prenons, vous en seriez touché ; cela vous dirait mieux que nos paroles que nous n’en pouvons plus et qu’il faut nous diminuer… Ce qui nous fait bien de la peine, c’est que ceux qui ont le plus de bien payent le moins.
Ils s’en vengèrent quelques jours après en venant, dans un tumulte nocturne, me menacer dans mon foyer d’une émeute irrésistible pour me contraindre à leur obéir : ils tinrent parole. […] Permettez-moi donc de prêter à cette grande ombre la parole très pâle d’un de ses disciples : XXXIII « Déroulez-moi sur cette table la carte actuelle de l’Europe et de l’Asie, aurait-il dit à ses auditeurs, et suivez mon doigt sur ces continents, ces îles, ces mers, qui sont chacun une lettre de cet alphabet diplomatique de puissances, et qui forment en se combinant la langue politique et les systèmes de guerre ou de paix de tout l’univers.
Toutes les fois que je me retrouve en face de ce tableau, je pense à Mlle de Guérin qui a transfiguré aussi la parole intime, le Verbe intérieur de l’homme, et je me dis : — Oh ! […] Il y a là quelque chose qui fait qu’on y attache fort les yeux, quand ce ne serait qu’un brin d’herbe. » Quel instinct de notre immortalité dans ces paroles !
Tandis que l’homme de la sensation et de l’activité se satisfait de ce monde misérablement ébauché qu’il a devant les yeux, et que l’homme de l’intelligence cherche à le perfectionner, le poète s’indigne des lenteurs, et finit par n’avoir plus que des paroles d’ironie et des chants de désespoir. […] Si nous devions condamner absolument Byron sur ses paroles et sans vraiment le comprendre, il nous faudrait condamner absolument et Voltaire et Rousseau, et tout le Dix-Huitième Siècle, et toute la Révolution, qui ont éveillé la fièvre de son génie, et donné à son sang cette impulsion généreuse mais désordonnée.
L’absolue conformité de la musique aux paroles et la liberté de l’orchestration, chargée de fournir à l’action une atmosphère, de dégager le fluide lyrique et d’éclairer le dessous des caractères, voilà les deux principes de la méthode wagnériste. […] Vous, vents révoltés, sifflez et mugissez…, piaffez comme des chevaux sauvages dans les flots, et faites les rejaillir en colonnes. — C’est le vaisseau de Tristan qui passe, et ce vaisseau surnagera et arrivera au port de l’avenir, fier de ses avaries et de son précieux chargement : l’harmonie immortelle. — Victor Tissot, 1867. » Ces trop belles paroles se perdaient dans le flot des invectives et des injures.
Quand elle rouvrit les yeux, elle ne reconnaissait plus personne ; elle était privée de l’ouïe, de la parole, du goût et de l’odorat. […] Quand un de ceux-ci désirait l’entretenir sur un sujet, le gentleman l’écoutait d’abord sans rien saisir des paroles, sauf le son.
Jules Janin parlant tout le temps de notre livre, nous fouettait avec de l’ironie, nous pardonnait avec de l’estime et des paroles sérieuses, et présentait notre jeunesse au public en l’excusant, en lui serrant la main : une critique à la fois très blagueuse et très paternelle. […] « Maintenant par les écrits, par la parole, par les achats… qu’est-ce qui a imposé à la génération aux commodes d’acajou, le goût de l’art et du mobilier du xviiie siècle ?
L’Europe fit silence pour écouter ces représentants d’un siècle nouveau à qui des événements inattendus venaient de donner la parole, non pour la France, répétons-le bien, mais pour l’esprit humain. […] Cette pseudo-terreur de paroles, puérile plagiat de la Convention, n’intimida personne et servit de prétexte aux ennemis de la démocratie constituée ; ils prirent la société tremblante sous leur égide, ils lui montrèrent du doigt les faux terroristes comme les Spartiates montraient aux enfants les ilotes ivres pour les dégoûter de l’ivresse.
Contentons-nous donc de ses fantômes couronnés, de sa démocratie à deux têtes, de ses courants bifurqués, de ses révolutions à double entente qui répondent au sourire de Démocrite et aux pleurs éternels d’Héraclite sur cette scène du monde livrée aux deux principes d’Oromaze ou d’Arimane, sans que l’on puisse le plus souvent discerner lequel d’entre eux est le mauvais génie. » Nous avons voulu citer, dans leur monstruosité expresse, les paroles de M. […] Les paroles qui commencent son livre sont d’un calme encore plus grand que leur clarté ; « une nature, dit-il, également indifférente à Dieu et à Satan, explique seule les libertés, les servitudes, les partis, les guerres et les révolutions.
J’étais bien sûr d’être d’accord sur les points principaux avec ces hommes d’autrefois, dont j’avais recueilli si souvent les paroles, quand ils s’exprimaient dans la familiarité sur cette nature singulière de génie qui, même après toutes les explications, était restée pour eux une sorte de problème.
Un autre élément très-positif de la fatalité, dans ces quatre journées glorieuses et sinistres de juin 1815, ç’a été la lenteur de rédaction et l’ambiguïté de parole du maréchal Soult comme major-général ; — ç’a été la circonspection morale des chefs, toujours braves et plus braves que jamais dans l’action, mais peu confiants désormais en la fortune, et qui, entre deux suppositions possibles, inclinaient toujours pour la plus défavorable, la plus fâcheuse et la plus timide : témoin Ney, Reille, Vandamme, d’Erlon, surtout Grouchy.
Le sot lieutenant frivole n’a, durant toutes les conversations où il apparaît, qu’une seule parole à la bouche, la Clélie.
Cela se pourrait pourtant, car on les a déjà blâmées sur parole.
Et puis, en paroles d’or et de soie, comme on dit, il nous les dévidera.
Sabbatier parmi ces héritiers compromettants, et nous en aurions presque le droit en lisant les paroles plus que sévères et les qualifications flétrissantes qu’il inflige à toutes doctrines littéraires et philosophiques qui ne sont pas les siennes.
Quand sir Walter Scott en viendra à la campagne d’Italie et à la correspondance de Bonaparte avec Joséphine, il comparera le style étincelant de ces lettres au langage d’un berger arcadien, et il ajoutera ces singulières paroles qu’on croirait entendre sortir des lèvres froncées d’une milady autour d’une table à thé : « Nous ne pouvons nous dispenser de dire que dans certains passages, qu’assurément nous ne citerons pas, cette correspondance offre un ton d’indélicatesse (indelicacy) que, malgré l’intimité du lien conjugal, un mari anglais n’emploierait pas, et qu’une femme anglaise ne regarderait pas comme l’expression convenable de l’affection conjugale. » Risum teneatis… Maintenat que nous avons un échantillon du XVIIIe selon sir Walter Scott, prenons une idée du tableau qu’il trace de la révolution francaise : « La définition du tiers état par Sieyes fit fortune, au point que les notables demandèrent que les députés du tiers fussent égaux en nombre aux députés de la noblesse et du clergé réunis, et formassent ainsi la moitié numérique des délégués aux États généraux. » Mais on sait que l’Assemblée des notables se prononça contre le doublement du tiers, et que le bureau présidé par Monsieur fut le seul qui vota pour cette mesure.
Galatin, également seul, luttait dans la Chambre des représentants ; si, avec l’autorité de son nom, de ses services passés, de sa parole exacte et judicieuse, il n’avait pas hâté le désabusement public et présenté une tête honorée aux suffrages des républicains longtemps épars, il est douteux que la volonté du peuple se fût dégagée et se fût fait jour : cette noble constitution, qui est comme l’honneur du monde, aurait succombé peut-être à l’incurable corruption qui s’y infiltrait dès sa naissance.
Lui seul entendra, chaque fois que le mot sera prononcé, certain sifflement de balle, certain amortissement de ce bruit dans la chair vivante, lui seul verra certaine grimace, certaine contorsion de l’homme qui meurt, certain geste indifférent du vieux soldat, certaine colère du vaincu, lui seul évoquera certain regard d’un ennemi rencontré dans une charge, certaine parole, certaine lumière, certain paysage : un monde d’impressions ressenties une seule fois par un seul homme surgira au son de deux syllabes banales.
Il s’agit du Père Hyacinthe : … Mes convictions personnelles n’ont pas à intervenir dans cette affaire ; j’étais allé là comme un Parisien désireux d’entendre une grande parole qui jadis fit courir tout Paris à Notre-Dame, et je n’ai trouvé qu’un comédien de talent.
Moi, je le laisserai ou je mourrai. » De même, lorsque le capitaine revient à Silvia, ils n’ont d’autres paroles à échanger entre eux que celles que prêtent à leurs personnages les auteurs des Ingannati : Regardez, messer Spavente, reconnaissez votre page, celui qui s’est fait votre serviteur si fidèle, si dévoué ; celle qui vous a aimé d’un amour si brave et si constant.
Je voudrais, en vous répondant, prononcer des paroles souriantes et de bon augure.
Je sais, depuis, maintenant, un nouveau livre où l’on peut pleurer, aux soirs noirs où c’est la jouissance désirée ; j’aurai la Mort d’Isabelle et ses ultimes paroles Floris, où, comme aux adieux de Wotan, toutes nos contraintes écorchées se fondront dans les sanglots, les sanglots de bénédiction qui sont, après le sommeil, le meilleur don des dieux mauvais aux hommes faibles.
Et quand, à son tour, Fontenelle explique la peine que Leibniz avait à parler « par la dose des choses qu’il avait dans la tête, et qui était beaucoup trop forte par rapport à la dose des paroles », que nous veut-il, sinon nous faire dégager une inconnue ?
Son âme, simple et profonde, ne put s’enfermer en ces formes créées par son esprit compliqué et puéril : il écrivit des Romances sans paroles.
Le segment cérébral, ajoute avec raison Lewes, possède les organes de la parole et les traits du visage par lesquels il peut communiquer à autrui ses sensations, le segment spinal n’a aucun moyen semblable, mais ceux qu’il a, il les emploie.
Là arrivent, tous les soirs, — car la bière vient du Grand Balcon, et la femme a le don capiteux de produire autour d’elle une certaine excitation de l’esprit et de mettre les imaginations en verve, — là arrivent le peintre Hafner, le plus bredouilleur des Alsaciens ; Valentin, le dessinateur de L’Illustration ; Deshayes, le petit maître aux tonalités grises, et le blond coloriste Voillemot, avec sa tignasse d’Apollon roussi, et Galetti, et le tout jeune Servin, et d’autres, et d’autres, et c’est toute la soirée un tapage et une débauche de paroles, que de temps en temps, solennellement, le maître de la maison réprime par un « Où te crois-tu !
Accomplissons notre tâche sur la terre, qui est d’inscrire en des paroles belles le rêve que fait l’homme à ce moment du temps infini, pour le transmettre à ceux qui nous succéderont.
Paroles et regards, tout est charme dans vous.
Vous m’aviez pourtant dit, lors du dernier renouvellement : Cette fois, vous pouvez compter sur moi, je n’ai qu’une parole !
Si mes scrupuleux et redoutables censeurs veulent prendre la peine de lire le second discours sur l’histoire ecclésiastique, par M. l’abbé Fleury, que personne, je pense, n’accusera d’impiété ; ils y trouveront au chapitre XVI, ces propres paroles : St.
Cette voix des hommes, qui n’est plus la parole que nous apprîmes à bégayer en naissant, nous cause une tristesse inexprimable.
» Contrairement à la parole de Notre-Seigneur aux Sadducéens, tendeurs de pièges : « Vous ne savez ni les Écritures ni la puissance de Dieu ; car, au jour de la résurrection, les hommes n’auront pas de femmes, ni les femmes de maris.
Pour la mettre au jour, il faut une notion claire et des paroles transparentes ».
II C’est Emerson qui avait écrit cette parole, commode aux historiens, que voilà congédiés tout à coup, renvoyés chez eux avec armes et bagages.
La haine, chez Macaulay, a beau être recouverte de ce vernis d’honorabilité (honorability) qui doit revêtir toutes les paroles d’un gentleman, on la sent circuler dans chaque mot qu’il écrit sur Jacques, vénéneuse comme du fanatisme refroidi.
» Ce fut lui qui, devenu l’argentier du roi, dit cette simple parole que l’Histoire a gardée : « Syre, tout ce que j’ay est vostre », et qui la fit suivre du fait, en versant une part de son immense fortune dans les finances de son pays.
Il couvrit parfois de sa parole la magnifique politique du grand homme profond qui était en train de faire une France monarchique avec les pièces et les morceaux de la féodalité.
Entre les femmes célèbres par le dévouement et l’amour, il n’y en a pas de plus grande que la veuve de Montmorency, mais sa vertu n’a pas eu d’ombre, et s’est ensevelie dans sa perfection. » Telles sont les pénétrantes paroles par lesquelles finit un volume qui nous prend l’âme avec une main tout à la fois puissante et douce, et dont on sent autour de son cœur l’empreinte longtemps.
Et vraiment peut-on dire à tort, quand on a lu cette histoire de France et ces claires paroles dans l’avertissement de l’édition de 1854 : « la philosophie de l’histoire est en mesure aujourd’hui de restituer au druidisme la part très considérable qui lui revient dans le développement de l’humanité, et au génie celtique une part plus grande dans le développement moral du moyen âge et de l’âge moderne » ?
Le portrait qu’il en trace n’est pas du xviiie siècle… On n’y a jamais peint dans cette manière juste, méprisante, inflexible : « Un singulier homme, ce jeune mari, — dit-il, — ce jeune souverain, que, hors la chasse et les chiens, rien n’intéressait, n’amusait, ne fixait, et que le cardinal — (le cardinal de Fleury) — promenait vainement d’un goût à un autre, de la culture des laitues à la collection d’antiques du maréchal d’Estrées, du travail du tour aux minuties de l’étiquette et du tour à la tapisserie, sans pouvoir attacher son âme à quelque chose, sans pouvoir donner à sa pensée et à son temps un emploi… Imaginez un roi de France, l’héritier de la régence, tout glacé et tout enveloppé des ombres et des soupçons d’un Escurial, un jeune homme, à la fleur de la vie et à l’aube de son règne, ennuyé, las, dégoûté, et, au milieu de toutes les vieillesses de son cœur, traversé des peurs de l’enfer qu’avouait, par échappées, sa parole alarmée et tremblante.
Nous les aurions adorés religieusement, si nous avions pu parvenir à les croire sur parole… Mais les songeries qui passent par un front ne sont pas plus des idées que les nuages qui passent ne sont des bas-reliefs de Phidias ».
III Et, en effet, on se demande si l’abbé Maynard a été autorisé par la famille à se mettre autant que Crétineau dans cette biographie de Crétineau ; car, sur ma parole !
Il dit positivement, dans sa confession d’auteur : « Les Russes ne se parlent qu’à « l’étranger ; en Russie, ils ne s’adresseraient pas une parole ».
Flourens, qui voudrait couvrir de sa tête tout entière, comme on couvre de sa poitrine celui qu’on aime, les erreurs de Buffon, ces erreurs qui sont souvent grandioses, — « et j’aime mieux, à tout prendre, une conjecture qui élève mon esprit qu’un fait exact qui le laisse à terre… J’appellerai toujours grande la pensée qui me fait penser. »« C’est là le génie de Buffon, ajoute-t-il encore, et le secret de son pouvoir, c’est qu’il a une force qui se communique, c’est qu’il ose et qu’il inspire à son lecteur quelque chose de sa hardiesse. » Et pourtant, est-ce que les paroles de M.
nous renverrons ceux qui croient à leurs paroles légères au livre de M.
Lacordaire, comme tous les artistes, et j’ai été tenté d’écrire, les artificiers de parole, est beaucoup moins écrivain qu’orateur.
Il croit, comme Littré et peut-être même avant Littré, que l’homme vient du singe, et voici ses propres paroles, recueillies par M.
L’Histoire n’a pas perdu une seule des paroles du soldat devenu prophète, et elles ont une beauté grandiose : « Dieu — dit-il — vous a frappé à la bouche, Sire (le couteau avait glissé, en remontant, jusqu’à la lèvre), parce que vous ne l’avez encore renié que débouché.
La femme qui a écrit ces terribles choses : L’Amour et la Mort, Le Positivisme, les Paroles d’un Amant, L’Homme à la Nature, La Nature à l’Homme, le Dernier Mot, Le Cri, est tout à la fois un monstre et un prodige, — un prodige par le talent et un monstre par la pensée.
Cet art, outre une imagination très vive et prompte à s’enflammer, supposait encore en eux des études très longues ; il supposait une étude raisonnée de la langue et de tous ses signes, l’étude approfondie de tous les écrivains, et surtout de ceux qui avaient dans le style, le plus de fécondité et de souplesse ; la lecture assidue des poètes, parce que les poètes ébranlent plus fortement l’imagination, et qu’ils pouvaient servir à couvrir le petit nombre des idées par l’éclat des images ; le choix particulier de quelque grand orateur avec qui leur talent et leur âme avaient quelque rapport ; une mémoire prompte, et qui avait la disposition rapide de toutes ses richesses pour servir leur imagination ; l’exercice habituel de la parole, d’où devait naître l’habitude de lier rapidement des idées ; des méditations profondes sur tous les genres de sentiments et de passions ; beaucoup d’idées générales sur les vertus et les vices, et peut-être des morceaux d’éclat et prémédités, une étude réfléchie de l’histoire et de tous les grands événements, que l’éloquence pouvait ramener ; des formules d’exorde toutes prêtes et convenables aux lieux, aux temps, à l’âge de l’orateur ; peut-être un art technique de classer leurs idées sur tous les objets, pour les retrouver à chaque instant et sur le premier ordre ; peut-être un art de méditer et de prévoir d’avance tous les sujets possibles, par des divisions générales ou de situations, ou de passions, ou d’objets politiques, ou d’objets de morale, ou d’objets religieux, ou d’objets d’éloge et de censure ; peut-être enfin la facilité d’exciter en eux, par l’habitude, une espèce de sensibilité factice et rapide, en prononçant avec action des mots qui leur rappelaient des sentiments déjà éprouvés, à peu près comme les grands acteurs qui, hors du théâtre, froids et tranquilles, en prononçant certains sons, peuvent tout à coup frémir, s’indigner, s’attendrir, verser et arracher des larmes : et ne sait-on pas que l’action même et le progrès du discours entraîne l’orateur, l’échauffe, le pousse, et, par un mécanisme involontaire, lui communique une sensibilité qu’il n’avait point d’abord.
Heureux si, averti par ces cheveux blancs, du compte que je dois rendre de mon administration, je réserve au troupeau que je dois nourrir de la parole de vie les restes d’une voix qui tombe, et d’une ardeur qui s’éteint. » Dans cette péroraison touchante, on aime à voir l’orateur paraître, et se mêler lui-même sur la scène.
Ne nous y trompons pas : bonnes ou mauvaises, c’est peut-être la première fois qu’on ait écrit des paroles de ce sentiment, de cet accent, de cette couleur. […] Il répond : — Par la parole. Mais comment l’homme a-t-il inventé la parole ? […] Julie, désespérée, se fait rendre sa parole par Saint-Preux. […] Ces dernières paroles sont fort belles.
Le seul qui nous soit antipathique est l’Homo loquax, dont la pensée, quand il pense, n’est qu’une réflexion sur sa parole. […] Tel est le processus de la parole. […] Alors, comme de la source, me paraîtraient couler naturellement les actions, les gestes et les paroles. […] Cousin, la pensée était tendue tout entière vers la parole, et la parole vers l’action. […] Ravaisson ; on échangea des paroles émues.
ma parole, je ne sais pas comment ils font… Mais, sérieusement, tenez-vous beaucoup à mon avis ? […] Sa figure s’assombrit, sa parole devint lente et grave. […] Non, c’est idiot, ma parole, idiot. […] monsieur, me dit-il, — et ses paroles sont lasses, et son air est très splénétique, — je vous en prie, ne me parlez pas littérature ! […] On dirait, ma parole, que les symbolistes de France ont pris le mot d’ordre à Bruxelles, à Liège, ou à Genève !
Nous reconnaissons les paroles de Léopold, ce sont celles que nous entendîmes près de la fontaine Pirène, c’est Le Cheval ailé sur l’Acrocorinthe. […] Le récit, vu d’un certain biais, est construit sur cette parole de l’Évangile que, si un aveugle conduit un autre aveugle, ils tomberont tous deux dans le précipice. […] Par une éducation patiente il l’éveille à la parole et à l’esprit. […] Mais quand j’écoute cette parole, je vous assure que je les vois. […] Aveugle elle a aimé la parole et l’âme du pasteur ; clairvoyante elle voit que cette parole et cette âme correspondent à la figure de Jacques.
