Il est dommage que cette date circonstanciée, qu’il note avec complaisance, ne se rattache pas à une œuvre plus digne de souvenir. […] M. de Chateaubriand, par exemple, qu’il eut occasion de voir vers l’époque d’Atala et du Génie du christianisme, et à qui il adressa de belles observations critiques dans son Ministère de l’homme-esprit (observations que M. de Chateaubriand ne lut jamais), n’avait gardé de Saint-Martin qu’un souvenir inexact et infidèle ; il lui est arrivé de travestir étrangement, dans un passage des Mémoires, la rencontre qu’il eut avec lui ; et lorsqu’il eut été averti par moi-même que Saint-Martin avait parlé précisément de cette rencontre et en des termes bien différents, il ne répara qu’à demi une légèreté dont il ne s’apercevait pas au degré où elle saute aujourd’hui à tous les yeux. […] Il mourut subitement dans le joli pays d’Aulnay, chez son ami le sénateur Lenoir-Laroche, le 13 octobre 1803. — Dans ce souvenir rapide que je viens de lui consacrer et dont j’ai cru qu’il était digne, je ne vais point jusqu’à conseiller de relire aucun ouvrage de lui : « Ceux qui ont de l’âme, disait-il, prêtent à mes ouvrages ce qui leur manque : ceux qui ne les lisent point avec leur âme leur refusent même ce qu’ils ont. » S’il disait cela en son temps et à l’heure de la publication, que sera-ce à plus de cinquante ans de distance ?
Le prince de Ligne aurait voulu que M. de Meilhan, dans l’émigration, écrivît ses mémoires : Écrivez, lui disait-il, des souvenirs, des mémoires de votre jeunesse, ministériels, et de Cour et de société ; — vos brouilleries et vos raccommodements de Rheinsberg, la vie privée et militaire du prince Henri, ses valets de chambre comédiens français, ses houzards matelots, ses chambellans philosophes ; et puis les zaporogues et les évêques du prince Potemkim, et ensuite vos conversations avec le prince de Kaunitz ; — ce sera un ouvirage charmant. […] Ce raffinement se décèle dans le recueil des maximes que Saint-Alban est censé léguer en souvenir à son fils. […] Le souvenir de la liaison de Mme du Deffand et d’Horace Walpole se présente aussitôt à l’esprit, et l’on se demande involontairement : « N’y eut-il rien, chez Mme de Créqui, de ce sentiment possible à tout âge chez une femme, et qui la porte avec un intérêt tendre vers un homme dont quelques qualités la séduisent ?
La vue de ces mots tracés il y a plus de vingt ans, le souvenir de ces épingles choisies par Nancy (sa sœur), tout cela m’a bouleversée. […] [NdA] Je m’étais trompé en cet endroit, lorsque l’article, pour la première fois, parut dans Le Moniteur ; j’avais voulu rattacher à Mme de Coigny et à sa fille le souvenir de La Jeune Captive. […] Épicharme, cité par Polybe, se borne à donner un conseil pratique et familier : « Sois sobre et souviens-toi de te méfier : ce sont les articulations du bon sens. » 34.
Berthelin s’est souvenu qu’Amadis Jamyn, que recommandait de son côté M. […] Que les poésies de Louise Labé, la belle Gordière, à laquelle se rattachent des souvenirs plus ou moins romanesques, n’aient cessé d’être réimprimées de temps en temps dans la patrie lyonnaise, il n’y a pas lieu de s’en étonner. […] Une chose a été dite et bien dite par un Ancien ; on l’a dans la mémoire, on la répète si l’on est un pur écho, on y fait allusion si l’on est un homme d’esprit ; tout homme qui a la tête meublée de ces beaux mots des Anciens, qui s’en souvient en pensant et en parlant, et qui tient à en faire ressouvenir les autres, est un classique.
Une bonne cote hardie Me donna de vingt florins d’or ; Il m’en souvient moult bien encor ; en s’en tenant aux âges plus rapprochés et après que le français proprement dit se fut entièrement dégagé du roman, dès l’aurore du xvie siècle, on trouve quelques points saillants : dans les premiers livres français imprimés (mystères, romans de chevalerie ou autres), un bon nombre le fut à Chambéry ; on rencontre archevêque à Turin Claude de Seyssel, l’historien de Louis XII et l’infatigable traducteur : il était né à Aix en Savoie. […] Mais il suffira de donner ici sa jolie pièce du Papillon, qui, pour la grâce et l’émotion, ne dépare pas. le souvenir de ses autres écrits. […] Maintenant en route vers la Russie, où des affaires l’ont rappelé et où l’accompagnent nos vœux, M. de Maistre a laissé ici, au passage, des souvenirs bien durables chez tous ceux qui ont eu l’honneur de l’approcher.
Il y aurait une manière bien simple, bien commode, et à la fois bien juste, de recommander ces volumes ; nous nous hâterions de dire qu’à une grande variété de sujets sur lesquels le critique a répandu tous les assortiments d’une érudition exacte et fine, se joint le mérite d’un style constamment net, rapide, élégant ; que la nouveauté des points de vue n’exclut en rien les habitudes et les souvenirs de la plus excellente et de la plus classique littérature ; que l’ancienne critique s’y trouve toute rajeunie, en ayant l’air de n’être que continuée. […] Magnin de se trop souvenir peut-être dans quelques occasions, et de reprendre trop juste les choses où elles étaient hier. […] En introduisant ce brin de politique entre des pages plus fraîches et restées plus neuves, en y oubliant, comme par mégarde, ce coin de cocarde, le critique littéraire a voulu sans doute témoigner qu’il avait sur certains points des opinions, des principes, rappeler qu’il les avait soutenus, et faire entendre qu’il s’en souvenait comme de tout le reste.
