J’ai parlé précédemment des deux premiers, et dans des articles insérés au Moniteur 58 j’ai cherché à marquer de quel secours pouvaient être les faits purement extérieurs, recueillis par Dangeau, et de quelle utilité à l’éclaircissement de certaines questions toutes morales et politiques, et par exemple à celle de la révocation de l’Édit de Nantes. […] Dangeau ne trouve pas à tout cela le plus petit mot pour rire, et s’il ne prend pas feu comme Saint-Simon, que ces sortes de questions ont le privilège de faire déborder, il s’applique à bien exposer les points en litige, comme un rapporteur sérieux et convaincu. […] Les questions de cérémonial et de salut militaire ne sauraient être oubliées : « En arrivant ici (au camp de Lamsheim), Monseigneur vit toute l’infanterie en bataille sous une ligne à quatre de hauteur… M. de La Feuillée, lieutenant général, qui était demeuré ici pour commander l’infanterie, salua Monseigneur de l’épée, à cheval. » Monseigneur, toutefois, dans cette campagne, s’il ne fait rien d’extraordinaire, ne manque à rien d’essentiel : il remplit les devoirs de son métier, il fait manœuvrer son monde. […] On fait partir Vauban incessamment, et on ne doute pas que le roi ne partît bientôt si la saison était moins retardée. » Ce Chanlay dont il est parlé, et que Dangeau, annoté par Saint-Simon, nous fait particulièrement connaître, était de ces seconds indispensables à la guerre, un officier d’état-major accompli, parfait à étudier les questions, les lieux, à dresser des instructions et des mémoires, à juger des hommes.
Ici se rencontre une question forcément matérielle, et que les esprits mêmes qui aimeraient le moins à s’occuper de ce côté de la vie ne peuvent éviter. […] De là, des questions positives qui se mêlent aux questions morales et qui intéressent la condition future de l’homme de Lettres et sa véritable indépendance. Ces questions complexes étaient peut-être contenues dans votre programme : elles resteront longtemps encore proposées ; nous aimons à espérer qu’elles se résoudront peu à peu, et dans un sens qui ne sera pas défavorable, en définitive, à l’honneur des lettres, ni à l’émancipation de l’esprit.
Sur le cérémonial de Louis XV, sur les questions de révérences, de tabourets, de pliants, de carreaux, qui reviennent à tous moments, — sur le droit que prétendent avoir les ducs d’avoir à l’église des carreaux, non pas devant le roi, mais derrière ; — sur tout cela, je passe. […] — C’est au reste une simple question que je propose : Aristote a oublié de la traiter dans son fameux chapitre « Des chapeaux ». […] Un mois ou six semaines après M. de Tessé étant prêt de se coucher, et son cuisinier étant dans sa chambre dans ce moment, il lui demanda s’il ne pourrait donc point lui faire découvrir le seigneur espagnol à qui il avait tant fait de questions. […] Mme de Vintimille, liguée avec Mme de Mailly, ne s’était jamais senti de force à faire ce coup d’État dans l’âme du roi, et un jour qu’en une circonstance critique Mme de Mailly et elle avaient essayé de lutter directement contre l’influence du cardinal, au moment même de réussir sur l’objet en question, elles virent en définitive qu’il fallait céder, et Mme de Vintimille dit fort sensément à sa sœur : « Nous pourrions peut-être l’emporter aujourd’hui sur le cardinal, mais il est absolument nécessaire au roi, et nous serions renvoyées dans trois jours. » Mme de La Tournelle tenta hardiment l’aventure : l’eût-elle emporté si le cardinal eût vécu ?
Tant qu’on ne s’est pas adressé sur un auteur un certain nombre de questions et qu’on n’y a pas répondu, ne fut-ce que pour soi seul et tout bas, on n’est pas sûr de le tenir tout entier, quand même ces questions sembleraient le plus étrangères à la nature de ses écrits : — Que pensait-il en religion ? […] Aucune des réponses à ces questions n’est indifférente pour juger l’auteur d’un livre et le livre lui-même, si ce livre n’est pas un traité de géométrie pure, si c’est surtout un ouvrage littéraire, c’est-à-dire où il entre de tout. […] On peut, en effet, répondre avec certitude à presque toutes les questions qu’on se pose sur son compte.
Quoi qu’il en soit, la part considérable que M. de Talleyrand avait prise non seulement aux actes du clergé, ou concernant le clergé, mais encore aux importantes questions de finance et aux travaux du comité de Constitution, l’esprit de décision et de vigueur dont il avait fait preuve, non moins que le tour habile et mesuré de sa parole, le désignèrent au choix de l’Assemblée pour être son organe dans le manifeste ou compte rendu de sa conduite, qu’elle jugea à propos d’adresser à la nation en février 1790. […] Qu’est-ce à dire quand il fut question peu après de consacrer les membres du nouveau clergé constitutionnel, les premiers évêques ? […] On s’est souvent demandé ce qu’aurait été Voltaire à la Révolution, et quelquefois on a tranché cette question bien à la légère. […] Elle juge, de quelques mots qu’il a laissé échapper dans sa dernière conversation avec elle, qu’il est question pour lui de mourir ; aussi a-t-elle passé la nuit dans une grande agitation et dans les larmes.
La thèse des partisans de l’unité morale soulève une question de fait dont nous devons dire un mot. […] Mais peu importe pour la question qui nous occupe. […] C’est une autre question. […] Quant aux points contestés ou flottants de la morale (droits de la femme, de l’enfant, conception de la famille, etc.), l’éducateur ne peut guère trancher ces questions à l’école.
Or, sans toucher à la question religieuse, et tout en reconnaissant que l’Église catholique est un monument grandiose de l’esprit humain, il faut bien établir ce fait, sine ira et studio : la Papauté temporelle, à Rome, c’était la négation de la nation italienne. […] En d’autres termes, si considérable qu’elle soit, la valeur relative, historique, de Dante, à laquelle les philologues s’attachent si fort, n’est plus qu’un détail, comparée à la valeur absolue ; chez lui la réponse est moins significative que la question ; les mots de la prière moins beaux que le geste des mains jointes. […] Pour la question d’évolution littéraire qui nous occupe spécialement ici, j’avoue être encore indécis, sans y voir toutefois de grosse difficulté. […] C’est une étape dont il faut reconnaître la grandeur et la nécessité, tout en constatant qu’elle est en conflit avec la mentalité actuelle de l’Europe. — En Italie, la monarchie est libérale au point de toucher à la république ; en Allemagne, elle repose sur une hiérarchie si forte qu’elle touche à l’absolutisme ; la nation s’y est constituée en partie, et forcément, contre la France, c’est-à-dire contre l’esprit de la Révolution ; c’est un anachronisme, mais l’équilibre se fera ; question de temps et de collaboration patiente.