Il la fait comparaître, et lit l’acte d’accusation ; il présente ensuite le plaidoyer des défenseurs, qui essayent d’excuser ses légèretés et ses indécences ; enfin, il prend la parole à son tour, et prouve que les raisonnements exposés ne s’appliquent pas au cas en question, que les écrivains inculpés ont travaillé avec effet et préméditation à corrompre les mœurs, que non-seulement ils ont employé des mots inconvenants, mais qu’ils ont à dessein et de propos délibéré représenté des choses inconvenantes ; qu’ils ont pris soin partout d’effacer l’odieux du vice, de rendre la vertu ridicule, de ranger l’adultère parmi les belles façons et les exploits obligés d’un homme de goût, que cette intention est d’autant plus manifeste qu’elle était dans l’esprit du temps, et qu’ils flattaient un travers de leur siècle. […] Il approuve la condamnation de Strafford ; il honore et admire Cromwell ; il exalte le caractère des puritains ; il loue Hampden jusqu’à l’égaler à Washington ; il n’a pas de paroles assez méprisantes et assez insultantes pour Laud ; et ce qu’il y a de plus terrible, c’est que chacun de ses jugements est justifié par autant de citations, d’autorités, de précédents historiques, de raisonnements, de preuves concluantes, qu’en pourrait amasser la vaste érudition de Hallam ou la calme dialectique de Mackintosh. […] Ces généreuses paroles partent du cœur ; la source est pleine, elle a beau couler, elle ne tarit pas ; dès que l’écrivain parle de la cause qu’il aime, dès qu’il voit se lever devant lui la Liberté, l’Humanité et la Justice, la Poésie naît d’elle-même dans son âme, et vient poser sa couronne sur le front de ses nobles sœurs. […] Je porterai volontiers le reproche d’être descendu au-dessous de la dignité de l’histoire, si je réussis à mettre sous les yeux des Anglais du dix-neuvième siècle un tableau vrai de la vie de leurs ancêtres1382. » Il a tenu parole.
Et je voyais autour de moi toute une hiérarchie sociale qui, prosternée aux pieds de ce Fils de Dieu, m’attestait la vérité de sa parole. […] Laissons, dis-je, à De Maistre son anathème contre la femme, qu’il termine par ces paroles : « Aucun législateur ne doit oublier cette maxime : Avant d’effacer l’Évangile, il faut enfermer les femmes ou les accabler par des lois épouvantables telles que celles de l’Inde. […] Là, sur des cadavres, règnent encore l’injustice, le mensonge, l’inégalité, la discorde ; le doute est gravé sur toutes ces pierres, et les paroles qui s’élèvent des tombeaux se combattent entre elles dans leur silence éternel, sans qu’il sorte de leur lutte aucune solution. […] Mais, je le reconnais, la poésie de la parole est venue fleurir dans vos ruines ; elle est venue, seule, célébrer des funérailles.
C’était le haut bavardage incontinent, le ruissellement de la parole tombant incessamment du sommet d’une tête fumante. […] Il se dépensait au café, au foyer des théâtres, partout où les hommes étaient rassemblés et où il pouvait ruisseler de paroles. […] Sa plume, rapide comme sa parole, ne laissait pas plus de trace que des mots évanouis. […] Il reste bien encore la Correspondance, qui viendra plus tard et qui parachèvera Diderot, esprit fait pour la correspondance comme pour le monologue, et pour les mêmes raisons, — la correspondance n’étant guères qu’un monologue écrit ; — mais, au lieu de la placer ici où elle devait être, les éditeurs, qui croient trouver leur compte à multiplier les volumes et à tarir, jusqu’à sa dernière goutte, le puits de paroles que fut Diderot, se sont mis à pomper dans l’Encyclopédie et à nous en tirer, un par un, tous les articles que Diderot, qu’on me passe le mot !
Ses paroles étaient, avec leur familiarité même, un peu augustes. […] Une âme si douce, aimable et tendre que ses paroles ont des inflexions câlines et des caresses amoureuses. […] Il imprime la collection de ses « œuvres complètes », comme s’il avait à jamais fini de prononcer une parole. […] Puis, les paroles de l’Écriture sont les riches symboles de vérités variées et nombreuses, dogmatiques et morales. […] Quelle parole !
Je suis si peu musicien que, si je m’avisais d’avoir une opinion sur l’œuvre nouvelle de Massenet, vous me ririez au nez et vous me diriez, comme Loulou à Stendhal : « Ta parole ? […] Nous apprenons que, fort heureusement, M. de Vogüé avait rapporté d’Orient le talisman d’Aladin, les paroles magiques qui font tomber les portes des harems et des palais enchantés, qu’à sa voix les dragons de la fable se sont évanouis en fumée, etc. […] Le poète se figure aimer, soigne et cultive cet amour, séduit et subjugue une femme de bien, se fait souffrir, la fait pleurer et la plante là en lui disant des choses désagréables tout cela sans lui avoir jamais adressé la parole et sans l’avoir effleurée du bout du doigt. […] » Hier, comme le grand diable (j’ai oublié son nom) recommençait sa plaisanterie habituelle, Marseille, de son balcon, a réclamé le silence et a laissé tomber ces paroles : « Ici, y a que le public et moi qu’est juge ! […] Cela prouve que nous sommes un très vieux peuple, et qui fut puissant par l’action et par la parole.
Nous nous révélons dans nos manières, que l’on connaît à nos paroles encore bien plus qu’à nos gestes ; une race ou un peuple se trahissent dans le caractère de la langue qu’ils parlent ; et une époque, enfin, se peint dans le choix de ses mots et dans le tour de ses phrases. […] Aucune parole qui fût plus éloquente n’était tombée même du haut de la chaire. […] Et — c’est une justice à lui rendre — il a tenu parole, il a prêché autrement, mais moins bien ; et de cette rage de nouveauté, dont il est un éloquent exemple, la suite est aussitôt ce qu’on pouvait prévoir : la décadence ou l’abaissement de tous les genres nobles ou élevés. […] V, 1864]. — D’une parole de Goethe [Cf. […] — Le Sermon sur l’unité de l’Église, 1681. — Comment ses origines parlementaires ; — son éducation de Sorbonne ; — une complaisance de sujet fidèle ou de bon Français ; — et l’idée qu’il se faisait du pape Innocent XI portaient Bossuet à l’attitude qu’il a prise à cette occasion. — Paroles caractéristiques de Joseph de Maistre dans son livre De l’Église gallicane [Liv.
Je promis à Briasson de me taire, et je lui ai tenu parole. […] Des colonnes de l’Église, dont j’ai l’honneur d’approcher, ont quelquefois juré sur ma seule parole. […] Dites, sur ma parole, que cette traduction, pleine d’harmonie et de la plus grande richesse d’expression, une des plus difficiles à faire en toute langue, est une des mieux faites dans la nôtre. […] Monsieur le chevalier, Je vous prie de vous rappeler la parole que vous m’avez donnée. […] Louis-René-Caradeuc de La Chalotais, procureur général au Parlement de Bretagne, celui qui porta la parole contre le duc d’Aiguillon, et qui fit un rapport contre les Jésuites.
Toutes ces paroles ne sont que rigoureusement justes appliquées à Charles Labitte, et celles-ci le sont encore241, que je détourne à peine : « Fidèle à la tradition, reconnaissant des aînés et même des maîtres (pour mieux le devenir à son tour), qu’il ressemblait peu à nos autres jeunes gens ! Ceux-ci savent tout du premier jour, ils ne reconnaissent personne, ils sont à eux-mêmes leur propre autorité : statim sapiunt, statim sciunt omnia, … ipsi sibi exempla sunt ; tel n’était point Avitus… » Nous pourrions continuer ainsi avec les paroles du plus ingénieux des anciens bien mieux qu’avec les nôtres, montrer cette ambition honorable que poursuivait notre ami, non point l’édilit comme Julius Avitus, mais la pure gloire littéraire qu’il avait tout fait pour mériter, et dont il était sur le point d’être investi… et honor quem meruit tantum.
A mesure qu’on avance dans le dix-huitième siècle, les règles se rétrécissent, la langue se raffine, le joli remplace le beau ; l’étiquette définit plus minutieusement toutes les démarches et toutes les paroles ; il y a un code établi qui enseigne la bonne façon de s’asseoir et de s’habiller, de faire une tragédie et un discours, de se battre et d’aimer, de mourir et de vivre : si bien que la littérature devient une machine à phrases, et l’homme une poupée à révérences. […] Ils murmurent éternellement et leurs feuilles bruissantes semblent sans relâche chuchoter les mêmes paroles.
Nous n’avons plus d’amis à Naples, nos parents y sont nos ennemis ; et, à cause de ces circonstances, chacun craint de nous tendre la main… Mon angoisse est telle, excellente dame, que le désordre de mon esprit se communique à mes paroles ; c’est à Votre Excellence à se représenter l’excès des peines qu’il m’est impossible d’exprimer ! […] La couleur de ses cheveux et de sa barbe tenait le milieu entre le noir et le blond, dans une telle proportion cependant, que le sombre l’emportait sur le clair, mais que ce mélange indécis des deux teintes donnait à sa chevelure quelque chose de doux, de chatoyant et de fin ; son front était élevé et proéminent, si ce n’est vers les tempes, où il paraissait déprimé par la réflexion ; la ligne de ce front, d’abord perpendiculaire au-dessus des yeux, déclinait ensuite vers la naissance de ses cheveux qui ne tardèrent pas à se reculer eux-mêmes vers le haut de la tête, et à le laisser de bonne heure presque chauve ; les orbites de l’œil étaient bien arqués, ombreux, profonds et séparés par un long intervalle l’un de l’autre ; ses yeux eux-mêmes étaient grands, bien ouverts, mais allongés et rétrécis dans les coins ; leur couleur était de ce bleu limpide qu’Homère attribue aux yeux de la déesse de la sagesse et des combats, Pallas ; leur regard était en général grave et fier, mais ils semblaient par moments retournés en dedans, comme pour y suivre les contemplations intérieures de son esprit souvent attaché aux choses célestes ; ses oreilles, bien articulées, étaient petites ; ses joues plus ovales qu’arrondies, maigres par nature et décolorées alors par la souffrance ; son nez était large et un peu incliné sur la bouche ; sa bouche large aussi et léonine ; ses lèvres étaient minces et pâles ; ses dents grandes, régulièrement enchâssées et éclatantes de blancheur ; sa voix claire et sonore tombait à la fin des phrases avec un accent plus grave encore et plus pénétrant ; bien que sa langue fût légère et souple, sa parole était plutôt lente que précipitée, et il avait l’habitude de répéter souvent les derniers mots ; il souriait rarement, et, quand il souriait par hasard, c’était d’un sourire gracieux, aimable, sans aucune malice et quelquefois avec une triste langueur ; sa barbe était clairsemée et, comme je l’ai déjà dépeinte, d’une couleur de châtaigne ; il portait noblement sa tête sur un cou flexible, élevé et bien conformé ; sa poitrine et ses épaules étaient larges, ses bras longs, libres dans leurs mouvements ; ses mains très allongées mais délicates et blanches, ses doigts souples, ses jambes et ses pieds allongés aussi, mais bien sculptés, avec plus de muscles toutefois que de chair ; en résumé, tout son corps admirablement adapté à sa figure ; tous ses membres étaient si adroits et si lestes que, dans les exercices de chevalerie, tels que la lance, l’épée, la joute, le maniement du cheval, personne ne le surpassait.
Ceci n’est point amour en l’air ni paroles de romances. » Et il lui fit, soit de vive voix, soit par lettres (car ces fâcheuses idées lui revenaient plus aigrement quand il était seul) des scènes de jalousie. […] Sans être précisément jolie, Ondine était d’une physionomie douce, « avec le regard un peu maladif. » Elle était, comme sa mère, réfractaire à la toilette. « Mme Valmore avait la parole un peu traînante et larmoyante, sa fille avait plus de décision et de netteté dans la repartie ; elle plaisait au premier abord. » En 1842, je pense (elle avait alors vingt et un ans), Ondine entra comme institutrice dans un pensionnat de demoiselles qui était situé rue de Chaillot.
Sa parole semblait presque trop « élégante », et sa diction apprêtée comme celle d’un clubman qui aurait reçu les leçons d’un sociétaire de la Comédie-Française. […] À ne considérer (s’il se peut) que la forme, j’ai eu l’impression que sa parole, directe, énergique, vibrante — merveilleusement claire — luttait sans désavantage contre l’énorme flot, épandu en nappe, de l’éloquence de M.
J’ai pris la parole et j’ai dit que les Anglais avaient eu bon marché de ce pays-là par la mauvaise manœuvre ou plutôt la trahison de Bigot74. […] [NdA] Nous surprenons ici Bernardin de Saint-Pierre s’essayant à faire sa cour à un roi, et un peu sous le charme d’une parole comme l’était Mme de Sévigné à pareille fête.
Dans la construction de ses contes ou de ses poèmes, il n’envisage pas chaque acte et chaque parole comme un hasard que rien ne nécessite et qui ne conditionne aucun résultat. […] Nous entrons dans l’éther astral où s’échangent les douces paroles de Monos et d’Una, d’Oinos et d’Agathos, d’où descendent le démon de Silence, la fée de l’Ile, d’où vint le fantôme informe et indéfini qui, par un temps de pestilence, contrista les sept buveurs de Ptolémaïs.
…………………………………………………… Fais que dans mes récits, déguisant leur faiblesse, La parole de Dieu conserve sa noblesse ! […] Alors un saint effroi venant saisir mon cœur, À genoux j’écoutai sa divine parole.
Du reste, et c’est par là que je termine, j’ai déjà rapproché de Mirabeau l’auteur des Fleurs du mal, je le rapproche de Dante, et je réponds que le vieux Florentin reconnaîtrait plus d’une fois dans le poète français sa fougue, sa parole effrayante, ses images implacables et la sonorité de son vers d’airain. […] Une sainte, trois fois canonisée par l’Église, sainte Brigitte, a bien osé nous montrer Jésus-Christ offrant à Satan une grâce pleine et entière, sous la condition d’une parole de repentir, et l’invincible orgueilleux se refusant à ces charges de la clémence divine !
La Tentation de saint Antoine étant une bataille de paroles et de gestes avec tous les diables des sept péchés capitaux, quel excellent sujet pour dire ou pour faire toutes les porcheries ! […] Ce qui révolte seulement bien plus que l’odieuse crudité des paroles, c’est la froideur avec laquelle on les écrit ou on les fait dégoiser à ses personnages.
Avec un geste de triomphe, il montre le ciel où il va monter par la mort et l’amour, et c’est ainsi que les paroles du conteur sont magnifiquement accomplies : « Au veu du geste et de la face brillante de cet homme de couraige, la connestable feut férue en plein dans le cueur. » C’est aussi dans ce Conte, où l’accent de Shakespeare alterne avec celui de Rabelais, que, sur les paroles du conteur, « l’espée des marys est un beau trespas de guallanterie, s’il y a de beaulx trespas », Doré en invente un de ce fantastique corporel qui est l’outrance d’une réalité gigantesque.
Non moins instructives sont celles de Bagley sur l’audition de la parole ; elles établissent avec précision que nous n’entendons qu’une partie des mots prononcés. […] KUSSMAUL, Les troubles de la parole, Paris, 1884, p. 233 ; Allen STARR, Aprazia and Aphasia, Medical Record, octobre 1888. — Cf.
Le vol sublime de la Marseillaise traîne malheureusement après lui des paroles ineptes. […] Rivarol, paresseux de génie qui mourut prématurément à l’époque où il allait rassembler dans une œuvre les étincelles de ce génie, nous est connu, à l’antique, plus par des paroles dites que par des paroles écrites. […] Le soldat de l’Empire n’a pas eu la parole officielle, ou ne l’a eue qu’à condition de conniver au décor et au convenu. […] Cette parole, sous l’Empire, n’avait pas d’expression écrite, et se dissipait avec la fumée des bivouacs. […] Depuis quatre ans Lamartine s’est rendu à la Chambre maître de l’art de la parole.
paroles presque prophétiques, et comme s’il avait déjà sa fin en perspective !
Cette religion évangélique purement morale, dans laquelle le prêtre n’est plus qu’un officier de bonnes mœurs et un agent de bienfaisance ; où l’on espère passionnément en l’autre vie, même quand on n’en est pas très sûr, mais parce que c’est une croyance utile et salutaire ; où le curé en cheveux blancs, qui ne sait que donner et pardonner, ressemble à un bon père de famille souriant selon la maxime que « l’air gracieux et serein doit être la parure de l’homme vertueux » ; cette religion du curé de Mélanie et à la Boissy-d’Anglas, religion de tolérance, de doute autant que de foi, et où l’arbitre du dogme ne trouve à dire à son contradicteur dans la dispute que cette parole calmante : « Je ne suis pas encore de votre avis », comme s’il ne désespérait pas de pouvoir changer d’avis un jour ; ce théisme doucement rationalisé et sensibilisé, à ravir un Bernardin de Saint-Pierre et à attendrir un Marmontel, n’est pas du tout la religion de Fénelon, comme on l’a souvent appelé, mais c’est bien la religion de l’abbé de Saint-Pierre.
On contemple cet homme au flanc blessé, comme il s’appelle quelque part, saignant, mais debout dans son armure, et toujours puissant dans sa marche et dans sa parole.
oissonade cette fine parole du Comique ancien : « Non, tu ne me persuaderas pas, non, quand même tu me persuaderais. » L’interruption des études causée en France par la Révolution y ramena une sorte de renaissance ; l’antiquité un moment refoulée et comme anéantie reparut avec un éclat et une autorité qu’elle n’avait pas eus à la veille de la catastrophe.
je n’en serai pas jalouse ; mais je souffrirai de ne pas lui connaître un cœur tel que le mien. » Et comme ils s’oubliaient dans ces paroles et dans leurs mutuels témoignages, Lucrezia répondit à son ami, qui craignait quelque surprise : « Oh !
Lorsque l’auteur de Simiane nous montre Juliette s’enivrant des douces paroles amoureuses dont la musique se môle à l’oscillation du bateau, quand il nous murmure un peu longuement quelques-unes de ces tendresses infinies : « A quoi servirait au ciel d’être la plus étincelante merveille qui soit sortie des mains du créateur, s’il ignorait lui-même sa beauté ?
Lucien insiste, et lui dit : ………………… Our doubts are traitors ; And make us lose the good, we oft might win, By fearing to attempt………………… « Nos doutes sont des traîtres qui nous font perdre le bien que nous pourrions faire, en nous détournant de l’essayer. » Qui peut avoir vécu dans une révolution, et n’être pas convaincu de la vérité de ces paroles !
Toutes les impressions s’atténuent ; le parfum est si faible que souvent on ne le sent plus ; à genoux devant leur dame, ils chuchotent des mièvreries et des gentillesses ; ils aiment avec esprit et politesse ; ils arrangent ingénieusement en bouquets « les paroles peintes », toutes les fleurs « du langage frais et joli » ; ils savent noter au passage les sentiments fugitifs, la mélancolie molle, la rêverie incertaine ; ils sont aussi élégants, aussi beaux diseurs, aussi charmants que les aimables abbés du dix-huitième siècle : tant cette légèreté de main est propre à la race, et prompte à paraître sous les armures et parmi les massacres du moyen âge, aussi bien que parmi les révérences et sous les douillettes musquées de la dernière cour !
Il représente un sage qui, poursuivi par un fou, le flatte de belles paroles menteuses, et tout doucereusement « le fait échiner et assommer » ; il trouve l’invention bonne et nous conseille de la pratiquer.
Mais si l’on considère de l’humanité son âme, son intelligence, sa moralité, sa destinée évidemment supérieure à cette vie et à cette mort entre lesquelles elle s’agite, sa connaissance de Dieu, l’hommage qu’elle rend à ce maître suprême de ses destinées individuelles ou collectives, la transition entre le fini et l’infini dont elle paraît être le nœud par sa double nature de corps et de pensée, sa conscience, faculté involontaire, révélation, non de la vérité, mais de la justice, son instinct évidemment religieux, son inquiétude sacrée qui lui fait chercher son Dieu, avant tout créature sacerdotale, chargée spécialement par l’Auteur des êtres de lui rapporter en holocauste les prémices de ce globe, la dîme de l’intelligence, la gerbe de l’autel, l’encens des choses créées, la foi, l’amour, l’hymne des créations muettes, la parole qui révèle, le cri qui implore, l’obéissance qui anéantit le néant devant l’Être unique, le chant intérieur qui célèbre l’enthousiasme, qui soulève comme une aile divine l’humanité alourdie par le poids de la matière, et qui la précipite dans le foyer de sa spiritualité pour y déposer son principe de mort et pour y revêtir d’échelons en échelons sa vraie vie, son immortalité dans son union à son principe immortel !
Et ce vieux capitaine a tant de finesse native, tant d’expérience accumulée, il a tant fait pendant soixante ans pour faire jouer les ressorts des âmes de ses soudards, pour saisir ses supérieurs aussi par les propriétés de leur humeur, qu’en racontant sa vie, il dépasse sans y songer la couche superficielle des faits historiques ; il plonge à chaque moment dans les consciences, les découvre dans les actes, les gestes, les paroles ; il se découvre lui-même à nous jusqu’au fond de son être intime.
Comme un grand chien noyé dans les ombres d’Hécate, Et puis tu fus noyer ta pensée délicate Dans la nuit, de la parole et du geste, complètement.
Mais alors que d’autres se crurent quittes envers l’art et envers eux-mêmes quand ils eurent poussé tel quel le cri arraché à leur chair sanglante par le hasard des heures mauvaises, Leconte de Lisle se haussa toujours jusqu’à une parole d’humanité universelle et voulut que toute glose devint inutile en éliminant de ses poèmes une allusion indiscrète aux événements particuliers qui leur avaient donné naissance, et, comme il refusait fièrement d’avertir et d’apitoyer, on déclara par arrêt sommaire que ses strophes étaient dénuées de sens et indigentes d’émotion.
» Cette parole semble bien indiquer combien est réduit le rôle de l’autorité.
» Un jour, il accompagne Mme d’Épinay dans une visite qu’elle rend au précepteur de son fils, et, comme on cause de la manière dont l’enfant doit être élevé, Duclos, avec sa brusquerie habituelle, lance tout à coup ces paroles : « N’allez pas faire la bêtise de lui dire du mal des passions et des plaisirs ; j’aimerais autant qu’il fût mort que condamné à n’en pas avoir. » Rousseau va plus loin encore.