Ce n’est que quinze ans après, que ce triste et doux souvenir, gardien de sa jeunesse, s’affaiblit assez chez lui pour lui permettre d’épouser une autre femme ; et alors il commence une vie bourgeoise et de ménage, dont nul écart ne le distraira au milieu des licences du monde comique auquel il se trouve forcément mêlé. […] On se souvient des magnifiques vers de l’Épître à Ariste, dans lesquels Corneille se glorifie lui-même après le triomphe du Cid : Je sais ce que je vaux, et crois ce qu’on m’en dit. […] Marquise, si mon visage A quelques traits un peu vieux, Souvenez-vous qu’à mon âge Vous ne vaudrez guère mieux.
Les Mémoires de M. de Ségur finissent là aussi, comme s’il avait voulu les clore sur les derniers souvenirs de sa belle et vive jeunesse. […] Successivement nommé au Corps législatif, à l’Institut, au Conseil d’État et au Sénat, grand maître des cérémonies sous l’Empire, nous le perdons de vue à cette époque au milieu des grandeurs qui le ravissent aux lettres, mais non pas à leur amour ni à leur reconnaissance : une élégie de madame Dufrenoy a consacré le souvenir d’un bienfait, comme il dut en répandre beaucoup et avec une délicatesse de procédés qui n’était qu’à lui. […] A côté des exemples à la Plutarque dont il l’autorise, et qui feraient un peu trop lieu-commun en se prolongeant, arrive un souvenir d’hier, un mot de Catherine, une de ces anecdotes de xviiie siècle que M. de Ségur conte si bien ; on passe avec lui d’Épaminondas à l’abbé de Breteuil, et le tout s’assaisonne, et l’on rentre en souriant dans le réel de la vie.
Dès les premières années du seizième siècle, elle engage en effet une lutte formidable avec l’esprit classique, avec les idées païennes, avec les systèmes de la philosophie antique, avec les souvenirs des premiers siècles du christianisme. […] Et qu’on ne cite pas Jean-Jacques comme une exception ; Jean-Jacques, il faut toujours s’en souvenir, est un protestant qui a été catholique ; un genevois qui, dans la mystique Savoie, à l’âge où l’âme garde, comme une cire molle, toutes les impressions, a pris part aux solennités de l’Eglise romaine ; il a suivi le lent déroulement des processions sous les arceaux des cathédrales ; il a respiré la fumée enivrante de l’encens ; il a rempli ses yeux d’un spectacle doux à la vue et son cœur d’une doctrine plus tendre que forte, plus féminine que virile. […] Avec Chateaubriand, Lamartine, les adeptes du romantisme commençant, elle a été pour la théologie une auxiliaire d’autant plus efficace qu’elle était moins sermonneuse et plus mondaine ; elle a ramené les indifférents et les tièdes aux offices par le charme de sa parole d’or ; elle a ravivé le sentiment d’angoisse et de mélancolie que l’homme éprouve devant l’énigme de sa destinée, devant la mort qui l’engloutit avec toutes ses ambitions ; elle a poétisé les ruines couronnées de lierre des vieux cloîtres écroulés, la mystérieuse pénombre des cathédrales, la voix lointaine des cloches éveillant même en l’homme qui ne croit plus les souvenirs de sa pieuse enfance ; elle a dit et redit les aspirations inassouvies de l’âme humaine vers l’infini de l’espace et du temps.
Le poète s’en vante dans les Grenouilles d’Aristophane : — « Vous souvient-il d’avoir vu ces Phrygiens qui venaient chez Achille, avec Priam, pour racheter le cadavre d’Hector, et combien de figures diverses ils ont faites ? […] Homère les oublie, Pindare s’en détourne, Sophocle s’en souvient à peine. […] Même pendant le sommeil, le souvenir amer des maux pleut autour de nos cœurs ; et, même malgré nous, la sagesse arrive, présent du Dieu assis sur les hauteurs vénérables. » De cette foi profonde jaillit la sève vertueuse qui circule partout chez Eschyle, sa flamme morale, son souffre sublime, son zèle de la justice, sa haine ardente de l’iniquité.
Pour couper court avec ceux qui se souviendraient que j’ai autrefois, il y a plus de quinze ans, fait un Portrait de Béranger tout en lumière et sans y mettre d’ombre, je répondrai que c’est précisément pour cela que je veux le refaire. […] Elle se résume dans le refrain : c’est par là qu’elle lui est venue, et c’est par là qu’elle demeure aussi dans notre souvenir, bien supérieure souvent à ce qu’elle est par l’exécution. […] M. de Pontmartin s’est quelquefois souvenu de ces anciennes relations ; j’ai été étonné pourtant que l’écrivain homme du monde et de bonne compagnie se fût permis, à d’autres fois, de juger si lestement et si souverainement de mes pensées et de mes sentiments intérieurs, comme lorsqu’il a écrit que « je n’avais jamais rien aimé et jamais cru à rien ».
Nous avons vu une fois, si l’on s’en souvient, Jean-Jacques Rousseau en correspondance avec une de ses admiratrices qui s’était éprise de lui jusqu’à oser l’aimer. […] Elle lui rendait surtout, et utilement pour son talent d’artiste, les impressions et la fraîcheur du passé qu’il avait perdues dans sa vie un peu factice : « Mes souvenirs de jeunesse connaissent tout ce que tu me dis, lui écrivait-il ; cela me fait l’effet du lointain qu’on se rappelle tout à coup distinctement, quoiqu’on l’ait pendant longtemps oublié. » Il ne se prodigue pas pour elle, mais jamais il ne la rebute ; il lui donne la réplique tout juste assez pour qu’elle ne se décourage pas et qu’elle continue. […] Cette liaison passa graduellement à l’état de culte immuable et de souvenir.
