Ma flûte ne sait plus, hélas, me réjouir, Mon cœur est travaillé de crainte et de désir. […] … Mais, ce qui importe, c’est le secret désir dont nous sommes travaillés. […] Montfort, lui aussi, est travaillé par le désir d’écrire des livres sacrés. […] Je ne dirai qu’une chose : ce qui constitue l’originalité des théories d’Eugène Montfort, c’est qu’il fait résider l’amour bien moins dans le désir que dans la possession. […] « … Mais le désir de l’amant ne s’éteint pas, il sent que son cœur s’exalte, il veut, il veut qu’elle soit en lui, il veut que son cœur la reçoive, la contienne, et se ferme sur elle dans une joie surhumaine.
Rien ne l’ennuie de ce qui est dans le sens de son désir. […] Mais il portait dans cette réforme sa passion même, et autant de désir peut-être de nuire aux apothicaires que d’aider à ses malades.
Mais il faut bien parler des études principales que Mme de Tracy s’était réservées pour ses dernières années, et qui semblent au premier abord en contradiction avec la vocation de la femme ; elle nous dira elle-même pourquoi elle les avait entreprises : Il y a des jours où l’on éprouve un désir passionné de revoir ceux que l’on a perdus. […] Évidemment, tout l’art de vieillir est de quitter, quand l’heure est venue, les désirs et les passions qui nous quittent ; de ne pas se faire une passion unique et fixe de celle qui n’a qu’un temps et ne doit avoir qu’une ou deux saisons ; de ne point opiniâtrer son imagination en arrière ; d’adoucir par degrés quelques-unes de nos passions, et de les terminer en goûts ; de saisir à propos, d’avancer, s’il se peut, quelques-uns de nos goûts derniers et durables et d’en faire presque des passions.
Ils sont comme le sensible Virgile qui, dans son Élysée, nous montrant les essaims innombrables des âmes bourdonnantes, avides de se replonger dans le fleuve où l’on puise avec l’oubli du passé le désir et le principe d’une existence nouvelle, s’écriait par la bouche de son héros étonné et compatissant : « Quæ miseris lucis tam dira cupido ! […] Nous le savons, tu peux donner encor des ailes Aux âmes qui ployaient sous un fardeau trop lourd : Tu peux, lorsqu’il le plaît,, loin des sphères mortelles Les élever à toi dans la Grâce et l’Amour ; Tu peux parmi les chœurs qui chantent tes louanges A tes pieds, sous tes yeux nous mettre au premier rang, Nous faire couronner par la main de tes Anges, Nous revêtir de gloire en nous transfigurant ; Tu peux nous pénétrer d’une vigueur nouvelle, Nous rendre le désir que nous avions perdu ; Oui, mais le Souvenir, cette ronce immortelle Attachée à nos cœurs, l’en arracheras-tu ?
C’est pourquoi ne point fuir le doux désir, mais le poursuivre, c’est ce que je dis à tous : l’Amour est la pierre à aiguiser de l’âme. » D’autres épigrammes (et il en est de très belles en ce genre) sont pour décrire des tableaux ou des statues. […] C’est bien elle, en effet, qui du bout de ses doigts exprime l’onde de sa chevelure ; c’est bien ce regard où luit l’éclat riant du désir, et ce sein qui, dans sa fraîcheur nouvelle, mûrit déjà7.
D’ailleurs elle a de beaux yeux et est fort bien faite ; elle est blanche, a de beaux cheveux ; beaucoup de désir de plaire, remplie d’attentions ; de l’esprit, de la vivacité ; sentant parfaitement tout son bonheur ; souhaitant passionnément de réussir dans cette Cour-ci ; une très bonne santé, point délicate de corps ni d’esprit ; encore un peu enfant ; une extrême envie de bien apprendre le français ; demandant qu’on la reprenne sur les mauvais mots qu’elle pourra dire… » Après l’avoir vue de ses yeux, il adoucit quelques traits et y ajoute en bien : « Un beau teint, assez blanche, de beaux yeux bleu foncé, un assez vilain nez, des dents qui seront belles quand on y aura travaillé, la taille très jolie ; elle se tient un peu en avant en marchant ; un peu plus grande que Madame (Madame Henriette). […] Votre Majesté rira peut-être de ce que je lui dis là, mais la bénédiction du lit, les prêtres, les bougies, cette pompe brillante, la beauté, la jeunesse de cette princesse, enfin le désir que l’on a qu’elle soit heureuse, toutes ces choses ensemble inspirent plus de pensées que de rires.
Leurs gestes étaient significatifs ; ils n’annonçaient rien de moins que le désir de voir tomber nos têtes. » De telles scènes, on en conviendra, en dépit de toutes les descriptions d’un Chateaubriand, sont bien faites pour gâter la poésie du lieu et l’enchantement de la perspective. […] « Les Espagnols, qui se montraient de temps à autre dans notre prison, témoignèrent le désir de voir le général, à ses derniers moments, approcher des sacrements, et comme ils insistaient sur ce point, disant qu’en cas de refus les autres prisonniers pourraient en être plus maltraités, j’en parlai amicalement à notre malade.