Tout cela pourtant est voué par devoir et par goût à la parole et à l’éloquence.
On lit dans la Correspondance, à propos de deux livres d’amis, ces paroles : « L’un a le charme et l’autre la force.
Pour beaucoup de trembleurs furieux qui ont la parole en ce moment, ces réformateurs sont les ennemis publics.
Il peut donc arriver que les neveux rejettent enfin comme une erreur des dogmes philosophiques, que leurs ancêtres auront regardez long-temps comme la verité, et qu’eux-mêmes ils avoient cru tels sur la parole de leurs maîtres.
Que je comprends bien cette parole d’un jeune écrivain plein de sève et de fougue, qui était venu passer six mois dans un département du Midi, six mois de commerce journalier avec des gens qui ne hasardent jamais une idée sans s’être assurés qu’elle a pour elle la prescription : « Si je devais rester ici trois mois de plus, je n’aurais plus la force de produire une pensée. » C’est grâce à la centralisation — maudite et honnie — que sont possibles ces hardies innovations où se retrempent les littératures fatiguées.
Les uns et les autres ne prennent d’abord la critique que comme un pis-aller et se promettent bien de lui manquer de parole à la première occasion ; mais ici commence l’enchantement.
Impiété à part, ils ont vu clair ; et par cette audacieuse parole, la tendance universelle a été montrée dans sa dernière profondeur.
Voici un livre d’observateur sur le vif, de voyageur en dehors des livres, d’homme qui a fait le sien à la sueur de son front et à la poussière de ses sandales, qui a vécu dix ans dans le pays dont il parle, plongé dans les difficultés de la langue de ce pays et dans le secret de ses mœurs, et qui, de la plus haute moralité, — de cette moralité de prêtre qui donne à la parole humaine, toujours suspecte quand elle nous revient de si loin, l’autorité qu’elle doit avoir pour être acceptée, — nous apporte sur la Chine un de ces renseignements, éclairés et complets, tels qu’on n’en avait pas revu depuis la publication des Lettres édifiantes.
Circonvenue par des gouvernements lâchement et doctement impies, lesquels n’osaient ni ne voulaient s’opposer à l’impiété audacieuse de leurs peuples, la papauté, en supprimant l’Ordre de Jésus, avait non seulement coupé son bras droit victorieux, mais elle avait par cette mutilation, qui, sans la grande parole du Sauveur, eût été peut-être un suicide, donné courage et foi en eux-mêmes aux ennemis de l’autorité divine, et prêté les deux flancs du monde aux révolutions.
Accablante parole !
Nous verrions que si ces états passés ne peuvent s’exprimer adéquatement par des paroles ni se reconstituer artificiellement par une juxtaposition d’états plus simples, c’est parce qu’ils représentent, dans leur unité dynamique et dans leur multiplicité, toute qualitative, des phases de notre durée réelle et concrète, de la durée hétérogène, de la durée vivante.
Malgré les orages de la liberté, les grands intérêts, et le plaisir de gouverner par la parole un peuple libre, il n’y eut pas un orateur qu’on pût citer avant Caton ; lui-même était encore hérissé et barbare.
Ces signes étaient, si je l’ose dire, des paroles réelles, et la nature entière était la langue de Jupiter.
Quelles vaines paroles, quelles misérables folies ont passé comme un vent funeste entre nous deux ? […] Mais Lydia, ayant cru aux belles paroles de Beppo et s’étant mise à l’aimer, mourrait de lui avoir servi de jouet. […] Le charme des mélodies absout l’impiété des paroles. […] Elle s’en veut d’avoir suivi le bel étranger aux douces paroles, l’élégant et paresseux jeune homme à la beauté de femme. […] Il a des paroles, — bien simples pourtant, — qui viennent, on le dirait, de plus loin que lui.
L’écriture qui ne prend pas de près contact avec la parole se dessèche comme la plante sans eau. […] Et puis la critique spontanée ne consiste pas seulement dans les conversations, dans la parole auditive, mais dans ces succédanés de la parole que sont les lettres, les notes personnelles. […] C’est lorsqu’il s’agit des arts mêmes de la parole, à savoir l’éloquence et surtout le théâtre. […] Aristophane, prenant la parole dans la parabase des Acharniens, propose ceci : « Il faut des procès. […] Sacrilège qui ne croira comme parole d’Évangile l’affirmation du critique des Évangiles.
Toute autre amitié que celle-là serait trompeuse, légère, bonne pour un temps, et bientôt épuisé ; elle mériterait qu’on lui appliquât la parole sévère du saint auteur de l’Imitation : “Noli confidere super amicos et proximos, nec in futurum tuam differas salutem, quia citius obliviscentur tui homines quam æstimas. […] « Je vous tiens parole, mon cher Sainte-Beuve, plus tôt que je ne comptais. […] Viguier, l’un des maîtres les plus distingués et les plus délicats de l’ancienne École normale, à qui j’avais dédié l’une des pièces (la IIe) du Recueil, après m’avoir remercié cordialement, après m’avoir dit : “Ce n’est pas un livre, c’est encore cette fois une âme vivante que vous m’avez fait lire ; telle est votre manière : entre votre talent et votre manière morale il y a intimité” ; ajoutait ces paroles que j’aurais dû peser davantage et dont j’ai vérifié depuis la justesse : « Voilà donc une phase nouvelle, un autre degré de l’échelle poétique et morale.
. — « Je pensais toujours au pays, et je ne croyais pas qu’il y eût de jolies filles sans bleues et sans jupes nattes tombant sur les épaules. » — Elle, c’est une effrontée, une coquette jusqu’à la brutalité ; « elle s’avançait eu se balançant sur ses hanches comme une pouliche du haras de Cordoue. » D’abord elle ne lui plaît pas ; il se sent trop loin avec elle de toutes les choses de son pays ; « mais elle, suivant l’usage des femmes et des chats qui ne viennent pas quand on les appelle et qui viennent quand on ne les appelle pas, s’arrêta devant moi et m’adressa la parole. » Ses premières paroles sont des railleries ; puis la rencontre de ces volontés dures et frustes toutes deux, hostiles au fond, se résume dans un geste qui vaut une action : « Prenant la fleur de cassie qu’elle avait à la bouche, elle me la lança, d’un mouvement du pouce, juste entre les deux yeux. […] Avant que l’homme eût eu le temps de reprendre la parole, elle ajouta : — Je ne crois pas.
Donc la parole est à l’universitaire. […] Commentant cette proposition, Paul Éluard d’écrire : La poésie purifiera les hommes, tous les hommes, toutes les tours d’ivoire seront démolies, toutes les paroles seront sacrées, et, ayant enfin bouleversé la réalité, l’homme n’aura plus qu’à fermer les yeux pour que s’ouvrent les portes du merveilleux v. […] Le même Français se plaît à répéter urbi et orbi que la parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée. […] Mais laissons la parole à André Breton : Parler de Dieu, penser à Dieu, c’est à tous égards, donner sa mesure. […] Ainsi, tourne-t-elle en rond, nourrie de mythes les plus miteux, elle qui, active pourrait enfin rendre possible une vie qui ne serait plus, en faits et gestes, paroles et pensées, la parodie grotesque de ce qui fut.
Dante a une vision, il est transporté hors de notre petit monde éphémère dans les régions éternelles ; il en voit les tortures, les expiations, les félicités ; il est troublé d’angoisses et d’horreurs surhumaines ; tout ce qu’une imagination furieuse et raffinée de justicier et de bourreau peut inventer, il le voit, il le subit, il en défaille ; puis il monte dans la lumière ; son corps n’a plus de poids ; il s’envole, involontairement attiré par le sourire d’une dame rayonnante ; il entend les âmes qui sont des voix et des mélodies flottantes ; il voit des chœurs, une grande rose de lumières vivantes qui sont des vertus et des puissances célestes ; les paroles sacrées, les dogmes de la vérité retentissent dans l’éther. […] Elle-même n’est d’abord que la fête religieuse, à la fois perfectionnée et réduite, transportée de la place publique dans l’enceinte fermée d’un théâtre, une succession de chœurs coupés par le récit et par la mélopée d’un personnage principal, analogue à un Evangile de Sébastien Bach, aux Sept Paroles de Haydn, à un oratorio, et une messe de la Sixtine dans laquelle les mêmes personnages chanteraient les parties et feraient les groupes. […] Et cependant de loin en loin nous entendons un accent de ces voix vibrantes ; nous voyons comme en un éclair l’attitude grandiose du jeune homme couronné43 qui se détache du chœur pour dire les paroles de Jason ou le vœu d’Hercule ; nous devinons son geste court, ses bras tendus, les larges muscles qui s’enflent sur sa poitrine ; nous retrouvons ça et là un lambeau de la pourpre poétique, aussi vif qu’une peinture déterrée hier à Pompéi. […] Selon une parole de Pindare, « les dieux étaient amis des jeux », et l’on ne pouvait mieux les honorer que par ce spectacle. — Le quatrième jour, la procession dont la frise du Parthénon nous a conservé l’image se mettait en marche ; en tête étaient les pontifes, des vieillards choisis parmi les plus beaux, des vierges de famille noble, les députations des villes alliées avec des offrandes, puis des métèques avec des vases et des ustensiles d’or et d’argent ciselé, les athlètes à pied, ou sur leurs chevaux, ou sur leurs chars, une longue file de sacrificateurs et de victimes, enfin le peuple en habits de fête. […] Platon, dans le Théagès, dit, en parlant d’un homme vertueux qui discourt sur la vertu : « Dans l’harmonie merveilleuse de ses actions et de ses paroles, on reconnaît le mode dorien, le seul qui soit véritablement grec. » 48.
Le romantisme est lyrique, éloquent, pathétique, fastueux, débordant de paroles, d’images et de cadences. […] Douloureuse parole, qui ouvre à l’âme des abîmes de pensées, et nous reporte malgré nous vers ces époques fatales des Symmaque et des Synésius. […] C’est un aveu d’impuissance, voilé sous des paroles de condamnation et de déclaration de guerre. […] Le questionné ne manquait jamais de répondre par un grand flux de gestes et paroles de surprise, d’acquiescement, de promesse. […] Je profanerais les choses sacrées, je profanerais le langage même, si j’insistais dans mes paroles sur la beauté des lettres à sa mère, si je sondais la source des larmes que j’ai versées en les lisant.
Leur roi (Louis XV) est la taciturnité même, Mirepoix est une momie ambulante, Nivernais a autant de vie à peu près qu’un enfant gâté malade… Si j’ai la goutte l’année prochaine, et qu’elle me mette tout à fait à bas encore une fois, j’irai à Paris pour être à leur niveau ; quant à présent, je suis trop fou pour leur tenir compagnie. » Prenez ces paroles pour ce qu'elles sont, pour une boutade, mais retenons-en quelque chose. […] Les paroles et la musique sont de M. le duc de Nivernais… Pour faire concevoir le charme de ce joli petit ouvrage, il faudrait l’avoir vu représenter avec tout l’intérêt qu’inspiraient la présence du prince et celle de l’auteur.
Si de telles législations étaient adoptées sur parole par les prolétaires du socialisme, il ne resterait aux veuves, aux orphelins, aux pères et aux mères survivants qu’à adopter le suicide en masse après la mort du propriétaire, et de se coucher sur le bûcher du chef de la famille pour périr au moins ensemble sur les cendres du même foyer ! […] C’est la société politique, diverse dans ses formes, qui prend la parole et qui parle seule.
Le soleil se couchait dans la mer de Chypre, mes regards planaient sur la verte plage de Saïde ; la chaîne du Liban chargé de lourds nuages noirs se prolongeait vers le nord ; ma pensée errait dans cette immensité, et les accents prophétiques que je venais d’entendre, échappés à une femme revêtue du caractère et presque du costume des anciennes sibylles, ces paroles solennelles disaient à mes impressions quelque chose de sauvage et d’imposant. […] Imitez les Arabes ; au moins chez eux la parole d’un homme ne change et ne trompe jamais… « Et ce pauvre, colonel Boutin, que n’ai-je pas fait pour prévenir ses malheurs ?
La mère se leva et, s’avançant pour prendre la parole, me dit en rougissant et, avec une pudeur visible dont l’heure, l’indiscrétion et l’épuisement étaient l’excuse, qu’elles étaient là à une heure si indue non pour demander, mais pour m’apercevoir de loin à l’heure du déjeuner où je sortirai du château pour venir avec ma famille et ma société goûter un moment la fraîcheur de cette salle d’arbres et le loisir du milieu du jour. […] Je suis rentré dans mon obscurité natale sans redemander la parole.
Voltaire s’offrit pour porter au jeune roi des paroles secrètes de paix. […] Il n’adressa jamais la parole à son chambellan ; son esprit tout sensuel ne s’élevait pas à la hauteur d’une idée, il n’aimait de la royauté que ses vices, une réforme aurait dégradé le trône à ses yeux.
Tout ce qui est sorti de la plume de Descartes est marqué de cette exactitude qui, selon son jugement, a manqué à Sénèque, et qui consiste dans le rapport parfait des paroles aux pensées et dans le choix, parmi les pensées, de celles qui peuvent servir de preuves à un raisonnement. […] Toutes ses paroles sont exclusivement pour l’idée ; elles sont nécessaires, par conséquent parfaites.
Le grand roi daigne lui prodiguer des sourires et ces paroles obligeantes dont les courtisans étaient si avides et si rarement honorés. […] Mais trève à ces répercussions que la vie économique exerce sur les écrits et les paroles des hommes !
Il ne faudrait pas croire, cependant, que cette non-répétition des paroles nuit au développement symphonique de la pensée musicale ; elle y aide au contraire et en accentue la portée. […] Dans sa Messe des Morts, restée si moderne, malgré son âge vénérable de près d’un demi siècle déjà (1840), le début de l’Agnus est conforme à la conclusion du morceau précédant, tandis que, au milieu de ce Final, le compositeur ramène la seconde moitié du premier morceau, le Te decet Hymnus même, en dépit de l’ordre du texte rituel, avec les mêmes paroles de cette partie de l’Introitus.
Le poète Hugo ne tint aucun compte des paroles de ce poète qui s’appelait l’Arioste. […] Les paroles qu’Hugo met dans sa bouche sont des cris, et encore il y en a trop.
Dans l’oraison funèbre de mon père, est-ce à moi ou au cardinal officiant que le prédicateur adressera la parole ? […] « Madame de Castries était un quart de femme, une espèce de biscuit manqué, extrêmement petite, mais bien prise, et aurait passé par un médiocre anneau ; ni derrière, ni gorge, ni menton ; fort laide, l’air toujours en peine et étonné ; avec cela une physionomie qui éclatait d’esprit et qui tenait encore plus parole. » Il les palpe, il les retourne, il porte les mains partout, avec irrévérence, fougueux et rude.
Seulement qu’en lisant ces pages, en entendant ces paroles qui brusquent parfois le papier, on n’oublie pas d’y mettre l’animation de la gloire, le sourire brillant de l’esprit et la grâce irrésistible de la jeunesse.
Il y portait à la fois un sentiment dont plus d’un se targue en paroles, mais qui, sincère chez lui et profond, était de plus constant et fixe jusqu’à la manie, le désir d’en faire profiter les autres et d’être utile au public.
La pitié était un sentiment pénible et même insupportable à son âme. » Un autre jour, quatre ans plus tard, la Cour étant à Moscou, Catherine eut à entrer dans les appartements du grand-duc pour remettre la paix et le bon ordre parmi ses gens, avec qui il avait l’habitude de boire, qu’il traitait de pair à compagnon, et qu’ensuite il rossait à coups de bâton ou de plat de sabre sans pouvoir les réduire, tandis qu’elle, d’ordinaire, elle y réussissait avec une parole ; et il se voyait quelquefois obligé de recourir à elle pour se tirer d’aflaire.
Ce sont quelques-unes de ses paroles mêmes.
Je viens de lire ses Lettres posthumes, publiées par un de ses amis et disciples, l’abbé Perreyve, qui semble lui avoir emprunté quelque chose de sa parole et de son glaive : il faut voir avec quelle fermeté, avec quelle certitude le panégyriste enflammé lui décerne son titre de saint, lui assigne son rang et son rôle d’apôtre, et le propose pour modèle aux jeunes générations catholiques de l’avenir.
Aux époques où l’humanité brise les liens qui l’unissaient sympathiquement à ce qui l’entoure, et où ses propres parties éparses luttent et se dévorent entre elles, quand la plus grande ardeur de destruction est calmée, une anxiété profonde succède ; le malaise moral et la misère matérielle rongent le corps social par sa double extrémité ; un vague et confus besoin d’association se fait sentir et s’exhale en gémissements mal définis, en mouvements désordonnés ; les uns ont faim de pain, les autres ont soif de parole ; tous sont malades et aspirent à la vie.
il a vieilli dans les affaires sans y prendre une idée, sans atteindre à un résultat, cependant il se croit l’esprit des places qu’il a occupées ; il vous confie ce qu’ont imprimé les gazettes ; il parle avec circonspection même des ministres du siècle dernier ; il achève ses phrases par une mine concentrée, qui ne signifie pas plus que les paroles ; il a des lettres de ministres, d’hommes puissants, dans sa poche, qui lui parlent du temps qu’il fait, et lui semblent une preuve de confiance ; il frémit à l’aspect de ce qu’il appelle une mauvaise tête, et donne assez volontiers ce nom à tout homme supérieur ; il a une diatribe contre l’esprit à laquelle la majorité d’un salon applaudit presque toujours, c’est, vous dit-il, un obstacle à bien voir que l’esprit, les gens d’esprit n’entendent point les affaires.
On devient capable de sentir qu’on ne comprend pas, ou qu’on ne comprend pas tout ; on devient incapable de se contenter des fausses clartés et des à peu près ; on devient habile à distinguer la voix intérieure qui part du fond de nous, de la parole que nous transmettent l’EIzévir et le Didot.
Votre parole, soit dans le récit, soit dans le dialogue, coule et s’épanche comme une fontaine publique.
L’action proprement dite, l’action directe sur les hommes, par la parole ou par le gouvernement, il l’aime et il l’a recherchée.
Que ses paroles sont insinuantes & se gravent profondément !
Le don de la parole devient pour eux le lien de leurs cœurs, ils s’entendent, se préviennent & se perfectionnent l’un par l’autre.
On raconte que Cicéron proposait parfois des défis à Roscius à qui rendrait le mieux une même pensée et avec plus d’éloquence, l’un avec le seul geste et l’autre avec la parole.
Nacque in quel mentre voglia alle fanciulle della villa di voler ballare, e cosi fatta bellissima radunata di donne e d’huomini ballarini, cominciossi il ballo al suono di bonissimo stromento : e, ballatosi alquanto, la moglie del detto vecchio geloso finge col marito di volere un suo servitio fare, alle cui parole trovandosi presente la donna, che la casa al suo amante prestata haveva, con licenza del marito in casa sua la condusse.
Un certain nombre de disciples s’étaient groupés autour de lui, partageant sa vie et méditant sa sévère parole.
On prenait note de ses paroles pour invoquer contre lui les lois d’une théocratie intolérante, que la domination romaine n’avait pas encore abrogées 998.
Lemoine, la Physionomie et la Parole, ch.
Sa rencontre avec la drôlesse est un des piquants intermèdes de la comédie, il s’est avisé d’abord de la plaisanter, du ton dégagé de ceux qui la payent : sur quoi, la dame, ravie de pouvoir mépriser quelqu’un, lui coupe la parole d’une réplique cinglante comme un coup de cravache.
C’est un poëte que cette même licence des théâtres révolterait et indignerait tout le premier, qui, il y a dix-huit mois, sur le bruit que l’inquisition des théâtres allait être illégalement rétablie, est allé de sa personne, en compagnie de plusieurs autres auteurs dramatiques, avertir le ministre qu’il eût à se garder d’une pareille mesure, et qui, là, a réclamé hautement une loi répressive des excès du théâtre, tout en protestant contre la censure avec des paroles sévères que le ministre, à coup sûr, n’a pas oubliées.
Rollin, en condamnant l’usage des fictions dans un poëte chrétien, n’interdit point certaines figures hardies qui font image, & par lesquelles on donne de la voix, du sentiment, de l’action même aux choses inanimées : « Il sera toujours permis, dit il, d’adresser la parole aux cieux & à la terre ; d’inviter la nature à louer son auteur ; de supposer des aîles aux vents pour en faire les messagers de dieu ; de prêter une voix de tonnerre aux cieux pour publier sa gloire ; de personnifier les vertus & les vices.
Il rapporte cette parole du vieil anatomiste Vésale, que ce n’est point le crâne qui suit la forme du cerveau, mais le cerveau qui suit la forme du crâne, et résumant les travaux de MM.
De plus, sans méconnaître l’abus que l’on peut faire des raisons à priori, il est difficile cependant de ne pas être frappé des paroles suivantes de M.
Je me figure que Thespis, sur l’idée d’Homère, dont on récitait les livres dans la Grèce, crut que des traits de l’histoire ou de la fable, soit sérieux, soit comiques, pourraient amuser les Grecs : il barbouillait même ces acteurs de lie, dit Horace, pour les rendre plus semblables à des satyres ; et il les promenait dans des chariots, d’où il disait souvent des paroles piquantes aux passants : voilà l’origine des tragédies satiriques.