Je goûte aussi la solitude, La paix du cœur, la douce étude, Les vieux auteurs grecs et romains… C’est ainsi que Fontanes, grand maître de l’Université à son tour, célébrait le souvenir de son humble prédécesseur, en se promenant du côté du château de Colombes d’où Rollin aurait aimé à dater son Histoire. […] Et moi j’ai le regret d’observer qu’ici l’homme de parti dissimule un peu ; si l’on prend en effet l’article biographique écrit après la mort de Rollin dans les Nouvelles ecclésiastiques, c’est-à-dire dans la feuille janséniste pure, on lit en propres termes l’aveu qui y est tourné à son honneur : Avant la clôture du cimetière, il y était, dit le biographe, l’un des plus assidus ; et l’on se souvient avec édification de l’y avoir vu fréquemment psalmodier auprès du tombeau, avec les fidèles qui s’y assemblaient. […] Elle ne transmettra point ces traditions qui sont l’honneur des familles, ni ces bienséances qui défendent les mœurs publiques, ni ces usages qui sont le lien de la société ; elle marche vers un terme inconnu, entraînant avec elle nos souvenirs, nos bienséances, nos mœurs, nos usages ; et les vieillards ont gémi de se trouver plus étrangers, à mesure que leurs enfants se multipliaient sur la terre.
Pauvres hommes, en qui si peu d’années de plus ou de moins déplacent si fort l’importance des points de vue, et qui se souviennent si inégalement des mêmes choses, selon la diversité des âges ! […] Quand il eût eu dans le cœur quelques restes de tendresse pour cette femme, elle se serait évanouie par le récit que je lui fis de l’inégalité de son humeur et de la légèreté de son esprit ; mais cette idée était déjà tellement effacée, qu’il ne lui en restait aucun souvenir, et depuis ce temps je ne me souviens point de lui avoir ouï nommer son nom.
Elle cherchera partout l’écho, partout la vie d’hier ; et elle s’inspirera de tous les souvenirs et des moindres témoignages pour retrouver ce grand secret d’un temps qui est la règle de ses institutions : l’esprit social, — clef perdue du droit et des lois du monde antique. […] Un siècle a d’autres outils de survie, d’autres instruments et d’autres monuments d’immortalité : il a, pour se témoigner au souvenir et durer au regard, le bois, le cuivre, la laine même et la soie, le ciseau de ses sculpteurs, le pinceau de ses peintres, le burin de ses graveurs, le compas de ses architectes. […] Nous l’avons évoqué dans ces monuments peints et gravés, dans ces mille figurations qui rendent au regard et à la pensée la présence de ce qui n’est plus que souvenir et poussière.
Laura Bridgman se souvient encore de l’émotion horrible qu’elle ressentit, toute petite, au toucher d’un cadavre. […] Nous comparons l’image ; que nous fournit l’art avec celle que nous fournit le souvenir ; nous approuvons ou nous critiquons. […] Mais il s’y mêle, d’habitude beaucoup d’autres plaisirs d’un caractère plus sensitif : en effet, l’image intérieure fournie par le souvenir se trouve ravivée au contact de l’image extérieure, et devant toute œuvre de l’art nous revivons une portion de notre vie.
Quant au naturalisme, nous devons nous souvenir que nous voyons non pas seulement avec nos yeux, mais avec toutes nos facultés. […] Whistler écrivait toujours l’Art, et si nous nous en souvenons bien, il l’écrit encore avec un A majuscule. […] Son cœur, son esprit, son imagination étaient toujours préoccupés de souvenirs et de rêves anglais, et de la culture telle qu’il l’avait reçue de l’Angleterre. […] Le souvenir, alors même que le flux et le reflux du changement mobile se lasse de vieillesse, donne à la terre et aux cieux, par l’effet du chant et celui de l’âme, leur gloire. […] Voir les illustrations du curieux volume Les débuts de Botany Bay, souvenirs d’un convict, publiés par Albert Savine (1911).
Ce fut de l’enthousiasme, si je me souviens bien, et Zola en demeura tout foudroyé. […] C’est que je me souviens de Villiers, lorsqu’il revint de son dernier voyage en Belgique. […] Ces souvenirs du passé, et ces souvenirs d’hier, me gênent pour dire tout le mal que pensent de la Belgique certains jeunes, affamés de réclame, et qui s’imaginent qu’on les vole quand on parle d’autres écrivains qu’eux. […] Qu’on honore son souvenir, c’est bien. […] Et ce souvenir qui lui survit, et qui survit à son œuvre oubliée, pourquoi le prostituer dans de douteuses équipées ?
A mon premier article du National sur Boerne, s’il m’en souvient), on me fit dire que l’Angleterre et l’Amérique étaient des reliques, de saintes reliques de liberté : j’avais écrit des contrées.
Si, parfois, il se souvient des quelques prosaïsmes de Walt Whitman (À une locomotive), il rappelle, par contre, la pureté douce de Keats.
Fernand Séverin font souvenir de ceux de Racine et de Shelley, de Chénier et de Keats et quelquefois de ceux de Lamartine ; mais, comme la déplorable bien que judicieuse manière de comparer une œuvre peinte à une œuvre écrite prévaut quelquefois et exprime d’une façon plus exacte les beautés qui les caractérisent, il nous semblerait donner une idée des poèmes de M.
Les années passées, le Salon avait, s’il m’en souvient, un air sombre, terne et grisâtre.
Ce prestige du passé, cette séduction du souvenir, ce charme subtil de l’histoire, j’essayerai de vous montrer à quel point Racine l’a subi. […] voilà ce qu’on ne demandera désormais à l’histoire que de décorer du prestige de ses souvenirs ! […] de quel souvenir viens-tu frapper mon âme ! […] je m’en souviens, le jour que son courage Lui fit chercher Achille ou plutôt le trépas. […] Souvenons-nous d’ailleurs qu’une tragédie seulement passable n’est pas déjà si facile à faire.
