L’histoire est injuste comme le temps ; la postérité prend ce qu’on lui donne : que voulez-vous ? […] Soit que l’empereur parle en souverain ou en chef de la littérature, il tâche de s’appuyer sur l’autorité de ce livre ; il se fait gloire d’en entendre le sens le plus caché ; il ne dédaigne pas de prendre le pinceau lui-même pour le copier et le commenter ; il y prend ordinairement le texte des discours qu’il adresse aux grands, aux princes, aux peuples de son empire. […] Comment s’y prendre pour détruire des idées aussi fausses ? […] J’en prends à témoin le ciel, la terre et mes ancêtres. […] Je me couche, je me lève, je m’habille, je prends mes repas à des heures fixes.
Depuis huit jours qu’il a pris gîte sous mon humble toit, il m’a enivré de poésie natale, mais tellement enivré que j’en trébuche en marchant, comme un buveur, et que j’ai senti le besoin de décharger mon cœur avec vous. […] Cependant, quand l’heure du sommeil ou de l’insomnie fut venue, je pris, par distraction, le volume sur la tablette de la cheminée, et je l’emportai sous le bras dans ma chambre. […] … La feuille tomba, puis de nouveau, comme pluie ; et puis, venu l’instant où ils la mettaient au sac, la main blanche et la main brune, soit à dessein ou par bonheur, toujours venaient l’une vers l’autre, mêmement qu’au travail ils prenaient grande joie. […] que l’artison te dévore, et que ton maître te prenne en horreur ! […] Une matrone prend sa défense et raconte, pour les faire taire, aux médisantes une légende provençale qui fait rentrer la raillerie dans leurs bouches.
Arraché bientôt après à cet asile studieux par la versatilité de son âme et de sa fortune, il alla à Dresde ; il s’y laissa prendre à un amour plus vénal que sincère pour une jeune Saxonne d’une grande beauté. […] « Prenez du bois de sapin, choisissez des branches sèches, afin que la flamme, plus vive, se précipite dans le conduit. […] Chacun se hâte, prend la fuite, cherche un moyen de salut. […] « L’homme jette encore un regard sur le tombeau de sa fortune, puis il prend le bâton de voyage. […] Ce fut elle qui vint me chercher à Offenbach ; elle me prit par la main et me pria de venir la trouver à la ville.
Toute l’autorité de la vertu publique, toute la majesté du peuple romain, se levaient avec lui quand il se levait pour prendre la parole. […] quelles résolutions tu as prises ? […] Et ces traîtres, le consul les voit et prend leur avis sur les grands intérêts de l’État ; quand leur sang devrait déjà couler, il ne les blesse pas même d’une parole offensante. […] Cicéron prend sur lui d’achever le coup d’État contre la démagogie en immolant les complices de Catilina. […] Pourquoi ai-je pris une résolution et une attitude de coupable suppliant, indignes de moi ?
Nausicaé prend les rênes brillantes et le fouet dont elle frappe pour le départ les deux mules, qui s’élancent bruyamment ; elles courent sans s’arrêter et emportent le linge et la jeune fille qui n’est pas seule ; car les suivantes vont aussi avec elle. […] Puis, après s’être baignées et imprégnées d’une huile onctueuse, elles prennent leur repas auprès des rives du fleuve, en attendant que l’ardeur du soleil ait séché le linge. […] — Non, lui dis-je, je sais très bien que je pouvais prendre la fortune avec la dictature et la garder ; mais il fallait pour cela cinq ou six têtes des leurs en tout pour intimider le reste. […] Prends la moitié de la mienne, Et recommande l’autre à Dieu. […] Il écrivit à son frère qu’il désirait revenir à Paris, et le priait de venir le prendre à la gare de Trouville, en lui marquant le jour et l’heure du rendez-vous.
Despréaux prit sur lui de ne pas éclater d’abord. […] Il prit vivement le parti des anciens, auxquels il étoit si redevable. […] A quoi pensoit cette belle, De prendre un amant dévot. […] On ne veut pas non plus qu’Énée ait violé ses sermens : il n’avoit pris aucun engagement solemnel avec Didon. […] Comme ce ton détestable est le plus aisé à prendre, il est aussi le plus suivi.
Cette raison si puissante, à force d’être toujours aux prises avec l’incompréhensible, a-t-elle fini par se troubler ? […] Pourquoi donc prenons-nous un si vif intérêt aux Provinciales, et qu’y trouvons-nous qui nous soit conforme ? […] Et le père de le prendre comme un bon conseil, et de se promettre de ne pas l’oublier. […] « Puisque vous le prenez ainsi, dit-il, je ne puis vous le refuser. » Et ce qui restait à dire, il le dit. […] Ainsi, mes pères, j’échappe à toutes vos prises. » Pascal ne quitte plus guère ce ton véhément.
L’homme âgé prend Parsifal par le bras et l’emmène. […] » Malgré lui, Amfortas, pâle comme un mort, va prendre au fond de l’arche un vase de cristal et l’élève dans les airs. […] Aux questions paternelles de Gurnémanz, elle répond par un geste de soumission, en disant : « Servir… je veux servir. » Puis elle prend une cruche et va puiser de l’eau à la fontaine comme la dernière des servantes. […] Recueil de citations prises dans les œuvres de Diderot. […] Les mots Wala et Wille (volonté) sont étymologiquement identiques ; c’est avec les puissances élémentaires de son propre être que Wotan prend conseil.
Mais, comme nous ne pouvons prendre une conscience claire et réfléchie de la réaction par laquelle notre caractère individuel, en ses profondeurs obscures, a ainsi déterminé le vouloir, sous l’idée elle-même déterminante de sa propre autonomie, nous finissons par prendre cette détermination incomplètement connue pour une indétermination réelle. […] Si nous prenons au hasard, les raisons de notre mouvement seront toutes mécaniques ; si nous choisissons, nous serons alors déterminés par un jugement de préférence fondé sur la grosseur, la couleur, le poids, la qualité de telle orange. […] Dans ce dernier cas, nous choisissons encore, en réalité, de prendre au hasard, pour montrer que nous ne sommes point sous la dépendance d’aucune orange particulière. […] Les deux partis adverses raisonnent chacun selon des hypothèses de leur invention et selon des définitions de leur fabrique, au lieu de prendre pour point de départ les faits donnés dans la conscience humaine. […] Ce sont des lois de finalité intellectuelle, qui permettent au moi de se prendre pour fin et, dans l’acte moral, de prendre en même temps pour fin l’être universel.
Cependant je pris la plume avec mes rivaux, et j’écrivis en toute humilité, mais avec tout l’effort de style dont j’étais capable, ma première composition. […] « Les petits bergers, armés d’une branche de houx où pendent encore les feuilles, prennent avec leurs chèvres le sentier de rocher qui mène aux montagnes ; ils s’amusent en montant à cueillir les rameaux du buis, que le printemps rend odorants comme la vigne, et à cueillir au buisson les fruits verts de cet arbrisseau, qui ressemblent à de petites marmites à trois pieds, amusement et étonnement de leur enfance. […] L’homme rejette sa veste ; la jeune femme ne garde que sa chemise de toile épaisse et forte comme le cuir ; ils prennent la pioche dans leurs mains hâlées, et on entend résonner partout sur les collines, jusqu’au milieu du jour, les coups de la pioche de fer luisant, sur les cailloux qui l’ébrèchent. […] L’entretien qui interrompait ou qui suivait les lectures prenait naturellement le ton grave, léger ou sentimental du volume. […] ce chant de l’âme qui exhale ce qui nous semble trop divin en nous pour rester enseveli dans le silence ou pour être exprimé en langue usuelle ; littérature instinctive et non apprise, qui prend ses soupirs pour des accents, et qui cadence les battements de deux cœurs pour les faire palpiter à l’unisson de leurs accords.
Il la prit dans ses bras, la fit allaiter, et l’éleva avec la sollicitude d’un père. […] ” » Le héros fait le serment ; il prend les deux mains de Sacountala dans les siennes, et ce signe les unit à jamais comme deux époux. […] ce n’est pas seulement pour complaire à notre vénérable père que je prends tous ces soins ; je t’assure que je ressens pour ces jeunes plantes l’amitié d’une sœur. […] ce charmant arbuste ne semble-t-il pas me faire signe de ses rameaux flexibles, que l’on prendrait pour autant de jolis doigts dans la mobilité que leur imprime le zéphyr ? […] Essuie, essuie tes larmes, ma chère fille ; prends courage, et jette un regard ferme sur le chemin que tu as à parcourir.
