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610. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

Individualité pédante, qui n’a que l’empirisme de la science, qui raconte ses impressions comme si c’était la règle suprême de la beauté, et qui les raconte sans légèreté, sans bonhomie et sans grâce !

611. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Swift »

Mais Swift, lui, est un ironique de certitude, car si son livre aux domestiques, incroyable même quand on l’a expliqué, n’était pas la plus grosse, la plus colossale et la plus sanglante ironie, il ferait vomir de dégoût… Règle générale, du reste : si vous supprimez l’ironie dans le doyen Swift, ce bon prêtre anglican, ce digne homme, comme dit peut-être ironiquement à son tour le bon Walter Scott, il n’y aurait plus là qu’un cynique bon à jeter à la porte de toutes les maisons honnêtes pour sa peine d’en corrompre si abominablement les serviteurs.

612. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Th. Gautier. Émaux et Camées »

Théophile Gautier représentait glorieusement l’école volontaire de la poésie travailleuse et, qu’on nous permette le mot, rageuse au travail, qui pose assez insolemment pour soi-même et pour le génie, que la Poésie est le résultat d’une poétique, la langue touchée, de telle ou telle façon, comme un piano, et qui croit simplifier et réaliser tout par des règles.

613. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Conclusion »

Nullement, s’il est vrai que les rapports « réversibles » sont presque de règle en matière historique.

614. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VIII. De Platon considéré comme panégyriste de Socrate. »

Socrate, avec la tranquillité d’un homme qui juge une cause qui lui est étrangère, examine s’il doit fuir ou rester : « Ami Criton, dit-il, il n’y a qu’une règle, la justice ; tant que j’ai vécu, je lui ai obéi : je suis encore le même.

615. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

Son critérium est la maxime suivante : ce que l’universalité ou la pluralité du genre humain sent être juste, doit servir de règle dans la vie sociale.

616. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre IV. Trois espèces de jugements. — Corollaire relatif au duel et aux représailles. — Trois périodes dans l’histoire des mœurs et de la jurisprudence » pp. 309-320

La règle qu’on y suit, c’est la vérité des faits.

617. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Mais d’abord imitatrice du passé, cette poésie, dans sa nouveauté même, gardera les formes de l’art, les règles de l’harmonie, que l’ignorance populaire et l’invasion barbare devaient plus tard confondre et détruire.

618. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Tout est confondu ; il n’y a plus ni loi, ni tradition, ni règle reconnue. […] Dénuée de principes et de règles, livrée à tous les caprices de la fantaisie, la littérature ne demanda plus ses inspirations qu’aux passions et aux idées du moment. […] Il y a plus : la passion étant à leurs yeux la loi suprême, la règle infaillible tracée par la nature, qu’y a-t-il de mieux à faire que de s’y abandonner ? […] La passion est sa seule règle et sa seule limite à elle-même. […] Loi, devoir, règle morale, convenances sociales, toutes choses, selon elle, qui rapetissent l’homme.

619. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

C’est la règle. […] J’ai pour règle de conduite de faire toujours ce qui me plaît, en dépit de toute moralité ! […] Les genres fixes, les règles immuables de l’ancienne critique sont remplacés par des espèces toujours changeantes, en vertu de leur plasticité, et dont les lois sont toujours en mouvement. […] Il reconnaît que les règles de l’art ne sont que formules inventées par les écrivains de chaque génération pour traduire leurs penchants et leur goût ; et encore, que « les mêmes règles sont vraies ou fausses, selon les artistes qui s’y soumettent ou s’y dérobent ». […] Il ne nous ont légué ni une idée morale, ni une règle de conduite, ni un principe de vie.

620. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Il doit y avoir une éducation sexuelle, mais ses principes ne sont pas autres que ceux que donneront toute l’éducation psychique, dont les règles, M.  […] Quoiqu’il ne m’ait fait, sur ce point le plus intime de son être, aucune confidence, il suffisait de le regarder vivre pour se rendre compte qu’il exerçait sur lui-même cette constante discipline qui fut celle des vieux stoïciens, de ce Marc-Aurèle, par exemple, qu’il admirait tant. « Sois droit ou redressé. » Cette maxime du sage empereur enveloppe à la fois l’affirmation de la règle la plus stricte et la négation de cette règle. […] Nous connaissons les règles que ces maîtres imposaient dans leurs ateliers aux débutants. […] Julia est d’un monde où la domination de soi demeure la règle extérieure, même quand la fièvre intérieure s’exalte jusqu’à la frénésie. […] Un égarement d’esprit, inexplicable sinon par la fièvre de l’obsession, a pu seul faire méconnaître à Guillaume II, Anglais par sa mère et par sa grand’mère, cette règle constante de la politique anglaise : l’indépendance des ports belges à l’égard des puissances européennes.

621. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Les esprits éminemment scientifiques sont, en règle ordinaire, des écrivains médiocres. […] Mais ce retour de l’opinion publique, quoique les exemples n’en soient pas rares, n’est point la règle, c’est l’exception, et il y aurait une énorme imprudence à y compter. […] En cela, comme en tout, c’est à la règle qu’on doit s’attendre et non à l’exception. […] C’est en effet la règle. […] La postérité, loin de casser en règle générale le jugement des contemporains sur les grands hommes « nés trop tôt », le confirme dans l’immense majorité des cas.