Le romancier s’est souvenu de Ruth et de Booz, d’Abisaïg et de David. […] Pour moi, je pris ce jour-là une des meilleures leçons de haute politique dont il me souvienne. […] Vous souvient-il d’un jour où, pour descendre dans une mine, on vous affubla d’habits de garçon ? […] Naguères encore (vous en souvient-il ?) […] Faguet aurait dû s’en souvenir davantage.
Hermia, la mère de Cœlio, se souvient d’avoir été belle et conte à son fils le drame d’amour dont elle fut l’héroïne. […] Le temps apaisa cette vivacité de colère ; il n’emporta ni la tristesse, ni le souvenir. […] Mme Pasteur te remercie de ton souvenir. […] Rappelle-moi au souvenir de M. […] Quels liens le souvenir d’anciennes voluptés a-t-il noués entre ces deux êtres ?
Cela fait, presque tout est fait ; car il n’y a plus qu’à mener l’auditeur pas à pas, de gradin en gradin, jusqu’aux dernières conséquences « Madame la maréchale aura-t-elle la bonté de se souvenir de sa définition Je m’en souviendrai : vous appelez cela une définition Oui C’est donc de la philosophie Excellente Et j’ai fait de la philosophie Comme on fait de la prose, sans y penser. » — Le reste n’est qu’une affaire de raisonnement, c’est-à-dire de conduite, de bon ordre dans les questions, de progrès dans l’analyse. […] Pour appliquer la satire, ils n’avaient qu’à regarder ou à se souvenir. […] L’une des plus belles strophes de Souvenir est presque transcrite (involontairement, je suppose) du dialogue sur Otaïti.
C’est pour l’avoir oublié à l’heure où il fallait s’en souvenir, que la crise a été si terrible et qu’elle nous agite encore. […] L’élévation du front, le bleu de l’œil, l’ovale du visage, l’épaisseur majestueuse mais un peu lourde du menton, rappelaient en lui le Bourbon et faisaient souvenir du trône. Le cou souvent incliné, l’attitude modeste du corps, la bouche un peu pendante aux deux extrémités, le coup d’œil adroit, le sourire caressant, le geste gracieux, la parole facile, rappelaient le fils d’un complaisant de la multitude et faisaient souvenir du peuple. […] Le vénérable fils de M. de Sèze a remué ses souvenirs de quatre-vingts ans pour me prouver l’inexactitude de détail de mon récit en ce qui touche son père.
Souvenirs, Plon, in-8, t. […] Discours. in-8. 1826. — Le duc Victor de Broglie (1785-1869), gendre de Mme de Staël, fut un des principaux doctrinaires, plusieurs fois ministre sous Louis-Philippe : Ecrits et Discours. 1863, 2 vol. in-8 ; Souvenirs, 4 vol. in-8, G. […] Souvenirs, C. […] Souvenirs contemporains, 2 vol. in-8, 1862.
Liberté fière, ignorance de toute intrigue, nulle vanité, simplicité de mœurs, humeur un peu farouche, bienveillance de pessimiste pour les personnes… je ne dis point que ces vertus ou ces dispositions sont impliquées par son scrupuleux objectivisme critique ; mais, quand on connaît qu’il les a en effet, le souvenir de ses livres fait qu’on n’en est point étonné, et que l’on s’y attendait. […] Je reviens à son âme, qui était gracieuse et noble, et qui alla toujours s’embellissant. — Il faut se souvenir ici que les pages les plus douloureuses peut-être et les plus imprégnées de l’amour de la terre natale qui aient été écrites sur l’« année terrible » sont d’Alphonse Daudet. — Il ne faut pas oublier non plus que cet homme dont la sensibilité et l’imagination furent si vives et l’observation si hardie, n’a pas laissé une seule page impure ; qu’en ce temps de littérature luxurieuse, et même lorsqu’il traitait les sujets les plus scabreux, une fière délicatesse retint sa plume, et que l’auteur de Sapho est peut-être le plus chaste de nos grands romanciers. […] Car imaginer, c’est, inexorablement, se souvenir : et de quoi Bernadette se souviendrait-elle ?
Il raconte alors l’existence de Prakriti dans une vie antérieure : — elle avait été la fille d’un fier Brahmane ; le roi Tchandala, qui se souvenait d’une existence antérieure de Brahmane, désirait pour son fils la fille d’un Brahmane, à laquelle son fils avait un violent amour ; par fierté et orgueil, la fille du Brahmane refusa le retour-d’amour et railla le malheureux. […] … » le souvenir apparaît, hélas ! […] — jadis fut un charme pervers, un attirement sortilégique, un enchantement païen ; jadis, une luxure terriblement belle ; et ce souvenir le hante ; et lui qui croit la promesse du Maître, il geint sous la Concupiscence, et il hurle les infinies lamentations, toujours vibrantes, du Crucifié qui palpite en sa chair. Pour les mondes pécheurs Christ a agonisé, à cause qu’il avait la désirante pitié des Désirs… ô pitié du Seigneur, vois ton fils agonisant, palpitant, crucifié : il fut le Saint, et le Pur, et le Bon ; il chanta ton nom, lui qui pleure aujourd’hui ; agréable il te fut, ce réprouvé ; il fut ton garde, ton serviteur, ta force, ta splendeur, ta joie, lui qui presque blasphème, et qui se perd, l’affolé des sensuels souvenirs, et qui tournoie en la démence de sa chair, et se maudit, ne connaissant plus ta parole… ta divine parole sous l’effort des concupiscences se fait étrange, elle s’altère, elle se corrompt, voilà qu’elle se fait autre affreusement, et c’est des sons magiques : la prière à Dieu se tourne en suggestion d’enfer : rude, le sortilège ramène la mauvaise ; et elle est… Ô pensée toujours vive des délices coupables, inoubliable, inoubliable pensée !
