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1186. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Il y a un petit traité d’Huygens20 qu’on pourrait rendre encore plus clair et plus simple. […] Je remarquerai seulement que chez toutes les nations, la langue a dû ses progrès aux premiers génies ; c’était le résultat des efforts qu’ils faisaient pour rendre fortement et clairement leurs pensées. […] Rendre cette page traduite dans la langue de l’auteur, et comparer sa traduction avec le texte original. […] Mais il est plein de peintures licencieuses, et pour en rendre l’usage innocent il faudrait l’estropier partout. […] Sans doute le travail du thème est de chercher un mot latin pour rendre le mot français ; mais s’ensuit-il de ce travail que le mot qu’on trouvera sera nécessairement celui qui convient ?

1187. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Prévost, doyen du conseil général du département dont il fait partie depuis plus de trente-deux ans, maire de la ville d’Hesdin pendant trente-cinq ans jusqu’en 1848, considéré et vénéré de ses concitoyens pour les services qu’il n’a cessé de leur rendre, et vivant aujourd’hui dans la retraite. […] Après un long exil de sept ans, rentré en France en 1735, retiré quelque temps, pour la forme, à l’abbaye de La Croix-Saint-Leufroy au diocèse d’Évreux, chez l’abbé de Machault, où il voyait bonne compagnie, et d’où il correspondait avec Thieriot et avec l’abbé Le Blanc, qui lui donnaient des nouvelles littéraires ; ayant achevé sa courte pénitence spirituelle à Gaillon ; puis devenu l’hôte et l’aumônier commode et tout honoraire du prince de Conti, l’abbé Prévost, quoique souvent aux expédients jusque sous le toit d’un prince, vivait toutefois d’une existence relativement heureuse au prix de son ancienne vie errante, lorsqu’au commencement de 1741, un service de correction de feuilles, qu’il rendit imprudemment à un nouvelliste satirique, l’obligea de quitter de nouveau Paris et le royaume. […] On y verra un exemple de plus de cette grâce, de ce tour coulant qu’il portait volontiers dans sa propre apologie comme en tout, et de cette manière de se soumettre sans s’abaisser : Monseigneur,   Ma disgrâce ne m’a pas rendu importun. […] Mais ma principale confiance est dans votre bonté, dont j’ai déjà ressenti bien des marques personnelles, et dont je m’efforcerai assurément de me rendre digne par l’usage que je ferai désormais de ma plume.

1188. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Comme dans la comédie de Marivaux, L’Heureux Stratagème, Marianne est tentée par moments d’user de représailles, d’aimer ou de faire semblant de se faire aimer par d’autres : « D’autres que lui m’aimeront, il le verra, et ils lui apprendront à estimer mon cœur… Un volage est un homme qui croit vous laisser comme solitaire ; se voit-il ensuite remplacé par d’autres, ce n’est plus là son compte, il ne l’entendait pas ainsi. » C’est assez montrer comment Marivaux, même quand il échappe au convenu du roman, au type de fidélité chevaleresque et pastorale, et quand il peint l’homme d’après le nu (éloge que lui donne Collé), nous le rend encore par un procédé artificiel et laisse trop voir son réseau de dissection au-dehors. […] Et il faut convenir qu’il est mieux rendu et plus joli en enfant qu’il ne serait en homme. […] Le xixe  siècle a été particulièrement favorable à Marivaux ; le gracieux interprète qu’il a retrouvé sur la scène, cette actrice inimitable qui a débuté par ses rôles malins et ingénus, leur a rendu à nos yeux toute leur jeunesse. […] Nos spirituels ou poétiques auteurs de petites comédies, de proverbes, de spectacles dans un fauteuil, ont reconnu en Marivaux un aîné sinon un maître, et lui ont rendu plus d’un hommage en le rappelant ou en l’imitant.

1189. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

M. de Meilhan avait beaucoup lu le cardinal de Retz et les auteurs du xviie  siècle ; il s’était amusé à tirer de là un pastiche qu’il ne s’était point attaché à rendre trop fidèle : il aurait été bien fâché, a-t-on remarqué, que la petite fraude eût trop réussi, et qu’on ne devinât point le nouvel auteur sous le masque. […] Il montre que la première idée d’un compte rendu appartient à Desmarets, ministre des finances sur la fin de Louis XIV, et que c’est à ce ministre qu’on devrait en rapporter l’honneur. […] Il y a des chapitres qui, pour la forme, sont dans le goût de Montesquieu : ainsi, le chapitre XV sur la France : « Il est un peuple à qui sa vivacité rend tout sensible à l’excès, à qui sa légèreté ne permet pas d’éprouver d’impressions durables. […] Dès les premières pages, il nous rend bien le caractère général de cette époque, ce qu’il a appelé le « caractère sexagénaire » du siècle.

1190. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

La rencontre qu’il fit de l’abbé de La Caille dans une société le rendit élève de ce savant homme en astronomie. […] Voltaire de son côté, qui recevait le premier volume de l’Histoire de l’astronomie, de Bailly, s’empressait de lui répondre gaiement : J’ai bien des grâces à vous rendre, monsieur ; car ayant reçu le même jour un gros livre de médecine et le vôtre, lorsque j’étais encore malade, je n’ai point ouvert le premier ; j’ai déjà lu le second presque tout entier, et je me porte mieux. […] Bailly s’en expliqua par lettre auprès de Voltaire, lequel répliqua à son tour et résista par toutes les raisons que le bon sens trouve au premier abord, et que le sien rendait si piquantes et si gaies ; il répugnait à admettre que l’âge d’or des sciences, et de l’astronomie en particulier, eût été se loger d’emblée en Sibérie : J’ose toujours, monsieur, vous demander grâce pour les brachmanes. […] Le temps, loin de nous éclairer, nous rend plus opiniâtres.

1191. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

… » L’originalité de Maurice de Guérin n’était pas là ; elle était dans un sentiment de la nature, tel qu’aucun poète ou peintre français ne l’a rendu à ce degré, sentiment non pas tant des détails que de l’ensemble et de l’universalité sacrée, sentiment de l’origine des choses et du principe souverain de la vie. Il l’a rendu dans sa composition du Centaure avec une sève débordante, jointe à une beauté de forme et d’art qui, dans un coup d’essai, déclare un maître. […] Paysage d’avril, quel pinceau autre que cette plume virginale nous le rendra aussi léger et aussi riant ? […] C’est à ce dernier rendez-vous qu’elle aspire sans cesse et qu’elle renvoie le terme et la satisfaction de tous les désirs, de toutes les espérances, retardées seulement et interrompues.

1192. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

Et puis, est-ce rendre à leurs œuvres le plus digne hommage que d’éviter d’en parler devant tous ? […] Le court jugement qu’il porte de Carnot en passant (« honnête homme autant que peut l’être un fanatique badaud  ») indique que, pour tout ce qui sort de son cercle défini, de son champ de vision tracé, le dédain peut le rendre léger, injuste, sans qu’il y ait jamais malveillance. […] Ses enfants le lui rendaient entre eux en l’appelant familièrement le père. […] Ce qui se rapporte bien à cet autre mot qu’il avait dit précédemment : « J’ai trois médecines à rendre, Dupont, Laffite et La Fayette. » 13.

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