Et moi j’étais là aussi pour chanter toutes ces choses ; pour étudier les siècles à leur berceau, pour remonter jusqu’à sa source le cours inconnu d’une civilisation, d’une religion, pour m’inspirer de l’esprit des lieux et du sens caché des histoires et des monuments sur ces bords qui furent le point de départ du monde moderne, et pour nourrir d’une sagesse plus réelle et d’une philosophie plus vraie, la poésie grave et pensée de l’époque avancée où nous vivons ! […] Elle ne sera plus épique ; l’homme a trop vécu, trop réfléchi pour se laisser amuser, intéresser par les longs écrits de l’épopée, et l’expérience a détruit sa foi aux merveilles dont le poème épique enchantait sa crédulité ; elle ne sera plus dramatique ; parce que la scène de la vie réelle a, dans nos temps de liberté et d’action politique, un intérêt plus pressant, plus réel et plus intime que la scène du théâtre ; parce que les classes élevées de la société ne vont plus au théâtre pour être émues, mais pour juger ; parce que la société est devenue critique de naïve qu’elle était. […] La poésie sera de la raison chantée ; voilà sa destinée pour longtemps ; elle sera philosophique, religieuse, politique, sociale, comme les époques que le genre humain va traverser ; elle sera intime surtout, personnelle, méditative et grave ; non plus un jeu de l’esprit, un caprice mélodieux de la pensée légère et superficielle, mais l’écho profond, réel, sincère, des plus hautes conceptions de l’intelligence, des plus mystérieuses impressions de l’âme. […] Mais sera-t-elle morte pour être plus vraie, plus sincère, plus réelle qu’elle ne le fut jamais ?
Des artistes d’un très réel mérite, des œuvres très intéressantes ne trouveront point leur place, — et je le regrette, — dans cette sorte de vue perspective qu’il m’a paru intéressant d’ébaucher sous la forme d’un résumé rapide et synthétique. […] Mais son objet n’est plus de ressusciter de grands personnages, de nous faire pénétrer dans leur intimité, ni de nous montrer comment des êtres fictifs et individuels ont pu se comporter sous l’influence réelle d’un milieu exactement reconstitué. […] Les élèves, grandis dans une clôture monacale et dans une vision décharnée des faits officiels ou de quelques grands hommes à l’usage du baccalauréat, ne comprennent guère que la race de leur pays existe, que la terre de leur pays est une réalité et que, plus existant, plus réel encore que la terre ou la race, l’esprit de chaque patrie est pour ces fils l’instrument de libération. » L’Appel au soldat pose un cas de psychologie de l’âme populaire. […] Donc, maintenant encore, les morts sont nos maîtres réels. […] L’ensemble du roman, dont la donnée fut discutée, offre une réelle séduction.
Cette substance, cet être des choses, est dans la force, ainsi que l’a dit Leibnitz, non dans cette force sans spontanéité qui n’est elle-même qu’une abstraction de la mécanique, mais dans cette autre force, la seule réelle et naturelle, qui tend d’elle-même à une fin déterminée, comme l’instinct, comme la volonté. […] Oui sans doute, le concept de la loi morale, pour emprunter le langage de Kant, implique l’existence réelle de la liberté ; mais ce concept lui-même reposé sur le sentiment de cette liberté. […] L’homme réel est une cause, une force active, douée de facultés diverses qui n’attendent que le contact d’un objet pour entrer en exercice. […] Cette cause première existe dans un ordre supérieur, aussi réel, aussi accessible à l’expérience que l’autre, dans l’ordre de la finalité ; c’est la cause finale, le bien, cause à laquelle tout obéit, la nature fatalement par l’impulsion mécanique ou l’instinct, l’humanité librement par la volonté raisonnable. […] C’est parce qu’il se reconnaît une force, une cause, qu’il retrouve un monde peuplé de forces et de causes réelles.
Ce n’est pas pour ses Ouvrages, qui ne consistent qu’en quelques Plaidoyers, que nous lui donnons une place dans cette Galerie littéraire ; il a rendu aux Lettres des services plus réels, que ceux qu’ont cru lui rendre tant d’Ecrivains par leurs Ecrits.
Un tout composé d’un nombre de parties réelles et finies, n’est réel que si le nombre de ces parties est fini. […] Or, le beau ne produit rien de pareil : c’est donc qu’il n’est pas réel. […] Le réel n’est désiré par nous que comme ressemblant à l’idéal que nous aimons. […] Le moi réel, nouménal, primitif, n’était pas soumis aux principes rationnels. […] Cette doctrine conserve une liberté non point réelle, mais possible.
Elle est pardonnable & utile, lorsqu’elle attaque des défauts ou des abus réels, en respectant les loix de la bienséance, & en annonçant sur-tout plus de zele que de malignité.
1834 Ce qu’il y a d’excellent surtout, selon moi, aux vrais mémoires des vrais grands hommes, c’est que déjà connus par leurs œuvres publiques, par des actes ou des productions hors de ligne et qui resteraient des fruits un peu mystérieux pour le gros du genre humain, ces hommes nous apparaissent dans leurs mémoires par leur lien réel avec la nature de tous. […] Parmi les documents récents qui se rapportent à cette vie publique, il convient de rappeler les Souvenirs sur Mirabeau par Étienne Dumont (de Genève), livre de bonne foi et de sens, écrit par un homme bien informé, sans prétention ambitieuse, quoi qu’on en ait dit ; livre qui n’atteint en rien le génie propre à Mirabeau et ne cherche point à lui dérober ni à lui soutirer son tonnerre, mais qui a replacé l’homme et le génie dans quelques-unes des conditions réelles moins grandioses. […] Béranger, le poëte, me disait un jour qu’une fois que les hommes, les grands hommes vivants, étaient faits types et statues (et il m’en citait quelques-uns), il fallait bien se garder de les briser, de les rabaisser pour le plaisir de les trouver plus ressemblants dans le détail ; car, même en ne ressemblant pas exactement à la personne réelle, ces statues consacrées et meilleures deviennent une noble image de plus offerte à l’admiration des hommes. […] Comme, après un certain laps de temps, la vérité minutieuse et toute réelle est introuvable, comme elle l’est même souvent déjà entre contemporains, il faut ou se condamner à un scepticisme absolu et fatal, ou se résigner à cette grande manière qui nous reproduit bien moins l’individu en lui-même que les idées auxquelles il a contribué et qu’on personnifie sous son nom.