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29. (1739) Vie de Molière

On admire la conduite de la pièce jusqu’au dénouement ; on sent combien il est forcé, et combien les louanges du roi, quoique mal amenées, étaient nécessaires pour soutenir Molière contre ses ennemis. […] On ne croyait pas alors que les Français pussent jamais soutenir trois heures de musique, et qu’une tragédie toute chantée pût réussir. […] L’intrigue, qui en effet a quelque chose de plus plaisant que celle du Misanthrope, soutint la pièce longtemps. […] Mais Cottin était bien loin de pouvoir se soutenir contre de telles attaques : on dit qu’il fut si accablé de ce dernier coup, qu’il tomba dans une mélancolie qui le conduisit au tombeau. […] Depuis lui, le théâtre français s’est soutenu, et même a été asservi à des lois de décence plus rigoureuses que du temps de Molière.

30. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Cherchant à me rendre compte de son talent lyrique et poétique, et des limites naturelles de cette vocation, j’écrivais dans le Globe (20 mars 1827), lorsque parurent les Sept Messéniennes nouvelles, le jugement que voici : — Quand un beau talent a remporté, du premier coup, un succès d’enthousiasme, et qu’une prédilection presque unanime s’est plu à le parer, jeune encore, et des louanges qu’il méritait déjà et de celles qu’on rêvait pour lui dans l’avenir, il arrive difficilement qu’une gloire où l’espérance a tant de part soutienne toutes ses promesses, et que l’augure si brillant de son début ne finisse point par tourner contre elle. […] La strophe, au contraire, enferme plus exactement la pensée, et la soutient plus encore qu’elle ne la gêne. […] Ce qui dure à une certaine hauteur, ce qui se soutient ou se perfectionne a, par cela même, son caractère ; et s’il entre dans ce ménagement du talent bon sens et prudence, c’est une part morale, après tout, dont on n’a pas à rougir, et qui, parmi tant de profusions et d’écarts, devient une distinction de plus. […] Delavigne soutint le choc : il faut avouer pourtant que sur plusieurs points il plia. […] Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure.

31. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Qui me soutient, demandes-tu ? […] La puissante logique qui étend les périodes soutient les images. […] » Les métaphores ainsi soutenues prennent une ampleur, une pompe et une majesté singulières. […] Le royal orateur disserte et démontre. « Adam est capable de se soutenir, quoique libre de tomber. […] Librement les uns se sont soutenus, librement les autres sont tombés.

32. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 7, nouvelles preuves que la declamation théatrale des anciens étoit composée, et qu’elle s’écrivoit en notes. Preuve tirée de ce que l’acteur qui la recitoit, étoit accompagné par des instrumens » pp. 112-126

Quintilien dit, après avoir parlé contre les orateurs qui déclamoient au barreau comme on déclamoit sur le théatre : si cet usage doit avoir lieu, il faudra donc aussi que nous autres orateurs nous nous fassions soutenir en déclamant par des lyres et par des flutes. Cela veut dire que la déclamation theatrale est si variée, qu’il est si difficile d’entrer avec justesse dans tous ses differens tons, qu’on a besoin lorsqu’on veut déclamer comme on déclame sur la scene, de se faire soutenir par un accompagnement qui aide à bien prendre ces tons, et qui empêche de faire de fausses inflexions de voix. […] On ne doit pas trouver si étrange après cela que les comediens se fissent soutenir par un accompagnement, quoiqu’ils ne chantassent point à notre maniere et qu’ils ne fissent que reciter une déclamation composée.

33. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 489-492

Il s’en faut cependant de beaucoup que Charles Perrault soit en état de soutenir un poids si immense de gloire, à moins qu’en jugeant par lui des Auteurs Encyclopédistes, sa médiocrité ne fût un préjugé pour la leur, ce qui seroit bien plus vraisemblable. […] Est-ce ensuite par la maniere dont il soutient cette cause ?

34. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 34, que la réputation d’un systême de philosophie peut être détruite, que celle d’un poëme ne sçauroit l’être » pp. 489-511

Rien ne seroit donc plus déraisonnable que de s’appuïer du suffrage des siecles et des nations pour prouver la solidité d’un systême de philosophie, et pour soutenir que la vogue où il est durera toujours, mais il est sensé de s’appuïer du suffrage des siecles et des nations pour prouver l’excellence d’un poëme, et pour soutenir qu’il sera toujours admiré. […] On est même bien fondé à soutenir que les generations à venir seront touchées en lisant un poëme qui a touché toutes les generations passées qui ont pû le lire en sa langue originale. […] Mais des philosophes s’opposent tous les jours aux philosophes qui soutiennent que la recherche de la verité est un ouvrage qui enseigne la verité.

35. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 507-511

La réputation de son Ouvrage de la Vérité de la Religion, prouvée par les faits, ne se soutint pas long-temps, quoique ce Livre l’eût fait recevoir à l’Academie. […] Il est vrai qu’il y soutient des paradoxes ; mais ces paradoxes n’ont rien qui puisse faire croire qu’il ait douté des vérités de la Religion, comme un des Coryphées de la Philosophie n’a pas craint de l’assurer.

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