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25. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

Après avoir vu un chacun, porteur du pamphlet, et apercevant, au moment du départ pour la chasse, un officier de vénerie, en montant à cheval, fourrer dans la poche de son habit la brochurette, Flaubert, un peu agacé, demanda à Feuillet : « Est-ce que vraiment vous trouvez du talent à Rochefort ?  […] Oui, quoique les jeunes semblent jusqu’ici enracinés dans le vieux passé et les vieilles méthodes, j’ai la conviction, que d’ici à peu d’années, même parmi les élèves de l’école des Chartes, il y aura un abandon des siècles antiques, pour remonter aux siècles modernes, et là, avec la documentation de ces temps, ressusciter des morts, parmi cette humanité vraiment galvanisable. […] Rien n’est vraiment lamentable comme la chute d’un ami, que vous ne pouvez vraiment ni défendre, ni soutenir. […] Daudet m’entretient de son livre : Les Rois en exil, dont la conception est vraiment tout à fait jolie, en ce qu’elle se prête à une réalité poétique et ironique. […] L’un d’eux dessine trois corbeaux, et c’est vraiment merveilleux de savoir, dans un dessin qui n’a jamais d’enveloppe ni de contour général, réserver les lumières, et d’être fixé d’avance si sûrement sur les places et les valeurs de sa composition.

26. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Vraiment curieuse, la mobilité du masque de l’acteur, et la succession des figures d’expression douloureuses, qu’il fait passer sur sa pétrissable chair, et les admirables et pantelants dessins qu’il donne d’une bouche terrorisée. […] Ç’a été un peu comme ça, tout le long de ma carrière littéraire, mais dans ce moment-ci vraiment la malchance a pris des proportions grandioses, une intensité suicidante. […] C’est vraiment une grande artiste. […] La scène de la prière, avec les réponses des malades, coupée par la chansonnette de Romaine agonisante, est saluée par un tonnerre d’applaudissements, par l’émotion d’une salle vraiment remuée… C’est un succès à tout casser. […] » C’est vraiment un intelligent et original commencement de phrase pour un curé !

27. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Croyez-vous que les « trois atlas » que Napoléon portait dans sa tête fussent vraiment complets ? […] Vraiment on lui prête une âme trop basse, des rancunes trop viles, trop féroces et trop longues. […] Vraiment, c’est là de l’histoire écrite pour les images d’Epinal. […] Il fallait tout au moins, pour nous donner vraiment l’impression du bonheur, réunir comme en un faisceau tous les plaisirs des sens : M.  […] Et vraiment, cette plainte, revenant à intervalles réguliers, nous avait semblé plus belle que les froides effusions des deux bienheureux.

28. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Elle semble se réveiller chez les poètes de la Pléiade française, mais imitée, apprise, affaiblie ; ce n’est vraiment qu’un reflet. […] Pouvillon ; mais le Marinier, le Forestier, l’Étude Chandoux (sans compter, qu’il s’y rencontre des parties vraiment belles) m’amusent et me retiennent parce qu’à chaque instant je sens, je vois par qui ces romans ont été écrits. […] Aujourd’hui, celui qui vit sur un sol qui lui appartient est le plus libre des hommes, est vraiment roi dans son domaine. […] Vraiment il est fort heureux pour nous que le monde soit inintelligible : nous en faisons ce que nous voulons. […] Vraiment le Berger est un beau livre.

29. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Le mysticisme magnifique et vague de Spiridion ou de Consuelo, le socialisme un peu incohérent, mais vraiment évangélique, du Péché de Monsieur Antoine ou du Meunier d’Angibaut, la foi au progrès, l’humanitairerie… tout cela plaît chez cette femme excellente, à l’imagination arcadienne, parce que chez elle, encore une fois, tout vient du cœur et en déborde à larges flots. […] La première, je crois, elle a vraiment compris et aimé le paysan, celui qui vit loin de Paris, dans les provinces qui ont gardé l’originalité de leurs mœurs. […] Elle vit vraiment de la vie de la terre, et cela sans s’y appliquer.

30. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé à Quimper »

Je n’en sais rien vraiment. […] Ce brave homme a eu vraiment une idée de génie. […] Cette invention a vraiment l’air d’avoir été faite pour nous !

31. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

« Cependant, en dépit de cet arrêt qu’il avait prononcé, le patriarche allemand fut le premier à donner, dans les arts, l’exemple d’une tolérance vraiment admirable. […] A. de Musset a raison entièrement et par ce qui touche à l’imagination, il pourrait voir qu’on n’a jamais plus imité qu’aujourd’hui et que ce temps passionné pour la recherche fiévreuse du nouveau n’a trouvé vraiment que cela, « l’imitation de seconde main ». — On copie ce qui n’était déjà qu’une imitation ! […] Et ainsi, attentifs à ne rien mutiler de ce qui vit autour de nous et qui peut servir à notre vie propre, nous pourrons atteindre à une compréhension plus large et plus personnelle des choses, comme à un art plus plastique, plus directement modelé sur la nature vivante ; et après tant de courses vagabondes hors des frontières, tant d’excursions dans tous les domaines défendus, y compris ceux de la chimère et de la folie, nous pourrons enfin nous rasseoir chez nous et inaugurer un mouvement qui sera vraiment un retour à la tradition française comme à la réalité humaine. » C’est sur ces mots que nous voudrions finir.

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