Le roi m’a donné pour mes étrennes, mon cher confrère, le premier de tous les biens, la liberté, et la permission de lui faire ma cour, qui est le plus précieux et le plus cher de tous pour un Français comblé des bienfaits de son maître.
Il est à croire, puisqu’ils voulaient perdre notre Europe et la remettre en friche par les dissensions et par les guerres, que les dieux, dans leur indulgence, préparaient un asile aux peuples fugitifs, et que c’est à cette fin qu’aux approches de ce siècle, du sein des vastes mers, ils ont fait jaillir un monde : — un monde vierge, humide encore, qui d’abord ne pouvait, dit-on, supporter qu’à peine les traces légères de quelques races errantes, et où maintenant le sol facile appelle la charrue, où les champs illimités n’attendent qu’un maître.
Petitot, la citation parallèle ; ce n’est, comme on le pense bien, qu’un très faible échantillon ; c’est aux curieux à pousser plus loin et dans le même sens une comparaison plus ample, qui ne fera que confirmer le premier aperçu : Charles, dit Duclos, était doux, facile, généreux, sincère, bon père, bon maître, digne d’être aimé et capable d’amitié.
Si Gacon dit vrai, Despréaux en aurait témoigné à La Motte une si vive colère que celui-ci n’osa se déclarer du vivant du maître, et qu’il attendit que le vieux lion fût mort pour montrer les dents.
Les Pères de l’Église lui furent donc les meilleurs maîtres pour apprendre à vieillir sans cesser d’espérer.
En voici un encore, l’aimable Félix Mendelssohn, « le puissant et doux maître du piano » (comme l’appelait Gœthe), qui voyageant en Italie, et rencontrant à Rome Horace Vernet directeur à la Villa Médicis, va nous donner l’impression la plus fidèle et la mieux sentie de cette nature heureuse et de cette mouvante existence : « (Rome, 17 janvier 1831.)
On retrouvait dans le préfet de Mayence le vieux conventionnel du Comité de salut public, avec sa frugalité et sa laboriosité toute républicaine. » Au dîner de l’Empereur où le préfet était invité et en attendant que le maître eût paru, il faut entendre Jean-Bon sous son costume de préfet le plus modeste possible, et, sauf l’habit, tout en noir, bas noirs, cravate noire, rendre raillerie pour raillerie à la troupe dorée qui souriait de sa tenue et de son peu de cérémonie.
Voici ce jugement mémorable et souvent cité : « Je vis, je ne fis que voir, dit-elle en parlant d’un de ses voyages à Paris, en février 1791, le puissant Mirabeau, Bétonnant Cazalès, l’audacieux Maury, etc. » ; et, se reprenant à ce nom de Mirabeau, elle ajoutait en manière de rétractation et de repentir : « Le seul homme dans la Révolution, dont le génie pût diriger des hommes, impulser une assemblée : grand par ses facultés, petit par ses vices, mais toujours supérieur au vulgaire et immanquablement son maître dès qu’il voulait prendre le soin de le commander.
Cette basse continue du maître éteindrait mon goût de chanter.
Je ne sais si l’on parla beaucoup de ces vers, mais le poëte, mais son âme, encore plus que ses écrits, était connue et goûtée des maîtres.
Le vicomte de Ségur, pour se distinguer de son frère lorsque celui-ci fut devenu maître des cérémonies sous Napoléon, et pour s’en railler un peu, écrivait volontiers chez ses amis : Ségur sans cérémonies.
Trois scènes principales, et qui font nœud, me paraissent excellentes et d’un comique très-net, très-vigoureux : ce sont celles de Bolingbroke avec la duchesse, au premier, au second et au quatrième acte, lorsque, maître de son secret, il se fait fort, par trois fois, de la contraindre à le servir.
Après tout, aux diverses époques de la république expirante ou de l’empire, dans les rares intervalles de liberté comme sous la censure des maîtres, il n’y avait à Rome que le journal en quelque sorte rudimentaire, un extrait de moniteur, de petites affiches et de gazette de tribunaux ; le vestige de l’organe, plutôt que l’organe puissant et vivant.