Il semble que dans les organes rudimentaires et dans les homologies de structure, la nature ait pris la peine de nous révéler son plan de modification, et que volontairement nous nous refusions à le comprendre. […] De là, sans dédaigner de prendre en considération l’existence actuelle de gradations intermédiaires entre deux formes quelconques, nous serons conduits à peser avec plus de soin et à évaluer plus haut la somme actuelle des différences qui existent entre elles. […] Les expressions d’affinités, de parenté, de communauté de type, de morphologie, de caractères d’adaptation, d’organes rudimentaires ou avortés, etc., cesseront d’être des métaphores et prendront un sens absolu. […] L’étude des productions domestiques prendra une plus haute valeur. […] L’embryon vertébré manifeste dès le commencement un système de développement bien caractérisé et le jeune être ne prend, à aucune de ses phases fœtales, la forme de l’articulé, du mollusque ou du rayonné.
Je n’ai pas à suivre ici les péripéties de l’entreprise ni à faire le siège de Constantinople : qu’il me suffise de rappeler que les croisés ne prirent point d’abord la ville pour leur compte ; ils exécutèrent fidèlement leur promesse, rétablirent sur le trône le père d’Alexis et y placèrent ce jeune homme lui-même. […] Quand Baudouin, élu empereur par les Français, s’est aventuré dans une expédition contre le roi des Bulgares et est fait prisonnier après une défaite, son frère Henri prend sa place ; mais les barons attendent, avant de l’élire et de le sacrer empereur à son tour, d’être positivement assurés du trépas de son frère : « Sur quoi je voudrais, écrit l’historien Nicétas, que les Romains (les Grecs) fissent un peu de réflexion ; eux, dis-je, qui n’ont pas sitôt élu un empereur qu’ils songent à le déposer. » Ainsi l’idée de légitimité, de fidélité au serment, et de religion politique, existe chez les Latins, tandis qu’elle est entièrement abolie chez les Grecs : ce qui, chez ceux-ci, est une infériorité sociale de plus. Chacun ne sait-il pas, dit encore ce même historien grec rendant involontairement hommage à ceux qu’il appelle Barbares, que quand ils ont pris une ville, ils la gardent avec une vigilance qui ne se peut exprimer, que pour cela ils renoncent au repos et endurent des fatigues incroyables ? Ils ne ressemblent pas en ce point-là à nos gens qui abandonnent leur chemise au premier qui la veut prendre, et qui secouent la poussière de leurs pieds lorsqu’on les chasse de leur patrie… Un tel aveu dispense de tout commentaire, et l’on voit encore par là de quel côté était alors la moralité, la vertu sociale ; pour être à l’état brut, elle n’en existait pas moins ; et l’on conçoit que les vainqueurs, parodiant les vaincus dans une mascarade de triomphe, se soient promenés dans les rues de Constantinople vêtus de robes, coiffés à la byzantine, et tenant en main pour toutes armes du papier, de l’encre et des écritoires.
Rien n’autorise à penser qu’à cet égard il se séparât bien nettement de la plupart des médecins et des savants du xviiie siècle ; mais ce qui ressort de plusieurs de ses discours, c’est que du moins il ne prenait aucune part au fanatisme négatif dont plus d’un était atteint, et que Condorcet, par exemple, professait. […] Dans un temps où le souffle général et le cri d’alentour eussent été pour la Providence, il n’eût pas pris tant de précautions, et il n’eût pas hésité. […] Vicq d’Azyr, selon la remarque de Grimm, prit, en louant Buffon, le parti le plus sûr et le plus fait pour être approuvé généralement ; ce fut de l’analyser avec suite, avec étendue ; il y mêla de l’éclat, et en quelques endroits il sut s’élever sur les pas de son modèle. […] Son imagination tendre, aux prises avec des tableaux constamment funestes, s’en imbut et se terrifia.
Ils m’ont vu huit jours de suite, par une pluie affreuse, ne prendre jamais un moment de repos, les conduire intrépidement au feu, les encourager dans leurs malheurs, et seul de l’état-major, ne les jamais quitter. […] ) Je regardais comme un honneur, après avoir été bien noté du général Schérer, de me trouver encore du nombre de ceux que l’intrigue avait écartés ; j’étais fier de ma réforme, et il n’a rien moins fallu que les ordres de Kellermann pour me faire demeurer ; car, après la retraite, j’allais prendre le même chemin que toi sans plus de façon, et le diable s’en est mêlé pour me faire demeurer : enfin, on m’a envoyé une nomination, et je suis encore attaché à la chaîne. […] Ce général de brigade, qui vient de prendre les chariots et les bagages de l’ennemi, se voit dans la nécessité d’écrire à son père : Un peu de numéraire pour changer mes habits et harnacher mes chevaux me serait nécessaire. […] Mais Bonaparte, nommé général en chef, arrivait à Nice le 27 mars et venait prendre en main cette armée de braves, sans habits, sans pain et sans souliers, qui n’attendait qu’un tel chef pour faire ses prodiges.
Je ne sais par quel bout m’y prendre, en vérité, pour louer cette merveilleuse édition qui a la palme sur toutes les autres et qui la gardera probablement. […] Il ne fit point comme les frères Grimm ont fait de nos jours en Allemagne, il ne prit point le bâton de voyageur et ne s’en alla point de chaumière en chaumière, de château en château, pour ramasser tout ce qui restait et flottait encore de poésie : ce n’était point la mode de tant courir au xviie siècle. […] Qu’on ne vienne plus tant parler de grandes œuvres, de productions solennelles : le bon Perrault, pour avoir pris la plume et avoir écrit couramment sous la dictée de tous, et comme s’il eût été son jeune fils, est devenu ce que Boileau aspirait le plus à être, — immortel ! […] Et il n’est guère probable que Perrault lui-même connût ce recueil. » Ainsi donc, il est bien entendu que ce n’est nullement d’invention qu’il s’agit avec Perrault ; il n’a fait qu’écouter et reproduire à sa manière ce qui courait avant lui ; mais il paraît bien certain aussi, et cela est satisfaisant à penser, que ce n’est point dans des livres qu’il a puisé l’idée de ses Contes de Fées ; il les a pris dans le grand réservoir commun, et là d’où ils lui arrivaient avec toute leur fraîcheur de naïveté, je veux dire à même de la tradition orale, sur les lèvres parlantes des nourrices et des mères.
Biot, n’était pas exempt, en effet, d’une certaine mobilité, et était capable de se prendre et de se déprendre assez brusquement. […] Nous n’aurions qu’à rappeler qu’il lui est arrivé, à lui tout le premier, en deux occasions (1828 et 1835), de prendre l’initiative pour proposer les mesures qu’il estimait les plus avantageuses à l’approvisionnement de la capitale, tout comme l’aurait pu faire un membre du Conseil municipal de Paris. […] Ce désappointement se changea en un sentiment plus pénible encore, lorsqu’en 1830 Arago succéda en cette même qualité de secrétaire perpétuel à Fourier, et prit au sein du Corps savant une prépondérance qui dura entière jusqu’à la fin de sa vie (1853). […] Biot a pris tous ses avantages en discutant cette question de publicité pour l’Académie des Sciences l’y remarque des appréciations très exactes et très bien rendues sur les mérites inégaux et divers de Delambre, de Cuvier et de Fourier, à titre de secrétaires perpétuels.
Napoléon en reconstituant le grand-duché de Varsovie après la paix de Tilsitt (1807), et en l’accroissant considérablement après celle de Vienne (1809), semblait encore n’avoir fait qu’un essai et n’avoir pris qu’une demi-mesure. […] M. de Senfft fut avec lui à Berlin, et depuis à Paris, sur un pied d’amitié et de confiance, auquel il dut, en 1809, la satisfaction de soustraire le fils aîné de Mmc la duchesse d’Esclignac, fait prisonnier en Espagne, à la rigueur des lois portées contre les Français pris les armes à la main. » On peut le remarquer, les parfaites liaisons de M. de Senfft à cette époque ne furent jamais qu’avec ceux qui, tout en servant alors la politique de Napoléon, avaient des restes d’ancien régime ou des avant-goûts et des prédispositions de régime futur différent. […] Mais une note de date postérieure, qu’il a pris soin d’ajouter, nous apprend que cette noble cause s’était entièrement dénaturée, à ses yeux, depuis 1831, par l’introduction de l’élément révolutionnaire. […] M. de Senfft y fut pris, et il trace à cette occasion de Fouché un portrait qui est encore plus flatté en son genre que celui de l’abbé de Pradt : « … M. de Senfft courut aussitôt chez le ministre de la police : c’était alors M. le duc d’Otrante, le fameux Fouché, dont cette circonstance le rapprocha pour la première fois.
