Qu’il jouisse avec un légitime orgueil des exploits de ses compatriotes sur le champ de bataille, c’est bien ; mais si ces exploits lui éblouissent les yeux jusqu’à lui faire oublier le droit aussi sacré et la valeur souvent égale des autres peuples, ce n’est plus de l’histoire, c’est de l’injustice patriotique et de la jactance nationale. […] Nous ne nions pas la nécessité et la légitimité de la dictature dans certaines occurrences extrêmes de la vie des peuples en révolution, mais ici c’était de la dictature usurpée au lieu de la légitime dictature donnée pour son salut par une nation. […] Cette analyse, cependant, a ce mérite d’être une excellente leçon de politique réelle en opposition avec la politique géométrique et scolastique d’un de ces illuminés du Contrat social qui croient pouvoir appliquer les lois de la mécanique aux intérêts moraux et aux passions des peuples. […] Il n’y manque, pour fanatiser l’œil du peuple, que ce général équestre franchissant au galop de son cheval aux jarrets tendus la cime des Alpes, comme dans le portrait de Bonaparte par David. […] Simple, timide, même un peu gauche, la figure toujours cachée sous une ample chevelure, il n’avait point l’extérieur militaire ; mais, héroïque au feu, bon avec les soldats, modeste avec ses camarades, généreux avec les vaincus, il était adoré de l’armée et des peuples conquis par nos armes.
Ceux par lesquels il commence sa Didon, ne sont pas irréprochables ; mais on en a fait de nos jours de plus mauvais : Grands Dieux, qui disposez de l’Empire du Monde ; Toi, qui portes en main le tonnerre qui gronde, Jupiter, ennemi du Peuple Phrygien, Qui fait que notre Troie à present n’est plus rien, &c.
Si Œdipe mourait sur la scène, il mourait devant le chœur, c’est à-dire, représentativement, devant tout le peuple de Colone, et le peuple de Colone pourrait dire où est sa dernière demeure. […] De son peuple et de lui tel était le lien. […] Et c’est là que l’on voit bien ce qu’a été 1830 pour le peuple, 1830 pour le peuple de France, comme pour les peuples étrangers (rappelez-vous la brochure de Quinet sur l’Allemagne, écrite en 1831 à Heidelberg ! […] Le peuple y a vu une revanche de 1815, et, par conséquent, une victoire bonapartiste à compléter plus tard. […] Il est entraîné par son peuple, et il faut bien qu’il les suive puisqu’il est leur chef.
Les événements comprennent une période de quatre années, depuis la retraite du peuple au Mont-Sacré, l’an de Rome 262, jusqu’à la mort de Coriolan. […] Le soin visible qu’a mis le poëte à imiter le langage laconique que l’histoire attribue à son héros ne l’a que très-rarement conduit à l’affectation, si ce n’est dans le discours de Brutus au peuple, modèle de l’éloquence scolastique du temps de l’auteur. […] Voltaire ne voit ici qu’une couronne demandée à un peuple libre qui la refuse ; mais César se faisant, en présence du peuple, l’acteur d’une farce préparée pour lui, et désespéré des applaudissements qu’on donne à la manière dont il a joué son rôle, c’était là en effet, pour les bons esprits de Rome, quelque chose d’extrêmement comique et qui ne pouvait leur être présenté autrement. […] Duffe s’était montré, dès le commencement de son règne, très-occupé de protéger le peuple contre les malfaiteurs et « personnes oisives qui ne voulaient vivre que sur les biens des autres ». […] La Méchante Femme mise à la raison nous semble plutôt faite pour plaire aux maris du peuple qu’à ceux de la bonne compagnie.
Alexandre veut, de propos délibéré, rapprocher et mêler les peuples. […] Malgré tout, les peuples parcourus et conquis par lui gagnèrent plus qu’ils ne perdirent à son passage. […] Il affirme que Dieu a immolé des milliers de vies humaines et bouleversé tout un peuple pour qu’Henriette fût catholique. […] Pour entendre un peuple injurieux Qui fait de mon malheur retentir tous ces lieux ? […] Ni son Iphigénie n’injurie son père comme fait celle d’Euripide, ni elle ne se pose ensuite en héroïne qui sauve son peuple.
Mais… « la justice du peuple » est souvent tardive, surtout en matière littéraire, et je ne l’attendrai certes pas pour saluer en M. […] » — Paris et le peuple rustique […] une langue qui convient merveilleusement au peuple ardent qui la parle, au paysage éclatant qu’elle décrit. […] Et cette influence de la littérature, elle est d’autant plus vive et facile que l’éveil intellectuel du peuple est plus récent, que ce peuple lui est livré sans défense. […] Quelles lectures sont offertes au peuple, qui est tout aujourd’hui, qui tient dans ses mains les destinées de la France, et à quels spectacles est-il convié ?
Et cela dans le milieu contemporain, avec le peuple qui nous entoure. […] La souveraineté du peuple est ici une croyance imbécile et dangereuse. […] Rien de moins viril pour la santé intellectuelle d’un peuple. […] peuple de polichinelles ! […] Ils sont pour le peuple une véritable école de mensonges historiques.
. — …… Jean Lombard avait gardé de son origine prolétaire, affinée par un prodigieux labeur intellectuel, par un âpre désir de savoir, par de tourmentantes facultés de sentir ; il avait gardé la foi carrée du peuple, son enthousiasme robuste, son entêtement brutal, sa certitude simpliste en l’avenir des bienfaisantes justices.
Ses Lettres sur l’origine des Sciences & sur celle des peuples de l’Asie, adressées à M.
