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1410. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

En Auvergne, où les hommes valides s’expatrient l’hiver pour chercher du travail, on prend les femmes672 : dans l’élection de Saint-Flour, il y a tel village où les quatre collecteurs sont en jupon. — Pour tous les recouvrements qui leur sont commis, ils sont responsables sur leurs biens, sur leurs meubles, sur leurs personnes, et, jusqu’à Turgot, chacun est solidaire des autres ; jugez de leur peine et de leurs risques ; en 1785673, dans une seule élection de Champagne, quatre-vingt-quinze sont mis en prison, et chaque année il y en a deux cent mille en chemin. « Le collecteur, dit l’assemblée provinciale du Berry674, passe ordinairement pendant deux ans la moitié de sa journée à courir de porte en porte chez les contribuables en retard. » Cet emploi, écrit Turgot675, cause le désespoir et presque toujours la ruine de ceux qu’on en charge ; on réduit ainsi successivement à la misère toutes les familles aisées d’un village. » En effet, il n’y a point de collecteur qui ne marche par force et ne reçoive chaque année676 « huit ou dix commandements ». […] Bien mieux, en vertu de l’ordonnance de 1680, chaque personne au-dessus de sept ans est tenue d’en acheter sept livres par an ; à quatre personnes par famille, cela fait chaque année plus de dix-huit francs, dix-neuf journées de travail : nouvel impôt direct, qui, comme la taille, met la main du fisc dans la poche des contribuables et les oblige, comme la taille, à se tourmenter mutuellement. […] Nous vous le demandons, sire, avec tous vos autres sujets, qui sont aussi las que nous… Nous vous demanderions encore bien d’autres choses, mais vous ne pouvez pas tout faire à la fois. » — Les impôts et les privilèges, voilà, dans les cahiers vraiment populaires, les deux ennemis contre lesquels les plaintes ne tarissent pas728. « Nous sommes écrasés par les demandes de subsides…, nos impositions sont au-delà de nos forces… Nous ne nous sentons pas la force d’en supporter davantage…, nous périssons terrassés par les sacrifices qu’on exige de nous… Le travail est assujetti à un taux et la vie oisive en est exempte… Le plus désastreux des abus est la féodalité, et les maux qu’elle cause surpassent de beaucoup la foudre et la grêle… Impossible de subsister, si l’on continue à enlever les trois quarts des moissons par champart, terrage, etc.

1411. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Il devait plus tard faire partie de notre intérieur de famille pendant quelques années ; compagnon volontaire de mes travaux et de mes tribulations intimes à la ville et à la campagne, mais compagnon sans intérêt, auxiliaire sans solde, payé en amitié comme il assistait en tendresse, génie familier et serviable du foyer, genius loci, comme Cicéron l’écrit d’un de ses secrétaires à qui il enseignait l’éloquence, et qui polissait ses harangues à Tusculum. […] Lisez cet inventaire prosaïque, et pourtant poétique, de ma tour de travail : Tout dort dans le château plein d’ombre et de silence. […] La sueur du travail et du patriotisme ruisselait dès l’aube du jour sur mon front.

1412. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

Il faut varier travail et distractions ; lasse du bas, je prends l’aiguille, puis la quenouille, puis un livre. […] Oui, le travail, le travail !

1413. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Sans doute, il ne fait pas de psychologie profonde ; il ne s’attache pas au travail intérieur qui fait ou défait une âme ; il n’essaie pas d’isoler et de peser tous les éléments qui se mêlent dans une volonté, dans un désir. […] L’analyse psychologique y est d’une finesse, d’une pénétration étonnantes : nous y retrouvons le Sainte-Beuve que nous connaissons, expert à démêler toutes les traces d’influences physiques et sociales dans la composition d’un caractère, curieux surtout des formes d’âmes imprécises et complexes, des états mêlés, morbides, anormaux, extrêmes, sentant avec une sûreté singulière le travail invisible des consciences, les effondrements, les crises, les agonies internes, sous les apparences unies et paisibles de la santé morale. […] Nos esprits supérieurs crèvent de faim : il faut suivre la filière, restreindre son appétit, s’user dans de petits emplois pour de maigres résultats, s’aplatir, servir, pour arracher peut-être bien péniblement après vingt ans d’un travail de forçat, ou pour manquer finalement, malgré tout le talent et toutes les bassesses, ce que l’on s’estimait légitimement dû.

1414. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Pour le grec, dont l’étude a été le premier travail de la Renaissance, il n’en sut pas davantage que les moines ; et leur article de foi, Graecum est, non legitur, aurait pu être sa devise. […] A côté de ces grandes idées sur les nouvelles destinées de la poésie et de la langue, le manifeste de Du Bellay remettait en honneur le travail, où Buffon a vu le secret du génie. […] Dans l’Olive, où il compare toutes les beautés de sa maîtresse à celles de la nature, Charles Fontaine, l’un des poëtes attaqués dans l’Illustration, notait, sans trop exagérer, cinquante fois, en quatre feuilles de papier, ciel et cieux, armées et ramées, oiseaux et eaux, fontaines vives et leurs rives, bois et abois, et tout un vain travail de la mémoire, répétant sans cesse les mêmes mots, à la place de l’inspiration qui les renouvelle et les varie à l’infini.

1415. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Jamais il ne s’étendait sur un objet, quel qu’il fût : il réservait la forte contention de son esprit pour les heures du travail et la causerie ne lui était, visiblement, qu’une manière de se délasser. […] La question de la traduction, travail linguistique important, est, selon Cécile Leblanc (Wagnérisme et création en France, Honoré Champion, Paris 2005), l’aspect le plus moderne des travaux de la revue.

1416. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

La plus réellement républicaine des institutions françaises sous la monarchie, c’était peut-être l’Académie, la république des lettres. » Seulement, je l’avoue, si le temps avait été donné à la république, je voulais enfoncer les portes de l’Académie française pour faire entrer en plus grande proportion et pour de plus dignes rémunérations l’armée des lettres, de la science, des arts dans cette vétérance du travail intellectuel, le plus mal rémunéré et souvent le plus indigent des travaux humains. […] La bourgeoisie ne fut qu’une croissance naturelle qui donne une tête aux peuples quand le corps est formé ; elle portait en elle le travail, l’aisance, le commerce, les industries, toutes choses matérielles ; elle ne portait pas encore la pensée.

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