C’est de là qu’il recueillit, pour la postérité et pour son temps qui ne le croyait pas et qui l’insulta pour sa peine, les paroles qui, créées ou exhalées, allaient s’évanouir, de ce poëte prodigieux qui en Emmerich ne chantait pas, mais disait ce qu’il voyait et, plus que tous les poëtes qui aient jamais souffert, souffrait sa poésie !
La parole, qui a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée, a dit un impudent menteur, trahit, au contraire, toujours l’homme, et il n’a pas besoin de se raconter pour se dire : il se dit en parlant de tout.
Maxime du Camp, le plus engagé des écrivains contre elle ; car il a dit de l’Académie, dans ses livres, de ces paroles qui sont des choses, — et des choses mortelles !
Les grands auteurs font cercle autour de sa chaire ; il en descend le plus souvent qu’il peut et leur cède la parole ; il prétend qu’ils sont les meilleurs maîtres d’idéologie, et que leur style est toute une logique.
Voici ses dernières paroles telles qu’on les trouve partout : « Mes amis, la nature me redemande ce qu’elle m’a prêté ; je le lui rends avec la joie d’un débiteur qui s’acquitte.
Le cours harmonieux des paroles qui se succèdent et qui s’enchaînent, soutient et fixe l’attention ; et la pantomime de l’orateur frappant les yeux en même temps que la musique des mots frappe l’oreille, sert pour ainsi dire d’accompagnement à cette musique.
Ainsi errants et solitaires, ils perdirent bientôt les mœurs humaines, l’usage de la parole, devinrent semblables aux animaux sauvages, et reprirent la taille gigantesque des hommes antédiluviens.
Brunetière en a, lui aussi, fait la remarque : Voltaire n’était pas en situation de nuire à Jean-Jacques autrement qu’en paroles. […] Leurs actes, leurs paroles et leurs méditations n’ont point un aspect de nécessité. […] Renan affirmait ses préférences pour saint François d’Assise et l’auteur de l’Imitation, qui lui semblaient plus fidèles à la parole du Maître. […] Paul Claudel prononçait cette prière : « Faites que je sois comme un semeur de solitude et que celui qui entend ma parole Rentre chez lui inquiet et lourd. » Je crois qu’il a été exaucé. […] De Roudaghi, un de ses émules, Chahid de Bactriane, disait : « La poésie chez les autres poètes ressemble à la parole : chez Roudaghi, la parole est faite de couleurs. » Ses poèmes amoureux sont en effet extrêmement pittoresques, sensuels et fleuris.
Est-ce qu’il n’a pas déposé sa parole ? […] Il n’a inventé ni les arts, ni la société, ni la famille, ni sa parole, ni sa pensée. […] La parole n’a donc pas été inventée. […] Il le doit à Dieu, mais il en sent l’impulsion sans qu’il soit nécessaire qu’une parole et un ordre formel le contraignent à s’y conformer. […] Elle vivait déjà de lecture et de parole, c’est-à-dire de pensée.
J’adresserai à la jeune génération littéraire qui grandit, ces grandes et fortes paroles de Claude Bernard. […] C’est pourquoi je n’accepte pas les paroles suivantes de Claude Bernard : « Pour les arts et les lettres, la personnalité domine tout. […] Le roman analyse longuement, avec une minutie de détails où rien n’est oublié ; le théâtre analysera aussi brièvement qu’il le voudra, par les actions et les paroles. […] Les romanciers naturalistes ont déjà écrit d’excellents modèles de dialogues ainsi réduits aux paroles strictement utiles. […] Imaginez que vous causez avec un sourd et que vous ne puissiez tirer de lui une parole s’appliquant à ce que vous dites.
Corneille nous coûtent bien de l’argent, et nous gagnons peu de chose. » On jugera sur ces paroles de la situation d’Alexandre Hardy ; et, à raison de trois écus la pièce, bien loin de s’étonner qu’il en ait fait cinq ou six cents, on le trouvera modéré de n’en avoir pas fait davantage. […] C’est la question à laquelle on aurait depuis longtemps répondu, si nous n’avions été nourris dans le respect de l’une des paroles certainement les plus absurdes qui soient jamais tombées de la bouche d’un doctrinaire. Le doctrinaire, c’est Royer-Collard, et la parole absurde, c’est que « l’on ne fait pas au scepticisme sa part ». […] C’est à la fois considérer Descartes, sur sa seule parole, comme beaucoup plus indépendant de ses maîtres qu’il ne l’est réellement, et Bossuet et Fénelon, Bossuet surtout, comme beaucoup moins originaux, personnels, et profonds qu’ils ne le sont l’un et l’autre. […] Obligés que nous nous croyons, quand nous le citons, de ne citer toujours qu’une moitié des paroles de Diderot, il en résulte que l’on ne connaît pas assez le personnage ; et ici, en particulier, je craindrais qu’on n’eût pas mesuré la portée de la citation, si je ne l’avais donnée tout entière.
Stéphane Mallarmé a bien voulu dire que j’avais été son premier visiteur ; il est inutile de dire que c’était vrai, cette parole, toujours certaine, étant la vérité et la mesure. […] C’était un peu café-concert ; cela n’était pas pour étonner Cros qui avait commis pour un lucre nécessaire, paroles et musiques, deux chansons, dont l’une, Paquita, fut le modèle du célèbre Amant d’Amanda. […] Elle se mire dans des blancheurs à son image, âme pure ou cœur de romances, Pierrots mélancoliques et malins, sceptiques sauf vis à-vis la blanche existence dans des carrières de craie, où ils passent le temps à figurer sans parole des représentations du monde. […] Elle est d’une tendresse, sans élans de paroles, profonde et victorieuse comme l’habitude, avec des ténacités d’héréditaires passions, des souplesses cachées de tiges de lierre sous l’épaisseur des feuillures. […] Cela avait un reflet des paroles tonnantes de politiciens flétrissant les bleus et les verts, ceux qui discutaient des vertus théologales pendant que les Turcs étaient aux portes de Constantinople, et appariant à ces Grecs des gens de Paris.
Quand croyons-nous autrui sur parole ? […] Mais de tous, le plus habituel est celui de la parole articulée. […] Comment s’est construit ce système de signes qu’on appelle la parole ? […] Ce n’est pas Dieu qui a enseigné la parole à l’homme, nous sommes arrivés à posséder la parole par suite même de notre nature. […] La parole a été construite.
Et que serait une traduction toujours exacte, par la plume ou par la parole, de notre façon de penser et de sentir, sinon quelque chose de honteux presque toujours et d’horrible parfois ? […] Il y a des écrits (ce sont les plus nombreux) qui ne sont qu’un moyen de communiquer à distance et à beaucoup de gens ce que la parole ne pourrait faire entendre qu’à un petit cercle de personnes. […] Il est, d’ailleurs, dans la nature de la parole, lorsqu’elle est franchement la parole et non point l’écriture récitée, d’être toujours prête à jaillir et de s’épancher libéralement, sans compter. […] Il sera Poète s’il l’a : Poète en paroles, ou, faute de cela, peut-être encore mieux, Poète en acte. […] Son rapport aux hommes de talent se pourrait exprimer par ces paroles de l’Évangéliste (Jean VII, 6) : Mon temps, à moi, n’est pas encore venu ; pour vous, le moment est toujours opportun.
Et c’est pourquoi les bons prêtres le croient sur parole, et le plaignent. […] La marquise, affolée, promet à son père tout ce qu’il veut, rappelle Humbert et lui reprend sa parole tout en lui jurant de lui garder son amour. […] Un personnage serait chargé de défendre ces nécessités inéluctables et de porter la parole en leur nom. […] J’aimerais mieux qu’elle ne dise rien du tout (on comprendrait assez sans les paroles), ni lui non plus. […] Cela commence par un échange de paroles aigres ou froides. « Enfin, dit la comtesse, puisque vous vous trouvez si mal ici, pourquoi n’êtes-vous pas parti plus tôt ?
Le vouloir humain y est à peu près étranger. » Et voilà les fortes paroles de d’Aubray qui nous reviennent en mémoire : « On peut faire une maison, non un arbre ou un rameau vert ; il faut que nature le produise, par essence de temps, du suc et de la moelle de la terre » ; — et ces paroles ne s’appliquent point à Malherbe, mais précisément à l’école, à l’atelier de fabrication artificielle qu’il attaquait. […] Plus j’ai vécu, plus j’ai apprécié cet ami de Mirabeau, qui l’appréciait comme moi, et qui lui laissa en mourant toutes ses grandes vues, sans sa grande parole. […] Cela a trompé un peu sur son caractère et arraché à ses meilleurs amis de petits cris d’impatience qui se sont tournés quelquefois en paroles injustes. […] Il avait celle-là dans son cœur, dans son esprit, dans son travail, dans sa parole. […] Les Goncourt écrivaient avec leurs nerfs, comme d’autres avec leur pensée, comme d’autres avec leur parole, les orateurs, comme d’autres avec des procédés et une rhétorique.
Ses perçantes paroles, comme une épée des highlands, tranchent les membres jusqu’à la moelle. […] Notez qu’il ne se réduisit pas aux rêveries platoniques ; il fut leste d’actions et aussi de paroles ; la gaudriole perce volontiers dans ses poésies. […] On en vint à comprendre que les résurrections tentées sont toujours imparfaites, que toute imitation est un pastiche, que l’accent moderne perce infailliblement dans les paroles que nous prêtons aux personnages antiques, que toute peinture de mœurs doit être indigène et contemporaine, et que la littérature archéologique est un genre faux. […] Aucune autre chose ne vous donnera de consolation quand vous serez où j’en suis. » Ce fut là presque sa dernière parole.
On dira qu’il n’a pas non plus fait paraître lui-même sa Politique tirée des paroles de l’Écriture sainte, ni ses Élévations sur les Mystères, ni sa Défense de la Tradition et des Saints Pères ? […] Elle est encore dans son Instruction sur les états d’oraison ou dans sa Politique tirée des paroles de l’Écriture sainte. […] ou dans la Politique tirée des paroles de l’Écriture sainte ? […] Tout frémissant encore d’une horreur sacrée des bourreaux du Christ, comme s’il sortait d’assister au drame du Calvaire, il n’y a rien là de personnel que l’accent, que l’éclat de la parole, que l’allure du discours. […] Rappellerai-je ces paroles, qui sont, ou qui étaient jadis, il n’y a pas longtemps encore, dans toutes les mémoires ?
C’est ce rythme intérieur qui donne, à la parole et aux écrits, leur portée, aux personnalités leur poids et leur ampleur, à la poésie claire, sa force magique. […] Mais, entre les deux, quel flux de paroles et de déclarations retentissantes, juste ciel, que de tribunes dressées, que d’orateurs vains ! […] A certaines heures, une parole ferme et renseignée peut être écoutée à la tribune et rendre des services. […] Lorsque Charcot, ayant étudié la fausse circonvolution du langage humain, imagina son fameux schéma de la « Cloche » il crut qu’il était le maître de la parole. […] Elle s’est tellement manifestée en paroles et en écrits (officiellement, du moins) qu’il ne lui est plus resté de forces pour se manifester en actes.
» Ces paroles du Christ à la veille d’être cloué à un infâme gibet, Victor Hugo aurait pu les prononcer à la veille de sa solennelle et triomphante apothéose. […] Voyez, en effet, comme Mme Roumestan tient mal sa parole ! […] S’il n’avait écouté que sa conscience, il eût tenu sa parole ; mais la voix de l’opinion lui murmura alors à l’oreille : Oh ! […] L’autre, alarmé pour la dot et les espérances qui attiraient son fils, essaye de dégager sa parole. […] — Et il a tenu parole.
» En parlant ainsi, le vieux rebbe semblait tout ému ; le gros percepteur Hâan le regardait, les yeux écarquillés, et Iôsef, de temps en temps, murmurait des paroles confuses. […] et ce matin au petit jour, elle a pris l’échelle et elle est allée les cueillir. » Fritz, à chaque parole du père Christel, sentait comme un baume rafraîchissant s’étendre dans tout son corps. […] » Ces paroles rendirent Sûzel et Fritz attentifs.
La largeur d’esprit dont il fait preuve n’est, en aucune façon, contestable ; elle n’est d’ailleurs pas en cause ; mais il reste acquis que, d’après ses propres paroles, le maître écrivain pense et dit que, pour lui, « l’évolution du vers français touche à son terme avec les poésies de Victor Hugo », et que ces poésies réalisent pour l’oreille « le maximum de jouissance que la constance des conditions physiologiques » lui permet d’obtenir. […] Il faut avoir pour donner. » J’ai tenu à citer intégralement ces fortes paroles, car je n’ai pas voulu les amoindrir. […] Adolphe Lacuzon, dont je citais les belles paroles en tête de cet article, la mission principale de la poésie devrait être de rappeler aux hommes ces problèmes essentiels.
Les gestes accompagnaient sa parole ; et, souvent, ils étaient un peu en retard sur elle, parce que la pensée frémissante courait et que les muscles chétifs n’arrivaient point à la suivre. […] La thèse apparaît bien, dans ces lignes très belles : « Je bénis tout ce qui m’a menti, l’illusoire beauté des choses, et les paroles des êtres bons, et tous les rêves qui peuvent encore donner aux hommes l’espoir, la force et la joie. […] N’a-t-il pas écrit encore cette parole désolée, que « les plaisirs du soir attristent le matin » ? […] … Voici quelques paroles de ce grand esprit désespéré. […] Cette parole excellente nous engage à éviter l’erreur où se laissent aller les psychologues trop confiants.
On sent trop bien que l’inspiration vient du dehors et que cette parole n’est qu’un écho. […] Je me la représente difficilement dans ces fameux dîners de chez Magny, où se réunissaient alors les plus brillants jouteurs de la plume ou de la parole. […] Si le hasard ou une bonne inspiration amenait l’entretien sur certains sujets qui lui étaient familiers, sa parole froide et paresseuse s’animait un peu ; ses grands yeux alanguis reprenaient du mouvement et de l’éclat. […] Ce sont là des formules déplorables, des partis pris excessifs en paroles. […] Quitte la caverne des réalistes et reviens à la vraie réalité, qui est mêlée de beau et de laid, de terne et de brillant, mais où la volonté du bien trouve quand même sa place et son emploi. » J’ai tenu à terminer ce portrait par ces belles et simples paroles qui lui donnent son vrai relief et sa vraie couleur.
Souveraineté lumineuse et vie rapide de Paris, ressources épaisses et durée lente de la province, paroles, souffles et influences de l’étranger, la littérature française est faite, comme la France elle-même, du brassage, des échanges, des amitiés et des hostilités entre ces trois éléments. […] Rien dans la vie du collège et dans la parole de ses professeurs ne contribuait à favoriser le besoin d’évasion né de la mésentente familiale, ne le disposait à changer des chaînes pour d’autres. […] « Longtemps, il a décrit le pays avec une mémoire qui a le souvenir du jour, du vent, du nuage, une mémoire locale inouïe, mettant, avec la couleur de sa parole, sous nos yeux les tournants du Nil, les aspects des pylônes, les silhouettes des petits villages, les lignes cahotées de la chaîne Libyque — comme s’il nous en montrait les esquisses. […] Il prend les choses dans ses belles facultés comme il les a reçues. » Le temps de Louis XIIl est encore une suite du seizième siècle, et l’on songe ici aux fières paroles de Descartes, comparant ses découvertes à quelques batailles qu’il a livrées et où il a eu l’heur de son côté. […] « Que ta pensée aille à sa conclusion, que ta parole exprime ta pensée ; achève tes phrases, tes gestes, tes lectures.
Entre lui et son désir du repos, entre lui et son amour, vient toujours se placer l’arrêt des dieux, la parole révélée, fata. […] Avant qu’aucun orateur prît la parole, une prière était prononcée devant le peuple silencieux467. […] Rome avait ses livres des pontifes, ses livres des augures, son livre des cérémonies, et son recueil desIndigitamenta.Il n’y avait pas de ville qui n’eût aussi une collection de vieux hymnes en l’honneur de ses dieux487 ; en vain la langue changeait avec les mœurs et les croyances ; les paroles et le rhythme restaient immuables et dans les fêtes on continuait à chanter ces hymnes sans les comprendre. […] Il y a même grande apparence que les paroles de la loi étaient rhythmées547. […] Sa force est dans les paroles sacrées qui la composent.
Au vrai, ni Gaud ni Yan ne sont morts ; ils ne se sont point mariés ; ils n’ont point échangé leur parole au cimetière. […] Je leur céderai alternativement la parole. […] Il sait toutes les inclinations du cœur, excelle à débrouiller les situations les plus délicates, possède pour les petits malaises de la vie amoureuse, pour les troubles des sens à tous les âges, d’admirables recettes familières, et il vous les donne sans pédanterie, avec sa longue expérience, sa fine bonhomie et sa grande douceur de parole. […] « C’est la mer que sillonnaient jadis sur les galères et les trirèmes les vieux poètes et les vieux sages ; et comme ils se tenaient debout à la poupe, au milieu des matelots attentifs, attentive elle-même, elle a écouté en des nuits pareilles les chansons d’Homère et les paroles de Solon. […] Les longs romans pleins de paroles et d’aventures fabuleuses, vides des choses qui doivent rester dans l’esprit du lecteur et y faire fruit, étaient en vogue dans le temps que les chapeaux pointus étaient trouvés beaux.
Elle se disait que c’était bien mal à elle et bien coupable d’avoir oublié des paroles prononcées par Marius. […] « Si les deux petits pauvres eussent écouté, et eussent été d’âge à comprendre, ils eussent pu recueillir les paroles d’un homme grave.
Étant allé faire ses adieux à Benoît XIV, celui-ci lui fit cadeau de bulles de dispense qu’il accepta avec reconnaissance ; mais, lorsqu’on lui présenta la note des frais d’expédition de ces bulles, il refusa obstinément d’en payer le montant, en disant qu’il croirait faire injure au Saint-Père s’il ne s’en rapportait pas à sa parole. […] VIII Telle fut la vie de cet homme distingué que le dix-huitième siècle prit pour un grand homme sur parole, et dont il ne lut guère que les Lettres persanes, feuille du Mercure, légère et spirituelle, mais peu digne, en somme, de la plume d’un législateur.
Dimanche, le marchand, créancier né des gentilshommes, et né pour être payé en monnaie de singe ; Madame Jourdain, toute proche du peuple, par son bon sens, sa tète chaude, sa parole bruyante, et sa bonté foncière ; Chrysale, la ganache bourgeoise, épais et matériel, tout occupé de son pot, père et mari sans dignité et sans autorité ; Jourdain, Arnolphe, les bourgeois vaniteux, qui jouent au gentilhomme, prennent des noms de terre, ou frayent avec des nobles dont la compagnie leur coûte cher ; Madelon. […] Avoir défendu la vérité, la nature, avoir combattu, Lionni tout ce qui s’en éloignait ou la corrompait, et s’apercevoir que, si un homme porte en lui cette vérité, et l’offre aux autres, la société ne pourra le supporter, le meurtrira, le rejettera, que la société, en réalité, repose sur un ensemble de mensonges et de ronventions qui masquent la nature : la découverte a de quoi mettre un accent irrité dans la parole d’Alceste.
La poésie, qui prend pour instrument la parole, et qui rend par des mots le symbole et le rythme, est un accord, comme la musique, comme la peinture, comme tous les autres arts : en sorte que le principe fondamental de tout art est le même, et que tous les arts se confondent dans l’art, toutes les poésies dans la poésie1. […] On a l’air de reporter continuellement sa pensée sur le Sinaï, les rives du Jourdain et Jérusalem ; mais le Sinaï, le Jourdain et Sion ne sont que des échos sonores pour donner à la parole du poète un accent de foi religieuse.
La nature leur parlait plus qu’à nous, ou plutôt ils retrouvaient en eux-mêmes un écho secret qui répondait à toutes ces voix du dehors, et les rendait en articulations, en paroles. […] Je suppose qu’un homme d’esprit (c’est presque le cas d’Apollonius de Rhodes) pût attraper le pastiche du style homérique de manière à composer un poème exactement dans le même goût, un poème qui fût à Homère ce que les Paroles d’un Croyant sont à la Bible ; ce poème, aux yeux de plusieurs, devrait être supérieur à Homère ; car il serait loisible à l’auteur d’éviter ce que nous considérons comme des défauts, ou du moins les manques de suite, les contradictions.
On l’enterra ; le curé me dit de bien bonnes paroles sur la mort de ces vagabonds, dont le cœur n’est pas toujours aussi loin de Dieu que l’on pourrait croire. » Pauvre oncle Pierre ! […] Il la reconnut à peine, la reçut debout et la congédia après deux ou trois paroles.
Dans la Cène de Léonard de Vinci, l’étonnement est peint d’une manière admirable sur le visage des disciples, avec les nuances les plus diverses selon les caractères, au moment où ils entendent cette parole de Jésus : « L’un de vous me trahira » ; et toutes ces nuances sont en même temps celles de l’aversion et de la crainte. […] Lorsque la balance et l’homme qu’elle renferme sont tous les deux en équilibre et en repos, on adresse à l’homme la parole : aussitôt, par le seul effet de l’excitation reçue et de l’attention qui y répond, la balance oscille et s’incline vers la tête, devenue plus pesante, tandis que les vaisseaux se contractent dans les extrémités inférieures, devenues plus légères.