Successivement nommé au Corps législatif, à l’Institut, au Conseil d’État et au Sénat, grand maître des cérémonies sous l’Empire, nous le perdons de vue à cette époque au milieu des grandeurs qui le ravissent aux lettres, mais non pas à leur amour ni à leur reconnaissance : une élégie de madame Dufrenoy a consacré le souvenir d’un bienfait, comme il dut en répandre beaucoup et avec une délicatesse de procédés qui n’était qu’à lui.
Venait-il chercher des inspirations politiques sous les arbres à l’ombre desquels son maître avait écrit le Contrat social ?
On se souvient de ce qu’on a senti peut-être, ou plutôt de ce que des maîtres vénérables ont dit qu’il fallait sentir.
Puis c’est le droit et l’histoire où il s’applique avec beaucoup d’ardeur, considérant expressément les grands personnages historiques comme des maîtres et des sortes de prédécesseurs dans un rôle qu’il jouera à son tour. « C’est un esprit auquel il faut de l’emploi », disait fort justement son précepteur le P.
L’esprit français s’attachant ainsi à l’esprit ancien, c’est Dante conduit par Virgile, son doux maître, dans les cercles mystérieux de la Divine Comédie.
Les meilleurs en sont même exactement à cet instant de la vie où l’homme est maître de ses plus amples forces intellectuelles, et s’ils sont les poètes d’aujourd’hui, ils sont encore les poètes de demain.
Voici le pape qui nous apparaît sous les traits de Renart, le maître fourbe, croquant de pauvres poules qui n’en peuvent mais.
» On se rappelle qu’en 1672 elle écrivait à madame de Saint-Géran : « Le maître vient quelquefois chez moi, malgré moi, et s’en retourne désespéré, jamais rebuté. » Je suis persuadé qu’il n’y a pas une âme délicate, pas une femme qui ne sente une différence entre les deux locutions, et ne se plaise à en discerner le caractère d’après les circonstances.
Jamais Scapin ne bafoua Géronte mis en sac avec l’effronterie de ce neveu turlupinant son oncle, son seigneur, le maître et le chef de sa maison.
Le père a un maître, l’art ; le fils a une maîtresse, madame Léa de Clère, une jeune femme séparée de son mari, qu’il aime avec le feu de la jeunesse et l’emportement d’un premier amour.
Une femme de Paris, Mme Du Bocage, lui avait proposé de remplacer auprès de lui Mme d’Épinay comme correspondante, pour le tenir au courant des choses et des personnes ; il refuse cette distraction et ce soulagement : Il n’y en a plus pour moi, s’écrie-t-il avec un accent qu’on ne saurait méconnaître ; j’ai vécu, j’ai donné de sages conseils, j’ai servi l’État et mon maître, j’ai tenu lieu de père à une famille nombreuse ; j’ai écrit pour le bonheur de mes semblables ; et, dans cet âge où l’amitié devient plus nécessaire, j’ai perdu tous mes amis !
Dans l’art du portrait, et sans avoir l’air d’y toucher, Mme de Caylus est un maître.
Ce M. de Malezieu, qui devint le personnage essentiel de la cour de la duchesse, son oracle en tout genre ; et de qui on parlait à Sceaux comme de Pythagore : « Le maître l’a dit », devait certes avoir plus d’une qualité ; mais il est difficile aujourd’hui de se faire une juste idée de son mérite.
Il devrait porter pour épigraphe ces vers de Bérénice : En quelque obscurité que le sort l’eût fait naître, Le monde, en le voyant, eût reconnu son maître.
Necker serait le maître.
En effet, toutes ces grandes réprimandes qu’on leur fait dans leur première jeunesse, de n’être pas assez propres, de ne s’habiller point d’assez bon air et de n’étudier pas assez les leçons que leurs maîtres à danser et à chanter leur donnent, ne prouvent-elles pas ce que je dis ?
M. de Maistre, à un certain moment, désira voir Bonaparte et s’aboucher avec lui au sujet des intérêts de son maître le roi de Sardaigne, alors si écrasé.
Son père, maître des comptes, était de Troyes, et le nom de Courcelles est celui d’un petit fief qu’il possédait tout près de cette ville.