Pour les sauver des attaques et de la fureur du peuple catholique, il est besoin de les faire escorter et conduire de Saint-Germain à Poissy par des archers de la garde du roi. […] Henri III, qui n’était pas toujours cruel, résista, dès le commencement de l’émeute, aux conseils de plusieurs capitaines (et notamment de Crillon) qui voulaient en avoir raison et qu’on la réprimât avec vigueur : Le roi, dit Mézeray, n’avait envie que de se saisir des principaux de la Ligue et voulait, par un procédé sans violence, désabuser le peuple des bruits qu’on avait semés… Il était d’ailleurs persuadé de cette opinion que la moindre goutte de sang qui se répandrait serait capable d’irriter la populace et de mettre le feu dans cette grande ville. […] C’est peut-être le jour où il souffrait d’avoir adressé ces lettres un peu trop terre-à-terre au contrôleur général, qu’il écrivit, pour se revancher, ces mots latins et courageux à huis clos en tête de son exemplaire de l’Histoire universelle de d’Aubigné : « Duo tantum haec opto, unum ut moriens populum Francorum, etc. » Ces deux souhaits de Mézeray étaient de voir, avant de mourir, la liberté du peuple français, et que chacun fût dorénavant rétribué selon ses services.
Il ne porte guère plus de chaleur en apparence dans la considération des mouvements politiques des peuples et dans la conception de l’histoire. […] » Ailleurs il parle « de la tranquille administration des lois, de ces arrêts salutaires qui, sortis du cabinet d’un seul ou du conseil d’un petit nombre, vont répandre la félicité chez un peuple entier ». […] Lui qui devait écrire l’histoire du peuple le plus guerrier, il sut par la pratique les détails du métier : il fut digne de parler ensuite de la Légion.
Quant aux femmes du peuple, il en trouva qui, la pipe à la bouche, renchérissaient par le grossier sur nos chiffonnières et nos androgynes ; mais en même temps combien de filles du peuple, encore distinguées, encore élégantes sous la guenille, et auxquelles il ne manque que d’être mieux nourries pour faire des demoiselles ! […] Parmi les sujets que vient de reproduire excellemment la photographie, je ne puis m’empêcher de signaler encore, pour le dessin comme pour le sentiment, cette scène de l’homme du peuple, de l’ouvrier faisant choix d’une épouse, lui posant la main sur l’épaule, et dans un langage grossier, que la légende a rendu au naturel, lui déclarant une affection grave pourtant et des plus sérieuses : l’attitude et le visage de cette femme debout, les yeux baissés, acceptant avec simplicité une vie commune qui lui sera rude, ont un véritable caractère de chasteté.
Il était trop bon, de cette bonté naïve, expansive, qui se confie en celle des autres, qui va au-devant, qui abonde dans l’idée de l’amour des peuples comme en des amours de nourrice ; qui ne compte pas assez sur les sentiments très mélangés, très équivoques, dont est formée en soi et par lesquels se présente surtout à un prince la nature humaine. Serait-il vrai que les peuples ne savent gré à un souverain de sa bonté que quand il a commencé par leur prouver sa force et par montrer à tous qu’il pouvait se faire craindre ? […] Au moment le plus beau et le moins endommagé encore de son règne, Louis XVI, pénétré de la lecture des Voyages de Cook et jaloux pour la France de cette gloire des conquêtes géographiques, voulut donner lui-même à Laperouse, en le chargeant d’une expédition lointaine, des instructions en quelque sorte morales, et, dans sa sollicitude de philanthrope, il les rédigeait ainsi : « Si des circonstances impérieuses, qu’il est de la prudence de prévoir, obligeaient jamais le sieur de La Peyrouse à faire usage de la supériorité de ses armes sur celles des peuples sauvages, pour se procurer, malgré leur opposition, les objets nécessaires à la vie, telles que des subsistances, du bois, de l’eau, il n’userait de la force qu’avec la plus grande modération et punirait avec une extrême rigueur ceux de ses gens qui auraient outrepassé ses ordres.
Le tempérament de ce peuple est tout poétique. Ce qu’on a dit un peu complaisamment des gondoliers de Venise chantant les octaves du Tasse serait plus vrai des gens du peuple, en Perse, récitant les vers de Ferdousi. […] Le poète raconte toute l’histoire des premiers rois de Perse, des fondateurs de dynasties, telle qu’elle s’est transmise et transfigurée dans la mémoire, pleine d’imagination et de féerie, de ces peuples orientaux.
Vauvenargues avait l’imagination tournée à l’histoire, à l’action, je l’ai dit ; homme de race noble et fière, il manquait, malgré sa modestie, de cette qualité plus naïve et plus humble qui fait que des âmes naturelles ont gagné à se rapprocher du peuple et y ont puisé des inspirations habituelles et plus vives. […] Dans l’ordre des sentiments et du goût, il ne croyait pas que nous fussions du tout au-dessus des peuples anciens, plus voisins que nous de l’instinct de la nature : « On instruit notre jugement, disait-il, on n’élève point notre goût. […] Une trop longue paix lui paraît funeste : « La paix, dit-il, rend les peuples plus heureux et les hommes plus faibles. » Et il ajoute excellemment : « La guerre n’est pas si onéreuse que la servitude. » Ce n’est pas tant de la servitude du dehors qu’il s’agit ici que de celle du dedans et de la lâcheté qui envahit les âmes : « La servitude, dira-t-il encore, abaisse les hommes jusqu’à s’en faire aimer.
Colbert, en condamner les portes ; il faut conserver ce jardin au roi, et ne le pas laisser ruiner par le peuple, qui, en moins de rien, l’aura gâté entièrement. » La résolution me parut bien rude et fâcheuse pour tout Paris. […] Je suis persuadé, continuai-je, que les jardins des rois ne sont si grands et si spacieux, qu’afin que tous leurs enfants puissent s’y promener. » Il sourit à ce discours, et dans ce même temps la plupart des jardiniers des Tuileries s’étant présentés devant lui, il leur demanda si le peuple ne faisait pas bien du dégât dans leur jardin : « Point du tout, monseigneur, répondirent-ils presque tous en même temps, ils se contentent de s’y promener et de regarder. » — « Ces messieurs, repris-je, y trouvent même leur compte, car l’herbe ne croît pas si aisément dans les allées. » M. […] Il nous montre le procédé par lequel on les fabrique, et, si cette raillerie ne saurait en aucun temps atteindre les dignes et véritables érudits, elle frappait d’aplomb sur « un certain peuple tumultueux de savants » qui, à cette époque, se maintenait encore.
