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1120. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

Ce songe si détaillé, et qui semble d’abord d’une grâce si ingénieuse, n’ajoute rien au dramatique de la situation, et la refroidit plutôt par une intention trop évidente ; c’est là un songe trop poétique et prophétique ; c’est presque un songe épique, un songe d’Athalie.

1121. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

Sa jeunesse fut errante, poétique, et, on peut le dire, presque fabuleuse.

1122. (1875) Premiers lundis. Tome III « Instructions sur les recherches littéraires concernant le Moyen Âge »

Il s’est conservé, en certaines contrées à part, surtout en Bretagne et vers les Pyrénées, d’anciennes traditions poétiques, des récits superstitieux, des chants même en langue du pays, altérés sans doute, mais évidemment transmis.

1123. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Dans la seconde se réveillent les facultés oratoires, précédant les facultés poétiques : nous avons vu, au xviie  siècle, le lyrisme se résoudre en éloquence ; on refait le même chemin en sens inverse.

1124. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Il fait une vague prière idéaliste en prose poétique, et se décide enfin à réciter le Pater, pour voir.

1125. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

Les fondateurs du christianisme vivaient dans un état de poétique ignorance au moins aussi complet que sainte Claire et les tres socii.

1126. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La diplomatie au xviie  siècle »

oublièrent d’appliquer à Lionne cette féroce théorie du bonheur, exigé par les hommes politiques qui croient en cacher l’égoïsme monstrueux sous le poétique mensonge de cette étoile qu’ils disent avoir, et qu’ils veulent qu’on ait !

1127. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

À nos yeux, à nous, qui sommes surtout littéraires, et pour qui les idées, dans leur essence poétique ou rationnelle, doivent passer bien avant les formes plastiques qu’on peut leur donner, la Revue générale de l’Architecture a une importance que ne saurait avoir un monument isolé, lequel, après tout, fût-il de génie, ne nous donnerait jamais que des sentiments élevés ou de puissantes sensations.

1128. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Illusion poétique d’une âme romanesque !

1129. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

Voyez comme La Bruyère lui-même, un grand esprit pourtant, bien au-dessus des apparences, a traité cette profonde figure de Guillaume d’Orange, qui finit par devenir poétique à force de soucis et d’ombres redoublées sur son front souffrant !

1130. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

C’était un René raisonnable, précédant le René poétique.

1131. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

Son gouvernement le breveta de génie et lui mit le harnachement poétique ; mais, sous les caparaçons officiels, on reconnaissait toujours l’indigente nudité de cette majestueuse figure d’Académie, comme on dit dans les Écoles de dessin, laquelle se faisait feuille de vigne avec sa branche de faux laurier.

1132. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

Son gouvernement le breveta de génie et lui mit le harnachement poétique ; mais, sous les caparaçons officiels, on reconnaissait toujours l’indigente nudité de cette majestueuse figure d’Académie, comme on dit dans les Écoles de dessin, laquelle se faisait feuille de vigne avec sa branche de faux laurier.

1133. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « X. Doudan »

Quand on a tant de talent, on doit avoir une conscience qui vous dit que vous en avez… Doudan a porté dans autre chose que dans ses lettres les facultés délicates et poétiques (et pour moi ce mot-là dit tout !)

1134. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

En fait de productions littéraires, nous n’en sommes ni aux « irrémédiables douleurs, ni aux désolantes préoccupations, ni au funeste délire… », car tout cela avait sa vie et sa poésie encore, et nous ne sommes plus, nous, ni poétiques, ni même vivants !

1135. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

C’était un René raisonnable, précédant le René poétique.

1136. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

S’il avait parlé en ces termes de l’Internelle Consolation dans sa langue artiste et populaire, le mot aurait peut-être été vrai, mais appliqué au texte latin de l’original, un tel mot n’est plus que poétique.

1137. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Cependant, il faut bien l’avouer, comme ce dix-neuvième siècle-là est dans l’autre, — dans le sérieux, l’honnête, l’élevé, — nous n’avons pas le bégueulisme de l’interdire au romancier qui veut l’aborder et le peindre : la règle, pour nous, de toute poétique, de toute observation, de toute étude et même de toute langue, étant que tout ce qui est doit être exprimé, MM. de Goncourt pouvaient donc préférer à l’autre ce dix-neuvième siècle.