D’autres fouillaient les antiques souvenirs, les ruines, les arceaux et les créneaux, et du haut de la colline, assis sur les débris du château gothique, ils voyaient la ville moderne s’étendre à leurs pieds comme une image encore propre à ces vieux temps, Comme le fer d’un preux dans la plaine oublié ! […] Je ne sais rien d’aussi touchant dans son recueil, de mieux senti, que les stances de souvenir qu’il a adressées à une fontaine de son pays du Bourbonnais, la Font-Georges : elles me rappellent des stances de Ronsard à la Fontaine Bellerie et surtout celles qui ont pour titre : De l’élection de mon sépulcre.
Ce désaccord, qui tenait à la rapidité des temps et à l’empressement honorable des premières générations, a graduellement cessé ; depuis une douzaine d’années surtout, l’Université ne se lasse pas de former dans ses écoles, d’exercer dans ses concours, une jeune et forte milice qui soutiendrait le choc dans les luttes philologiques contre nos rivaux d’outre-Rhin, et qui n’a pas à rougir non plus devant les souvenirs domestiques, devant les traditions exhumées de la vieille Université d’avant Rollin. […] Depuis l’amateur qui l’a saluée d’un coup d’œil et qui s’en souvient avec grâce, jusqu’à celui qui s’initie lentement à ses mystères ; depuis l’heureuse nature qui en a été allaitée et pétrie dès l’enfance, jusqu’à l’esprit fait qui tard y revient et tâche, comme Alfieri, comme Marie-Joseph Chénier, de se l’inoculer par réflexion, qui en épelle et qui en reconquiert chaque beauté, tous y gagnent et trouvent de ce côté seulement la patrie première, le point fixe et lumineux pour s’orienter dans les écarts comme dans les retours.
Leconte de Lisle a le malheur de n’être pas chrétien, il aurait pu, du moins, s’abstenir d’un titre (Dies iræ) qui rappelle à toutes les mémoires la plus sublime, la plus terrible de nos prières funèbres ; il aurait pu se souvenir que la poésie a mieux à faire qu’à enlever à la vie la croyance et l’espérance de la mort : ceci soit dit sans rien ôter au mérite de cette pièce où se traduit, d’une façon vraiment saisissante, non plus le désabusement humain dont parlait M. […] Alexandre Dumas fils Si vous prenez Le Lac de Lamartine, la Tristesse d’Olympio de Victor Hugo, le Souvenir ou une des Nuits, celle que vous voudrez de Musset, vous aurez avec les chœurs d’Athalie, d’Esther et de Polyeucte, avec l’admirable traduction en vers de l’Imitation par Corneille, vous aurez à peu près le dernier mot de notre poésie d’amour terrestre et divin.
L’une de nos entrevues, surtout, reste gravée dans mon souvenir. […] Je me souviens de la joie d’un jeune ouvrier maçon à peine échappé du service militaire, à qui Verlaine avait permis de copier des fragments de Sagesse.
— Il faut se souvenir que le cerveau le moins humain et le plus faux de ce siècle aura été le cerveau d’un poète, et du plus grand ! […] Je me souviens d’avoir ressenti un plaisir violent en contemplant un mur de l’Acropole, un mur tout nu (celui qui est à gauche quand on monte aux Propylées).
Souvenons-nous désormais de faire cette réflexion, dans les accidens qui peuvent nous survenir. […] Il est vrai qu’il est un peu imité du Tasse ou de l’Arioste, je ne me souviens plus lequel des deux.
Ils sont d’ailleurs plus près du fait que de la pensée, et, quand ils pensent, ils inventent moins qu’ils ne se souviennent. […] Dans sa position d’amiral et de Français, car cela fut longtemps une position que d’être Français à la cour de Russie, il aurait pu voir bien des choses, et s’en souvenir, mais il n’avait point le regard qui pénètre.
N’y a-t-il plus là qu’un souvenir qui pèse sur une tombe, la nuée seule d’un souvenir sinistre, allégé par le temps, et que le souffle du P.
Privés de renseignements et d’objets de comparaison, les critiques futurs prendraient pour de l’invention ce qui n’est qu’imitation et souvenir. […] Nous indiquerons le grand morceau : Le triomphe de Bacchus à son retour des Indes, pris, sauf erreur, au vieux Baïf : Le chant de l’Orgie avec des cris au loin proclame Le beau Lyœus, le Dieu paré comme une femme, Qui, le thyrse en main, passe rêveur et triomphant, A demi couché sur le dos nu d’un éléphant, etc., etc, et, avec plus d’éloges encore, la pièce appelée Désespérance, où l’assonance la plus inattendue a presque sur l’esprit puissance de pensée, et dissout les nerfs dans la plus noble des mélancolies : Tombez dans mon cœur, souvenirs confus, Du haut des branches touffues !
Princes, s’il nous arrive de vous donner le nom de dieu, c’est pour vous faire souvenir de ce que vous devez être. […] Prince, s’écrie l’orateur, puisqu’il a rejeté la clémence du tyran, il a droit à la tienne. » Il l’invite à conserver les semences et les restes épars des connaissances et des lettres : « Ce sont elles qui font la gloire d’un siècle et d’un empire ; c’est donc à elles qu’il faut confier le souvenir immortel de ton nom. » Alors il lui fait observer que tant qu’il y aura des hommes sur la terre, il y en aura qui cultiveront la philosophie et les arts ; ce sont eux qui font la renommée : ils se transmettent de siècle en siècle les noms de leurs bienfaiteurs, et ces bienfaiteurs sont immortels comme leur reconnaissance.
