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332. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

On peut étudier une science pour s’en servir, pour en tirer parti ; mais on peut en outre l’étudier pour elle-même. […] Lors même que l’histoire de la philosophie ne servirait à rien en général, et même ne servirait pas à la philosophie proprement dite (ce qui est manifestement faux), on ne pourrait pas en conclure néanmoins qu’elle ne fût point par elle-même l’objet légitime de la curiosité, de l’examen. […] Par les doctrines métaphysiques, elle nous sert à comprendre l’histoire des religions.

333. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

D’ailleurs il y a dans les arts mécaniques les plus communs un raisonnement si juste, si compliqué, et cependant si lumineux, qu’on ne peut assez admirer la profondeur de la raison et du génie de l’homme, lorsque tant de sciences plus élevées ne servent qu’à nous démontrer l’absurdité de l’esprit humain. […] J’oubliais encore de dire que dans ces écoles on étudie aussi les éléments de l’histoire, de la géographie ; on prend une teinture du blason, des généalogies des maisons souveraines, enfin de tout ce qui est nécessaire à un homme qui veut servir sa patrie avec quelque distinction8. […] Ordinairement chaque professeur a un livre élémentaire imprimé qui sert de fondement à ses leçons, qu’il explique à ses auditeurs, et aux principes duquel il ramène toutes les digressions dont il se sert pour rendre les éléments de chaque science plus frappants et plus sensibles.

334. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Il n’y avait que la haine révolutionnaire qui pût aller de pair avec la vanité effrénée, dans l’âme de Mme Colet, si on peut se servir de ce mot d’âme, en parlant d’elle. […] Incapable de creuser longtemps dans la nature humaine et de nous faire un livre profond de ce qu’elle y aurait trouvé, Mme Colet a pour ressource de plaquer autour des amours avilissants et avilis, dont elle nous raconte les orages, de longues descriptions de Venise, fourbues à force d’avoir servi, et des citations de Byron toujours inévitables, quand on parle de Venise et qu’on n’a pas en soi d’impression, neuve et sincère. […] Serrer sa pensée autour des faits, qui est le grand mérite de l’historien, n’était pas possible à cette femme dont le moi a des pieds d’éléphant, qui se fourrent partout et qui écrasent tout… D’ailleurs l’Italie des Italiens n’était pas qu’un livre d’histoire ; c’était aussi un voyage où l’auteur avait le droit de parler de soi, et vous pensez si elle allait s’en servir, de ce droit, parfois insupportable ! […] Et si je me sers de cette comparaison, dont je lui renvoie le sacrilège, c’est que Mme Colet, comme Michelet, comme M. 

335. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

L’expérience l’a instruit et il sait combien peu il lui a servi de changer tant de fois de régime. […] Fichte, qui avait commencé par se dire citoyen du monde, proclamait dans ses leçons à Berlin que le bon moyen de servir l’humanité est de servir et d’aimer la patrie. […] Le Créateur ne s’est servi que d’un seul et même patron pour tous les êtres organisés. […] Savoir n’est rien, s’il ne sert à prévoir. […] Les mots eux-mêmes contribuent ici à accréditer l’erreur, et le langage sert à la répandre.

336. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racan, et Marie de Jars de Gournai. » pp. 165-171

Deux jours après, ils se trouvent à dîner ensemble : on servit un mauvais potage. […] Il s’en trouveroit fort peu qui voudroient prendre cette peine ; &, pour ce qui est dit qu’elle a servi le public, ç’a été si particulièrement, qu’on n’en parle que par conjecture.

337. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 20, de la difference des moeurs et des inclinations du même peuple en des siecles differens » pp. 313-319

C’est la politique, secondée par l’esprit du siecle, qui a fait commettre toutes ces noirceurs à des gens, dont, pour me servir de l’expression du temps, toute la religion gisoit dans une écharpe rouge ou dans une blanche. […] Pourquoi vient-il des siecles où les hommes ont un éloignement invincible de tous les travaux d’esprits, et où ils sont si peu disposez à étudier, que toutes les voïes dont on se sert pour les y exciter demeurent long-temps inutiles ?

338. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — V »

On se rappelle qu’il répondit : « Nous ne pouvons pas tous servir la patrie de la même façon. […] Si chacun peut en dire autant de soi, cela ira bien pour tous. »‌ Vous voyez comment il faudrait très légèrement transformer la phrase pour qu’un de ces grands individus, que Taine traite de fous furieux, la reprît : « Nous ne pouvons pas tous servir l’humanité de la même façon… Marc-Aurèle, Spinoza, Gœthe, c’est très bien… accepter les lois de la nature, c’est parfait… Mais contrarier la nature, l’exalter, c’est un magnifique dressage… » Les grands hommes que je viens de citer sont des forces conservatrices ; elles s’efforcent de maintenir ; elles pourraient enrayer le mouvement vers l’inconnu, qui est la vie même.

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