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1282. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Chaque trait de talent et de pensée était vivement saisi au passage, et je me souviens qu’on applaudit fort celui-ci, par exemple (je ne le cite que comme m’étant resté dans la mémoire), lorsque, arrivant à parler de l’ordre des jésuites, l’historien décrivait cette société habile, active, infatigable, qui, pour arriver à ses fins, osait otut, même le bien. […] Il est surtout une époque bien mémorable de son règne, celle qui précède la paix de Nimègue (1672-1678), dans laquelle Louis XIV ne partage avec personne le mérite d’avoir conduit sa politique extérieure : il avait perdu son habile conseiller M.de Lionne, en 1671 ; M.de Pomponne, qui lui succédait, homme aimable, plume excellente, le charme des sociétés de mesdames de Sévigné et de Coulanges, n’était pas en tout, à beaucoup près, un remplaçant de M.de Lionne, ni du même ordre politique ; il manquait de fertilité et d’invention. […] On arrive, en continuant de rêver, à se dire que la société est une invention, que la civilisation est un art, que tout cela a été trouvé, mais aurait pu ne l’être pas ou du moins ne l’être qu’infiniment peu, et qu’enfin il y a nécessairement de l’artifice dans ces génies dirigeants.

1283. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

Une certaine conscience intérieure, au milieu de tous leurs succès de société, semble avoir averti les poëtes et beaux-esprits de ce bord, qu’ils n’étaient pas à leur vraie place dans le siècle, que leur moment était passé ou n’était pas venu, que d’autres, véritablement grands, régnaient, qu’ils étaient évincés, en un mot. […] Quand on lit un choix bien fait de ses vers, desquels il faut retrancher absolument et ignorer tant de fadaises de société sur sa chatte et sur son chien, on est frappé chez elle de qualités autres encore que celles qu’on lui accordait jadis. […] Des Houlières, qui reprit du service et vécut fort peu à ses côtés, elle ne put jamais relever ses affaires de fortune, dérangées par une longue absence, et sa vie se passa dans des gênes continuelles, que l’agrément de la société ne recouvrait qu’à demi.

1284. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Il y passa quelques mois comme précepteur, en 1675 ; il y vint quelquefois pendant ses vacances de Sedan ; il y resta dans l’intervalle de son retour de Sedan à son départ pour Rotterdam : mais on peut dire qu’il ne connut pas le monde de Paris, la belle société de ces années brillantes ; son langage et ses habitudes s’en ressentent d’abord. […] Si Bayle eût vécu au centre de la société lettrée de son âge, de cette société polie que M. 

1285. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Il faudrait signaler encore comme une émanation de l’esprit clérical, et comme un des moyens d’action par où les clercs modifièrent l’esprit de la société laïque, les sermons prononcés dès le ixe et le xe  siècle en langue vulgaire, et dont nous aurons occasion de parler ailleurs. […] Quel qu’ait pu être Guillaume de Lorris, noble, bourgeois ou vilain, il avait étudié, et il adressait son poème à la société aristocratique, à celle qu’avait ravie Chrétien de Troyes et pour qui chantait précisément en ce temps-là le comte Thibaut de Champagne. […] Le paupérisme, et l’inégalité des biens, la nature du pouvoir royal, l’origine de l’État et des pouvoirs publics, la justice, l’instinct, la nature du mal, l’origine de la société, de la propriété, du mariage, le conflit du clergé séculier et du clergé régulier, des mendiants et de l’Université, l’œuvre de création et de destruction incessantes de la nature, les rapports de la nature et de l’art, la notion de la liberté et son conflit avec le dogme et la prescience divine, l’origine du mal et du péché, l’homme dans la nature, et son désordre dans l’ordre universel, toutes sortes d’observations, de discussions, de démonstrations sur l’arc-en-ciel, les miroirs, les erreurs des sens, les visions, les hallucinations, la sorcellerie et jusque sur certain phénomène de dédoublement de la personnalité, voilà un sommaire aperçu des questions que traite Jean de Meung, outre tous les développements de morale et de satire qui tiennent plus directement à l’action du roman, etje ne sais combien de contes mythologiques extraits d’Ovide ou de Virgile, tels que les amours de Didon et l’histoire de Pygmalion.

1286. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Mais comme, à toute époque, le cercle formé par ces deux genres d’intelligences n’est jamais excessivement étendu, et comme, chaque jour, il tend à se rétrécir davantage dans notre société bourgeoise, occupée de grosses choses et se complaisant dans sa propre vulgarité, l’effet de la publication, risquée par la Revue des Deux-Mondes, n’alla pas plus loin. […] Elle ne sentit jamais le besoin d’avoir une société autour d’elle sur les degrés d’un Capitole ou sur le pic d’un cap Misène, pour épancher la poésie contenue dans son sein. […] Depuis qu’il était sorti du collège et qu’il était entré dans le monde, Georges-Maurice de Guérin avait été toujours errant, tantôt chez M. de Lamennais, en Bretagne, où il vit le Lucifer du sacerdoce pencher longtemps sa tête d’astre sur le gouffre au fond duquel il allait se précipiter ; tantôt à Paris, ici ou là, obligé aux luttes familières à tous les membres de cette pauvre société déclassée, et sauvant de ces luttes qui auraient dû l’écraser, le talent le plus fait pour le repos, la contemplation, la position horizontale, et ce que les gens, qui suent aux mécaniques de ce temps, appelleraient peut-être l’oisiveté.

1287. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Dans son état final, la société n’est ni la monarchie, ni l’aristocratie, ni la démocratie, ni l’anarchie, et pourtant, dans un certain sens, elle est tout cela à la fois. […] Il est donc clair que les formes extérieures de gouvernement qui appartiennent à la période de civilisation ne sont que l’expression, en symboles extérieurs et distincts, des faits de la véritable vie interne de la société »43. […] Il y en a une qui est d’affirmer qu’elle est essentiellement nécessaire à la vie en masse, à la vie des sociétés ; il y en a une autre qui consiste à la nier radicalement dans son principe ; il y en a une troisième enfin qui consiste à l’expliquer.

1288. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

À l’origine même de la société hébraïque, avaient commencé les écoles des prophètes. […] Mais, malgré ce rapport dans les faits, la distance est trop grande entre les deux influences, comme entre les deux sociétés. […]   « Tu n’auras pas avec eux même la société de la tombe ; car tu as ruiné ton pays, tué ton peuple ; et la semence des méchants ne sera pas nommée dans l’éternité.

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