Je crois au contraire que, dans une certaine classe surtout, il en est si peu d’heureux, que s’il m’était proposé de changer mon sort pour le sort de celui qu’après un mûr examen je croirais le plus heureux d’entre dix hommes pris au hasard dans le nombre de ceux qui ont l’avantage, inappréciable parmi nous, de réfléchir, je refuserais sans hésiter cet échange : et je ne sais si j’accepterais cette proposition, ayant le choix dans vingt, dans cinquante. […] Quand je jette un coup d’œil sur le passé, sur tout le non-succès de mes desseins, sur la perte de tant d’années, je me condamne, je me dis : « Il fallait prendre tel parti ; » puis je trouve qu’il a été si mal à propos de ne pas prendre ce parti que je me mets à examiner mieux les circonstances pour voir ce qui a pu faire obstacle : alors je me rappelle des choses qui me prouvent qu’en effet cette conduite qui eût été la plus sage n’a pas été praticable. […] — Mais l’embarras est moins grand, plusieurs de mes amis ayant pris assez tôt, dans le temps de mes malheurs, le soin de m’apprendre que je pourrais les quitter sans scrupule lorsque je serais heureux. » « Décembre 1812.
Dans la seconde édition, le caractère breton prit le dessus, mais d’une façon un peu affichée. […] Mais Saladin, grêle et fin, et faisant déjà le vaincu, n’a pris qu’un coussin de soie rempli de duvet, et a demandé à Richard si avec sa grande épée il le pourrait pourfendre : — Non, certainement, répondit le roi ; nulle épée, fût-ce l’Excalibar du roi Arthur, ne pourrait fendre ce qui n’oppose aucune résistance. — Et lui, Saladin, d’un coup habile de son cimeterre qui ressemble à une faucille dorée, a déjà divisé le coussin sans presque faire semblant. […] En cette arène épique, de quelque façon qu’il se la trace, nous voudrions le voir prendre fréquemment et couramment tout son champ, le voir s’accorder tout entrain et pleine ouverture126. […] Obscurci longtemps par une colline, Ton astre rayonne et prend son essor ; Hélas !
La forme atteste une main habile et presque virile d’artiste ; le fond exprime une âme de femme délicate et ardente, mais qui a beaucoup pensé, et qui ne prend guère l’harmonie des vers comme un jeu. […] Et souvenez-vous de moi dorénavant, lorsqu’ici viendra, après bien des travers, quelqu’un des hôtes mortels, et qu’il vous démandera : « O jeunes filles, quel est pour vous le plus doux des chantres qui fréquentent ce lieu, et auquel de tous prenez-vous le plus de plaisir ? […] A ne prendre que l’ensemble, on a véritablement créé le lyrique en France, non plus par accident, mais par une production riche et profonde. […] « J’étais sorti le matin pour chasser le sanglier, et je suis rentré le soir ayant pris beaucoup de cigales. » Mais les cigales sont harmonieuses. — Eh bien, l’école poétique moderne, au pis, peut se dire comme ce chasseur-là.
Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français Janvier 1844 Il y avait quelque hardiesse à revenir de nos jours à Bérénice, et cette hardiesse pourtant, à la bien prendre, était de celles qui doivent réussir. […] Il est bon que la conscience intérieure que chaque talent porte naturellement en soi prenne ainsi forme au dehors et se représente à temps dans la personne d’un ami, d’un juge assidu qu’on respecte ; il n’y a plus moyen de l’oublier ni de l’éluder. […] Jean-Jacques n’a pas craint de soutenir que Titus serait plus intéressant s’il sacrifiait l’empire à l’amour, et s’il allait vivre avec Bérénice dans quelque coin du monde, après avoir pris congé des Romains : une chaumière et son cœur ! […] Un organe pur, encore vibrant et à la fois attendri, un naturel, une beauté continue de diction, une décence tout antique de pose, de gestes, de draperies, ce goût suprême et discret qui ne cesse d’accompagner certains fronts vraiment nés pour le diadème, ce sont là les traits charmants sous lesquels Bérénice nous est apparue ; et lorsqu’au dernier acte, pendant le grand discours de Titus, elle reste appuyée sur le bras du fauteuil, la tête comme abîmée de douleur, puis lorsqu’à la fin elle se relève lentement, au débat des deux princes, et prend, elle aussi, sa résolution magnanime, la majesté tragique se retrouve alors, se déclare autant qu’il sied et comme l’a entendu le poëte ; l’idéal de la situation est devant nous. — Beauvallet, on lui doit cette justice, a fort bien rendu le rôle de Titus ; de son organe accentué, trop accentué, on le sait, il a du moins marqué le coin essentiel du rôle, et maintenu le côté toujours présent de la dignité impériale.
Préface Si je ne me trompe, on entend aujourd’hui par intelligence ce qu’on entendait autrefois par entendement ou intellect, à savoir la faculté de connaître ; du moins, j’ai pris le mot dans ce sens. […] Au-dessous et à côté des idées, images, sensations, impulsions éminentes dont nous avons conscience, il y en a des myriades et des millions qui jaillissent et se groupent en nous sans arriver jusqu’à nos regards, si bien que la plus grande partie de nous-mêmes reste hors de nos prises et que le moi visible est incomparablement plus petit que le moi obscur. […] Un écoulement universel, une succession intarissable de météores qui ne flamboient que pour s’éteindre et se rallumer et s’éteindre encore sans trêve ni fin, tels sont les caractères du monde ; du moins, tels sont les caractères du monde au premier moment de la contemplation, lorsqu’il se réfléchit dans le petit météore vivant qui est nous-mêmes, et que, pour concevoir les choses, nous n’avons que nos perceptions multiples indéfiniment ajoutées bout à bout. — Mais il nous reste un autre moyen de comprendre les choses, et, à ce second point de vue qui complète le premier, le monde prend un aspect différent. […] Nous prenons le mot impulsion au sens psychologique et non au sens mécanique.
Il en prend au peuple, aux provinces, mots de cru et de terroir, savoureux et mordants : il en va chercher chez ses conteurs du xvie siècle, chez son favori Rabelais. […] La Fontaine, d’abord, n’invente rien : il prend sa matière de toutes mains, d’Ésope, de Phèdre, de Babrius, d’Avienus, de Lokman ou Pilpay, d’Horace ou de Marot, de Des Périers ou de Rabelais, de tous les fabulistes de profession et d’occasion qu’il peut connaître. […] Ils y ont vu des préceptes, quand ce sont ordinairement des observations : ils ont cru que le poète réglait, quand il constatait ; ils ont pris des lois expérimentales pour des commandements catégoriques. […] En 1647, il se marie, et prend une charge de maître des eaux et forêts.
L’analyse interne d’une œuvre littéraire Comme le mot de « littérature » est pris souvent dans un sens très vague, il n’est peut-être pas inutile de se demander ici : l’qu’est-ce qu’une œuvre littéraire ? […] Prenez les nouvelles et les romans de Mérimée : ce ne sont au contraire le plus souvent qu’émotions fortes, violentes, éclatant en actes brusques, imprévus et sanglants. […] S’il est des genres littéraires voués ainsi à l’action par leur nature même, tous peuvent à l’occasion prendre ce caractère militant. […] Mais toujours, même chez les écrivains qui prennent à tâche de demeurer impersonnels, perce la passion qui leur tient le plus à cœur et qu’ils ont l’envie inconsciente de rendre contagieuse en l’exprimant.
« Ressentir à un faible degré les états de conscience impliqués dans les actes de prendre, de tuer et de dévorer, c’est avoir le penchant à prendre, à tuer et à dévorer. […] Assurément, dans le seul fait de penser, par exemple de penser au jeu, il y a une activité qui tend à se maintenir contre les obstacles, mais n’est-ce pas ici une conséquence toute secondaire, résultant de cette loi que l’activité, en s’exerçant, en prenant conscience de soi, prend aussi ipso facto jouissance de soi, et par cela même tend à se maintenir ? […] En outre, il est essentiel que l’appétition vitale puisse prendre spontanément conscience de soi sous les deux formes du plaisir et de la douleur ; bref, nous avons besoin des trois moments du processus appétitif.