Sans nous engager dans le détail des intrigues, il demeure évident que Mme des Ursins contribua dès les premiers temps à bien diriger la reine, à l’engager dans une voie où elle se fit bien venir de ses nouveaux sujets et chérir du peuple espagnol. […] Le mérite et l’art de Mme des Ursins fut de savoir en si peu de temps tirer si bon parti des grâces et de l’affabilité de la reine, qu’elle la rendit réellement populaire parmi le vrai peuple du centre de l’Espagne, et ce fut miracle de voir les racines de cette royauté si nouvelle prendre si vite au cœur des vieux Castillans, qu’elle put résister ensuite pendant de rudes années à tous les orages. […] Mme des Ursins, remontant au principe de la succession d’Espagne, montre quel fond on doit faire sur cette fidélité de si fraîche date des Espagnols à la maison de Bourbon, et quel en est le vrai sens politique : pour les grands, empêcher la division de la monarchie ; pour les peuples des provinces, bien vendre leurs laines.
En ce moment de licence effrénée où le peuple a beaucoup moins besoin d’être excité que contenu, ces barbares excès, à quelque parti qu’on les prête, me semblent dangereux à présenter au peuple, et propres à justifier les siens à ses yeux. […] C’étaient sans cesse des visites domiciliaires, des menaces de pillage et d’incendie ; on accusait Beaumarchais d’être accapareur de blés, puis d’être accapareur d’armes cachées, et de les entasser dans des souterrains qui n’existaient pas : Quant à moi, disait-il dans ces espèces de mémoires et pétitions à la Convention qu’il faudrait toujours mettre en regard du monologue de Figaro, quant à moi, citoyens, à qui une vie si troublée est devenue enfin à charge ; moi qui, en vertu de la liberté que j’ai acquise par la Révolution, me suis vu près, vingt fois, d’être incendié, lanterné, massacré ; qui ai subi en quatre années quatorze accusations plus absurdes qu’atroces, plus atroces qu’absurdes ; qui me suis vu traîner dans vos prisons deux fois pour y être égorgé sans aucun jugement ; qui ai reçu dans ma maison la visite de quarante mille hommes du peuple souverain, et qui n’ai commis d’autre crime que d’avoir un joli jardin, etc.
Mais les abus valent infiniment mieux que les révolutions ; et ce second point s’adresse aux peuples. » Enfin, Calvin n’eût pas écrit : « J’ai toujours observé qu’on peut tout dire aux Français ; la manière fait tout. » Les esprits absolus et cruels se soucient bien de la manière ! […] Déjà, dès cette époque, l’idée de l’émancipation commençait à sourdre dans la tête d’Alexandre, ce jeune Louis XVI russe, à la beauté de Louis XIV, et dont le peuple, plus docile et plus facile à mener que celui de Louis XIV, l’eût sauvé de la ressemblance de destinée avec l’autre émancipateur s’il avait poussé un peu plus loin ses velléités généreuses. […] Partout où règne une autre religion (ajoute-t-il encore), l’esclavage est de droit, et partout où cette religion s’affaiblit, le peuple devient en proportion précise moins susceptible de liberté générale ».
La République des Lettres devient une démocratie des lettres : le peuple chante, le peuple lit, le peuple écoute. […] Aux peuples romans de reprendre contact avec les vertus, l’art, la poésie, les légendes de leur moyen âge ! […] De même les mœurs romantiques étaient composées des habitudes des peuples du Nord et des restes de la civilisation romaine ». […] Si un être, si un autre cœur, manque à la seconde, c’est qu’elle est environnée d’un peuple, que le génie est marqué de solitude pour le service et la lumière de ce peuple. […] Entre Lamartine et la foule, entre le vaisseau de Colomb qui entre au port et le peuple qui se presse sur les quais, le pacte est fait.
De nos jours, on commet une erreur plus grave : on confond la race avec la nation, et l’on attribue à des groupes ethnographiques ou plutôt linguistiques une souveraineté analogue à celle des peuples réellement existants.
Ce Livre a été traduit en Espagnol, & mérite de l’être chez tous les Peuples jaloux de la vertu des Femmes.
De fréquens voyages dans presque toutes les contrées de l’Europe, & même sur les côtes d’Afrique & ailleurs, ont beaucoup contribué à le mettre en état de vérifier les situations des lieux, & les observations sur les mœurs & la Religion de différens Peuples.
Le prêtre les badigeonne, l’architecte les gratte, puis le peuple survient, qui les démolit.
Le peuple français, entre les modernes, est certainement celui qui ressemble le plus au peuple athénien, par sa vive intelligence, mais aussi par cette frivolité qui a perdu la cité de Pallas et nous a souvent mis en grand péril. […] … » Car déjà les peuples civilisés n’admettent plus que la guerre juste et défensive. […] Les droits de l’État et ceux du peuple ne viennent qu’ensuite. […] Le peuple, il faut l’aimer, assurer son bien-être et l’instruire, mais n’en pas faire une idole, ni un Moloch. […] Mais l’idée de la liberté des peuples, des droits de l’homme et du citoyen, lui paraît une sottise et une folie, condamnée par les faits.
Quelle que soit son origine, elle existe chez tous les peuples. […] Vouloir établir la démocratie chez un peuple corrompu, cela est fou. […] Et qu’importe alors que nous soyons dévorés par une cour, par un directoire, par une assemblée du peuple ? […] On sentait qu’il faut une religion, non seulement pour le peuple, mais pour tout le monde. […] En réalité, la Restauration avait justement pour elle, en Espagne, ce que l’empereur avait eu contre lui : le peuple et les moines.
ces gaietés triviales semblables à notre horrible fête du carnaval et à nos promenades ironiques du bœuf gras dans Paris, où le peuple jouit cruellement de l’agonie de l’animal qu’il va frapper, le paraissent inspirer. […] Si c’était à recommencer, je ne choisirais jamais cette profession. » C’est alors qu’il fit jouer M. de Pourceaugnac, cette farce immortelle qui fait rire encore le peuple d’aujourd’hui. L’éclat de rire qu’on arrache au peuple par les moyens souvent ignobles est la grimace du ridicule, le sublime du commun ; mais le vrai génie s’abaisse comme il s’élève, et quand il daigne y descendre, il le trouve et le rend impérissable. […] La pièce déplut au public, et charma Louis XIV ; il en félicita Molière, il était assez homme de goût pour y saisir les deux ridicules de la noblesse et de la bourgeoisie, il était placé assez haut pour se moquer de son peuple. […] Il mourut le vendredi 17e du mois de février de l’année 1673, âgé de cinquante-trois ans, regretté de tous les gens de lettres, des courtisans et du peuple.
