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946. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Béranger avait remarqué bien des fois cette disposition mélancolique des hommes assemblés, et en avait conclu l’idée de la chanson doucement sérieuse à l’usage du pauvre, de l’affligé, du peuple. […] la plainte du pays ; la douleur morne, l’espoir opiniâtre de la vieille armée ; l’espoir plus léger, l’impatience et les moqueries de la jeunesse ; la tristesse dans le plaisir ; de l’esprit tour à tour piquant, coloré, attendri, comme il ne s’en trouve que là depuis Voltaire ; de suaves et gracieuses enveloppes d’une pureté d’art antique, et qui par moments rappellent, ainsi qu’on l’a remarqué avec goût, Simonide, Asclépiade et les érotiques de l’Anthologie. 

947. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Son Dernier Chouan, en 1829, l’avait fait remarquer pour la première fois, mais sans le tirer encore de la foule ; sa Physiologie du Mariage lui avait acquis la réputation d’un homme d’esprit, observateur sans scrupules, un peu graveleusement expert sur une matière plus scabreuse que celle dont avait traité Brillat-Savarin ; mais c’est à partir de la Peau de Chagrin seulement que M. de Balzac est entré à pleine verve dans le public, et qu’il l’a, sinon conquis tout entier, du moins remué, sillonné en tout sens, étonné, émerveillé, choqué ou chatouillé en mille manières. […] De 1821 à 1829, époque où M. de Balzac commença de se faire remarquer par la publication du Dernier Chouan, qu’a-t-il tenté ?

948. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Mais, à mesure qu’il avançait, l’esprit qui domine dans ce livre augmentait aussi d’influence, et y donnait une couleur qui n’a pas été assez remarquée des critiques : n’y voyant que la lettre, ou faisant semblant, ils l’ont traité comme un pur ouvrage de littérature ancienne. […] Mais d’abord je lui ferai remarquer que c’est déjà une grande réhabilitation obtenue, que cette part d’importance faite par lui-même au poëte jadis étranglé dans six vers de Boileau.

949. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Pendant que M hiers entrait au Constitutionnel par M tienne, M ignet arrivait par Châtelain au Courrier, et y prenait rang d’abord dans des articles sur la politique extérieure qui eurent l’honneur d’être remarqués de M e Talleyrand. […] Voilà les défauts qui disparaissent le plus habituellement dans la fermeté, l’énergie, l’éclat ou la propriété de l’expression, et qui ne se remarquent plus du tout dans les beaux récits de M.Mignet, tels que celui des événements de Hollande sous les frères de Witt ; nous osons lui proposer à lui-même ce parfait exemple pour son histoire future de la Réformation.

950. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

En tête d’une des lettres de sa Critique générale, Bayle nous dit avoir remarqué, dès ses jeunes ans, une chose qui lui parut bien jolie et bien imitable, dans l’Histoire de l’Académie française de Pelisson : c’est que celui-ci avait toujours plus cherché, en lisant un livre, l’esprit et le génie de l’auteur que le sujet même qu’on y traitait. […] Certains dévots n’en gardent pas non plus dans l’expression, dès qu’il s’agit de ces choses, et l’on a remarqué qu’ils aiment à salir la volupté, pour en dégoûter sans doute.

951. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Politien, remarquez encore que, de tous mes enfants, nul n’a montré une nature égale à celle de Pierre, de telle sorte qu’il me fait augurer et espérer qu’il ne le cédera à aucun de ses ancêtres, à moins que les expériences que j’ai déjà faites de ses talents ne me trompent. » Il m’a donné récemment une preuve de la vérité du jugement et de la prévision de son père, quand nous l’avons vu sans cesse près de lui dans sa maladie, toujours prévenant dans les services les plus intimes et les plus désagréables, supportant le plus patiemment possible les veilles, la privation d’aliments, ne pouvant souffrir qu’on l’arrachât du lit de son père que pour les affaires les plus urgentes de la république, et tout cela avec une merveilleuse piété répandue sur toute sa personne. […] Dans ce présage, on remarqua aussi qu’une seule colonne dorée de ce dôme, une seule, fut renversée par la foudre, comme pour n’être pas d’un trop mauvais augure pour cette illustre famille.

952. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Je ne sais si on l’a assez remarqué, les plus fragiles ou fausses morales ont toujours été proposées par de très honnêtes gens qui ont pris dans l’instinct et dans le plaisir la règle fondamentale de la vie, parce que leur instinct et leur plaisir ne les écartaient pas sensiblement des actions sans lesquelles il n’y a plus de morale, partant plus de société : ainsi Helvétius, ainsi Montaigne. […] Rois ou paysans ne diffèrent qu’en « leurs chausses242 » : les passions, les ressorts sont les mêmes ; mais les effets ici sont plus menus, là plus illustres ; et voilà, remarquez-le, le principe d’une théorie toute classique de la tragédie.

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