Il relevoit cet endroit, où le panégyriste du prince lui disoit que, s’il continuoit à prendre tant de villes, il n’y auroit plus moyen de le suivre, & qu’il faudroit l’aller attendre aux bords de l’Hellespont. […] Despréaux le prit en aversion, parce que son ami Molière avoit à s’en plaindre. […] Nos deux Anaxagores trouvèrent des partisans, entr’autres madame Des Houlières, dont le fort fut toujours de donner au public de bonnes choses & de prendre le parti de ceux qui lui en donnoient de mauvaises. […] L’un faisoit des vers mordans ; & l’autre, pour en faciliter la lecture, les faisoit imprimer à ses dépens, & en enveloppoit les biscuits qu’on venoit prendre chez lui.
Lélut, cette limite, au point de vue du développement du crâne pris dans sa grande circonférence horizontale, est de 16 à 17 pouces, et au point de vue de la pesanteur du cerveau d’environ 1000 grammes. […] Ici il n’est plus guère possible de peser directement des cerveaux, car on n’a pas facilement à sa disposition un cerveau de Chinois, de Nègre ou de Hottentot ; mais à défaut de cerveaux on a des crânes, et au lieu de peser les uns, ou prend la mesure des autres21. […] Selon moi, l’idiot est celui dont le cerveau contiendrait le moins de phosphore ; le fou, celui dont le cerveau en contiendrait trop ; l’homme ordinaire, celui qui en aurait peu ; l’homme de génie, celui dont la cervelle en serait saturée à un degré convenable. » En Allemagne, Feurbach avait pris tellement au sérieux cette théorie du phosphore, qu’il n’hésitait pas à signaler comme une cause de l’affaiblissement des caractères en Europe l’usage exagéré de la pomme de terre, qui contient peu de phosphore. […] Il y a plus, si l’on prend le poids relatif, il est des singes, par exemple les ouistitis, qui sont mieux partagés que nous.
Cette poésie qui roule dans son flot, sans pureté, des paillettes prises à tous les Pactoles, quand ce n’est pas à tous les oripeaux, a cependant une manière de rouler ces bavures et toutes ses impudentes réminiscences, qui ne pouvait pas manquer de faire illusion aux culs-de-jatte de l’Académie, à qui le moindre mouvement défendu, le moindre signe de vie élémentaire, apparaissent comme des phénomènes ! […] Pour elle grande chose — trop grande même, — prendre l’Italie révolutionnée pour piédestal, c’était plus beau que le cap Misène ! […] La communiante avec Lamennais, qui communiait aussi avec Garibaldi, le Christ moderne, et qui prend la Révolution italienne pour une hostie, ne pouvait pas la juger… Le livre de l’Italie des Italiens est un acte d’adoration perpétuelle, dans lequel, pour la première fois, et contrairement à la loi de l’amour, celle qui adore ne s’efface pas, ne s’enfonce pas dans l’être aimé. […] Ce qui reste, c’est que gouvernements, ministres, ambassadeurs, aristocratie, aient accueilli, salué, acclamé, pris pour confidente de leurs desseins Mme Colet !
Quand il veut faire travailler à Pauline La logique de Condillac, lui faire apprendre par coeur L’art poétique de Boileau, dont il dira ensuite pis que pendre, ses conseils partent évidemment d’un fonds moins important, moins vraiment stendhalien que lorsqu’il veut lui faire prendre, en 1805, l’habitude d’analyser les personnes qui l’entourent (« l’étude est désagréable, mais c’est en disséquant des malades que le médecin apprend à sauver cette beauté touchante ») ou lorsqu’il contracte dans ses premières relations montaines l’aptitude à traduire par une algèbre psychologique les valeurs les unes dans les autres (" notre regard d’aigle voit, dans un butor de Paris, de combien de degrés il aurait été plus butor en province, et, dans un esprit de province, de combien de degrés il vaudrait mieux à Paris. " ) c’est à cette époque que Stendhal s’accoutume (héritier ici de Montesquieu qui ne paraît point, je crois, dans ses lectures) à rattacher instantanément un trait sentimental à un état social, à mettre en rapport par une vue rapide le système politique d’un pays avec ses façons de sentir. […] De ce point de vue, l’amour-vanité, l’amour-goût, l’amour-passion, le mouvement qui conduit Stendhal de l’un à l’autre, qui lui fait apercevoir l’un comme un rêve à l’horizon de l’autre, prennent une valeur musicale. […] La psychologie qui a pris après Stendhal la suite et le sillon des analyses du XVIIIe siècle l’a fort bien étudiée. […] En tout cas, si nous la prenons comme une image, au même titre que la cristallisation, c’est une image commode, profonde et vraie.
Fénéon a pris trop à cœur son état de fidèle de « l’église silencieuse » dont parle Gœthe, et que, nous autres, nous fréquentons trop peu. […] Ayant pris charge de la littérature vers le déclin du naturalisme, M. […] qu’il nous prenne entre ses mains d’époux. […] Si pour thème d’un discours il prend ce mot de M. […] Mazel est un traditionaliste ; l’un a pris de M.
Il n’avait pas accepté seulement, il avait pris, et gardé tout entier pour lui, l’héritage de pouvoir que lui avaient comme accumulé les Mazarin et les Richelieu. […] Il y avait une grande place à passer, et dans les commencements de notre connaissance, il prenait son chemin par les côtés de cette place. […] Et si l’on cherche la raison de ce progrès du style narratif, où la trouvera-t-on, que dans l’intérêt nouveau qu’on prend aux choses voisines et contemporaines ? […] L’édition de 1682, que quelques éditeurs prennent encore aujourd’hui pour type, est aussi parfaitement incorrecte que laide. […] — N’y a-t-il pris qu’une satisfaction d’artiste à « défigurer » l’antiquité selon l’image qu’il s’en formait ?
Lorsqu’il eut publié ce recueil, intitulé Fleurs du mal, il n’eut pas seulement affaire à la critique, la justice s’en mêla ; elle prit fait et cause au nom de la morale publique, comme s’il y avait véritablement danger à ces malices enveloppées et sous-entendues dans des rimes élégantes. […] » Et vous avez pris l’enfer, vous vous êtes fait diable ; vous avez voulu arracher leurs secrets aux démons de la nuit.
. — La grande nouvelle qui domine toutes les autres est celle de la transformation du journal la Presse qui vient d’augmenter son format, d’abaisser son prix, et de prendre d’un grand coup de filet la masse et l’élite des écrivains. […] Mais Chateaubriand, le voilà devenu, presque sans le vouloir, le compère d’une entreprise politique qui lui est antipathique ; voilà que son livre mystérieux d’Outre-tombe va servir, en quelque sorte, de miroir à prendre les alouettes, c’est-à-dire à faire des chalands à M.
Je le sais trop bien, et, si je l’avais ignoré, M. le pasteur Napoléon Peyrat, dans un livre de Souvenirs intitulé Béranger et La Mennais (1861), aurait pris soin de me l’apprendre. […] Je n’avais pas été le premier à le rechercher au début de notre liaison ; lui-même m’avait fait, par Victor Hugo, des avances dès le temps des Consolations ; je l’avais connu prêtre et disant encore la messe, ultramontain et pur romain de doctrine : je l’avais pris avec vivacité et sympathie par tous les points desquels je pouvais me rapprocher et qui m’offraient un moyen de correspondre ; je m’étais efforcé de multiplier ces « points d’attouchement, » comme les appelle Lavater dans son manuel de l’amitié ; je n’avais eu, dès son premier pas dans le libéralisme, que d’excellents et chauds procédés envers lui et lui avais hautement rendu, je puis dire, de bons offices littéraires.
D’une part, engagée par les sollicitations de votre mémoire, disons mieux, de votre conscience ; de l’autre retenue par les scrupules de votre amour-propre, ou du moins de votre délicatesse, il vous faudra, et j’adopte ici la supposition la plus douce, il vous faudra tout ménager, tout prévoir, conter avec apprêt et réserve, fausser presque à votre insu vos réminiscences, prendre à propos vos rêves pour des souvenirs, en un mot, par un officieux et perpétuel mensonge d’imagination, reconstruire le passé en croyant le reproduire ; à moins toutefois, ce que je ne redoute guère, qu’il ne vous advienne l’orgueilleux caprice de nous confesser voire vie pleine et entière, à la mode de saint Augustin, sinon de Jean-Jacques. […] Il y a plus : bien avant sa venue d’Altona, et un peu avant son départ pour Londres, madame de Genlis avait pris une part non moins active à d’autres luttes, d’un intérêt non moins puissant, quoique plus profane ; elle fut patronne des clubs avant d’être mère de l’Église ; c’était toujours prêcher, et cette prédication disposait à l’autre.