» Le maître de la maison se leva brusquement, et tout le monde avec lui… Il faut tout lire de cette Prophétie, jusqu’au dernier mot où Cazotte se prédit à lui-même sa fin et en style plus poétique et figuré.
Là où il est sur son terrain, dans l’ordre de sa vocation, et véritablement maître, c’est quand, à propos du Manuscrit de 1814 du baron Fain (25 avril 1830), il parle des choses de la guerre, de l’art et du génie qui y président : Dans une belle opération de guerre, il y a une partie de savoir et de calcul qui n’est pénétrée que par quelques esprits ; mais il y en a une autre qui produit dans toutes les imaginations l’émotion du beau, et qui est toute en spectacle.
. — Les auteurs répondront, pour leur défense, qu’ils ont été entraînés dans cette voie par deux anecdotiers, leurs maîtres : Plutarque et Saint-Simon.
La gloire, le pouvoir, la richesse, le succès ne s’acquièrent en dernière analyse qu’en suscitant dans des âmes étrangères, des images, des enchaînements de pensées et de sentiments, qui, remplaçant ou doublant les états d’esprit appartenant en propre à ces êtres subjugués, donnent à leur volonté, à leurs muscles, à leur sensibilité, des impulsions qui sont utiles à leur maître.
Macbeth commence par ce parricide, tuer Duncan, tuer son hôte, forfait si terrible que du contre-coup, dans la nuit où leur maître est égorgé, les chevaux de Duncan redeviennent sauvages.
Fière et magnanime avec des hypocrisies étranges, grande avec pédanterie, hautaine avec habileté, prude avec audace, ayant des favoris, point de maîtres, chez elle jusque dans son lit, reine toute-puissante, femme inaccessible, Élisabeth est vierge comme l’Angleterre est île.
L’auteur s’éloigne quelquefois des sentimens de nos meilleurs maîtres, mais c’est avec tous les égards qu’on leur doit.
Son grand tableau de bataille l’a élevé au rang d’académicien ; et c’est ma foi à bon titre ; c’est le plus beau, celui qui caractérise le mieux un grand maître.
Le christianisme, naissant au sein d’un peuple grossier, promettant à ses apôtres les fers et la mort ; annonçant à Rome et à Athènes, au sein des lumières, la morale d’un homme qui venait d’expirer sur la croix, renversant les idoles jusque dans les métropoles du culte idolâtre ; contredisant tous les orgueils de l’homme ; les chrétiens, mourant comme leur maître, et donnant leur mort même pour preuve de leur mission ; consentant ainsi à l’ignominie du supplice ou à la honte du mensonge : tel est le tableau que présente l’établissement du christianisme.
Des lois comme, celle qui, intitulée Maître et Employé, reconnaissait, naguère encore, en pleine Angleterre du xixe siècle, l’inégalité légale de l’ouvrier et du patron, apparaissant, comme de moins en moins tolérables.
et même, après cet espoir trompé, quelle vertu guerrière, quelle effusion de sang généreux au profit d’un maître !
Au lieu d’approfondir les sentiments et de les chercher dans leur propre inspiration, ils s’attachaient à copier les formes du style de leur maître. […] Dans les maîtres du pouvoir, elle avait plus d’inconvénient que sous la plume d’un auteur. […] Qu’on se figure un vieillard dont l’esprit avait embrassé tant de choses, et presque toujours avec succès, jouissant tranquillement de toute sa renommée ; revenu des idées imprudentes de sa jeunesse ; rappelant une nouvelle génération au bon goût et au sentiment de l’ordre et des convenances, dont il avait vu les derniers restes ; maître d’une grande fortune acquise sans cupidité, et consacrée par des bienfaits environné des hommages de l’Europe, dont l’élite venait visiter sa retraite : voilà le rôle que Voltaire aurait pu jouer. […] C’est ainsi qu’en admirant la suite et l’ensemble du livre de la Grandeur et de la Décadence des Romains, nous avons le malheur de ne pouvoir plus entrer complètement dans ce système de vertu et de prudence que l’imagination de Montesquieu a cru voir présider, de siècle en siècle, aux destins et à la gloire des maîtres du monde ; soit qu’en l’adoptant nous craignions de nous voir trop inférieurs à ce tableau héroïque ; soit que le spectacle de notre âge nous rende sincèrement incrédules. […] Des disciples nombreux se pressaient sur leurs pas, et, de même que le maître avait consacré sa vie à rechercher la vérité, les disciples consacraient la leur à étudier, à recueillir, à répandre les paroles du maître.