1138. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Je ne puis décrire l’enchantement où me jeta cette poétique et sauvage contrée, rêvée à travers les Contes d’Espagne et d’Italie d’Alfred de Musset et les Orientales d’Hugo. […] Tout ce qu’il y avait en hommes de hardi, d’aventureux, de poétique, ôtait aux armées, faisant des Iliades en action et n’écrivant pas. […] Ce ne sont pas des effusions pures, des caprices poétiques, des harmonies inconscientes. […] Les prosateurs-nés ne s’élèvent jamais à la poésie, quelque poétiques qu’ils soient d’ailleurs. […] Balzac, comme le Jupiter de l’Olympe poétique allemand, ne pouvait souffrir le tabac, sous quelque forme que ce fut ; il anathématisait la pipe, et proscrivait le cigare.

1139. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

— Barbier est l’aristocrate poétique le plus raffiné ; il n’aurait dû faire que des pianto et des sonnets artistiques, et il s’est trouvé poussé à cette débauche de La Curée trop rude pour lui, comme un fils de famille qu’on habille en fort un mardi de carnaval et qu’on pousse à la sublime ribotte. […] — Dans sa notice un peu précieuse, mais ingénieuse et poétique, mise en tête des premières éditions d’André Chénier, Latouche parlant des tendresses passionnées qui inspirèrent le chantre de Fanny et de Camille, avait dit : Amour, qui accables et soutiens les jours du poète, nul peut-être n’était destiné à te rendre avec plus d’éloquence ! […] Jamais la solution de continuité, qui est au fond du talent poétique de Musset, n’a été plus sensible ; il y a longtemps que cela existe pour qui sait réfléchir et veut se rendre compte ; ces lacunes ne sont pas nouvelles chez lui, mais les engoués n’y regardent pas de si près. — Dans son sonnet à Victor Hugo, lequel du moins est intelligible, quel salmigondis : Les bonbons, l’océan, le jeu, l’azur des cieux, Les femmes, les chevaux, les lauriers et les roses ! […] Ponsard, voulant louer Homère et nous l’expliquer au vrai, nous dira : « Ce bavardage poétique me charme. » Il se flattera de n’avoir pas fait comme André Chénier qui « a reculé, dit-il, devant la brutalité d’Homère. » Brutal toi-même ! […] Sa jeunesse poétique a été malheureusement amoindrie par le pédantisme du parti classique, mais maintenant le voilà qui a Le Globe pour lui : il a donc partie gagnée. » Victor Hugo, étant allé remercier M. 

1140. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Beaucoup sont des viveurs, des viveurs tristes, sortes de Musset et de Murger, qui s’abandonnent et s’étourdissent, capables des rêves les plus poétiques et les plus purs, des attendrissements les plus délicats et les plus touchants, et qui, néanmoins, ne savent que miner leur santé et gâter leur gloire. […] Celui-ci était un esprit déréglé, débordé, outrageusement véhément et audacieux, mais grandiose et sombre, avec la « véritable fureur poétique » ; païen de plus, et révolté de mœurs et de doctrines. […] Si le génie poétique est moindre, la structure d’esprit n’a pas changé. […] Parfois même l’idylle naît complète et pure, et le théâtre tout entier est occupé par une sorte d’opéra sentimental et poétique. […] » Voilà les touchantes et poétiques figures que ces poëtes mettent dans leurs drames ou à côté de leurs drames, parmi les meurtres, les assassinats, le cliquetis des épées, et les hurlements des tueries, aux prises avec des furieux qui les adorent ou les supplicient, conduites comme eux jusqu’à l’extrémité de leur nature, emportées par leurs tendresses comme ils le sont par leurs violences ; c’est ici le déploiement complet, comme l’opposition parfaite de l’instinct féminin porté jusqu’à l’effusion abandonnée, et de l’âpreté virile portée jusqu’à la roideur meurtrière.