Malgré ce surnom formidable, Ivan était très aimé de son peuple, comme le sont en général tous les princes qui ont la main ferme et rude. […] Le peuple, on le sait, n’admet rien de naturel dans les événements qui secondent l’ambition des hommes qu’il n’aime pas. […] Les Polonais établis à Moscou à la suite de Marine ou faisant partie de la garde du tzar portaient ombrage aux boyards et au peuple. […] Il est pour les peuples, comme pour les individus, un état d’enfance où la raison des hommes, loin d’être capable de les conduire, peut à peine suffire à les soumettre. […] À peine la vie d’un homme, et dix fois, vingt fois, cent fois la vie d’un peuple, d’un siècle, d’un monde !
Dans l’autre, il ouvre ses yeux au spectacle de la rue, aux misères du peuple, non pas en badaud, en flâneur misanthropique, ni même en pur artiste, mais en homme qui sait voir, comprendre et sentir, cela sans fade sentimentalité ni déclamation oiseuse.
C’est ainsi que ces poèmes mûrissent pendant des années avant de se produire au grand jour, selon le précepte d’Horace, que Jasmin a retrouvé à son usage, et c’est ainsi que ce poète du peuple, écrivant dans un patois populaire et pour des solennités publiques rappelant celles du moyen âge et de la Grèce, se trouve être, en définitive, plus qu’aucun de nos contemporains, de l’école d’Horace que je viens de nommer, de l’école de Théocrite, de celle de Gray et de tous ces charmants génies studieux qui visent dans chaque œuvre à la perfection.
Quelques Romans insipides, que le peuple ne voudroit pas lire à présent ; quelques Poésies, dont le Recueil seroit à peine supportable, quand on le réduiroit à quatre pages.
On y releve avec force les erreurs, les méprises, les contradictions, les bévues, les absurdités dans lesquelles il est tombé, lorsqu’il a voulu disserter sur l’ancien Peuple de Dieu & sur les Livres sacrés.
Le Peuple Protestant a pu chanter quelque temps ces Cantiques bizarrement travestis ; mais le bon sens a toujours rejeté des Productions, où le naïf s’efforce en vain d’atteindre au sublime, qui n’a rien de commun avec lui.
s’il faut qu’un monarque se montre quelquefois à son peuple, l’endroit ne doit-il pas répondre par sa grandeur et par sa magnificence à un usage aussi solennel [?]
« En un mot, on sent que bien des choses ne se sont faites que parce que le peuple a vu au boulevard le chevalier de Maison-Rouge de Dumas, et a lu les Girondins de M. de Lamartine. » « — (Mars 1848.) […] J’évitai les quais et la Grève, qui devaient être encombrés de peuple ; je pris la Cité, Notre-Dame, l’île Saint-Louis, et j’arrivai à la place Royale, où la garde nationale du quartier s’assemblait.
. — Le sublime est le troubadour qui récite, tôle nue et à distance, des vers épiques à la table des rois ; le comique est le petit chien impertinent qui saule sur la table du festin, salit les plats d’argent et d’or, met les rois en colère, le menu peuple en liesse, et mord en se sauvant le pied du troubadour. — L’architecte héroïque se cache derrière son œuvre, qui semble s’élever toute seule aux sons de sa musique, comme Thèbes aux doux accords de la lyre d’Amphion. […] Les peuples les plus sérieux sont aussi les plus comiques ; l’Anglais d’abord, puis l’Espagnol151. — Nous manquons de comique, parce que nous manquons de sérieux et que nous avons mis à sa place l’esprit152.
« Vous vous souvenez, dit Balzac, du vieux pédagogue de la cour et qu’on appelait autrefois le tyran des mots et des syllabes, et qui s’appelait lui-même, lorsqu’il était en belle humeur, le grammairien à lunettes et en cheveux gris… J’ai pitié d’un homme qui tait de si grandes différences entre pas et point, qui traite l’affaire des gérondifs et des participes comme si c’était celle de deux peuples voisins l’un de l’autre, et jaloux de leurs frontières. […] Le « courtisan », c’était sans doute la forme exquise de la langue que le peuple de Paris offrait à l’état brut et non raffiné : les crocheteurs de la Grève devaient fournir l’étoffe, et la cour y mettre la façon ; mais il n’est pas au pouvoir de la cour, ni même du roi, de faire français ce qui n’est pas du français de Paris.
Les peuples civilisez, ont toûjours fait usage de la musique instrumentale dans leur culte religieux. Tous les peuples ont eu des instrumens propres à la guerre, et ils s’y sont servi de leur chant inarticulé, non-seulement pour faire entendre à ceux qui devoient obéïr, les ordres de leurs commandans, mais encore pour animer le courage des combattans, et même quelquefois pour le retenir.
En quelques païs le souverain a été obligé d’exciter par des actes publics le peuple devenu protestant, à prendre les mêmes divertissemens les jours de dimanche après le service, qu’il prenoit bien avant que le culte religieux y eut été changé avec la confession de foi, sans qu’on l’y exhortât. […] On appelle communément des airs caracterisez ceux dont le chant et le rithme imitent le goût d’une musique particuliere, et qu’on imagine avoir été propre à certains peuples, et même à de certains personnages fabuleux de l’antiquité, qui peut-être n’existerent jamais.
Il a cité enfin le très docte Daunou, l’oratorien apostat, qui fait de Grégoire un tourmenteur de peuples, doué d’un zèle inconsidéré qui lui venait d’une persuasion incurable… Et à tous ces doctes il a ajouté le docte Guizot, calomniateur d’un autre genre, car c’est calomnier un homme que de lui retirer de sa grandeur sans en avoir le droit. […] L’Eglise romaine a mis Grégoire au rang des saints ; partout l’idée de sa sainteté prévalut dans le peuple après sa mort.