Cet épisode des Mémoires, sans rien apprendre de bien nouveau, est curieux et s’ajoute, pour le confirmer, à ce que l’on connaît de Barnave : « Je savais, dit Malouet, où il en était vis-à-vis du roi ; je savais qu’il y avait de sa part conviction de ses erreurs, désir sincère de les réparer ; mais il ne convenait pas de paraître instruit de ses projets, s’il évitait de s’en expliquer avec moi. […] Voici ce qu’il me dit : Sauf une douzaine de députés tels que Potion, Rewbell, Buzot, Robespierre, Dubois de Crancé, etc., tous les constitutionnels ont le même désir que moi de terminer la Révolution et de rétablir l’autorité royale sur les plus larges bases.
Cette fierté tenait à sa nouvelle situation, au désir de garder son rang. […] Le besoin de se procurer des vivres, et aussi l’humeur ardente, le désir de gloire, le poussaient sans cesse, du côté de Kœnigsberg, à des mouvements et à des entreprises que l’Empereur n’avait pas ordonnés.
Vers 1828, à cette époque que nous avons appelée le moment calme et sensé de la Restauration, le public avait fait de grands progrès ; l’exaspération des partis, soit lassitude, soit sagesse, avait cédé à un désir infini de voir, de comprendre et de juger. […] Là où d’autres eussent mis leur âge d’or, tâchant de l’éterniser, lui, ardent et inquiet, s’était vite retrouvé avec de plus vastes désirs.
Pourtant, de cette habitude générale de continuellement juger le passé au point de vue du présent, était né en quelques esprits élevés le désir bien naturel d’une méthode contraire, où l’on irait d’abord à l’objet pour l’étudier en lui-même et en tirer tout ce qu’il contient. […] M. de Barante, dès son premier coup-d’œil, s’était montré choqué des abus de la méthode dite philosophique en histoire ; il fut conduit au désir d’en purger absolument le noble genre, et de lui rendre, s’il se pouvait, son antique sincérité.
L’âme seule lui suffisait ou du moins lui semblait suffire : mais quand l’ami lui témoigna sa souffrance, elle ne résista pas, elle donna tout à son désir, non parce qu’elle le partageait, mais parce qu’elle voulait ce qu’elle aimait pleinement heureux. […] Il l’entourait d’un soin affectueux, d’une fraîcheur de désir et de jeunesse, que son sentiment n’avait jamais connue d’abord dans cette vivacité, mais qu’une fois averti, il puisait avec vérité dans sa profondeur.
Jouet d’une basse et odieuse intrigue… (et ici suivent quelques détails particuliers)…, — le temps me vengera, me disais-je, c’est inévitable ; et je brûlais du désir de voir ce temps s’écouler, et mon âme se livrait à un sentiment haineux, à un espoir, à un désir de vengeance qui troublaient toutes mes facultés morales, qui minaient, qui consumaient toutes mes facultés physiques… j’étais malheureux, bien malheureux.
Ce sont des corps, mais aussi des esprits et des âmes dont il parle : il ne se prononce pas sur la cause des phénomènes, mais il lui suffit que tout le monde s’entende sur les ordres de faits désignés par les noms d’idées, désirs, affections, volontés. […] Nulle psychologie, du reste, dans les bonshommes qui peuplent ses tableaux : quelques états de sensibilité, les siens, aspirations vagues et douloureuses, désirs de l’impossible, regrets de l’écoulé, nostalgies, désespérances, toutes les nuances enfin de cette disposition élémentaire qu’on peut appeler l’égoïsme sentimental.
La Rochefoucauld, en poursuivant de son analyse amère et impitoyable tous les déguisements de notre mauvaise nature, en nous faisant peur de nos mouvements les plus naïfs, aurait pu nous ôter jusqu’au désir de l’innocence, à force de nous prouver qu’elle est impossible. […] Suard s’en doute bien un peu ; mais, dans le pieux désir de ménager une gloire si populaire, il aime mieux faire tort aux pensées de leur vulgarité qu’à l’auteur. « La justesse d’une pensée, dit-il, la rend triviale. » C’est une excuse d’apologiste, et non une vérité.
Tendances multiples et divergentes en apparence, mais qui partent toutes du même principe : du désir de se distinguer de la foule. […] Le désir de plaire au monde a poussé maintes fois écrivains et orateurs à sacrifier les qualités fortes et solides aux qualités douces et brillantes.
Mais sous cette oppression s’éveille le désir de la liberté ; des abus de pouvoir provoquent le mécontentement ; et ce sont d’abord des attaques sourdes, des railleries légères ; l’ironie, l’arme des faibles, est tournée contre les prêtres, les moines, les prélats ; puis les attaques se font plus vives, plus hardies, plus franches ; de la satire contre les personnes et la discipliné ecclésiastique, on passe à la critique du dogme ; on vise ainsi la religion au cœur. […] Ils bannissent de leurs écrits et de leurs sermons la vanité, le désir de briller.