1141. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Lanson dit excellemment du sentiment national : « On peut dire que la moitié des pages éloquentes ou des émotions poétiques du xve  siècle (comme déjà du xive ) est un produit du patriotisme, l’expression d’un amour nouveau de la France, et de la tendresse ou de l’indignation que les misères des humbles et des laborieux excitent. […] nous avons combattu avec l’épée… ») révèlent à Augustin Thierry sa vocation d’historien ; et c’est une chaîne ininterrompue qui va de Thierry à Guizot, à Tocqueville, à Michelet, à Fustel de Coulanges, à Taine et à Renan ; c’est aussi par une intuition d’abord toute poétique que Gregorovius, un soir, sur un pont du Tibre, conçoit son Histoire de Rome. […] L’histoire, naguère une reconstruction poétique, se fait exacte, méthodique, renouvelle la philologie, le droit, la philosophie, la psychologie, les sciences naturelles qui vont passer au premier plan. […] Par contre, cela est certain, il n’est pas lyrique ; il ne l’est que sous une influence étrangère ou par exception ; le plus souvent, il prend pour du lyrisme ce qui est éloquence, ou vision poétique, ou simplement esprit.

1142. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

De même pour Lamartine : j’aurais aimé qu’en développant son talent poétique aussi grandement, aussi démesurément même, que sa nature de génie l’y portait, il fût demeuré en politique d’accord avec lui-même, fidèle à ses origines, à ses précédents, à l’ordre d’opinions, de doctrines et, pour tout dire, de bienséances où il avait passé toute sa jeunesse et qui lui étaient comme son cadre naturel, — un M.

1143. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

Mais il faut aussi convenir de tout le charme, de toute la jouissance des images poétiques et des mouvements d’éloquence dont la prose perfectionnée nous offre de si beaux exemples.

1144. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VII. Narrations. — Dialogues. — Dissertations. »

Ce caractère dramatique, cette exacte combinaison de détails rapportés à un but unique, et placés pour produira leur plus grand effet, ce progrès constant de l’action, cette rigoureuse analyse des passions, l’appropriation merveilleuse des discours et des faits, la rapidité du développement, la précision des effets, c’est par là surtout que les Fables de La Fontaine ont réussi : si ces qualités ne sont pas plus précieuses en elles-mêmes et plus essentielles que l’imagination pittoresque et le sentiment poétique, elles sont du moins plus utiles ; si elles ne font pas l’auteur plus grand, elles contribuent plus à la fortune du livre.

1145. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Stendhal, son journal, 1801-1814, publié par MM. Casimir Stryienski et François de Nion. »

Il lit même des dictionnaires de rimes et de synonyme, et entreprend de se faire « un dictionnaire de style poétique ( !)

1146. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

Bien plus, ajoutera-t-on, cette sorte de déisme est si vague qu’il peut envelopper toute autre chose que le déisme même, à savoir le panthéisme et jusqu’à cette forme d’athéisme poétique et sentimental qui est propre à notre temps.

1147. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVII. Le Retour du Christ. Appel aux femmes ! »

Dumas, « la Vierge pleine de grâce, — si on veut, — n’est qu’une légende poétique, embarrassante pour le christianisme et qui l’empêchera de triompher ! 

1148. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

Pour un esprit comme le sien, pour un esprit jeune alors, animé, plein de sève, et par-dessus tout cela poétique (il venait de publier un volume de vers), c’était une charge, mais non une charge d’âme, que de continuer Sismondi, — Sismondi, l’historien érudit, si l’on veut, mais l’historien sans vie réelle, sans mouvement, sans chaleur, et l’un des écrivains de cette belle école grise de Genève qui, pour le gris, le pesant et le froid, a remplacé avantageusement Port-Royal !

1149. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Mathilde de Toscane »

Dans quelque temps que ce pût être, cette grande figure historique, enfoncée et comme perdue en des chroniques qu’on ne lit plus, mais entrevue d’abord et finalement déterrée, aurait passionné de sa beauté singulière toute imagination qui serait restée poétique sous les formes sévères et sobres de l’histoire et de l’érudition.

1150. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

Ainsi Cotin, l’abbé Cotin, le faiseur de charades, ce sphinx poétique qui ne dévora jamais personne, et dont Boileau fit l’épluchette que vous savez.

1151. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édouard Fournier »

Quel effet bizarre produit sur nous Fournier, ce singulier racleur de mots, cet effaceur d’esprit, qui semble suspendu sur une planchette d’érudition que je crois très mince et très fragile, mais pourtant avec moins de risques que ses confrères en regrattage, et dont tout le soin est d’enlever le noir et la poussière à l’histoire, d’essuyer incessamment avec son torchon d’érudit cette estompe poétique que les proprets de l’exactitude bien lavée prennent pour une tache, et de s’acharner, jusqu’à ce qu’elles soient abattues, sur ces fleurs tombées on ne sait d’où, ces traditions qui voilent moins l’histoire qu’elles ne l’ornent, et qui ne sont pas contraires à la réalité parce qu’elles sont beaucoup plus belles !

