II Toute diplomatie avait cessé d’exister pour M. de Talleyrand du jour où Napoléon, promu à l’empire par sa propre volonté et par les victoires de ses armées, avait résolu de substituer les conquêtes aux alliances, et de détruire au profit de la France tout l’équilibre européen. […] La diplomatie errait comme un aveugle, à tâtons, d’un pôle à l’autre ; le roi seul avait une volonté fixe, la paix, non parce qu’elle est la paix, mais parce qu’elle est l’immobilité. Cette volonté diplomatique du roi Louis-Philippe était sans cesse contrariée et contrainte par les cabales parlementaires, qui reprochaient à ce gouvernement sa seule vertu, et qui lui remettaient sans cesse sous les yeux, comme un contraste, les grandeurs de Napoléon, sans parler jamais des catastrophes et des expiations de ce génie qui avait dépensé deux fois la France pour payer sa gloire personnelle. […] Aussi doux qu’habile, ce ministre cacha une volonté virile sous des séductions féminines.
Il ne voyait pas ou voyait mal, il ne regardait et n’écoutait que par volonté, il lisait rapidement et au hasard, et tout de suite, sur un fait, il s’essayait à bâtir une théorie. […] Il se donne une tâche quelconque, bizarre, difficile, et il l’accomplit : on dirait un exercice de volonté, une gageure. […] Ce sont surtout des êtres qui ont une grande œuvre à parfaire, un grand effort de volonté à donner. […] Mais si Nietzsche ne peut parvenir toujours directement où il devait espérer d’aller, son esprit pour cela ne sera pas stérile ; des hommes prendront sa place, qu’il a encouragés mystérieusement et dont il a doublé la force vitale et la volonté.
Bien avant de connaître Schopenhauer, il avait composé son nibelungenring ; là le monde du paganisme périt parsa volonté ; c’est le monde du pur égoïsme ; l’« éternellement-naturel » a dans la consciente sensualité de son égoïsme perdu la force d’arriver au « purement-humain ». Wotan, la force première de la volonté dans la Nature, ne peut que renoncer à ce monde en renonçant à sa propre existence ; et l’apparition la plus noble et la plus pure, qui refuse à la nature, par son non-savoir, ce qui lui est dû, doit périr avec ce monde égoïste. […] Le chemin de cette humanité idéale ne nous est pas montré dans Tristan, mais dans Parsifal : là l’amour n’est plus attaché par les sens aux manifestations de la vie, mais elle devient la compassion agissante pour les souffrances du monde, elle devient la volonté qui renonce à l’égoïsme et à la sensualité, la volonté pour tous, pour l’humanité.
Elle manquait ainsi qu’en toute notre Poésie, malgré ses émouvantes phrases humaines à travers le Moi du poète, qui ne put davantage de ses Inspirés tenir une œuvre-une pleine de la volonté pensante et pesante d’une vie. […] Et, de l’attraction et la pénétration inorganiques, organique par l’Être sortait, désir plus que le désir, une primordiale volonté à devenir. […] Mais pourtant (parce que le Savoir donné à qui ne le mérite pas en s’élevant vers lui de toute sa volonté et d’une apte intelligence, est le pire des maux) ne se doit-il à tous : se rappelant que la Multitude qui vit surtout des sens et des instincts, s’enorgueillit en elle-même du Savoir qu’elle reçoit, d’autant qu’elle ne le perçoit pas. […] Puisque nous allons aussi à la conception d’une tête humaine, ainsi que pétrie de radio-activités, pénétrant et mouvant tout de sa volonté, opérant en même temps de tous les signes phénoménaux l’Analyse et la Synthèse.
Il a, en somme, une couleur à lui, une saveur sui generis ; n’eût-il que le charme de la volonté, c’est déjà beaucoup !
L’amour sur-tout, considéré comme affection de l’ame, naissant en nous d’elle-même, & précédant toute détermination à la volonté, y est développé dans tous ses mouvemens, & réduit à une théorie aussi lumineuse qu’utile.
» Prolonger de telles situations, les créer par amusement, tout en se flattant d’avoir trois cœurs, c’est le sûr moyen de n’en avoir bientôt plus un ; à un tel régime la sensibilité véritable s’épuise, la volonté se ruine et s’use, l’être moral intérieur arrive vite à un complet délabrement. […] La raison, éclairée par l’expérience, avertie par les revers, a beau dire, elle a beau faire l’éloquente et la souveraine à de certains moments solennels, elle n’a plus à ses ordres la volonté. […] A un certain degré, cette mêlée, cette lutte de diverses natures en une seule, aurait pu paraître intéressante, et elle a certainement paru telle à quelques personnes qui l’ont connu ; je sais une femme distinguée qui a écrit : « On sent dans Benjamin Constant un besoin d’être aimé, dirigé, soigné, qui charme à côté de si grandes facultés… » Pourtant, à moins d’être femme peut-être, et avec la meilleure volonté du monde, il n’y a pas moyen de n’être point ici frappé de ce choc d’éléments inconciliables et d’un désaccord qui crie.