C’est le régime représentatif… Autrement dit, la tyrannie anonyme, ou à peu près… Au moins, sous l’ancien régime — qui, du reste, ne valait pas mieux, — on savait à qui s’en prendre. […] dit Ruy Blas à don César de Bazan. — Les ennuis matériels de cette fâcheuse Exposition, j’en prendrais encore mon parti.
Que, dans Gabrielle, qui est une comédie d’une haute moralité, il mît hardiment, dans la bouche des personnages contemporains, le ferme alexandrin du xviie siècle ; que, dans l’Aventurière, il fît passer, à travers ce même vers classique le souffle du lyrisme et de la fantaisie ; que, pris d’une vertueuse indignation, il marquât, dans le Mariage d’Olympe, la fille triomphante avec le fer rouge de la satire ; qu’après un regard épouvanté sur les progrès d’un luxe corrupteur, il dénonçât la courtisane mariée, la lionne pauvre ; — toujours il nous faisait admirer et applaudir des œuvres d’une composition solide et harmonieuse, d’un intérêt poignant et irrésistible. […] Sauf dans la Pierre de touche, le premier Augier a pris la langue des vers pour instrument comme l’autre la prose.
Stanislas Guyard, Professeur au Collège de France 9 septembre 1884 Quelle fatalité, Messieurs, que la mort soit venue prendre parmi nous le plus jeune, le plus désigné pour les grandes œuvres, le plus aimé ! […] Quand il pensait à tant de belles choses qui seraient à faire, quand il voyait la moisson si belle et les ouvriers si peu nombreux, il était pris d’une sorte de fièvre ; il assumait pour lui la tâche de dix autres.
Il a eu beau dire que le goût & la gloire des Lettres étoient intéressés à cette sévérité ; que les défauts des Auteurs célebres sont beaucoup plus dangereux que ceux des Auteurs médiocres, qu’on n’est jamais tenté de prendre pour modeles ; qu’il est essentiel d’arrêter les usurpations des Tyrans littéraires, qui abusent de leur réputation pour renverser les Loix & faire respecter jusqu’à leurs écarts : de pareilles raisons ne sauroient justifier ces attentats toujours impardonnables, si on fait attention aux génies qu’ils attaquent. […] Ajoutons qu’incapable de sentir combien le siecle des lumieres doit l’emporter sur le siecle du goût, il a eu la simplicité de prendre la défense des Corneilles, des Racines, des Crébillons, contre MM. de Voltaire & de Saint-Lambert ; celle de Despréaux & de J.
C’est seulement dans ce lieu psychologique, où éclot le phénomène de la connaissance, qu’il est possible d’observer les formes diverses de la réalité, car c’est là seulement que la réalité prend forme objective, c’est là seulement que se rencontrent des objets. De même que la réalité psychologique est un compromis entre un principe d’acte et un principe de contemplation, on peut remarquer tout d’abord, en ce qui touche à l’objet considéré isolément, qu’il apparaît et prend forme sous le regard de la conscience, à la suite d’un compromis entre un principe de mouvement et un principe d’arrêt.
Crime et Châtiment est admirable parce que ce roman est appelé à peindre l’hallucination criminelle, mais le peintre qui entoure d’une pareille hallucination indifféremment un violoniste mondain, une jeune femme charmante, Carlyle, ou de délicieux enfants roses est absurde, parce que ces œuvres sont absurdes et morbides, parce que l’absurde et le malade ne peuvent pas rationnellement prétendre prendre jamais place dans notre admiration.. […] « Que ceux qui ont une idée médiocre ou pauvre et qui ont besoin d’être en face de grands hommes pour s’apercevoir de la grandeur de l’homme, s’adressent à nos de Lesseps, à nos Edison, à nos Pasteur ou bien à nos politiques, aux généraux, aux écrivains, aux artistes, aux grands commerçants, aux industriels fameux, aux philosophes ; mais que ceux qui se sentent l’âme élevée et le cœur vibrant pour la suprême beauté de leur race prennent les plus humbles, les va-nu-pieds et les derniers pauvres gens.
Il est certain qu’on ne doit élever sur le cothurne que les personnages pris dans les hauts rangs de la société. […] La morale, la curiosité, la noblesse de l’art, la pureté du goût, et peut-être la nature envieuse de l’homme, obligent donc de prendre les acteurs de la tragédie dans une condition élevée.
Nous prendrons pour objet de comparaison chez les anciens, dans les amours champêtres, l’idylle du Cyclope et de Galatée. […] L’accent d’une âme passionnée est aigu, sifflant, précipité ; l’A est trop long pour elle : il faut une bouche pastorale, qui puisse prendre le temps de le prononcer avec lenteur.
… Où qu’on prît ces héroïnes, qui ne forment pas un bataillon, mais toute une armée dans l’histoire ; qu’on les prît sur notre terre de France, que ce fût sainte Radegonde, sainte Geneviève, sainte Clotilde, et tous ces cœurs vaillants de la vaillance de Dieu jusqu’à Jeanne d’Arc et depuis elle, n’importe où l’historien allât les choisir, elles étaient dignes de s’aligner en face des plus grandes (s’il y en avait) de la Révolution française, et de faire baisser les yeux à leurs portraits, plier le genou à leurs cadavres.
Seulement, son nouvel ouvrage, bien différent en cela du livre de Lerminier, lequel est digne d’être pris en considération par les esprits les plus profonds, n’ajoutera pas beaucoup aux idées actuelles et à la gloire de son auteur. […] Cet ouvrage, du reste, — notes de voyage prises en courant, — ne peut avoir l’importance d’un livre même aux yeux de son auteur, qui a, dans un talent incontestable, l’obligation d’être sévère.
Il achevait sa philosophie à Abbeville en 1834, et faisait un premier voyage à Paris dans l’été de cette même année, pour y prendre son grade de bachelier-ès-lettres. […] Obligé, d’après les conditions universitaires, d’obtenir le grade de docteur-ès-lettres, Charles Labitte prit pour sujet de thèse une période fameuse de notre histoire politique, ou du moins un point de vue dominant dans cette période, et qui s’étendit aussitôt sous sa plume jusqu’à former le volume intitulé De la Démocratie chez les Prédicateurs de la Ligue (1841). […] Auguste Bernard et l’autorité qu’il s’est acquise sur le sujet me serviront d’excuse, si je me prends directement à son opinion, qui rallierait au besoin plus d’un partisan. […] On ne prend de tels mots au pied de la lettre que quand on y met peu de bonne volonté. […] En ce qui est du sentiment démocratique avancé dont on serait tenté par moments de faire honneur à l’auteur et à sa faction, prenez bien garde toutefois et ne vous y fiez guère : il y a quelque chose qui falsifie à tout instant cette inspiration de bon sens démocratique, qui le renfonce dans le passé et qui l’opprime, c’est l’idée catholique fanatique, l’idée romaine-espagnole238.
« Des deux autres partis à prendre, le premier était le plus logique et le plus absolu : proclamer la déchéance et la république. […] Qu’on lise ce récit compulsé tête par tête, dans cette mêlée de cadavres et dans cette mare de sang, pour faire au peuple horreur de lui-même quand il prend ses fureurs pour loi ? […] Il prit le crime pour du génie. […] On eût dit qu’il savait d’avance que les événements brisent ceux qui leur résistent, mais que les révolutions, comme les vagues, rapportent souvent les hommes où elles les ont pris. […] Il avait voulu intimider l’Assemblée constituante par un rassemblement de troupes à Versailles, et le peuple de Paris avait pris la Bastille et embauché les gardes-françaises.
À peine eut-elle pris sa place accoutumée, que trois ou quatre vieux personnages s’approchèrent d’elle, lui parlèrent avec le plus tendre intérêt. L’un d’eux, qui avait une petite perruque ronde, prit ses mains dans les siennes, où il les retint longtemps, et se mit à faire la conversation avec elle comme si elle avait eu vingt-cinq ans. […] Ce fut de cette époque qu’elle prit le goût et la passion de ce qu’elle appelle sans cesse dans ses ouvrages la société, c’est-à-dire un cercle plus ou moins étendu d’hommes oisifs et de femmes désœuvrées qui se réunissent le soir dans un salon pour causer au hasard de toutes choses. […] « Depuis un an, dit en finissant madame de Staël, depuis un an que le secret le plus impénétrable entoure sa prison, on a dérobé tous les détails de ses douleurs ; mille précautions ont été prises pour en étouffer le bruit. […] Madame de Staël n’y vit pendant les premiers mois que l’impatience d’un jeune héros contre des assemblées inertes ou orageuses, qui prenait la dictature au nom de son génie pour régulariser la république, anéantir les factions, grandir la patrie et donner à la pensée confuse du siècle l’unité d’un grand homme.