Aujourd’hui je n’y mets rien, je l’avoue, qu’un sincère désir de voir et de montrer les choses et les personnes telles qu’elles sont, telles du moins qu’en ce moment elles me paraissent. […] Elle engage son amant à moins boire, à ménager ce nectar qui l’énerve, et elle ajoute : De mes désirs mal apaisés, Ingrat, si tu pouvais te plaindre, J’aurais du moins, pour les éteindre, Le vin où je les ai puisés.
je suis si faible et si changeante, que mes meilleurs désirs ressemblent à cette fleur des champs dont parle votre prophète-roi, qui fleurit le matin et qui sèche le soir. » Pour se préserver de ses rechutes, de ses faiblesses, « du doux poison de plaire à ce monde et de l’aimer », elle invoque un de ces coups de miséricorde qui affligent, humilient, et à la fois retournent vers Dieu une âme. […] Quand je considère ces choses, j’entre dans le désir de me taire et de me cacher… pauvre canal où les eaux du ciel passent, et qui à peine en retient quelques gouttes !
Présents ou absents, leur moindre désir était pour lui une loi imprescriptible. […] Après 1815, quand la maison de Savoie est rétablie dans son antique héritage, M. de Maistre, à la veille de rentrer dans sa patrie, mais lésé lui-même dans sa fortune et à peu près ruiné dans son patrimoine, ne forme plus que le vœu du patriarche ; il nous laisse voir l’unique fond de son désir au milieu de cet ébranlement de l’Europe, où le volcan ne se ferme d’un côté que pour se rouvrir d’un autre : « Ma famille, mes amis et mes livres suffisent aux jours qui me restent, et je les terminerais gaiement si cette famille ne me donnait pas d’affreux soucis pour l’avenir. » Faisant allusion à cette vivacité qu’il portait volontiers en tout, et dont il ne prétend pas s’excuser : Cependant, écrivait-il à un ami, si j’avais le plaisir de vivre quelque temps avec vous sous le même toit, vous ne seriez pas peu surpris de reconnaître en moi le roi des paresseux, ennemi de toute affaire, ami du cabinet, de la chaise longue, et doux même jusqu’à la faiblesse inclusivement !
N’ayant en tout ceci d’autre désir que d’être vrai et d’autre rôle que d’exposer fidèlement un caractère auquel le mot de traître ne convient pas, un de ceux auxquels il s’applique le moins, je demande à bien définir la question politique d’alors, telle que nos souvenirs calmés nous la laissent voir à cette distance, et je veux d’abord l’élever à sa juste hauteur. […] Mme de Lavalette s’agenouilla en vain ; les passions du jour étaient plus fortes que le désir de pardonner.
Ce signalement que nous donne Choisy de l’abbé de Cosnac au physique, répond bien à ce qu’il se montre dans le courant de ses Mémoires : n’y cherchez pas d’élévation, aucune idée morale, distincte de l’intérêt et du désir d’arriver ; entré domestique, comme on disait alors (et sans idée de défaveur), auprès du prince de Conti, il ne songe qu’à plaire à son maître, à lui devenir agréable, utile, puis nécessaire, et à s’y procurer ses propres avantages. […] Ses désirs, à l’âge de vingt-deux ans, sont uniquement tournés du côté de la fortune : « Je menais une vie assez douce, dit-il, sans ennemis, content de mon maître, et même il me semblait être assez en état d’obtenir de lui quelque grâce.
» L’auteur de l’Histoire des Causes nous met sous les yeux les rapports, les déclarations écrites, l’opinion sur le peuple des hommes qui le représentaient aux États-Généraux, et ces déclarations affirment qu’il ne poussait pas alors à la Révolution, qu’il n’en avait ni le désir ni la pensée. […] Ainsi on a lu avec éblouissement l’Histoire des Girondins, ces poésies trompeuses d’un grand poète qui se trompe lui-même, et avec les horreurs du dégoût sinon avec les frénésies d’un désir partagé, cette Histoire de Michelet, qui, je le dis avec tristesse, est un grand crime, si elle n’est pas une honteuse folie.
Mais une main puissante s’est étendue des cieux, et, secourable, elle l’a transféré dans une atmosphère plus douce, et l’a conduit, par les sentiers de l’espérance, aux campagnes éternelles, vers le prix qui comble nos désirs, là où la gloire passée n’est plus que nuit et silence. […] Son désir audacieux s’épouvante de sa faiblesse ; et, arrêtée par un profond vertige, elle épuise sa force en convulsions, déprimant aujourd’hui ce qu’hier elle exaltait, et faisant inutilement trembler le monde. » Nous n’osons suivre le poëte dans toute sa pieuse ferveur, ne pouvant lui emprunter le charme de son harmonie.
On y arrive aussi par le désir, et l’abstinence use plus que l’excès… Il faudra cent mille siècles de néant pour me reposer de la fatigue de ces vingt années… J’ai vécu dans le milieu le plus calme et le plus chaste. […] Pour assouvir son impossible désir, non seulement il avait peiné sur des sujets étranges qu’il traitait avec des procédés de style jusque alors à peu près inconnus, mais il avait épuisé sa vie et sa santé à courir hors des chemins battus, cherchant le singulier et le factice jusque dans les détails de sa toilette. […] Nous sortons de l’amour avec un abattement de l’âme, un affadissement de tout l’être, une prostration du désir, une tristesse vague, informulée, sans bornes. […] Ou plutôt, on peut dire qu’il ne voulait et ne cherchait rien, mais qu’il prenait pour des désirs une indéfinissable activité de névrosé qui s’agitait en lui et le secouait avec fureur sans but précis et sans détermination fixe. […] Je n’éprouve même vis-à-vis d’aucun jupon le désir de curiosité qui vous pousse à dévoiler l’inconnu et à chercher du nouveau311.
