Il n’importe ; on voit ici, dans l’unité de ton des hymnes religieux et des récits épiques, l’antiquité même de cette poésie lyrique. […] Nulle part, la fable ingénieuse et symbolique de Cérès et de Proserpine n’a été contée avec autant de charme religieux et de pathétique. […] Un tel langage appartient à ces temps de la Grèce, où le courage et le génie du peuple étaient le plus liés aux croyances et aux fêtes du culte religieux.
Dans Un conflit religieux au xiie siècle. […] Mais l’éducation religieuse de Rousseau fut sans intensité et tenait peu. […] Et la partie consciencieuse, religieuse, de son esprit y intervient comme pour la fixer solennellement en lui. […] Elle avilissait du même coup le sentiment religieux. […] Elle prend possession directe du gouvernement religieux et moral.
La science et l’humanisme, peut-on me dire, vous offrent un aliment religieux suffisant. […] Maintenir une portion de l’humanité dans la brutalité est immoral et dangereux ; lui rendre la chaîne des anciennes croyances religieuses, qui la moralisaient suffisamment, est impossible. […] La question de la réforme gouvernementale n’est donc plus politique ; elle est morale et religieuse ; le ministère de l’Instruction publique est le plus sérieux, ou, pour mieux dire, le seul sérieux des ministères. […] Et quant aux absurdes persécutions religieuses de Louis XIV, il n’y avait qu’une femme étroite et dure, des jésuites et Bossuet qui fussent capables de les conseiller à un roi fatigué. […] C’est impossible, la chaîne est trop forte : le pape, l’empereur, les rois, les ordres religieux, les universités ; et pour soulever tout cela, un pauvre moine.
Les anciennes hymnes, les proses du Moyen Âge, dont toutes d’ailleurs n’avaient pas la beauté religieuse, la gravité ou l’onction des principales que nous connaissons, étaient jugées sévèrement par les délicats, et il parut aux hommes les plus considérables du clergé de France que c’était faire acte de convenance et de bonne liturgie que d’en remplacer quelques-unes par des strophes d’un rythme et d’une latinité plus d’accord avec les règles de l’ancienne poésie classique. […] Il ne fut d’ailleurs jamais prêtre ; son humeur naturellement impétueuse, son tempérament poétique et glorieux qui triompha toujours de ses projets de réforme, l’avertit à temps de son peu de vocation, et, en faisant de lui le plus étrange des religieux, l’arrêta du moins sur le seuil de l’autel. […] Pellisson qui, depuis qu’il s’était converti, avait beaucoup de zèle, et qui de plus avait titre et qualité spéciale d’économe de Cluny, engagea un jour Santeul à mieux employer son talent, et à faire des chants religieux, des hymnes qui lui seraient une occupation également lucrative et plus décente, plus digne d’un religieux : « Laissez là, lui disait-il, tous ces artifices menteurs des muses et d’Apollon ; c’est assez donner à Phébus et aux muses ; ces sortes de jeux ne siéent qu’à la jeunesse, et, pour n’être que des jeux, on y trouve aussi quelque gloire.
En un mot, il reçut des soins de son excellente mère une éducation hardie et mâle, que la nature en lui favorisait, et que l’austérité de sa communion religieuse confirma : il eut la jeunesse ardente, frugale et grave. […] La première guerre civile religieuse, entamée en 1621, paraît s’être faite contre le gré de Rohan, quoiqu’il en ait été l’instrument et le champion énergique. […] Chef de ligue et d’une ligue religieuse, M. de Rohan eut donc à lutter contre tous les inconvénients de sa situation, prédications fanatiques et dénonciations au dedans, violences populaires, excès et crimes à punir (comme autrefois M. de Mayenne avec les Seize), troupes volontaires et difficiles à ramasser ou à contenir sous le drapeau. […] Car, une fois ces guerres religieuses entamées, ce fut l’honneur de M. de Rohan de ne jamais donner les mains à des traités particuliers et de ne pas sacrifier son parti ; c’est en cela autant que par ses talents de capitaine qu’il se distingue des autres seigneurs tôt ou tard défectionnaires, et qu’il a mérité que cette cause protestante française restât identifiée à son nom.
Par exemple, en terminant une Histoire de Port-Royal où le grand Racine aurait rempli toute la place qu’il doit tenir, et où l’on aurait montré l’esprit religieux de cette sainte maison s’exprimant par sa bouche avec un caractère unique de tendresse, de mélodie et de grandeur, dans l’œuvre d’Athalie et surtout dans celle d’Esther on ajouterait quelque chose comme ceci : « Il est un autre Racine que l’on aurait aimé à y joindre, ce Racine fils qui n’a pas été tout à fait sans doute le poète tendre, plaintif, l’élégiaque chrétien, le Cowper janséniste qu’on aurait souhaité à Port-Royal expiré, mais qui en a eu quelques accents ; ce Racine fils qui offre le modèle de la manière la plus honorable de porter un nom illustre quand on est engagé dans la même carrière ; car si le crime d’une mère est un pesant fardeau, la gloire d’un père n’en est pas un moins grand, et Racine fils n’a cessé de le sentir en même temps qu’il a suffi dignement encore à ce rôle difficile. […] C’est par où il débute, dans un temps qu’il se croyait appelé au parti de la retraite religieuse chez les Oratoriens. […] Mais enfin, il est honorable à ce chantre de la Religion, purement raisonneur et sans invention, à ce traducteur en vers des Pensées de Pascal, de s’être enquis des autres poèmes religieux construits par de vraiment grands architectes et poètes dans les littératures étrangères, et d’avoir essayé d’y mordre. […] Racine avait une autre sœur encore dont l’abbé de La Roque ne parle pas, qui se fit religieuse à Port-Royal, la sœur Marie de Sainte-Geneviève Racine, de laquelle on ne dit rien sinon qu’elle mourut dans de grands sentiments de piété.
Il fait remarquer le rapport constant qui s’est établi entre le déclin et le retour des vrais principes politiques et des principes religieux pendant le cours de la Révolution française ; le Concordat n’est pas maudit. […] Il y a dans sa conduite d’alors et dans sa tendance d’aujourd’hui cette véritable, cette seule ressemblance, à savoir qu’il ne s’est jamais borné et même qu’il n’a guère jamais aimé à envisager le christianisme, comme tant de grands saints l’ont fait, par le côté purement intérieur et individuel, par le point de vue du salut de l’âme et des âmes prises une à une, mais qui l’a embrassé toujours de préférence (et en exceptant, si l’on veut, son Commentaire sur l’Imitation et sa traduction de Louis de Blois) par le côté social, par son influence sur la masse et sur l’organisation de la société ; et c’est ainsi qu’il se portait avant tout pour la défense des grands papes et des institutions catholiques. « Jésus-Christ, disait-il en 1826, ne changea ni la religion, ni les droits, ni les devoirs ; mais, en développant la loi primitive, en l’accomplissant, il éleva la société religieuse à l’état public, il la constitua extérieurement par l’institution d’une merveilleuse police, etc. » Toutefois les moyens que M. de La Mennais proposait et exaltait jusqu’à la veille de juillet 1830 étaient, il faut le dire, séparés du temps actuel et de sa manière de penser présente par un abîme. […] Les doctrines religieuses, morales et politiques, les lois et les institutions qu’elles avaient consacrées, formaient comme un vaste édifice, demeure commune de la grande famille européenne. […] Sincèrement il conçoit l’idée d’une régénération spirituelle et religieuse moyennant la liberté, et, las de crier aux puissants, il lui paraît que c’est avec une autre prédication qu’il faut désormais réveiller, spiritualiser et christianiser le monde.