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201. (1874) Premiers lundis. Tome II « Li Romans de Berte aus Grans piés »

La pensée de notre jeune et savant collaborateur consistait à rechercher dans les anciennes épopées françaises, non pas seulement les imaginations plus ou moins gracieuses des conteurs et des poètes, non pas le mérite et l’agrément littéraire de leurs romans, mais les croyances diverses des populations, les récits historiques altérés, les invasions mythologiques qui avaient laissé des traces. […] Nous suivrons cette continuation avec l’intérêt qu’inspirent ces récits des vieux trouvères qui firent les délices de nos aïeux.

202. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre II. Des Époux. — Ulysse et Pénélope. »

Elle ne peut arracher ses beaux bras du cou du héros ; et l’Aurore aux doigts de rose aurait vu les larmes de ces époux si Minerve n’eût retenu le soleil dans la mer…… Cependant Eurynome, un flambeau à la main, précédant les pas d’Ulysse et de Pénélope, les conduit à la chambre nuptiale…… Les deux époux, après s’être livrés aux premiers transports de leur tendresse, s’enchantèrent par le récit mutuel de leurs peines…… Ulysse achevait à peine les derniers mots de son histoire, qu’un sommeil bienfaisant se glissa dans ses membres fatigués, et vint suspendre les soucis de son âme11. […] Il n’aurait pas manqué de semer son récit de réflexions philosophiques, de vers frappants, de mots heureux.

203. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Gabriel Ferry »

Dupe, ou, pour dire un mot moins dur, victime du génie de Cooper, Ferry a cru qu’on pouvait reprendre la création achevée d’un immense artiste, et il ne s’est pas aperçu que dans Fenimore Cooper le véritable personnage, le vrai héros des poèmes que nous avons sous les yeux, c’est l’Amérique elle-même, la mer, la plaine, le ciel, la terre, la poussière enfin de ce pays qui n’a pas fait son peuple et qui est émietté par lui… Il n’a pas vu qu’en ôtant Bas-de-Cuir lui-même des romans de Fenimore, — cette figure que Balzac, qui avait le sens de la critique autant que le sens de l’invention, a trop grandie en la comparant à la figure épique de Gurth dans Ivanhoe et qui n’est guères que le reflet du colossal Robinson de Daniel de Foe, — il n’a pas vu qu’il n’y avait plus dans les récits du grand américain qu’une magnifique interprétation de la nature, que l’individualisation, audacieuse et réussie, de tout un hémisphère, mais que là justement étaient le mérite, la profondeur, l’incomparable originalité d’une œuvre qui n’a d’analogue dans aucune littérature. […] Mais à travers tout ce fracas de faits, tout ce remue-ménage d’aventures, tous ces coups de pistolet ou de carabine tirés à tort ou à travers, de loin ou à bout portant, à toutes les minutes ou à toutes les places du récit, on cherche en vain une conception nette ou une combinaison puissante.

204. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

Isolant chaque détail de la masse, allant sans discernement et sans choix d’un objet quelconque à un objet quelconque, comme l’enfant, mené par son désir innocent de prendre chaque chose et de la saisir dans sa vulgarité complète, égaré par cette manie de touche-à-tout, il enfile toutes les venelles qui se présentent à sa flânerie dans ce récit sans raison d’être, sans unité de composition et sans but ! […] Nous sommes fort heureux de le dire, les Talons rouges, simples et élégants récits, très souvent aristocratiques, ne mentiront point à leur étiquette, et ils marquent un progrès incontestable dans le talent de l’auteur, qui s’affermit, s’affine et s’aiguise.

205. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre V. Observations philosophiques devant servir à la découverte du véritable Homère » pp. 268-273

Les fables furent à leur origine des récits véritables et d’un caractère sérieux, et (μῦθος, fable, a été définie par vera narratio). […] Dante ressembla sous ce rapport à l’Homère de l’Iliade, que Longin trouve toute dramatique, toute en actions, tandis que l’Odyssée est toute en récits.

206. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Faiseur par pièces et par morceaux, il coupe le fil à son récit et à ses personnages avec des dissertations abominables, dans lesquelles se débattent, comme dans un chaos, les prétentions d’un Trissotin colossal. […] Depuis l’histoire des Comprachicos jusqu’aux histoires des cyclones, des écueils, de la mer et du mécanisme des vaisseaux, tout ce qui devrait être fondu, en supposant que ce soient là des connaissances précises, dans le récit et dans le drame, est détaché en dissertations qui vont toutes seules, oubliant le roman, et pendant des temps infinis. […] Si vous preniez le récit qui est le fond du livre, à part de ces nauséabondes dissertations qui ne peuvent agir que sur des Bélises et des Philamintes : … Du grec ! […] Quand Walter Scott, qui est le Shakespeare du Roman, et quand Balzac, pour lequel je cherche un nom qui puisse dire sa place, plus haute que celle de Walter Scott, nous donnent ces récits qui sont les vraies épopées de ce siècle, ils ne procèdent point par heurts et par tableaux détachés. […] Ils ne coupent point la trame de leur récit par des dissertations pédantes, et de ce pédantisme insolemment ennuyeux qui fait de Victor Hugo je ne sais quel Vadius colossal… Ils sont déductifs, logiques et vrais.

207. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

C’est que le théâtre c’est le fait palpable, et que le roman n’est qu’un récit. […] le récit qui est des plus curieux. […] Quant au récit qu’elles encadrent, il est des plus imprévus. […] (Nous l’appellerons Charles pour la facilité du récit.) […] Récits de campagne. — 1890.

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