Naguère, on y tendait comme à l’Idéal, car l’Idéal, c’est pour les peuples ce qui leur manque et le contraire de ce qu’ils ont. Il faut être juste : la philosophie, qui se moque des hypocrites religieux et qui a les siens, les révolutions, qui ont détruit les grandes fortunes et rendu la vie si exiguë, ne devaient-elles pas arriver à ce résultat de nous pousser l’imagination, de toute la force de l’ennui enragé qu’elles ont créé pour les peuples modernes, vers le temps passé des grandes existences et des plaisirs largement conçus et splendidement réalisés ?
En effet, si la Réforme est une destruction, et une destruction abominablement criminelle, surtout au point de vue des idées et de la conscience modernes, puisque cette destruction n’était pas seulement celle d’une certaine organisation, mais de l’organisation de la majorité d’un peuple, brisée par la minorité, Henri IV, qui fut le plus près d’un tel événement et qui pouvait le mieux élever une digue contre le fleuve, Henri IV a, dans cette destruction, la main qu’il n’y a pas mise pour l’empêcher, en supposant (supposition pure !) […] Il prouve admirablement, au contraire, qu’au xvie siècle les novateurs, à commencer par Luther lui-même, ne surent d’abord où aller, voulant une réforme des mœurs, mais tenus en respect par le dogme et l’opinion des peuples qui aimaient encore la « Sainte mère l’Église ».
Michelet, dans son Histoire de la Révolution, a eu l’extravagante pensée d’imputer l’action révolutionnaire au peuple seul, au peuple acéphale, et de nier l’ascendant des chefs… ce qui est tout simplement guillotiner l’Histoire et abattre sous le stupide niveau égalitaire tout ce qui s’y élève, même dans le mal.
… Pour eux, Pelletan n’est qu’un vieux jeune homme inconséquent, un bourgeois de 1848, et la preuve, l’opinion que voici : « La France respira — dit-il — sous la République de Cavaignac », et il oublie que ce peuple de Paris, qu’il prend si souvent pour la France, eut le sifflet coupé par le général Cavaignac ! […] Le silence qu’il garde sur ce massacreur du peuple, ainsi que l’appellent les républicains, l’auteur des Uns et des Autres le couvre, il est vrai, de cette énormité : c’est que les royalistes et les bonapartistes seuls firent l’insurrection que le général Cavaignac canonna.
Que de raisons, à ce qu’il semble, pour adorer le peuple qui a préféré Barrabas à Jésus-Christ ! […] C’est que les Juifs ont été pendant des siècles le peuple de Dieu !
Il n’y a pas place pour la critique là où il n’y a pas un historien qui recherche à la fois le vraisemblable et le vrai ; qui non-seulement raconte les événements, mais qui les explique ; qui pénètre les causes et prévoit les effets ; qui raisonne sur les intérêts des peuples, sur les caractères sur les mœurs ; qui discerne le bien du mal, et qui approuve ou blâme ; qui, pour tout dire, sent en homme de cœur, examine en philosophe et décidé en juge. […] Froissart n’avait ni cette forte éducation que donne le spectacle des agitations d’un peuple libre, ni, dans la langue nationale, un maître comme Dante ; et, quoique clerc, s’il n’ignorait pas tout à fait l’antiquité, il la pratiquait fort peu, ou point. […] Le sens de cette confusion universelle, dans laquelle il vivait, était trop obscur pour qu’il fût tenté de le chercher et comment se serait-il ému de toutes ces destructions de la guerre, dont personne, ni peuple, ni noble, ni roi, n’était excepté ? […] Tracer d’une main impartiale les portraits des grands personnages, faire des réflexions sur les événements et les caractères des peuples, comparer leurs institutions, distinguer une bonne politique et une mauvaise, indiquer des progrès à faire, des réformes à réaliser, enfin regarder l’histoire comme un enseignement, voilà ce qui donnait à Comines le droit de prendre le titre d’historien, que Froissart s’attribue si naïvement. […] Un progrès de plus de la langue, et on s’imaginerait lire Bossuet montrant le doigt de Dieu dans les chutes des empires et la disparition des peuples, et épouvantant la sagesse humaine de la fragilité de ses établissements.
Toutes deux reflètent également le génie d’un peuple. […] Il semble qu’on pourrait distinguer une Éthologie des individus, une Ethologie des peuples et une Ethologie des races. […] L’Ethologie des peuples et des races puiserait ses matériaux dans la linguistique et l’histoire. […] Il est aussi différent de déterminer le caractère d’un peuple et de raconter son histoire, que de faire le portrait d’un homme et de tracer sa biographie. L’histoire d’un peuple et la biographie d’un homme ne se composent pas seulement de ce qui vient d’eux, mais aussi de l’action des circonstances extérieures sur eux.
Les poètes chinois ne sont que des théologiens très sages, mais très arides, qui font au peuple la concession de quelques incarnations indiennes, qu’on peut lire dans le désœuvrement. […] … Les politiques ont parlé d’un contrat social, où le peuple n’était pas préalablement entendu ; mais le contrat humain et divin, mais ce contrat entre la vie et le néant, mais ce contrat entre la victime et le supplice, qu’en dites-vous ? […] À l’exception du petit nombre qui trouve, comme dit le peuple, son pain tout cuit, l’homme passe le reste de son existence active à gagner très péniblement ce pain ; et par quels métiers ? […] On pourrait faire plus aujourd’hui, on pourrait, en quelques instants, parcourir soi-même ces différents climats intellectuels du globe, et se rendre compte par sa propre sensation des sensations différentes des races et des peuples qui vivent ou qui meurent sous les différentes latitudes de la pensée, — « vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà », — s’écriait le religieux Pascal lui-même en sondant cet horrible mystère des opinions et des doutes des mortels ! […] … « Du jour où de l’Éden la clarté s’éteignit, « L’antiquité menteuse en songes me peignit ; « Chaque peuple à son tour, idolâtre d’emblème, « Me fit semblable à lui pour m’adorer lui-même.
Les langues sont des créations spontanées ; elles sont l’œuvre des peuples. […] Voyons-le mêlé au peuple et aux héros de 1789, partageant leur puissant idéal et leurs nobles illusions. […] On ne se fait une idée un peu nette d’un peuple que par la vue des monuments qu’il a laissés. […] Mais on nous enseignait la vie des peuples comme on l’enseignerait à des taupes. […] Ce « veau de lune », comme l’appelle Stefano, est le peuple et le peuple tout entier.