Des dessins de Férogio, une charmante esquisse d’Hébert, un blond Baudry, une Nuit de Rousseau, qui est comme le « Songe d’une nuit d’été » de Fontainebleau, des Chassériau, des fleurs de Saint-Jean, une Macbeth de Delacroix ; enfin, deux petits tableaux de femmes nues, dont le faire va de Devosge à Devéria, — deux tableaux du maître, chez lequel Gautier apprit la peinture au faubourg Saint-Antoine. […] Nous serons, tour à tour, chacun de nous trois, Job sur son fumier avec ses amis. » Et puis à propos de Psyché, dont il a donné l’idée de la reprise chez Jeanne Destourbet, dans une causerie avec le prince Napoléon, reprise qu’il voulait tourner vers la résurrection du côté inconnu de Molière, maître de ballets, arrangeur de divertissements, Gautier se met à rejuger Le Misanthrope, une comédie de collège de Jésuites, pour la rentrée des classes : « Ah !
Trop d’autres illustres, trop d’autres, mes maîtres, ont offert des modèles définitifs du genre, pour que je me permette de les ignorer. […] Les Maîtres d’autrefois.
De ce qu’un orateur adopte d’abord les passions de son auditoire pour arriver ensuite à s’en rendre maître, on ne conclura pas que suivre soit la même chose que diriger. […] De ce que le fils d’un maître d’armes est devenu, beaucoup plus vite que son père, un tireur excellent, on ne peut conclure que l’habitude du parent se soit transmise à l’enfant, car certaines dispositions naturelles en voie d’accroissement ont pu passer du germen producteur du père au germen producteur du fils, grandir en route par l’effet de l’élan primitif et assurer au fils une souplesse plus grande que celle du père, sans se soucier, pour ainsi dire, de ce que le père faisait. […] Maintenant, supposons nos yeux ainsi faits qu’ils ne puissent s’empêcher de voir dans l’œuvre du maître un effet de mosaïque.
En fait de poésie et de critique poétique, je ne suis qu’un amateur ; Robert de Souza, un maître, au sens rigoureux du mot, “notre génial abbé Rousselot” — m’écrivait hier le P. […] Pour une cause ou pour une autre, j’hésitais encore à pousser la leçon de ces maîtres jusqu’à ses dernières conséquences, et j’attendais sans doute Valéry. […] Mon incompétence, en matière de philosophie technique m’empêche d’ajouter ici le témoignage des vrais maîtres.
Comme l’architecte est le maître des matériaux, la danseuse la maîtresse des mouvements de son corps, le poète possède les mots de la langue, avec leurs valeurs, leur sonorité, leur timbre, leur qualité. […] Mallarmé, comme Baudelaire, a vaincu, on ne voit dans sa « difficulté » qu’un culte mystique de la poésie, et les moins mallarméens reconnaissent qu’il a écrit une quarantaine de vers qui sont parmi les plus beaux de la langue française ; Valéry bénéficie de la trouée qu’a faite son maître. […] Il faut que le lecteur croie le poète, comme l’enfant par l’aigle ou l’homme par le cheval, emporté par un mouvement dont il n’est pas maître, par une âme étrangère qui l’« exerce ».
Magendie ayant été mon maître, j’ai le droit de m’enorgueillir de ma headendance scientifique, et j’ai le devoir de chercher, dans la mesure de mes forces, à poursuivre l’œuvre à laquelle resteront attachés les noms des hommes illustres que j’ai cités. […] Nous chercherons à déterminer exactement les conditions de manifestation des phénomènes de la vie, afin de nous en rendre maîtres comme le physicien et le chimiste se rendent maîtres des phénomènes de la nature inorganique14. […] C’est par cette étude seule qu’il pourra saisir le mystère de la nutrition intime et arriver à se rendre maître de ces phénomènes de la vie, ce qui est son but suprême.
