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837. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Ses ennemis fascinés le cherchent et ne le voient pas ; il se cache dans sa gloire, comme le lion du Sahara se cache dans les rayons du soleil pour se dérober aux regards des chasseurs éblouis.

838. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

Moire, velours, damas, satin clair et bruyant, Brodés, glacés, brochés, lamés, nous disent-elles ; Les fleurs, les diamants, ces soleils congelés, La topaze, d’où sort comme une haleine chaude, L’opale nuageuse aux doux rayons voilés, Le saphir, nom divin !

839. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Ne cherchez rien de gaulois en lui : on parle souvent d’esprit gaulois, d’humeur gauloise, à tort et à travers, et on en prête à bien des gens qui n’en ont pas ; mais lui, soyez sûr qu’il n’en a pas un grain ; ces vieilles saveurs domestiques lui vont peu au fond ; il ne les prise pas très-haut : il a vu mieux que cela dans le monde des Médicis et dans la patrie du soleil.

840. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

Le soleil couché n’avait laissé de ce côté que quelques rougeurs ; la lune se levait et montait déjà pleine et ronde : la Réserve et les petits lieux de plaisance aussi bien que les fanaux du rivage s’illuminaient.

841. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Il y a comme des soleils de printemps pour les nations.

842. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XI. De la littérature du Nord » pp. 256-269

Ils ne se retracent pas même les jouissances du cœur, sans y mêler l’idée de l’ombre bienfaisante qui doit les préserver des brûlantes ardeurs du soleil.

843. (1894) Propos de littérature « Chapitre Ier » pp. 11-22

Vielé-Griffin, après quelques tâtonnements, écouta des cantilènes victorieuses dire les paroles de sa pensée, laissa toutes ses idées s’épanouir sans contrainte à la pleine joie du soleil.

844. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

Loret disait de cet acteur : C’est un comique sans pareil ; Comme le ciel n’a qu’un soleil, La terre n’eut qu’un Scaramouche.

845. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « F.-A. Cazals » pp. 150-164

En relisant ses couplets, on est amené insensiblement à leur restituer la vie de l’heure, l’atmosphère du Soleil d’or chargée de bière et d’alcool, le grouillement et l’entrain de la foule, l’éclat des lumières, le ronflement et les cris de la rue voisine.

846. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre X. Prédictions du lac. »

Dans nos sociétés établies sur une idée très rigoureuse de la propriété, la position du pauvre est horrible ; il n’a pas à la lettre sa place au soleil.

847. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

        Le monde, en lui, regrette Homère, Les François, leur soleil : mais cet astre éclatant         Est parmi ceux du firmament.

848. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

Un rat, hôte d’un champ, etc… On reconnaît tout le talent de La Fontaine dans le discours du rat, dans la peinture de l’huitre bâillant au soleil, dans celle du rat surpris au moment où l’huitre se referme ; et voyez comme ce dernier mot est rejeté au commencement du vers, par une suspension qui met la chose sous les yeux, et le naturel de la leçon qui termine la phrase.

849. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 12, des siecles illustres et de la part que les causes morales ont au progrès des arts » pp. 128-144

Il ne s’acheve point aucune révolution physique dans la nature en l’espace de cent ans, ainsi qu’il se fait une révolution physique dans la nature dans le terme d’une année, qui est cette révolution du soleil qu’on nomme annuelle.

850. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet »

Ce qui suit la superbe influence des Jésuites en Chine au xviie  siècle n’est plus guères qu’un coucher de soleil qui dure encore et dont nos missionnaires actuels sont les derniers rayons.

851. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

Catalogués et numérotés par leur date d’admission à l’Académie française, tous ces esprits, qui, dans les lettres, expriment ce que Napoléon appelait de la chair à canon dans la guerre, et forment, pour ainsi parler, l’humus d’une littérature, comme la masse des soldats tués forme celui des champs de bataille, tous ces esprits n’auraient pas l’honneur de la place qu’ils occupent au petit soleil du livre de Livet s’il s’agissait individuellement d’eux, au lieu du corps dont ils ont fait partie.

852. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Il y a glacé des fruits savoureux encore, mais il les a glacés, et on aimerait mieux la tiédeur qu’y aurait laissée le dernier baiser du soleil !

853. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

— qu’il doit porter sur sa tête jusqu’à la tombe, comme nous y portons le soleil.

854. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Il coupe avec de l’eau de Seine ce vin généreux, mûri par le soleil sur les rampes ardentes des volcans, et il épargne un mal de tête aux bourgeois, pleins de reconnaissance.

855. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice Bouchor »

Jamais au clair soleil je ne tendrai les bras, Car il ne connaît point les rayons qu’il nous jette ; Rien ne peut animer notre sol qui végète… Sans savoir que tu meurs, ô terre, tu mourras !

856. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Banville. Les Odes funambulesques. »

Excepté donc le Premier soleil, La Ville enchantée et quelques fragments des Satires où le rythme et la langue se remettent à jaillir, en plusieurs reprises étincelantes et trop courtes, à travers d’horribles et d’insensés jargons d’atelier, d’estaminet et de coulisses, il n’y a rien pour la Critique que des sujets d’étonnement douloureux et de pitié dans ce volume, dont tout le mérite appartiendra à l’éditeur.

857. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Henri Murger. Œuvres complètes. »

On y trouve des manières de parler comme celles-ci : Vous la reconnaîtrez à ses cheveux ardents Comme un soleil du soir qui se couche dedans   La pourpre et l’or d’un ciel d’orage.

858. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Charles Didier » pp. 215-226

Didier d’une façon toute boccacienne (le mot y est, nous ne l’inventons pas), ce Décaméron (le mot y est encore) raconté en un tour de soleil, à huit mille pieds au-dessus de la mer. » Or, que veulent dire ces huit mille pieds au-dessus du niveau de la mer, sur lesquels, à plusieurs places de son volume, le nouveau Boccace de l’Italie au dix-neuvième siècle revient avec une véritable puérilité d’insistance ?

859. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Feuillet de Gonches »

La pensée de Feuillet s’est tissé un vêtement avec La Fontaine, comme Perrault a tissé une robe à Peau-d’Ane avec les rais d’argent de la lune et les rayons d’or du soleil.

860. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre V. »

Un pâtre, endormi sur sa tombe, s’était mis à chanter dans le sommeil ; et les bergers accourus pour l’entendre, ayant, de leur foule tumultueuse, renversé la colonne qui portait l’urne funèbre, le soleil avait vu les restes d’Orphée.

861. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Ampère exposer, à propos des poèmes didactiques du moyen âge, l’histoire piquante de ce genre, je pensais à Delille et me disais combien ce qui avait paru si neuf de son temps était vieux sous le soleil. […] Sa vue s’affaiblissait déjà ; ce soleil lumineux et cette blancheur des murailles du Levant lui causaient plus de souffrance que de joie. […] Le doux éclat de ce soleil naissant Flatte bien plus mes yeux que ces flots de lumière Qu’au plus haut point de sa carrière Verse son char éblouissant.

862. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Puis il était toujours resté le vagabond à qui il fallait le grand air et le ciel libre, les courses à l’aventure, et les surprises d’un coin de bois ou d’un coucher de soleil. […] Il a vu lever le soleil au Monte en face de Turin, en 1728 ; et l’abbé Gaime qui l’y a mené, lui a fourni, avec l’abbé Gàtier, le professeur du séminaire d’Annecy, les traits du Vicaire savoyard ; de sa passion profonde pour Mme d’Houdeto est sortie la Nouvelle Héloïse : les amours de Julie et de Saint Preux, ce sont les leurs, brutalement tranchés dans la réalité, délicieusement achevés par le rêve ardent de son désir ; les paysages où s’encadrent ces amours, ce sont les bords du lac de Genève, de son lac ; et les sensations de ses personnages dans cette charmante nature, ce sont les siennes, ses profondes émotions d’enfance. […] Il lui a dit la splendeur des levers du soleil, la sérénité pénétrante des nuits d’été, la volupté des grasses prairies, le mystère des grands bois silencieux et sombres, toute cette fête des yeux et des oreilles pour laquelle s’associent la lumière, les feuillages, les fleurs, les oiseaux, les insectes, les souffles de l’air.

863. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Lors même que le toit serait percé à jour et que l’eau du ciel viendrait mouiller la face du croyant agenouillé, la science aimerait à étudier ces ruines, à décrire toutes les statuettes qui les ornent, à soulever les vitraux qui n’y laissent entrer qu’un demi-jour mystérieux, pour y introduire le plein soleil et étudier à loisir ces admirables pétrifications de la pensée humaine. […] Ces deux phases dans la création légendaire correspondent aux deux âges de toute religion : l’âge primitif, où elle sort belle et pure de la conscience humaine, comme le rayon de soleil, âge de foi simple et naïve, sans retour, sans objection, ni réfutation ; et l’âge réfléchi, où l’objection et l’apologétique se sont produites ; âge subtil, où la réflexion devient exigeante, sans pouvoir se satisfaire ; où le merveilleux, autrefois si facile, si bien imaginé, si suavement conçu, reflet si pur des instincts moraux de l’humanité, devient timide, mesquin, parfois immoral, surnaturel au petit pied, miracles de coterie et de confréries, etc. […] Je vis un jour un enfant quelque temps pensif, puis tout à coup affirmer sérieusement et avec un étrange caractère d’insistance qu’il avait vu quelques jours auparavant une tête humaine dans le soleil.

864. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Il fait toujours du soleil. […] Son valet était un général romain, tué à une bataille quelconque dans le pays, et auquel il avait redonné le mécanisme vital, en ne lui accordant que la dose d’intelligence nécessaire pour nettoyer ses fioles. » 18 avril Je voudrais une chambre inondée de soleil, des meubles tout mangés de lumière, de vieilles tapisseries, dont toutes les couleurs seraient éteintes et comme passées sous les rayons du Midi. Là je vivrais dans des idées d’or, le cœur réchauffé, l’esprit ensoleillé, dans une grande paix doucement chantante… C’est étrange comme, à mesure qu’on vieillit, le soleil vous devient cher et nécessaire, et l’on meurt en faisant ouvrir la fenêtre, pour qu’il vous ferme les yeux.

865. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Et rondissant le dos au soleil, tout en gouaillant et en lâchant des blagues amères, le bohème nous mène au cimetière d’Auteuil, où l’on vient de poser la pierre de granit de Gavarni. […] Lundi 16 février Maria nous entretenait d’une particularité de la peau de son pays, de la peau de la femme de Brie, cette peau de blonde de Paris, devenant sous le soleil et le hâle des champs, plus noire, plus tannée que la peau paysanne du plus extrême Midi. […] On disait que Berthelot avait prédit, que dans cent ans de science physique et chimique, l’homme saurait ce que c’est que l’atome, et qu’avec cette science, il pourrait à son gré modérer, éteindre, rallumer le soleil comme une lampe Carcel.

866. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Car la passion est chose naturelle, trop naturelle même pour ne pas introduire un ton blessant, discordant dans le domaine de la beauté pure ; trop familière et trop violente pour ne pas scandaliser les purs désirs, les gracieuses mélancolies et les nobles désespoirs qui habitent les régions surnaturelles de la poésie… » Ce qui vaut mieux, chez Baudelaire, que cette prose alambiquée et froide, ce sont des vers comme ceux qu’il a intitulés : Elévation : Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées, Des montagnes, des bois, des nuages, des Par mers, delà le soleil, par-delà les éthers, Par-delà les confins des sphères étoilées, Mon esprit, tu te meus avec agilité, Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l’onde, Tu sillonnes gaîment l’immensité profonde Avec une indicible et mâle volupté. […] — Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,     A cette horrible infection, Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,     Vous, mon ange et ma passion ! […] Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici, … Vois se pencher les défuntes Années, Sur les balcons du ciel, en robes surannées ; Surgir du fond des eaux le Regret souriant ; Le Soleil moribond s’endormir sous une arche, Et, comme un long linceul traînant à l’Orient, Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche320.

867. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

Maintenant dans l’oubli je dormirais encore,         Et j’achèverais mon sommeil Dans cette longue nuit qui n’aura point d’aurore, Avec ces conquérants que la terre dévore, Avec le fruit conçu qui meurt avant d’éclore,         Et qui n’a pas vu le soleil. […] retranchez le nombre Des soleils que je dois compter ! […] L’homme ainsi doué se sent une puissance de vie intérieure qui userait des milliers de corps et des milliers de siècles sans avoir émoussé seulement sa faculté d’être, et il se sent accouplé par on ne sait quelle loi à une pincée d’argile corruptible, façonnée en organes qui tombent en ruines après un petit nombre de levers et de couchers de soleil, malgré tous ses efforts pour les réparer sans cesse et pour leur donner un peu de cette immortalité qu’il sent en lui.

868. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Selon lui, l’action du soleil sur la terre, alors couverte par les eaux, fit saillir des pellicules, matrices d’organismes imparfaits, qui plus tard, se développant par degrés, donnèrent naissance à toutes les espèces actuellement vivantes. Les ancêtres de l’homme furent des animaux aquatiques analogues aux poissons : ils habitaient les eaux bourbeuses et s’habituèrent lentement à vivre sur la terre ferme à mesure que le soleil la desséchait. […] Que dire par exemple de cette influence attribuée au mouvement de la terre autour du soleil et aux courans magnétiques, et qui, selon une loi formulée par Hegel, reprise par Michelet et de Lasaulx, ferait voyager la liberté, et avec elle la civilisation, d’Orient en Occident ?

869. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Le soleil rosnyen luit pour tout le monde, et bien avant les Mères Sociales, plus d’un écrivain altruiste y a réchauffé sa vacillante inspiration37. » Malgré M.  […] Mais j’écoutais déjà venir des clameurs confuses, et quand je pénétrai dans tes murs, je reçus en moi la lumière de ta beauté, ô ville radieuse et violente, intarissable source de naissances et de joies, femelle aux seins de soleil et d’amour, aux entrailles ivres et palpitantes et torturées de remous passionnées, ville au sexe de feu !  […] Dès le Soleil des Morts, on pouvait prévoir l’évolution finale de cette intelligence souple, riche, subtile.