Ses émissaires, mêlés parmi le peuple, exprimaient à grands cris leur désir d’entendre cette voix céleste. […] On n’eut point d’égard à cette modestie de Néron ; les soldats même qui montaient la garde à la porte de son appartement, se joignant au peuple, demandèrent qu’il parût sur le grand théâtre. […] Après avoir achevé son prélude, il fit dire au peuple, par l’organe de Cluvius Rufus, personnage consulaire, qu’il chanterait le rôle de Niobé. […] Son Britannicus tomba ; sa Phèdre fut abandonnée ; son Athalie fut conspuée ; son humanité, son amour pour le peuple lui fit perdre les bonnes grâces du roi. […] Ensuite il n’est pas moins faux que cette proscription du peuple juif ne puisse les atteindre.
Il étoit d’une figure avantageuse ; sévere observateur des Loix, moyen dont il se servoit pour gagner la bienveillance du Peuple ; fourbe, imposteur, hypocrite, faisant servir la Religion à ses desseins, mettant en œuvre les révélations & les visions, pour s’autoriser, effronté jusqu’à se vanter d’affermir l’autorité du Pape, dans le même temps qu’il la sapoit par les fondemens ; fier dans la prospérité, prompt à s’abattre dans l’adversité, étonné des moindres revers ; mais, avec la réflexion, capable de se servir des moyens les plus hardis pour se relever ».
Malgré cela, le Peuple en est extasié, & se plaît à le voir souvent représenter.
On sait que ce Livre est un amas, un magasin de formules de Lettres & de Complimens, sur toutes sortes de sujets, où le Peuple croit encore aujourd'hui trouver un modele du style épistolaire.
Dans l’un et l’autre cas, n’ayons aucun scrupule de montrer au peuple cette bastille à jeter par terre et déchaînons-le. […] Mais il lui faut la collaboration du peuple et celle de l’élite intellectuelle. […] L’histoire d’un peuple nous montre l’action constante, à travers la diversité des événements, d’une disposition psychologique qui tient à la nature même des races qui le composent et aussi à la situation géographique de ce peuple. […] Beyens — l’atmosphère de haine et de défiance entre les deux peuples. […] La tentation de la guerre préventive travaille déjà le peuple tout entier et son chef qui ne fait qu’un avec lui.
— Le Livre du Peuple et les pantoufles de M. […] Le Livre du Peuple et les pantoufles de M. […] Il avait consacré déjà tant d’années à la première histoire où le peuple ait joué son rôle ! […] — « Le peuple de Florence n’est pas bête, disait Machiavel, et cependant frère Jérôme Savonarole, a bien fait croire au peuple de Florence qu’il prédisait l’avenir ! […] Il assiste à l’enfantement de l’œuvre ; il l’expose le premier à la douce clarté du jour ; il dit à son peuple : « La voilà !
Bréal, à travers les mots auxquels notre oreille est habituée depuis l’enfance » ; la preuve qu’il y a là une illusion, c’est que le même phénomène se produit chez tous les peuples : « les étrangers entendent les mêmes bruits que nous dans des mots tout différents »270 . […] Tous les peuples, encore sauvages, ont inventé le langage audible ; tous ceux qui sont sortis de la barbarie ont signalé leurs premiers pas dans la voie du progrès en créant des représentations graphiques, plus ou moins descriptives, plus ou moins symboliques, des idées qui leur étaient le plus familières276, et jamais les peuples civilisés n’ont abandonné ce moyen d’expression supplémentaire, mais indispensable. […] Une intelligence subitement privée de la parole intérieure ne serait pas pour cela réduite à l’impuissance, mais seulement gênée, désorientée, comme par l’absence d’un organe utile par lui-même et dont elle avait appris à ne se passer jamais ; tel un homme subitement privé de la vue, ou bien un aveugle qui vient de perdre son bâton ; tel un peuple inopinément frappé par la mort de l’homme d’état qui possédait toute sa confiance et dans les mains duquel il avait concentré tous les pouvoirs. […] Enfin, pour toute entreprise difficile et nouvelle de la pensée, pour celles qui doivent compter dans l’histoire de l’esprit humain ou seulement dans l’histoire économique ou politique des peuples, il faut des idées encore jeunes et vivantes, aux contours saillants, et dont les couleurs n’aient pas été ternies par un trop long usage. […] Allusion à la 4e partie des Voyages de Gulliver, « Voyage chez les Houyhnhnms », nom d’un peuple de chevaux raisonnables (voir notamment la rencontre du narrateur à la fin du chap.
Nous ne dirons pas que dans celle qu’elle a composée sur l’Incendie de l’Hôtel-Dieu, elle ait atteint le sublime & l’énergie de ce genre de Poésie ; mais on ne peut méconnoître dans cette petite Production plusieurs traits de vivacité & de sentiment, préférables au jargon philosophique de la Voix du Peuple, Epître composée par un Académicien sur le même sujet.
A l'en croire, le Critique des Entretiens d'Ariste & d'Eugene est un malhonnête homme, qui dit cent fausses pointes & cent insolences, un faiseur de libelles diffamatoires qu'il ne faut pas chercher parmi les honnêtes gens, qui ne fréquente que les plus sets de la lie du peuple.
Avouons-le humblement : le peuple, le vieux peuple des campagnes est l’artisan de notre langue et notre maître en poésie. […] On n’y trouve pas trace de haines contre les peuples étrangers. […] Il aspirait au jour prochain de l’émancipation des peuples et de la fraternité universelle. […] C’est ce qui faisait sa force en ce monde et spécialement chez les peuples où elles sont blanches. […] Et le lendemain, le peuple vit qu’elles étaient liées l’une à l’autre par des chaînes de roses.