Pour subsister, pour avoir une action encore efficace, il faut qu’elle se mette au ton du siècle, et, dans sa voix au moins et ses gestes, marque prendre sa part de la dégradation universelle. […] Les choses prenaient un vilain tour : l’évêque n’était pas disposé à lâcher le mauvais garçon, quand Louis XI, récemment sacré, passa près de Meung, donnant des lettres de rémission aux prisonniers dans toutes les villes où il s’arrêtait. […] Commynes rentre à la cour : aussitôt ses procès prennent un meilleur tour. […] Cette force est celle de Dieu : presque à chaque page, Commynes la prend sur le fait, et la signale avec une sincérité d’accent qui touche souvent à l’éloquence139. […] Prisonnier à Azincourt, il ne fut mis en liberté qu’en 1440, et prit une 3e femme, Marie de Clèves.
Disons donc que ce poète est souvent peu attentif au sens et à la valeur des signes écrits qu’il emploie, et que, d’autres fois, il se laisse prendre aux grands mots ou à ceux qui lui paraissent distingués. […] Pourquoi ont-ils pris cette attitude (car on sait d’ailleurs qu’ils n’ont point demandé au catholicisme la règle de leurs mœurs et qu’ils n’en ont point observé, sinon par caprice, les pratiques extérieures) J’ai essayé de le dire au long et à plusieurs reprises5. […] Paul Verlaine, le catholicisme ait été un jour la seule religion possible, le refuge unique après des misères et des aventures où déjà sa raison avait pris l’habitude d’abdiquer. […] A certains moments, sous un choc extérieur, ces impressions ignorées de nous se réveillent à demi : nous en prenons subitement conscience, avec plus ou moins de netteté, mais toujours sans être informés d’où elles nous sont venues, sans pouvoir les éclaircir ni les ramener à leur cause. […] Ce que je prenais d’abord pour des raffinements prétentieux et obscurs, j’en viens à y voir (quoi qu’il en dise lui-même) des hardiesses maladroites de poète purement spontané, des gaucheries charmantes.
Il est indubitable que les plus beaux produits de ce théâtre-ci — et ce sont parfois des merveilles — ne prennent leur pure valeur, pour l’homme de goût, que hors la scène. […] Donc prenez un homme moyen, moyennement intelligent, moyennement cultivé, moyennement sensible… Parlons d’avance le langage de la postérité, la poire ordinaire ! […] Il paraît qu’en Argentine et au Brésil les femmes ont pris tellement de leçons d’attitudes gracieuses qu’elles ne peuvent plus s’écrier : Tiens, vous voilà ! […] Je connais des enfants qui ont pris le goût du meurtre au guignol du Luxembourg. […] Et, sauf le cas de triomphe éclatant, il ne les prendra jamais au sérieux comme le théâtre.
Aucune ne porte le signe des êtres observés et pris à même la vie : divers et incomplets. […] Des êtres pris partiellement dans la réalité seraient d’ailleurs plus complexes et moins intenses, auraient une âme plus mêlée et plus trouble que les esprits rigides et clairs qui passent dans les contes de Poe. […] Outre l’aspect particulier que prennent chez Poe les trois parties primordiales de l’esthétique de tout écrivain : le style, l’invention des lieux et des personnages, la composition, il est utile de considérer les caractères généraux de ces éléments, les propriétés par lesquelles ils concordent et coopèrent. […] Devenues, par ces propriétés extra-littéraires, inquiétantes et dures à lire, balancées exactement en leurs proportions, elles prennent le contour géométrique parfait d’un dessin linéaire. […] Il faut qu’ils sachent et qu’ils montrent comment ils s’y sont “pris”. » Cédant à cette faiblesse, Poe nous a révélé, en plusieurs de ses Essais, les principes de son esthétique rationaliste, par laquelle il avoue exclure de l’art toute émotion et tout enthousiasme.
Corneille, dominé par son génie, et n’empruntant aux anciens que les préceptes de l’art sans prendre leur manière pour modèle, fit de la tragédie une école d’héroïsme et de vertu. […] Corneille, s’élevant tout à coup au dessus des déclamateurs barbares qui n’avaient encore pris aux grecs que la règle des trois unités, jeta le premier de longs sillons de lumière dans la nuit qui couvrait la France. […] Où Racine avait-il pris tant de beautés si étonnantes et d’un si grand effet ? […] le cid, la seule de ses pièces où l’amour produise quelque effet, bien plus par la situation que par les détails, le cid, qui fut le premier fondement de sa réputation, il l’avait pris aux espagnols. […] On voit que ses plus beaux ne lui ont pas coûté beaucoup de peine ; mais on voit aussi qu’il n’en a pris aucune pour embellir par la tournure ce qui ne peut pas briller par la pensée.
On a trouvé bon le vénéneux nectar, et l’on en a pris à si haute dose, que la nature humaine en craque et qu’un jour elle s’en dissout tout à fait ! […] On peut la prendre pour une justice, — la justice de Dieu ! […] Figurez-vous cette langue, plus plastique encore que poétique, maniée et taillée comme le bronze et la pierre, et où la phrase a des enroulements et des cannelures ; figurez-vous quelque chose du gothique fleuri ou de l’architecture moresque appliqué à cette simple construction qui a un sujet, un régime et un verbe ; puis, dans ces enroulements et ces cannelures d’une phrase qui prend les formes les plus variées comme les prendrait un cristal, supposez tous les piments, tous les alcools, tous les poisons, minéraux, végétaux, animaux, et ceux-là les plus riches et les plus abondants, si on pouvait les voir, qui se tirent du cœur de l’homme, et vous avez la poésie de M. […] Après les Fleurs du mal, il n’y a plus que deux partis, à prendre pour le poète qui les fit éclore : ou se brûler la cervelle…… ou se faire chrétien ! […] J’ai d’ailleurs, pour agir ainsi, une excuse excellente, l’exemple du recueil même qui me prend aujourd’hui pour organe.
Lassé de ces bruits sonores et des statues de tout métal debout sur leurs socles démesurés, on se rejette avec une sorte de faiblesse en arrière et, comme Dante en ses cercles sombres, on réclame un guide compatissant et à portée de la main : O Virgile, Térence, Racine, Fénelon, grands hommes et si charmants, pris au sein même et dans les proportions de l’humanité, où êtes-vous ? […] Lucas-Montigny ne saurait être pour Mirabeau cette postérité froidement curieuse et assez indifférente aux conclusions ; il ne faut pas le blâmer d’un effort et d’un but auquel on devra et l’on doit déjà nombre de pièces authentiques et de détails inconnus, puisés au trésor qu’il a pris peine à réunir ; de plus indifférents n’eussent pas fait ainsi, et ils auraient sans doute fait beaucoup moins. […] En parlant de Mirabeau, il était difficile qu’une imagination amante des gloires sombres et fortes, qui s’était attaquée déjà à Cromwell, à Richelieu, à Charles-Quint, à Louis XI, à Napoléon, ne se prît pas au côté purement et simplement grand, et n’y sacrifiât point les considérations autres qui tempèrent et corrigent, qui agrandissent les fonds du tableau, mais diminuent la hauteur de la principale figure. […] Je suis fort heureux pour mon pauvre et spirituel Dumont (de Genève) que le poëte ne l’ait pas pris à partie ; il l’aurait, je le crains, assez pulvérisé. […] Nous ne prendrons pas partie pour les anecdotes de ce pauvre Étienne Dumont, qui, avec tant de circonspection et d’honnêteté, a essayé malencontreusement de remettre à leur place quelques simples grains sur le visage presque auguste de Mirabeau.
Ses habitudes étaient prises, sa vie réglée ; il n’y changea rien. […] Au tome second des Œuvres choisies de La Monnoye (page 296), on lit un récit détaillé de cette mort de Santeul par La Monnoye ; témoin presque oculaire ; rien n’y vient ouvertement à l’appui du dire de Saint-Simon : Santeul s’était levé le 4 août, encore gai et bien portant ; il ne fut pris de ses atroces douleurs d’entrailles que sur les onze heures du matin ; il expira dans la nuit, vers une heure et demie. […] Walckenaer, dans son Étude sur La Bruyère, a rappelé une agréable anecdote tirée des Mémoires de l’Académie de Berlin et qui s’était conservée par tradition : « M. de La Bruyère, a dit Formey, qui le tenait de Maupertuis, venait presque journellement s’asseoir chez un libraire nommé Michallet, où il feuilletait les nouveautés, et s’amusait avec un enfant fort gentil, fille du libraire, qu’il avait pris en amitié. […] Il paraît qu’une première fois, en 1691, et sans le solliciter, La Bruyère avait obtenu sept voix pour l’Académie par le bon office de Bussy, dont ainsi la chatouilleuse prudence (il est permis de le croire) prenait les devants et se mettait en mesure avec l’auteur des Caractères. […] ) La satyre n’étoit pas du goût de Madame la Dauphine, et j’avois commencé une réponse aux Caractères du vivant de cette princesse qu’elle avoit fort approuvée et qu’elle devoit prendre sous sa protection, parce qu’elle repoussoit la médisance.
