Il suffît que l’ensemble et nombre de parties restent agréables, riantes et vives. […] Continuant donc de s’adresser humblement au souverain Être, il lui demande, puisqu’il doit avoir des ennemis, de les lui accorder à son choix, avec les défauts, les sottes et basses animosités qu’il lui désigne ; et alors, avec un art admirable et un pinceau vivifiant, il dessine un à un tous ses ennemis et ses adversaires, et les flétrit sans âcreté, dans une ressemblance non méconnaissable : « Si mes malheurs doivent commencer par l’attaque imprévue d’un légataire avide sur une créance légitime, sur un acte appuyé de l’estime réciproque et de l’équité des deux contractants, accorde-moi pour adversaire un homme avare, injuste et reconnu pour tel… etc. » Et il désigne le comte de La Blache si au vif que tous l’ont nommé déjà ; de même pour le conseiller Goëzman, de même pour sa femme et pour leurs acolytes ; mais ici la verve l’emporte, et le laisser-aller ne se contient plus ; à la fin de chaque portrait secondaire, le nom lui échappe à lui-même, et ce nom est un trait comique de plus : Suprême Bonté !
Dans Emmeline de même : cette vive, espiègle et rieuse personne, et qui pourtant a un cœur, se prend d’un premier amour de jeune fille, qui la rend mélancolique d’abord ; mais, sitôt qu’elle a aimé et qu’elle a épousé l’homme qu’elle aime, la gaieté revient : « Il semblait que la vie d’Emmeline eût été suspendue par son amour ; dès qu’il fut satisfait, elle reprit son cours, comme un ruisseau arrêté un instant. » Ne cherchez point chez M. […] Son récit est net, svelte, alerte, coupé au vif.
Voltaire peut-être a raison, et pourtant la postérité, qui n’a pas à opter entre ces chefs-d’œuvre divers ni à se décider pour l’un au détriment des autres, la postérité, qui n’est pas homme de lettres, ne se pose point la question de la sorte ; elle ne recherche pas ce qui est plus ou moins difficile ou élevé comme art, comme composition ; elle oublie les genres, elle ne voit plus que le trésor moral de sagesse, de vérité humaine, d’observation éternelle qui lui est transmis sous une forme si parlante et si vive. […] C’est quand on a lu ainsi dans une journée cette quantité choisie des meilleures fables de La Fontaine, qu’on sent son admiration pour lui renouvelée et afraîchie, et qu’on se prend à dire avec un critique éminent : « Il y a dans La Fontaine une plénitude de poésie qu’on ne trouve nulle part dans les autres auteurs français66. » De sa vie nonchalante et trop déréglée, de ses dernières années trop rabaissées par des habitudes vulgaires, de sa fin ennoblie du moins et relevée par une vive et sincère pénitence, qu’ai-je à dire que tout le monde ne sache ?
Permission pourtant d’en dire du mal. » III Quelquefois la diatribe s’assaisonne de chaux vive. […] Au fond du trou il y avait de la chaux vive.
C’est un fantaisiste ; c’est une imagination très vive qui pousse devant elle ; c’est un esprit flaireur et, mieux que flaireur, c’est un esprit découvreur, mais qui se grise souventes fois avec ses découvertes ; c’est par-dessus tout, enfin, un humouriste, ayant cette faculté délicieuse de l’humour, qui tient tout à la fois de la gaieté et de la mélancolie, et qui se permet d’aller, mais en se faisant pardonner à force de grâce, jusqu’à l’extravagance. […] Masque qui reprenait sa figure parce qu’il avait le désespoir de l’illusion… Non, je n’ai jamais vu d’opposition plus vive qu’entre ces deux critiques et ces deux professeurs du xixe siècle, contrastant en tout, — excepté en convictions fortes et en autorité morale qu’ils n’avaient pas plus l’un que l’autre, ce qui les frappe également tous deux de néant et leur enlève, du coup et pour jamais, toute grande influence sur les hommes !
Vive toute la lyre ! […] Il ne se montre pas par de bons mots, par des reparties vives et surprenantes ; ni par des effets de mémoire qu’on voit en d’autres enfants. […] Deux ou trois figures de meneurs sont très bien tracées et en vif relief. […] Encore une société qui est prise tout à fait sur le vif et qui est crayonnée magistralement. […] Berthold Zeller dans son nouveau volume sur Louis XIII, et c’est ce qui donne à cet ouvrage un très vif intérêt.
Jean Ajalbert : Sur le vif.