Il put s’y développer avec plus d’étendue, et y offrir une place à ses amis, à l’abbé Morellet qu’il voulait bien appeler son maître et qui lui répondait : « Discipule supra magistrum » ; surtout au jeune Adrien de Lezay qu’on a vu périr préfet de Strasbourg en 1814, et qui s’exerçait alors avec vivacité et talent sur toutes les questions à l’ordre du jour.
Jusqu’à cette époque de son histoire, Froissart avait plus ou moins suivi la Chronique de Jean le Bel : c’est à partir de l’année 1356 et de la bataille de Poitiers seulement, qu’il commence à cheminer seul, et, dès les premières pages, il débute par un grand tableau digne d’un maître.
Revoyons de près nos maîtres, restituons leur vraie parole, faisons, ne rougissons pas de faire pendant quelque temps des éditions, voire même des vocabulaires : excellent régime que je propose, même aux auteurs originaux, pour se retremper durant une saison.
Il conserva toute sa vie un tendre penchant pour ses premiers maîtres, et les impressions qu’il avait reçues d’eux ne le quitteront jamais.
Tout ce qu’il faut de mouvement à la vie sociale, tout l’élan nécessaire à la vertu existerait sans ce mobile destructeur : mais, dira-t-on, c’est à diriger les passions et non à les vaincre, qu’il faut consacrer ses efforts ; je n’entends pas comment on dirige ce qui n’existe qu’en dominant : il n’y a que deux états pour l’homme, ou il est certain d’être le maître au-dedans de lui, et alors il n’a point de passions ; ou il sent qu’il règne en lui-même une puissance plus forte que lui, et alors il dépend entièrement d’elle.
Point de personnage qui n’y soit un orateur accompli ; chez Corneille, Racine et Molière lui-même, un confident, un roi barbare, un jeune cavalier, une coquette de salon, un valet, se montrent passés maîtres dans l’art de la parole.
Son maître, le peintre Ghirlandaio, obtint pour lui de Laurent la permission d’aller dans ses jardins étudier les beaux vestiges d’art qui arrivaient de Grèce.
Dans les traditions religieuses, ethniques, historiques qui sont la matière de la poésie celtique, ce ne sont que voyages au pays des morts, étranges combats et plus étranges fraternités des hommes et des animaux, visions fantastiques de l’invisible ou de l’avenir, hommes doués d’une science ou d’une puissance surnaturelles, qui commandent aux éléments et savent tous les mystères, animaux plus savants et plus paissants que les hommes, chaudrons, lances, arbres, fontaines magiques, et longs écheveaux d’aventures et d’entreprises impossibles à quiconque n’est pas prédestiné pour les accomplir, servi par les êtres ou maître des objets prédestinés à en assurer l’accomplissement.
Sa conscience le met à l’abri des tentations, son caractère l’élève au-dessus de son temps, son goût est entretenu par la seule lecture des maîtres.
M. de Régnier a dépouillé aussi ses vers de leur trop inflexible éclat et, comme l’enfant de cette authentique légende, le voici maître de ses mouvements.
En attendant, je me contente d’un récit qui m’en apprend assez sur les causes de la guerre pour que je ne confonde pas cette conquête manquée avec une guerre juste, et l’ambition du roi avec la querelle de la France ; qui des luttes intérieures de la Hollande fait ressortir cette triste vérité, que l’invasion même ne réconcilie pas les partis ; qui m’intéresse aux deux nations, à la Hollande par la justice et par le respect du faible, à la France par le patriotisme et l’amour de la gloire ; qui, parmi plusieurs portraits d’un dessin aussi juste que brillant, me laisse imprimées dans l’esprit les deux grandes figures royales du siècle, Louis XIV et Guillaume III, esquissées comme certains croquis de grands maîtres, dont le crayon ne laisse plus rien à faire au pinceau.
