/ 1586
761. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Le très beau sonnet de Du Bellay, son sonnet immortel : Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage ! […] On m’assure pourtant qu’il ne sera ni tout à fait inutile, ni désagréable pour ceux mêmes qui le savent déjà, de citer le sonnet célèbre, qu’on s’attend à lire chaque fois qu’il est question de Du Bellay ; j’obéis donc à cette observation qui m’est faite au dernier moment, d’autant plus que c’est la meilleure preuve que je n’ai pas surfait le poète : Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, Ou comme cestui-là qui conquit la toison, Et puis est retourné, plein d’usage et raison, Vivre entre ses parents le reste de son âge !

762. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Volney n’a que de la mauvaise emphase littéraire, lui qui avait fait déjà l’excellent Voyage en Syrie ; Roland est un zéro dont sa femme est le chiffre, chiffre qui, selon moi, eût couru risque de valoir dix fois moins sans l’honnête zéro. […] Ses écrits nombreux sur les matières économiques, son Voyage en Italie, attestent beaucoup de justesse, de finesse et de connaissances ; ses descriptions de machines dans l’Encyclopédie méthodique surpassent. assure-t-on, en précision élégante celles de Diderot.

763. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

On comprendra, d’après de telles circonstances, comment celui des philosophes du siècle qui sentit et pratiqua le mieux la moralité de la famille, qui cultiva le plus pieusement les relations de père, de fils, de frère, eut en même temps une si fragile idée de la sainteté du mariage, qui est pourtant le nœud de tout le reste ; on saisira aisément sous quelle inspiration personnelle il fit dire à l’O-taïtien dans le Supplément au Voyage de Bougainville : « Rien te paraît-il plus insensé qu’un précepte qui proscrit le changement qui est en nous, qui commande une constance qui n’y peut être, et qui viole la liberté du mâle et de la femelle en les enchaînant pour jamais l’un à l’autre ; qu’une fidélité qui borne la plus capricieuse des jouissances à un même individu ; qu’un serment d’immutabilité de deux êtres de chair à la face d’un ciel qui n’est pas un instant le même, sous des antres qui menacent ruine, au bas d’une roche qui tombe en poudre, au pied d’un arbre qui se gerce, sur une pierre qui s’ébranle ?  […] Ils ne s’occupent que du soin de leur équipage, du désir de commander aux compagnons de ce malheureux voyage, et de la recherche de quelque divertissement qu’ils peuvent prendre en passant.

764. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

Il y a des jours où, sans le vouloir, nous repassons en esprit un morceau de notre vie, telle journée de voyage, telle soirée d’opéra, telle conversation intéressante ; nous nous sentons ramenés d’une manière fixe à l’ancien état ; les idées qui essayent de se jeter à la traverse sont mal venues ; elles sont chassées, ou s’arrêtent sur le seuil ; si au premier moment quelque lacune se rencontre dans notre souvenir, elle finit le plus souvent par se combler d’elle-même ; un détail oublié surgit à l’improviste. — Je me rappelle en ce moment une soirée passée à Laveno, sur le lac Majeur, et, à mesure que j’insiste, je revois mon dîner d’auberge, la grosse nappe toute blanche, la jolie servante effarée ; puis, un peu après, le sentier tortueux parmi les thyms et les lavandes, le lac d’un gris bleuâtre sous une enveloppe moite de vapeur, les plaques de lumière, les traînées scintillantes, les broderies d’argent qu’un rayon égaré semait çà et là sur la nappe unie, le bruissement imperceptible des petits flots qui venaient mourir sur la grève, et les clochettes des vaches qui tintaient çà et là dans le silence. […] « À son départ pour la Grèce, un de nos savants fut renverse de sa voiture par une violente secousse ; une boîte, peu lourde pourtant, lui tomba sur la tête ; il ne s’ensuivit ni douleur ni plaie des téguments ; mais le blessé oublia totalement le pays d’où il était sorti, le but de son voyage, le jour de la semaine, le repas qu’il venait de faire, toute l’instruction qu’il avait acquise.

765. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Le voyage en Sicile, qu’il fit longtemps après, en 1841, est une promenade classique autour de l’Etna, de l’histoire, des monuments. […] C’était la dépouille du bélier ailé que Phryxos, fils d’Athamas, y avait consacrée après son voyage aérien.

766. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre VI. Premiers pas hors de Saint-Sulpice  (1882) »

C’était le lieu de séjour momentané des élèves qui, en entrant au séminaire ou en en sortant, avaient besoin de quelques jours libres ; les ecclésiastiques en voyage, les supérieures de couvent qui avaient des affaires à Paris, y trouvaient un asile commode et à bon marché. […] Le déplacement d’un atome rompait la chaîne de faits fortuits qui, au fond de la Bretagne, me prépara pour une vie d’élite ; qui me fit venir de Bretagne à Paris, qui, à Paris, me conduisit dans la maison de France où l’on pouvait recevoir l’éducation la plus sérieuse ; qui, au sortir du séminaire, me fit éviter deux ou trois fautes mortelles, lesquelles m’auraient perdu : qui, en voyage, me tira de certains dangers où, selon les chances ordinaires, je devais succomber ; qui fit, en particulier, que le Dr Suquet put venir à Amschit me tirer des bras de la mort, où j’étais enserré.

767. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

J’ai sous les yeux quantité de volumes anonymes ou pseudonymes de sa façon : l’Histoire du procès Fualdès (1818) ; les Mémoires de Mme Manson (il fit le voyage de Rodez exprès pour aller la voir) ; des Lettres à David sur le Salon de 1819 (en collaboration avec M.  […] Et si c’est là qu’on a eu son premier ami, si deux cœurs de dix-sept ans s’y sont ouverts à la fois à la curiosité des voyages et au charme des anciennes histoires, durant les causeries sans lumière près d’un feu de sarment… !

/ 1586