1152. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

C’est un autre Bossuet, moins sculptural et plus humain, moins radieux, mais certainement plus poétique, ainsi trouvé et saisi qu’il est dans ce clair-obscur que tous les biographes avaient fait de six ans à peine, et qui fut, au compte de Floquet, de dix-sept, — de 1652 à 1669.

1153. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

Depuis qu’il existe, il a toujours préféré à tout les facultés altières de l’esprit, les brutalités de sa force et la profondeur de ses perfidies… Mais lui démontrer, à propos de ce merveilleux et pauvre prêtre, — saint Vincent de Paul, — que Renan, ce rude connaisseur, ne trouvait ni imposant ni poétique, et dont il faisait tout au plus un saint bonhomme ; lui démontrer que ce saint bonhomme pouvait avoir dans la tête, à la même place précisément que Richelieu ou Napoléon, un génie égal ou supérieur au génie des plus fiers, des plus impérieux, ou même des plus mauvais qui aient mené un jour les hommes et dompté les choses, ne vous y trompez pas !

1154. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « José-Maria de Heredia »

avec sa nature poétique et plastique, avec ses facultés de coloriste débordant, Heredia a dû souffrir de s’être passé cette gourmette du mot à mot, humble et résigné.

1155. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

Quoique le grand Corneille et le plus grand Shakespeare fussent de vigoureux travailleurs, qui se donnaient un mal infini pour tricoter leurs drames dans les conditions du Théâtre et des poétiques de leur temps, ils n’avaient point assez de métier, et quand Voltaire appelait Shakespeare barbare, c’était un reproche que le métier faisait au génie.

1156. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Jean Richepin »

Plume appuyée, mordante, solidement éclatante, même quand elle appuie sur les choses vulgaires, procédant d’habitude par comparaisons plus pratiques que poétiques, mais qui font entrer l’objet comparé dans l’esprit du lecteur comme un coup de cette bûche emmanchée — le marteau des fendeurs de bois — qui enfonce le coin de fer dans le tronc noueux de l’arbre abattu… Vous voyez qu’ici, dans l’homme aux opinions et aux créations antiviriles de ce roman à petite morale, puisqu’elle est vide de Dieu, se retrouve le mâle que nous connaissions.

1157. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Il paraîtrait que c’est une loi : les réalistes, comme les ours, viendraient mieux et seraient plus forts vers les pôles… Cette locution d’Ames mortes, qu’on pense tout d’abord être une manière de dire poétique et funèbre, toute pleine d’attirants mystères, n’est qu’un terme usuel en Russie, un terme vulgaire et légal… Vous saurez tout à l’heure ce que c’est… M. 

1158. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

D’abord on pourrait, à commencer par les romans de la Table Ronde, pour finir par le Petit Jehan de Saintré, suivre la vérité croissante de ce que nous appellerions volontiers la géographie poétique. […] Les descriptions poétiques, sobres d’abord, s’enflent de siècle en siècle et se distendent sous l’invasion de détails oiseux qui s’imposent tous à la fois, sans cependant s’appeler ni se tenir59. […] Des hommes de second ordre, Sorel, Furetière, Scarron, protestèrent contre les fictions poétiques qui faussaient la peinture de la vie pour l’embellir. […] On ne pouvait guère toucher à la cadence poétique sans toucher à la cadence musicale ; on comparait naturellement les conventions de la tragédie à celles de l’opéra italien ; la tyrannie de l’air de bravoure, des duos et de toutes les coupes musicales admises avec celles de la période poétique, de la strophe, de la mesure ou de la rime. […] Les chefs de l’école poétique seraient, à notre avis, Théophile Gautier, Baudelaire, M. 

1159. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Mais les honneurs qu’on lui prodigua ne rappellerent point des bords du tombeau le génie poétique. […] Il avouait que sans l’Art Poétique il n’eût peut-être jamais entrepris l’Art de peindre. […] Peut-être eût-il envisagé ce sujet sous une forme encore plus poétique. […] Elles sont à celles de Despréaux ce qu’est son Poëme du Geste à l’Art Poétique. […] C’est ce même Patru qui, par des raisons à-peu-près semblables, voulut détourner Boileau d’entreprendre l’Art Poétique.