Une langue, où il n’existera plus de morceaux de livres, plus de phraséologie où passera le mot d’auteur, et où cependant le public sentira que c’est un lettré qui a fabriqué les paroles sortant de la bouche des acteurs, voilà la révolution à tenter ! […] Des paroles prophétiques du général Ducrot, alors commandant à Strasbourg, prononcées dans le salon de la princesse Mathilde, — et qui faisaient sourire, — des conversations intimes avec notre parent Édouard Lefebvre de Béhaine premier secrétaire d’ambassade à Berlin nous avaient donné la certitude qu’une guerre était imminente avec la Prusse.
Ces paroles imprimées en 1797 sont étrangement prophétiques. […] La description de ses souffrances ainsi idéalisées par le souvenir et la narration de ses impressions personnelles, diluées dans le torrent des sensations contemporaines, parut aux lecteurs semblable à la musique d’opéra dont on écoute l’air sans prêter attention aux paroles.
Si ses autres Opéra n’ont pas été remis au théatre, c’est la faute de la musique & non des paroles. […] Les paroles d’Hypolite & d’Aricie sont de lui.
Les jeunes maîtres eux-mêmes qui déjà nous enseignaient de leur parole et de leur plume, MM. […] Au lieu de forces brutales qui l’écrasent de leur poids, il rencontre des volontés, des intelligences comme la sienne, avec lesquelles il lui faut compter, il est vrai, mais sur lesquelles il peut toujours agir par la parole, par l’exemple, tantôt pour les retenir, tantôt pour les entraîner.
Il ne lui a manqué peut-être que de venir un peu plus tard pour trouver tout son emploi ; et cet excès même de parole et de chaleur physique, qui détonnait dans la société et dans les salons, eût trouvé son milieu assez naturel et tout son espace dans la vie des assemblées.
Fidèle à ces principes, suivez votre goût pour les lettres, et vous obtiendrez des gens de bien une sanction sans laquelle les plus grands talents n’ont rien qui soit digne d’être envié. » Certes, celui qui fait ainsi parler les grands esprits, et qui met dans leur bouche un sens si juste avec des paroles si complètes, est lui-même de leur postérité à bien des égards, et, si on ne le cite qu’au second rang, il ne fait pas d’injure au premier.
Mme de Maintenon, grâce à une exacte et fidèle reproduction de ses paroles et de ses écrits, va être de plus en plus connue, appréciée de tous et, nous n’hésitons pas à le dire avec le nouvel éditeur, estimée et admirée.
Ballanche : il avait des parties vagues, nuageuses, inintelligibles, je le crois, même pour lui, et qu’il ne parvint jamais à éclaircir, qu’il ne débrouilla jamais aux yeux du monde ni aux siens ; il avait des puérilités et des enfances, des bégayements sans fin dans l’entretien habituel, et, tout à côté de cela, il lui sortait de la bouche, et surtout de la plume, des paroles d’or.
. — En disant ces nobles paroles, Napoléon se montrait serein, caressant, rajeuni… Il n’y avait, malheureusement, de vrai dans sa conclusion que la gloire.
M. de Nangis se mit derrière tout le monde ; le Roi, ayant tourné, l’aperçut, et, lui adressant la parole, lui dit : « Que dites-vous de ma chienne, trouvez-vous qu’elle chasse bien ?
Le caractère de Madeleine se peint dans ses paroles, non pas tout à fait tel qu’on aime à se le figurer d’après la tradition ordinaire, non pas celui d’une femme tendre, passionnée et abandonnée.
Cependant jamais Hassan-Aga ne lui donna un coup de bâton, ni ne lui en fit donner, ni ne lui adressa une parole injurieuse, tandis qu’à chacune des nombreuses tentatives que faisait ce captif pour s’enfuir, nous craignions tous qu’il ne fût empalé, et lui-même en eut la peur plus d’une fois.
Singulier mélange, en effet, que cet abbé de Pradt, instruit de tant de choses et qui croyait s’entendre à toutes ; homme d’Église qui l’était si peu, qui savait à fond la théologie, et qui avait à apprendre son catéchisme ; publiciste fécond, fertile en idées, en vues politiques d’avenir, ayant par moments des airs de prophète ; écrivain né des circonstances, romantique et pittoresque s’il en fut ; le roi des brochuriers, toujours le nez au vent, à l’affût de l’à-propos dans les deux mondes, le premier à fulminer contre tout congrès de la vieille Europe ou à préconiser les jeunes républiques à la Bolivar ; alliant bien des feux follets à de vraies lumières ; d’un talent qui n’allait jamais jusqu’au livre, mais qui avait partout des pages ; habile à rendre le jeu des scènes dans les tragi-comédies historiques où il avait assisté, à reproduire l’accent et la physionomie des acteurs, les entretiens rapides, originaux, à saisir au vol les paroles animées sans les amortir, à en trouver lui-même, à créer des alliances de mots qui couraient désormais le monde et qui ne se perdaient plus ; et avec cela oublieux, inconséquent, disparate, et semblant par moments sans mémoire ; sans tact certainement et sans goût ; orateur de salon, jaseur infatigable, abusant de sa verve jusqu’à l’ennui ; s’emparant des gens et ne les lâchant plus, les endoctrinant sur ce qu’ils savaient le mieux ; homme à entreprendre Ouvrard sur les finances, Jomini sur la stratégie, tenant tout un soir, chez Mme de Staël, le duc de Wellington sur la tactique militaire et la lui enseignant ; dérogeant à tout instant à sa dignité, à son caractère ecclésiastique, avec lequel la plupart de ses défauts ou, si l’on aime mieux, de ses qualités se trouvaient dans un désaccord criant ; un vrai Mirabeau-Scapin, pour parler comme lui, un archevêque Turpin et Turlupin.
Il exprimait volontiers, d’ailleurs, dans le particulier, sa peine de ne pouvoir venir quelquefois, et il témoignait en paroles combien cette privation lui coûtait.
Cette parole de Frédéric marque son homme.
Il n’est pas vrai, malheureusement, qu’on ne soit jamais entraîné que par les qualités qui promettent une ressemblance certaine entre les caractères et les sentiments : l’attrait d’une figure séduisante, cette espèce d’avantage qui permet à l’imagination de supposer à tous les traits qui la captivent, l’expression qu’elle souhaite, agit fortement sur un attachement, qui ne peut se passer d’enthousiasme ; la grâce des manières, de l’esprit, de la parole, la grâce, enfin, comme plus indéfinissable que tout autre charme, inspire ce sentiment qui, d’abord, ne se rendant pas compte de lui-même, naît souvent de ce qu’il ne peut s’expliquer.
Si peut-être ils ont quelquefois des doutes et soupçonnent le mal qu’ils font, cette impression doit passer vite ; les extrêmes conséquences des paroles mauvaises qu’ils écrivent sont si lointaines et si aléatoires !
Madame reprit la parole : “Il ne vous l’a que trop dit, mais vous ne l’avez pas cru.”
Schuré oppose au parti pris de stagnation de l’Église contemporaine la parole de Saint Thomas : « La foi est le courage de l’esprit qui s’élance en avant, sûr de trouver la vérité. » Il estime avec Charles Morice que l’ère des révélations n’est pas close et que, seuls, les poètes ont le privilège d’ouïr et d’interpréter les voix du Mystère.
Et, quand l’humanité ne sera plus, Dieu sera, et l’humanité aura contribué à le faire, et dans son vaste sein se retrouvera toute vie, et alors il sera vrai à la lettre que pas un verre d’eau, pas une parole qui auront servi l’œuvre divine du progrès ne seront perdues.
D’autres, des rêveurs, comme Verlaine, jaloux de donner à leur poésie le vague de la musique, composeront en vers imprécis, flottants et en quelque sorte fluides, ce qu’ils nommeront des Romances sans paroles.
Et nous pouvons ajouter aux paroles du poète : Oui, tout meurt, mais pour renaître, et tout renaît pour mourir.
Bain, est une parole ou un acte contenu ». « La tendance d’une idée de l’esprit à devenir une réalité, est une des forces qui régissent notre constitution ; c’est une source distincte d’impulsions actives….
Quel chagrin t’a dicté cette parole amère, Cette offense au malheur ?
Ajoutez un teint éblouissant de fraîcheur, des bras, des mains admirables, un charmant sourire, une parole appropriée, et qui s’inspirait moins de l’esprit que de l’âme, du désir d’être bonne et de plaire.
La physionomie de la Faustin lui apparaît tantôt dessinée en ombres et méplats lumineux, par une lampe posée près de son lit, tantôt s’assombrissant, se creusant sous une émotion tragique : Subitement sur la figure riante de la Faustin, descendit la ténébreuse absorption du travail de la pensée ; de l’ombre emplit ses yeux demi-fermés ; sur son front, semblable au jeune et mol front d’un enfant qui étudie sa leçon, les protubérances, au-dessus des sourcils, semblèrent se gonfler sous l’effort de l’attention ; le long de ses tempes, de ses joues, il y eut le pâlissement imperceptible que ferait le froid d’un souffle, et le dessin de paroles, parlées en dedans, courut mêlé au vague sourire de ses lèvres entr’ouvertes.
Un illustre érudit du xviiie siècle, le chef de l’école de Leyde, Tibère Hemsterhuys, se plaignait que de son temps « l’histoire de la philosophie, cette matière si riche des recherches savantes, n’eût pas encore attiré les études de la critique, qu’elle fût livrée à des compilateurs sans génie et sans lettres, qui ne connaissaient les philosophes anciens que par de vicieuses traductions, et qui tiraient d’une lecture superficielle un résumé aride et sans intelligence37. » Il y a un siècle à peine que ces paroles ont été prononcées.
Quelquefois, ne pouvant faire entendre sans beaucoup de paroles, à des lecteurs ordinaires, toute l’étendue du sens de l’auteur, j’ai mieux aimé en laisser entrevoir la finesse aux seuls lecteurs intelligents, que de l’anéantir dans une périphrase.
Aura-t-il pu saisir ce bruit vague et sourd qui se compose de tant de voix confuses, et qui est cependant, pour les esprits attentifs, la parole même de la génération présente ?
Que chacune de ses paroles soit sacrée ; que son silence même inspire le respect, et ressemble quelquefois à la justice.
Nous combattrons avec toutes les armes de la raison les artistes de la parole qui se fourvoient et qui se trompent ; avec toutes les flèches du ridicule ces bateleurs de la fantaisie qui passent leur temps à peigner des phrases soyeuses, à retaper des paradoxes centenaires et à faire miroiter au soleil les verroteries de leur style. […] Barrillot n’aille pas se méprendre sur la portée de nos paroles. […] Nous vivons si bien dans un milieu de lutte et de guerre spirituelle, qu’il faut, à tout prix, se dresser à cette escrime de la parole écrite, — fût-ce aux dépens de ceux qu’on aime. […] Ceci est un éloge, et il faut y ajouter encore, en signalant cette suavité de diction, qui donne à sa parole le bruit caressant d’un collier de perles s’égrenant sur un plateau de cristal. […] l’intempérance de plume a remplacé le bon ton et la distinction du style ; cette parole, si mesurée et si sage d’ordinaire, franchit alors à pieds joints toutes les barrières, laissant en deçà les immunités de la critique, et avoisinant, de l’épaisseur d’un cheveu, l’ardente personnalité. — L’écrivain fils des croisés, le littérateur petit-maître, a jeté ses manchettes brodées par-dessus les moulins de la polémique, — ou du moins les retrousse-t-il jusqu’au coude.
Il fallait que l’un diminuât pour que l’autre pût croître. « Tous les métiers de parole, dit Amiel, sont dangereux : ils tendent à faire illusion à la galerie, et finissent par faire illusion au pratiquant lui-même. […] On songe aux propos de la Libre Parole sur M. […] dont Amiel écrivit les paroles et la musique le 13 janvier 1857, pendant le conflit entre la Suisse et le roi de Prusse au sujet de Neuchâtel, et quand la Confédération eut mobilisé. […] Dans une Colère de Samson calviniste, le grand bûcher s’allume : Tout, actes, paroles, silence, excuses, remontrances, tout nuit à qui est sur la mauvaise pente à qui n’est plus en cour, ou est en voie de disgrâce, L’amour est l’inverse de la justice ; il est toujours prodigue ou ingrat. […] Panneton, par la Libre Parole !
Les avocats, ne pouvant le justifier, puisqu’il avouait ses crimes, cherchèrent à le grandir ; ils lui laissèrent la parole, et, jusqu’au moment où il fut condamné à mort, ce fut lui qui eut l’air de diriger les débats. […] On a reproché au grand roi ces paroles, qui pourtant s’accordent bien avec la beauté et la majesté des œuvres accomplies sous son règne. […] « Il faut que Moultou, avec M. et madame de la Rive, qu’il affectionnait beaucoup, l’encouragent de toutes leurs forces. » — « C’est une œuvre à vous, monsieur de Voltaire, lui disent-ils ; joignez le fait à la parole, la gloire du bienfaiteur de l’humanité à la gloire de l’écrivain. […] Quelle facilité à donner sa parole avec la formelle intention d’y manquer, chez ces descendants de races chevaleresques ! […] — Eh bien, en lisant ce volume de M. d’Haussonville, en parcourant ce dédale de traités violés, de paroles trahies, d’amitiés trompées, de paix dérisoires, de guerres inutiles, d’ambitions égoïstes, en voyant la France et la Lorraine échanger ce luxe de serments, de protestations, de lettres amicales, de pièges, de stratagèmes et de représailles, comédies sans gaieté, sans moralité et sans dénoûment, on est toujours tenté de s’écrier : De là la nécessité de Louis XIV !
Au moment où Ion va boire, « un des serviteurs prononce une parole de mauvais augure ». […] les charmantes et profondes paroles d’amour, écrites il y a dix-huit cents ans, je pense, et toujours jeunes ! […] Si cette dame était ma mère à moi, elle ne serait pas si bien habillée. » Alors Vasantasena « Petit, ta bouche prononce des paroles bien cruelles. » Elle se dépouille, en pleurant, de ses parures, et en remplit le chariot : « Prends tout cela pour t’amuser. […] Écoutez ces propos : « Oui, dit la reine, c’est le roi qui veut d’abord que vous guérissiez et que vous reveniez à la vie ; c’est lui qui trouve que ce serait grand dommage qu’une si belle créature vînt à mourir d’un si vaillant amour : ce sont là ses propres paroles. […] Leloir a bien rendu la spirituelle impertinence, mais en lui prêtant une parole et une allure trop lentes à mon gré ; et M.
Oui, les paroles prononcées par le Père Souël ne laissent rien à désirer au moraliste le plus sévère. […] Le mariage accompli, Octave se tient parole, et sous prétexte d’aller se joindre aux défenseurs de l’indépendance hellénique, il quitte sa femme, et pendant la traversée, il s’empoisonne, emportant dans la mort le secret qui pesait sur lui. […] » Ce dernier, traducteur des œuvres dramatiques de Gœthe, prononçait des paroles amères que son ami nous a rapportées : « Albert me disait l’autre soir : il y aura toujours quelque chose de sombre, de désenchanté au fond de notre existence » (Lettres de 1820 et 1821). […] Dans cette débauche, qui est surtout une débauche de paroles, l’affectation saute aux yeux. […] Il y a bien longtemps que je me répète ces paroles.
Sa parole passionnée la décide à le reconnaître pour le véritable Tsar et il envahit la Russie à la tête d’une armée nombreuse. […] Il est toujours pleins de jolis compliments, et il passe pour avoir adressé de bonnes paroles d’encouragement, même à nos plus grands artistes. […] Mais la pensée et la foi sont choses trop puissantes pour que le temps puisse les entamer, quand une fois elles ont été rendues splendides par la parole ou sublimées par le chant. […] Il serait un trouble-fête aux dîners, il serait impossible aux thés de l’après-midi, car sa vie entière fut une protestation contre la parole en public. […] Je ne saisis pas très bien alors le sens réel des paroles de M.
Jusqu’à la fin, et pendant les années qui suivirent, nous l’avons toujours vu allier et concilier sans plus d’effort, et de manière à frapper d’étonnement et de respect, la foi et la science, la croyance et l’espoir en la pensée humaine et l’adoration envers la parole révélée. […] Quelques-uns, armés au complet, outre la pensée puissante intérieure, ont l’enveloppe extérieure endurcie, l’œil vigilant et impérieux, la parole prompte, qui impose, et toutes les défenses.
Mais lorsque je considère qu’il ne s’agit point d’un objet entièrement nouveau, que nous possédons tous une langue maternelle, que le long exercice de la parole nous dispose dès notre enfance à l’étude de ces principes, ou à leur application à l’idiome qui nous est familier, et dont nous avons appris les éléments de nos parents, lorsqu’ils environnaient notre berceau, ou qu’ils nous portaient dans leurs bras ; lorsque je vois la liaison étroite de cette science avec la logique, je la laisse où je l’ai placée. […] Il me semble qu’on pourrait retourner ainsi la proposition de Diderot : Faire un thème, c’est chercher dans la langue qu’on ignore les moyens de rendre les paroles de la langue qu’on sait ; faire une version, c’est employer la langue qu’on sait à s’expliquer celle qu’on ignore.
Et questionné par un de ses malades sur je ne sais quel remède en vogue, un autre médecin célèbre, Bouvart, répondait : « Dépêchez-vous d’en prendre pendant qu’il guérit. » — M. de Meilhan avait un frère qui fut fermier général et qui avait les mœurs du jour ; une des paroles de ce fermier général à sa femme est restée comme peignant l’immoralité domestique portée à son comble, elle n’est pas de celles qu’on puisse citer25.
On trouverait dans ses lettres écrites durant les deux ou trois années qui précédèrent sa fin, des paroles qui sont comme des pronostics : Hélas !
Ils n’ont pas eu de peine à montrer que Saint-Simon exagère, en les résumant, les défauts du personnage ; nos jeunes auteurs vont trop loin toutefois quand ils font de Saint-Simon un ennemi de Dangeau : on n’est pas ennemi de ceux dont on voit les ridicules, et le seul tort de Saint-Simon est de trop voir et d’être doué par la nature d’un organe qui est comme un verre grossissant, et d’une parole de feu irrésistible : de là tant de portraits ressemblants, outrés, vrais à les bien entendre, et en tout cas ineffaçables.
Belle parole et noble désir en effet !
Il y a dans Bussy plusieurs personnages qui se compliquent et qui se nuisent l’un à l’autre, en même temps qu’ils doivent nuire à la parfaite naïveté de sa parole.
Marolles, qui joindra plus tard (1627) à ce premier bénéfice l’abbaye de Villeloin, plus considérable, et qui en prit occasion de recevoir l’ordre de prêtrise moins par vocation que par convenance (les bulles y mettant cette condition), fut lié avec quelques-uns de messieurs de Port-Royal, fort sévères sur ce genre d’abus et de d’irrégularités ; mais, tout en se prévalant de leur amitié et en la leur rendant par de bonnes paroles et des témoignages publics d’intérêt, il ne fut touché en aucun temps de scrupules sur la manière dont il était entré dans les bénéfices et dans le sacerdoce ; il avait le christianisme assez large et coulant, et n’était rien moins que rigoriste, soit pour la doctrine, soit pour les mœurs : se contentant de vivre en honnête homme, comme on disait alors.
Mais aucune parole ne sortait de sa bouche.
dans cette maison de silence et de paix, un jeune homme obscur, timide, que Lamennais, distrait par ses visions sociales apocalyptiques, ne distingua jamais des autres, à qui il ne supposait que des facultés très ordinaires, et qui dans ce même temps où le maître forgeait sur son enclume ces foudres qu’on appelle les Paroles d’un croyant, écrivait, — lui —, des pages intimes beaucoup plus naturelles, plus fraîches, — tranchons le mot, plus belles —, et faites pour toucher à jamais les âmes éprises de cette vie universelle qui s’exhale et se respire au sein des bois, au bord des mers.
Molé, entouré de ministres secondaires, forme son Cabinet du 11 avril 1837, ministère d’amnistie et de conciliation, mais que ses adversaires appellent de concession, et contre lequel tous les princes de la parole, tous les grands amours-propres qui n’en sont pas, se coalisent pour le renverser, sans réussir le lendemain de leur victoire à en former un pour leur compte.
Biot trouve de nobles paroles pour caractériser ce nouvel effort héroïque d’où sortirent l’École polytechnique dans sa première forme plus ouverte et plus libre que depuis, et surtout l’École normale d’alors qui dura peu, mais qui donna, dans cette résurrection des esprits, une impulsion puissante et décisive, — assez pour que sa destinée fût remplie : « On voulut qu’une vaste colonne de lumière sortit tout à coup du milieu de ce pays désolé, et s’élevât si haut, que son éclat immense pût couvrir la France entière et éclairer l’avenir… Ce peuple, qui avait vu et ressenti en peu d’années toutes les secousses de l’histoire, était devenu insensible aux impressions lentes et modérées ; il ne pouvait être reporté aux travaux des sciences que par une main de géant. » Ces géants civilisateurs et pacifiques qui remirent alors en peu de mois l’édifice entier sur ses bases, se nommaient Lagrange, Laplace, Monge, Berthollet… moment immortel !
Mais quand j’ai payé ces hommages aux individus et aux personnes, je me hâte d’ajouter que, eût-on réussi pour un temps en quelqu’un de ces biais et de ces remèdes palliatifs de l’ancien régime, on ne serait parvenu après tout qu’à faire ce qu’on appelle une cote mal taillée, rien de nettement tranché ni de décisif, et qu’il est mieux (puisqu’enfin les choses sont accomplies et consommées) qu’on en soit venu à cette extrémité dernière de n’avoir eu qu’un seul et grand parti à prendre, le parti à la Mirabeau et à la Sieyès : la France, en un mot, n’a pas perdu pour attendre ; et quand tout récemment, dans le compte rendu des séances du Sénat, je lisais ces déclarations spontanées d’un duc de La Force et d’un cardinal Donnet, si empressés à se replacer dans les rangs de tous, lorsqu’une parole inexacte avait paru un moment les en vouloir séparer, je pensais qu’au milieu de nos divisions mêmes d’opinions, il était consolant qu’on en fût venu à ce grand et magnifique résultat, aussi clair que le jour, à savoir qu’il n’y a plus en France qu’un seul ordre, une seule classe, un seul peuple.
