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363. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Ils aspireront à quelque chose de mieux, au simple, au grand, au vrai, et se dessécheront et s’aigriront à l’attendre ; ils voudront le tirer d’eux-mêmes ; ils le demanderont à l’avenir, au passé, et se feront antiques pour se rajeunir ; puis les choses iront toujours, les temps s’accompliront, la société mûrira, et lorsque éclatera la crise, elle les trouvera déjà vieux, usés, presque en cendres ; elle en tirera des étincelles, et achèvera de les dévorer. […] En fait de mythologie, rien n’égale chez Le Brun la strophe suivante, tirée de l’ode sur le triomphe de nos Paysages, et que Charles Nodier aime à citer avec sourire : La colline qui vers le pôle Borne nos fertiles marais, Occupe les enfants d’Éole A broyer les dons de Cérès.

364. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Cousin, que l’humanité se développe à la manière de l’individu ; que les périodes de l’une répondent aux âges de l’autre ; que dans son enfance elle débute par la spontanéité et la religion, pour arriver dans son âge mûr à la réflexion et à la science, il est bien vrai, en ce sens, de dire que la destinée de l’espèce peut se lire en raccourci dans celle de l’individu ; mais, après quelques rapprochements ingénieux, quelques perspectives neuves du passé, il faut bientôt quitter ce point de vue trop hasardeux, trop vague, et duquel on ne tire rien de certain ni de vivant sur l’avenir. […] Il faudrait donc admettre, pour que les inductions que la psychologie prétend tirer du moi présent à l’avenir de l’humanité fassent légitimes, que toutes les grandes évolutions du moi eussent achevé leur cours, et que de plus il existât une sorte d’égalité psychologique entre tous les individus, entre tous les moi de l’humanité adulte ; de sorte qu’un de ces moi quelconque, s’observant lui-même par une bonne méthode, arrivât aux mêmes résultats que les autres moi ses semblables. […] Tant qu’une révélation reste à faire, et lorsque l’époque en est venue, le seul grand psychologiste possible, le seul psychologiste capable de tirer directement de l’observation individuelle l’avenir de l’humanité, c’est le révélateur lui-même ; car déjà l’humanité transformée vit en lui et remplit son moi ; mais ce révélateur alors ne s’amuse jamais à faire une psychologie, il fonde une religion.

365. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre II. Diderot »

C’était écrit ; il n’en fallait pas plus à Diderot, il avait tiré de son œuvre le plaisir qu’il en attendait. […] Diderot n’est point un génie créateur, apte à tirer un monde de soi ; il est loin de Descartes, loin même de Rousseau. […] La philosophie de Diderot, dans ses parties caractéristiques, est vraiment une philosophie de la nature : ce qu’il tire de Leibniz, ce sont ces principes de raison suffisante, de moindre action, de continuité, que l’étude scientifique du monde organisé et inorganique suppose et vérifie constamment ; et c’est lui d’abord qui, avant Helvétius, avant d’Holbach, remet l’homme dans la nature, et réduit les sciences morales aux sciences naturelles.

366. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Sans doute il y a plus loin de tirer du non-être par état, et de porter après ces ténébreux enfants au degré de puissance qu’on voit ici par leurs établissements et a l’état et rang entier des princes du sang, avec la même habileté de succéder à la couronne ; sans doute il y plus loin du néant à cette grandeur, que de cette grandeur à la couronne. […] La sœur de Constant d’Aubigné, madame de Villette, tante de Françoise, la tira de la prison de Niort ; elle l’emmena dans son château et l’éleva dans la religion protestante. […] Madame de Neuillan, sa marraine, catholique zélée, se crut obligée de la tirer de la maison de sa tante hérétique ; elle la trouva imbue des principes des protestants, et voulut la forcer à se convertir.

367. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Cependant le maréchal, pour toute réponse, fit le parlementaire prisonnier : quelques coups de canon tirés pendant cette espèce de négociation servirent de prétexte ; et, sans considérer les masses des ennemis et le petit nombre des siens, il ordonna l’attaque. […] Le maréchal, « doué de ce talent d’homme de guerre qui apprend à tirer parti des moindres circonstances », remarqua dans la plaine une ligne de glace et la fit casser pour voir le sens du courant, pensant bien que ce devait être un ruisseau qui allait au Dniepr. […] Les Cosaques nous criaient de nous rendre, et tiraient à bout portant au milieu de nous ; ceux qui étaient frappés restaient abandonnés.

368. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre II : Partie critique du spiritualisme »

La pluralité des consciences a donc pour corollaire la discontinuité des consciences : d’où je tire cette conséquence, c’est que, dans l’hypothèse d’une unité primitive, homogène, sans division et absolument continue, la pluralité des consciences serait impossible. […] On veut savoir de quelle étoffe les choses sont faites, et l’on croit que Dieu les compose avec sa substance, comme un tailleur fait un habit avec du drap, à quoi les théologiens répondent que le drap est tiré du néant ; mais pour les uns et les autres il faut du drap. […] On n’a jamais pu tirer du matérialisme d’autre morale ni d’autre droit que la loi du plus fort.

369. (1761) Apologie de l’étude

Mais demandons à la plupart d’entre eux quel fruit ils ont tiré de leurs veilles ? […] Semblable à un pendule qu’une force étrangère a tiré de son repos, il tend à y revenir sans cesse. […] Chacun songeant donc également, et à se tirer de lui-même, et à faire désirer aux autres d’être à sa place, celui-ci aspire aux grandes richesses, celui-là aux grands honneurs ; un troisième espère trouver dans le sein de la méditation et de la retraite un bonheur plus facile et plus pur.

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