622. (1908) Après le naturalisme

Le génie est sa propre règle. […] Mais des ruines n’ont point encore surgi les croyances définitives, l’impératif formel, et l’homme que ne retient plus aucune règle, aucune morale, ivre aussi de ce qu’il considère comme une libération de sa servitude passée, laisse le champ libre à ses instincts, à ses énergies de bête. […] Les règles, les conditions particulières de la poésie et qui importantes pour elle, deviennent moindres dans l’ensemble de la Littérature, ont été élevées sur un plan plus haut que leur plan rationnel, érigées en dogmes capitaux et sacrées lois fondamentales, là où elles n’auraient dû passer que pour accessoires. […] On conviendra qu’il n’est pas que l’immoralité pour lutter contre la fausse morale ; qu’une morale vraie, plus large, plus éclairée en a plus certainement raison, sans aucun risque ; et que tout de même, dans la vie, il vaut mieux suivre une règle prudente que se dévoyer. […] On admettra en effet que les règles auxquelles se contraignirent les classiques, par exemple, que les notions d’humanité incarnées dans leurs personnages renfermaient une grande part d’erreur et de convention.

623. (1883) La Réforme intellectuelle et morale de la France

Comment Paris ne voit-il pas qu’il n’est ce qu’il est que par la royauté, qu’il ne reprendra toute son importance de capitale que par la royauté, qu’une république, selon la règle posée par l’illustre fondateur des États-Unis d’Amérique, créerait nécessairement pour son gouvernement central, à Amboise ou à Blois, un petit Washington ?  […] Quelle pouvait être notre règle de conduite, à nous autres libéraux, qui ne pouvons pas admettre le droit divin en politique, quand nous n’admettons pas le surnaturel en religion ? […] Rétablissons la royauté, rétablissons dans une certaine mesure la noblesse ; fondons une solide instruction nationale primaire et supérieure ; rendons l’éducation plus rude, le service militaire obligatoire pour tous ; devenons sérieux, appliqués, soumis aux puissances, amis de la règle et de la discipline. […] Que ne pouvons-nous espérer que le catholicisme se réforme, qu’il se relâche de ses règles surannées ! […] Je crois que ces universités libres produiraient de très médiocres résultats ; toutes les fois que la liberté existe réellement dans l’université, la liberté hors de l’université est de peu de conséquence ; mais, en leur permettant de s’établir, on aurait la conscience en règle et on fermerait la bouche aux personnes naïves toujours portées à croire que sans la tyrannie de l’État elles feraient des merveilles.

624. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

La force de l’impression intérieure qui, ne sachant pas s’épancher, se concentre et se double en s’accumulant, l’aspérité de l’expression extérieure, qui, asservie à l’énergie et aux secousses du sentiment intime, ne travaille qu’à le manifester intact et fruste en dépit et aux dépens de toute règle et de toute beauté, voilà les traits marquants de cette poésie, et ce seront aussi les traits marquants de la poésie qui suivra. […] Au dixième siècle, on voit le roi Edgard donner un manoir à un évêque à condition qu’il mettra en saxon la règle monastique écrite en latin par saint Benoît. […] Ils s’imposaient les règles de la rime moderne avec les règles de la quantité antique.

625. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

S’il est vrai, comme je le crois, que les espèces alliées ou espèces représentatives qui habitent une aire continue sont généralement distribuées de manière que chacune d’elles ait une assez vaste extension, et soit séparée des autres par un territoire neutre relativement assez étroit, où elle devient presque soudain de plus en plus rare ; alors, comme les variétés ne diffèrent pas essentiellement des espèces, la même règle doit, sans nul doute, s’appliquer aux unes comme aux autres. […] Mais cette variété intermédiaire, par cela même qu’elle habitera une aire moins étendue, sera représentée par un moins grand nombre d’individus : or, dans l’observation des faits, aussi loin que j’ai pu pousser mes recherches, cette règle s’applique exactement aux variétés à l’état de nature. […] Si nous pouvons nous fier à ces faits et à ces observations, et en conclure que les variétés intermédiaires entre deux formes quelconques ont toujours existé en moindre nombre que les formes qu’elles relient les unes aux autres, il nous devient aisé de comprendre pourquoi ces variétés transitoires ne peuvent se perpétuer pendant de longues périodes, et pourquoi, en règle générale, elles doivent être exterminées et disparaître plus tôt que les formes auxquelles elles ont originairement servi de passage. […] On retrouve cette règle dans les écrits de presque tous les naturalistes expérimentés.

626. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

C’était aussi faire preuve d’indépendance intellectuelle que de s’affranchir de certaines règles établies par de grands esprits qui pour être supérieurs, n’en étaient pas moins faillibles. […] Diderot disait « Quand l’artiste pense à l’argent, il perd le sentiment du beau. » Nous pourrions peut-être ajouter, l’exception confirmant la règle, que les préoccupations d’un ordre purement littéraire et esthétique ne gênent guère nos auteurs. […] Cette éducation du dehors, prise au hasard et à l’aventure, est dénuée de méthode, de règle et de programme ; elle est composée des éléments les plus divers. […] L’École naturaliste ne suit donc aucune des règles qu’a imposées Diderot ; elle pêche constamment et intentionnellement contre le goût elle ne respecte aucunement la loi d’unité qui ne peut s’obtenir que par la subordination des parties accessoires.

627. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Si l’on abandonne les actions des hommes à cette règle, le vicaire de st Roch, qui croit son culte très-essentiel au maintien de la société, tuera le philosophe, s’il n’est prévenu par celui-ci, qui regarde toute institution religieuse comme contraire au bonheur de l’homme. […] Se jetter dans les extrêmes, voilà la règle du poëte, garder en tout un juste milieu, voilà la règle du bonheur. […] C’est l’abbé De Gua De Malves ; c’est un profond géomètre, témoin son traité des courbes du troisième et quatrième genre, et sa solution, ou plutôt démonstration de la règle de Descartes sur les signes d’une équation.

628. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — I »

Si aucune religion ne satisfait complètement la raison des philosophes de nos jours, ils devraient voir aussi qu’aucune religion ne satisfait toutes leurs sympathies, ne règle tous les actes qu’ils doivent accomplir comme hommes et comme êtres sociaux.

629. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IV. De la philosophie et de l’éloquence des Grecs » pp. 120-134

Ce qui contribue à nous donner une idée prodigieuse des anciens, ce sont les grands effets produits par leurs ouvrages ; ce n’est pas néanmoins d’après cette règle qu’il faut les juger.

630. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre V. Des personnages dans les récits et dans les dialogues : invention et développement des caractères »

Dans la tragédie comme dans la comédie, sous la mythologie, sous l’histoire, sous les fictions convenues, n’est-ce pas vraiment la vie ordinaire qu’ils peignent, et ne sont-ce pas au fond des incidents communs, dans le raccourci vigoureux ou l’agrandissement idéal que les règles imposent ?

631. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

C’était là une règle qui dans l’usage souffrait de nombreuses exceptions ; on les prodiguait à tout propos et souvent hors de propos.

632. (1890) L’avenir de la science « I »

Non seulement il négligea totalement le vrai et le beau (la philosophie, la science, la poésie étaient des vanités) ; mais, en s’attachant exclusivement au bien, il le conçut sous sa forme la plus mesquine : le bien fut pour lui la réalisation de la volonté d’un être supérieur, une sorte de sujétion humiliante pour la dignité humaine : car la réalisation du bien moral n’est pas plus une obéissance à des lois imposées que la réalisation du beau dans une œuvre d’art n’est l’exécution de certaines règles.

633. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

On a rassemblé ci-dessus quelques exemples pareils entre eux de ce faux goût, empruntés à la fois aux écrivains les plus opposés, à ceux que les scholastiques appellent classiques et à ceux qu’ils qualifient de romantiques ; on espère par là faire voir que si Calderon a pu pécher par excès d’ignorance, Boileau a pu faillir aussi par excès de science ; et que si, lorsqu’on étudie les écrits de ce dernier, on doit suivre religieusement les règles imposées au langage par le critique, il faut en même temps se garder scrupuleusement d’adopter les fausses couleurs employées quelquefois par le poëte.

634. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

Il appelle, dans ses lettres, Abailard, un horrible composé d’Arius, de Pélage & de Nestorius ; « un moine sans règle, un supérieur sans vigilance, un abbé sans discipline, un homme sans mœurs ».

635. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

Cette fable est très-bien écrite et parfaitement contée ; mais quelle morale, quelle règle de conduite peut-on en tirer ?

636. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Je ne prétends pas donner ici mon avis pour règle, d’autres peuvent être affectés différemment., mais c’est ainsi que je le suis.

637. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Littérairement, il est pour l’ordre contre la fantaisie ; il n’accepte l’imagination qu’avec la règle ; il n’est pas ivre de Renaissance.

638. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Règle générale et absolue, nos œuvres ont toujours l’âge que nous avons quand nous les lançons dans le public.

639. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’arbitrage et l’élite »

De cette conférence terminée en 1890, est sorti le traité d’arbitrage permanent international qui est aujourd’hui la règle du droit public américain.

640. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VII. Dernières preuves à l’appui de nos principes sur la marche des sociétés » pp. 342-354

Il aurait dû pourtant les frapper dans ces deux règles qu’ils établissent 1º cessante fine legis, cessat lex ; ils ne disent point cessante ratione ; en effet le but, la fin de la loi, c’est l’intérêt des causes traité avec égalité ; cette fin peut changer, mais la raison de la loi étant une conformité de la loi au fait entouré de telles circonstances, toutes les fois que les mêmes circonstances se représentent, la raison de la loi les domine, vivante, impérissable ; 2º tempus non est modus constituendi, vel dissolvendi juris ; en effet le temps ne peut commencer ni finir ce qui est éternel.

641. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

mais tout cela, chez ces grands hommes, véritablement transformé par la profondeur de l’observation, plié aux règles de la composition, soumis enfin aux lois du style. […] Une règle de prudence est d’abord de ne pas demander ce que l’on est certain de ne pas obtenir. […] La raison y est toujours maîtresse, et la passion s’y déploie sous la règle. […] Si Corneille a maudit plus d’une fois le pédantisme des d’Aubignac et la règle des trois unités, Corneille avait raison, parce que, dans un système dramatique où les situations décident des caractères, les d’Aubignac sont d’impertinents censeurs, et la règle n’est plus qu’une entrave. […] À une certaine hauteur, ne peut-on pas dire que les règles s’évanouissent en quelque sorte, et devant la critique toutes les belles œuvres ne sont-elles pas égales ?

642. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

À l’abattement caractéristique du dégénéré s’allie, en règle générale, une aversion pour toute action, qui peut aller jusqu’à l’horreur d’agir et l’impuissance de vouloir (aboulie). […] En règle générale, les endroits insensibles sont continus, et occupent la moitié extérieure de cette membrane. […] Les esprits indépendants (il n’est pas question ici des simples imitateurs), qu’un bon critique réunit en un groupe, laisseront peut-être reconnaître une certaine ressemblance, mais en règle générale celle-ci sera le résultat d’influences extérieures, et non d’une réelle parenté intime. […] Dans les cas extrêmes, cette manière de voir maladive s’élève jusqu’à l’hallucination, qui en règle générale affecte l’ouïe, mais peut aussi s’adresser à la vue et aux autres sens. […] L’accouplement de mots qui, par le sens, sont incohérents ou très peu cohérents, est en règle générale une preuve d’imbécillité, quoique trop souvent il étonne et fasse rire.

643. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Mais peut-on imaginer dans un pareil endroit une conversation fine et spirituelle, une éclosion de madrigaux et de sonnets galants, des discussions sur la noblesse d’un mot ou sur une règle de grammaire ? […] En somme, une toilette voyante, tapageuse, rappelant à la fois la manie de l’antiquité qui avait sévi si fort au temps de la Révolution et l’allure militaire qui fut de règle sous l’Empire. […] Sa marche folle et désordonnée ne se dérobe-t-elle pas à toute espèce de règle et de formule ?

644. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Le maître ne s’astreignait plus aux anciennes règles du moyen âge ; il créait une allitération adaptée aux besoins de son poème. […] On se trompe beaucoup si on croit que les vers rimés sont la règle dans Tristan ; je ne crois pas exagérer en disant que deux tiers du poème ne sont point rimés. […] Tristan et Isolde chantent fort souvent des paroles différentes, en même temps ; c’est la règle.

645. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IX : Insuffisance des documents géologiques »

Je sais pourtant que deux paléontologistes, dont les opinions ont un grand poids, je veux parler de Bronn et de Woodward, ont admis en règle générale que la durée moyenne de chaque formation est deux ou trois fois aussi longue que la durée moyenne des formes spécifiques. […] — Il est de toute importance de se rappeler ici que les naturalistes n’ont aucune règle d’or pour distinguer les espèces de variétés. […] En règle générale, des formations riches en fossiles, d’une puissance suffisante pour résister à des dénudations subséquentes, et pour persister inaltérées pendant de longues périodes, telles enfin qu’ont été dans le passé les formations secondaires, ne peuvent s’accumuler dans un archipel que durant des périodes d’affaissement.

646. (1921) Esquisses critiques. Première série

Inapte au jeu des idées, il connaît fort bien les règles de celui des mots. […] L’auteur veut analyser l’âme, et tracer des règles de conduite. […] Elles composent sa règle et sa doctrine : en écrivant de la sorte il se conforme à son idéal du beau. […] Il nous soumet des règles de conduite, et nous engage à les adopter. […] Il ne craint pas de nous répéter ses préceptes, et ne se lasse point de nous enseigner les règles d’une morale pratique qu’il institue.

647. (1932) Les idées politiques de la France

Dans ce parti national ou nationaliste qui était celui de Faguet, comme il n’y a pas de règle sans exception, il déclare « voir trouvé « quelques royalistes franchement et intelligemment libéraux. […] Mais ces deux batailles perdues n’en ont que mieux lié l’avenir de l’Église à une acceptation ouverte et à une utilisation habile de la règle du jeu démocratique. […] La règle du jeu de leurs congrès est que le brigadier y ait raison. […] Telle est la règle du jeu. […] Il mettra hors la loi les idées politiques qui ne respectent pas la règle du jeu.

648. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Leur exemple n’est pas une règle pour nous. […] Un général, fameux par ses exploits, peut-il ignorer les règles de l’honneur ? […] N’est-ce pas une faute essentielle contre les règles de l’art que de travestir ainsi les Chinois en Romains ? […] L’auteur de La Pucelle n’avait réussi que par des innovations dangereuses ; il était naturellement ennemi des règles et des principes, qu’il regardait comme les entraves du génie. […] Il n’est pas nécessaire d’avoir fait des pièces de théâtre pour en donner des règles : Aristote eût certainement composé de bien mauvaises tragédies : sa poétique n’en est pas moins un chef-d’œuvre.

649. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Pareillement, d’un système il aperçoit la règle qui se dégage. […] Son premier besoin est celui d’une règle de conduite ou de redressement C’est à découvrir cette règle que son esprit est tendu, c’est à mettre ses actions en accord avec elle que sa volonté s’applique, c’est à déplorer le désaccord entre cette règle et ses actions que sa sensibilité se dépense. […] Il est trop dominé par l’idée de la règle pour ne point traduire ces enivrés de l’heure qui passe à la barre du Bien qui ne passe pas. […] Ici l’Héraion, le plus ancien des temples doriques connus, montrait les bases tronquées de ses piliers posées d’après la règle, sévèrement, simplement, à même le stylobate. […] Les règles des maisons religieuses, ces merveilles d’entente psychologique, ne tiennent-elles pas un compte essentiel de cet élément de direction ?

650. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Le deuxième volume renferme un chapitre aux Infortunés, dans lequel, à travers les conseils et les règles de conduite que l’auteur essaye de déduire, on lit toute l’histoire de sa vie d’émigration et de sa noble pauvreté : « Je m’imagine, s’écrie-t-il, que les malheureux qui lisent ce chapitre le parcourent avec cette avidité inquiète que j’ai souvent portée moi-même dans la lecture des moralistes, à l’article des misères humaines, croyant y trouver quelque soulagement. […] Quand sa marche est loyale et fidèle à certaines règles, il n’a pas failli.

651. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Les secousses souvent contradictoires, les espérances précipitées suivies de découragement, puis de nouveau reprises avec ferveur, les jugements excessifs, passionnés, lancés dans la colère, et que plus tard elle mitigera, le bon sens fréquent qui s’y mêle, la sincérité invariable, tout contribue à faire de ces pages sans art un témoignage bien honorable à celle qui les écrivit, en même temps qu’une utile leçon, suivant nous, pour ceux qui cherchent dans la réflexion du passé quelque sagesse à leur usage, quelque règle à leurs jugements en matière politique, quelque frein à leurs premiers et généreux entraînements. […] Et cependant Mme Roland est bien sous le même souffle, sous la même inspiration sentimentale que cette autre fille de Jean-Jacques : « Quoi qu’il en soit du fruit de l’observation et des règles de la philosophie, écrit-elle à Bancal, je crois à un guide plus sûr pour les âmes saines, c’est le sentiment.

652. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

Toutes ses remarques sur les héros et les enfants des Dieux naissent de là : il y a toujours dissimulé l’amertume : « Les enfants des Dieux, pour ainsi dire, se tirent des règles de la nature et en sont comme l’exception. […] M. de Feletz, bon juge et vif interprète des traditions pures, a écrit : « La Bruyère qui possède si bien sa langue, qui la maîtrise, qui l’orne, qui l’enrichit, l’altère aussi quelquefois et en viole les règles. » (Jugements historiques et littéraires sur quelques Écrivains… 1840, page 250.)

653. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Mais prenons garde : si mon article est trop bien composé et conçu, s’il met le lecteur au fait, s’il le dispense de recourir aux comptes rendus officiels, si, en un mot, cet article net et lucide se suffit à lui-même comme il est de règle en bonne littérature politique, en bonne rhétorique du genre, je suis en faute, en contravention, et me voilà condamné ipso facto. […] Aux yeux du moraliste, cet article inscrit dans une loi paraîtra un jour bien digne d’une époque où ceux qui respectent le moins la règle des mœurs, qui sont les plus habitués à manquer aux devoirs de la famille, à préférer constamment la mauvaise compagnie à la bonne, à violer les convenances et à friser le scandale, qui semblent même les plus disposés par moments à s’en faire gloire avec fatuité, sont en même temps les plus jaloux d’être soustraits à la médisance publique et se montrent les plus offensés si la chronique les effleure.

654. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre II. De la rectification » pp. 33-65

Impossible de ne pas la voir telle ; les règles de l’optique et de la vision nous y contraignent. […] Parfois enfin les petites sonnettes qui, en règle générale, reçoivent d’elle leur ébranlement, lui transmettent le leur ; et nous savons les principales conditions de ces effets singuliers. — Dans les hallucinations du microscope, la cloche a été si fortement et si constamment ébranlée en un seul sens, que son mécanisme continue à fonctionner, même lorsque le cordon est devenu immobile. — Dans le rêve et l’hallucination hypnagogique, le cordon est fatigué ; il ne rend plus ; le long emploi de la veille l’a mis hors d’usage ; les objets extérieurs ont beau le tirer, il ne fait plus sonner la cloche ; à ce moment, au contraire, les petites sonnettes dont les sollicitations ont été réprimées perpétuellement pendant la veille, et dont les tiraillements ont été annulés par le tiraillement plus fort du cordon, reprennent toute leur puissance ; elles tintent plus fort et tirent avec efficacité ; leur ébranlement provoque dans la cloche un ébranlement correspondant ; et la vie de l’homme se trouve ainsi divisée en deux périodes, la veille pendant laquelle la cloche tinte par l’effet du cordon, le sommeil pendant lequel la cloche tinte par l’effet des sonnettes. — Dans l’hallucination maladive, le cordon tire encore, mais son effort est vaincu par la puissance plus grande des sonnettes ; et diverses causes, l’afflux du sang, l’inflammation du cerveau, le haschich, toutes les circonstances qui peuvent rendre les hémisphères plus actifs, produisent cet accident ; le tiraillement des sonnettes, plus faible à l’état normal que celui du cordon, est devenu plus fort, et l’équilibre ordinaire est rompu, parce qu’une des fonctions qui le constituent a pris un ascendant qu’elle ne doit pas avoir.

655. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre dixième. »

L’idéal effarouche des esprits jaloux d’une liberté de spéculation illimitée ; ils s’en défient comme d’une règle. […] Sur ces deux points il ne se sent pas en règle, et il n’en dit rien.

656. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

Un critique qui, après cette première impression de vérité et de vie, voudrait faire des réserves au nom du goût, trouverait à noter dans ces portraits plus d’une infraction aux règles de l’art et plus d’un effet illégitime. La règle de la gradation, par exemple, n’y est guère respectée.

657. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Il serait vain aussi de chercher des règles générales pour les concilier et faire à chacun sa part. […] Le tiers esprit écoutera tout cela et il saura qu’il ne peut y avoir de règles générales absolues pour régler le conflit.

658. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Jamais les anciens ne sont bien nettement sortis du point de vue étroit où l’esthétique est censée donner des règles à la production littéraire ; comme si toute œuvre devait être appréciée par sa conformité avec un type donné, et non par la quantité de beauté positive qu’elle présente. Une seule règle peut être donnée pour produire le beau : Élevez votre âme, sentez noblement et dites ce que vous sentez.

659. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Si l’harmonie est une science fermée, c’est-à-dire une science où les règles, posées une fois pour toutes, ont la valeur d’axiomes et ne sauraient être transgressées, Wagner doit être regardé comme un pitoyable harmoniste ; si, au contraire, elle a le droit d’étendre son domaine, et, sans gâter pour cela le plaisir exigé par l’oreille, de s’enrichir de conquêtes nouvelles, Wagner offre en ses travaux une matière digne d’intérêt. […] Si les compositeurs ont montré jusqu’ici dans l’usage de tels procédés plus de mesure et plus de réserve, si leur musique garde en définitive une physionomie fort différente de celle-ci, c’est qu’ils se soumettaient d’avance à des règles imposées par l’école, Wagner, plus hardi, a essayé de s’y soustraire.

660. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre V. Le Bovarysme des collectivités : sa forme idéologique »

Il est arrivé ceci : les prohibitions, les règles et les contraintes qui se sont perpétuées dans le dogme et, dans la loi, n’étaient pour les hommes animés de la croyance ancienne, que des attitudes d’utilité raisonnées, Mais leur importance et leur utilité même eurent bientôt transformé ces attitudes naturelles en dogmes, dont la généalogie utilitaire peu à peu fut perdue. […] On voit donc par ces deux exemples, à côté desquels on en pourrait citer beaucoup d’autres que les Grecs et les Romains des premières périodes historiques appliquèrent à leur propre gouvernement des règles et des maximes instituées naguère en vue de satisfaire une croyance qui n’existait, plus dans leur âme et des intérêts qui n’étaient plus les leurs.

661. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

C’est la seule gloire et la seule idée juste qui soit restée au protestantisme anglican que de poser une autorité et une règle, et de vouloir que cette autorité soit obéie, que cette règle soit respectée.

662. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Mais on ne se passe pas de philosophie ; et en attendant que les philosophes lui apportassent la théorie malléable, modelable sur la double expérience du dedans et du dehors, dont la science aurait eu besoin, il était naturel que le savant acceptât, des mains de l’ancienne métaphysique, la doctrine toute faite, construite de toutes pièces, qui s’accordait le mieux avec la règle de méthode qu’il avait trouvé avantageux de suivre. […] Quand un fou déraisonne, son raisonnement peut être en règle avec la plus stricte logique : vous diriez, en entendant parler tel ou tel persécuté, que c’est par excès de logique qu’il pèche.

663. (1874) Premiers lundis. Tome II « Alexis de Tocqueville. De la démocratie en Amérique. »

L’étendue et l’importance des questions que soulève ce second volume, surtout relativement à notre Europe, se conçoivent aisément ; l’auteur, sans prétendre jamais résoudre à l’avance ce que recèle l’avenir, a rassemblé tous les éléments d’expérience, et posé les règles déjà évidentes pour les plus probables conjectures.

664. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IV. Des femmes qui cultivent les lettres » pp. 463-479

Le vulgaire ne juge jamais que d’après certaines règles communes, auxquelles on peut se tenir sans s’aventurer.

665. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

Et cette cause n’est-elle pas un certain esprit général formé vers le commencement du siècle, qui trouve des expressions différentes, mais également fidèles dans certaines doctrines philosophiques et dans certaines règles littéraires ?

666. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XX. Opposition contre Jésus. »

Si Luther, si les acteurs de la Révolution française eussent dû observer les règles de la politesse, la réforme et la révolution ne se seraient point faites.

667. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

Telle, dans des canaux pressée, Avec plus de force élancée, L’onde s’élève dans les airs ; Et la règle, qui semble austère, N’est qu’un art, plus certain de plaire, Inséparable des beaux vers.

668. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

La vérité qui se cherche, qui se veut à tout prix, la vérité même contre soi ; car, pour la première fois, il a donné l’exemple en France, et a élevé à la rigueur d’une règle de conduite, d’ouvrir les vastes espaces de sa revue à ses adversaires d’idées sur toutes les questions qu’ils seraient tentés d’y discuter.

669. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

Grenier, professeur, a fait exception à la règle.

670. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Benoît-Joseph Labre n’était pas fait, probablement, pour la règle sur place la vie en communauté.

671. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Cependant, il faut bien l’avouer, comme ce dix-neuvième siècle-là est dans l’autre, — dans le sérieux, l’honnête, l’élevé, — nous n’avons pas le bégueulisme de l’interdire au romancier qui veut l’aborder et le peindre : la règle, pour nous, de toute poétique, de toute observation, de toute étude et même de toute langue, étant que tout ce qui est doit être exprimé, MM. de Goncourt pouvaient donc préférer à l’autre ce dix-neuvième siècle.

672. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

En règle stricte, on ne doit jamais abdiquer sa personnalité en littérature, et j’en reconnais à M. 

673. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

ni dans le cercle immense de l’éther divin, ni sur la mer, hormis ce que font les méchants dans l’égarement de leurs âmes ; et tu mets la règle où était le désordre, et les choses ennemies te sont amies.

674. (1900) Molière pp. -283

Quand il est accablé sous le plus fort, il se rattrape toujours, le bourgeois de Molière, comme c’est de règle, sur le plus faible. […] À mon avis, plus les femmes de la Cour prenaient de liberté, plus cette licence témoigne de l’excès d’autorité alors régnant. — Je crois que c’est parce qu’il y avait des maris comme le duc de Mazarin, qui obtenait du roi la permission de lancer contre la duchesse sa femme toute la cavalerie du royaume, je crois que c’est pour cela qu’il y avait des femmes comme Hortense Mancini, qui, dans le couvent où elle s’était réfugiée, soutenait un siège en règle contre la maréchaussée conduite par son mari. […] Vous êtes plus humains, plus modestes, plus éclairés, plus instruits qu’autrefois, vous n’êtes plus si entêtés de la Faculté, et même vous savez bien qu’il existe des lumières en dehors de la Faculté ; et à preuve, quand il arrive un docteur, blanc ou noir, qui, sans avoir pris ses grades, se pique de guérir les cancers, vous examinez son remède, et vos règles ne sont pas aussi absolutistes. […] Tout vieillit, tout s’épuise, même le roman historique et le roman bourgeois, nouveau-venus parmi nous, qui n’ont voulu connaître aucune règle, et qui tombent, frappés de langueur, pour avoir usé de la jeunesse avec trop de force et de liberté. […] Chénier ; elle ne nous laisse que malaisément démêler, au milieu des règles qui la contraignent, sous un langage et des sentiments d’exception, la réalité de la vie quotidienne.

675. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

En s’appliquant à la composition de ses tragédies historiques indépendamment de toute règle factice, en combinant l’étude sévère et la passion, la fidélité à l’esprit, aux mœurs et aux caractères particuliers de l’époque, et les sentiments humains généraux s’exprimant dans un langage digne et naturel, Manzoni ne faisait autre chose que réaliser avec originalité le vœu déjà ancien de son ami, et donner la vie poétique aux idées qu’ils avaient autrefois agitées ensemble. […] Sans doute il nous importe peu aujourd’hui qu’Hermès Visconti, dans un spirituel dialogue, ait trouvé de bonnes raisons contre l’arbitraire des règles relatives à l’unité de temps et de lieu, que Manzoni en ait trouvé de non moins piquantes et de décisives dans sa lettre à M. […] Avec cela, il a une règle pour le choix de ses expressions, et cette règle, il la trouve dans ses souvenirs, dans ses habitudes, qui lui donnent un sentiment presque sûr de la conformité de son style avec l’esprit général de la langue ; il n’a pas de dictionnaire à consulter pour savoir si un mot choquera ou s’il passera : il se demande si c’est français ou non, et il est à peu près sûr de sa réponse. […] J’admets que l’Italie, malgré sa Toscane, ait, à quelques égards, l’inconvénient de la province, c’est-à-dire qu’on y sente le manque d’un grand centre, d’une capitale qui donne le mouvement à la langue et en règle le ton à chaque moment. […] Ses jugements, pleins de finesse et de mesure, étaient ma règle dans le doute ; et la sympathie avec laquelle il suivait mes travaux me stimulait à marcher en avant.

676. (1927) Des romantiques à nous

Benda à Mélisande qu’il faut peut-être craindre que Mélisande, instruite par lui, recommence à faire exprès des raisonnements faux pour la joie exquise de s’entendre encore une fois expliquer la règle, avec ces jolies façons, dans ce style d’or. […] Les synthèses, institutions, règles d’action de cette époque, plus arbitrairement imaginée et reconstituée d’ailleurs que représentée dans ses traits réels, sont donnés comme la vérité absolue et éternelle qui suffit à tout et où il faut intégralement revenir. […] C’était une base possible de paix entre le curé et l’instituteur, celui-ci s’en tenant à la notion de Dieu, considéré comme source et règle suprême de tout bien, celui-là y ajoutant les supposés particuliers de la religion touchant les actes de Dieu dans l’humanité et le salut éternel des individus. […] Un jour qu’il jouait au piano une symphonie de Schumann, son enthousiasme tomba tout d’un coup et il quitta la place en disant : « C’est assez ; voici les mathématiques musicales qui commencent. » Il en était arrivé au point où, les thèmes de l’ouvrage ayant été exposés, le « développement » formel de ces thèmes fait son apparition, pour se poursuivre, selon les règles (des règles larges d’ailleurs) jusqu’à la fin du morceau ou, du moins, jusqu’à une « réexposition » dans une tonalité voisine, elle-même suivie d’autres développements. […] Méprisant la bonne règle qui veut qu’un commerçant soit bien avec tout le monde, il s’afficha et n’y perdit rien.

677. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

Continuons l’examen ; notre assurance deviendra plus ferme encore, et, en même temps, nous commencerons à démêler la loi qui règle l’opération localisante. — Dans tous les cas précédents, elle situait notre sensation à l’extrémité nerveuse d’où part ordinairement l’ébranlement qui se termine par la sensation. […] Les sensations que nous procure la rétine sont celles des différentes couleurs et des différents degrés du clair et de l’obscur ; en outre, comme elle est une gerbe serrée de filets nerveux distincts, chacun de ses filets, selon la règle générale du système nerveux, éveille, quand il est touché, une sensation distincte. […] Car, en règle générale, chaque variation dans cet ébranlement et dans sa position réelle se traduit par une variation proportionnée dans la sensation et dans sa position apparente, de sorte qu’en règle générale notre faux jugement aboutit au même effet qu’un jugement vrai.

678. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Avec une naïveté qui serait touchante si elle n’avait été si funeste, on étudia chez Homère, plus encore chez d’autres qui ne le valent pas, la formule de l’épopée : le choix du sujet, la conduite de l’action, le rôle du merveilleux, la qualité des personnages, les épisodes, la forme métrique, tout cela fut établi en règles précises12 ; et la forme tua l’esprit. […] Le problème historique se complique, ici plus qu’ailleurs, de questions esthétiques ; voici, sous une forme concise, les faits que je soumets à la réflexion : 1º la tragédie (en sa formule classique : vers, cinq actes, unités, sujet et personnages nobles, etc.) est une « forme » spéciale du drame, forme naturelle et rationnelle dans l’antiquité13, étroite et vieillie pour l’esprit moderne, mais imposée par la tradition académique, et viable d’ailleurs pour le génie d’un Racine ; de fait, plus d’une « règle » de la tragédie s’explique par les exigences de l’intensité dramatique ; Brunetière l’a fortement démontré en théorie, et, avant lui, Dumas fils en pratique ; de nos jours, Ibsen. […] Victor Cousin n’a exploité les romans de Mlle de Scudéry que pour en tirer des portraits de grandes dames… Avec un peu de patience, et un jugement plus libre, on trouvera bien autre chose dans le roman du xviie  siècle. — On a reconstruit toute l’histoire du théâtre au xviie  siècle, on en a montré les étapes par Hardy, par Mairet, par l’Académie ; mais on s’est attaché trop exclusivement aux formes et à la fameuse règle des unités ; quand on compte les œuvres réalisées, les œuvres vraiment dramatiques, sans se laisser éblouir par trois grands noms, on a le sentiment très net de l’avortement d’un idéal académique, idéal contraire au goût véritable du public. […] Ce xviie  siècle, si riche en œuvres et en hommes, nous montre mieux que toute autre époque l’action combinée de trois forces souvent contraires : l’esprit général de la période (qui est épique), la tradition savante (qui enseigne le culte de la tragédie, de l’épopée, et qui donne les règles précises de ces « formes »), l’individualité (qui tend à la liberté) ; de là les résultats les plus variés, dans les œuvres de valeur relative comme dans celles de valeur absolue ; par exemple : le moule rigide étouffant l’esprit (épopée) ; la forme nouvelle et vivante (roman) ; la forme vidée (lyrisme) ; la forme en conflit avec le contenu (tragédie romanesque), mais galvanisée par le génie héroïque (Corneille) ; l’art suprême, original, s’harmonisant avec la tradition savante, méconnu du public (Racine) ; ou se créant une forme personnelle (La Fontaine) ; l’individualité du précurseur, arrêtée à mi-chemin, révélant un monde en fait, et un autre en puissance (Molière).

679. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Je ne sais si cette manière d’essayer des stradivarius en les brisant et en les rajustant est tout à fait conforme aux règles du métier ; un luthier en sait là-dessus plus long que moi ; c’est dans tous les cas une belle fable à l’Amphion.

680. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

Racine lui-même fait à la rime, à l’hémistiche, au nombre des syllabes, des sacrifices de style ; et s’il est vrai que l’expression juste, celle qui rend jusqu’à la plus délicate nuance, jusqu’à la trace la plus fugitive de la liaison de nos idées ; s’il est vrai que cette expression soit unique dans la langue, qu’elle n’ait point d’équivalent, que jusqu’au choix des transitions grammaticales, des articles entre les mots, tout puisse servir à éclaircir une idée, à réveiller un souvenir, à écarter un rapprochement inutile, à transmettre un mouvement comme il est éprouvé, à perfectionner enfin ce talent sublime qui fait communiquer la vie avec la vie, et révèle à l’âme solitaire les secrets d’un autre cœur et les impressions intimes d’un autre être ; s’il est vrai qu’une grande délicatesse de style ne permettrait pas, dans les périodes éloquentes, le plus léger changement sans en être blessé, s’il n’est qu’une manière d’écrire le mieux possible, se peut-il qu’avec les règles des vers, cette manière unique puisse toujours se rencontrer ?

681. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VII. Narrations. — Dialogues. — Dissertations. »

Mais il n’est guère possible qu’il ne faille pas démolir la thèse adverse avant d’élever la sienne : c’est une règle qui ne souffre guère d’exception, et l’on peut dire que dans toute question sujette à controverse, où l’on peut répondre sans absurdité : oui ou non, il faut examiner d’abord les raisons qui engagent à répondre oui, quand on doit répondre non, et commencer par les raisons qui sont en faveur du non, quand on doit conclure par le oui.

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