Puis, cette inquiétude grandit, et le désir, et la passion, et la colère. […] Travaillé de scrupules religieux, du désir de vivre et d’écrire en chrétien, il voulut qu’une idée chrétienne ressortît de sa tragédie. […] Désir, inquiétude, terreur, pitié, espérance et désespoir, joie et souffrance, tout cela ne se rencontre pas moins, j’imagine, dans la lutte intérieure avec Dieu que dans quelque bourgeoise intrigue d’ambition ou d’amour. […] Nous devons tous faire les mêmes rêves, ou à peu près, car nous sommes tousles mêmes êtres chétifs, et consumés de vains désirs ; bornés, éphémères, et dévorateur du temps et de l’espace. […] Les deux vaillants poètes pousseraient-ils le désir de tout arranger et l’humanité boulevardière jusqu’à supprimer le crucifiement ?
Le premier volume des œuvres ne paraîtra qu’après celui-ci, qui est le second : l’inconvénient de ce mode de publication n’a point échappé à l’éditeur ; mais on a cru devoir se conformer à un article du testament d’Auguste Fabre, qui a exprimé le désir qu’une médaille et un portrait de son frère Victorin, et le bas-relief du monument funèbre, fussent gravés et placés au frontispice, du tome Ier des œuvres ; il a fallu du temps, et on a éprouvé des retards pour l’exécution de ces divers travaux.
Vinet lui-même, considéré dans son œuvre et dans sa vie, qu’il offrait en quelque sorte l’image d’un Pascal réduit et modéré, d’un Pascal plus aisément circoncis dans ses essors et dans ses désirs, mais dont le centre moral était le même et dont le cœur était comme taillé sur le cœur de l’autre.
Cette pièce, pourtant, n’est pas toujours onction et douceur ; elle devient parfois une extase, un délire, la voix du poète s’élève, éclate, et il s’écrie avec la trompette des anges, avec la lèvre ardente des prophètes : Mon âme a l’œil de l’aigle, et mes fortes pensées Au but de leurs désirs volant comme des traits, Chaque fois que mon sein respire, plus pressées Que les colombes des forêts, Montent, montent toujours, par d’autres remplacées, Et ne redescendent jamais !
Celui qui s’est vu déchiré par des affections tendres, par des illusions ardentes, par des désirs même insensés, connaît tous les genres d’infortunes, et trouve à les soulager, un plaisir inconnu à la classe des hommes qui semblent à moitié créés, et doivent leur repos seulement à ce qui leur manque.
Les odes de La Motte s’appellent le Devoir, le Désir d’immortaliser son nom, la Bienfaisance, l’Émulation : ce sont des dissertations méthodiques, parfois ingénieuses, où la part de la poésie se marque par l’emphase, la dureté, la cacophonie, l’effort sensible pour ne pas parler comme tout le monde.
Et puisqu’on veut bien nous accorder que les Naturistes apportent en effet une éthique imprévue et une inédite méthode de vie, je ne crains pas trop de m’avancer en déclarant que leur désir d’art populaire, autochtone, païen et rationnel, contribuera énormément à une réforme dans l’expression, qui, pour être très différente de celle de Malherbe, n’en sera pas moins considérable.
Je n’avais rien vu du tout, et j’éprouvais un désir fou de m’en aller.
les êtres vils qui rêvent « le roman d’un jeune homme pauvre » et qui l’écrivent, dévoilant naïvement toute la pourriture de leur désir.
L’amour que nous inspirent les statues de Rodin et les épopées de Zola garantit la véracité de ce désir.
On leur reproche d’être toujours disposés à altérer les faits, à les plier à leurs désirs ou à leurs craintes, de taire ceux-ci, d’exagérer ceux-là, afin que leur dogme favori, à savoir l’existence de l’âme, sorte triomphant de l’épreuve que lui font subir l’anatomie et la physiologie.
Quelle différence y a-t-il physiologiquement entre un souvenir et une métaphore, entre l’espérance et le désir, entre l’amour et la haine, l’égoïsme et le désintéressement ?
Messieurs, je proteste de mon ardent désir de me libérer envers vous.
Mais, quand on y regarde attentivement, est-il bien taillé en orateur, et quand il demande qu’on ouvre la fenêtre, est-ce un cri de Mirabeau comprimé que cet humble désir d’un peu d’air ?
Ainsi nous allons, selon les événements, de la négation à la foi ou au désir d’une foi, et inversement. […] — A propos d’Avdotia Maximonna… Ça serait mon désir, et mêmement celui de ma mère. […] — Il me semble que je n’ai désir de rien dans la vie, si ce n’est que Roussakof me donne sa fille Avdotia, même sans un denier. […] (Il y a, du reste, du simple désir brutal à l’amour exalté, tant de sentiments intermédiaires, et si rapprochés ! […] Je crois qu’il tient à ce qu’on le sache, et ce désir est assez naturel.