Et moi, tout flatté que je puisse être de mille douceurs et sucreries qu’il m’adresse par compensation en maint endroit, mais plus jaloux, je l’avoue, d’être honnête homme que de passer pour avoir du goût, je lui dis tout net à propos de ces phrases étranges qu’on vient de lire, et qui atteignent directement et outrageusement mon caractère : « Savez-vous, Monsieur, que si vous n’étiez pas un homme léger qui ne pèse pas ses paroles, vous seriez un calomniateur !
L’étonnement des élèves parut grand ; mais il ne fut exprimé que sur la physionomie de chacun… Maurice était sujet à des colères très vives, mais qui duraient peu ; il avait d’ailleurs du tact, et, en cette occasion, il sentit la nécessité de justifier par quelques paroles la hardiesse de la sortie qu’il venait de faire, « Belle invention vraiment, dit-il en continuant de peindre, que de prendre Jésus-Christ pour sujet de plaisanterie !
« Il y a aussi, reprenait d’Eckermann faisant écho et tout vibrant de la parole du maître, il y a tous les degrés de la vie humaine, de la naissance à la vieillesse ; et les différents tableaux d’intérieur que les saisons différentes amènent avec elles passent tour à tour devant nos yeux. » — « Et le paysage, s’écriait Goethe, revenant sur sa première idée, le paysage !
» On n’a jamais vu de femme, dans le cas de Clotilde, adresser de telles paroles à un homme distingué et de cet ordre, à quelque illustre membre de l’Académie des sciences à qui elle aurait tant fait que de se donner.
Après l’habile Capo d’Istria, trop homme de cabinet pourtant, trop habit noir pour la Grèce, et si odieusement frappé au début de sa mission pacificatrice, il n’y a eu d’homme d’État que Coletti, celui-ci tout à fait selon le cœur et le génie du pays et du peuple, le seul Grec de ce temps-ci qui, selon la parole de M.
Taillandier oublie trop, et dont M. de Lamartine nous disait, hier encore, avec le charme qui s’attache même à ses dernières paroles : « L’amour en Italie, comme on peut le voir par la Béatrice de Dante et par la Laure de Pétrarque, est le plus avoué et en même temps le plus sérieux des sentiments de l’homme.
Il suffit que « tout uniment et avec des paroles claires, honnêtes et bien disposées, dans une période sonore, et par le cours naturel d’un récit amusant, l’auteur peigne ce que son imagination conçoit et qu’il fasse comprendre ses pensées sans les embrouiller ni les obscurcir : « Tâchez aussi, se fait-il dire par un interlocuteur de ses amis, qu’en lisant votre histoire, le mélancolique s’excite à rire, que le rieur augmente sa gaieté, que le simple ne s’ennuie pas, que l’habile admire l’invention, que le grave ne la méprise point, et que le sage se croie tenu de la louer.
Luzel a déjà dû s’impatienter, s’il nous lit, et je suis sûr que, s’il était à portée de voix, il aurait demandé plus d’une fois la parole ; car, lui, il a la prétention d’être dans un cas tout différent : « Nous autres Bretons, dit-il dans sa préface, nous avons l’avantage précieux de posséder une langue à nous : je dis langue et je repousse vigoureusement le mot flétrissant de patois. » Loin de moi l’idée de le contredire et de porter atteinte à sa patriotique pensée !
Vuillart, revenant sur les paroles de Racine qu’il a rapportées, en assure l’exactitude : « Je vous rapporte, monsieur, mot pour mot, les termes du petit testament de mort106, sans y ajouter ni diminuer le moins du monde : ils ont fait une telle impression sur ma mémoire que je crois qu’ils n’en sortiront jamais. » Le testament publié par Racine fils confirme la fidélité de cette relation de M.
… Au Temps, je suis comme quand nous causions à la table de Magny ; j’y retrouve Nefftzer, Scherer ; nous sommes là toujours entre amis ; on ne craint pas d’y exprimer tout haut ce que l’on pense, quand même ce ne serai pas l’opinion du voisin, et on laisse la parole au voisin qui réplique… » 7.
Il y a une piquante épigramme de Martial où ce qu’il dit de ses Épigrammes mêmes peut s’appliquer aux élégies, à toute cette poésie vivante et vraie : « Tu crois, dit-il à un de ces estimables conseillers, que mes épigrammes n’ont rien de sérieux ; mais c’est le contraire ; celui-là véritablement n’est pas sérieux qui nous vient chanter pour la centième fois avec emphase le festin de Térée ou de Thyeste… C’est pourtant là ce qu’on loue, ce qu’on estime, me diras-tu, ce qu’on honore sur parole. — Oui, on le loue, mais moi, on me lit. » Nescis, crede mihi, quid sint epigrammata, Flacce, etc.
il faut que ce secret intime qu’on ne pourrait revêtir de paroles, sans lui donner une existence qu’il n’a pas, il faut que ce secret intime serve à rendre inépuisable le sentiment de la pitié4.
. — D’abord le naturel en est exclu ; tout y est arrangé, apprêté, le décor, le costume, l’attitude, le son de voix, les paroles, les idées et jusqu’aux sentiments. « La rareté d’un sentiment vrai est si grande, disait M. de V., que, lorsque je reviens de Versailles, je m’arrête quelquefois dans les rues à regarder un chien ronger un os297. » L’homme, s’étant livré tout entier au monde, n’avait gardé pour soi aucune portion de sa personne, et les convenances, comme autant de lianes, avaient enlacé toute la substance de son être et tout le détail de son action.
Il a essayé, selon ses propres paroles, « de civiliser la doctrine en la dépaysant des collèges et la délivrant des mains des Pédants290 » ; à ceux qui n’étaient pas des savants, et ne lisaient latin ni grec, aux femmes, il a offert la substance de l’antiquité.
Ne lui demandons ni couleur ni énergie sensible, ni rythme expressif, ni forme en un mot ; mais une parole agile, souple, claire qui forme d’ingénieuses combinaisons de signes, qui dégage avec aisance des idées toujours intéressantes, souvent nouvelles ou fécondes, voilà ce que Mme de Staël nous offre : son style, c’est de l’intelligence parlée.
N’a-t-il bu que de l’eau, quand il revient chez lui le soir, amenant avec soi des femmes d’une vertu délabrée ; et qu’il maltraite celle pour qui je suis, de paroles et de coups ?
4º Et en même temps encore, par le respect que les hommes qu’elle estime professent pour le parlementarisme national, pour les campagnes électorales, et, par les simulacres que cette jeunesse s’offre de ces jeux (conférence Molé, association des Étudiants…), elle s’assimile le goût de la propagande populaire, de la prédication morale et sociologique, elle désire répandre sa bonne parole, et conformer sur le modèle, par elle jugé le meilleur, ses contemporains ductiles.
Ne dites pas : C’est beau de langage, mais c’est faux de pensée : ce sont là de vaines paroles ; les grands écrivains se trouveraient fort peu dédommagés du reproche d’avoir mal pensé par la louange d’avoir bien dit.
Ce qui est incontestablement admirable, c’est la forme du langage, l’ampleur et la richesse des tours, le jet abondant et intarissable de la parole.
Les plus antiques des sages et des poètes, ceux qui ont mis la morale humaine en maximes et qui l’ont chantée sur un mode simple converseraient entre eux avec des paroles rares et suaves, et ne seraient pas étonnés, dès le premier mot, de s’entendre.
On peut dire tout ce qu’on voudra, maint noble cœur prendra parti pour Marie Stuart, même quand tout ce qu’on a dit d’elle serait vrai. » Cette parole que Walter Scott met dans la bouche de l’un des personnages de son roman (L’Abbé), au moment où il prépare le lecteur à l’introduction auprès de la belle reine, reste le dernier mot de la postérité comme des contemporains, la conclusion de l’histoire comme de la poésie.
Imprudent, qui n’as pas compris toutes les ruines que peut couver une parole mauvaise, et toutes les révolutions que peut enfanter une conduite coupable !
» Ces nobles paroles, et d’autres encore que l’on pourrait rappeler, sont un peu gâtées par des vers violents et d’un goût détestable, que M.
On releva dans le discours de Barthélemy quelques néologismes : il disait en parlant des États généraux et des espérances, déjà troublées, qu’ils faisaient naître : « La France… voit ses représentants rangés autour de ce trône, d’où sont descendues des paroles de consolation qui n’étaient jamais tombées de si haut. » La singularité de cette phrase, selon la remarque de Grimm, fut fort applaudie : Barthélemy inaugurait à l’Académie le style parlementaire et ce qu’on a tant de fois répété des discours du trône.
Mais tandis que le premier changement s’opère sous des conditions purement physiques, que l’intervention des autres hommes et du milieu ne peut modifier que d’une façon insensible, la croissance intellectuelle et morale semble déterminée en grande partie par cette intervention, par l’exemple immédiat des paroles et des actes, par la notion qui est le legs des exemples et des efforts passés.
Il a d’admirables trouvailles de mots ; par l’appariement des paroles, il sait rendre la nature du choc nerveux brusque ou lent, dont l’affectent ses sensations.
« Son érudition abondante révélait tout de suite l’ancien moine… Son front, séparé en deux parties, non par une ride (il n’en a jamais eu), mais par un sillon très léger, renfermait (c’étaient ses propres paroles) d’un côté la science profane, et de l’autre la science sacrée.
Voyez, dans une même patrie, les gens de la plaine et ceux de la montagne, ceux qui communiquent, par tout leur être, avec le sol rocheux, l’air sec, avec les bruyères, avec les grands flamboiements de soleil sur des surfaces arides ; regardez à côté et étudiez ceux que la vie enferme dans l’ombre moite des forêts ; observez le visage des mêmes travailleurs qui change avec les saisons, la couleur de leurs paroles ou de leurs yeux qui varie plus d’une fois en un jour, et dites si nous ne sommes pas un peu les sujets de ce monde que nous dominons par la pensée ?
Cependant le romancier, d’un air entendu, frappe de la main sur ses dossiers ; et les reporters, sur sa parole, nous jurent qu’il n’a rien dit qu’il ne puisse prouver, en forme de preuve authentique, dont ne témoigne la collection du Gil Blas et du Figaro.
Alors, m’adressant au premier sachem (toujours Louis XIV) : « Puissant Soleil, lui dis-je, Ononthio vient de prononcer une parole qu’un génie ennemi lui aura sans doute inspirée : mais toi qu’Athaïnsie (la vengeance) n’a pas privé de sens, tu es trop prudent pour te persuader que nous sommes tes esclaves. » À ces paroles, qui sortaient ingénument de mes lèvres, il se fit un mouvement dans la hutte (cette hutte est le palais de Versailles). […] Il ne prononça qu’une parole. » Mais l’auteur ne nous dit pas laquelle. […] « Aben-Hamet se prosterna, adora Blanca encore plus que le ciel, et sortit sans prononcer une parole. » Tous sont sublimes, mais le musulman l’est particulièrement. […] Louis XVIII, en sacrifiant sa vie, gagnera la seule bataille qu’il aura livrée ; il la gagnera au profit de la liberté du genre humain. » Mais le vieux roi entendait mal ces paroles sublimes. […] Le roi netto manqua sur-le-champ à sa parole.
Cela ne renverse rien et n’édifie rien non plus ; mais ce ne sont point de mauvaises paroles. […] On ne peut, au moins comme parole de bon augure, qu’accepter cette conclusion d’un ouvrage qui se place parmi les plus belles œuvres historiques qu’il nous ait été donné de connaître. […] L’auteur s’y retire et s’y dissimule respectueusement derrière ses personnages (Eugénie de Guérin, Maurice de Guérin, Barbey d’Aurevilly) et n’y prend la parole lui-même qu’aussi peu qu’il est possible. […] La parole prononcée est sans pudeur. […] Personne, d’abord, ne prit la parole pour nier qu’il y eût des principes.
Il lui manquait de quoi renouveler sa vision des choses et la matière délicieuse que donnent le silence et la parole des yeux qu’on a choisis. […] La voix d’Unruh est sourde, mais, précisément, son génie oratoire, c’est un déchaînement dans les mots et une retenue dans la parole. […] À peine avais-je fermé la Guerre à vingt ans 67, que je me reprochais cette sournoise irritation causée par les paroles du jeune biographe de Barrès ! […] Le surréalisme pur, comme vous l’entendez, est impossible, la parole même le fausse, et l’écriture. […] ce n’est pas un mince sujet d’étonnement de constater d’un orateur qu’il n’a point donné que des paroles, et d’un ministre qu’il s’était rendu capable de son emploi avant même de l’occuper !
Son idéal n’est pas bien haut, et on peut dire qu’il n’a pas d’idéal ; mais il semble avoir voulu prouver, et par ses paroles et par son exemple, quelle bonne règle morale ce serait déjà que l’intérêt bien entendu, avec un peu de bonté, qui serait encore de l’intérêt bien compris. […] On dirait un chrétien du IIIe siècle attaquant les païens, ou un homme de parti de notre temps qui ne peut dire une parole, dans l’entretien le plus indifférent, sans exprimer son horreur pour le parti adverse. — Et, en effet, sa critique, toute de détail, a bien ce caractère. […] Scélérat, un tel homme l’est de temps on temps, quand l’occasion s’en présente ; burlesque, il l’est sans cesse, dans toute parole et dans tout geste, et de toute sa personne et de toute la suite naturelle de sa vie. […] » — « Ci gît la parole d’un Normand ! […] Ce n’est vrai que pour ceux qui ne font que les écouter, et qui s’en tiennent à leurs paroles.
Notre condamnation de la formule romantique se résume dans cette parole sévère : pour détruire une rhétorique, il ne fallait pas en inventer une autre. […] Il suffit qu’on chante, les étrangers eux-mêmes n’ont pas besoin de suivre les paroles. […] La première fois que je l’ai entendu, je suis resté stupéfait de toutes les grâces dont il a semé ses paroles. […] Et, lorsque Condé ose demander une parole, le capitaine lui répond à peu près ceci : — Vous avez la mienne ! […] Voyez vous ce routier se promenant avec des blancs-seings de la reine, faisant la leçon aux grands capitaines, donnant sa parole avec des gestes de matamore !
Pierre Les bonnes paroles font toujours plaisir. […] Car pour lui, tout ne se passera pas en paroles.
Je la comparerais plutôt à un orateur sacré, plein de grâce et de modestie, qui compte sa propre parole pour rien, et croit avoir fait par ses commentaires tout ce qu’il peut faire, s’il persuade à ses auditeurs de sonder d’un cœur et d’un esprit purs le texte de la Parole divine.
En présence de tous ses courtisans il se reprocha le tort qu’il avait eu de ne pas l’employer assez, et dit en peu de mots tout ce qu’on pouvait dire de plus honorable en faveur de celui qu’il regrettait. « Le ciel suprême, dit-il, est irrité contre moi ; il m’a enlevé le trésor le plus précieux de mon royaume en m’enlevant le sage qui en faisait la principale gloire et le plus bel ornement. » Ce magnifique éloge, tout mérité qu’il était, aurait pu être regardé comme un tribut que ce prince payait à la coutume, s’il ne l’eût fait suivre par quelque chose de plus durable que les paroles. […] Une faute lui en fait éviter cent autres ; celles mêmes de ses prédécesseurs lui servent infiniment. — Tai-tsong était si frappé que l’histoire fît mention des paroles, des actions et des fautes de ses prédécesseurs, qu’il s’observait avec beaucoup de soin, et s’effrayait lui-même par la pensée de ce qu’on dirait de lui dans la suite des siècles. « Je me juge moi-même, disait-il, par les choses que je blâme et que j’improuve dans mes prédécesseurs.
Mais il vaut mieux en ceci des prières que des paroles. […] C’est de Bossuet, ces paroles.
Le temps n’est, suivant la grande parole de Timée, qu’une image mobile de l’éternité. […] La métaphysique, loin d’être le bégayement de l’intelligence humaine, en est au contraire la parole la plus nette et la plus haute.
Le chaos, le ciel, la terre, Géo et Céto, Jupiter dieu des dieux, Agamemnon roi des rois, les peuples, troupeaux dès le commencement, les temples, les villes, les assauts, les moissons, l’Océan ; Diomède combattant, Ulysse errant ; les méandres d’une voile cherchant la patrie ; les cyclopes, les pygmées ; une carte de géographie avec une couronne de dieux sur l’Olympe, et çà et là des trous de fournaise laissant voir l’Érèbe, les prêtres, les vierges, les mères, les petits enfants effrayés des panaches, le chien qui se souvient, les grandes paroles qui tombent des barbes blanches, les amitiés amours, les colères et les hydres, Vulcain pour le rire d’en haut, Thersite pour le rire d’en bas, les deux aspects du mariage résumés d’avance pour les siècles dans Hélène et dans Pénélope ; le Styx, le Destin, le talon d’Achille, sans lequel le Destin serait vaincu par le Styx ; les monstres, les héros, les hommes, les mille perspectives entrevues dans la nuée du monde antique, cette immensité, c’est Homère. […] Pierre disait : On peut détourner les paroles de Paul en de mauvais sens.
A travers tous ces accidents subsiste l’expression substantielle, et dans maintes scènes le plus beau est l’impassibilité du masque un, épandant les paroles hilarantes ou graves. […] Que si ce sont des pudeurs du public que l’on doive respecter, l’on ne peut arguer ni d’Aristophane, dont maintes éditions ont en note à toutes les pages : Tout ce passage est rempli d’allusions obscènes ; ni de Shakspeare (sic), de qui l’on n’a qu’à relire certaines paroles d’Ophélie et la célèbre scène, coupée le plus souvent, où une reine prend des leçons de français.
La sorcière accroupie et murmurant tout bas Des paroles de sang, lave pour les sabbats La jeune fille nue ; Hécate aux trois visages Froisse sa robe blanche aux joncs des marécages ; Écoutez. — L’heure sonne ! […] si je t’avais lu, je t’aurais adressé la parole, je t’aurais touché la main, je t’aurais demandé ton amitié, je me serais attaché à toi par cette chaîne sympathique qui relie entre elles les sensibilités isolées et maladives pour lesquelles la température d’ici-bas est trop froide, et qui ne peuvent vivre que de l’air tiède de l’idéal de la poésie et de l’amour, cette poésie du cœur !
Toutes les tours d’ivoire seront démolies, toutes les paroles seront sacrées et, ayant enfin bouleversé la réalité, l’homme n’aura plus qu’à fermer les yeux pour que s’ouvrent les portes du merveilleux. »az Une fois pour toutes, condamnés en bloc les cadres agréables, divertissements et plaisirs destinés à celer ce que l’intelligence risquerait de découvrir de plus ou moins contraire à l’individu, si nous nous refusons à user, en vue de profit individuel, des faits ou dispositions favorables, il est dès lors non moins injuste d’aller chercher dans une apparence néfaste des raisons contre l’esprit. […] Les tours d’ivoire seront démolies, toutes les paroles seront sacrées et l’homme, s’étant enfin accordé à la réalité, qui est sienne, n’aura plus qu’à fermer les yeux pour que s’ouvrent les portes du merveilleux. » Éluard procède d’une façon proche de Crevel, reprenant les mêmes éléments, citations, notes de lecture qu’il cite parfois de mémoire, recycle et ajuste en des contextes différents, avec des variantes.
Parce que le sujet hypnotisé finit par avoir chaud quand on lui répète avec insistance qu’il a chaud, il ne suit pas de là que les paroles de la suggestion soient déjà chaudes. […] Bornons-nous à dire que l’entendement, imitant le travail de la nature, a monté, lui aussi, des appareils moteurs, cette fois artificiels, pour les faire répondre, en nombre limité, à une multitude illimitée d’objets individuels : l’ensemble de ces mécanismes est la parole articulée.
Elle a du cœur ; ne lui demandez pas l’agrément, mais dites : Il manquerait à cette cour une figure et une parole des plus originales si elle n’y était pas.
Il la perdit après peu d’années de mariage, et tomba dans un abattement et un désespoir qu’il crut éternel ; on lui doit cette justice qu’il fit tout son effort pour conserver et consacrer cette disposition d’âme, et il eût volontiers écrit alors à M. de Tréville, ou à tel autre de ses amis avancé dans la pénitence, cette belle parole qui résume toute la piété d’un deuil vertueux : « Priez Dieu d’accroître mon courage et de me laisser ma douleur. » On a dans plusieurs lettres de lui, et dans des réflexions écrites en ce temps-là, l’expression très naturelle et très vive de ses sentiments ; il s’écriait : Dieu a rompu la seule chaîne qui m’attachait au monde ; je n’ai plus rien à y faire qu’à mourir ; je regarde la mort comme un moment heureux… Que je me trouve jeune !
