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1298. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Ce sont des antipathies de race, de condition, d’humeur, et que de longues années passées en présence, dans la vue continuelle et dans une étroite contrainte, n’ont fait que cultiver, fomenter en secret et exaspérer. […] Un jour, en une circonstance mémorable, Madame s’était vue humiliée devant Mme de Maintenon, forcée de se reconnaître envers elle des torts, de lui en faire des excuses devant témoin, et de se dire son obligée avec reconnaissance.

1299. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

» Le comte de Maistre, dans une des charmantes lettres à sa fille, Mlle Constance de Maistre, a badiné agréablement sur cette question, et il y a mêlé des vues pleines de force et de vérité : « L’erreur de certaines femmes est d’imaginer que pour être distinguées, elles doivent l’être à la manière des hommes… On ne connaît presque pas de femmes savantes qui n’aient été malheureuses ou ridicules par la science. » Au siècle dernier, un jésuite des plus éclairés et des plus spirituels, le père Buffier, qui était de la société de Mme de Lambert, dans une dissertation légèrement paradoxale, s’est plu à soutenir et à prouver que « les femmes sont capables des sciences » ; et après s’être joué dans les diverses branches de la question, après avoir montré qu’il y a eu des femmes politiques comme Zénobie ou la reine Élisabeth, des femmes philosophes comme l’Aspasie de Périclès et tant d’autres, des femmes géomètres et astronomes comme Hypatie ou telle marquise moderne, des femmes docteurs comme la fameuse Cornara de l’école de Padoue, et après s’être un peu moqué de celles qui chez nous, à son exemple, « auraient toutes les envies imaginables d’être docteurs de Sorbonne », — le père Buffier, s’étant ainsi donné carrière et en ayant fini du piquant, arrive à une conclusion mixte et qui n’est plus que raisonnable : À l’égard des autres, dit-il, qui ont des devoirs à remplir, si elles ont du temps de reste, il leur sera toujours beaucoup plus utile de l’employer à se mettre dans l’esprit quelques connaissances honnêtes, pourvu qu’elles n’en tirent point de sotte vanité, que de l’occuper au jeu et à d’autres amusements aussi frivoles et aussi dangereux, tels que ceux qui partagent la vie de la plupart des femmes du monde. […] Le père de Mme Dacier n’était donc nullement un pédant, mais tout à fait un homme d’esprit, plein de vues et de liberté dans l’érudition.

1300. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Cependant, sincèrement amoureux des lettres, dilettante à sa manière, il employait la fleur de ses matinées dans son joli et commode appartement, et en vue des jardins de l’évêché, à lire ou plutôt à se faire lire (goutteux et myope qu’il était) les modernes et même les anciens, à les parcourir en tous sens, à en tirer, non pas une science solide et continue, mais de jolies pensées, des anecdotes curieuses, des raretés galantes et graveleuses même dès qu’il s’en offrait, le tout pour en enrichir ses cahiers de lieux communs et ses tiroirs : il songeait qu’un moment pouvait venir où tous ces magasins d’esprit lui seraient utiles et lui feraient honneur à débiter. […] Il était bien dans son droit : il n’avait écrit sa dissertation latine sur Voiture qu’à la demande de Balzac, il n’avait jamais songé à l’imprimer ; c’était Costar qui avait publié la réfutation avant la pièce même à laquelle il répondait, et qui ensuite avait donné au public la dissertation elle-même : J’entre, disait Girac en commençant, dans un combat que je n’ai pu éviter, y étant provoqué de la plus pressante manière qu’on le puisse être ; car, quelque ennemi que je sois de toute sorte de contestation, le défi qu’on m’a fait étant public, et mon adversaire se présentant comme en triomphe à la vue du peuple, il ne m’a pas été libre de demeurer sans lui repartir.

1301. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

que de vues et de sentiments contraires, et qui se réfléchissent même dans la manière de dire et de s’exprimer ! […] L’honneur de Richelieu est de l’avoir senti avec une énergie ardente et un indomptable génie d’exécution : le malheur de Rohan, celui de sa position, est de n’avoir pu le sentir, d’avoir été l’allié naturel et comme nécessaire de l’étranger, de quiconque était alors l’ennemi de la patrie, d’avoir continué de penser là-dessus comme un seigneur féodal en retard, devenu républicain par rencontre, et qui, en vue d’une conviction religieuse particulière, usait de tous les moyens de défense, sans se douter de ce qu’il allait choquer au sein de cet autre sentiment moral et religieux aussi, de ce sentiment patriotique, tout à l’heure universel.

1302. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Mais ce qu’il a et ce qui rachète bien des défauts, c’est (je ne parle que du présent volume et du journal) une certaine richesse de vues, la présence et la suggestion de plusieurs solutions possibles à la fois, la plénitude du problème bien posé et considéré sans cesse, la sincérité parfaite, l’honnêteté, la bonté, la profondeur à force de candeur, un sentiment moral qui anime et personnifie ses recherches, qui les rend touchantes, et qui y donne (avec plus de douceur et d’affection) quelque chose de l’intérêt qu’auront éternellement les angoisses et les fluctuations orageuses de Pascal à la poursuite du bonheur. […] Les incapacités que nous lui avons trop vues, et qu’il nous révèle, supprimaient pour lui les années que la plupart des hommes emploient ardemment et consacrent à la poursuite des honneurs et aux objets de l’ambition.

1303. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Il nous raconte quelque temps après (dans sa préface des Histoires des anciens comtes d’Anjou, 1681), qu’un ami à qui il avait fait cadeau d’un de ces rares exemplaires de son Athénée ne put se résoudre à lui en faire compliment à cause des vers qu’il y avait entremêlés, et que ce même ami à qui il donna à lire quelques jours après sa version en vers du prophète Daniel s’excusa de lui en dire un seul mot, prétextant que sa vue était très affaiblie. […] Il mourut à Paris le 6 mars 1681, à l’âge de quatre-vingt-un ans ; il fut inhumé, en personnage illustre, dans l’église de Saint-Sulpice, avec une belle épitaphe très en vue, et un médaillon en marbre blanc contenant son portrait et surmonté d’un génie pleurant qui tient son flambeau renversé.

1304. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Il avait déjà écrit quelques contes ou nouvelles (Contes d’un Planteur de choux) ; il s’était essayé dans la presse de province, et il aspirait à faire des articles critiques plus en vue. […] Une châtelaine voisine, des plus méchantes, qui a jeté ses vues sur le fils du marquis, Emmanuel, pour en faire son gendre, et qui entrevoit une rivale à sa fille dans la jeune Parisienne, sème les propos, les calomnies ; pour les faire cesser, le marquis, accompagné de son fils, vient demander Aurélie en mariage à son père.

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