1160. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Et ce que la vie contenait en soi, — la vie réelle, la vôtre, la mienne, celle du bourgeois que nous sommes, — ce qu’elle contenait de poétique ou de ridicule, bien loin de savoir l’en dégager, on ne savait pas seulement l’y voir, et d’ailleurs on ne s’en souciait pas. […] De purement oratoire que notre tragédie classique avait été jusqu’à lui, si Racine l’a rendue poétique, je ne crois pas, en effet, que, pour préciser le sens de ce mot, on puisse prendre un meilleur exemple que celui de sa Phèdre. […] si je me laissais aller, la tragédie tout entière y passerait avant la représentation ; et peut-être en ai-je dit assez pour vous montrer quelle est cette transfiguration de la réalité qu’on entend quand on parle du caractère poétique de la tragédie de Racine. Poétique, elle ne l’est pas sans doute à la façon d’une élégie de Lamartine, ou d’une Ode d’Hugo ! […] Enfin, et s’il faut tout dire, — en raison même de l’importance donnée dans Phèdre à la constitution de l’atmosphère ou du milieu poétique, — n’est-il pas vrai qu’avec le romanesque, c’est le descriptif et le lyrique aussi qui s’insinuent traîtreusement dans le drame ?

1161. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Il n’a pas voulu considérer que la situation n’admet pas des ornements si gais ; qu’Œdipe et Jocaste, dans un moment aussi terrible, n’ont pas le loisir de faire des descriptions étudiées et des phrases poétiques. […] Avec toute cette jactance poétique, Corneille était un homme modeste : rien n’est au contraire plus orgueilleux que la modestie de nos poètes modernes. […] Il n’est pas nécessaire d’avoir fait des pièces de théâtre pour en donner des règles : Aristote eût certainement composé de bien mauvaises tragédies : sa poétique n’en est pas moins un chef-d’œuvre. […] On sait que les préfaces des auteurs dramatiques ne sont que des apologies de leurs défauts, et des poétiques arrangées exprès pour leurs pièces : telles sont celles de Lamotte-Houdart, d’ailleurs écrites avec, beaucoup d’art et de finesse. […] Cessez n’est pas poétique ; il est plus faible arrêtez, qui précède.

1162. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Ainsi, dans ces premiers traités, la préoccupation de Wagner reste la même ; réformer l’art au moyen du drame musical, poétique et plastique. […] Benoit a de plus mis en lumière, avec une clarté parfaite, ce don merveilleux d’invention poétique qui fut une des facultés maîtresses de Wagner. […] Alfred Ernst Camille Benoît : Les motifs typiques des Maîtres Chanteurs, étude pour servir de guide à travers la partition, précédée d’une notice sur l’œuvre poétique (brochure, in-16, 1 fr. 50).

1163. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

si M. le comte de Mornay avait songé à la conservation de ce diadème poétique, il eut commandé qu’il fût d’un plus rude métal ! […] Auprès de vous se tient, souriante et charmée de vous voir, la belle et consolante déesse de la jeunesse ; elle est votre consolation, elle est votre force, et si parfois quelque découragement pénètre au fond de votre âme enivrée et chancelante sous les parfums du laurier poétique, eh bien ! […] Enfin, dans cette vie active, occupée, en plein bruit poétique, elle n’avait qu’une seule crainte, c’était d’être prise, à la fin de ses jours, par une de ces longues agonies qui font de votre cœur un lambeau, et de la femme la plus charmante un lugubre objet de pitié et de dégoût.

1164. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Roméo, a dit encore bien superficiellement Hazlitt, Hazlitt dont Shakespeare semble avoir parfois troublé la vue, Roméo, c’est Hamlet amoureux , comme si ce qui fait cette étincelante et exquise création de Roméo, cette incarnation de toutes les sensations poétiques et heureuses de l’existence, était une affaire de soleil ! […] Dieu sait si j’aime et si je respecte ce grand Shakespeare, et mes lecteurs savent aussi si je nie les rapports de la moralité et du génie, et si ce n’est pas au contraire presque une poétique pour moi que la nécessité de tenir compte de leur union dans toute œuvre d’art et de littérature Dieu et mes lecteurs savent si j’ai jamais distrait la beauté morale de la vérité esthétique ; si, par ce côté-là comme par l’autre, Shakespeare, dans ses pièces de théâtre (uniquement dans ses pièces de théâtre, il est vrai), n’est pas à mes yeux le plus grand des artistes, Le plus grand, parce qu’il en est le plus pur ! […] En d’autres termes, moins poétiques et tout aussi vrais, ils ont cherché des midi à quatorze heures, infinis et superbes, pour expliquer dans le grand poète ce qui n’avait pas besoin d’explication.