Soyez sociable ; faites honneur à la vertu dans le monde. » Et il redouble lui-même de légèreté en écrivant, comme pour lui donner l’exemple avec le précepte : « On a besoin d’être sans cesse la faucille en main, pour retrancher le superflu des paroles et des occupations. » Jamais la piété de Fénelon ne se montre mieux ce qu’elle est que dans ces lettres au vidame d’Amiens, c’est-à-dire une piété douce, commode, simple, exacte, ferme et gaie tout ensemble, une piété qui s’allie avec tous les devoirs et qui se ressouvient du grand seigneur devant les hommes jusque dans la perfection de l’humilité devant Dieu : Un homme de votre rang ne fait point assez, et il manque à Dieu quand il ne s’occupe que de curiosités, que d’arrangement de papiers, que de détails d’une compagnie, que de règlements pour ses terres.
Duveyrier portant la parole pour les électeurs se félicitait également en leur nom de recevoir les anges de paix que l’Assemblée leur envoyait.
Dès ce moment, monsieur, je vous mis au nombre de trois ou quatre personnes que j’aime et que j’honore sur tout le reste du monde… De telles paroles s’ajoutent bien au peu que nous en apprend l’histoire, pour laisser en nous l’idée de M. de Puylaurens comme n’étant ni un factieux ni un favori vulgaire.
En reconnaissant dans ses œuvres de l’esprit, de la facilité, de l’élégance et quelque agrément, mais en ne trouvant pas dans ses vers, pour le critiquer avec ses propres paroles, Certain je ne sais quoi qui manque à leur beauté, on se fait toutefois une question, on se demande à quoi tient la vie dans les productions de l’esprit et de l’imaginalion, d’où vient ce don et ce souffle qui fait les beaux vers sans vieillesse.
Le fait est que dans les discours, dans les apologies, dans les lettres, dans ce qui se rapproche de la parole vive et parlée (où il devait exceller), le style de Rohan est bien meilleur que dans la narration, qui reste chargée sous sa plume et parfois assez obscure.
Comment, quand il s’agit de Mme de Maintenon, par exemple, qui évite de prendre hautement parti, qui s’abstient volontiers et se renferme dans une réserve prudente, comment venir nous dire : « Sûre d’elle-même, elle ne l’était pas autant des personnes qui recherchaient sa recommandation ; elle craignait les causeries et les commentaires de salon…, et tout ce bruyant désordre d’actes et de paroles que sa présence avouée dans tel ou tel camp aurait occasionné, et qu’une neutralité, qui n’était autre chose que le sage isolement d’une mystérieuse spontanéité, pouvait seule empêcher ?
Royer-Collard, indigné de la résistance des organes, me dire de ce ton qui donnait aux paroles tout leur sens : « Ne vieillissez pas, monsieur !
une chimère… Et pourtant quand tu penchas ta tête charmante sur mon épaule, quand des paroles enivrantes sortirent de ta bouche, quand je te vis prête à m’entourer de tes mains comme d’une guirlande de fleurs, il me fallut tout l’orgueil de mes années pour vaincre la tentation de volupté dont tu me vis rougir.
Il est un peu dur, l’humeur dédaigneuse et méprisante avec les hommes, un peu de vanité, un peu d’envie, et fort (peu) commode s’il n’était roi : gardant sa parole avec une fidélité extrême, reconnaissant, plein de probité, haïssant ceux qui en manquent, ferme en tout ce qu’il entreprend59. » Dès l’âge de quinze ans, Louis XIV, qui fait les campagnes de 1653, 1654, 1655, montre une grande ardeur à se distinguer, à faire exactement son métier de roi, dût-il manquer aux prescriptions de son médecin.
Malgré les dédains et les ironies de Gœthe les jours où sa parole coupait comme la bise, sa fréquentation, au total, sa familiarité prolongée est saine pour l’esprit et rassérénante (sain est un mot qu’il aime).
Ce résumé, on peut le croire, ne terminait rien : la cohue d’opinions subsistait ; il y avait en ces jeunes têtes si doctes, si enivrées de leurs idées et si armées de la parole, excès d’intolérance, d’outrecuidance, c’était inévitable ; on s’injuriait, mais on ne se détestait pas ; les récréations, avec leur besoin de mouvement et d’exubérance physique, raccommodaient tout, et quelquefois le soir on dansait tous ensemble tandis que l’un d’eux jouait du violoncelle et un autre de la flûte.
Cette manière était noble sans être exagérée, et quoique ce prince fût naturellement timide, il avait assez travaillé sur son extérieur pour que sa contenance ordinaire fût ferme, sans la moindre apparence de morgue ; en public, son regard était assuré, peut-être un peu sévère, mais sans autre expression : en particulier, et surtout lorsqu’il adressait la parole à quelqu’un qu’il voulait bien traiter, ses yeux prenaient un singulier caractère de bienveillance, et il avait l’air de solliciter l’affection de ceux auxquels il parlait.
Jocelyn d’une part, de l’autre les Paroles d’un Croyant et les Affaires de Rome, sont, à ne voir que l’écrivain même, d’admirables et riches preuves de puissance et de fertilité.
C’était étrange, c’était nouveau… il n’en fallait pas davantage pour que mon Dumas fût empaumé, je devrais dire emballé, car il fut, dès le principe, un des plus fervents adeptes des nouvelles doctrines, un adepte, plutôt un apôtre, prêchant d’exemple et de parole : “Songez donc, me disait-il, la vie de l’être, de l’Humanité, est là toute entière !
Dans les sciences exactes, toutes les bases sont invariables ; dans les idées morales, tout dépend des circonstances : l’on ne peut se décider que par une multitude de considérations, parmi lesquelles il en est de si fugitives qu’elles échappent souvent même à la parole, à plus forte raison au calcul.
De cette façon la science parfaite s’achèvera par une langue bien faite347 Grâce à ce renversement du procédé ordinaire, nous coupons court à toutes les disputes de mots, nous échappons aux illusions de la parole humaine, nous simplifions l’étude, nous refaisons l’enseignement, nous assurons la découverte, nous soumettons toute assertion au contrôle, et nous mettons toute vérité à la portée de tout esprit.
Son originalité est de noter toutes les choses extérieures par lesquelles les hommes se révèlent ; ce sont d’abord leurs actes, et leurs paroles, puis leur geste, leur physionomie, toute leur apparence physique, puis leurs habits et leur train de maison, leur logement, leurs meubles, leurs repas ; c’est leur profession : Lesage, avant Diderot, n’oublie jamais de faire entrer la condition dans la composition du caractère.
Ainsi, selon ses propres paroles, chaque animal a son pays, sa patrie naturelle, où il est retenu par une nécessité physique.
« … Dès lors, ai-je dit dans Science et Hypothèse, cette affirmation la Terre tourne n’a aucun sens… ou plutôt ces deux propositions, la Terre tourne, et, il est plus commode de supposer que la Terre tourne, ont un seul et même sens. » Ces paroles, ont donné lieu aux interprétations les plus étranges.
Fichte, qu’en France, bien entendu, on eût appelé un impie, faisait tous les soirs la prière en famille ; puis on chantait quelques versets avec accompagnement de piano ; puis le philosophe faisait à la famille une petite homélie sur quelques pages de l’Évangile de saint Jean, et, selon l’occasion, y ajoutait des paroles de consolation ou de pieuses exhortations.
Je viens à vous — vous le savez, on vous l’a dit, il y aurait affectation de ma part à ne pas l’avouer — sans habitude de l’enseignement ni de la parole.
Madame de Sévigné cite fréquemment La Fontaine dans ses lettres à sa fille ; dans ses épanchements maternels elle emprunte souvent de lui des paroles d’affection et de tendresse.
Ces paroles excitèrent, chez ceux mêmes qui s’étaient choqués d’abord, un sentiment de cordialité et de confiance qui, depuis, ne s’est plus démenti.
Le jugement de Cuvier, couronné d’une ou deux des paroles de Buffon, embrasserait probablement l’entière vérité.
L’élégance commune de la forme n’y dérobe plus l’insipidité du fond, et quelques observations fines y surnagent à peine dans des flots de paroles.
Le lendemain, de bon matin, au Conseil auquel assistait Fouquet avec les autres ministres et secrétaires d’État, Louis XIV dit : « Messieurs, je vous ai fait assembler pour vous dire que jusqu’à présent j’ai bien voulu laisser gouverner mes affaires par feu M. le cardinal, mais que dorénavant j’entends les gouverner moi-même ; vous m’aiderez de vos conseils quand je vous les demanderai. » Fouquet entendit ces paroles sans y croire.
Cousin, et de cette parole, déjà si nette et si tranchée, de M.
[NdA] Il faut citer les paroles mêmes de Mme de Maintenon, qui font un si grand contraste avec l’épicuréisme insouciant de Regnard ; c’est dans une lettre à la princesse des Ursins (19 juin 1707) : « Nous sommes dans un lieu délicieux.
À la fin de cette fable d’Un animal dans la Lune, La Fontaine célèbre le bonheur de l’Angleterre qui échappait alors aux chances de la guerre, et, dans cette première et pleine gloire de Louis XIV, il fait entendre des paroles de paix ; il le fait avec délicatesse et en saluant les exploits du monarque, en reconnaissant que cette paix si désirée n’est point nécessaire : La paix fait nos souhaits, et non point nos soupirs.
Il prend à la lettre ces paroles de sa préface : « Je n’ai pas naturellement l’esprit désapprobateur. » Il le loue d’avoir fait contre-poids par des idées de respect pour les choses existantes à l’esprit de censure qui s’attaquait au bien comme au mal.
Personne ne peut remplacer sa parole dans cet impayable récit : « Monsieur, excusez mon entrée si insolite, — (fit-il, l’impétueux !)
Ils s’entendent à demi-mot, chacun achevant la phrase de l’autre ou lui coupant la parole pour lui dire : « Bien, assez, j’ai compris. » Ils se contredisent rarement, et plus volontiers s’attellent tour à tour à la même idée pour la dévider jusqu’au bout.
Survienne une parole radicale et passionnée, elle les polarise dans une direction unique. […] Ce feu qui, chez Isaac, se consume en agitation de paroles et de conduite, chez ses deux fils, dévore obscurément l’âme. […] Ce pli caustique et impatient du visage, cette sensibilité toujours sur ses gardes et agressive, « cette souffrance intérieure » (je laisse ici la parole à Adolphe)… qui refoule sur notre cœur les impressions les plus profondes, qui glace nos paroles, qui dénature dans notre bouche tout ce que nous essayons de dire, et ne nous permet de nous exprimer que par des mots vagues, ou une ironie plus on moins amère », tout cet obscur drame psychologique, à un tel degré d’acuité, ne saurait être, n’est pas ici, le simple effet d’une situation contrariée dans la vie. […] Car c’est une action, et épuisante, que de s’enivrer perpétuellement de paroles, de faire d’éternelles confidences, de recommencer infatigablement l’histoire de sa propre personnalité, depuis l’instant où Dieu la créa « dans un jour de colère d’apathie ». […] Il se roidissait contre les douces paroles du vieillard. « Vous m’aviez promis de devenir honnête homme.
Grâce à eux, les musiciens en réputation commencent à croire que la poésie bien faite n’empoisonne pas la musique, comme les marchands de paroles au boisseau en font courir le bruit ; et tous les compositeurs jeunes vont demander des libretti aux jeunes écrivains, comme les élégants vont chez les meilleurs faiseurs. […] Les gens soi-disant bien informés envoyaient des nouveautés de ce genre : *** « Pendant la campagne d’Egypte, le général Bonaparte, montrant les pyramides à ses troupes, leur adressa ces paroles mémorables : « Soldats ! […] — En attendant, reprit Virmaître, comme nous comprenons qu’il faut que jeunesse s’amuse, nous avons décidé qu’un encouragement vous serait accordé. — Saint-Alme, vous avez la parole. […] Quand le premier service fut achevé, l’impatiente curiosité des dames ne pouvant se prolonger au-delà, le marquis de L… se leva et prit la parole en ces termes : Mesdames, je comprends parfaitement la surprise que vous témoignez en me retrouvant au milieu de vous, ou en vous retrouvant au milieu de moi, comme il vous plaira. […] La cloche du départ se fait entendre : on remonte en voiture, — et, à la liberté d’espace dont chacun jouit, on s’aperçoit qu’il manque— quelqu’un et quelque chose. — Ce quelqu’un et ce quelque chose, — c’est Nadar et ses jambes. — Tout le wagon entonne à l’unanimité, sur une musique vague, un hymne à l’indépendance, qui commence, comme tous les hymnes de ce genre, par ces paroles : « Libres du joug qui nous oppresse. » Cet enthousiasme est troublé par un double cri d’épouvante échappé à un des voyageurs, qui, en se penchant à la portière, vient d’apercevoir Nadar marchant sur la voie et suivant le train, au petit pas, en fumant son cigare. — Au premier arrêt, — il se fait ouvrir la portière, et se réallonge de nouveau d’un pôle à l’autre du wagon ; le désordre se rétablit.
Les voix ânonnantes des élèves, dont je distinguais, de la cour, toutes les paroles, s’atténuaient, puis n’étaient plus qu’un bourdonnement, à mesure que je m’éloignais sous les vieux arbres, dans la pénombre des massifs. […] J’allais alors la remercier, et elle m’embrassait, en recommençant à rire… Cette verve bizarre ne se bornait pas aux paroles, j’écrivais aussi. […] Ce discours, qui s’adressait plutôt aux élèves de dix-huit ans, qu’aux petites comme moi, je le suivais cependant sans en perdre un mot, et la sœur Fulgence était certainement éloquente, car sa parole me communiquait son enthousiasme et m’ouvrait tout un monde magnifique. […] Quand le moment fut venu, elle prononça d’une voix ferme et sonore les paroles qui la liaient à jamais. […] Les deux plus fortes de la classe, hors du rang, comme des chefs d’armée, se penchaient attentives et recueillaient les paroles : — Quatre assemblés, deux ronds de jambes, trois jetés battus, une pirouette… Elles répétaient le pas et, quand elles l’avaient bien compris, le branle commençait, la mélodie sonnait plus haut, accentuant les temps forts, et le maître, toujours assis, gigotait de plus belle.
CharIton Bastian, reprend la parole, et M. de Varigny vient de traduire de l’anglais son curieux plaidoyer. […] Lamarck qui, à la fin de chacune des paroles brusques et offensantes de l’empereur, essayait inutilement de dire : C’est un livre d’histoire naturelle que je vous présentent la faiblesse de fondre en larmes. » L’ouvrage que Napoléon traitait avec ce dédain était la Philosophie zoologique, c’est-à-dire le livre même dont le Muséum d’histoire naturelle vient de fêter le centenaire en inaugurant un monument à la gloire du fondateur de la biologie. […] Les plaisirs de l’oreille ne sont guère que d’entendre des paroles, mais c’est plutôt un plaisir de sentiment ou d’intelligence. […] Le seul crime est le crime de violence, Peu importe qu’on ma sollicite par des écrits ou des paroles : le mal ne commence qu’au moment où on m’y plie par la force. […] On confond les actes ou les paroles avec les mots qui synthétisent ces actes ou ces paroles.
Michelet, « est le pays des beaux parleurs, abondants, passionnés (au moins pour la parole), et, quand ils veulent, artisans obstinés du langage ; ils ont donné Massillon, Mascaron, Fléchier, Maury, les orateurs et les rhéteurs. […] Même lorsque Rousseau tient une idée juste, trop souvent il la compromet par les excès de sa parole et de son humeur. […] Ainsi, dans les légendes allemandes, la musique donne la vie et la mort33. » La musique dit plus que la parole, parce qu’elle dit avec moins de précision : c’est là sa supériorité, et, si l’on veut, son infériorité tout à la fois. […] Les lettres à Juliette sont les cris de la passion la plus concentrée, mais les mots lui sont rebelles : « Ma poitrine est pleine de tout ce que j’ai à te dire ; il y a des moments où je trouve que la parole n’est rien. » — Dans la musique seule il put épancher la tendresse infinie dont son cœur débordait… Ne pouvant avoir aucun des bonheurs de ce monde, il prit son art comme la langue sacrée qui pouvait élever jusqu’à Dieu les passions humaines. […] Ce voile léger est d’or chez Paul Véronèse et chez le Titien ; chez le Guide, il est d’argent et d’azur… » Seulement il faut se garder de croire, comme les paroles de Stendhal pourraient le faire supposer, que ce ton général soit choisi de sang-froid et adopté par délibération.
Et ces paroles qu’on lui fit dire après l’avoir un peu contemplé : Mon Dieu, qu’il est grand !
Sages paroles, et qui peuvent se lire dans le même moment qu’on a entre les mains les Épîtres d’Horace.
Mais quand je ne songeais qu’à bien faire dans cette carrière nouvelle, d’autres ne songeaient qu’à m’entraver dès le seuil et à m’ôter la parole, comme ils eussent fait dès longtemps de ma plume, s’ils l’avaient pu.
Besenval excédait donc un peu le ton de Versailles par son feu et par une certaine liberté de paroles qu’il ne demandait pas mieux qu’on mît sur le compte d’un reste de franchise helvétique.
Il a écrit quelque part dans un de ses derniers articles, ces paroles qui, bien qu’ayant un sens plus général là où il les dit, expriment évidemment l’impression qu’ont dû lui laisser les années pénibles de l’apprentissage : Aujourd’hui la lutte est partout, et aussi le sérieux triste.
» Ici nous retrouvons quelques-unes des idées particulières et, si l’on veut, des préventions de Vauvenargues, un reste de gentilhomme, ou plutôt un commencement de grand homme ambitieux, qui aimerait mieux franchement être Richelieu que Raphaël, avoir des poètes pour le célébrer que d’être lui-même un poète ; qui aimerait mieux être Achille qu’Homère : « Quant aux livres d’agrément, ose-t-il dire, ils ne devraient point sortir d’une plume un peu orgueilleuse, quelque génie qu’ils demandent ou qu’ils prouvent. » Il ne permet tout au plus la poésie à un homme de condition et de ce qu’il appelle vertu, que « parce que ce génie suppose nécessairement une imagination très vive, ou, en d’autres termes, une extrême fécondité, qui met l’âme et la vie dans l’expression, et qui donne à nos paroles cette éloquence naturelle qui est peut-être le seul talent utile à tous les états, à toutes les affaires, et presque à tous les plaisirs ; le seul talent qui soit senti de tous les hommes en général, quoique avec différents degrés ; le talent, par conséquent, qu’on doit le plus cultiver, pour, plaire et pour réussir. » Ainsi la poésie, il ne l’avoue et ne la pardonne qu’à titre de cousine germaine de l’éloquence, et qu’autant qu’elle le ramène encore à une de ces grandes arènes qui lui plaisent, à l’antique Agora ou au Forum, ou à un congrès de Munster, en un mot à une action directe sur les hommes.
Si juste dans ses paroles, dans ses pensées ; si attentive, et d’un si bon naturel !
Montaigne disait donc (et à travers le secrétaire on sent de plus en plus le langage et l’accent magistral, comme sous de certaines pages de l’abbé Ledieu on sent la parole de Bossuet), — il disait : « Qu’on ne voyait rien de Rome que le ciel sous lequel elle avait été assise et le plan de son gîte ; que cette science qu’il en avait était une science abstraite et contemplative, de laquelle il n’y avait rien qui tombât sous les sens ; que ceux qui disaient qu’on y voyait au moins les ruines de Rome en disaient trop, car les ruines d’une si épouvantable machine rapporteraient plus d’honneur et de révérence à sa mémoire : ce n’était rien que son sépulcre.
Elle se plut de bonne heure aux entretiens de ce frère poëte d’imagination et de nature : « Il m’était si doux de t’entendre, de jouir de cette parole haute et profonde, ou de ce langage fin, délicat et charmant que je n’entendais que de toi !
Ses lettres qui sont la partie durable de son œuvre et qu’on devrait recueillir à part, dans un volume où il n’y aurait pas autre chose, sont semées de paroles d’or.
Tu vas me dire : Voilà de belles paroles J’espère ne pas m’en tenir là ; d’ailleurs quand l’idée vous en vient naturellement, il y a déjà la moitié du chemin de fait. » Horace était alors dans sa trente et unième année.
Mais le soir on se reposait, on secouait sa fatigue, et la chambre de l’artiste se remplissait d’amis et de camarades qui se dédommageaient par une orgie de paroles d’avoir travaillé ou rêvé tout le jour : « Ces nuits, disait Gavarni en les dépeignant de sa plume la plus vive, ces nuits résument bien la journée elle-même.
Ici le poète prend la parole et semble prier pour un moment le peintre de lui céder la place ; car, pour ces poètes déclassés, la critique est comme une lucarne qu’on leur ouvre, et il leur est difficile, quand la chose les intéresse un peu vivement, de ne pas passer la tête à la fenêtre pour dire : Me voici !
Herman s’approche, essaye de la consoler et lui prodigne les protestations, même les paroles de tendresse.
Et puis Mme de Staël savait la vie, le grand monde, les vraies fautes, et par cela même était plus contenue et plus chaste en paroles.
Le roi a une grâce d’état ; il se porte aussi bien que si rien n’était arrivé… » Tout à côté des paroles douloureuses et concentrées de la reine, on a de ces journées un récit complet, circonstancié, par une correspondante qui ne va plus cesser d’écrire durant ces trois années, et qui est du caractère le plus naturel, le plus accentué, le plus vif, je veux dire Madame Élisabeth.
Chatel, à qui l’on doit ces renseignements, a mis pour épigraphe à son travail une parole de Ménandre, qui revient à dire : « Faute d’observer les petites choses, on se fourvoie dans les grandes » ; et un autre mot de Quintilien, qui en est comme la traduction : « Ce sont de petites choses, à la vérité, mais sans lesquelles les grandes ne peuvent trouver de point d’appui122. » Dans cette mesure, c’est parfait, et il n’y a rien de minutieux dans les curiosités biographiques ainsi entendues.