En 1788, la détresse est telle, que le ministre de Loménie prend et dépense les fonds d’une souscription faite par des particuliers pour les hospices ; au moment où il se retire, le Trésor est vide, sauf quatre cent mille francs dont il met la moitié dans sa poche. […] Désormais elle va le contrôler avec attention, avec défiance, avec colère ; et malheur à ceux qu’elle prendra en faute, car elle sait qu’ils la ruinent en ruinant l’État ! […] En 1784583, des fils de magistrats allant prendre leur première leçon de droit chez un agrégé, M. […] Désormais, avec ou sans les privilégiés, il sera, sous la même dénomination, appelé le peuple ou la nation. » — N’objectez pas qu’un peuple ainsi mutilé devient une foule, que des chefs ne s’improvisent pas, qu’on se passe difficilement de ses conducteurs naturels, qu’à tout prendre ce clergé et cette noblesse sont encore une élite, que les deux cinquièmes du sol sont dans leurs mains, que la moitié des hommes intelligents et instruits sont dans leurs rangs, que leur bonne volonté est grande, et que ces vieux corps historiques ont toujours fourni aux constitutions libres leurs meilleurs soutiens. […] J’y fis ce jour-là même une attention particulière, et, sur le pilastre, je vis pour ornement un bouclier, suspendu à une chaîne mince que le sculpteur avait attachée à un petit mufle de lion, comme on voit à des marteaux de porte ou à des robinets de fontaine ». — Sensations perverties, conceptions délirantes, ce seraient là pour un médecin des symptômes d’aliénation mentale ; et nous ne sommes encore qu’aux premiers mois de 1789 Dans des têtes si excitables et tellement surexcitées, la magie souveraine des mots va créer des fantômes, les uns hideux, l’aristocrate et le tyran, les autres adorables, l’ami du peuple et le patriote incorruptible, figures démesurées et forgées par le rêve, mais qui prendront la place des figures réelles et que l’halluciné va combler de ses hommages ou poursuivre de ses fureurs.
Et enfin il y a si longtemps que les genres servent dans notre littérature vieillie, nous en avons tant vu les lois et les règles tourner, aux mains des faiseurs, en procédés qui dispensent de regarder la nature, nous avons tant vu de pièces bien faites, où il n’y avait pas un mot de senti et de vécu, que nous en sommes venus à prendre volontiers l’inexpérience technique pour une marque de sincérité : il nous semble que l’artiste qui bouscule les genres et leurs lois doive nous étaler la nature toute pure et toute nue. […] Tandis que nous aimons à prendre le contact de la nature même, à ce point que le fruste et l’inachevé ont pour nous une force incroyable de séduction, et que nous donnerions pour les Pensées de Pascal, qui sont des notes, et pour les Sermons de Bossuet, qui sont des brouillons, les Provinciales et les Oraisons funèbres, dont la seule infériorité est d’être finies, nos aïeux d’il y a deux cents ans goûtaient sans inquiétude la perfection de l’art. […] Eumée n’est pas à Ulysse ce qu’un porcher peut être à l’égard de Louis XIV : si bien que la traduction par le mot propre est plus fausse que si on prend la périphrase : « gardien des troupeaux du roi », qui du moins est incolore et ne présente à un Français aucun objet fâcheux de la réalité contemporaine. On peut regretter d’être obligé de recourir à de tels expédients pour faire goûter le beau naturel des anciens : mais tant qu’une société n’a pas des mœurs et un goût qui lui rendent aimable la grossièreté de l’humanité primitive, la pire infidélité, après tout, c’est de prendre, pour traduire les anciens, les mots qui en inspirent le dégoût et la dérision : mieux vaut ne pas donner tout Homère, que de rendre tout Homère ridicule. […] C’est ce point, au-delà duquel l’art ne peut rien, où notre intelligence croit prendre le contact immédiat et direct de la nature, et où cette interposition d’un esprit entre l’objet et nous ne nous est plus sensible : tant la forme créée artificiellement par son effort parvient à être adéquate à la réalité, qui semble s’être approchée jusqu’à nous et dont il ne nous paraît plus que rien nous sépare.
A cette date le pli est pris. […] L’orgueil guérit les mécomptes de sa vie politique : quand on ne lui donnait rien, si je voulais, disait-il ; quand on lui avait retiré, si j’avais voulu ; et la certitude qu’il avait pu tout prendre, tout garder, et qu’il avait tout méprisé, le consolait. […] Il avait pris pour fin la sensation, et non faction. […] Si l’on prend Chateaubriand hors de sa vie politique, hors des Mémoires d’outre-tombe, dans ses œuvres de création littéraire seulement, à peine le soupçonnera-t-on spirituel, et moins encore, peut-être, intelligent. […] On laissera tomber tout cela : et l’on ne prendra que les parties franchement modernes de son inspiration.
Tout prend à ses yeux un sens et une valeur, en vue du but important qu’il se propose, lequel rend sérieuses les choses les plus frivoles qui de près ou de loin s’y rattachent. […] Il faut prendre la révolution qu’elle a opérée ; examiner ce que l’esprit humain était avant la culture philologique, ce qu’il est devenu depuis qu’il l’a subie, quels changements la connaissance critique de l’antiquité a introduits dans la manière de voir des modernes. […] J’ai la conscience que j’ai tout pris de l’expérience ; mais il m’est impossible de dire par quelle voie j’y suis arrivé, de quels éléments j’ai composé cet ensemble (qui peut avoir très peu de valeur sans doute, mais qui enfin est ma vie). […] Ici, comme en tant d’autres choses, on s’est laissé prendre à ce sophisme : Nos pères ont fait merveille avec des méthodes médiocrement régulières. […] Je dois répéter, pour éviter un étrange malentendu, que dans tout ce qui précède j’ai pris le mot de philologie dans le sens des anciens, comme synonyme de polymathie : [en grec] (Platon, les Lois, I, 641, E.)
Un entrepreneur de traduction semble même avoir pris à tâche de déformer la poésie wagnérienne ad usum Galliæ. […] Les auditeurs des concerts Lamoureux s’accoutument aux procédés wagnériens, et leur oreille prend même plaisir (unwillkurlich !) […] Sa vérité prend la forme d’une illusion pour mieux nous pénétrer, et les données les plus abstraites de la philosophie wagnérienne nous sont manifestées avec une puissance de réalisation dont rien n’approche et dont rien n’a jamais pu approcher. […] Et tandis que l’action dramatique, dans sa portée psychologique, c’est-à-dire par la sonorité expressive du mot et du motif, semble nous pénétrer et se perdre en nous, notre moi, par réaction fatale, se prend à vivre, à son insu, la vie du drame et à évoluer, dans sa compréhension subjuguée, selon le devenir déterminé de l’œuvre. […] Wagner lui-même, du reste, a pris soin de fixer les symboles en de parlantes images.
Quoi qu’on puisse penser de ces interprétations, elles montrent du moins que l’auteur prend plus au sérieux, qu’on n’aurait cru peut-être, ces premiers essais de la pensée philosophique. […] Il a commencé l’histoire du développement de nos pensées ; les autres s’étaient contentés de prendre les idées comme ils les trouvaient, Locke rechercha soigneusement l’origine de toutes nos idées. […] Cependant le grand principe de Kant, qu’il faut chercher dans les lois de la pensée une solution des problèmes philosophiques, Gall a eu le mérite d’en approcher par le côté biologique : « Nous devons chercher nos idées et nos connaissances, en partie dans les phénomènes du monde extérieur et dans leur emploi raisonné, et en partie dans les lois innées des facultés morales et intellectuelles232. » Physiologiquement, il prend sa revanche. […] On connaissait beaucoup de faits comme ceux-ci : un mal de dent qui disparait quand on entre chez le dentiste ; prendre de l’eau en s’imaginant que c’est de l’émétique, et vomir, etc. […] Peisse, p. 138, avec la note de l’éditeur qui ne la prend pas davantage au sérieux.