L’exactitude et le désir d’une précision scientifique détruisent chez M. […] Il ne hait pas les situations scabreuses, les désirs dangereux, les velléités de révolte, les chatouillements de la curiosité. […] Ce souvenir ne lui cause donc ni regrets, ni désirs. […] Feuillet me permettra-t-il de lui faire entendre l’expression d’un désir qui prend sa source dans la sympathie que m’inspire son talent ? […] Sardou tenait son spectateur par ses désirs les plus divers.
. — Je ne puis me conformer à leur désir. […] Huysmans, du désir de peindre des âmes, mais bien d’une connaissance imparfaite des ressources de leur métier. […] L’abbé partait pour Rome, voulant se défendre, expliquer au Pape ses désirs et ses espoirs. […] Il sait très bien que la Bourgeoisie, partagée entre son désir d’un frein qui empêcherait ses esclaves de se révolter et ses traditions anticléricales, tâche de tout concilier en usant de finasseries plutôt répugnantes. […] mon fils, la volonté n’exprime qu’un poignant désir de perfection dont la vie se sert pour te duper.
Il lui expose la chose, les désirs de sa sœur, et fait appel à la bienveillance que le ministre lui a toujours témoignée. […] Crémieux, pendant son ministère, a toujours embrassé tout le monde. « Il suffit, continue-t-il, que vous manifestiez ce désir, votre beau-frère ne sera pas destitué, vous pouvez être tranquille. » Sur cette assurance, M. […] Je veux tenter d’aller à Paris, et malgré mon désir de ne pas voir de Prussiens, je pousse jusqu’à Passy. […] Une fille, un peu tutoyée des deux mains par un garde national, se dérobe avec les fuites de corps et les révérences d’une soubrette se défendant contre le désir d’un grand seigneur. […] Et il y a encore une chose plus triste que la bêtise : c’est que dans tout ce qui se dit, tout ce qui se crie, tout ce qui se gueule, vous ne touchez qu’une idiote envie, un désir homicide de ravalement.
Il se défend de céder au désir épigrammatique que ce nom excite chez tous les amateurs du fameux petit livre de Taine. […] Il a laissé voir son désir et son secret sentiment dans plusieurs pages de ses « Politiques et Moralistes ». […] Désir qui revient heurter sans trêve, et qui ne trouvera pas à s’assouvir. […] Comment s’attacher à un bien si fragile que le désir et la grâce d’une femme, et, en même temps, voir couler les heures d’un cœur reposé ? […] De faibles parents ont accédé trop vite au désir de cette volontaire petite personne.
À l’ouverture de chaque âge, il est d’une certaine façon ; son corps, son cœur et son esprit ont une structure et une disposition distinctes ; et de cet agencement durable que tous les siècles précédents ont contribué à consolider ou à construire sortent des désirs ou des aptitudes permanentes, selon lesquelles il veut et il agit. […] C’est sur d’autres objets que se rejetteront la grande curiosité, les instincts sublimes de l’esprit, le besoin de l’universel et de l’infini, le désir des choses idéales et parfaites. […] Ce n’est plus un ami de cœur à qui l’on confie ses menus désirs, ses petites peines, une sorte de directeur affectueux et tout humain ; ce n’est plus un roi dont on essaye de gagner les parents ou les courtisans, et de qui on espère des grâces ou des places : on ne voit en lui que le gardien du devoir, et on ne lui parle pas d’autre chose.
Un jour il témoigna un ardent désir de repos, d’un entier éloignement du monde, au déclin de sa vie. […] Jouissant, dès ma première jeunesse, des conseils et de la bienveillance d’hommes supérieurs, je m’étais pénétré de bonne heure de la persuasion intime que, sans le désir d’acquérir une instruction solide dans les parties spéciales des sciences naturelles, toute contemplation de la nature en grand, tout essai de comprendre les lois qui composent la physique du monde, ne seraient qu’une vaine et chimérique entreprise. […] S’il m’était permis d’interroger ici mes plus anciens souvenirs de jeunesse, de signaler l’attrait qui m’inspira de bonne heure l’invincible désir de visiter les régions tropicales, je citerais : les descriptions pittoresques des îles de la mer du Sud, par George Forster ; les tableaux de Hodges représentant les rives du Gange, dans la maison de Warren Hastings, à Londres ; un dragonnier colossal dans une vieille tour du jardin botanique à Berlin.
Craindras-tu de montrer tes actions et ta puissance égales à ton désir ? […] On n’a rien gagné, et tout dépensé, quand on a obtenu son désir sans en être plus heureux : il vaut mieux être celui que nous détruisons, que de vivre par sa destruction dans des joies toujours inquiètes. […] Rébellion, ne lève point la tête jusqu’à ce que je voie se lever la forêt de Birnam ; et Macbeth, au faîte de la grandeur vivra tout le bail de la nature, et son dernier soupir sera le tribut payé à la vieillesse et à la loi de mort. — Cependant mon cœur palpite encore du désir de savoir une chose : dites-moi (si votre art va jusqu’à me l’apprendre), la race de Banquo régnera-t-elle un jour dans ce royaume ?
