Voltaire, en quatre pages intitulées : Ce gu’on ne fait pas et ce qu’on pourrait faire 47, et où il conseille en badinant, a plus fait pour donner le goût des améliorations sociales et d’une civilisation perfectionnée, que l’abbé de Saint-Pierre en ses trente volumes.
Il a permis avec une douce indulgence la libre poursuite du plaisir sensuel, sous la seule condition de respecter les convenances sociales, du reste singulièrement élargies ; et voici que de la sensation physique toute pure, dans laquelle il avait simplifié l’amour, est sortie la satiété ; la vanité même, par où on en relevait la saveur, n’a pas suffi à dissiper l’impression de langueur accablante, d’écœurante monotonie, que dépose à la longue dans les cœurs le libertinage du siècle.
Les tortures de la passion, les férocités et les lâchetés sociales, les âpres sanglots du désespoir, l’ironie et le dédain, tout se mêle avec force et harmonie dans ce cauchemar dantesque troué çà et là de lumineuses issues par où l’esprit s’envole vers la paix et la joie idéales.
Comme on retouche le portrait moral qu’on tracerait de lui d’après l’Emile ou le Contrat social, quand on consulte ses Confessions ou les récits des contemporains !
On pourrait appeler, comme on le voit, ces causes éloignées de nos plaisirs et de nos douleurs : causes égoïstes, causes sociales, causes esthétiques.
Mais la poésie dramatique, celle qui présente les passions du cœur humain aux prises dans les diverses variétés sociales, celle-là il la recherche et il la goûte ; il aime à en disserter, et il trouve à en dire les choses les plus ingénieuses et les moins prévues, qui n’en sont pas moins justes pour cela.
Après chaque ébranlement social, voulez-vous avoir la mesure de la confiance renaissante ?