Le tyran excite nos imaginations ; mais qui donc se souviendrait du bonhomme Macbeth ? […] Les premiers tableaux de Courbet, de Manet furent accueillis par des huées ; aujourd’hui, ce souvenir honteux nous humilie. […] Cet ardent souci du souvenir des hommes, au moment de périr par une mort violente, a déjà son ordre de grandeur. […] Qui se souvient d’Habert aujourd’hui ? […] Stendhal prétendait qu’un auteur avait atteint la perfection lorsqu’on se souvenait de ses idées sans pouvoir se rappeler ses phrases.
Et le comte, s’en souvient-on ? […] Souvenez-vous que, parti d’une condition modeste. […] Shakespeare n’a pu mêler que l’âme de son temps avec un peu des souvenirs de la Grèce antique. […] Ils ont tous deux au cœur d’amers et salissants souvenirs ? […] Si tu trouves mieux, tu m’oublieras ; sinon, tu te souviendras de moi.
Il y a deux manières d’écrire qu’on peut observer chez tous les auteurs : l’une consiste à se souvenir, l’autre à oublier. […] Le poète se sentait attiré du côté du Rhin par les souvenirs du moyen âge qui convenaient à ses opinions d’abord légitimistes. […] orgueilleuse insensée Malgré toi tu t’en souviendras ! […] Il m’en souvient comme si c’était d’hier. […] Monsieur, les banquettes de la Comédie-Française en gardèrent trois ans le souvenir.
Les témoins de cette scène en garderont à jamais le souvenir. […] On se souvint de la théorie du beau geste. […] Ils peuvent du moins en aviver le souvenir et en raviver le culte. […] Peut-être a-t-il fait de vagues humanités ; il ne s’en est pas souvenu. […] Jenny Dacquin vieillit avec ce cher souvenir.
Ces cruelles et sacrilèges Poésies, qui insultent Dieu et le nient et le bravent, rappellent involontairement les plus grandes douleurs de l’orgueil humain, et on y retrouve comme un grandiose souvenir des yeux convulsés de la Niobé antique, des poignets rompus du Crotoniate et de la cécité de Samson dans l’entre-deux de ses piliers, — cette terrible cécité, qui renverse quand elle tâtonne !
Elle a défendu âprement et avec des rires la cause du petit et du faible ; elle a prononcé les paroles d’espoir et de consolation ; elle s’est attendrie au souvenir du village natal dont elle a retrouvé, tant de fois la parole familière et sonore ; elle s’est élevée jusqu’à l’ode et à la tragédie ; et lyrique, et magnifique, et bien française, elle vient de chanter l’épopée héroïque de notre Jeanne d’Arc… [La Cigale (mars-juin 1900).]
Il ressuscite sous quelques notes de vielle, de flageolet ou de cornemuse le souvenir des belles châtelaines et des pages qui hantent toujours les tours, croulantes encore sur la colline, au-dessus des chaumes. — C’est Izel : Doux musiciens, frôlez les harpes d’argent ; La reine Izel est couchée avec son page ; Doux musiciens, frôlez les harpes d’argent.
[Souvenirs poétiques de l’école romantique (1880).]
Ne te souvient-il plus, perfide, de ce jour Que, pâle & tout tremblant, tu parus à ma Cour ; Qu’encor tout effrayé des horreurs du naufrage, Ma pitié mit ta flotte à l’abri de l’orage ; Et que, me demandant secours en ton malheur, Avecque ce secours je te donnai mon cœur ?
À la vérité, les deux scènes ne se peuvent comparer, ni pour la composition, ni pour la force du dessin, ni pour la beauté de la poésie ; mais le triomphe du christianisme n’en sera que plus grand, puisque lui seul, par le charme de ses souvenirs, peut lutter contre tout le génie d’Homère.
L’Italie aux cent princes et aux magnifiques souvenirs, contraste avec la Suisse obscure et républicaine.
Les ruines changent de caractère en Égypte : souvent elles offrent dans un petit espace diverses sortes d’architecture et de souvenirs.
Les autres sont presque devenus pour nous les évenemens d’une histoire étrangere, d’autant plus que nous n’avons pas le soin de perpetuer le souvenir des jours heureux à la nation par des fêtes et par des jeux annuels, ni celui d’éterniser la memoire de nos heros, ainsi que le pratiquoient les grecs et les romains.
Il cherchait de jolies scènes rustiques, de touchants souvenirs, des sentiments curieux ou purs. […] En un instant nos catalogues, nos raisonnements, tout l’attirail des souvenirs et des préjugés disparaît de sa mémoire ; les choses lui semblent neuves ; il est étonné et il est ravi ; un flot impétueux de sensations arrive en lui et l’oppresse ; c’est la séve toute-puissante de l’invention humaine qui, arrêtée chez nous, recommence à couler chez lui. […] On le suit parmi les carrefours bruyants, le long du brouillard jaunâtre, sous le soleil morne qui se lève au-dessus de la rivière comme un boulet rouge, et on écoute, le cœur serré, les profonds sanglots, l’agitation insensée d’une âme qui veut et ne peut s’arracher à ses souvenirs. […] Une âme fine peut s’emporter, atteindre parfois la fougue des êtres les plus violents et les plus forts ; des souvenirs personnels, dit-on, lui avaient fourni la matière de Maud et de Locksley Hall ; avec une délicatesse de femme, il avait eu des nerfs de femme. […] Son long poëme In memoriam, écrit à la louange et au souvenir d’un ami mort jeune, est froid, monotone et trop joliment arrangé.