1165. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

J’ai remarqué cela ailleurs encore, dans sa causerie, à propos surtout des discussions du romantisme poétique. […] Cette école du romantisme poétique ne fut d’ailleurs qu’à peine touchée dans son Cours ; il l’éluda dans sa charmante et judicieuse leçon sur André Chénier.

1166. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Qu’on rabaisse son talent poétique tant qu’on voudra, il n’y attache pas lui-même plus de prix qu’il n’en mérite ; mais si on veut bien lui accorder au moins le bon sens le plus vulgaire et le plus usuel, comment supposera-t-on que si la haine qu’on lui impute était dans son cœur, que s’il avait prétendu exhaler ses propres sentiments en écrivant les imprécations d’Harold, il eût au même moment demandé à être renvoyé dans ce pays qu’il abhorrait, et qu’enfin il fût venu se jeter seul au milieu des ennemis de tout genre que la manifestation de ces sentiments aurait dû lui faire ? […] C’est là que j’écrivis en grande partie les Harmonies poétiques et religieuses, qui ne furent imprimées que huit ans après.

1167. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Le Bonheur est (avec la Justice) un des plus vastes efforts de création poétique qu’on ait vus chez nous depuis les grands poèmes de Lamartine et de Hugo. […] Si elles ne peuvent en augmenter beaucoup la beauté poétique et plastique, elles lui restituent du moins toute sa beauté logique et de construction, si je puis dire.

1168. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

« — Je sais lire pour moi… cela ne peut suffire Quand il faut déployer, par mille tons divers, « Le poétique accent qui convient à des vers. […] le poète, interdit et confus, Demeure anéanti sous le poids du refus : « S’il est quelqu’un de vous, Messieurs, qui sache lire, « Dit-il, entre ses mains je dépose ma lyre. » Ce poétique appel est fait en vain deux fois.

1169. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

« Il étoit peu adroit », dit son biographe Roulliard, « en son génie poétique. » « Il se mêla de poésie, dit Bayle, et n’y réussit pas. » La version des vers grecs en vers français, ajoute-t-il, à laquelle Amyot se voulut assujettir dans son Plutarque, est « affreuse. » Charles IX la trouvait grossière, « en quoi, dit Roulliard, son opinion a esté suivie de beaucoup d’aultres. » Amyot n’a pas même eu, à cet égard, l’espèce d’adresse que donnait aux auteurs les plus médiocres l’habitude générale au xvie  siècle d’écrire en vers ; outre que, dans la traduction des poëtes grecs, les analogies des deux langues étant beaucoup plus rares, il lui arrive plus souvent d’éteindre l’original que d’enrichir sa propre langue. […] Doué d’une imagination vive et poétique, qui se représentait les idées comme des objets et colorait les abstractions elles-mêmes ; plein de finesse et de raison, riche de son fonds et du fonds antique, il trouva la prose à peine sortie du berceau, hardie et aventureuse comme tout ce qui commence ; il la plia aux caprices de sa pensée, et l’enrichit de tours originaux qui prirent cours en son nom.

1170. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Personne ne voulait admettre que l’histoire des hommes et des peuples est pleine d’inattendu, et que ces dieux dont l’Italie accompagne ses guerriers, ne sont qu’un symbole poétique d’une force réelle et mystérieuse, adverse ou contraire, qui secourt ou terrasse les êtres. […] Nietzsche n’est point une idole ; c’est une superbe intelligence et surtout une âme magnifiquement poétique, mais comme les plus belles barques traînent parfois des herbes immondes, Nietzsche traîne après lui le nietzschisme.

1171. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Mais, la concession une fois faite à l’artiste, son devoir est de se tenir dans les limites, assez larges, d’ailleurs, de la vraisemblance poétique. […] Elle fit beaucoup pour la défense du compositeur et publia plusieurs ouvrages sur lui dont : Richard Wagner et son œuvre poétique, depuis Rienzi jusqu’à Parsifal en 1882, Le collier des jours et Le troisième rang du collier en 1909 (dans lequel elle raconte son voyage et sa rencontre avec le compositeur).

