Tel mot, qui ne frappe point le lecteur, fait un effet profond sur le spectateur ; il y a des choses qu’on lit mais qu’on ne veut point entendre, et d’autres qui feraient fermer un livre et qu’on accepte à la scène. […] Comparez Sapho roman avec Sapho drame, en particulier les deux scènes finales : la chute définitive de Gaussin et comment Sapho l’abandonne ; vous saisirez sur le vif le contraste qu’il y a entre la vision épique et les exigences de la scène. […] — Les romans qu’on adapte à la scène sont nombreux ; le cas inverse plutôt rare. […] On est pour ou contre le divorce ; on est capitaliste ou socialiste, catholique ou libre penseur ; on porte à la scène le scandale du jour ou l’avarie ; et Pataud va voir si Bourget l’a mis dans La Barricade. […] Les décors étaient d’un artiste, très réussis ; toutefois, ils exigeaient des changements de scènes, et ces entr’actes coupaient la trame légère de l’action d’une façon fort désagréable.
Ils veulent absolument voir dans la pièce grecque une autorité et un précédent direct pour les drames d’aujourd’hui, et non-seulement quant à la franchise et la crudité des actions, mais quant au style, mélange, assurent-ils, de naïveté et de recherche ; tellement qu’ils ont pu entrer tout droit chez le poëte d’Antigone en sortant de chez le poëte de Falstaff (ces messieurs ont en effet traduit et arrangé pour la scène quelque chose de Shakspeare). […] Ce sera le moyen de le tenir en laisse par une correspondance suivie et qui soit de nature à pouvoir être publiée dans les journaux, afin qu’il soit presque toujours en scène.
Jay n’a nullement reculé devant la tâche obligatoire : il a pris M. de Montesquiou depuis son entrée sur la scène politique jusqu’à sa mort ; il a encadré, entre l’apparition et le décès de M. de Montesquiou, toute notre révolution, se rejetant, quand la vie du héros faisait faute, sur Castor et Pollux, sur la Convention et sur l’Empire, lançant son petit trait au passage contre les passions sinistres et contre la manie des conquêtes, manie qui n’est guère contagieuse apparemment. […] Sans doute les genres se confondent et se heurtent horriblement ; le mauvais déborde ; l’ignoble nous repousse et envahit la scène de toutes parts.
J’ai trouvé que l’École des vieillards ne manquait ni de vérité ni de force, et que la confession de Louis XI à François de Paule était une scène singulièrement dramatique ; et j’ai goûté, dans les Poésies posthumes, le rythme berceur et le charme gris des Limbes… Je n’avais pas lu Une famille au temps de Luther, mais j’en avais d’avance une assez bonne opinion, et je comptais que la représentation serait pour le moins intéressante. […] Eugène Lintilhac Le Paria (1829), dont les chœurs sont fort beaux et annoncent la poésie des Poèmes antiques d’Alfred de Vigny ; Marino Faliero (30 mai 1829), dont les audaces sont antérieures à celles d’Hernani, et en sont toutes voisines, puisque le poète s’y affranchit de l’unité de lieu et admet le mélange du comique dans le dialogue… ; Louis XI, d’un effet si sûr à la scène ; les Enfants d’Édouard, si adroitement découpés dans Shakespeare… [Précis historique et critique de la littérature française (1895).]
Les pièces qu’il intitule Ballades ont un caractère différent ; ce sont des esquisses d’un genre capricieux : tableaux, rêves, scènes, récits, légendes superstitieuses, traditions populaires. […] L’auteur de ce livre a le malheur de ne rien comprendre à tout cela ; il y cherche des choses et n’y voit que des mots ; il lui semble que ce qui est réellement beau et vrai est beau et vrai partout ; que ce qui est dramatique dans un roman sera dramatique sur la scène ; que ce qui est lyrique dans un couplet sera lyrique dans une strophe ; qu’enfin et toujours la seule distinction véritable dans les œuvres de l’esprit est celle du bon et du mauvais.
Nous quittons les harmonies physiques des monuments religieux et des scènes de la nature pour entrer dans les harmonies morales du christianisme. […] Quand le peuple croit entendre la voix des morts dans les vents, quand il parle des fantômes de la nuit, quand il va en pèlerinage pour le soulagement de ses maux, il est évident que ces opinions ne sont que des relations touchantes entre quelques scènes naturelles, quelques dogmes sacrés, et la misère de nos cœurs.
Ils sont encore au point de vue d’un acteur qui n’aurait pu saisir du grand drame qu’un petit nombre de scènes. […] Une scène d’intérieur, voilà tout le sujet des Syracusaines. […] Sur la place publique, devant l’église, devant son église, qui est aussi sa maison commune, la foule vit de la vie fictive de la scène. […] À les regarder tous du haut du clocher, on n’a plus sous les yeux une scène et des spectateurs, mais un double spectacle. […] La mise en scène des mystères n’est pas d’un réalisme incontestable aux yeux de tout le monde.