Jamais son image ne s’est effacée de notre souvenir : placuisse viris ! […] Il faut se souvenir, pour bien comprendre ce mariage précédé d’un long noviciat domestique, que Goethe, aux yeux de la ville de Weimar, n’était pas seulement un poète, un ministre, un favori du souverain, mais une sorte de dieu antique au-dessus des mœurs et des lois, un être d’exception qui avait ses mœurs et ses lois à part du reste de l’humanité. […] Le lecteur va juger, sur une traduction toujours atténuante de l’œuvre originale, combien Schiller dépassa Pindare et Horace dans ce dithyrambe didactique du poète qui se souvenait d’avoir été chrétien. […] Goethe se souvint de son âge, et se contenta du feu et de l’encens, sans toucher au vase fragile d’où cet enivrement montait à lui. […] Qui m’enlèvera ce souvenir ?
C’est par lui que j’appris que l’Arioste, dans un voyage qu’il fit à Florence, vers l’âge de quarante-cinq ans, conçut un amour sérieux et durable pour une charmante veuve florentine à laquelle il adressait mentalement toutes les louanges qu’il donne aux femmes belles et vertueuses, et dont il retraçait quelques souvenirs dans chacun des délicieux portraits de femmes dont son poème est illustré. […] Ce sont là de ces soirées qu’on n’oublie plus, et qui fixent dans la pensée l’heure où l’on a lu pour la première fois un livre désormais incorporé à nos souvenirs. […] Je crois que le livre ne serait pas si identifié à nous, sans la personne et sans le site ; et que le site et la personne ne seraient pas si fascinateurs sur notre souvenir, sans le livre. […] Ô souvenir ! […] je vous retrouve pour pleurer : car, peu de jours après que j’eus quitté les collines euganéennes pour retraverser les Alpes, une maladie rapide comme celles des enfants, un vent glacé, tombant des Alpes sur la villa, emporta Thérésina au séjour des plus beaux fantômes, et il y a peu de jours qu’une lettre d’un inconnu, à cachet noir, m’apprit la mort de la comtesse Léna, qui s’était souvenue jusqu’au tombeau de nos belles jeunesses.
Il nous a entretenu de Schiller, de leurs travaux communs, de ce que celui-ci voulait faire, de ce qu’il aurait fait, de ses intentions, de tout ce qui se rattache à son souvenir : il est le plus intéressant et le plus aimable des hommes. […] Voici comment il s’attendrit sur son souvenir, quand la mort eut éteint la voix de Goethe : Je vois enfin devant moi terminé le troisième volume de mes conversations avec Goethe, promis depuis longtemps ; j’éprouve la joie que donne le triomphe de grands obstacles. […] La joie que j’éprouvais dans ces moments me rendait tout mon feu ; les idées et la suite de leur développement, les expressions telles qu’elles avaient été prononcées, tout redevenait clair comme un souvenir de la veille. […] « Dans ses Souvenirs, M. de Müller éclaircit ce point. […] Tout le monde se souvient des chapitres délicieux dans les premiers livres des Confessions de saint Augustin, de J.
Fingal s’en indigna : trois fois il porta la main à sa lance, résolu d’étendre son bras vengeur sur le perfide Uthal : mais le souvenir de ses exploits se réveille dans son âme et l’arrête : il ordonne à son fils et à Toscar de partir. […] Est-il prouvé que Macpherson les ait retrouvés, grâce aux souvenirs de ces pasteurs, compulsés pendant dix ans avant de les recueillir et de les rédiger pour ses compatriotes, qui les ont reconnus eux-mêmes ? […] Adieu, souviens-toi d’élever mon tombeau. […] Je viens souvent m’asseoir sous l’ombrage, dans ce triste lieu ; j’entends soupirer le vent dans le gazon, et leur souvenir se réveille dans mon âme. […] Je me souviendrai de vous en pleurant ; je chanterai dans la solitude l’histoire de vos malheurs, quand le vent agitera les forêts de Tora et que j’entendrai rugir les torrents de ma patrie.
Quoique grand admirateur des écrivains du dix-septième siècle, il leur connaît des modèles ; il est si plein des anciens, qu’il ne démêle pas ses propres pensées des leurs, et que là même où il invente il croit se souvenir. La tradition de Lesage, c’est le dix-septième siècle, avec les souvenirs que de bonnes études de collège lui ont laissés de l’antiquité classique. […] Il est chrétien, comme le sont la plupart d’entre nous, par le souvenir du clocher natal, moins oublié peut-être que les parents ; il l’est par tout ce que laisse d’impressions ineffaçables dans un cœur où le mal n’est pas le maître, la doctrine de l’Evangile, transmise, aux jours d’innocence, d’une pieuse mère à son fils, d’un prêtre à un enfant. […] Lesage n’y a point pensé ; c’est pour cela qu’on se souvient du peu qu’il a fait de descriptions et qu’on en trouve trop dans Walter Scott. […] Même aux endroits où je me plais avec Gil Blas, je me sens recherché par des souvenirs de Don Quichotte.