1172. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Remarquons surtout la poétique apparition de ce motif d’Harold à la fois noble, sombre et tendre, dans la marche des pèlerins (dans un rhythme allongé cette fois), la sérénade (de même, pendant qu’en même temps le cor anglais chante la mélodie de la sérénade) et l’orgie des brigands. […] Voici maintenant cette admirables Invitation à la panse de Weber, le Carnaval de Schumann et ses ravissants impromptus à quatre mains ; les Scènes d’Orient, op. 66, (1848) où le retour fugitif du thème de te délicieuse quatrième pièce dans le sixième et dernier morceau est de l’effet le plus poétique.

1173. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

L’auteur n’a pas « l’intention de donner un exposé suivi et complet du mouvement poétique au xixe  siècle ». […] Honorat de Bueil, seigneur de Racan, est la seule âme poétique égarée dans le premier Parnasse, groupe d’ouvriers probes, trop consciencieusement appliqués au martelage des syllabes et à l’ajustage des stances pour se donner le loisir de rêver.

1174. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

Ne voulant pas mêler à cet entretien tout familier et tout poétique un autre sujet littéraire, j’insère en note, à la suite de ces vers, un morceau en prose écrit en 1848, à peu près sous les mêmes impressions, et qui n’a jamais été imprimé dans mes œuvres générales. […] J’avais douze ans, j’en avais vingt, j’en avais trente ; regards de ma mère, voix de mon père, jeux de mes sœurs, entretiens de mes amis, premières ivresses de ma vie, aboiements de mes chiens, hennissements de mes chevaux, expansions ou recueillements de mon âme tour à tour répandue ou enfermée dans ses extases, matinées de printemps, journées à l’ombre, soirées d’automne au foyer de famille, premières lectures, bégayements poétiques, vagues mélodies : tout se levait de nouveau, tout rayonnait, tout murmurait, tout chantait en moi comme ce chant de résurrection, comme l’Alleluia trompeur qu’entend Marguerite à l’église le jour de Pâques dans le drame de Gœthe.

1175. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

III, chap. 8] L’auteur du Génie de l’homme, M. de Chênedollé, a reproduit en très beaux vers quelques traits de ce chapitre, dans un des plus brillants morceaux de ses Études poétiques, intitulé Bossuet :       Ainsi quand, défenseur d’Athène,       Au plus redoutable des rois, Jadis l’impétueux et libre Démosthène Lançoit, brûlant d’éclairs, les foudres de sa voix ;       Ou quand, par l’art de la vengeance,       Armé d’une double puissance, Il réclamoit le prix de la couronne d’or, Et pressant son rival du poids de son génie,       Sous son éloquence infinie,       L’accabloit, plus terrible encor. […] V, chap. 4] Voici encore un fragment poétique emprunté aux harmonies du Génie du christianisme ; il est extrait d’un poème de M. 

1176. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Je vais essayer en quelques mots de vous donner une idée de la poétique suivie par tous les auteurs de mon temps jusqu’au moment où il vous a plu de commencer votre révolution. […] J’en reviens, Monsieur, au talent poétique que je me plais à vous reconnaître dans tout autre genre que celui du théâtre ; mais comme je crois que si vous avez échoué sur la scène, c’est que vous êtes parti d’un faux principe, je crois de même que du moment où vous voudrez l’abandonner et revenir à la raison de nos pères, vous retirerez un grand avantage de votre conversion.

1177. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

C’est une boutade de La Fontaine ; mais au point de vue de l’histoire littéraire et des idées poétiques, ou même des idées philosophiques dans l’histoire littéraire, le passage est assez curieux. […] La lutte du jour et de la nuit, soit au crépuscule du matin, soit au crépuscule du soir, c’est une des idées poétiques qu’il caresse sans cesse et qu’il a le plus souvent exprimée, toujours avec une certaine variante, variante heureuse.