L’unité de cette vie, c’est l’absolu désintéressement, c’est le dévouement sans défaillance au devoir, sous toutes les formes où successivement il se présente ; chacun des ouvrages de l’orateur ou de l’écrivain est venu à son heure, pour un besoin actuel et précis, sans nul désir de gloire littéraire. […] Bourgoing et dans le Panégyrique de saint Paul : il demande que l’orateur écarte le bel esprit, mette de côté tout désir de plaire, tire toute la force de son discours de l’étude de l’Ecriture, et de l’ardeur de sa foi. […] Il y a réellement de la chaleur dans Bourdaloue : une sincérité profonde, le désir et le plaisir de rendre la vérité sensible, la charité aspirant à l’utilité des âmes, dégagent insensiblement, à travers le tissu serré des raisonnements, une émotion de qualité très pure et très fine, qui va au cœur : émotion d’autant plus puissante qu’elle ne fait rien pour s’étaler.
L’une d’elles, madame Périer, écrit vers cette époque « qu’elle le voit peu à peu croître en humilité, en soumission, en défiance, en mépris de soi-même, et en désir d’être anéanti dans l’estime et la mémoire des hommes. » Enfin, au commencement de l’année 1655, à l’âge de trente-deux ans, il entrait à Port-Royal, alors sous la direction de M. de Sacy. […] Pascal emploie contre la résistance de la raison l’imagination et la sensibilité ; il y fait servir toutes les passions tour à tour, l’admiration, le désir, l’espérance, la joie, la tristesse, et, s’il le faut, la peur. […] Mais, du moins, cet esprit paraît jouir encore de lui-même ; l’habileté du travail, les premières caresses de la réputation qui le découvre derrière l’anonyme, quelque reste des idées du monde qui l’ont suivi dans sa retraite à Port-Royal, la vivacité de la polémique, le désir de n’avoir pas le dessous, la joie secrète de voir les gens de bon sens et les rieurs de son côté, toutes ces choses qui ont leur douceur honnête et permise, même pour les parfaits, le tiennent dans une disposition qui nous paraît heureuse, comparée à l’ardeur fébrile des Pensées.
Mes chers amis, Édouard Thierry (ceci est confidentiel) m’a exprimé un vif désir de connaître votre pièce. […] Pour votre gouverne, sachez bien, au pied de la lettre, que ce désir a été réellement et spontanément exprimé par Thierry, sans aucune provocation de ma part… Là-dessus nous hésitions. […] Thierry insistait pour lire Henriette ; et il mettait tant de bonne grâce et de bon désir à vouloir la connaître, que nous cédions.
Aussi, plusieurs années se passèrent sans que je pensasse à recourir à ce moyen ; et ce premier germe de désir, déposé dans mon esprit par Sacountala elle-même, y demeura longtemps enseveli dans la plus profonde inaction. […] Vois, ma Sacountala, nous ne pourrions honnêtement nous refuser au désir de notre hôte ; viens donc, prenons place près de lui. […] » s’écrie-t-il en strophes lyriques ; je puis donc maintenant donner un libre cours à mes désirs !
Pour le présent j’attends mon ordre de départ, et je me dispose à profiter de la liberté qui m’est donnée. » Régulier et méthodique, Gandar ne se proposait toutefois d’user de cette latitude qu’avec discrétion et mesure : « Mon désir était de voir peu de villes pour les bien voir, de séjourner à Rome, de traverser Gênes, Florence et Naples, et d’arriver à Athènes sans m’écarter de cette ligne. […] Gandar, sur la fin de ses cinq années de Caen, le sentait bien ; si professeur qu’il fût par vocation et par nature, il éprouvait un vif désir de fixer pour lui-même, et pour d’autres encore que pour sa centaine d’auditeurs fidèles, quelques-uns de ses résultats. […] J’ai regretté particulièrement il y a quelques semaines de n’avoir pas sous la main les Artistes dominicains du père Marchese ; mais je dois me résigner et marcher toujours, toujours courir… Jugez si les désirs et les regrets se pressent dans ma pauvre tête. […] Je n’y trouverais à redire, à la lecture, qu’un peu trop de contention et de densité ; dans son désir d’être précis et complet, il ne veut rien omettre ni négliger : dans le développement oral des leçons, cet inconvénient devait en partie disparaître.
La commission, en terminant un travail qui, cette année comme la précédente, est resté sans fruit, ne se hasarderait pas toutefois à exprimer ce vœu, monsieur le ministre, si elle ne sentait qu’elle va en cela au-devant de vos désirs, et si elle ne confiait l’idée à votre goût.
Il a fallu bien des années, bien des efforts et des bégayements de l’admiration et de la critique pour arriver à le refaire et à le compléter ainsi ; mais ces efforts n’ont pas été vains, mais on ne s’était point trompé dans un premier élan d’enthousiasme et de sympathie filiale ou fraternelle ; on ne l’avait point porté trop haut, et l’étude attentive, approfondie, n’a fait que justifier les désirs du cœur et confirmer les pressentiments du goût.
Je laisse à des grammairiens plus délicats que lui à juger si quittions n’est pas ici très-légitime, puisque le désir auquel on répond n’est pas seulement au passé, mais qu’il dure et persiste jusqu’au dernier moment.
si l’on n’est pas content de l’activité de son ami, si l’on croit avoir à s’en plaindre, à la perte de l’objet de ses désirs viendra bientôt se joindre le chagrin plus amer de douter du degré d’intérêt que votre ami mettait à vous seconder.