Paris, un instant ému, par la promenade du drapeau rouge et les charges policières du Père-Lachaise, qui revivifiaient les souvenirs de la Semaine sanglante, se remit à ne s’occuper que de celui qui fut « le plus illustre représentant de la conscience humaine ». […] Un vélum noir voilait de deuil l’Arc de Triomphe de la gloire impériale ; la lumière des becs de gaz et des lampadaires filtrait, lugubre, à travers le crêpe ; des couronnes d’immortelles et de peluches, des portraits de Hugo sur son lit de mort, des médailles de bronze, portant gravé : Deuil national…, enfin tous les symboles de la douleur désespérée avaient été réquisitionnés, et pourtant la multitude immense n’avait ni regrets pour le mort, ni souvenirs pour l’écrivain : Hugo lui était indifférent. […] On utilisait, à l’époque, la mère de toutes les façons ; elle était déjà la grande ficelle dramatique : c’était le souvenir de la mère qui au théâtre paralysait le bras de l’assassin prêt à frapper ; c’était la croix de la mère, qui exhibée au moment psychologique, prévenait le viol, l’inceste et sauvait l’héroïne ; c’était la mort de sa mère, qui du Chateaubriand sceptique et disciple de Jean-Jacques de 1797, tira le Chateaubriand mystagogique d’Atala et du Génie du Christianisme de 1800. […] VI On se souviendra de la débauche d’hyperboles de la presse parisienne, qui dura dix longues journées. […] D’autres recueils ont trouvé moyen de faire bénéfice sur les faveurs du ministre du roi, lesquels se sont souvenus des avantages de l’économie lorsqu’il s’est agi d’encourager un ouvrage assez maladroit pour se montrer royaliste et indépendant. » (Préface du troisième volume du Conservateur littéraire). — Cependant page 361 du même recueil on lit : « L’ode sur la mort du duc de Berry, insérée dans la septième livraison, ayant été communiquée par le comte de Neufchâteau au duc de Richelieu, président du conseil des ministres et zélé pour les lettres, qui l’ayant jugée digne d’être mise sous les yeux du Roi, sa Majesté daigna ordonner qu’une gratification (sic), de 500 fr. fût remise à l’auteur, M.
Depuis, retiré à la campagne, il vit sur cet exploit, il croit que Paris s’en souvient toujours. […] vous vous souvenez ? […] Ces souvenirs touchent l’homme de Plutarque, et plus encore les beaux yeux de la marquise. […] Qui se souviendra de moi, et même de M. […] Je ne me souviens plus du tout s’il l’a mérité.
Voici un billet qui prouve que Plisthène est votre fils. » Et il lui montre la lettre écrite par Erope il y a vingt ans (vous souvenez-vous ?). […] Rita, amèrement, le lui rappelle : « Oui, tu l’appelais Eyolf, ton Asta… je m’en souviens. […] Souvenez-vous, d’ailleurs, qu’elle est la fille du subtil et glissant M. […] Regardez et souvenez-vous. […] À l’aide, ô souvenirs guerriers des anciens jours !
S’il le savait, c’est qu’il s’en souvient. D’où lui vient ce souvenir ? […] Ce sont des choses dont il se souvient ; on ne peut pas dire autrement. […] Si savoir c’est se souvenir, l’âme existait donc avant, bien avant ce corps qu’elle est venue animer. […] Que ce soit l’âme individuelle qui se souvienne quand elle croit apprendre ou comprendre, ou que ce soit l’âme commune de l’humanité qui se souvienne de la sorte et qui en chaque homme réveille, et très facilement, ses souvenirs à peine endormis, la connaissance est une réminiscence qui suppose que quand nous naissons nous ne commençons pas à vivre, nous recommençons à vivre.
Souvenez-vous que la poésie ne s’enseigne pas. […] C’est le plus beau et le plus durable souvenir d’elle qu’elle pût laisser dans l’âme de ses amis. […] Je me souviens d’avoir vu, au cimetière Montmartre, la forme d’un corps humain comme tracé en relief sur la terre humide. […] Vous aurez besoin de fuir ces sépulcres barbares qui matérialisent l’idée de la mort, qui dégradent et défigurent l’image restée dans nos souvenirs. […] Souviens-toi que tu es né de la lumière, et reviens à la lumière. » Satan, ébranlé, s’écrie : « Ô Nazaréen !
Je pourrais vous répondre simplement que je continue à me laisser apporter mes sujets par le hasard de mes curiosités ou de mes souvenirs… (Hélas ! […] » Il rougissait d’être un bourgeois payé par des bourgeois : il se souvenait avec amertume de « cet infortuné peuple de ses frères qu’il avait quitté lâchement ». […] L’atmosphère y est pleine de souvenirs et comme saturée d’âme. […] Il triompha du moins assez vite de ces premiers assauts, plus redoutables, qui suivirent immédiatement son retour à Dieu, de la séduction du péché encore tout proche, des mauvais souvenirs encore tout chauds dans le sang de ses veines. […] Et vous comprendrez mieux la magnanimité de ce jugement, si vous vous souvenez du vers abominable où Victor Hugo avait insulté Louis Veuillot dans sa mère.
Ce ne sera pas un des souvenirs les moins curieux du siège que cette représentation. […] Et si elle n’est pas présente à votre souvenir, les Molière ne sont pas si rares, vous n’avez qu’à rouvrir le volume. […] Peut-être ne s’en souvient-il plus ; il était, en ce temps-là, fort enfoncé dans la politique courante et ne s’occupait guère d’art dramatique. […] L’impression seule en est restée, d’autant plus ineffaçable, que les causes étant ainsi tombées du souvenir, elle ne peut plus être remise en discussion. […] Je ne conteste pas le fait, tout ce que je puis dire, c’est je n’y avais pas assisté et je n’ai rencontré dans la salle personne qui s’en souvînt plus que moi.
Malherbe s’est tout d’abord vanté, on s’en souvient, d’aller prendre les mots de son vocabulaire parmi les portefaix du port au foin et dans le peuple des halles.
Comme tous les écrivains patriotes, il s’est attaqué aux puissants, à ceux qui abusaient de la force contre le droit, et il ne s’est souvenu des carlistes que quand de loin en loin ils relevaient la tôle.
. — Italie et Semaine sainte à Rome, souvenirs (1841). — Milianah, poème (1842). — La Fille d’Eschyle, tragédie (1848). — Les Poèmes de la mer (1852). — Laboureurs et soldats (1854). — La Vie rurale (1856)
Il a voulu qu’on s’en souvînt, et il vient de leur donner quelques petits frères.
Qu’il soit permis à notre compagnie, gardienne des souvenirs et des œuvres du passé, de montrer les sources où M.
Elles fournissent au cœur de majestueux souvenirs, et aux arts des compositions touchantes.