1178. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Ferrari n’est pas seulement un historien réussi… quelquefois, ou un philosophe échoué presque toujours : c’est aussi un poète à sa manière, ou du moins une tête d’une organisation poétique. […] Qui refuse à l’auteur de l’Histoire de la Raison d’État et des Révolutions d’Italie ce rare assemblage de facultés qui forment son talent d’originalités complexes et font de lui une sorte de génie composite, un grand artiste, abstrait et poétique, qui prend l’histoire comme un matras et la pétrit à sa fantaisie, quitte à prendre, dans une suprême duperie, pour une éternelle vérité, cette forte fantaisie qu’il a imprimée sur l’histoire ?

1179. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Démon du goût et de l’irritabilité littéraire ; démon de l’inspiration poétique, et même de la correction ; démon de la justice et de la tolérance contre les persécuteurs ; démon de la civilisation, du luxe et de l’industrie (quand, par exemple, il veut vendre et placer partout ses montres du pays de Gex), il a en lui la légion démoniaque au complet ; il fait tout enfin par démon, par accès et verve.

1180. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

Il s’est écrit depuis des années bien des batailles de Waterloo : il y en a eu de nettes et de patriotiques, de savantes et de passionnées, de fougueuses et de brillantes, de poétiques et de souverainement, j’allais dire d’outrageusement pittoresques.

1181. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

— Une étincelle poétique de M. de Pongerville, qui faisait maintenant appel à la critique dans la langue des dieux, au nom de Lucrèce, fit écrire à M. 

1182. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

Toutefois, pour être juste, il reste encore à la critique, après le triomphe incontesté, universel, du génie auquel elle s’est vouée de bonne heure, et dont elle voit s’échapper de ses mains le glorieux monopole, il lui reste une tâche estimable, un souci attentif et religieux : c’est d’embrasser toutes les parties de ce poétique développement, d’en marquer la liaison avec les phases qui précèdent, de remettre dans un vrai jour l’ensemble de l’œuvre progressive, dont les admirateurs plus récents voient trop en saillie les derniers jets.

1183. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Tant qu’on reste en effet sur le terrain moyen des aventures humaines dans la zone mélangée des malheurs et des passions d’ici-bas, comme l’ont fait Le Sage et Fielding, on peut garder une neutralité insouciante ou moqueuse, et corriger les larmes qui voudraient naître par un trait mordant et un sourire ; mais dès qu’on gravit d’effort en effort, d’agonie en agonie, aux extrémités funèbres des plus poétiques destinées, le manque d’espérance au sommet accable, ce rien est trop, ce ciel d’airain brise le front et le brûle.

1184. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

En un mot, la clef de bien des destinées poétiques, à ce second âge de développement, se trouverait dans celle relation étroite avec la vie.

1185. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Mais c’est un spectacle trop grandiose et trop rare en ce temps-ci pour ne pas l’admirer et s’incliner d’abord devant, dût-on argumenter et analyser ensuite, que cette trempe de caractère poétique, cette vaillance presque fabuleuse dans l’art qui, depuis tantôt douze ans, combat, construit et conquiert.

1186. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Troplong : De la chute de la République romaine »

Dans cette improvisation historique nouvelle, l’auteur a fait preuve, une fois de plus, de ce talent de peindre en courant, de deviner au risque d’imaginer, de faire vivre des portraits, de dramatiser des scènes, et de verser l’émotion poétique, romanesque même, dans de graves récits.

1187. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

Dans toutes les langues, la littérature peut avoir des succès pendant quelque temps, sans recourir à la philosophie ; mais quand la fleur des expressions, des images, des tournures poétiques n’est plus nouvelle ; quand toutes les beautés antiques sont adaptées au génie moderne, on sent le besoin de cette raison progressive qui fait atteindre chaque jour un but utile, et qui présente un terme indéfini.

1188. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre premier. Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? » pp. 9-27

. — Vous êtes singuliers, vous autres philosophes modernes ; vous blâmez les poétiques, parce que, dites-vous, elles enchaînent le génie ; et actuellement vous voudriez que la règle de l’unité de temps, pour être plausible, fût appliquée par nous avec toute la rigueur et toute l’exactitude des mathématiques.

1189. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

N’est-ce pas une puissance étrange que ce talent qui nous les rend sensibles, qui les relie entre eux, qui, en dépit du siècle, amenant les dieux et les animaux dans la cité poétique, rassemble tous les êtres de la nature et la nature elle-même en une comédie universelle, les transforme et les proportionne suivant une idée maîtresse et pour un seul dessein ?

/ 1792