870. (1926) L’esprit contre la raison

Des Bourses, des Chambres de députés étaient camouflées en temples grecs et les plis lourds et faussement classiques d’une pseudo-Antiquité cachaient ce soleil de soufre et d’amour qui, un beau soir, finit toujours par éclaterq, là-bas, plus loin que l’horizon et l’habitude. […] Avec ce poète, Saint-John Perse, revenu des pays du Soleil levantx , des hommes dévoués à l’esprit et qui ne veulent plus des hochets anecdotiques avec quoi on a tenté de les amuser, répètent : Aux ides pures du matin que savons-nous du songe, notre aînesse ? […] Le poète d’Anabase est encore présent dans un texte où Crevel rend hommage à Paul Klee (publié à Berlin en 1928) : « Et le sommeil n’est pas nommé, / mais sa puissance est parmi nous. » La coquille sur « sommeil » (au lieu de « soleil ») ne pouvait que conforter la lecture de Crevel.

871. (1903) La renaissance classique pp. -

Tous les déchets inutiles jonchent le sol, où l’ardeur du soleil les décomposera. […] On médite, on regarde autour de soi : ce ciel, ces marbres, cette blancheur des pierres, ces reflets des eaux dormantes sous le pâle soleil d’arrière-saison ! […] Poursuivi par l’image des maîtresses royales, vous vous reposez dans une allée solitaire, en face de la fontaine de Mansart, étincelante sous ses dorures et ses bas-reliefs de porphyre, comme un buffet de parade dressé pour des réjouissances princières… Le soleil se couche.

872. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

… Mais non… De là grande ombre qui se dressait au milieu de la route, comme une statue équestre de bronze, il ne restait plus rien qu’un petit cadavre tout noir, couché, la face contre le sol, les bras en croix… Je me rappelai le pauvre chat que mon père avait tué, alors que de ses yeux charmés il suivait dans l’espace le vol d’un papillon… Moi, stupidement, j’avais tué un homme, un homme que j’aimais, un homme en qui mon âme venait de se confondre, un homme qui, dans l’éblouissement du soleil levant, suivait les rêves les plus purs de sa vie ! […] Et dans cette uniformité, imaginez le soleil blanc, fatigué et sénile, des déclins d’automne… Chapitre III. […] Mais Peau-d’Âne en un milieu moderne, sans les robes couleur de soleil et de lune, sans le prince Charmant, sans les fées, Peau-d’Âne en manches à gigot et en jupe directoire, traversant le boulevard au bras d’un ingénieur des mines, vous n’y pensez pas ! […] Erckmann-Chatrian nous peignent un lever de jour en Alsace, « le soleil pale montant dans la brume, les maisonnettes aux larges toitures de chaume regardant de leurs petites fenêtres noires109 », ces traits ramassés et sobres me paraissent bien valoir les minutieux inventaires de M. de Glouvet. […] À moins qu’il ne fasse des livres de description pure, comme Au soleil et Sur l’eau.

873. (1921) Esquisses critiques. Première série

Si le grand jour de la réputation, si la lumière crue de la notoriété se posent sur eux, leurs traits s’effacent comme il arrive sous un soleil trop blanc. […] Tout le jour le soleil rayonna sur la plaine, je marchai rêvant de bonheur. […] Non, les ondulations du fleuve Océan, ni les nœuds de la vipère ivre de chaleur qui dort au soleil, toute noire, ne sont plus perfides que ses étreintes. […] L’ami du voleur de soleil). […] Les plus sublimes montagnes de l’Europe nous environnaient, les neiges étincelaient au soleil, le lac était à nos pieds.

874. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Elle est encore un peu dans le goût du temps ; elle en garde le vocabulaire ; trop d’astres, de soleils, de beautés non pareilles, d’or du Tage et de trésors de l’Inde. […] Vous verriez un tas de moissonneurs, rôtis du soleil, qui travaillent comme des démons, et quand ils sont hors d’haleine, ils se jettent à terre au soleil même, dorment un miserere et se relèvent aussitôt. […] Cette Phèdre chrétienne du xviie  siècle et d’aujourd’hui est fille de Minos et de Pasiphaé et petite-fille du Soleil. […] et je soutiens la vue De ce sacré soleil dont je suis descendue ! […] Mon père y tient l’urne fatale… Ainsi, au moment le plus douloureux du drame, Phèdre nous fait ressouvenir que Jupiter est son bisaïeul, le Soleil son aïeul et Minos son père.