Un peuple a toujours les Jérémies qu’il mérite. […] « Ce qui distingue, dit-il, le génie des peuples germains, ce sont ses préoccupations morales. […] Ce peuple, qui passe pour impie, a fait de grandes choses pour l’amour de Dieu. […] Les vrais amis du peuple sont les vendeurs de liqueurs qui lui creusent les fosses, et remplissent les asiles d’orphelins. […] Nous sommes un peuple jeune, avec beaucoup de crudités, mais nous poussons et nous, vous poussons… À tout à l’heure, messieurs !
Eugène Sue, livre inspiré par l’amour du peuple, par l’intelligence des vrais intérêts démocratiques. »
Fournier, Édouard (1819-1880) [Bibliographie] La Musique chez le peuple (1847). — Souvenirs historiques et littéraires du département du Loiret (1847). — Album archéologique de l’église abbatiale de Saint-Benoît-sur-Loire (1851)
L’auteur entreprend de prouver : 1º qu’Homère n’a pas été philosophe ; 2º qu’il a vécu pendant plus de quatre siècles ; 3º que toutes les villes de la Grèce ont eu raison de le revendiquer pour citoyen ; 4º qu’il a été, par conséquent, non pas un individu, mais un être collectif, un symbole du peuple grec racontant sa propre histoire dans des chants nationaux.
Les deux premières journées de la lutte entre le peuple et les troupes étaient passées ; le combat languissait. […] Si le peuple est vaincu, il n’est plus peuple, il est esclave, c’est un mal ; si le peuple est vainqueur, les circonstances seront extrêmes, il sera entraîné à l’anarchie : à l’anarchie, il y a un remède ; à la servitude, il n’y en a plus. […] Il aimait à faire à loisir de belles choses qui rempliraient l’univers et qui rassembleraient dans une même admiration tout un peuple de nobles esprits ; mais ses délices, à lui, étaient de les faire en silence et dans l’ombre, et sans cesser de vivre avec les nymphes des bois et des fontaines, avec les dieux cachés. […] Ce sont, en effet, les peuples qui font les poèmes épiques, ce ne sont pas les poètes.
Tous les peuples étaient dans l’affliction et le désespoir. […] Est-ce des traditions indiennes transportées des bords du Gange aux bords du Danube et passées dans les âmes du peuple germain, colonie évidente de l’Inde ? est-ce des principes chrétiens commençant à civiliser ces peuples à peine encore baptisés ? […] L’élégance du costume, la richesse des étoffes, la magnificence des armes, or, argent, tissus, soie, à peine encore connue en Europe, la ponctualité des étiquettes du camp, de cour et d’ambassade, le droit des gens rigoureusement observé dans les négociations attestent aussi que cette prétendue barbarie des peuples germaniques était découlée de l’Inde et du Caucase depuis longtemps quand tout cela était à peine éclos dans nos contrées. […] Les peuples qui viennent de passer brillamment par trois grandes phases de philosophie dans le dix-huitième siècle, d’action militaire dans le dix-neuvième et de pensée éloquente dans notre dernière période de la restauration en France, sont-ils donc comme les individus qui se lassent à moitié route et qui déposent leur fardeau pour que d’autres plus jeunes et moins découragés les reprennent et les portent plus loin sur le chemin de l’avenir ?
Ses paroles n’ont pas été vaines, et la main de Fingal s’est rougie du sang de mon peuple. » « Elle parut les yeux baignés de larmes, ses cheveux noirs étaient épars ; son sein, éclatant de blancheur, était gonflé de soupirs. […] Et toi, Fingal, remets dans son fourreau ton épée homicide, et laisse combattre ton peuple. […] Mon épée reluira sur cette colline : elle sera l’appui de mon peuple ; mais puissiez-vous n’avoir jamais besoin de son secours, tandis que le fils de Morni va combattre à ma place ! […] « Mais vois le roi de Morven, il s’avance, et l’incendie, les torrents, les tempêtes sont l’image de sa force. — Heureux ton peuple ! […] Heureux est ton peuple, ô Fingal !
Il le fut si bien, qu’à dater de la publication de Μ. de Cassagnac, les écrivains révolutionnaires, comme Michelet, par exemple, renoncèrent à la poésie et à la vertu de leurs grands hommes et se rabattirent sur un héros plus vague, — le Peuple anonyme et collectif. […] Il a combattu pour le pouvoir, les principes, la monarchie, l’autorité, la règle, les idées chrétiennes, quelle que fut l’indignité de ceux qui portaient cette Arche des peuples. […] Il a compris une de ces situations, rares dans l’histoire des peuples, qui établit une race et renouvelle une société ; il l’a comprise en la prenant d’avant en arrière, au lieu de la prendre d’arrière en avant, mais il l’a fouillée, il l’a pénétrée, il l’a décrite, et l’homme qui l’aurait devinée, qui l’aurait annoncée à longue date, n’aurait peut-être pas si bien fait. […] Cette thèse, qu’il dresse sur leurs débris, il la déduit du fait historique des invasions gauloises, qui ont laissé partout des traces de leur passage dans des mots de même origine, retrouvés toujours, malgré les mêlées des peuples et leurs transfusions. […] Monarchistes tous les trois, mais différant dans leur conception de monarchie applicable aux peuples actuels, déraillés et éperdus, ils avaient cela de commun et de semblable qu’ils étaient religieux tous les trois, et qu’ils croyaient absolument à la Révélation chrétienne et aux Traditions de l’histoire.