Nul être vivant ne le secourt, nul être vivant ne s’intéresse à son existence ; il ne lui reste que la contemplation de la nature, et elle lui suffit ; c’est ainsi qu’existe l’homme sensible sur cette terre, il est aussi d’une caste proscrite, sa langue n’est point entendue, ses sentiments l’isolent, ses désirs ne sont jamais accomplis, et ce qui l’environne, ou s’éloigne de lui, ou ne s’en rapproche que pour le blesser.
Il avait seulement un vif désir de savoir, de comprendre, et c’était — et c’est — un esprit délié et cultivé.
Fatalement tu es voué à l’emprisonnement dans ces caves, en communion de misère avec une foule d’êtres dont les uns sont comme toi beaux efforts et gardent aux yeux une étincelle de la lumière perdue, dont les autres, nés dans le souterrain, du désir de deux misérables, sont rachitiques, lugubres, et ne roulent au fond de leurs yeux que la morne obscurité d’un désespoir séculaire.
Je produis en vous le désir de faire une chose, — ce qui implique naturellement que je prévois votre action : — ce n’est pas vous forcer à la faire.
Madame Scarron tut sans folie concevoir l’espérance de loucher le cœur du monarque, et surtout en concevoir le désir ; et madame de Montespan dut ressentir, dans son âme altière, une secousse de jalousie qui ne pouvait manquer d’avoir des suites.
Je me trompe, elle aurait désiré de plus qu’il n’y eût point de passion dans celui qui serait fait à madame de Montespan, le désir fut trompé, elle partit pour Barèges.
Lui aussi il eut le désir d’écrire une bible ; les dernières années de sa vie, il les consacra au peuple.
Mes yeux seraient encore attachés sur cette image, je m’y serais consumée d’un vain désir, si une voix dans le désert : « L’objet que tu vois, belle créature, est toi-même ; avec toi il fuit, et revient.
Il arrive dans les ouvrages ce qu’on voit en société : le désir éternel de plaire rapetisse l’âme et lui ôte le sentiment et l’énergie des grandes choses.
Je ne parle pas de vingt autres causes qui la préparèrent ; mais je remarque que dès le premier siècle, la grandeur de l’empire, une puissance qui n’était limitée par rien, des fantaisies qui n’avaient de bornes que la puissance, des trésors qu’on ne pouvait parvenir à épuiser, même en abusant de tout, firent naître dans les princes je ne sais quel désir de l’extraordinaire qui fut une maladie de l’esprit autant que de l’âme, et qui voulait franchir en tout les bornes de la nature ; de là cette foule de figures colossales consacrées aux empereurs, la manie de Caligula de faire enlever de toutes les statues des dieux leur tête, pour y placer la sienne ; le palais d’or de Néron, où il avait englouti un quart de Rome, une partie des richesses du monde, et des campagnes, des forêts et des lacs ; la statue d’Adrien élevée sur un char attelé de quatre chevaux, et qui faite pour être placée au sommet d’un édifice, était d’une grandeur que nous avons peine à concevoir ; sa maison de campagne, dont les ruines seules aujourd’hui occupent dans leur circonférence plus de dix milles d’Italie, et où il avait fait imiter les situations, les bâtiments et les lieux les plus célèbres de l’univers ; enfin le palais de Dioclétien à Spalatro en Illyrie, édifice immense partagé par quatre rues, et dont chaque côté avait sept cents pieds de long.
De là, quelques paroles d’une tristesse vraiment poétique, dans la tragédie de Thyeste : « Est roi celui qui ne craint pas, est roi celui qui ne forme pas de désir.
Étant homme de lettres, malgré tout et quoi qu’il en ait, il n’a pu complètement résister au désir de l’impression ; mais il se replie et rentre dans la retraite, avec délices ; il est l’homme du volume introuvable ; au fond, il regrette vraisemblablement la faiblesse qui l’a empêché de rester tout à fait inédit, et il appartient à la famille des Amiel, des Marie Bashkirstsef, des Maurice et des Eugénie de Guérin, de tous ces auteurs clandestins, grands rédacteurs de mémoires et de confessions, que l’horreur de la foule et la passion de la solitude contemplative réservent pour les gloires posthumes. […] La Tentative amoureuse ou le Traité du vain désir, est un petit conte délicieux, mais qu’il est impossible de résumer. […] Chacune cède à sa nature et au désir du nouveau. […] Ajoutez-y le goût de la dissimilation et du risque, la curiosité non pas tant des événements que de lui-même, le désir d’embarrasser la police qui né pourra retrouver le motif du crime, puisque le crime sera immotivé… Avouons que la plaisanterie est un peu forte ! […] André Gide ce désir de ménagements et cette crainte de se compromettre : à la vérité, il se rattrape aujourd’hui sur le point auquel je viens de faire allusion et qui n’est peut-être pas très bien choisi.