Il y étudia beaucoup et sur d’autres matières encore que celles qu’on y enseignait, ou du moins il les prit dans un tout autre sens, et s’annonça dès cet âge comme un esprit philosophique et indépendant. […] On possède tous ses manuscrits de cette époque de Saint-Sulpice ou des années qui suivirent, et l’on conçoit aisément que ses supérieurs, en parcourant de telles ébauches hardies, en aient pris quelque ombrage. […] Nous avons de beaux arts, nous produisons des effets sensitifs, nous communiquons des émotions vagues ou particularisées, mais nous ignorons l’art d’éclairer un parti, et de pousser à le prendre… Les discours qui se tiennent au Parlement d’Angleterre ont un but ; ils ne ressemblent point à notre style oratoire ; il n’y a point cette emphase, ce ton de dignité… Ce sont des gens qui ont des affaires ; nous sommes oiseux et nous nous arrêtons à faire les beaux. […] Il vit qu’on ne prendrait jamais ses idées qu’en les tronquant et en les altérant, c’est-à-dire en les rendant indignes d’être avouées et reconnues par lui. […] Aussi n’est-il, à le bien prendre, et comme on l’a dit, que « le sublime orateur des idées communes ».
Je ne prends pas les intérêts de ma paresse, car La Fontaine l’a définie un peu mieux, bien entendu, que je ne pourrais le faire. […] prends, si tu veux, encor d’autres chemins. […] Ceci, nous le prenons sur le fait, c’est lui-même qui l’avance. […] Ainsi je vous citerai une seule anecdote touchant ses distractions fameuses, et qui est celle-ci : Un jour dînant (comme on disait alors, c’est-à-dire déjeunant) en compagnie d’une société qui ne lui plaisait pas beaucoup, il se leva et prit congé. « Où allez-vous donc Oh ! il se fait tard, je vais à l’Académie Mais non, il n’est pas l’heure, vous avez encore une heure devant vous Je prendrai par le plus long !
George Sand, dont le talent vieillissant a pris des fanons de plus en plus tombants, a voulu — dans l’ordre des idées, bien entendu ! […] C’est cette société qui a moins de profondeur que le vernis de son carrossier, et dont les habitudes uniformes peuvent se traduire éternellement par la vie de château, Paris et Trouville, Trouville surtout, où les romanciers envoient à présent leurs romans prendre les bains pour les faire devenir forts, et qui en reviennent aussi faibles et aussi bêtas qu’ils étaient partis. […] Il n’est pas, il ne fut jamais, il ne pourrait pas être, un grand écrivain de nature humaine, qui la prend aux entrailles et la secoue avec puissance, mais il est très bien l’écrivain d’une petite société incapable de fortes sensations. […] Que si on est en compagnie trop moderne pour s’attendre à quelque chose comme les mil e tre de don Juan et les quatre mille du prince de Conti, on se cogne un peu, de surprise, il faut l’avouer, à ces trois maigres amours de Philippe (qui n’est pas Alexandre), en comptant même celui qui le prend, à la fin du livre, pour la cousine dont il ne voulait pas au commencement. […] ne révèle aucune personnalité de femme dans ce dessin vide qu’on a pris pour elle.
Tu as pris, en même temps, le premier des oiseaux pour messager de tes oracles. […] Évidemment, sur cet écho malheureux des paroles de Jéhovah et de ses prophètes, le scrupule a pris plus tard aux compilateurs poétiques d’Alexandrie. […] Plus tard, ce problème reviendra et s’éclaircira dans la pensée humaine, qui, sans faire Dieu l’auteur du mal, comprendra qu’il a dû le permettre sous ses deux formes extrêmes, la douleur et le vice ; car, sans cette double épreuve, les deux lois et les deux grandeurs de l’homme, le travail et la vertu, n’auraient plus où se prendre ici-bas. […] Cette adulation même prend un accent élevé, pour décrire la puissance réelle du roi d’Égypte : « Il règne sur une vaste contrée154, sur une vaste mer, sur de nombreux continents. […] Le charme en est pris d’ailleurs, non plus sur les bords de l’Eurotas, que ne foulaient plus alors les vierges libres et pures de Lacédémone.
M. de Chateaubriand, plus fort, plus grand homme, et sachant mieux à quoi se prendre, frappa bien davantage ; lorsqu’il commença pourtant, il était moins que madame de Staël en harmonie avec l’esprit progressif et les destinées futures de la société, mais il s’adressait à une disposition plus actuelle et plus saisissable ; il s’était fait l’organe éclatant de tout ce parti nombreux que la réaction de 1800 ramenait vivement aux souvenirs et aux regrets du passé, aux magnificences du culte, aux prestiges de la vieille monarchie. […] La Restauration prit la France sur ces entrefaites ; les trois ou quatre premières années en furent peu littéraires ; les factions politiques, les débats orageux et hostiles, les luttes renaissantes de l’ancien régime et de la Révolution tuèrent toute cette frêle poésie delillienne ; mais ce n’est guère qu’en 1819 qu’on voit une poésie nouvelle éclore sur les hauteurs de la société, dans les endroits les plus abrités du souffle populaire et les moins battus de la foule. […] Seulement ils voulaient l’harmonie, et comme la société d’alors n’était rien moins qu’harmonique, ils s’en prirent longtemps à l’esprit de révolution qui venait la troubler.
Cependant ce sont là des exemples pris de la littérature classique, et l’on ne trouvera point extraordinaire que, jusque dans leurs écarts apparents, les poètes du xviie siècle aient, au fond, respecté les règles universellement admises en France de leur temps. […] Mais où prendre ce commencement ? […] Dans les choses même qu’on croit le mieux connaître, si on veut les exposer, on ne sait souvent pas par quel bout les prendre.
Prenez mon joug sur vos épaules ; apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes ; car mon joug est doux, et mon fardeau léger 888. » Un grand danger résultait pour l’avenir de cette morale exaltée, exprimée dans un langage hyperbolique et d’une effrayante énergie. […] Mais toujours aussi des Saints devaient se rencontrer pour prendre à la lettre les sublimes paradoxes de Jésus. […] Le ton qu’il avait pris ne pouvait être soutenu plus de quelques mois ; il était temps que la mort vînt dénouer une situation tendue à l’excès, l’enlever aux impossibilités d’une voie sans issue, et, en le délivrant d’une épreuve trop prolongée, l’introduire désormais impeccable dans sa céleste sérénité.
Ajoutons que Jean est le seul évangéliste qui ait une connaissance précise des relations de Jésus avec la famille de Béthanie, et qu’on ne comprendrait pas qu’une création populaire fût venue prendre sa place dans un cadre de souvenirs aussi personnels. […] » Poser la question, c’était la résoudre, et sans être prophète, comme le veut l’évangéliste, le grand-prêtre put très bien prononcer son axiome sanglant : « Il est utile qu’un homme meure pour tout le peuple. » « Le grand-prêtre de cette année », pour prendre une expression du quatrième évangéliste, qui rend très bien l’état d’abaissement où se trouvait réduit le souverain pontificat, était Joseph Kaïapha, nommé par Valérius Gratus et tout dévoué aux Romains. […] Le « parti de l’ordre » (je prends cette expression dans le sens étroit et mesquin) a toujours été le même.
Quand il fut nommé colonel général des dragons, il prit le frère de madame de La Sablière pour secrétaire. […] Madame de La Sablière regarda d’abord cette distraction, cette désertion ; elle examina les mauvaises excuses, les raisons peu sincères, les prétextes, les justifications embarrassées, les conversations peu naturelles, les impatiences de sortir de chez elle, les voyages à Saint-Germain où il jouait, les ennuis, les ne savoir plus que dire ; enfin, quand elle eut bien observé cette éclipse qui se faisait, et le corps étranger qui cachait peu à peu tout cet amour si brillant, elle prit sa résolution, le ne sais ce qu’elle lui a coûté. […] Il y avait madame de La Fayette, madame Scarron, Segrais, Caderousse, l’abbé Testu, Guilleragues, Brancas. » Nous aurons peut-être occasion de parler plus tard de l’étrange passion de ce comte de Brancas pour madame de Coulanges ; passion qui, lorsque le roi passait insensiblement de la galanterie à la piété, c’est-à-dire de madame de Montespan à madame de Maintenon, prit une couleur de dévotion bizarre, dont il n’appartenait qu’à un courtisan de concevoir l’alliage avec la galanterie, et à la plume de madame de Sévigné de faire la peinture.