L’un d’eux, le Parlement, simple rejeton sorti du grand chêne, a cru parfois posséder une racine propre ; mais sa sève était trop visiblement empruntée pour qu’il pût se tenir debout par lui-même et fournir au peuple un abri indépendant. […] On a vu comment sa diplomatie a sauvé les immunités du clergé, comment elle l’a racheté de la capitation et des vingtièmes, comment elle a changé sa part d’impôt en un « don gratuit », comment chaque année elle applique ce don au remboursement des capitaux empruntés pour son rachat, par quel art délicat elle est parvenue, non seulement à n’en rien verser dans le Trésor, mais encore à soutirer chaque année du Trésor environ 1 500 000 livres ; c’est tant mieux pour l’Église, mais tant pis pour le peuple. — Maintenant parcourez la file des in-folios où se suivent de cinq ans en cinq ans les rapports des agents, hommes habiles et qui se préparent ainsi aux plus hauts emplois de l’Église, les abbés de Boisgelin, de Périgord, de Barrai, de Montesquiou ; à chaque instant, grâce à leurs sollicitations auprès des juges et du Conseil, grâce à l’autorité que donne à leurs plaintes le mécontentement de l’ordre puissant que l’on sent derrière eux, quelque affaire ecclésiastique est décidée dans le sens ecclésiastique ; quelque droit féodal est maintenu en faveur d’un chapitre ou d’un évêque ; quelque réclamation du public est rejetée102. […] À la fin le troupeau écorché découvrira ce qu’on fait de sa laine. « Tôt ou tard118, dit un Parlement dès 1764, le peuple apprendra que les débris de nos finances continuent d’être prodigués en dons si souvent peu mérités, en pensions excessives et multipliées sur les mêmes têtes, en dots et assurances de douaires, en places et appointements inutiles. » Tôt ou tard, il repoussera « ces mains avides qui toujours s’ouvrent et ne se croient jamais pleines, ces gens insatiables qui ne semblent nés que pour tout prendre et ne rien avoir, gens sans pitié comme sans pudeur ». — Et ce jour-là les écorcheurs se trouveront seuls. […] Ils peuvent avoir compassion du peuple, mais ils ne se sentent pas coupables envers lui ; car ils sont ses souverains et non ses mandataires.
Qu’on oublie donc que ces vers parlent de moi ; qu’au lieu de moi, retiré depuis longtemps de la lice, et qui n’ai fait que toucher superficiellement et avec distraction la lyre jalouse qui veut tout l’homme, on suppose un nom véritablement et légitimement immortel ; qu’on se figure, par exemple, que Solon, poète d’abord, et poète élégiaque dans sa jeunesse, puis restaurateur, législateur et orateur de la république athénienne, puis banni de la république renversée par l’inconstance mobile des Athéniens, puis rentré obscurément dans sa patrie, par l’insouciance du maître, y végète pauvre et négligé du peuple sur une des montagnes de l’Attique ; qu’on se représente en même temps un jeune poète d’Athènes, moins oublieux que ses compatriotes, bouclant sa ceinture de voyage, chaussant ses sandales, et partant seul du Parthénon pour venir visiter bien loin son maître en poésie, relique vivante de la liberté civique ; que Solon reçoive bien ce jeune homme, partage avec lui son miel d’Hymette, ses raisins de Corinthe, ses olives de l’Attique ; que le disciple, revenu à Athènes après une si bonne réception, raconte en vers familiers à ses amis son voyage pédestre, ses entretiens intimes avec le vétéran évanoui de la scène et se survivant, mutilé, à lui-même et à tous dans un coin des montagnes natales. […] J’écrivais le Conseiller du peuple, journal à cinquante mille abonnés, dans lequel je m’efforçais de modérer les esprits impatients à qui l’élan exagéré allait faire traverser la liberté ; je le voyais, je le disais. […] Sur cette clairière jaunissante où Laprade et tant d’autres étaient venus se transfigurer depuis Hugo, comme sur un humble Thabor des poètes, les chênes ont été abattus, pour convertir en une poignée d’or nécessaire les rêves mille fois plus dorés qui tombaient avec leur ombre de leurs cimes ; les sentiers battus par les pieds d’amis s’effacent, le château est désert ; le cheval Saphir, qui me portait, dans les grandes journées de feu de Paris, à la défense des foyers et des familles, et que la popularité honnête soulevait quelquefois des pavés sur les bras du peuple, erre seul aujourd’hui dans le pré sous ma fenêtre, paissant en liberté l’herbe d’automne ; de temps en temps je le vois relever la tête, regarder par-dessus le buisson, écouter les chars lointains, et hennir au vent, croyant toujours que ce sont ses maîtres qui reviennent le seller et le monter pour le conduire à la victoire ; puis, détrompé par l’attente vaine, il retourne tristement brouter près des bœufs roux et des vaches blanches, à la lisière des bois qui lui versent l’ombre ! […] Si je demandais à ce peuple pour toi une botte de foin à vie, je ne l’aurais pas !
La famille du bargello était très aimée dans le peuple des boutiques et des places de Lucques, parce que, malgré ses fonctions, le bargello, chargé des prisons, était doux et équitable, et qu’il avait dans ses fonctions même de police mille occasions d’être agréable à celui-ci ou à celui-là. […] Il faut avoir des amis partout, dit le peuple, même en prison ; n’est-ce pas vrai, monsieur ? […] CLXXVI Le piccinino dont la provende était déjà toute prête dans un immense canestre de joncs plein de morceaux de pain tout coupés, de prescuito et de caccia cavallo (jambon et fromage à l’usage du peuple), et portant, de l’autre main, une cruche d’eau plus grande que lui, sortit de la cuisine et marcha, derrière le bargello et moi, vers la porte ferrée de la cour des prisonniers. […] Lucques n’est pas une terre de malfaiteurs ; le peuple des campagnes est trop adonné à la culture des champs qui n’inspire que de bonnes pensées aux hommes, et le gouvernement est trop doux pour qu’on conspire contre sa propre liberté et contre son prince.
Puis c’est un poème humanitaire et démocratique : en face du bourgeois égoïste et satisfait, le peuple opprimé, trompé, souffrant, irrité, mourant, l’éternel vaincu ; en face des vices des honnêtes gens, les vertus des misérables, des déclassés, d’un forçat, d’une fille. […] L’insurgé Marius, fils d’un soldat de l’empire, race de bourgeois, c’est bien visiblement le fils du général comte Hugo, le pair de France de Louis-Philippe, qui est allé au peuple, et qui s’est fait le serviteur glorieux de la démocratie. […] Il distingue très bien aussi les groupes sociaux, monde élégant, bourgeoisie riche, petit commerce, peuple de Paris, aristocratie et bourgeoisie provinciales ou campagnardes, paysans, fonctionnaires, employés, journalistes, toutes les coteries, toutes les professions, toutes les conditions : dans chaque groupe, les individus-types, qui accusent un des travers, un des instincts, un des manèges spéciaux du groupe. […] En 1789 et en 1825, il n’y a d’énergie que dans le peuple : la justification du la Révolution est là, et la condamnation de la Restauration.