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692. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

Non, non, non, la vérité, l’honnêteté, l’enseignement aux foules, la liberté humaine, la mâle vertu, la conscience, ne sont point des objets de dédain. […] L’imprécation peut être aussi sainte que l’hosanna, et l’indignation, l’indignation honnête, a la pureté même de la vertu. […] Les vers d’amour d’André Chénier avoisinent sans désordre et sans trouble l’ïambe courroucé : « Toi, vertu, pleure si je meurs ! 

693. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

Il pousse les ménagements et la pratique de la discrétion jusqu’à laisser immoler à ses yeux la vérité, et peut-être quelquefois la vertu, sans les défendre. […] Cette vertu suppose un esprit de réflexion pratique, d’attention à autrui, d’occupation du sort des autres et de détachement de soi, qu’il n’a pas reçu, ce me semble, infus avec la vie, et qu’il a encore moins songé à se donner.

694. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Ibrahim, qui ne croit guère à la vertu efficace des protocoles, a fait preuve de sens, en marchant de Konieh sur Scutari ; un pied dans le Bosphore, n’étant séparé du divan que par ce détroit que les amoureux et les poëtes traversent à la nage, il est plus certain de se faire entendre. — Aux États-Unis, tout espoir d’un accommodement entre la Caroline du Sud et le Congrès n’est pas évanoui ; on se prépare pourtant des deux côtés, comme pour une lutte sanglante, et les milices sont sous les armes. […] On s’est amusé follement au carnaval de 1833, parce qu’il y avait longtemps qu’on ne s’était amusé, parce qu’il faut toujours en France en revenir aux plaisirs, parce qu’au milieu des soucis qui assombrissent et des vertus sérieuses que, dit-on (et je le crois), nous acquérons, nous sommes l’éternelle nation de la Fronde et de la Régence, le Paris de Rabelais, de Manon Lescaut, du Mariage de Figaro et du Directoire.

695. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVII. Romans d’histoire, d’aventures et de voyages : Gebhart, Lemaître, Radiot, Élémir Bourges, Loti » pp. 201-217

Pourtant, c’est exactement le charme, la vertu maîtresse et constante d’Émile Gebhart. […] Des circonstances adviennent en son impériale famille à l’occasion desquelles il est avoué, recherché, trouvé dans les bagnes français, ramené en Orient, dans sa gloire, ses honneurs, avec, miracle, la princesse Isabelle, jadis aperçue à Rugen, dès lors adorée sans espoir, qu’une mère chérie lui retrouve et lui donne : le bonheur sans phrase, le bonheur des mains jointes, des extases, de l’impuissance à remercier le Créateur que crée le flux de notre félicité, à qui la vertu de notre reconnaissance veut une personnalité… La vie s’attaque à ce bonheur.

696. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Le vrai dans les livres est la vertu dans la conduite ; aussi, est-il grand besoin qu’on nous le recommande. […] » Si Lamotte s’était plus mêlé de moraliser, je croirais le reconnaître dans cette image de vertus humaines, qui, « nées le plus souvent dans l’orgueil et dans l’amour de la gloire, y trouvent un moment après leur tombeau », ou qui, « formées par les regards publics, vont s’éteindre le lendemain, comme ces feux passagers, dans le secret et les ténèbres19. » Suis-je même bien sûr de ne pas faire tort à Lamotte, en le supposant capable de ces figures ?

697. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Ne rien posséder fut le véritable état évangélique ; la mendicité devint une vertu, un état saint. […] Des femmes faibles ou coupables, surprises de tant de charme, et goûtant pour la première fois le contact plein d’attrait de la vertu, s’approchaient librement de lui.

698. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Il est des vertus qui, à quelques égards, sont plus conformes à notre goût. […] Quand on voulut, après les Antonins, faire une religion de la philosophie, il fallut transformer les philosophes en saints, écrire la « Vie édifiante » de Pythagore et de Plotin, leur prêter une légende, des vertus d’abstinence et de contemplation, des pouvoirs surnaturels, sans lesquels on ne trouvait près du siècle ni créance ni autorité.

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