Moins distraite que l’homme par le mouvement de la vie extérieure, plus persévérante et plus entière dans son désir, elle est plus capable de longues préméditations, de desseins recuits dans la solitude. […] Sa vie aura été un long désir. […] aux sentiments confus, aux rêves et aux désirs obscurs accumulés à travers les siècles dans l’âme innombrable des humbles et des petits. […] C’est à la douleur de la mère de Christine qu’elle reconnaîtrait la malfaisance de sa conduite ; et la joie involontaire que lui causerait cette douleur l’éclairerait enfin sur elle-même, sur ses intentions réelles, sur la méchanceté de son désir. […] Et le désir de sentir et de parler comme si on aimait n’est-il pas encore de l’amour ?
Vit-on jamais pareil désir et pareil art de plaire ? […] Il voit que, ni par ses désirs, ni par ses actions, ni par aucune cérémonie, ni par aucune institution, ni par lui-même, ni par aucune créature, il ne peut ni mériter l’un ni obtenir l’autre. […] À Kingswood, Whitefield, ayant rassemblé les mineurs, race sauvage « et païenne, pire que les païens eux-mêmes, voyait les traînées blanches que les larmes faisaient en coulant sur leurs joues noires822. » D’autres tremblaient ou tombaient ; d’autres avaient des transports de joie, des extases. « Après le sermon, dit Thomas Oliver, mon cœur fut brisé, et je n’aurais pu exprimer le puissant désir que je sentais de la justice. […] On n’a jamais vu en Angleterre une plus copieuse et une plus véhémente analyse, une si pénétrante et si infatigable décomposition d’une idée en toutes ses parties, une logique plus puissante, qui enserre plus rigoureusement dans un réseau unique tous les fils d’un même sujet : Quoiqu’il ne puisse arriver à Dieu ni bien ni avantage qui augmente sa félicité naturelle et inaltérable, ni mal ou dommage qui la diminue (car il ne peut être réellement plus ou moins riche, ou glorieux, ou heureux qu’il ne l’est, et nos désirs ou nos craintes, nos plaisirs ou nos peines, nos projets ou nos efforts n’y peuvent rien et n’y contribuent en rien), cependant il a déclaré qu’il y a certains objets et intérêts que par pure bonté et condescendance il affectionne et poursuit comme les siens propres, et comme si effectivement il recevait un avantage de leur bon succès ou souffrait un tort de leur mauvaise issue ; qu’il désire sérieusement certaines choses et s’en réjouit grandement, qu’il désapprouve certaines autres choses et en est grièvement offensé, par exemple qu’il porte une affection paternelle à ses créatures et souhaite sérieusement leur bien-être, et se plaît à les voir jouir des biens qu’il leur a préparés ; que pareillement il est fâché du contraire, qu’il a pitié de leur misère, qu’il s’en afflige, que par conséquent il est très-satisfait lorsque la piété, la paix, l’ordre, la justice, qui sont les principaux moyens de notre bien-être, sont florissants ; qu’il est fâché lorsque l’impiété, l’injustice, la dissension, le désordre, qui sont pour nous des sources certaines de malheur, règnent et dominent ; qu’il est content lorsque nous lui rendons l’obéissance, l’honneur et le respect qui lui sont dus ; qu’il est hautement offensé lorsque notre conduite à son égard est injurieuse et irrévérencieuse par les péchés que nous commettons et par la violation que nous faisons de ses plus justes et plus saints commandements, de sorte que nous ne manquons point de matière suffisante pour témoigner à la fois par nos sentiments et nos actions notre bon vouloir envers lui, et nous nous trouvons capables non-seulement de lui souhaiter du bien, mais encore en quelque façon de lui en faire en concourant avec lui à l’accomplissement des choses qu’il approuve et dont il se réjouit831. […] Pendant dix pages, l’idée déborde en une seule phrase continue du même tour, sans crainte de l’entassement et de la monotonie, en dépit de toutes les règles, tant le cœur et l’imagination sont comblés et contents d’apporter et d’amasser toute la nature comme une seule offrande « devant celui qui, par ses nobles fins et sa façon obligeante de donner, surpasse ses dons eux-mêmes et les augmente de beaucoup ; qui, sans être contraint par aucune nécessité, ni tenu par aucune loi ou par aucun contrat préalable, ni conduit par des raisons extérieures, ni engagé par nos mérites, ni fatigué par nos importunités, ni poussé par les passions importunes de la pitié, de la honte et de la crainte, comme nous avons coutume de l’être ; ni flatté par des promesses de récompense, ni séduit par l’attente de quelque avantage qui pourrait lui revenir ; mais étant maître absolu de ses propres actions, seul législateur et conseiller de lui-même, se suffisant, et incapable de recevoir un accroissement quelconque de son parfait bonheur, tout volontairement et librement, par pure bonté et générosité, se fait notre ami et notre bienfaiteur ; prévient non-seulement nos désirs, mais encore nos idées, surpasse non-seulement nos mérites, mais nos désirs et même nos imaginations, par un épanchement de bienfaits que nul prix ne peut égaler, que nulle reconnaissance ne peut payer ; n’ayant d’autre objet en nous les conférant que notre bien effectif et notre félicité, notre profit et notre avantage, notre plaisir et notre contentement833. » La force du zèle et le manque de goût : tels sont les traits communs à toute cette éloquence.