A ce discours, M. de Lœwendal, par les conseils duquel M. le comte de Clermont s’était toujours conduit, prit la parole et dit au comte d’Estrées : « Vous êtes donc l’orateur de l’armée ?
Clément Brentano, venu là comme curieux, y est resté comme croyant, et a passé des années à recueillir, presque sous la dictée de l’humble fille, les paroles et descriptions en bas allemand, qui ne tarissaient pas sur ses lèvres.
» Aussi les images empruntées et les libres réminiscences se succèdent enchâssées avec art ; le palmier de Latone, auquel le vieillard compare les gracieux enfants, ne nous ramène-t-il pas vers Ulysse naufragé s’adressant en paroles de miel à Nausicaa ?
« Peu importaient ses paroles à ses assassins.
Je veux parler de l’imagination psychologique, du don de distinguer les formes générales des caractères et des vies humaines, et de composer les actes et paroles d’un personnage en parfait accord avec ses sentiments.
nous savons, tout de suite que c’est un imbécile, et « quel pauvre cerveau de paysan laborieux, quelle étroitesse d’intelligence cachent la solennité de ce lauréat académique fabricant d’in-octavos, sa parole à son d’ophicléide faite pour les hauteurs de la chaire », Mais M.
À travers la pratique dont il pense ennoblir sa voix, il dit pour elles des paroles voulues profondes ou somptueuses et qui sont sottises laborieusement alambiquées.
Beaucoup de choix et de netteté dans les pensées ; des paroles assorties et belles de leur propre harmonie ; enfin la sobriété nécessaire pour que rien ne retardât une impression, forment le caractère de leur bonne littérature.
Laissons donc les anecdotes, renvoyons-y les curieux, et écoutons ses paroles.
On peut lui appliquer ce qu’il a dit de son père, qu’il avait conservé jusqu’à la fin cette précieuse timidité d’une conscience vertueuse et tendre, qui répugne aux partis et même aux paroles sévères.
Son père l’avait emmené en Guyenne en bas âge ; là, dans son château de Bonnefons, il plaça près de lui un jeune précepteur, qui devint plus tard un prédicateur assez célèbre, l’abbé Anselme, sujet excellent, homme sensé et distingué, d’une piété éclairée, d’une morale exacte, qui donna à son élève les meilleurs préceptes et lui laissa les plus pures impressions : « Ce n’est point sa faute, dit M. d’Antin, si je n’ai pas l’esprit et le cœur faits comme je devrais l’avoir ; il n’y a rien oublié de sa part, ses paroles et ses actions étant toujours de concert. » Mais la nature avait mêlé dans cette âme délicate et molle des goûts de séduction qui ne demandaient que l’éveil.
L’abbé Boileau, qui était alors doyen de l’église cathédrale de Sens, fut obligé de porter la parole à la tête de son chapitre.
Cette jeune femme, sur laquelle tous les portraits s’accordent, était, dès l’âge le plus tendre, une perfection mignonne de bon sens, de prudence, de grâce et de gentillesse : Mme de Stainville, à peine âgée de dix-huit ans, nous dit l’abbé Barthélemy, jouissait de cette profonde vénération qu’on n’accorde communément qu’à un long exercice de vertus : tout en elle inspirait de l’intérêt, son âge, sa figure, la délicatesse de sa santé, la vivacité qui animait ses paroles et ses actions, le désir de plaire qu’il lui était facile de satisfaire, et dont elle rapportait le succès à un époux digne objet de sa tendresse et de son culte, cette extrême sensibilité qui la rendait heureuse ou malheureuse du bonheur ou du malheur des autres, enfin cette pureté d’âme qui ne lui permettait pas de soupçonner le mal.
Et Aristote croyait au fait d’Andron d’Argos, et Platon croyait au principe social de la communauté des femmes, et Gorgisippe croyait au fait de la terre plate, et Épicure croyait au fait de la terre portée par l’air, et Hermodamante croyait au fait des paroles magiques maîtresses du bœuf, de l’aigle, de l’ours et du serpent, et Echécrate croyait au fait de la maternité immaculée de Thémistoclée, et Pythagore croyait au fait du sceptre en bois de cyprès de Jupiter, et Posidonius croyait au fait de l’océan donnant à boire au soleil et des rivières donnant à boire à la lune, et Pyrrhon croyait au fait des tignes vivant dans le feu.
Cependant ils ont l’orgueil de leur race et opposent volontiers, en paroles sinon en actions, leur loyauté à la félonie de la race des hommes (v.
Rappelons-nous un mot magnifique de Chateaubriand : « Les grands génies doivent peser leurs paroles ; elles restent, et c’est une beauté irréparable. » 8.
La nôtre était de montrer par ces paroles que le cassant et impérieux comte de Maistre prévoyait sans horreur, et même sans étonnement, de telles circonstances, et qu’il donnait même au gouvernement, que dans son livre il arme contre elles, le conseil de leur obéir.
Je n’ai pas besoin de vous dire mon opinion : je suis Français avant tout, et je tiens à croire que Rouget de Lisle a composé l’air et les paroles en quelques heures, après un bon souper. […] le grand orateur a été trop ému pour répondre au discours qu’on lui a adressé, et ce prince de la parole est resté court. […] Non seulement on n’a jamais pu découvrir en elle la moindre trace de ruse féminine, ou de cette fourberie princière que la politique prétend excuser ; mais il est impossible à ceux qui l’approchent de mettre en doute l’entière franchise de ses moindres paroles. […] Éloquence publique, art de la parole. […] convaincu peut-être, et converti ; et cela dans une compagnie dont l’égalité est le principe et la parole est l’âme ; oui, — être menacé de ne plus sortir d’une même nuance et bientôt d’une même famille, être destiné, si l’on vit encore vingt ans, à voir se vérifier ce mot de M.
Maintenant assistons à ses efforts pour exprimer, avec son crayon seul, toutes les pensées que nous exprimons si aisément par la parole. […] Cette harmonie s’explique : presque toujours l’artiste, en même temps qu’il compose ses figures symboliques, se les traduit à lui-même par la parole intérieure. […] Nous pourrions nous donner le plaisir facile, pendant que nous avons la parole et qu’il ne peut répliquer, de l’accabler de nos ironies. […] Ils écrivent des histoires sans paroles. […] L’un répète les paroles du Christ, l’autre s’indigne, celui-là proteste de son innocence.
Moy mesme, qui fois singuliere conscience de mentir, et qui ne me soulcie gueres de donner creance et auctorité à ce que ie dis, m’apperçeois toutesfois aux propos que i’ai en main, qu’estant eschauffé, ou par la resistance d’un aultre, ou par la propre chaleur de ma narration, ie grossis et enfle mon subiect par voix,’ mouvements, vigueur et force de paroles, et encores par extension et amplification, non sans interest de la verité naïfve : mais ie le fois en condition pourtant, qu’au premier qui me ramene, et qui me demande la verité nue et crue, ie quitte soubdain mon effort, et la luy donne sans exaggeration, sans emphase et remplissage. La parole vifve et bruyante, comme est la mienne ordinaire, s’emporte volontiers à l’hyperbole. […] Je tiendrai parole : je me contenterai d’indiquer quelquesuns des beaux traits qu’on y lit. […] « Il vous coupa la parole.
Dumas, et le prix dont on la paye, c’est le mépris du sujet. » Ce mépris se traduit dans l’attitude, dans l’air du visage, dans le son de la voix et dans l’accent de la parole. […] Pour prêcher la parole de Dieu, il emploie tous les artifices du diable. […] D’après l’attitude où ils nous sont présentés, et d’après les paroles qui s’épanchent d’eux, on jurerait d’une collection de crétins. […] On le reconnaissait tout de même à son effervescence, à l’intempérance de sa parole, à sa manie prometteuse. […] Il leur adresse la parole : « Ah !
» Veuillot doute que « le héros des libres penseurs, Modère, recevant du Roi la même parole, eût répondu avec le même courage ». […] Or, Meyerbeer précisément partait pour la campagne, la tête pleine de musique, et la musique de Meyerbeer avait envie de se poser sur des paroles. Vite, des paroles ! […] Et l’on goûtait, à Port-Royal, un accord charmant des paroles et du lieu ; Racine revivait dans son paysage. […] Alors, il cherche la consolation et, dans l’Imitation de Jésus-Christ, découvre les paroles salutaires.
Ainsi, ceux qui se louent se mettant au-dessus des autres, les regardant comme les dernières parties de la société, et se considérant eux-mêmes comme les plus honorables, ils se rendent nécessairement odieux à tout le monde. » Les romantiques ne connaissaient assurément pas ces paroles du modeste et timide Malebranche ; et, les eussent-ils connues, qu’ils n’en eussent tenu compte. […] Chacun sait maintenant ce qu’il veut dire, on ne se paye plus de tirades ; on ne déclame plus ; on n’ouvre plus la bouche comme si chaque parole qu’on prononce allait ébranler le ciel et la terre » [Cf. […] — écrit Michelet, en 1866, — Voltaire, dans ses Lettres anglaises a dit la grande parole, le moderne Symbole ; le but de l’homme est l’action » [Cf. […] Affaires de Rome]. — Situation difficile de Lamennais. — Il publie ses Paroles d’un croyant, 1834. — Effet prodigieux du livre [Cf. […] I et II, — s’est détendue à mesure qu’il avançait en âge [Cf., dans les Affaires de Rome, ses descriptions de voyage] ; — et que, s’il y a du pastiche, — et de la déclamation dans les Paroles d’un croyant, — il y a aussi de la poésie.
Dorénavant pour les premiers personnages du royaume, hommes et femmes, ecclésiastiques et laïques, la grande affaire, le principal emploi de la vie, le vrai travail, sera d’être à toute heure, en tout lieu, sous les yeux du roi, à portée de sa parole ou de son regard. « Qui considérera, dit La Bruyère, que le visage du prince fait toute la félicité du courtisan, qu’il s’occupe et se remplit toute sa vie de le voir et d’en être vu, comprendra un peu comment voir Dieu fait toute la gloire et toute la félicité des saints. » Il y eut alors des prodiges d’assiduité et d’assujettissement volontaire. […] Et je n’ai pas décrit le détail infini de l’étiquette, le cérémonial prodigieux des grands repas, les quinze, vingt et trente personnes occupées autour du verre et de l’assiette du roi, les paroles sacramentelles du service, la marche du cortège, l’arrivée de « la nef », « l’essai des plats » ; on dirait d’une cour byzantine ou chinoise184.
Là-dessus, les frères consultant le testament paternel trouvèrent à leur grand étonnement ces paroles : Item j’enjoins et ordonne à mesdits trois fils de ne porter aucune espèce de frange d’argent sur ou autour de leurs habits… Suivait une pénalité en cas d’infraction, trop longue pour l’insérer ici. […] … La ville jurera qu’il a trompé par des paroles magiques la jeune fille sans défense ; tous les fats en riront, et diront que les savants ne valent pas mieux que les autres hommes… Quel soin paternel de cette jeune fille ; cinq mille guinées dans sa bourse, le docteur aurait pu imaginer pis38. » En 1714, la mère de Miss Vanhomrigh mourut ; elle accourut en Irlande avec sa sœur, et le supplice mérité de Swift commença.
Les maximes saines qu’il offre dans tous ses Apologues, lui méritent une place parmi les sages qui ont prêché la morale & la vertu, & qui ont donné la parole aux animaux pour instruire les hommes. […] Toutes ses paroles, toutes ses actions plaisoient d’autant plus, qu’elles portoient un certain air de négligence qui paroissoit la simple nature, & qui avoit toutes les graces de la naïveté.
C’est lui qui a écrit ces magnifiques paroles que l’Histoire, sévère jusque dans son amour, doit répéter souvent aux pouvoirs qu’elle aime : « Dans le monde politique moins qu’ailleurs, on ne sait pas prévoir les malheurs et s’y préparer. […] Pas plus tard qu’hier, Granier de Cassagnac était un orateur politique, d’une parole qui ressemblait à ses écrits, et d’un sens droit, ferme et pratique, à étonner ceux qui, l’ayant connu comme journaliste, l’avaient trouvé parfois paradoxal.
Le poète est celui chez qui les sentiments se développent en images, et les images elles-mêmes en paroles, dociles au rythme, pour les traduire. […] Des étrangers, conversant entre eux dans une langue que nous ne comprenons point, nous font l’effet de parler très haut, parce que leurs paroles, n’évoquant plus d’idées dans notre esprit, éclatent au milieu d’une espèce de silence intellectuel, et accaparent notre attention comme le tic-tac d’une montre pendant la nuit.
O che cosa sono le parole : crudeltà, idillio, cavalleria, vita domestica, e via enumerando, se non le espressioni di quei concetti ? […] Croce) que D’Annunzio, artiste païen et purement sensitif ou sensuel, s’est cru qualifié pour servir d’intermédiaire entre le pessimisme de l’Occident et la pitié slave, ou pour enseigner une « justice simple et virile », ou encore pour prononcer la « parole de vie » si ardemment attendue.
À défaut de ce honneur impossible, Mme Necker essayait quelquefois de lui indiquer d’autres sources de consolation et le souverain remède contre l’isolement du cœur ; elle lui avait fait promettre de lire l’ouvrage de son mari sur L’Importance des opinions religieuses, et elle avait, à l’occasion, sur ce sujet de christianisme et de monde invisible, des paroles amies et délicates, que Gibbon du moins ne repoussait pas.
Les autres chevaliers cependant se mirent à le railler et à le narguer à la française : « Bien fol est le roi, lui disait-on, s’il ne vous croit contre tout le conseil du royaume de France. » Au dîner qui suivit, le roi ne lui adressa point la parole comme il faisait d’ordinaire.
En effet, dans le Discours de M. de Morville, nous lisons, et les assistants purent entendre ces paroles : Il y a longtemps, monsieur, que votre amour pour les lettres est célèbre dans cette compagnie ; les applaudissements que vous y recevez aujourd’hui ne vous sont pas inconnus ; vous y devez être accoutumé, et vous les avez obtenus dans un âge auquel on ferait un mérite d’en concevoir l’espérance.
. — Quelques années après, il avait changé et s’était transformé encore, il était dans sa troisième et dernière phase, et son journal se termine par cette parole qui est un désaveu de la précédente et qui semble indiquer l’entrée définitive dans une autre sphère : Le stoïcien est seul, ou avec sa conscience de force propre le trompe ; le chrétien ne marche qu’en présence de Dieu et avec Dieu, par le médiateur qu’il a pris pour guide et compagnon de sa vie présente et future.
je crois étudier Frédéric, je me livre à le critiquer ou à l’approuver, je m’appuie au besoin de son autorité et de sa parole, et je suis dupe, je suis mystifié, je n’ai en main que du La Beaumelle, de la fausse monnaie à effigie de roi !
Quant à la rhétorique et à la poétique, elle s’en tint prudemment à la Lettre de Fénelon, qu’elle peut montrer à ses amis et à ses ennemis comme une charmante suite de questions et de projets : chacun là-dessus peut bâtir et rêver à son gré, sur la parole engageante du moins dogmatique des maîtres.
Chauvelin : « Il a fait le misérable traité de Séville, misérable parce que nous ne voulions pas l’exécuter, et que c’est un embarquement violent pour ne faire que cacade, paroles de pistolet et actions de neige. » On ne sait où il va prendre un pareil jargon : « Un financier a le train du prince, et n’a l’état, l’esprit et les manières que d’un poilou. » — « Je fus pouillé », pour : on me gronda.
Comme on lui faisait sentir l’inconséquence : « Je veux, dit-elle, rendre à la vertu par mes paroles ce que je lui ôte par mes actions. » Un autre jour, elle reprochait vivement à son amie la maréchale de Mirepoix de voir Mme de Pompadour, et se laissant emporter à la vivacité de l’altercation, elle alla jusqu’à dire : « Ce n’est, au bout du compte, que la première fille du royaume. » — « Ne me forcez pas de compter jusqu’à trois », répliqua la maréchale.
Mais quelle preuve plus convaincante pourrions-nous donner, que ses propres paroles et ses lettres où règne un ton d’affection sincère et de vérité ?
Le triomphe si bien ménagé de M. de Harlay en cette circonstance achève de nous le montrer dans tout son beau, j’allais dire dans tout son plein ; et, après tant de témoignages déjà produits, je ne saurais mieux le définir encore qu’avec les excellentes paroles de d’Olivet, qui cette fois (chose unique dans sa vie de grammairien et d’écrivain correct) a eu un ou deux traits de pinceau : « Personne ne reçut de la nature un plus merveilleux talent pour l’éloquence.
Sa parole suave, ses manières sans apprêt, sa familiarité rassurante, élevaient tout de suite ceux qui l’approchaient à son niveau.
j’aimerais autant dire que le Père éternel des petites-maisons n’est pas fou, que les paroles de l’opéra-buffa ne sont pas bêtes, que M.
Je vous expose, mon très cher frère, avec sincérité de cœur, les sentiments dans lesquels je suis, non sans bien des réflexions sur le passé et l’avenir de ce qui me regarde. » Et il terminait en s’appliquant cette parole de l’Écriture : « Deus dédit, Deus abstulit… Dieu me l’a donné, Dieu me l’a ôté : que son saint nom soit béni !
Quand il manifestait celle qu’il croyait avoir pour Mme de Staël, il écoutait les paroles qu’il lui adressait ; elle lui répondait, cherchant aussi, dans son éloquence, s’il n’y aurait pas quelques phrases qu’elle pût placer dans un de ses romans.
En parlant à un apôtre, il trouve lui-même des paroles d’apôtre.
Des yeux gris sous des sourcils touffus44, une face morte plaquée de taches, un petit visage qui diminuait encore sous son immense chevelure, le menton noyé dans une large cravate molle remontante, qui rappelait celle des incroyables et le négligé du Directoire, le nez en pointe insolemment retroussé, une lèvre inférieure avançant et débordant sur la supérieure, avec je ne sais quelle expression méprisante indéfinissable, fixée aux deux coins de la bouche et découlant de la commissure des lèvres45 ; un silence fréquent d’où sortaient d’un ton guttural quelques paroles d’oracle ; il y avait là de quoi faire, en causant, un vis-à-vis de première force à Royer-Collard, bien que celui-ci eût plus de sève et de verdeur.
Ce fut Mme Valmore qui puisa un jour tout son courage dans son amitié pour aller dire à Mlle Mars cette fatale parole que le public commençait à lui murmurer depuis quelque temps : « Il n’y a plus à tarder ; le moment est plus que venu ; il faut vous retirer. » Mlle Mars l’écouta et lui en sut gré : c’était à la fois une marque de bon cœur et de bon sens.
Son ami, l’auteur des Iambes, et aujourd’hui du Pianto, a osé beaucoup : proférant des paroles ardentes, et d’une main qui n’a pas craint quelque souillure, il a fouillé du premier coup dans les plaies immondes, il les a fait saigner et crier.
Sans le cantique qui rythme la rotation de la tige dans le trou du disque, le dieu violenté ne paraîtrait pas ; la parole l’excite plus que le frottement, il veut être chanté en même temps qu’attisé.
Le cadran que les nègres d’enseigne ont dans le ventre, madame Chariot l’a dans le cœur ; elle a juré de trahir sa pratique au coup de l’horloge ; elle tient sa parole.
sa parole complète à merveille son style.
Il n’a pas seulement jeté l’enchantement sur la passion, il a su, comme l’a dit Byron, donner à la folie l’apparence de la beauté, et recouvrir des actions ou des pensées d’erreur avec le céleste coloris des paroles.
Voici une de ses lettres en deux lignes, et qui en dit plus que toutes les paroles : De tous les instants de ma vie (1774).
Elle ne se marque guère qu’en un point : c’est un tuteur fictif, le tuteur de Mme d’Épinay, qui est censé raconter l’histoire de sa pupille, mais qui ne fait le plus souvent que lui céder la parole à elle-même, ainsi qu’aux autres personnages, dont il cite et insère au long les lettres, journaux ou conversations.
à tout bruit, à tout éclat ; l’autre qui proclame et prêche à haute voix ses doctrines, qui sème les germes à pleines mains à tous les vents, en apostrophant l’avenir ; Fontenelle qui se rattache encore à Descartes et à quelques-uns des grands esprits réguliers du siècle précédent, ou, qui pis est, aux précieuses ; et Diderot qui, en ses accès, par le désordre et la fougue de sa parole, semble déjà faire appel aux générations ardentes qui auront à leur tête Mirabeau ou Danton.
Chaque pensée, chaque parole de Mme de Gerfaut est pénétrée d’une tendresse qui ne se peut contenir et qui rayonne autour d’elle.
Et puis ce n’étaient pas seulement les paroles, mais les actions du duc de Lauzun, qui avaient de l’extraordinaire et qui enlevaient par leur imprévu.
C’est l’abbé de Pradt qui a dit cela en tête d’un de ses écrits (Les Quatre Concordats) ; et, sans regarder toutes les paroles que jetait cet homme d’esprit comme autant d’oracles, il est juste de tenir compte de ses jugements, surtout quand il s’agit du style de pamphlets, de brochures politiques, de ce style qui prend et mord sur le public, même en matière sérieuse : l’abbé de Pradt s’y connaissait.
» Cette parole, détournée, involontairement sans doute, de son vrai sens pour les besoins de la polémique, a pris plus tard, à la grande surprise de celui dont elle avait été l’interjection, les proportions d’une formule.