Qu’aurait dit Tacite, si on lui eût annoncé que tous ces personnages qu’il fait jouer si savamment seraient alors complètement effacés devant les chefs de ces chrétiens qu’il traite avec tant de mépris ; que le nom d’Auguste ne serait sauvé de l’oubli que parce qu’en tête des fastes de l’année chrétienne on lirait : Imperante Caesare Augusto, Christus natus est in Bethlehem Juda ; qu’on ne se souviendrait de Néron que parce que, sous son règne, souffrirent, dit-on, Pierre et Paul, maîtres futurs de Rome ; que le nom de Trajan se retrouverait encore dans quelques légendes, non pour avoir vaincu les Daces et poussé jusqu’au Tigre les limites de l’Empire, mais parce qu’un crédule évêque de Rome du VIe siècle eut un jour la fantaisie de prier pour lui ?
Elles sentent vaguement que, dans leur intérêt même, elles auraient eu besoin d’un chef et d’un maître ; elles l’admirent lorsqu’elles le rencontrent.
A cela je répondrai : Vous pensez que pour atteindre cette vérité sublime vers laquelle vous tendez, il faut vivre en maîtres et en isolés, qu’il faut vous dépouiller soigneusement de tout ce que vous pouvez avoir de commun avec la foule.
. — Mais supposons maintenant que cet espace homogène ne soit pas logiquement antérieur, mais postérieur aux choses matérielles et à la connaissance pure que nous pouvons avoir d’elles ; supposons que l’étendue précède l’espace ; supposons que l’espace homogène concerne notre action, et notre action seulement, étant comme un filet infiniment divisé que nous tendons au-dessous de la continuité matérielle pour nous en rendre maîtres, pour la décomposer dans la direction de nos activités et de nos besoins.
C’est qu’ils cherchent à balancer un pouvoir par l’autre ; collectif ou individuel, un maître unique devient vite un tyran.
Pindare ne divinise pas ces maîtres, dont il aime le stable pouvoir ; il n’adore pas leurs passions, mais la paix de leur règne et cette magnificence qui fait de l’éclat du trône la splendeur du peuple.
C’est que Chaucer ici suit ses véritables maîtres, et qu’il est lui-même beau diseur, abondant, prompt au sourire, amateur du plaisir choisi, disciple du Roman de la Rose, et bien moins Italien que Français196. […] Si lourd et si incommode que fût l’instrument qui leur était transmis, le syllogisme, ils s’en rendirent maîtres, ils l’alourdirent encore, ils l’enfoncèrent en tout sujet dans tous les sens.
* * * — Livres magiques après tout, que ces livres de Hugo, qui, comme tous les livres de vrais maîtres, donnent, à leur lecture, une espèce de petite fièvre cérébrale. […] Le domestique, dans notre société d’égalité, n’est plus qu’un paria à gages, une mécanique à faire le ménage, que les maîtres n’associent plus à leur humanité.
Tu n’as donc pas quitté ce port de ton bonheur ; Ce soleil du matin qui réjouit ton cœur, Comme un arbre au rocher fixé par sa racine, Te retrouve toujours sur la même colline ; Nul adieu n’attrista le seuil de ta maison, Jamais, jamais tes yeux n’ont changé d’horizon, L’arbre de ton aïeul, l’arbre qui t’a vu naître N’a jamais reverdi sans ombrager son maître ; Jamais le voyageur en voyant du chemin Ta demeure fermée aux rayons du matin, Trouvant l’herbe grandie, ou le sentier plus rude, N’a demandé, surpris de cette solitude, Sur quels bords étrangers, dans quels lointains séjours Le vent de l’inconstance avait poussé tes jours. […] Il fut mon maître en éloquence, mon modèle en politique.
Et le maître opulent de l’écriture et du dire vous apparaît, comme un doge dans la débine, comme un pauvre et mélancolique Marino Faliero, joué au théâtre Saint-Marcel. […] Je ne sais, mais ma porte s’ouvrant et donnant passage à ces Allemands, les maîtres de mon foyer pour quelques jours, cette perspective me fait souffrir, ainsi que d’un mal physique. […] Thiers, pas plus que ses généraux, n’eût été maître de ce mouvement, et tout le pays aurait été entraîné dans une reprise à outrance de la guerre. […] Un des amis de Burty faisant partie du Comité public lui avait annoncé, trois ou quatre jours avant l’entrée des troupes, que le gouvernement n’était plus maître de rien, qu’on devait se rendre dans les maisons, les déménager, et fusiller les propriétaires.