875. (1932) Le clavecin de Diderot

Les solitaires les plus brillants, ceux qui se sont arrangé une petite coquille dont la nacre accroche, retient, renvoie les rayons du soleil, ceux dont la gourmandise s’est trouvé une petite cachemite aussi bien dorée que croûte de pâté, ceux qui ont connu la gloire, puis feint de très exaltants mépris, ne savons-nous pas que leurs réduits, leurs tours d’ivoire, finissent toujours par sentir la croupissure d’eau bénite, le pipi de chaisière, les aisselles de sacristain et le nombril de chanoine. […] Le soleil, l’ail, l’accent, le mélange de sperme, de coquillage secret et de fruits trop mûrs, dont se trouve naturellement parfumée toute vieille cité phocéenne, voilà qui a été corrigé par la tristesse septentrionale. […] En vérité, depuis des siècles, on se contente de répéter les mêmes expériences et considérations sur certains réflexes à fleur de peau, avec une volonté d’agnosticisme ou, au moins, le désir de conclure qu’il n’y a rien de changé sous le soleil. […] Pratiquement, ils exigent de toute vie qu’elle se laisse étioler là, en un point fixe du temps, de ce temps que les dernières royautés parlementaires et républiques conservatrices rêvent d’arrêter, à leur profit, comme un soleil de la bible. […] Ne pas confondre la libération des conflits sociaux avec la béatitude grossière que le ciel bleu, le soleil valent aux natifs des horizons spleenétiques, quand le soleil se met à les chatouiller là où je pense.

876. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

Chateaubriand n’a pas plus inventé les orages que les couchers de soleil, et les uns et tes autres, il me semble, appartiennent à tout le monde. […] Ce soleil d’Afrique a eu cela de singulier que toutes nos humeurs à tous, même nos humeurs secrètes, ont fait éruption.

877. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

La forte séve qui, plus haut, s’en va mûrir et se transformer merveilleusement sous un soleil dont les rayons ne viennent pas également à chacun, on la voit sortir et monter de cette terre qui est notre commune mère à tous. […] Il faut dire pourtant que sous Louis XIV, à part ce soleil monarchique qui absorbait en lui toutes les superstitions et les apothéoses, le génie et sa fonction étaient noblement conçus, et dans des proportions vraiment belles.

878. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Un beau coucher de soleil en mer. […] Le sublime de la forêt américaine, la grâce nette des montagnes grecques, la grandeur du cirque romain, le tohu-bohu bariolé du campement oriental, les ciels bas et brumeux de la Germanie et les riants soleils d’Italie, les architectures exquises et les vierges solitudes, toutes les formes que la nature et l’homme ont offertes à ses yeux, il a tout su voir et tout su rendre.

879. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Parce que, comme l’aigle, qui regarde fixement le soleil, il a pu regarder fixement les yeux d’Hippolyte. […] C’est à l’imitation étrangère qu’appartiennent ces désespoirs, ces alternatives de feu et de glace, ces cœurs Meurdris, couverts de sang, percés de toutes parts, Au milieu d’un grand feu qu’allument des regards ; ces vies « ravies par des yeux foudroyants, ces yeux « où le beau soleil tous les soirs se retire » ; ces plaies incurables, et tout ce détail du martyre amoureux : … les angoisses mortelles, Les diverses fureurs, les peurs continuelles Les injustes rigueurs, les courroux véhéments, Les rapports envieux, les mécontentements etc. 

880. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

Il est quatre heures ; le Soleil d’été brille, en plein ciel ; par les avenues ombragées, la foule est montée ; on n’entendait que le bruit des pas ; la foule confusément se mêle, errant sur la terrasse d’où l’horizon apparaît immensément. […]   Brünnhilde est, de nouveau, perdue en la contemplation du cadavre :   — « Comme le Soleil, purement, sa lumière me rayonne : le plus pur il était, lui qui m’a trahie : trompant l’épouse, — fidèle à l’ami, — de la propre aimée, la seule chère à lui, il s’est séparé par son épée.

881. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Soudain, étourdissant le prélude vermeil Un cor de guerre ulule, et sous les forêts mûres La horde des Héros dardant l’or des armures Déferle en cavalcade en le los du soleil : Lohengrin, Tannhaeuser, et Parsifal le Chaste, Dont les pennons de pourpre ondulent avec faste, Chevauchent aux clameurs des cymbales d’airain ! […] Cours belliqueux de chars enivrés de soleil !

882. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XII, les sept chefs devant Thèbes. »

Il crie « comme un dragon sous le soleil de midi » ; il secoue, en se démenant, les aigrettes touffues de son casque, et les clochettes d’airain de son bouclier « sonnent l’épouvante ». […] Que les deux mains frappent la tête, faites le bruit des rames qui poussent sur l’Achéron la Théoride aux voiles noires, vers la terre sans soleil où débarquent tous les mortels. » — Les filles d’Œdipe sont entrées pendant ce prélude, elles se tiennent debout, rangées devant les deux corps, comme des statues sépulcrales. — « Voici Antigone et Ismène ; elles vont remplir le sombre devoir.

883. (1913) La Fontaine « II. Son caractère. »

En tout cas, voici ce que La Fontaine se dit à lui-même : « Douze lustres et plus ont roulé sur ta vie : De soixante soleils la course entre-suivie Ne t’a pas vu goûter un moment de repos ; Quelque part que tu sois, on voit à tout propos L’inconstance d’une âme en ses plaisirs légère, Inquiète et partout hôtesse passagère. […] Chambre murée, étroite place, Quelque peu d’air pour toute grâce, Jours sans soleil, Nuits sans sommeil.

884. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Couple littéraire sans analogue dans la poésie du monde, car la Bible est l’esprit de Dieu et les poèmes de l’Orient ne sont guère que de l’opium fumé qui rêve et se tord au soleil, Homère et Virgile sont l’Adam et l’Ève de la poésie telle que l’homme, en possession de toutes ses puissances, la conçoit et la réalise. […] Ici, ce n’est pas un valet de chambre qui publie ces Lettres à la Princesse, qu’il fallait supprimer comme la Princesse a supprimé ses réponses, c’est un légataire universel qui n’a d’existence au soleil que parce que Sainte-Beuve lui a légué son parapluie.

885. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Le chef-d’œuvre devait énumérer le décor obligatoire des petits ruisseaux et des petits oiseaux, des fleurs en satin et des délicieuses mièvreries, des soleils immuables et des clairs de lune mélancoliques, où s’élève un chant de guitare qui fait fondre le cœur d’émotion. […] Rien ne détraque plus sûrement une cervelle de poète qu’un coup de soleil.

886. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Si les ponts pouvaient parler, si la Sainte-Chapelle, le Palais de Justice, les « buées matinales » et les bateaux de la Seine, si le soleil couchant au-dessus du bois, pouvaient dire leur opinion aux romanciers, ils leur crieraient : « Assez ! […] le clair soleil qui déroule mes germes plissés ; ah !

887. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Sur le visage presque imberbe, toutes les lignes sont fermes et précises comme sur un bronze ciselé avec insistance ; la peau recouvre d’une pâleur fauve des muscles secs, accoutumés à se manifester par un frémissement sauvage dans le désir ou dans la colère ; le nez droit et rigide, le menton osseux et étroit, les lèvres sinueuses, mais énergiquement serrées, exprimant la volonté téméraire ; et le regard est pareil ù une belle épée, dans l’ombre d’une chevelure épaisse, lourde et presque violette comme les grappes de raisin embrasées par le soleil sur le sarment le plus vivace. […] Voir avec des yeux de huit, de dix, de douze ans, le soleil se lever sur le même paysage, aussi familier bientôt que l’âme maternelle ; s’attrister ou se réjouir de la venue des saisons ; sentir en soi grandir la joie ou la plainte dont elles sont faites, et avoir l’impression si ennoblissante et si vraie qu’on est tout petit dans un monde bien grand, mais que ce tout petit est l’écho intelligent de cette immensité, quelle bonne école primaire !

888. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

On sentait qu’il avait fallu toute une race de preux pour produire cette combinaison de traits purs et nobles, toutes ces grâces quasi royales qui se trahissaient lentement, comme celles du cygne jouant au soleil avec une langueur majestueuse. » Quoi qu’il en soit de l’explication dont je ne suis pas garant, la beauté fine et aristocratique de Valentine, qui ne répond point, dans le premier instant, au type rêvé de Bénédict, le gagne peu à peu, et la pauvre Athénaïs, déjà si compromise dans son cœur, lui semble une bourgeoise plus frelatée que jamais.

889. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

Comme un enchantement d’espérance et de joie, Il vient avec sa cour et ses chœurs gracieux, Où, sous des réseaux d’or et des voiles de soie, S’enchaînent des Esprits inconnus dans les cieux ; Soit que, dans un soleil où le jour n’a point d’ombre, Il me promène errant sur un firmament bleu, Soit qu’il marche, suivi de Sylphides sans nombre Qui jettent dans la nuit leurs aigrettes de feu : L’une tombe en riant et danse dans la plaine, Et l’autre dans l’azur parcourt un blanc sillon ; L’une au zéphyr du soir emprunte son haleine, A l’astre du berger l’autre vole un rayon.

890. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

Il était midi, et le roi sortait déjà forêt pour entrer dans une plaine de sable où le soleil frappait d’aplomb.

891. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre V, la Perse et la Grèce »

Un rideau de pourpre voilait, comme un nuage, ce soleil humain, pondant ses audiences.

892. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

Je vois le soleil se lever, se coucher, se relever plus d’une fois avant que j’aie pu vous réconcilier avec une pensée qui valoit à peine quelques momens. » Le grand argument de La Mothe, en faveur de son opinion, étoit que la prose peut dire tout ce que disent les vers ; au lieu que les vers ne sçauroient dire tout ce que dit la prose ; qu’elle comporte, aussi bien que la poësie, l’enthousiasme, l’invention, les images, les figures hardies, la pompe de l’expression.

893. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

L’archevêque Turpin tue 700 hommes ; Roland en tue 800, en met en fuite 40.000 ; ses 20.000 soldats en tuent 100.000 et Charlemagne arrête le soleil !

894. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Royalistes et Républicains »

Depuis qu’il y a des partis, ils se sont toujours comptés avant la patrie, et voilà pourquoi ce qu’il faut contre eux, c’est un genre de gouvernement qui ne s’imagine pas se les concilier, mais qui les dompte ; et le gouvernement parlementaire, qui traite avec eux, qui leur fait même une place au soleil de ses institutions, leur donne une importance qu’ils ne manquent jamais de retourner contre lui.

895. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

dans une oisiveté désolante, il ne croyait pas à autre chose qu’à ces deux messieurs en sa personne et à leurs talents cachés, qu’il eut fait reluire au soleil de la vie publique si seulement, il y a quelques années, il avait été au Journal des Débats.

896. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Collé »

Honoré Bonhomme ce coup de soleil.

897. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « X. Doudan »

Ce n’est pas toujours du soleil qu’on y grippe.

898. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Mais Leopardi, ce glaçon de vanité souffrante que le soleil de l’Italie ne put jamais fondre, ses blasphèmes et ses vers sont froids comme la lime qui a servi à les limer.

899. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Ronsard »

La langue, grandie et devenue forte comme les petits de la lice, se retourna férocement contre sa poésie et lui prit sa place au soleil, jusqu’au moment impatienté, que j’ai signalé au commencement de ce chapitre, où le poète, malgré la langue qu’il avait parlée, à force de Poésie, ressuscita !

900. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

Majestueux spectacle de sa présence, tous les amis en cercle, et lui-même au milieu, comme si les amis étaient les astres, et lui le soleil !

901. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Les fleurs qui affectent l’image du soleil ont quelque chose de sa puissance. […] Les vrais lilas et les vraies roses, on les cueille dans les simples jardins qui ne connaissent d’autre chaleur que celle du soleil. […] C’est son ombre, non pas l’ombre que fait le soleil, mais le reflet des choses, tel qu’il se voit dans l’eau calme. […] Les plus ardents voyageurs s’élèvent, en imagination, de soleils en soleils et s’exaltent à l’idée d’une exploration jamais finie et pleine de merveilles toujours renouvelées. […] C’est beau une révolution, cette grande faux qui passe, un matin de soleil.

902. (1903) Le problème de l’avenir latin

Cette violente divergence éclate lorsque disparaît à l’horizon, pour ne plus reparaître, le soleil du monde antique. […] La chute napoléonienne consommée, l’ombre peu à peu s’appesantit sur la France, tandis que s’affirme et s’élargit la place au soleil des peuples germaniques. […] C’est qu’en effet il y a des régions qu’en sa révolution le soleil de la civilisation et de la grande vie sociale laisse dans l’ombre, et la région méditerranéenne est actuellement une de celles-là. […] Celles-ci, par exemple : la terre tourne, la graine germe, la plante croît, l’animal vit et meurt, le soleil brille et chauffe, la pierre est un solide, l’eau est un liquide, l’air est un gaz, le père procrée l’enfant, etc., etc. […] Soleil, soleil, soleil, flambe. ‌

903. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Derrière eux, et en plein soleil, se tenait un cercle de gens accroupis, grandes figures d’un blanc sale, sans plis, sans voix, sans gestes, avec des yeux clignotants sous l’éclat du jour, et qu’on eût dit fermés. […] Ce n’était pas l’impression d’un beau pays frappé de mort et condamné par le soleil à demeurer stérile ; ce n’était plus le squelette osseux de Boghari, effrayant, bizarre, mais bien construit ; c’était une grande chose sans forme, presque sans couleur, le rien, le vide, et comme un oubli du bon Dieu ; des lignes fuyantes, des ondulations indécises ; derrière, au-delà, partout, la même ouverture d’un vert pâle étendue sur la terre ; çà et là des taches plus grises, ou plus vertes, ou plus jaunes ; d’un côté les Sebal-Rous à peine éclairées par un pâle soleil couchant ; de l’autre, les hautes montagnes du Tell encore plus effacées dans les brumes incolores ; et là-dessus un ciel balayé, brouillé, soucieux, plein de pâleurs fades, d’où le soleil se retirait sans pompe et comme avec de froids sourires. […] Je passai près d’une heure entière couché près de la source à regarder ce pays pâle, ce soleil pâle, à écouter ce vent si doux et si triste. […] Le paysage est d’abord construit ou plutôt détruit par le jeu de quelques lignes qui semblent tirées d’un album de croquis ; puis toute son âme confondue avec celle de l’artiste s’incorpore au ciel spacieux : ce ciel soucieux, aux pâleurs fades, d’où le soleil se retire avec de froids sourires, tient dans la page la même place que le mot « sérieux » dans le passage qui précède. […] Il éclot dans une journée passée en plein air, à la campagne, un jour des premiers soleils d’avril.

904. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Sainte-Beuve trace le portrait du marquis de Couaën : « Noble figure, déjà labourée, un front sourcilleux, une bouche bienveillante, mais gardienne des projets de l’âme, le nez aquilin d’une élégante finesse ; quelques minces rides vers la naissance des tempes, de ces rides que ne gravent ni la fatigue des marches ni le poids du soleil, mais qu’on sent nées du dedans, à leurs racines attendries et à leur vive transparence. […] Nous n’avons mot à dire non plus de l’équipage, tous excellents marins qui savent parfaitement prendre la hauteur du soleil à midi, mesurer la distance de cet astre à la lune, calculer méthodiquement leur point sur le chronomètre, mais qui, pour le moment, ne nous apprendraient pas autre chose, si ce n’est peut-être à chanter des chansons de Béranger du matin au soir. […] » Mais cette mélancolie ne dure pas, d’autres pensées lui succèdent ; l’esprit français, la gaieté française se font jour à travers tous ces regrets, comme un rayon de soleil vient percer les brouillards de l’Himalaya ; et il écrit pour rassurer ses amis, tandis que d’orageuses rafales menacent de déraciner sa tente et de renverser la table où il s’appuie : « Dites que je suis dans un pays aussi salubre que l’Europe, mangeant des pommes et du raisin, buvant du vin du cru (qui est détestable), et enfin,      « Sachez, sachez      « Que les Tartares      « Ne sont barbares « Qu’avec leurs ennemis !  […] Il a un régiment de femmes, casernées dans un sérail, dressées à monter à cheval, et qui manœuvrent au soleil, jambe deçà, jambe delà, comme nos hussards. […] L’île de Salsette, située au bas du versant occidental des Ghates, est un pays malsain, couvert de forêts empestées ou brûlées par les ardeurs d’un soleil dévorant.

905. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

. — C’est si beau : on se lève avec le jour et on voit paraître le soleil, là-bas, à gauche, derrière les montagnes qui se détachent en vigueur sur le ciel bleu argent et si vaporeux et doux qu’on étouffe de joie. […] Ils ont des figures radieusement respectueuses et ceux qui sont le plus près se font de la main une visière comme on fait quand le soleil empêche de voir. […] Madrid. — Une capitale, au moins, et il fait beau, pourtant le coucher du soleil… mais le musée est chauffé, je crois. […] Paul, Sacha et Dina sont aux petits soins auprès de moi ; Vassili fait très bien la cuisine, Rosalie sert avec entrain ; le soleil chauffe. […] Si je rendais bien l’effet de sève de printemps, de soleil, ce serait beau.

906. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

Ces pivoines ont des dénominations, comme celle-ci : Nuage de bronze, Soleil levant du port, Bambou neigeux, Blanc de la Vie mondaine, Toilette légère, Parfum de manches des femmes. […] Au fond ce sont bien certainement le voyage de Philippe Sichel, et plus tard le voyage de Bing, qui ont fait faire connaissance intime à l’Europe avec le Japon, et qui ont vulgarisé l’art de l’Empire du Soleil, en Occident. […] Tout à coup il s’arrête, la clef encore dans la serrure, et me dit : « Quand j’ai pris possession de cette propriété, on m’a remis cette clef, et quand je l’ai mise dans la serrure de cette grille, où il y avait au-dessus un coup de soleil, dans le moment, à la fois un peu distrait, un peu pensant à autre chose, j’ai été surpris par le souvenir d’un bruit… oui, d’un bruit, du temps que j’avais six ans. […] Et ç’a été vraiment un féerique spectacle ; quand la messe finie et la porte de l’église ouverte, un coup de soleil y est entré, et enveloppant la mariée dans la blancheur transparente de son voile, l’a donnée à voir, une seconde, dans la lumière électrique d’un coup de théâtre.

907. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Sage pénétré de la casuistique grecque, où l’algèbre semblait le rire même du soleil sous les oliviers ; penseur méprisant qui ne sut arriver au calme devant la vie qu’après des luttes douloureuses et des révoltes ; poète ardent dont l’âge éréthise le goût passionné pour le Grand Tout, rêveur et abstracteur, amoureux de mythes et d’idées, Han Ryner est probablement le plus haut génie de notre temps. […] Il plante ses souvenirs, le boulevard Voltaire, ses douces mortifications, et Léonie, et le triste pèlerin qui va, le dos courbé, le long des ruisseaux de Paris, pouir s’ébattre au milieu des êtres éternels et des soleils. […] Et pourtant, à la fin, quelle nostalgie vers un soleil qui n’est pas fait pour lui. […] Ses livres aussi sautent d’un point à l’autre : tantôt à Montmartre, tantôt dans ce Berlin pierreux, puis en Italie, aux Indes : l’homme nostalgique, assoiffé de tous les soleils et ne trouvant nulle part son repos.

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